Upload
others
View
8
Download
0
Embed Size (px)
Citation preview
UNIVERSITE DU MAINE UMR CNRS 6120 Faculté des Sciences Polymères, Colloïdes, Interfaces
THESE
Présentée en vue de l'obtention du grade de
DOCTEUR
Spécialité CHIMIE ET PHYSICO-CHIMIE DES POLYMERES
par
Soraya MEHALEBI
le 25 Janvier 2008 à 15h dans la salle Pierre Belon (B.U.)
AGREGATION ET GELIFICATION DE LA ββββ-LACTOGLOBULINE :
INFLUENCE DES INTERACTIONS ELECTROSTATIQUES
Devant le jury composé de : Monsieur D. Renard (INRA - Nantes) Rapporteur Monsieur G. Cuvelier (ENISIA - Massy) Rapporteur Monsieur A. Riaublanc (INRA - Nantes) Examinateur Monsieur F. Mariette (CEMAGREF - Rennes) Examinateur Monsieur D. Durand (PCI - Le Mans) Directeur de thèse Monsieur T. Nicolai (PCI - Le Mans) Directeur de thèse
Résumé :
La β-lactoglobuline est une protéine globulaire présente dans le sérum du lait. Quand
une solution de β-lactoglobuline est chauffée les protéines se dénaturent ce qui conduit à leur
agrégation. Si la concentration de protéines est plus grande qu'une valeur critique un gel est
formé. Le processus d'agrégation et de gélification dépend beaucoup des conditions externes
comme la concentration de sel ajouté ou le pH. Cette influence peut être expliquée par des
interactions électrostatiques. En effet la β-lactoglobuline comme les protéines en générales est
un polyélectrolyte dont la densité de charges dépend du pH. Par conséquent les interactions
électrostatiques dépendent du pH, mais également de la concentration en sel puisque celui-ci
peut les écranter.
L'objective de cette thèse est d'étudier l'influence des interactions électrostatiques sur
la structure des agrégats et des gels de β-lactoglobuline et sur leurs propriétés mécaniques.
Cette étude revêt un aspect fondamental parce que la β-lactoglobuline peut être considérée
comme une protéine globulaire modèle. Mais l'étude a aussi un but applicatif puisque la β-
lactoglobuline est le composant protéique majeur du lactosérum et est de ce fait beaucoup
utilisée dans l'industrie agro-alimentaire.
La structure des agrégats et des gels a été caractérisée par diffusion de rayonnement et
microscopie confocale. Les résultats principaux sont que la structure des agrégats est peu
influencée par les interactions électrostatiques, mais que la structure du gel en dépend très
fortement. Par exemple l'aspect visuel des gels change de transparent comme l'eau à pH 6.2 à
opaque comme le lait à pH 5.8. La diminution de la répulsion électrostatique via la diminution
du pH ou via l'augmentation de la concentration en sel rend la structure des gels plus
hétérogènes. Elle influence aussi leur module élastique. Par contre, la variation des propriétés
mécaniques des gels ne peut pas être corrélée à la variation de leur structure.
Ce travail a été réalisé au sein du laboratoire Polymères, Colloïdes et Interfaces (UMR 6120) de l’Université du Maine, dans le cadre d’une bourse de thèse BDI (Bourse Docteur Ingénieur) CNRS-région Pays de la Loire, sous la direction de Messieurs Dominique DURAND et Taco NICOLAI.
Merci à Monsieur Gérard CUVELIER, professeur à l’ENISIA-CNAM-INRA (Massy) et à
Monsieur Denis RENARD, professeur au BIA-INRA (Nantes) d’avoir examiné ce travail en tant que rapporteurs. Je tiens également à remercier Messieurs Alain RIAUBLANC, chargé de recherche à l’INRA (Nantes) et François MARIETTE, du CEMAGREF (Rennes) pour avoir aimablement accepté d’être membre du jury de thèse.
Je tiens à remercier Messieurs Dominique DURAND et Taco NICOLAI, directeur de
recherche au laboratoire PCI, pour avoir encadré ce travail de thèse. Je tiens à les remercier pour leur soutien sans faille, leur disponibilité et surtout leur patience. Avant tout merci à eux de m’avoir appris à dépasser mes limites.
Je tiens à associer à ces remerciements l’ensemble des membres du laboratoire PCI, et
plus particulièrement Madame Danielle Choplin pour les tâches administratives et Monsieur Jean-Luc Monéger, pour sa disponibilité et pour son humour ! Il y a bien sur Anita Loiseau qui a toujours été la gentille du service et enfin Gérard GUEVELOU pour ses blagues un peu limite parfois !
Enfin mes remerciements vont aux thésards du laboratoire pour les très bons moments
passés aussi bien au laboratoire qu’à l’extérieur : Souad, quelqu’un en qui j’ai toujours eu confiance et qui m’a aidé à évoluée dans le bon sens, Anthony, toujours prêt à me contredire pour me pousser dans mes retranchements, Frédéric, le beau gosse du service mais surtout un soutien sans faille, Ji, Sujin l’Indian lover mon deuxième bras droit, Aissam le dragueur du service.
Je remercie également les membres de ma famille, surtout mes parents qui ont toujours été
là et sans qui je ne serais pas arriver là. Je leur dédie bien évidemment cette thèse.
Sommaire
SOMMAIRE
Introduction
Chapitre I.Contexte bibliographique........................................................................... 1
I-La protéine à l'état natif ....................................................................................................... 1
I.1.Généralités .................................................................................................................. 1 I.2.Cas de la β-lactoglobuline. ......................................................................................... 1
II-Gélification des protéines globulaires ................................................................................ 5
III-Processus de dénaturation ................................................................................................. 8 III.1.Généralités................................................................................................................ 8 III.2.Influence de la force ionique et du pH sur la température de dénaturation. ............ 8
IV-Agrégation thermique ...................................................................................................... 10 IV.1.Cinétique d'agrégation............................................................................................ 10 IV.2.Tailles des agrégats suivant les conditions expérimentales ................................... 14
V-Structure des agrégats ....................................................................................................... 15
VI-Structure des gels.............................................................................................................. 16 VI.1.Mécanisme de gélification. .................................................................................... 16 VI.2.Structure des gels. .................................................................................................. 17
VII-Propriétés rhéologiques linéaires des gels de protéines globulaires........................... 18 Références bibliographiques………………………………………………………………….22
Chapitre II.Matériels et techniques expérimentales............................................. 24
I-Préparation des solutions de ββββ-lactoglobuline natives ..................................................... 24 I.1.Caractéristiques de la poudre de β-lactoglobuline.................................................... 24 I.2.Préparation des solutions. ......................................................................................... 25 I.3.Instabilités des solutions pour des pH proches du pI. ............................................... 25
II-Technique de diffusion dayonnement. ............................................................................. 27 II.1.Introdution................................................................................................................... 27 II.2.Principes généraux. ..................................................................................................... 27
II.2.1.Diffusion statique de la lumière............................................................................ 28 II.2.2.Diffusion dynamique ou quasi-élastique de la lumière ....................................... 32 II.2.3.Diffusion des rayons X aux petits angles: SAXS.................................................35
II.3.Appareillages expérimentaux...................................................................................... 35
II.3.1.Diffusion statique de la lumière: SLS................................................................... 35 II.3.2.Diffusion dynamique de la lumière : DLS............................................................ 36 II.3.3.Diffusion des rayons X aux petits angles: SAXS.................................................37
III-Turbidimétrie ................................................................................................................... 37 III.1.Théorie....................................................................................................................... 37 III.2.Appareillages expérimentaux. ................................................................................... 39
IV-Chromatographie d'exclusion stérique : SEC. .............................................................. 39 IV.1.Principe...................................................................................................................... 39 IV.2.Appareillage expérimental. ....................................................................................... 40
V-Microscopie à balayage laser : CSLM.............................................................................. 41 V.1.Principe de la CSLM. ................................................................................................. 42 V.2.Appareillage utilisé et préparation des solutions. ....................................................... 43
VI-La Rhéologie...................................................................................................................... 44
VI.1.Principe ..................................................................................................................... 44 VI.2.Appareillage. ............................................................................................................. 45
Référence bibliographiques................................................................................................... 46
Chapitre III.Caractérisation de l'état natif de la ββββ-lactoglobuline.................. 47
I-Agrégation réversible de la protéine native autour du pI. .............................................. 47
II-Caractérisation de la protéine native suivant le pH. ...................................................... 52 II.1.Diffusion statique de la lumière et SAXS................................................................... 52 II.2.Diffusion dynamique de la lumière............................................................................. 56
Références bibliographiques ................................................................................................. 58
Chapitre IV.Agrégation thermique de la ββββ-lactoglobuline. ............................... 59
I-Diagramme d'état sol/gel. ................................................................................................... 59
II-Taux d'agrégation. ............................................................................................................. 61
III-Structure des agrégats dilués. ......................................................................................... 67 III.1.Facteur de structure des agrégats dilués suivant le pH........................................... 67 III.2.Influence de la concentration en protéine et du pH sur la croissance des agrégats 70
IV-Structure des systèmes in-situ. ........................................................................................ 72 IV.1.Hétérogénéité des gels formés à 100g/L suivant le pH.......................................... 75 IV.2.Structure des systèmes in-situ suivant le pH sans ajout de sels ............................. 76 IV.3.Influence de la concentration en sels sur la structure des gels formés à 100g/L ... 77 IV.4.Influence de la concentration en protéine sur l'hétérogénéité des systèmes suivant le pH et la force ionique ................................................................................................. 79 IV.5.Visualisation des hétérogénéités formées en microscopie confocale pour des gels formés à 100g/L suivant la force ionique et le pH ......................................................... 80
V-Cinétiques d'agrégation et de gélification........................................................................ 82 V.1.Influence de la température. .................................................................................... 82 V.2.Influence du pH sur la cinétique de gélification et d'agrégation ............................. 83 V.3.Influence de la concentration .................................................................................. 84
Références bibliographiques. ................................................................................................ 86
Chapitre V.Propriétés rhéologiques linéaires des gels de ββββ-lactoglobuline.. 87
I-Influence de la concentration et du pH. ............................................................................ 87
II-Influence de la concentration et de la force ionique à pH 7........................................... 92
III-Relation structure-propriétés rhéologiques. .................................................................. 95
IV-Influence de la température sur Ge par l'intermédiare des rampes de températures..97
Références bibliographiques. ................................................................................................ 99
Conclusion
Introduction
Introduction La β-lactoglobuline est une protéine globulaire couramment utilisée dans l’industrie
alimentaire. Elle est à la fois utilisée pour ses propriétés texturantes, émulsifiantes et
moussantes. Sous l’effet d’un traitement thermique, comme beaucoup de protéines
globulaires, elle s’agrège et forme un gel si la concentration est suffisante. Les
caractéristiques des gels formés dépendent fortement des conditions expérimentales (pH,
force ionique, concentration, température…). Ainsi, la β-lactoglobuline forme deux types de
gels suivant le pH et la force ionique. Une diminution de pH de part et d’autre du point
isoélectrique (pH à laquelle la charge nette de la protéine est nulle, noté pI) permet une
diminution de la charge globale tandis qu’une augmentation de la force ionique permet un
écrantage des charges et donc joue sur la portée des interactions électrostatiques.
Selon les conditions expérimentales, des observations en microscopie montrent des
gels transparents formés de fibrilles d’un diamètre inférieur à 10nm et des gels opaques
formés de particules sphériques dont la taille peut atteindre le micromètre. Dans la littérature
ces deux types de gels sont nommés respectivement gels fibrillaires ou « finely stranded
gels » et gels particulaires ou « particle gels ». Les gels fibrillaires sont formés lorsque les
interactions électrostatiques sont fortes c’est-à-dire pour des pH loin du pI et à faible force
ionique alors que les gels particulaires sont formés pour des pH proches du pI ou à forte force
ionique.
Les interactions électrostatiques gouvernent donc la structure des gels. La transition entre ces
deux structures apparaît sur une étroite gamme soit de pH, soit de force ionique.
L’objectif de cette thèse est de comprendre comment les interactions locales
gouvernent la structure à grande échelle. Pour cela, deux paramètres vont être ajustés : le pH
qui rend compte de la densité de charge et la force ionique qui gouverne la portée des
interactions. Enfin, nous tenterons de corréler les structures obtenues aux propriétés
rhéologiques.
Les différentes études menées portent sur les différents points suivants:
• Caractériser les interactions électrostatiques présentes au sein de la protéine native suivant
le pH
• Déterminer la taille et la structure des agrégats dilués en fonction du pH
• Déterminer la structure des systèmes in-situ en fonction du pH et de la force ionique en
utilisant la diffusion de la lumière et la turbidimétrie.
• Etudier les propriétés rhéologiques des différents types de gels formés et les comparer à la
structure.
Chapitre I.
Contexte bibliographique
Chapitre I. Contexte bibliographique
1
I-La protéine à l’état natif I.1.Généralités
Une protéine est une macromolécule composée par une chaîne d’acides aminés liés
entre eux par des liaisons peptidiques et possédant quatre niveaux de structures différents.
L’enchainement de ces acides aminés constitue la structure primaire. Les protéines
comportent des zones ordonnées périodiquement où la chaîne polypeptidique linéaire présente
une structure tridimensionnelle régulière de type hélice α ou feuillet β.
Ces différentes régions, dont l’organisation est maintenue par des liaisons hydrogène entre
acides aminés, constituent la structure secondaire de la protéine. La structure tertiaire
correspond à une organisation tridimensionnelle des éléments de la structure secondaire, et
résulte d’interactions non-covalentes (hydrogènes, hydrophobes, Van der Waals,
électrostatiques...) avec parfois des ponts disulfures. La structure quaternaire se définit par
l’état d’oligomérisation de la protéine c’est-à-dire par l’association de plusieurs chaines. La
protéine peut ainsi se présenter sous forme de monomères, de dimères…L’état « natif » d’une
protéine correspond à la conformation prise à l’état naturel.
I.2.Cas de la β-lactoglobuline
a.Structure
Elle est la protéine majeure du lactosérum ou petit lait. Le lactosérum est
obtenu après précipitation acide des caséines du lait. Il comprend différentes protéines : la β-
lactoglobuline (50%), l’α-lactalbulmine (30%), la sérum albulmine bovine BSA (quelques %)
et des immunoglobulines (Ig) (quelques %). La β-lactoglobuline est composée de 162
aminoacides avec une masse molaire d’environ 18kg.mol-1 et un rayon hydrodynamique de 2
nm1.
Chapitre I. Contexte bibliographique
2
La figure I.I.1 donne une représentation schématique de sa conformation native.
Figure I.I.1 : Structure tridimensionnelle de la de la β-lactoglobuline2.
Elle possède deux ponts disulfures établis entre les résidus Cystéine 66 et Cystéine 160 d’une
part et entre les résidus Cystéine 106 et Cystéine 119 d’autre part. Le résidu Cystéine 121 est
porteur d’un groupe thiol libre2.
Selon les espèces animales considérées, sept variants génétiques, de structures primaires
voisines, ont été isolés3. Les variants A et B sont les plus courants (ils sont en proportion à
peu près égale chez les bovins) et ne diffèrent que par deux substitutions dans la structure
primaire : Aspartate et Valine pour le variant A au lieu de la Glycine et l’Alanine pour le
variant B4.
b.Rôles biologiques
Le rôle biologique de la β-lactoglobuline n’est pas encore bien identifié mais compte
tenu de son affinité in vitro pour certains composés comme les acides gras, le retinol, les
vitamines A et D ou encore les ions calcium on peut penser à un rôle in vivo de transporteur
de ces molécules d’autant qu’elle n’est pas dégradée au cours de la digestion et n’a donc
aucun rôle nutritionnel fondamental. Elle jouerait également un rôle d’activateur in vivo de
l’activité de la lipase prégastrique des ruminants contribuant ainsi à la digestion des lipides du
lait en phase néonatale.
Chapitre I. Contexte bibliographique
3
c.Utilisations industrielles
Pendant des décennies l’industrie laitière a considéré le lactosérum comme un déchet
et il a été utilisé principalement à destination de l’alimentation animale. Avec le
développement des procédés d’ultrafiltration performants, des travaux ont montré l’intérêt
technologique de premier plan que pouvaient représenter les protéines du lactosérum en tant
qu’ingrédients alimentaires. La β-lactoglobuline est à la fois utilisée pour ses propriétés
texturantes, émulsifiantes et moussantes5, par exemple : elle stabilise les mousses dans les
meringues, réduit la graisse dans les saussices et est utilisée dans les boissons (jus d’orange,
boissons chocolatées…)5,6. Plus récemment, des intérêts thérapeutiques ont été démontrés7,
par exemple la β-lactoglobuline pourrait être utilisée comme agent anti-cancéreux, anti-
microbiens, …
d.Ionisation de la β-lactoglobuline en fonction du pH
Les protéines sont composées d’acides aminés et sont en conséquence des composés
amphotères c’est-à-dire que suivant le pH, le nombre et la distribution des charges varient. Il
est donc important de prendre en compte la variation de la charge nette en fonction du pH
(figure I.I.2).
pH
2 4 6 8 10
Z
-15
-10
-5
0
5
10
15
20
Figure I.I.2 : Courbe de titration de la β-lactoglobuline pour les variants génétiques A (○) et B (∆) dans 0.25M de KCl à 25°C. Z est la charge nette par monomère. (Données de Basch et Timasheff, 1967)
Chapitre I. Contexte bibliographique
4
Le point isoélectrique (pI≈5.2) est le pH pour lequel la charge nette est nulle. La
densité de charge varie légèrement avec la force ionique et la concentration. Lorsque le pH
augmente, la charge nette diminue et passe de +20 à pH 2 à -10 à pH 10. Il est cependant
important de noter que la distribution des charges dans la protéine n’est pas la même de part et
d’autre du pI ce qui lui confère des propriétés différentes.
Les différences entre les variants génétiques sont liées aux différences de teneur en
groupements chargés : le variant B contient une charge de moins que le variant A à pH 6.
La présence de diverses interactions (électrostatiques, Van der Waals, hydrogènes,
hydrophobes…) permet une auto-association de la protéine. Il y a principalement un équilibre
monomère-dimère1 qui se déplace vers le monomère lorsque la température augmente ou que
la densité de charge augmente ou encore que la force ionique augmente.
Une association plus importante apparaît à des pH voisins du pI et dépend fortement de la
concentration en protéine. Ces associations conduisent à des solutions turbides pour des pH
compris entre 4 et 68. Plus récemment une étude9 dans cette zone de pH à faible force ionique
a été menée afin de comprendre ce phénomène. La variation de la turbidité a été suivie dans le
temps à température ambiante et à faible concentration (2g/L). Après une augmentation
initiale de la turbidité, elle se stabilise ensuite. La valeur atteinte, de même que la vitesse
d’augmentation sont maximales pour un pH de 4.8. Cette variation de la turbidité est liée à
l’apparition d’agrégats dont la taille augmente dans le temps et peut atteindre le micron.
En augmentant la force ionique, cette agrégation est favorisée.
Le variant A s’agrège plus rapidement que le mélange A et B alors que le variant B ne
présente aucun phénomène d’agrégation à température ambiante à pH 4.8. Cette agrégation a
été également observée sur le WPI10 (isolat des protéines du petit lait) avec un maximum à pH
5.2 au lieu de 4.8.
Chapitre I. Contexte bibliographique
5
II-Gélification des protéines globulaires
La β-lactoglobuline forme un gel lorsqu’elle est chauffée à des concentrations
suffisantes. La texture des gels dépend des conditions expérimentales. Elle forme deux types
de gels (des gels particulaires ou fibrillaires) suivant les conditions expérimentales. Cette
nomenclature a été basée sur des observations en microscopie : les gels fibrillaires sont
formés de fibrilles tandis que les gels particulaires sont formés de particules grossièrement
sphériques dont la taille peut atteindre le µm (figure I.II.3).
Il faut noter que la technique de microscopie utilisée (SEM) nécessite un traitement au
préalable de l’échantillon qui peut modifier les structures formées.
2µm
2µm
Figure I.II.3: Images en microscopie SEM pour des gels de β-lactoglobuline (variant B) à 100g/L à 90°C pendant 30 minutes pour différents pH11 : (b) pH 7, (d) pH 5 Les gels fibrillaires sont formés lorsque les répulsions électrostatiques sont fortes donc pour
des pH loin du pI et aux faibles forces ioniques tandis que les gels particulaires sont formés
dans le cas de faibles répulsions électrostatiques. Les gels fibrillaires sont transparents car ils
sont homogènes à des échelles de distances faibles par rapport à la longueur d’onde de la
lumière visible et les gels particulaires sont plus hétérogènes donc turbides avec des domaines
denses.
Le passage de gels fibrillaires vers les gels particulaires se fait progressivement et se situe
autour du pH 6 jusqu’au pH 412 avec l’existence de systèmes présentant une structure
intermédiaire.
Ce changement de structure s’accompagne d’une variation de la turbidité des gels. Des
photographies de gels de β-lactoglobuline formés à 100g/L à pH 7 suivant la force ionique et
suivant le pH sans ajout de sels ont été réalisées (figure I.II.4).
Chapitre I. Contexte bibliographique
6
CNaCl 0M 0.05M 0.1M 0.12M
pH 7
pH pH 7 pH 6.1 pH 6 pH 5.9
Sans sel
Figure I.II.4 : Photos des gels de β-lactoglobuline formés à 100g/L suivant le pH et la force ionique. CNaCl représente la concentration en NaCl.
D’après les photos, les gels deviennent turbides sans ajout de sels autour du pH 6 et pour les
systèmes à pH 7 autour de 0.1M NaCl. Renard et al13 ont mis en évidence que cette transition
transparent-turbide varie avec le pH et la force ionique. Pour les pH 6 et 5, les gels turbides
sont formés pour toutes les concentrations en NaCl testées tandis qu’à pH 9 cette transition se
situe au voisinage de 0.07M. Les gels formés à pH 2 sont transparents au moins jusqu’à
0.2M NaCl.
La même variation de structure suivant le pH a été également observée pour le WPI12.
La zone de pH où des gels particulaires sont formés sans sels est plus petite pour le WPI que
pour la β-lactoglobuline et se situe entre pH 5.4 et 4.5.
Il existe une concentration minimale nécessaire pour former un gel de β-
lactoglobuline. Cette concentration notée Cg dépend des conditions expérimentales (pH, force
ionique)13,14. La figure I.II.5 représente la variation de Cg en fonction de la concentration en
NaCl pour différents pH.
Chapitre I. Contexte bibliographique
7
CNaCl (mol/L)
0.01 0.1
Cg
(g/L
)
10
100
Figure I.II.5: Concentration critique de gélification en fonction de la concentration en NaCl pour différents pH13,15. Données de Renard et al13 pour différents pH : ♦ pH 2, ■ pH 6, ▲ pH 7, ● pH 9. Données de Baussay et al15 : ∆ pH 7 A pH fixé la réduction des répulsions électrostatiques par ajout de sels conduit à une
diminution de Cg. Plus le pH est proche du pI moins il faut de sels pour écranter les charges,
Cg diminue donc quand le pH tend vers le pI à CNaCl fixée. A pH 513 (données non
représentées sur la figure) la concentration critique de gélification est de l’ordre de 10g/L et
ne dépend pas de la force ionique : à ce pH la charge globale est quasiment nulle et l’ajout de
sels n’a pratiquement plus d’influence sur Cg.
Stading et al. en 19908 ont étudié la variation de la concentration critique de
gélification en fonction du pH mais sans ajout de sels (figure I.II.6).
Figure I.II.6 : Concentration critique de gélification en fonction du pH sans ajout de sels8.
Chapitre I. Contexte bibliographique
8
Dans ce cas, les solutions sont chauffées pendant 1 heure à 95°C. Cg est définie
comme la concentration minimale pour laquelle le module de conservation G’ est plus grand
que le bruit des mesures. Cg diminue lorsque l’on s’approche du pI. Elle est minimale (de
l’ordre de 10g/L) et constante dans la zone de pH de 4.5 à 5.512.
III-Processus de dénaturation III.1.Généralités
La dénaturation est la perte de la structure native16 de la protéine qui apparaît sous
l’effet de différents facteurs tels que la température, le pH et l’ajout de différents composés
(Urée, éthanol...)…
Dans cette étude nous allons principalement faire référence à la dénaturation thermique.
La température de dénaturation Td est mesurée en DSC (Differentiel Scanning Calorimetry).
Cette technique permet de mesurer le flux de chaleur nécessaire pour maintenir un échantillon
à la même température que la référence au cours d’un chauffage à vitesse constante.
Suivant la vitesse utilisée et les conditions expérimentales (pH, force ionique…), Td se situe
entre 60°C et 80°C. La dénaturation thermique est un processus cinétique caractérisé par une
énergie d’activation : elle est donc lente pour des températures inférieures à Td et rapide pour
des températures supérieures à Td.
Une augmentation de température permet une cassure des liaisons au sein de la protéine et
induit donc une flexibilité de la structure. Elle est suivie d’une perte partielle de cette structure
conduisant à de possibles associations entre les protéines.
III.2.Influence de la force ionique et du pH sur la dénaturation thermique
Le pH et plus généralement les interactions électrostatiques ont une grande influence
sur Td. La figure I.III.7 représente la variation de Td en fonction du pH pour la β-
lactoglobuline.
Chapitre I. Contexte bibliographique
9
Figure I.III.7 : Effet du pH sur la température de dénaturation de la β-lactoglobuline mesurée en solution sans sel par DSC à 10°C/min17.
La stabilité thermique est maximale dans la zone de pH 3 à 4 et diminue à des pH plus
acides ou plus basiques.
L’ajout de sels influence également la température de dénaturation. Dans la figure I.III.8 est
représentée la variation de Td à pH 3.5 et à pH 7 en fonction de la concentration en NaCl et en
KCl.
Figure I.III.8 : Effet de la force ionique sur la température de dénaturation de la β-lactoglobuline mesurée à 10°C/min18. Sur cette figure il y a aussi l’effet du cation ajouté Na+ ou K+: K+ (□ pH 7 et + pH 3.5) et Na+ ( x pH 7 et O pH 3.5). A une concentration fixée en sel, Td est plus grande à pH 3.5 qu’à pH 7, comme dans le cas de
la figure I.III.7. A pH 7, elle augmente par ajout de sels alors qu’elle diminue à pH 3.5.
Chapitre I. Contexte bibliographique
10
La nature du cation utilisé (K+ et Na+) n’influence pas ou très peu la température de
dénaturation thermique.
IV-Agrégation thermique
Pour la β-lactoglobuline l’agrégation est l’étape qui suit directement la dénaturation. Il
s’agit d’un processus exothermique. De nombreuses interactions (liaisons hydrogène, de Van
der Waal, hydrophobes…) sont mises en jeu pendant ce processus et influencent l’agrégation.
Le processus d’agrégation et la structure des agrégats dépendent fortement du milieu donc de
la température, du pH, de la force ionique et de la concentration en protéine.
IV.1.Cinétique d’agrégation
a. Influence de la température
Sur la figure I.IV.9 est représentée la décroissance de la fraction non agrégée de la β-
lactoglobuline pour différentes températures. Il est possible d’obtenir une courbe maitresse
par normalisation des courbes par le temps de demi-agrégation th. Le temps de demi-
agrégation représente le temps nécessaire pour que la moitié de la protéine s’agrège.
Figure I.IV.9 : (a)-Décroissance dans le temps de la fraction non agrégée de protéine (F) pendant la dénaturation thermique pour différentes températures à 18.6g/L pH7 0.1M. (b)-Courbe maîtresse obtenue par normalisation des données de (a) par les temps de demi-agrégation (th) respectifs14.
Chapitre I. Contexte bibliographique
11
La température augmente la vitesse de dénaturation et en conséquence le processus
d’agrégation des protéines. Des études ont montré qu’elle n’a qu’un effet cinétique sur
l’agrégation qui peut être décrite par un processus Arrhénnien avec une énergie d’activation
qui correspond aussi à l’énergie d’activation du processus de dénaturation (elle est de l’ordre
de 200-450kJ/mol14). L’étape limitante est donc la dénaturation.
b. Influence de la concentration
De la même façon que précédemment, la décroissance de la fraction non agrégée de la β-
lactoglobuline pour différentes concentrations a été suivie à 67°C et à pH7 0.1M NaCl
(figure I.IV.10).
Figure I.IV.10 : (a)-Décroissance dans le temps de la fraction non agrégée de protéine (F) pendant la dénaturation thermique pour différentes concentrations à 67°C pH 7 0.1M. (b)-Courbe maîtresse obtenue par normalisation des données de (a) par les temps de demi-agrégation (th) respectifs14.
Pour toutes les concentrations, F diminue et un plateau est obtenu pour les temps longs. Une
augmentation de la concentration accélère la cinétique d’agrégation. Il est possible d’obtenir
une courbe maitresse par normalisation du temps par le temps de demi-agrégation. L’ordre de
la cinétique est donc la même pour toutes les concentrations.
Chapitre I. Contexte bibliographique
12
c. Influence de la force ionique à pH 7
La fraction de protéine non agrégée a été suivie en fonction de la concentration en protéine et
pour différentes forces ioniques15 à pH 7 pour des solutions chauffées suffisamment
longtemps pour que l’agrégation soit finie (figure I.IV.11).
C (g/L)0.1 1 10 100
Fp
0.0
0.2
0.4
0.6
0.8
1.00.003M0.01M0.02M0.05M0.1M0.2M0.4M
a
C/CAC
0.1 1 10 100
F p
0.0
0.2
0.4
0.6
0.8
1.0
0.003M 0.01M0.02M0.05M 0.1M0.2M0.4M
CAC
Figure I.IV.11: (a)-Fraction de protéine non agrégée Fp en fonction de la concentration en protéine pour différentes concentrations en NaCl (de 0.003M à 0.4M) (b) Courbe maitresse : Fp en fonction de la concentration normalisée par CAC pour différentes forces ioniques.
On constate que, quelle que soit la force ionique, Fp suit la même évolution : elle décroît
lorsque la concentration en protéine augmente et se stabilise à 5% pour les fortes
concentrations. La fraction de protéine non agrégée diminue plus rapidement lorsque la force
ionique augmente.
Le processus d’agrégation nécessite par ailleurs une concentration minimale en protéine
appelée concentration critique d’association CAC qui dépend des conditions expérimentales
et notamment de la force ionique. Cette concentration CAC diminue lorsque la concentration
en sel augmente comme le montre la figure I.IV.12.
b
Chapitre I. Contexte bibliographique
13
Cs (mol/L)
0.001 0.01 0.1 1
CA
C (
g/L)
0.01
0.1
1
10
Figure I.IV.12 : Concentration critique d’association CAC en fonction de la concentration en sel
d. Influence de la force ionique à pH 2 et 2.5
Schokker et al. en 200019 ont suivi la fraction de protéine non agrégée dans le temps pour
différentes forces ioniques et concentrations à pH 2.5 et à 80°C. En augmentant la
concentration, la décroissance en protéine non agrégée est accélérée.
Durand et al20 se sont placé à pH 2 et ont également constaté une accélération du processus
d’agrégation par augmentation de la concentration en protéine. Le processus est plus lent à pH
2 et 2.5 qu’à pH 7. Ceci peut s’expliquer par une plus forte température de dénaturation Td
aux pH 2 et 2.5 (de l’ordre de 75°C (voir figure I.III.8)) qu’à pH 7 (autour de 68°C sans ajout
de sels).
e. Influence du pH à force ionique fixée
Le pH fait varier le nombre de charges présentes dans la protéine, il influence donc la
cinétique d’agrégation, la taille et la fraction d’agrégats formés.
Hoffman et al en 199921 ont suivi la fraction de protéine non agrégée en fonction du temps
pour différents pH (figure I.IV.13).
Chapitre I. Contexte bibliographique
14
Figure I.IV.13 : Fraction de protéine non agrégée en fonction du temps de chauffe à 65°C pour une concentration en β-lactoglobuline de 50g/L pour différents pH21 : ◊ 8, ● 7.6, ∆ 7.2, ♦ 6.8, ○ 6.4 et▲ 6.
La cinétique de décroissance en protéine non agrégée est ralentie par une diminution
du pH. Une augmentation de Td lorsque le pH diminue peut expliquer ce ralentissement.
IV.2-Tailles des agrégats suivant les conditions expérimentales
La force ionique et la concentration en protéine influencent également la taille et la
masse molaire moyenne en poids des agrégats formés. La figure I.IV.14 représente la
dépendance en concentration du nombre moyen d’agrégation mw pour des agrégats de β-
lactoglobuline formés à pH 7 après 24 heures à 80°C et pour différentes forces ioniques20.
C (g/L)0.1 1 10 100
mw
101
102
103
104
105
106
0.003M0.01M0.02M0.05M0.1M0.2M0.4M
Figure I.IV.14 : Dépendance en concentration du nombre d’agrégation mw d’agrégats de β-lactoglobuline formés à pH 7 chauffés à 80°C pendant 24 heures et pour différentes concentrations en sel.
Chapitre I. Contexte bibliographique
15
Aux faibles concentrations en protéine et jusqu’à 0.05M NaCl un plateau est observé et
permet de conclure à la formation de préagrégats dont le nombre d’agrégation (environ 100
monomères) varie peu avec la force ionique. Ce nombre augmente lorsque la concentration
augmente et diverge à Cg. Puisque Cg diminue avec la force ionique, mw diverge à des
concentrations plus faibles pour les fortes forces ioniques (voir figure I.II.5).
A pH 2 et 2.5, la taille des agrégats augmente lorsque la concentration en protéine augmente
et diverge à Cg mais la présence de préagrégats n’ont pu être décelés mêmes aux faibles
concentrations.
V-Structure des agrégats
Des images en microscopie électronique (Cryo-TEM) permettent une visualisation des
structures formées suivant le pH et la force ionique (figure I.V.15).
pH 2 0.013M pH 2 0.1M
pH 7 0.003M pH 7 0.1M
Figure I.V.15 : Photos Cryo-TEM d’agrégats issus de la dénaturation thermique de solutions de β−lactoglobuline. (a) en présence de fortes interactions : pH 7 0.003M NaCl et pH 2 0.013M NaCl
(b) en présence de faibles interactions : pH 7 0.1M NaCl et pH 2 0.1M NaCl
A pH 7, sans ajout de sels des agrégats primaires ou pré-agrégats sont formés aux
faibles concentrations. Ces agrégats sont constitués de 100 monomères avec un rayon
hydrodynamique de 15 nm et une longueur de 50nm. Lorsque la concentration augmente ou
par ajout de sels, ces agrégats primaires s’associent en aggrégats fractals.
(a) (b)
Chapitre I. Contexte bibliographique
16
Les grands agrégats dilués obtenus ont une structure auto-similaire caractérisée par une
dimension fractale de 1.7 sans ajout de sels et de 2 en présence de sels avec une augmentation
de la densité locale lorsque la force ionique augmente22.
A pH 2 sans ajout de sels, les agrégats sont généralement longs et rigides. Il s’agit de
fibrilles dont la densité de branchement et la flexibilité augmentent lorsque la force ionique
augmente23.
VI-Structure des gels
VI.1-Mécanisme de gélification
a. Mécanisme de gélification à pH 7
Des études menées en diffusion de la lumière couplées à de la chromatographie
d’exclusion stérique (SEC) pour différentes forces ioniques et températures24 ont démontré un
mécanisme d’agrégation thermique en deux étapes (figure I.VI.16).
Figure I.VI.16 : Modèle d’agrégation24 en 2 étapes avec formation d’agrégats primaires (préagrégats) qui formant des agrégats fractals de plus grande taille en s’associant. Formation du gel pour C>Cg . Première étape : à température ambiante il y a un équilibre monomère-dimère qui se déplace
vers la forme monomère lorsque la température augmente. Il y ensuite dénaturation des
monomères qui s’associent de façon irréversible pour former des préagrégats.
Deuxième étape : ces agrégats primaires s’associent ensuite pour former des agrégats fractals.
Si la concentration en protéine est suffisante, il y a gélification.
fractal cluster of primary aggregates
monomer monomer primary
aggregate dimer
* native native denatured
50 nm
T ����
gel
C>Cg Cprotéine
Csel
Chapitre I. Contexte bibliographique
17
b. Mécanisme de gélification à pH 2 et 2.5
Aux pH 2 et 2.5 et aux faibles forces ioniques, des chaines rigides sont formés par
nucléation et croissance. Lorsque la force ionique augmente les agrégats deviennent plus
flexibles et la densité de branchement augmente. En augmentant la force ionique, ces agrégats
s’associent et permettent la formation d’un gel si la concentration est suffisante.
VI.2-Structure des gels
La structure des gels est traditionnellement décrite en termes de gels fibrillaires ou
particulaires comme nous en avons déjà discuté. Cette distinction a été faite en microscopie
électronique.
La structure locale des gels fibrillaires est voisine de celle des agrégats qui permettent
l’obtention du gel. Elle a été étudiée en utilisant des techniques de rayonnements (neutrons et
SAXS)25,26. Ces dernières ont montré à pH 7 l’existence d’un pic d’interaction dans le cas des
gels transparents et la longueur de corrélation est inférieure à quelques dizaines de
nanomètres. Après ajout de sels, le pic d’interaction disparait dû à l’écrantage des charges. La
structure à des distances plus faibles que la longueur de corrélation est la même que celle des
agrégats.
A pH 2, un pic d’interaction est également visible aux faibles forces ioniques et disparaît par
ajout de sels tout comme à pH 7.
Chapitre I. Contexte bibliographique
18
VII-Propriétés rhéologiques linéaires des gels de protéines globulaires
L’évolution des modules de conservation G’ et de perte G’’ obtenus par cisaillement
dans le temps pour des gels de β-lactoglobuline et de WPI a été déterminé par de nombreux
auteurs26-32. Après une forte augmentation des modules lorsqu’un gel est formé, un
ralentissement progressif de la croissance est observé (exemple en figure I.VII.17) mais G’
continue d’augmenter de façon logarithmique avec le temps.
Pour les concentrations au dessus de Cg, lorsque la solution est chauffée le système est formé
dans un premier temps d’agrégats et de protéines non agrégées. Puis ces agrégats croissent et
finissent par percoler formant ainsi un gel. Le temps de gel tg est défini par le croisement entre
le module de conservation G’ et de perte G’’. Au delà le système est constitué d’une fraction
sol et d’une fraction gel. La fraction sol contient à la fois des agrégats et des protéines non
agrégées. Avec le temps, la fraction sol diminue au profit de la fraction gel. G’ continue alors
de croître par une augmentation de la densité de réticulation.
Aux temps plus longs, la fraction sol se stabilise à une valeur constante d’autant plus faible
que la concentration est élevée. Aux concentrations très supérieures à Cg, la fraction sol
devient négligeable. Pour ces temps longs, le module continue d’augmenter alors que
l’augmentation de la fraction gel est négligeable car il y a probablement un renforcement des
liens au sein du gel.
Pouzot et al27 ont étudié la variation des modules dans le temps pour différentes
températures et concentrations en β-lactoglobuline à 0.1Hz (figure I.VII.17).
Figure I.VII.17 : (a) Evolution de G’ (symboles pleins) et de G’’ (symboles ouverts) à 0.1Hz dans le temps pour une concentration de 50g/L à 0.1M NaCl pour différentes températures.
Chapitre I. Contexte bibliographique
19
C (g/L)10 100
G' 0
(P
a)
100
101
102
103
104
(b) Courbes maitresses des modules de conservation (symboles fermés) et des modules de perte (symboles ouverts) pour une température de référence de 70°C obtenues par superposition des données de la figure (a). Trois concentrations ont été choisies : 76, 50 et 25g/L.
L’augmentation de la température accélère le processus de gélification mais le
processus est le même. Ceci est vrai pour les différentes concentrations en protéines.
La concentration joue sur la cinétique d’agrégation et donc de gélification et sur la
force des gels formés.
Ces auteurs 22 ont aussi étudié l’influence de la concentration sur l’évolution du module de
conservation mesuré à 80°C et 0.1Hz pour des solutions de β-lactoglobuline à 0.1M de NaCl
à pH 7 (figure I.VII.18). La dépendance en concentration des modules élastiques G’0 obtenus
aux temps longs a été donnée en figure I.VII.18.
t(s)
102 103 104 105
G'(P
a)
10-1
100
101
102
103
104
Figure I.VII.18 : (a) Evolution du module de conservation G’ dans le temps pour une température de 80°C à 0.1Hz pour différentes concentrations en β-lactoglobuline à 0.1M NaCl. (b) Dépendance en concentration du module élastique obtenu à temps longs G’0.
Pour expliquer la dépendance en concentration de G’0, les auteurs ont utilisé le modèle
du gel fractal33 qui décrit le système comme un remplissage compacte de blobs fractals
interconnectés monodisperses avec une énergie élastique dominée par leur énergie de flexion
(« bending »). Suivant ce modèle, le module suit une loi de puissance avec la concentration :
αα C'G 0 . L’exposant α égal à 4.5 dépend de la structure du gel qui peut être caractérisée en
diffusion de la lumière (figure I.VII.18 b).
73g/L 58g/L
45g/L 31g/L
27g/L
17g/L
a b
Chapitre I. Contexte bibliographique
20
Ikeda et al31 ont également suivi la dépendance en concentration du module G’0 pour des gels
de WPI (composé en majorité de β-lactoglobuline) à temps longs à 90°C sur une faible
gamme de concentration en protéine pour trois concentrations en NaCl. Le module élastique
suit une loi de puissance avec la concentration en protéine : à 25, 100 et 500mM NaCl, les
exposants de cette loi de puissance sont 5.4, 2.7 et 3.4 respectivement. Les valeurs absolues
mesurées à 100mM sont proches de celles de la figure I.VII.18. A une concentration donnée
en protéine, un maximum de G’0 est visible autour de 100mM NaCl (figure I.VII.19).
Figure I.VII.19 : Evolution du module élastique G’0 à 1Hz pour des gels de WPI à 100 g/L chauffés à 90°C en fonction de la concentration en NaCl31.
D’autres auteurs ont observés également ce maximum qui se situe autour de 100mM
de NaCl28 à pH 7 pour le WPI. Pour la β-lactoglobuline seule34 il situé à 200mM à pH 8.
Verheul et al28 ont étudié l’effet de la force ionique sur G’0 pour des forces ioniques plus
importantes (0.1 à 3M). Le module suit une loi de puissance avec la concentration avec un
exposant indépendant de la force ionique et proche de 4.5. A une concentration fixée en
protéine, G’ diminue avec une augmentation de la force ionique.
Renard et al26 ont également suivi l’évolution du module élastique avec la concentration dans
le cas de la β-lactoglobuline à 0.1M de NaCl. L’exposant obtenu est plus fort (proche de 6)
car les modules ont été mesurés pour un temps de chauffe assez court (1 heure) à 80°C. Or
puisque la cinétique est ralentie lorsque la concentration diminue, les modules mesurés pour
les plus faibles concentrations ne sont pas représentatifs de l’état final.
G’0 (Pa)
Chapitre I. Contexte bibliographique
21
Peu d’études ont été faites dans le cas de l’influence du pH sur la dépendance en
concentration du module élastique.
Stading et al 8 ont étudié les propriétés viscoélastiques des gels de β-lactoglobuline formés en
fonction du pH pour une seule concentration (100g/L) d’où la difficulté de donner une
interprétation aux résultats obtenus. Il faut tenir compte de l’écart existant entre la
concentration choisie et Cg dans les mêmes conditions car Cg dépend du pH : par exemple à
pH 7, les G’ obtenus sont très faibles, puisque Cg est proche de 100g/L à ce pH.
Kavanagh et al32 ont déterminé la dépendance en concentration de G’0 à différents pH (2, 2.5,
3 et 7) sans ajout de sels dans le cas des gels de β-lactoglobuline. Aux fortes concentrations
G’0 diminue lorsque le pH diminue de 3 à 2 avec un minimum à pH 7. Puisque Cg est
relativement grande, aucune loi de puissance n’est observée pour les différents pH.
Verheul et al28 ont étudié l’influence du pH sur la cinétique de gélification du WPI à
45g/L, à 68°C et à 0.5M NaCl. Lorsque le pH passe de 6 à 7.5 la cinétique est accélérée et le
module G’ obtenu au bout de 20 heures est supérieur pour le pH le plus élevé. Ces propriétés
rhéologiques sont couplées à l’évolution de la fraction agrégée au cours du temps. Un module
plus important pour les plus forts pH s’explique par la présence d’une fraction agrégée plus
importante au point de gel que pour les plus faibles pH.
Chapitre I. Contexte bibliographique
22
Références bibliographiques :
(1) Aymard, P.; Durand, D.; Nicolai, T. International Journal of Biological Macromolecules 1996, 19, 213-221.
(2) Papiz, M. Z.; Sawyer, L.; Eliopoulos, E. E.; North, A. C. T.; Findlay, J. B. C.; Sivapradadarao, R.; Jones, T. A.; Newcomer, M. E.; Kraulis, P. J. Nature 1986, 324, 383-385.
(3) McKenzie, H. A. In Milk proteins : chemistry and molecular biology; Academic Press : New York and London, 1971; Vol. II.
(4) Kinsella, J. E.; Whitehead, D. M.; Academic Press: San Diego, 1989; pp 343-437. (5) Mehra, R.; The Dairy Products Research Centre Teagasc publication: Moorepark,
2001; pp 1-12. (6) De Wit, J. N. In The use of whey protein products. (7) Chatterton, D. E. W.; Smithers, G.; Roupas, P.; Brodkorb, A. International Dairy
Journal 2006, 16, 1229-1240. (8) Stading, M.; Hermannsson, A. Food Hydrocolloids 1990, 4, 121-135. (9) Majhi, P. R.; Ganta, R. R.; Vanam, R. P.; Seyrek, E.; Giger, K.; Dubin, P. L.
Langmuir 2006, 22, 9150-9159. (10) Ju, Y. Z.; Kilara, A. J. Agric. Food Chem. 1998, 46, 1830-1835. (11) Boye, J. I.; Ma, C.-Y.; Ismail, A.; Harwalker, V. R.; Kalab, M. J. Agric. Food Chem.
1997, 45, 1608. (12) Langton, M.; Hermannsson, A. Food Hydrocolloids 1991, 5, 523-539. (13) Renard, D.; Lefebvre, J. International Journal of Biological Macromolecules 1992,
14, 287-291. (14) Le Bon, C.; Nicolai, T.; Durand, D. International Journal of Food Science and
Technology 1999, 34, 451-461. (15) Baussay, K.; Le Bon, C.; Nicolai, T.; Durand, D.; Busnel, J. International Journal of
biological Macromolecules 2004, 34, 21-28. (16) Lefebvre, J. Denaturation of globular proteins in relation to their functional
properties, 1996. (17) Hegg, P.-O. Acta Agriculturae Scandinavica 30 1980. (18) Relkin, P. Critical Reviews in Food science and Nutrition 1996, 36, 565-601. (19) Schokker, E. P.; Singh, H.; Pinder, D. N.; Creamer, L. K. International Dairy
Journal 2000, 10, 233-240. (20) Durand, D.; Nicolai, T. In Handbook of food science, technology and engineering,
2006; Vol. 2. (21) Hoffmann, M. A. M.; Van Mil, P. J. J. M. J. Agric. Food Chem. 1999, 47, 1898-1905. (22) Pouzot, M.; Nicolai, T.; Durand, D.; Benyahia, L. Macromolecules 2004, 37, 614-
620. (23) Aymard, P.; Nicolai, T.; Durand, D. Macromolecules 1999, 35, 2542-2552. (24) Aymard, P.; Durand, D.; Nicolai, T. International Journal of Polymer Analysis &
Characterization 1996, 2, 115-119. (25) Pouzot, M.; Nicolai, T.; Visschers, R. W.; Weijers, M. Food Hydrocolloids 2005, 19,
231-238. (26) Renard, D.; Axelos, M. A. V.; Lefebvre, J. In Food macromolecules and colloids;
Dickinson, E.; Lorient, D., Eds.; The Royal society of chemistry.: Cambridge, 1995; pp 390-399.
(27) Pouzot, M.; Nicolai, T.; Benyahia, L. J. Rheology 2004, 48, 1123-1134.
Chapitre I. Contexte bibliographique
23
(28) Verheul, M.; Roefs, S. P. F. M. Journal of Agricultural and Food Chemistry 1998, 46, 4909-4916.
(29) Verheul, M.; Roefs, S. P. F. M.; Mellema, J.; De Kruif, K. G. Langmuir 1998, 14, 2263-2268.
(30) Ikeda, S. Food Hydrocolloids 2003, 17, 399-406. (31) Ikeda, S.; Foegeding, E. A.; Hagiwara, T. Langmuir 1999, 15, 8584-8589. (32) Kavanagh, G. M.; Clark, A. H.; Ross-Murphy, S. B. Langmuir 2000, 16, 9584-9594. (33) Shih, W.; Shih, W. Y.; Kim, S.; Liu, J.; Aksay, I. A. Physical Review A 1990, 42,
4772-4779. (34) Mulvihill, D. M.; Kinsella, J. E. Journal of Food Science 1988, 53, 231-236.
Chapitre II.
Matériels et techniques expérimentales
Chapitre II. Matériels et techniques expérimentales
24
I-Préparation des solutions de ββββ-lactoglobuline natives I.1. Caractéristiques de la poudre de β-lactoglobuline
La β−lactoglobuline utilisée a été fournie sous forme de poudre fabriquée
industriellement par Lactalis (lots 958 et 983). Des analyses réalisées sur le lot 958 en HPLC
ont montré que la poudre contient 97.5% de protéine (tableau II.I.1) avec présence des
variants A et B en proportions à peu près identiques (figure II.I.1).
Figure II.I.1 : Chromatogramme de la poudre de β-lactoglobuline lot 958 LACTALIS. Présence des variants A et B dans les même proportions.
Tableau II.I.1 : Composition biochimique de la poudre de β-lactoglobuline lot 958 LACTALIS. La β−lactoglobuline représente 97.5% de la masse totale en protéines
Les deux lots utilisés ont la même composition biochimique puisque le lot 983
provient du lot 958. La seule différence entre les deux lots est que, le lot 983 a été lyophilisé
à un pH de 7 et le lot 958 à un pH de 3.5. Nous ne ferons donc pas par la suite de distinction
entre les deux lots.
Composition Quantité (% m/m poudre)
Humidité 3.93
β-lactoglobuline 90
α-lactalbumine 1.6 Matières minérales 1.0
Lactose 0.06
Chapitre II. Matériels et techniques expérimentales
25
I.2. Préparation des solutions
La poudre est d’abord mise en solution sous agitation modérée dans de l’eau Millipore
avec 200ppm d’azoture de sodium (antibactérien). On obtient une solution à pH 3.5 pour le lot
958 et à pH 7 pour le lot 983.
Les solutions à pH 3.5 sont portées à pH 7 par ajout rapide de soude à 0.1M sous agitation
forte. Pour enlever les sels présents dans la poudre, les solutions obtenues à partir des deux
lots sont dialysées contre du solvant : eau millipore pH 7 + 200 ppm azoture de sodium dans
des sacs de dialyse (Spectra Por 3500 Da) au minimum pendant 8h.
A l’issue de cette dialyse la solution est ensuite filtrée sur un filtre Anotop de 0.45 µm ou 0.2
µm. Les solutions, notamment celles à fortes concentrations ne se conservent pas longtemps
(environ 1 semaine pour une concentration de 150g/L à pH 7), elles sont donc lyophilisées
pour obtenir une poudre.
Il est important que le dernier bain de dialyse ne contienne pas d’azidure de sodium pour que
la poudre après lyophilisation n’en contienne pas.
La concentration en protéine de la solution : C (g/L) est ensuite déterminée par la mesure de
l’absorbance (A) à 278 nm à l’aide d’un spectrophotomètre UV (Cary 50 Bio de Varian,
France) avec un coefficient d’extinction1, (ε) de 0.96 g-1.L.cm-1 : ClA ⋅⋅ε= (l : taille de la
cuve utilisée, en générale 1 cm).
Le pH de la solution est ajusté suivant le pH de travail en ajoutant des très faibles quantités de
solutions de NaOH ou d’HCl.
I.3. Instabilités des solutions pour des pH proches du pI
A température ambiante, la solution devient turbide comme du ‘lait’ instantanément
dans une zone de pH compris entre 4.5 et 5.6. Si la solution est laissée au repos, un dépôt
blanc se dépose au fond du tube et ce d’autant plus vite que la concentration est grande et que
le pH est proche du pI (5.2).
Le précipité formé dans cette zone de pH (4.5 à 5.6) se redisperse totalement quand on
remonte le pH à 7 ou à des pH inférieurs à 4.5.
De nombreux auteurs ont également observé ce phénomène (par exemple Stading et al2).
Chapitre II. Matériels et techniques expérimentales
26
Pour retirer ce précipité une série de centrifugations a été faite. Nous avons constaté qu’il était
nécessaire de centrifuger au minimum 1 heure 30 minutes à 50 000 g pour enlever le précipité
et pour obtenir des solutions de protéine native correctes pour effectuer des mesures en
diffusion de la lumière (nous verrons cela plus en détail par la suite). La fraction de protéine
perdue par centrifugation varie suivant les conditions expérimentales (pH, concentration,
température) et peut atteindre 30% à 100g/L et à pH 5.2.
Après centrifugation, nous avons constaté que les solutions continuent d’évoluer. Cette
évolution est plus rapide lorsque la concentration augmente et pour des pH plus proches du pI.
Dans la figure II.I.2, un exemple de cette évolution a été donné : la variation de la turbidité à
685 nm en fonction du temps a été tracée pour une solution à pH 5.2 et une concentration de
40g/L à 20°C.
t(s)
102 103 104 105
Tur
bid
ité (
cm-1
)
10-2
10-1
100
Figure II.I.2 : Evolution de la turbidité mesurée à 685 nm en fonction du temps pour une solution à 40g/L à pH
5.2
L’augmentation de la turbidité dans le temps est très lente, mais pour des temps longs (au bout
d’une semaine) une deuxième précipitation est visible.
Chapitre II. Matériels et techniques expérimentales
27
II-Techniques de diffusion du rayonnement
II.1. Introduction
Les techniques de diffusion de rayonnement utilisées permettent de caractériser la
structure sur une large gamme d’échelle d’observation (du nm au µm).
Il est possible d’avoir des informations sur la dynamique des particules en analysant les
fluctuations d’intensité dans le temps en termes de fonction d’autocorrélation.
Les techniques de diffusion du rayonnement utilisées sont des méthodes d’analyse non
destructives et particulièrement adaptées pour l’étude des solutions de protéines et de leur
processus d’agrégation. Elles permettent d’accéder à des informations quantitatives sur les
systèmes telles que la masse molaire, la taille, la structure, la mobilité, la dynamique interne
des agrégats…
II.2. Principes généraux
Une onde transversale plane monochromatique sonde un volume diffusant V dans un milieu
isotrope non absorbant et contenant des unités de diffusion (figure II.II.3).
ρks
Volume diffusant V
d3r
Détecteur
y
O x
ρr
Source
θθθθ
z
ρk i
ρ ρ ρr r R'− =
ρr '
ρq
Figure II.II.3 : Schéma de la technique de diffusion du rayonnement
La radiation diffusée est détectée à une distance R. L’angle d’observation θ est l’angle
entre le vecteur d’onde du rayonnement incident ρk i et le vecteur d’onde de la lumière
diffuséeρk s. Pour la diffusion élastique ou quasi-élastique, l’amplitude de ces deux vecteurs
Chapitre II. Matériels et techniques expérimentales
28
est pratiquement la même et vaut ki=ks=2πn/λ0 où n est l’indice de réfraction du milieu et λ0 la
longueur d’onde du rayonnement incident.
On définit le vecteur de diffusion comme :
ρ ρ ρq k ki s= − avec q
n=
42
0
πλ
θsin( / ) (II.1)
q-1 représente l’échelle spatiale sondée par la technique.
II.2.1.Diffusion Statique de la lumière
En diffusion statique de la lumière, on détermine l’intensité moyennée dans le temps.
L’intensité moyennée diffusée (Im) par la solution est corrigée par l’intensité diffusée par le
solvant (Isol) et normalisée par l’intensité diffusée par une référence (Iréf) (le toluène dans
notre étude). On obtient ainsi une intensité relative diffusée notée Ir telle que :
réf
solmr I
III
−= (II.2)
Pour une solution, Ir est liée à la compressibilité osmotique
∂π∂C
et au facteur de structure
S(q) de la solution par la relation suivante :
)q(SC
RTCKI1
r ⋅
∂π∂⋅⋅⋅=
− (II.3)
Avec réf
2réf
2
a4
22
R
1
n
n
c
n
N
n4K ⋅
⋅
∂∂⋅
λπ= (II.4)
où -K : constante d’appareil correspond au pouvoir de diffusion ou contraste des particules
-Na : nombre d’Avogadro
-C est la concentration en particules
-S(q) est le facteur de structure des particules
-n est l’indice de réfraction du milieu, proche de celui du solvant pour une solution diluée
-nréf est l’indice de réfraction de la référence
-C
n
∂∂
est l’incrément d’indice de réfraction
-Rréf est le rapport de Rayleigh de la référence (il est égal à 2.78.10-5 cm-1 à λ=532nm)
Chapitre II. Matériels et techniques expérimentales
29
-
∂π∂C
la compressibilité osmotique
a. Cas des systèmes dilués (C →0)
Pour les systèmes dilués (C →0), la compressibilité osmotique C∂π∂
peut être décrite sous la
forme d’un développement du viriel :
( )Κ+⋅⋅+⋅⋅=∂
π∂CMA21
M
1RT
C w2w
(II.5)
où Mw est la masse molaire moyenne en poids et A2 le second coefficient du viriel déterminé
par les interactions binaires entre les molécules.
avec ( )
( )∑∑=
i i
i iiw MC
MCMM . (II.6)
Pour des interactions attractives A2 est négatif, A2 est positif pour des interactions répulsives
et dans le cas d’un solvant θ il est proche de zéro.
Lorsque la concentration tend vers zéro, les interactions entre particules sont négligeables et
on obtient alors :
( )qSMCKI wr ⋅⋅⋅= (II.7)
Généralement le calcul de S(q) n’est pas simple mais des simplifications existent dans certains
cas. Dans le cadre de notre étude, il est possible de schématiser la structure des agrégats de
protéine (figure II.II.4).
Rc
L p
Rg
Figure II.II.4 : Structure schématisée d’un agrégat. Les différentes distances caractéristiques sont indiquées : Lp (longueur de persistance), Rg (rayon de giration) et Rc (épaisseur).
Chapitre II. Matériels et techniques expérimentales
30
Trois longueurs caractéristiques peuvent être mesurées suivant l’échelle sondée :
-Lp , longueur de persistance qui représente la longueur minimale pour que le système soit
assimilable à un bâton
-Rg le rayon de giration : il s’agit du rayon qu’aurait une sphère de même moment d’inertie
- Rc l’épaisseur
Figure II.II 5 : Evolution de l’échelle spatiale sondée en fonction du vecteur d’onde q.
Suivant le rapport entre l’échelle sondée donc q-1 et la taille des particules le facteur de
structure a différentes expressions :
• q.Rgz << 1 : ce qui correspond à regarder la structure de l’agrégat dans son ensemble
On obtient par des développements limités l’expression de S(q) :
12gz
22gz
2
3
Rq1...
3
Rq1)q(S
−
+=−≈ (II.8)
On peut ainsi déterminer le rayon de giration moyen en z, Rgz des particules :
∑∑=
i ii
i ii2gi2
gz )M(CM
)M(CMRR (II.9)
Avec i l’espèce considérée, Mi la masse molaire, Ci la concentration, Rgi le rayon de giration.
• q.Rgz >> 1 et q.Lp << 1 : c’est à dire pour des échelles sondées correspondant à la structure
interne de l’agrégat
q-1
q, θ1/Rg 1/ro
Chapitre II. Matériels et techniques expérimentales
31
Les processus d’agrégation en solution conduisent le plus souvent à la formation d’objets
ayant à la fois des structures et des distributions autosimilaires (c’est le cas dans notre étude).
On parle alors d’objet fractal, caractérisé par une dimension fractale Df. La masse molaire
moyenne en poids (Mw) est alors reliée à la taille par la relation :
( ) fDgzw RM ∝ (II.10)
Le facteur de structure de tels agrégats suit une loi de puissance de la forme :
fDqqS −∝)( (II.11)
avec 1 ≤ Df < 3
Avec - pour un bâton rigide, Df = 1
- pour une pelote gonflée, Df = 5/3 (en bon solvant)
- pour une pelote gaussienne, Df = 2 (en masse ou en solvant θ)
Pour des objets avec des structures homogènes Df vaut 3 et le facteur de structure est donné
par la loi de Porod :
4)( −∝ qqS (II.12)
L’intensité mesurée est dans ce cas proportionnelle à la surface totale des interfaces.
• q.Lp >> 1 et q.Rgz << 1 : on a un bâton donc Df vaut 1.
• q.Rc<1 : le diamètre du bâton est mesuré.
Pour résumer, nous avons tracé la variation de Ir/KC (avec Ir/KC=MwS(q)) en fonction du
vecteur d’onde (figure II.II.6).
Chapitre II. Matériels et techniques expérimentales
32
q(nm-1)
0.0001 0.001 0.01 0.1 1
Rθ/
KC
(g
/mo
l)
103
104
105
106
107
108
109
1010
1/Rg
Mw
1/Lp
df
1/Rc
I r/K
C (
g/m
ol)
Figure II.II.6 : Dépendance en q de l’intensité diffusée indiquant les différents paramètres caractéristiques distingués dans le texte.
b. Cas des systèmes concentrés
En utilisant les mêmes équations, on détermine de manière analogue à la situation diluée, une
masse molaire dite « apparente » (Ma) et un rayon dit « apparent » (Ra) qui prennent en
compte la présence des interactions répulsives et attractives entre les particules du système.
( )qSMCKI ar ⋅⋅⋅= (II.13)
Avec
12a
2
3
Rq1)q(S
−
⋅+= (II.14)
Ra est une mesure de la longueur de corrélation des fluctuations de concentration du
système. Cette longueur de corrélation correspond à l’échelle spatiale au-delà de laquelle le
système est homogène.
II.2.2.Diffusion Dynamique ou quasi-élastique de la lumière
En diffusion dynamique de la lumière (DLS) on s'intéresse aux fluctuations d’intensité.
Chapitre II. Matériels et techniques expérimentales
33
Expérimentalement, on détermine la fonction d'auto-corrélation de l'intensité diffusée mesurée
à un angle donné, G2(t), qui correspond au produit de l'intensité à un instant t par l'intensité à
un instant t+∆t moyennée sur une longue période :
)t(I).0(I)t(G2 = (II.15)
Après renormalisation, on définit :
)t(I
)t(G)t(g 2
2 = (II.16)
Lorsque la distribution des fluctuations de l’intensité est gaussienne autour de sa valeur
moyenne la fonction d’autocorrélation de l’intensité, g2(t), est liée à la fonction
d’autocorrélation du champ électrique, g1(t), par la relation de Siegert :
[ ]212 )t(g.a1)t(g += (II.17)
où a est une constante comprise entre 0 et 1, selon les caractéristiques de l’appareillage utilisé.
Plusieurs types de fluctuations peuvent induire une variation du champ électrique :
-les fluctuations de densité, généralement trop rapides pour être détectées directement par
un corrélateur de photons
-les fluctuations de concentration, généralement découplées des fluctuations de densité
La fonction g1(t) est donc essentiellement une mesure de la relaxation des fluctuations de
concentration. Les processus de relaxation sont nombreux : diffusion, rotation ou mouvements
internes des agrégats. C’est la différence de pression osmotique qui gouverne la relaxation des
fluctuations de concentration par diffusion à laquelle s’oppose la friction entre les particules et
le solvant. Le coefficient de diffusion mutuelle dépend de la compressibilité osmotique et du
coefficient de friction.
La relaxation par diffusion des particules, g1(t) prend une forme très simple pour
des solutions diluées monodisperses :
τ−= t
exp)t(g1 avec : 2qD1 ⋅=τ
(II.18)
où D est le coefficient de diffusion,τ représente le temps de relaxation c’est-à-dire le temps
pour que les particules diffusent sur une distance proche de q-1 (échelle spatiale sondée).
Chapitre II. Matériels et techniques expérimentales
34
En milieu très dilué, la particule est assimilée à une sphère dont le coefficient de diffusion
s’écrit de cette façon :
hs
B0 R6
TkD
⋅η⋅π= (relation de Stokes-Einstein) (II.19)
avec ηs la viscosité du solvant, T la température, kB la constante de Boltzmann, Rh est le rayon
hydrodynamique de la particule.
La diffusion dynamique de la lumière permet d’accéder au rayon hydrodynamique
des particules au travers de cette dernière équation. Dans le cas où les particules sont
polydisperses ou s’il existe plusieurs populations de particules, les fonctions d’autocorrélation
expérimentales peuvent être décrites par une distribution de temps de relaxation :
∫ ττ
−⋅τ= d)t
exp()(A)t(g1 (II.20)
Pour des solutions diluées, la distribution des temps de relaxation correspond à la distribution
des rayons hydrodynamiques et la contribution de chaque particule )(A τ est proportionnelle à
l’intensité diffusée c’est-à-dire que pour chaque particule A(τ)∝C.M.
Le coefficient de diffusion moyen s’écrit alors :
τ=
τ=
²q
1
²q
1D (II.21)
et on définit un rayon hydrodynamique moyenné en z :
∑
∑−
=i ii
i ii
1
hihz )M(CM
)M(CMR
1
R (II.22)
Pour des molécules homogènes, rigides et sphériques, seul le mouvement du centre de masse
est observé puisque les mouvements internes et la rotation ne contribuent pas à la relaxation :
dans ce cas quelle que soit l’échelle spatiale sondée (sur toute la gamme de q-1) on mesure D.
Dans le cas de particules flexibles ou asymétriques, la relaxation est déterminée par les
coefficients de diffusion de translation et de rotation, et par la dynamique interne de toute la
particule. Pour qRg>>1 et dans le cas des particules flexibles, 3q−∝τ .
Chapitre II. Matériels et techniques expérimentales
35
II.2.3. Diffusion des rayons X aux petits angles : SAXS
Les rayons X sont des radiations électromagnétiques de haute énergie. Sous un champ
de rayons X tous les électrons d’un atome vont osciller et émettent des rayons X en retour.
La définition du contraste entre les particules est donc différente entre la diffusion statique de
la lumière et les SAXS. Dans le cas de la SLS, K est déterminée par la variation d’indice de
réfraction alors qu’en SAXS cette constante dépend de la densité d’électrons.
Les mesures en SAXS sont comparables aux mesures en SLS dans leur principe. Mais en
SAXS les valeurs du vecteur d’onde sont plus grande ce qui permet donc d’accéder à des
échelles plus petites (0.1< q-1 <100nm).
II.3. Appareillages expérimentaux
II.3.1. Diffusion statique de la lumière : SLS
Les expériences ont été réalisées sur un système ALV couplé à un laser solide
(Millenia, Spectra Physics) polarisé verticalement avec une longueur d’onde fixe de 532nm.
Ce système est schématisé sur la figure II.II.7.
Traitementinformatique
LASER
θ
PMAutocorrélateur
Optique
Bain de décaline ou d’huile de silicone
Echantillon
Optique
Figure II.II.7: Représentation schématique de l’installation de diffusion de la lumière classique
Le faisceau laser est focalisé sur le centre de la cellule de diffusion grâce à un système optique
(lentille + pinhole). La cellule de diffusion cylindrique est placée au centre d'une cuve remplie
d’huile de silicone ou de décaline qui sont isoréfractives du verre ce qui évite les problèmes
de reflets du faisceau incident, cette cuve est thermostatée par un bain externe au système.
Chapitre II. Matériels et techniques expérimentales
36
Le photomultiplicateur (PM du montage SLS) transforme le faisceau diffusé en impulsions
électriques d’amplitude et de durée directement utilisables par l’analyseur.
Les mesures sont effectuées sur une gamme d’angle θ allant de 10° à 140° ce qui correspond à
une échelle spatiale (q-1) comprise entre 30 et 370nm. Un bain thermostaté permet de régler la
température entre 10°C et 80°C.
Le toluène et le Ludox 50 (Dupont de Nemours, USA) sont utilisés comme référence de
calibration de l’appareil permettant notamment le calcul de la valeur absolue de la constante
d’appareillage, K. Dans le cas où les échantillons diffusent trop et risquent soit d’endommager
le PM soit de présenter une intensité diffusée au-delà de la zone de saturation du PM, on
utilise des filtres d’atténuation placés devant la source laser incidente afin d’en diminuer
l’intensité.
II.3.2. Diffusion Dynamique de la Lumière : DLS
La diffusion dynamique de la lumière est réalisée sur le même appareil que celui
utilisé pour la SLS.
La corrélation des photons est assurée par un corrélateur digital ALV-5000/E multi-bit
multitau. On obtient alors la fonction d’autocorrélation normalisée de l’intensité, g2(t) et on
déduit, grâce à la relation de Siegert, la fonction d’autocorrélation normalisée du champ
électrique, g1(t).
Le corrélateur permet de sonder une échelle temporelle comprise entre 0.2µs et quelques
dizaines de secondes.
Traitement des données de dynamique
Nous allons donner une description générale du traitement des données en
dynamique.
Deux méthodes d’ajustements principaux sont utilisées : le REPEX et le GEX.
On peut écrire g1 sous la forme d'une somme pondérée d'exponentielles décroissantes en
tenant compte de la contribution de chacune des espèces présentes dans la solution. Le
traitement des données consiste à extraire de g1 une distribution des temps de relaxation.
Ces deux ajustements permettent donc d’accéder à la fois à l’amplitude de diffusion et aux
temps de relaxation de chaque particule.
Chapitre II. Matériels et techniques expérimentales
37
II.3.3. Diffusion de rayons X aux petits angles : SAXS
Les mesures de SAXS ont été réalisées sur une caméra SAXSess (Anton- Paar,
Graz, Autriche) (Bergmann, Orthaber, Scherf et Glatter, 2000) connectée à un générateur à
rayons X (Philips, PW 3830) opérant à 40 kV et 50 mA avec un tube en anode de cuivre
(Philips 2773/00). Un miroir Göbel (AXO Dresden, C40-0641) est utilisé pour convertir le
faisceau rayon X polychromatique divergeant en un faisceau focalisé linéairement d’une
radiation de CuKα (λ=0.154nm). Un détecteur plan d’images (Fuji BAS1800) permet de
détecter la lumière diffusée sur une gamme de q (0.9 x 10-2 < q < 5 nm-1). Les images sont
lues 5 minutes après exposition pour minimiser la détérioration rapide des états excités.
L’image 2D est intégrée rapidement pour obtenir l’intensité en fonction de q, I(q), en utilisant
un logiciel SAXSQuant (Anton- Paar, Graz, Autriche).
La valeur absolue des intensités a été obtenue par une mesure des monomères natifs de
β−lactoglobuline dont la masse molaire est connue par mesure en SLS permettant ainsi de
déterminer la constante d’appareillage (K) de manière absolue.
La référence utilisée pour corriger les intensités diffusées est de l’eau.
III-Turbidimétrie
La turbidimétrie est basée sur la mesure de l’intensité transmise d’un rayonnement à
travers un échantillon. Dans certains cas, la turbidité τ peut être reliée à la structure des
systèmes via leur facteur de structure S(q) mais c’est une technique plus simple d’usage.
III.1.Théorie
La turbidité, τ (cm-1), est reliée à la transmission et au chemin optique L par :
L
1
I
Iln
tr
0 ⋅
=τ (II.23)
Avec I0 : intensité incidente du laser
Itr : intensité transmise
L : trajet optique (cm)
Chapitre II. Matériels et techniques expérimentales
38
La diminution de la transmission est due :
• soit à l’absorption des photons de l’onde incidente par les molécules présentes dans le
milieu se faisant avec transition de leur niveau énergétique et par conséquent se réalisant à
des longueurs d’ondes bien spécifiques (ex : pic d’absorption situé à λ=278nm pour la
plupart des protéines)
• soit à leur diffusion lors de la rencontre de particules dans le milieu.
Nous nous plaçons dans une zone de longueur d’onde loin de la zone d’absorption (λ≥350nm)
pour que la turbidité mesurée ne provienne que d’un phénomène de diffusion.
La turbidité (τ) peut ainsi être directement reliée au facteur de structure S(q) et aux paramètres
de taille (Ma et Ra) des systèmes par l’équation suivante :
∫ ∫π π
ϕθθθ+⋅⋅⋅=τ2
0 0
2aa ddsin)cos1()R;q(SMCH (II.24)
H est une constante d’appareil et vaut :
2
a4
2
C
n
N
n4H
δδ
λπ= (II.25)
et avec n : indice de réfraction du milieu et son incrément avec la concentration (δn/δC) qui
dépendent peu tous les deux de la longueur d’onde (λ) du rayonnement incident.
Dans le cas des protéines globulaires la dépendance de la turbidité, τ, avec la longueur
d’onde, λ, peut être résolue.
En effet, des études précédentes3 sur des solutions aqueuses de protéines ont montré que
l’indice de réfraction varie très peu avec la longueur d’onde : 013.0n −λα et peut être
considéré comme constant et égal à celui du solvant aqueux : n = 1.33.
D’autre part il a été vu dans le cas de gels de protéines4,5 que l’incrément d’indice de
réfraction avec la concentration a une dépendance avec λ :
2.02
C
n −λα
δδ
(II.26)
Chapitre II. Matériels et techniques expérimentales
39
La turbidité a donc une dépendance en longueur d’onde en loi de puissance :
2.4−λατ (II.27)
dans le cas où le facteur de structure n’a pas de dépendance en longueur d’onde c’est-à-dire
pour qRa<<1.
III.2.Appareillage expérimental
Les mesures de turbidité ont été effectuées avec un Spectrophotomètre UV-Visible
Cary 50 Bio, (Varian, France) muni d’un bain thermostaté. Il est donc possible de réaliser des
essais en température et de suivre l’évolution de la turbidité.
Des balayages en λ ont été effectués sur la gamme : 350nm< λ < 1100nm.
Les cuves utilisées sont des cellules rectangulaires en verre et en quartz (type Glass et QS
Hellema, France) de différents trajets optiques : ∆L= 1, 0.5, 0.2, 0.1cm.
Une couche d’huile de silicone est ajoutée sur le haut du tube pour empêcher l’évaporation.
IV-Chromatographie d’exclusion stérique
IV.1.Principe
La chromatographie d'exclusion stérique (ou SEC) est une chromatographie en phase
liquide à haute vitesse permettant de fractionner des molécules selon leur taille ou plus
exactement selon leur volume hydrodynamique en solution.
Contrairement aux autres types de chromatographies, en SEC il faut essayer d'éliminer
toutes les interactions entre le soluté et la surface des pores pour ne conserver que l'effet
stérique lié à la taille des pores.
Le principe de cette méthode est d'éluer une solution d'espèces de masses moléculaires
différentes dans une colonne remplie par un matériau ayant une structure poreuse (appelé
aussi phase stationnaire). Les espèces vont alors s'attarder plus ou moins longtemps dans les
pores en fonction de leur taille et vont donc sortir à des volumes hydrodynamiques
décroissants.
Chapitre II. Matériels et techniques expérimentales
40
Le paramètre essentiel est le volume total de la colonne qui peut être décomposé en trois
parties qui sont :
- le volume interstitiel Vint
- le volume poreux total Vp
- le volume occupé par le matériau poreux Vg
Dans les modes de chromatographies classiques, les solutés sont très petits par rapport aux
pores, aussi les composés non retenus et l'éluant ont accès indifféremment à Vint et Vp et sont
élués à V0 = Vint + Vp.
En SEC, on utilise des pores dont la taille est du même ordre de grandeur que celle des
solutés, il en résulte qu'une population de molécules de taille donnée se partage entre le
volume Vint dans lequel l'éluant circule et une fraction du volume poreux K.Vp (0<K<1) que
l'on appelle volume poreux accessible Vacc.
Une espèce est ainsi caractérisée par un volume d'élution Ve qui est de la forme :
Ve = V0 + K.Vp
Pour ce type de chromatographie, V0 est aussi appelé volume d'exclusion totale et est égal au
volume interstitiel Vint.
IV.2. Appareillage expérimental
Un schéma de fonctionnement de l’appareil SEC du laboratoire est présenté sur la
figure II.IV.8 :
Figure II.IV.8 : Représentation schématique de la ligne d’analyse de SEC.
OrdinateurDétecteur diffusion
de lumière
RéfractomètreDifférentiel
DétecteurUV
Injecteurautomatique
PompeSolvant
Colonne
Circulation éluant
Connexion informatique
Chapitre II. Matériels et techniques expérimentales
41
Les éléments constituant la ligne d’analyse sont :
− Une réserve de solvant, une solution à 0.1M NaNO3 avec 50ppm de NaN3, agent
antibactérien
− Une pompe Thermo Sep P100 (le débit utilisé pour nos analyses est de 1cm3/min pour
une durée totale de 45min)
− Un injecteur automatique GILSON 234 (le volume injecté est de 300µL et la
concentration des échantillons de 1g/L)
− Deux jeux de colonne TSK 2000 SW+4000 SW de 2x30cm dont la limite d’exclusion
stérique est de 5.107 g/mole en Dextran). Le gel de remplissage est constitué de
polyether hydroxylé avec une faible absorption des polymères hydrosolubles. La
gamme de pH autorisée va de 2 à 12.
− Un détecteur UV Spectra Physics UV2000, réglé sur 278nm pour la détection des
protéines
− Un détecteur diffusion de la lumière multiangles, DLV 111, conçu au laboratoire.
− Le détecteur le plus utilisé est le réfractomètre différentiel (Shodex RI 71) qui mesure
en continu la différence d’indice de réfraction, ∆ni, entre la solution éluée et le solvant
pur. ∆ni est liée à la concentration et à .C
n
δδ
L’acquisition des données se fait à l’aide d’une carte d’acquisition National Instrument et le
traitement des résultats par le logiciel « CE12 » développé au laboratoire sous LabView. Ce
logiciel permet la mise en œuvre des détecteurs RD, UV et diffusion de la lumière.
V-Microscopie confocale à balayage laser : CSLM
La microscopie confocale est une technique particulièrement élaborée comprenant
des lasers, des éléments optiques, des dispositifs de balayage rapide et des ordinateurs qui
traitent numériquement les images. Ce système permet de visualiser des objets
microscopiques en trois dimensions.
L’inconvénient majeur de la microscopie conventionnelle est une perte de résolution due à la
lumière défocalisée qui se superpose à l’image du plan focal. La microscopie confocale
permet de pallier à ces inconvénients puisque son principe est de pratiquer des coupes
Chapitre II. Matériels et techniques expérimentales
42
optiques virtuelles dans l’objet observé et de n’enregistrer que l’image de la fluorescence
émise dans le plan choisi (plan focal).
V.1.Principe de la CSLM
Figure II.V.9 : Schéma du principe de fonctionnement du microscope confocal.
Nous avons utilisé la microscopie confocale à balayage laser (MCBL) en mode
fluorescence. Le schéma de principe de l’appareil utilisé est représenté sur la figure II.V.9. Le
rayon laser excitateur passe par un diaphragme (« pinhole d’entrée ») qui réduit la source à un
point lumineux.
Le faisceau lumineux passe ensuite sur un miroir dichroïque qui permet à la lumière
d'excitation de pénétrer dans l’échantillon marqué par des fluorochromes. Il y a alors émission
des rayons fluorescents provenant de différents plans de la préparation.
Grâce à un diaphragme variable ou pinhole de sortie qui élimine le signal provenant d’autres
plans (flèches rouges sur la figure) il est possible de sélectionner les rayons émis par un seul
plan de l’échantillon appelé plan focal. Ces rayons émis (flèches noires sur la figure) passent
alors à travers un filtre d’émission des longueurs d’onde puis arrivent à un système de
détection (photomultiplicateur) qui transforme le signal lumineux en signal électrique.
Pinhole de sortie
Laser
Photomultiplicateur
Filtre d’émission
Miroir dichroïque
Objectif
Plan focal
Pinhole d’entrée
Z
Échantillon
Chapitre II. Matériels et techniques expérimentales
43
L'image est construite point à point par balayage (X, Y) du champ analysé à l'aide de
miroirs de déflection de la source lumineuse. Une platine motorisée déplace la préparation
suivant l'axe Z permettant la saisie de différents plans optiques dans l'épaisseur de l'objet. La
structure tridimensionnelle de l'échantillon est obtenue en superposant les images obtenues.
V.2.Appareillage utilisé et préparation des échantillons
Les clichés de CSLM ont été réalisés avec un microscope Leica TCS-SP2 inversé
(Leica Microsystems Heidelberg, Allemagne) équipé de trois lasers qui regroupent 6 raies :
458, 488, 514, 543 et 633 nm.
L’objectif ×63 à immersion à eau a été utilisé permettant d’observer les systèmes à l’échelle
de 20 µm. La protéine étudiée ne possédant pas de propriétés de fluorescence naturelle après
excitation à ces longueurs d’onde, il a été nécessaire de la marquer avec une sonde
fluorescente (fluorochrome) pour la visualiser.
La protéine est marquée par la rhodamine B isothiocyanate (RITC), dont les maxima
d'excitation et d'émission se situent respectivement à λ = 543 nm et 580 nm. La RITC se fixe
sur les groupements apolaires de la protéine sans perturber ses caractéristiques structurales. Le
marquage s'effectue par ajout d’une solution de RITC préparée au préalable directement dans
la solution de protéine pour que la concentration en RITC soit d’environ 5ppm. Nous avons
vérifié que cette concentration en rhodamine n’influence pas la structure des gels formés.
L'échantillon est homogénéisé ensuite à température ambiante.
La protéine marquée est observée en utilisant un laser avec la longueur d'onde de
543 nm (émission enregistrée entre 560 et 700 nm).
Les solutions de protéines marquées sont placées entre lames concaves et lamelles
de 0.17mm d’épaisseur à température ambiante. L’ensemble (lame-lamelle) est scellé avec du
vernis à ongle de manière à éviter toute évaporation. Les lames sont ensuite chauffées à 80°C
dans un bain thermostaté. Nous avons vérifié que l’évaporation est négligeable pour induire
une variation de concentration.
Les observations des gels obtenus sont ensuite faites à température ambiante, à
différents endroits de l’échantillon pour vérifier son homogénéité.
Chapitre II. Matériels et techniques expérimentales
44
VI-La rhéologie
VI.1.Principe
Le but est d'étudier la réponse du matériau à une sollicitation sinusoïdale pour des
fréquences variables et de mesurer le module de conservation G' et le module de perte G".
Ainsi, avec le type d'appareil que nous avons utilisé, le matériau est soumis à une contrainte
sinusoïdale complexe fonction du temps σ(t) de la forme :
( )tsin.itcos* 0 ω+ωσ=σ
où ω/2π est la fréquence des oscillations.
Dans le domaine des réponses linéaires du produit, la déformation résultante γ(t) est
également une fonction sinusoïdale du temps de même fréquence, mais présentant un
déphasage δ, encore appelé angle de perte :
( ))tsin(.i)tcos(* 0 δ+ω+δ+ωγ=γ
Le déphasage δ est caractéristique des propriétés viscoélastiques du produit : il est nul dans le
cas d'un solide élastique idéal, il est de π/2 radians dans le cas d'un liquide visqueux
newtonien et il est compris entre 0 et π/2 pour les milieux ayant un comportement
viscoélastique.
Le module complexe σ*/γ* se décompose en deux parties :
( )δ+δγσ
=+=γσ= sin.icos"G.i'G
*
**G
0
0
La partie réelle correspond au module de conservation G' (appelé module élastique) et la
partie imaginaire au module de perte G" (appelé module visqueux).
Ainsi :
δγσ
= cos'G0
0 δγσ
= sin"G0
0 et 'G
"Gtan =δ
Faire varier la fréquence des oscillations permet d'explorer le comportement mécanique du
produit à différentes échelles de temps d'observation (celui-ci est inversement proportionnel à
ω). On peut ainsi accéder à des structures de durées de vie (temps de relaxation) différentes.
Cette technique est donc particulièrement intéressante pour suivre le phénomène de
gélification au cours duquel la structuration du milieu va progressivement évoluer.
Chapitre II. Matériels et techniques expérimentales
45
VI.2.Appareillage
Nous avons utilisé un rhéomètre à contrainte imposée AR2000 (TA Instruments), avec
une géométrie en acier cône-plan (40mm-1°). Il possède un système de régulation de
température à effet Peltier. Afin d’éviter l’évaporation du produit lors des expériences
réalisées à haute température, de l’huile de paraffine a été ajoutée sur l’échantillon et est
maintenue en place grâce à un piège en silicone.
Les solutions sont dégazées au préalable pour éviter la formation de bulles d’air.
Chapitre II. Matériels et techniques expérimentales
46
Références bibliographiques : (1) Townend, R.; Kumosinski, T. F.; Timasheff, S. N. J. Biol. Chem. 1967, 242, 4538-
4545. (2) Stading, M.; Hermannsson, A. Food Hydrocolloids 1990, 4, 121-135. (3) Aymard, P.; Williams, M. A. K.; Clark, A. H.; Norton, I. T. Langmuir 2000, 16,
7383-7391. (4) Horne, D. S. Faraday Discuss. Chem. Soc. 1987, 83, 259-270. (5) Bremer, L. G. B.; Van Vliet, T.; Walstra, P. J. Chem. Soc., Faraday Trans. 1989, 85,
3359-3372.
Chapitre III.
Caractérisation de l’état natif de la β-lactoglobuline
Chapitre III.Caractérisation de l’état natif de la β-lactoglobuline
47
I-Agrégation réversible de la protéine native autour du point isoélectrique pI
Nous avons déjà discuté au préalable (partie matériels et techniques expérimentales)
de l’existence d'un phénomène de déstabilisation dans une zone particulière de pH. Une étude
plus détaillée de cette déstabilisation a été faite, en particulier l’influence de la température et
de la concentration.
A température ambiante (20°C), la solution devient, pour des pH compris entre 4.5 et
5.6, turbide comme du ‘lait’. Si la solution est laissée au repos, un dépôt blanc se dépose au
fond du tube et ceci d’autant plus vite que la concentration est grande et que le pH est proche
du pI (5.2).
Le précipité formé dans cette zone de pH se disperse de nouveau totalement pour des pH
supérieurs à 6 ou inférieurs à 4.5.
Stading et al1 ont mesuré l’absorbance de solutions de β-lactoglobuline natives en fonction du
pH (figure III.I.1).
Figure III.I.1 : Absorbance1 mesurée à 420 nm pour des solutions de β-lactoglobuline natives à 10g/L à 22°C.
A 420nm l’absorbance mesurée n’est due qu’à un phénomène de diffusion et permet donc de
conclure à une agrégation, ici à température ambiante.
Un traitement des solutions turbides est possible (voir la suite) et permet d’obtenir des
systèmes transparents. La stabilité des solutions à température ambiante dépend de nombreux
paramètres tels que la concentration, le pH, la force ionique, le temps d’agitation…
D’autres auteurs ont également observé ce phénomène d’agrégation à température ambiante2.
Leur étude a montré une agrégation à température ambiante pour des pH compris entre 3.8 et
Chapitre III.Caractérisation de l’état natif de la β-lactoglobuline
48
5.2. Cette agrégation est favorisée par une augmentation de la force ionique et est maximale
entre les pH 4.3 et 4.8.
Nous avons étudié l’effet de la température et la concentration sur ce phénomène de
précipitation à pH 5.2 (pI). Les solutions sont mises à pH 5.2 puis centrifugées pendant 1
heure 30 minutes, temps minimal nécessaire pour que la solution devienne transparente à une
vitesse de 50 000 g. Une fraction non négligeable de protéine se retrouve dans le précipité (de
l’ordre de 30% pour une solution à 100g/L).
Pour mettre en évidence la reformation d’agrégats après centrifugation, la fonction
d’autocorrélation des agrégats formés est mesurée en fonction du temps pour deux
concentrations issues d’une même solution mère. La figure III.I.2 représente la fonction
d’autocorrélation en fonction du temps pour différents temps à 20°C pour une solution à
40g/L à pH 5.2. Les distributions des rayons hydrodynamiques apparents issus de la fonction
d’autocorrélation ont été également représentées.
log(t) (µs)
0 1 2 3 4
g 2(t)
norm
alis
é
0.5
1.0
Rha(nm)
1 10 100
A
Figure III.I.2 : (a) Evolution de la fonction d’autocorrélation (b) Distributions des rayons hydrodynamiques apparents Rha pour les différents temps de mesure décalés en ordonnée. Les mesures ont été réalisées à 20°C sur une solution à 40g/L à pH 5.2 à un vecteur d’onde (q) égal à 2.3.10-2
nm-1.
L’échelle spatiale sondée (q-1) est d’environ 45nm et par conséquence les valeurs de
Rha supérieures à 45nm sont influencées par la dynamique interne. Au temps t=0 il n’y a
qu’une seule population qui correspond au système à l’état natif. Une deuxième population
plus grande en taille apparaît ensuite dans le temps et la contribution de la protéine native
diminue. Ce deuxième mode se décale de plus en plus vers les temps longs ce qui indique une
augmentation de la taille des agrégats formés.
t=0t=18ht=45ht=110h
a
b
Chapitre III.Caractérisation de l’état natif de la β-lactoglobuline
49
Les mêmes observations sont valables à 20g/L.
Nous avons constaté que la cinétique d’agrégation est accélérée lorsque la température
augmente. Cette agrégation est suivie avec un spectrophotomètre puisque les solutions
deviennent rapidement turbides.
L’évolution de la turbidité à 685 nm en fonction du temps a été suivie à deux concentrations
différentes (40 et 20g/L) à pH 5.2 et pour différentes températures (figure III.I.3). Les
solutions caractérisées ont été préparées avec le même protocole qui est le suivant : les
solutions sont mises à pH 5.2, puis tout de suite centrifugées.
t(s)
100 101 102 103 104
τ (c
m-1
)
10-2
10-1
100
101
102
t(s)
100 101 102 103 104
τ (c
m-1
)
10-2
10-1
100
101
102
30°C40°C50°C60°C70°C80°C
Figure III.I.3 : Evolution de la turbidité de solutions de β-lactoglobuline à pH 5.2 mesurée à 685 nm en fonction du temps pour différentes températures indiquées sur la figure et pour deux concentrations : 40g/L (a) et (b) 20g/L
La turbidité augmente pour les deux concentrations et d’autant plus vite que la température
augmente. Après un maximum, la turbidité diminue indiquant une précipitation. La turbidité
maximale atteinte avant précipitation augmente lorsque la température augmente.
Pour les deux concentrations à 80°C, les valeurs mesurées se situent au delà du seuil de
saturation et n’ont donc aucune signification.
Nous avons constaté que le temps d’attente avant centrifugation influence l’agrégation.
Cependant, la fraction de protéine qui précipite est la même quelque soit le temps d’attente
avant centrifugation. Trois solutions à 40g/L et à pH 5.2 sont préparées avec trois temps
d’attente entre le moment où le pH est mis à 5.2 et le moment où la solution est centrifugée
(0h, 2h15 et 4h). Pour suivre l’agrégation, l’évolution de l’intensité relative Ir a été suivie en
a b
Chapitre III.Caractérisation de l’état natif de la β-lactoglobuline
50
fonction du temps à 40°C pour q-1 égal à 120nm (figure III.I.4). Pour vérifier la
reproductibilité des mesures, chaque solution est mesurée trois fois.
t(s)
101 102 103 104
I r
101
102
Figure III.I.4 : Evolution de l’intensité relative Ir en fonction du temps pour une solution à 40g/L à pH 5.2 et à une température de 40°C, pour un angle de 30°. Les temps t1, t2 et t3 correspondent aux temps d’attente avant centrifugation : t1 quand la solution est centrifugée tout de suite, t2 après 2h15 d’attente et t3 après 4h d’attente avant centrifugation. Quelque soit le temps d’attente, il y a un temps pour lequel le système évolue peu (la mise en
température est d’environ 100 secondes) avec une faible vitesse d’agrégation. Il y a ensuite
une augmentation brutale de Ir qui traduit l’agrégation rapide du système.
Les mesures pour une même solution mère sont reproductibles. Pour des solutions préparées
indépendamment, seule, la forme de l’intensité est reproductible contrairement aux valeurs
absolues des temps pour lesquels Ir augmente brutalement.
Le temps d’attente avant centrifugation semble stabiliser la protéine puisque le moment où Ir
augmente brutalement croit lorsque le temps d’attente est plus long.
La centrifugation réalisée au préalable permet de retirer les agrégats formés spontanément
lorsque le pH est mis à 5.2. Des agrégats sont formés de nouveau et finissent par précipiter
aux temps longs. On pourrait penser que la fraction d’agrégats qui précipitent est plus
importante si l’on attend avant de centrifuger. Mais elle est indépendante du temps d’attente
et se situe autour de 15%, ce qui peut être lié à l’évolution très lente du système à température
ambiante.
A ce stade il est difficile de comprendre et d’expliquer ce phénomène de ralentissement de
l’agrégation lorsque le temps d’attente augmente.
t1 t2 t3
Chapitre III.Caractérisation de l’état natif de la β-lactoglobuline
51
Pour mieux visualiser ces phénomènes de précipitation, des photos ont été faites sur des
systèmes à pH 5.2 pour différentes concentrations (10 à 65g/L) et pour différentes
températures (30 à 80°C). Les solutions sont chauffées 3 à 4 jours. Aucune centrifugation n’a
été réalisée au préalable.
Nous avons choisis de montrer celles réalisées pour deux températures extrêmes 50°C et
80°C car 80°C est la température de dénaturation à pH 5.23 et 50°C une température bien en
dessous de celle-ci.
Figure III.I.5 : Photos de solutions à pH 5.2 pour différentes concentrations (aucune centrifugation n’a été réalisée au préalable) (a) à 50°C : C1 10g/L, C2 19g/L et C3 47g/L (b) à 80°C : A1 10g/L, A2 19g/L, A3 37g/L, A4 46g/L, A5 51g/L et A6 65g/L
Aux températures inférieures à 50°C, on obtient des solutions avec un surnageant transparent
et un dépôt blanc au fond du tube.
A partir de 70°C, les solutions aux faibles concentrations (10 et 19g/L) présentent des
précipités et des gels sont obtenus pour les fortes concentrations. On peut définir une
concentration qui délimite la formation de gels et de précipités en suspension. Dans ce cas,
elle est comprise entre 20 et 40g/L. Cette concentration est légèrement plus forte que celle
obtenue par certains auteurs1,4 qui la situe entre 10g/L et 15g/L. Cette différence peut
s’expliquer par le choix de la technique utilisée pour définir cette concentration.
Aux concentrations proches de la transition gel/précipité, il est difficile de distinguer s’il
s’agit d’un gel avec synérèse ou de « grands » précipités en suspension.
La concentration du surnageant a été mesurée pour chaque solution à chaque
température : pour les plus faibles températures (20 à 50°C), de 10 à 15% de protéine
précipite quelque soit le temps d’attente. Par contre à partir de 60°C, cette fraction augmente
dans le temps et peut atteindre 60% pour les longs temps de chauffe et pour les plus fortes
concentrations (65g/L à 70°C).
Pour comprendre le phénomène d’agrégation, il faut séparer les faibles températures (de 20 à
50°C) et les fortes températures (de 60 à 80°C).
A1 A2
A3 A4 A5 A6
C1 C2 C3
(a) (b)
Chapitre III.Caractérisation de l’état natif de la β-lactoglobuline
52
Les précipités formés aux faibles températures à toutes les concentrations se dispersent dans
le temps pour des pH au-delà de 6 et en dessous de 3.5. Aux temps longs, les solutions ne
présentent plus d’agrégats. L’agrégation à faible température (de 20°C à 50°C) est donc
réversible par une variation de pH. L’augmentation de la température accélère l’agrégation.
Aux fortes températures (à partir de 60°C), les agrégats formés sont stables par une variation
de pH. Il s’agit donc d’une agrégation irréversible. Cette agrégation est liée à la dénaturation
de la protéine puisque les températures utilisées sont proches des températures de
dénaturation.
II-Caractérisation de la protéine native suivant le pH
Nous avons étudié l’influence du pH sur la masse molaire apparente mesurée en
diffusion statique de la lumière (SLS) et en SAXS et sur le rayon hydrodynamique apparent
mesuré en diffusion dynamique de la lumière.
Nous avons restreint notre étude à des pH compris entre 8 et 5.2. Les solutions aux pH 5.5 et
5.2 ont nécessité le traitement préalable décrit précédemment : une centrifugation pendant 1
heure 30 minutes à 50 000 g. Ces solutions évoluent lentement à 20°C et peuvent donc être
caractérisées.
II.1-Diffusion statique de la lumière et SAXS
La figure III.II.6 montre les dépendances en concentrations de Ma pour les différents
pH étudiés. L’intensité diffusée des systèmes n’a pas de dépendance angulaire puisque les
solutions sont homogènes (longueur de corrélation inférieure à 20nm).
Il est important de noter qu’il existe toujours une fraction d’agrégats dans la solution
qui contribue à l’intensité relative mesurée et donc à Ma. Les intensités mesurées sont donc
corrigées par l’amplitude relative du pic correspondant aux protéines natives (Anative) dans la
distribution des temps de relaxation de la façon suivante :
Ir (natives) = Ir (mesurée) x Anative.
Chapitre III.Caractérisation de l’état natif de la β-lactoglobuline
53
C(g/L)
1 10 100
Ma
(10-4
g/m
ol)
1
10pH 8pH 7pH 6.5pH 6pH 5.5pH 5.2
Figure III.II.6 : Evolution de la masse molaire apparente Ma en fonction de la concentration en protéine C à différents pH. Les traits en pointillés représentent les valeurs des masses molaires pour le dimère et le monomère5.
D’un point de vue générale, Ma augmente lorsque le pH diminue. En effet, la charge
globale diminue lorsque le pH diminue impliquant une réduction des interactions
électrostatiques.
L’évolution de Ma avec C est la résultante de deux effets : d’une part du déplacement
de l’équilibre monomère-dimère vers le dimère lorsque la concentration augmente et d’autre
part de l’augmentation des effets d’interactions (électrostatiques…) : répulsives ou attractives.
Pour les pH 8, 7 et 6.5, Ma diminue lorsque la concentration augmente due à l’augmentation
des répulsions électrostatiques avec la concentration. Aux faibles concentrations, la protéine
se présente sous la forme d’un mélange monomère-dimère.
Aux pH 6 et 5.5, Ma est quasiment indépendante de la concentration, ce qui implique une
compensation entre les interactions répulsives et attractives.
A pH 5.5, la protéine existe sous forme de dimère aux faibles concentrations alors qu’à pH 6
elle existe sous forme d’un mélange monomère-dimère.
A pH 5.2 (pI), Ma augmente lorsque la concentration augmente. Dans ce cas, les interactions
deviennent attractives, mais on ne peut pas exclure la présence de plus grands oligomères.
Les études en SAXS permettent d’accéder à des échelles plus locales (q-1 entre 0.5 et
10 nm). Nous avons couplé les mesures en SAXS et celles en SLS pour avoir accès au facteur
de structure des systèmes.
Monomère
Dimère
Chapitre III.Caractérisation de l’état natif de la β-lactoglobuline
54
Les figures III.II.7 à III.II.9 montrent les dépendances en vecteurs d’onde de Ma pour les
différents pH étudiés et pour différentes concentrations, obtenues en SAXS et en SLS.
q (nm-1)
10-2 10-1 100
Ma
(g/m
ol)
103
104
139g/L113g/L101g/L78g/L61g/L5g/L
q (nm-1)
10-2 10-1 100
Ma
(g/m
ol)
103
104
120g/L 101g/L80g/L52g/L40g/L10g/L
SLS SAXS
Figure III.II.7 : Evolution de la masse molaire apparente Ma en fonction du vecteur d’onde q pour différentes concentrations en protéine et pour différents pH : (a) pH 8, (b) pH 7
q (nm-1)
10-2 10-1 100
Ma
(g/m
ol)
103
104
99g/L40g/L20g/L10g/L5g/L
Figure III.II.8 : Evolution de la masse molaire apparente Ma en fonction du vecteur d’onde q pour différentes concentrations en protéine à pH 6.5
a b
Chapitre III.Caractérisation de l’état natif de la β-lactoglobuline
55
q (nm-1)
10-2 10-1 100
Ma
(g/m
ol)
103
104
5g/L10g/L20g/L 50g/L 80g/L
q (nm-1)
10-2 10-1 100
Ma
(g/m
ol)
104
59g/L20g/L10g/L5g/L
Figure III.II.9 : Evolution de la masse molaire apparente Ma en fonction du vecteur d’onde q pour différentes concentrations en protéine et pour différents pH : (a) pH 6 et (b) pH 5.5
Les mesures en SAXS sont cohérentes avec celles obtenues en SLS. Les courbes se
rejoignent à grand q pour les différents pH et pour toutes les concentrations, indiquant que la
structure locale est la même quelque soit le pH.
Une comparaison directe de l’effet du pH sur le facteur de structure mesurée en SAXS
a été faite dans la figure III.II.10 pour des solutions à 40g/L et pour différents pH.
q (nm-1)
0.1 1
Ma
(g/m
ol)
103
104
pH 8pH 7pH 6.5pH 6pH 5.5
Figure III.II.10 : Evolution de la masse molaire apparente Ma en fonction de q pour différentes pH et pour une concentration de 40g/L. Comme précédemment aux faibles valeurs de q, Ma augmente lorsque le pH diminue. Pour les
grands q, les courbes se rejoignent.
Il est possible de comparer l’effet du pH et de la concentration en sels6 sur la dépendance en
concentration de Ma. A faible force ionique tout comme pour les forts pH le système se
b a
Chapitre III.Caractérisation de l’état natif de la β-lactoglobuline
56
présente sous la forme d’un mélange monomère-dimère. Cet équilibre se déplace vers le
dimère lorsque la concentration en sels augmente ou lorsque le pH diminue. Les interactions
répulsives diminuent lorsque la force ionique augmente ou lorsque le pH diminue vers le pI.
II.2-Diffusion dynamique de la lumière
Les mesures en diffusion dynamique de la lumière permettent d’accéder au rayon
hydrodynamique apparent. Les valeurs sont suffisamment petites pour que le rayon
hydrodynamique apparent soit indépendant du vecteur d’onde.
La figure III.II.11 montre les dépendances en concentrations du rayon hydrodynamique
apparent Rha pour les différents pH étudiés.
C(g/L)
1 10 100
Rha
(n
m)
1
2
3
4
5
6
7
Figure III.II.11 : Evolution du rayon hydrodynamique apparent Rha en fonction de la concentration en protéine C pour différents pH. Les traits en pointillés représentent les valeurs pour le dimère et le monomère5.
Par diffusion dynamique de la lumière, on suit à la fois l'effet des interactions
électrostatiques et l’effet de la friction. Aux faibles concentrations, la protéine se présente
sous forme de monomères, de dimères ou d’un mélange monomère-dimère suivant les
conditions expérimentales. Lorsque la concentration augmente des interactions répulsives ou
attractives apparaissent qui font diminuer ou augmenter Rha respectivement. Enfin aux fortes
concentrations, la friction domine ce qui fait toujours augmenter Rha.
L'évolution du rayon hydrodynamique Rha pour les différents pH confirme les résultats
obtenus en diffusion statique de la lumière
Pour les faibles pH (5.5 et 5.2), Rha augmente fortement lorsque la concentration augmente.
Pour les plus forts pH (8 à 6), le rayon hydrodynamique apparent diminue d’abord et
Monomère
Dimère
pH 8pH 7pH 6.5pH 6pH 5.5pH 5.2
Chapitre III.Caractérisation de l’état natif de la β-lactoglobuline
57
augmente ensuite à partir d’une certaine concentration (autour de 20g/L) indiquant que la
friction domine alors pour ces concentrations.
Chapitre III.Caractérisation de l’état natif de la β-lactoglobuline
58
Références bibliographiques :
(1) Stading, M.; Hermannsson, A. Food Hydrocolloids 1990, 4, 121-135. (2) Majhi, P. R.; Ganta, R. R.; Vanam, R. P.; Seyrek, E.; Giger, K.; Dubin, P. L.
Langmuir 2006, 22, 9150-9159. (3) Hegg, P.-O. Acta Agriculturae Scandinavica 30 1980. (4) Renard, D.; Lefebvre, J. International Journal of Biological Macromolecules 1992,
14, 287-291. (5) Aymard, P.; Durand, D.; Nicolai, T. International Journal of Biological
Macromolecules 1996, 19, 213-221. (6) Baussay, K.; Le Bon, C.; Nicolai, T.; Durand, D.; Busnel, J. International Journal of
biological Macromolecules 2004, 34, 21-28.
Chapitre IV.
Agrégation thermique de la β-lactoglobuline
Chapitre IV. Agrégation thermique de la β-lactoglobuline
59
I-Diagramme d’état sol/gel
Pour déterminer le diagramme d’état sol/gel de la β-lactoglobuline en fonction du pH
sans ajout de sels, les solutions sont chauffées à 80°C pendant 15 heures, temps au bout
duquel le système n’évolue pratiquement plus. Deux critères peuvent être utilisés pour définir
un gel : (a) le gel résiste à son propre poids c’est-à-dire que si le tube est retourné, le système
ne coule pas (b) le système coule sous son propre poids mais il n’est pas possible de dissoudre
complètement le système dans un solvant.
Le diagramme d’état sol/gel a été réalisé par l’observation des systèmes à 20°C juste après les
avoir chauffés. Il est important de noter que ce diagramme dépend du temps d’attente à 20°C
mais nous en discuterons par la suite.
La figure IV.I.1 représente l’influence du pH sur la concentration critique de gélification
notée Cg.
pH
2 3 4 5 6 7 8 9
Cg
(g/L
)
0
20
40
60
80
100
Figure IV.I.1 : Diagramme d’état sol/gel de la β-lactoglobuline en fonction du pH sans ajout de sels. Les solutions sont chauffées 15 heures à 80°C. Critère a ● Critère b ○ Des photos de plusieurs gels ont été ajoutées. Les traits en pointillés délimitent deux zones définies dans le texte. Deux zones de pH ont été définies :
-zone (1) : pour les pH supérieurs à 5.8 ou inférieurs à 3.5, les deux critères sont applicables et
la transition sol-gel délimite la formation de gels à C>Cg et d’agrégats en solutions à C<Cg.
Dans ces zones il est possible de caractériser à la fois les agrégats et les gels.
Pour les pH inférieurs à 3.5, Cg varie peu et est de l’ordre de 50g/L. Les systèmes formés sont
transparents sur toute cette gamme de pH.
(1) (1) (2)
Chapitre IV. Agrégation thermique de la β-lactoglobuline
60
Pour les pH supérieurs à 5.8, Cg augmente lorsque le pH augmente et passe de 40g/L à pH 5.8
à 90g/L à pH 7. Au delà du pH 7, Cg diminue légèrement jusqu’à 80g/L à pH 9 (critère a).
Dans ces deux gammes de pH les deux critères donnent des Cg relativement proches sauf à pH
9 (entre 65g/L et 80g/L).
La diminution des interactions électrostatiques lorsque le pH se rapproche du pI explique la
diminution de Cg. Cependant les valeurs plus grandes pour Cg aux forts pH (supérieurs à 5.8)
ne s’expliquent pas par la charge globale de la protéine puisqu’elle est de +20 à pH 2 alors
qu’à pH 7 elle n’est que de -7.
-zone (2) : les agrégats formés à des concentrations inférieures à Cg (critère a) précipitent. Il
est difficile de définir la transition entre la formation de gels et de précipités en suspension
pour les pH inférieurs à 5.8 à cause de la formation de précipités de plus en plus importants.
Ceci conduit à une imprécision dans la définition de Cg. Cg est minimale à pH 4.8 et est de
l’ordre de 10g/L.
Les deux zones ont déjà été distinguées dans la littérature sur la base d’observations
microscopiques : des gels fibrillaires sont observés dans la zone 1 et des gels particulaires
dans la zone 21-3.
De façon plus générale, nous avons vu qu’en réduisant la charge globale de la protéine, Cg
diminue. De la même façon, la force ionique via l’écrantage des charges influence les
interactions électrostatiques mises en jeu et donc Cg. Une précédente étude sur l’effet de la
concentration en NaCl à pH 74 a montré la formation de gels de plus en plus hétérogènes
lorsque la force ionique augmente. A partir d’une concentration en sel importante (0.2M) des
précipités sont formés pour des concentrations proches de Cg.
Les valeurs de Cg obtenues sont légèrement inférieures pour les forts pH (supérieurs à 6.5) à
celles obtenues par d’autres auteurs2. Pour des pH compris entre 5 et 4, ces auteurs2 ont
mesurés Cg de l’ordre de 10g/L ce qui est bien inférieure à nos mesures (30g/L). Ces
différences sont dues à la méthode utilisée pour déterminer Cg (rhéologie dans leur cas). Dans
notre cas, nous avons constaté que pour des pH compris entre 4 et 6, ces précipités
remplissent presque tout l’espace à partir de 10g/L, il est donc possible de mesurer des
modules assez importants conduisant à assimiler le système à un gel.
Des observations utilisant le critère a ont été également faites par Renard et al pour déterminer
Cg5 en fonction de la force ionique pour différents pH. Les solutions ont été chauffées
pendant 1 heure à 100°C (voir chapitre I figure I.II.5). La tendance et les valeurs absolues
Chapitre IV. Agrégation thermique de la β-lactoglobuline
61
obtenues sont les mêmes : Cg diminue lorsque le pH diminue avec un effet moins marqué
lorsque la force ionique augmente.
Il est important de séparer l’aspect cinétique pour les systèmes de la zone 1 formés entre le
critère a et b. Rappelons qu’il s’agit des systèmes qui ne se dissolvent pas par dilution mais
qui coulent sous leur propre poids. Après un certain temps, ces systèmes forment des gels qui
résistent à leur poids aux faibles températures (20°C) mais coulent de nouveau lorsqu’ils sont
chauffés. Ce phénomène est réversible avec la température. La température au-delà de
laquelle les gels coulent augmente dans le temps. Au bout de quelques jours, les systèmes ne
coulent plus même aux fortes températures. Les valeurs de Cg définies par les critères a et b
deviennent alors proches.
II-Taux d’agrégation
Le taux de protéines agrégées (Fa) est un facteur prédominant dans l’étape
d’agrégation de la protéine au cours de la dénaturation. La mesure de Fa se fait en solution
diluée à température ambiante puisque les agrégats de protéine sont stables au refroidissement
et à la dilution. Nous avons étudié par Chromatographie d’Exclusion Stérique (SEC)
l’influence du pH sur ce paramètre Fa. La détection des protéines se fait par la mesure de
l’absorption en UV à 280nm.
La figure IV.II.2 montre les chromatogrammes normalisés par la concentration obtenus par
SEC pour différentes concentrations en protéine à pH 8.
Chapitre IV. Agrégation thermique de la β-lactoglobuline
62
Ve (mL)
8 10 12 14 16 18 20
UV
/C (
U.A
.)20g/L10g/L5g/L2g/L
Native70g/L60g/L50g/L
Figure IV.II.2 : Chromatogrammes normalisés de solutions de β-lactoglobuline à pH 8 pour différentes concentrations après 15 heures à 80°C. La référence représente la protéine à l’état natif.
Dans le cas de la protéine native, le pic (2) est étroit et se situe autour de 18mL. Il
existe un équilibre entre les dimères et les monomères. Ce mélange contient principalement
des dimères4 dans les conditions de mesure (solvant à 0.1M NaCl et à pH 7).
Les chromatogrammes des systèmes chauffés montrent la présence de deux pics : le
pic (2) autour d’un volume d’élution de 18mL correspondant à la protéine sous forme de
monomères et de petits oligomères et un autre pic (1) à un volume d’élution plus petit
correspondant aux agrégats. Lorsque la concentration en protéine augmente, la fraction de
protéine agrégée augmente et le pic (1) se déplace vers les plus petits volumes d’élution ce qui
indique une augmentation de la taille des agrégats formés. Pour le pic (2), il y a prédominance
de monomères aux faibles concentrations (2g/L) puisque le maximum se situe à un plus grand
volume d’élution que la protéine native. Puis, lorsque la concentration augmente, des dimères,
des trimères et plus généralement des oligomères se forment.
Une autre représentation des chromatogrammes a été réalisée dans la figure IV.II.3
pour les pH 8, 7, 6.5 et 6 en normalisant les pics par le maximum. Pour plus de clarté nous ne
montrons que quelques concentrations en β-lactoglobuline.
(2) (1)
Chapitre IV. Agrégation thermique de la β-lactoglobuline
63
Figure IV.II. 3 : Chromatogrammes normalisés de solutions de β-lactoglobuline pour quelques concentrations et pH après 15 heures à 80°C. - Les chromatogrammes de gauche sont centrés sur le pic des agrégats formés - Les chromatogrammes de droite sont centrés sur le pic de la protéine sous forme de monomères ou de petits oligomères. Le chromatogramme de la protéine native a été ajouté.
Ve (mL)
14 16 18 20
U.V
. nor
mal
isé
10g/L3g/L2g/LNative
Ve (mL)
8 9 10 11 12 13 14
U.V
. no
rmal
isé
39g/L10g/L3g/L2g/L1g/L
U.V
. no
rmal
isé
10g/L40g/L60g/L
2g/L1.5g/L
U.V
. nor
mal
isé
2g/L1g/LNative
10g/L
UV
nor
mal
isé
20g/L5g/L1.9g/LNative
UV
nor
mal
isé
40g/L3g/L1.9g/L
UV
no
rma
lisé
20g/L10g/L5g/L2g/LNative
UV
no
rma
lisé
20g/L10g/L5g/L
70g/L60g/L50g/L
pH 8
pH 7
pH 6.5
pH 6
Chapitre IV. Agrégation thermique de la β-lactoglobuline
64
En diminuant le pH, le pic (2) devient moins large vers les plus petits volumes d’élution
indiquant que la quantité d’oligomères formés est moins importante. Pour le pic (1) des
agrégats de même taille sont formés à des concentrations plus petites lorsque le pH diminue.
La forte sensibilité au pH au voisinage de 6 conduit à des problèmes de reproductibilité : des
agrégats de plus ou moins grandes tailles peuvent être formés. En conséquence, au niveau des
chromatogrammes, la position du pic (1) varie pour les différents essais. Cependant, la
fraction de protéines agrégées reste la même pour les différents essais.
A l’aide de ces chromatogrammes, la fraction de protéine agrégée a été déterminée pour les
différents pH en fonction de la concentration en protéine (figure IV.II.4).
C(g/L)
1 10 100
F a
0.0
0.2
0.4
0.6
0.8
1.0 pH8
pH6
pH7pH6.5
Figure IV.II.4 : Fraction de protéine agrégée Fa en fonction de la concentration pour différents pH pour des solutions de β-lactoglobuline chauffées pendant 15 heures à 80°C.
On constate que quelque soit le pH, Fa augmente quand on augmente la concentration en
protéine. A forte concentration, cette fraction est proche de 1 indiquant qu’il ne reste pas ou
très peu de protéine en solution qui ne s’agrège pas.
Il est possible de définir une concentration critique d’association CCA qui correspond à la
concentration minimale pour pouvoir former des agrégats. En normalisant les concentrations
par CCA (figure IV.II.5), Fa a le même comportement quelque soit le pH et peut être décrite
par la relation suivante :
C
CCACFa
−= .
Chapitre IV. Agrégation thermique de la β-lactoglobuline
65
Le même comportement a été observé pour Fa en fonction de C/CCA en variant le pH à force
ionique fixée et en variant la force ionique à pH74.
C/CCA
0.1 1 10 100
F a
0.0
0.2
0.4
0.6
0.8
1.0pH8
pH6
pH7pH6.5
C/CCA
0.1 1 10 100
Fa
0.0
0.2
0.4
0.6
0.8
1.00.003M 0.01M0.02M0.05M 0.1M0.2M0.4M
Figure IV.II.5 : Evolution de Fa en fonction de la concentration normalisée par CCA pour les différents pH compris entre 8 et 6 et sans ajout de sels (a) et pour différentes forces ioniques à pH 7 (b)
La concentration critique d’association CCA (figure IV.II.6) diminue lorsque les répulsions
électrostatiques sont réduites c’est-à-dire lorsque le pH tend vers le pI ou lorsque la force
ionique augmente. A faible pH ou à forte force ionique CCA est faible, ce qui implique qu’il
suffit de très peu de protéine pour induire l’agrégation.
pH
5.5 6.0 6.5 7.0 7.5 8.0 8.5
CC
A (
g/L
)
1
10
Cs (mol/L)
0.001 0.01 0.1 1
CC
A (
g/L
)
0.01
0.1
1
10
Figure IV.II.6 : Concentration critique d’association CCA (a) en fonction du pH sans ajout de sels et (b) en fonction de la force ionique à pH 7
a b
a b
Chapitre IV. Agrégation thermique de la β-lactoglobuline
66
La déviation de Fa observée aux faibles concentrations montre que même aux concentrations
inférieures à CCA, des agrégats sont formés mais en très faible quantité. Il existe parfois une
fraction qui ne s’agrège pas même à forte concentration et qui dépend du lot utilisé.
De nombreuses équipes utilisent la précipitation des agrégats à pH 4.8 pour mesurer la
fraction d’agrégats formés. Nous avons observé que cette précipitation apparaît également
pour les protéines non agrégées mais dénaturées.
Des solutions à pH 7 et à 1g/L (concentration pour laquelle des grands agrégats ne sont pas
formés) sont chauffées à des temps donnés et ensuite placées à pH 4.8 afin de mesurer la
fraction de protéines dénaturées qui précipitent.
Dans la figure IV.II.7 la fraction de protéines (F) qui précipitent en fonction du temps de
chauffe à 80°C a été donnée.
t(h)
1 10 100
F
40
60
80
100
Figure IV.II.7 : Fraction de protéines qui précipitent en fonction du temps de chauffe à 80°C à pH 4.8 pour des solutions initialement à pH 7 à 1g/L.
Il faut au minimum 24 heures à 80°C pour que toutes les protéines précipitent et pour que la
dénaturation soit complète. Dans toute l’étude, les systèmes ont été chauffés 15 heures, la
dénaturation n’est donc pas complète puisque seulement 82% des protéines précipitent à pH
4.8.
Cependant nous avons vérifié que la structure, la taille, la croissance et la quantité des
agrégats ne varient pas après 15 heures de chauffe à 80°C.
Chapitre IV. Agrégation thermique de la β-lactoglobuline
67
Durant ce temps, des réactions intramoléculaires et intermoléculaires sont responsables de la
dénaturation. En augmentant la concentration en protéine ou en diminuant les répulsions
électrostatiques, les interactions intermoléculaires sont favorisées et des agrégats sont formés.
Nous avons également constaté que la précipitation des protéines dénaturées est visible sur
une gamme de pH compris entre 5.5 et 4.5. La précipitation est maximale pour le pH 4.8 et
diminue de part et d’autre de ce pH.
Par ailleurs il est possible de comparer l’effet du pH sur la vitesse de dénaturation pour deux
solutions initialement à pH 7 et 6 et à 1g/L. La même fraction de protéine précipite à pH 4.8
pour les deux solutions. La vitesse de dénaturation à 80°C est donc la même pour les pH 6 et
7.
III-Structure des agrégats dilués
Les agrégats issus de la dénaturation thermique irréversible de solutions de
β−lactoglobuline native réalisées pour différents pH (8, 7, 6.5, 6 et 5.8) et pour différentes
concentrations en protéines (pour C < Cg) sont caractérisés en SLS. Ils sont dilués
suffisamment avec le solvant de la solution de β−lactoglobuline initiale pour pouvoir négliger
les interactions entre agrégats. La force ionique des solutions est d’environ 0.003mol/L ce qui
correspond à celle apportée par l’azidure de sodium (antibactérien).
III.1-Facteur de structure des agrégats dilués suivant le pH La figure IV.III.8 présente la dépendance de l’intensité diffusée avec le vecteur d’onde (q)
pour des agrégats obtenus après chauffage pendant 15 heures à 80°C de solutions à diverses
concentrations en protéines à pH 6. Comme mentionné précédemment, après 15 heures à
80°C la structure, la croissance et la taille des agrégats ne varient plus.
Chapitre IV. Agrégation thermique de la β-lactoglobuline
68
q(nm-1)
10-3 10-2
I r/K
C (
g/m
ol)
106
107
108
109
62g/L
60g/L
50g/L
40g/L
20g/L
10g/L
55g/L
65g/L
Figure IV.III.8 : Dépendance en q de Ir/KC des agrégats dilués de protéine formés après 15 heures à 80°C pour des solutions à pH 6 et pour différentes concentrations en protéine.
La dépendance en q de l’intensité diffusée montre une augmentation progressive de la
valeur de l’intercepte et une courbure qui se déplace vers les plus faibles q avec la
concentration en protéines. Ceci correspond à une augmentation de la masse molaire moyenne
(Mw) et de la taille (Rgz) des agrégats.
Pour les agrégats de très large taille faits à 65g/L (proche de Cg) à pH 6, on constate que
l’intensité diffusée montre une loi de puissance avec q sur tout le domaine de vecteurs d’onde
sondé.
Dans ce cas, la structure interne des agrégats est observée et la loi de puissance montre le
caractère autosimilaire des agrégats. La pente de la droite (en représentation log-log),
correspondant à l’exposant de la loi de puissance, I α q-Df, est égale à la dimension fractale
(Df) de la structure.
Suivant la gamme de q le facteur de structure des agrégats dilués s’écrit dans le bruit des
mesures de deux façons :
• Pour qRgz<7 :
+
=
3
²R²q1
1)q(S
gz.
• Pour qRgz>4 : fDq)q(S −∞ avec ici Df égale à 1.7.
A partir des mesures d’intensité diffusée par les agrégats dilués en fonction du vecteur d’onde
le facteur de structure des agrégats dilués est obtenu par une normalisation de la courbe Ir/KC
Chapitre IV. Agrégation thermique de la β-lactoglobuline
69
mesurée aux différents q par la valeur (Ir/KC)q→0 = Mw, correspondant à la masse molaire
moyenne en poids des agrégats (figure IV.III.9).
q.Rgz
0.1 1 10
S(q
)
0.01
0.1
1pH 7pH 8
pH 6pH 5.8
pH 6.5
Figure IV.III.9 : Superposition des facteurs de structure pour des agrégats dilués formés à différentes concentrations à différents pH. Le trait continue représente la fonction décrite précédemment pour qRgz<1. Le trait en pointillé est une droite de pente 1.7 égale à la dimension fractale des agrégats dilués. La courbe maîtresse obtenue suite à cette superposition montre une structure des agrégats
autosimilaire quelle que soit la concentration initiale en protéines et quelque soit le pH.
Pour le pH 5.8, seuls les grands agrégats formés à des concentrations proches de la Cg ont été
caractérisés car aux faibles concentrations les agrégats précipitent rapidement, il est donc
difficile de mesurer le facteur de structure.
Des mesures avec le même pH mais sur une solution préparée indépendamment donnent des
masses molaires moyenne en poids plus importantes donc des systèmes plus denses,
cependant le même facteur de structure est obtenu.
La fractalité de la structure interne des agrégats dilués est également mise en évidence lorsque
la masse molaire moyenne en poids (Mw) est reliée au rayon de giration en z (Rgz) par une loi
de puissance comme sur la figure IV.III.10.
Il existe une relation linéaire en échelle log-log entre ces deux paramètres pour toutes les
concentrations en protéine et pour les pH compris entre 8 et 5.8 :
fDgzw RaM ⋅=
Le préfacteur a dépendant du pH.
Chapitre IV. Agrégation thermique de la β-lactoglobuline
70
La pente de la droite correspond à la dimension fractale des agrégats : Df. On constate que Df
vaut environ 1.7 pour tous les pH étudiés (8 à 5.8). Cette valeur de Df est cohérente avec la
mesure du facteur de structure (figure IV.III.9).
Rgz (nm)
101 102 103
Mw (
g/m
ol)
106
107
108
109
1010
pH 6pH 6.5pH 7pH8
pH 5.8
Figure IV.III.10 : Dépendance de la masse molaire moyenne Mw avec le rayon de giration Rgz des agrégats dilués obtenus pour différentes concentrations et pH. Les droites en pointillé ont une pente de 1.7 (Df des systèmes). Le préfacteur a augmente légèrement lorsque le pH diminue de 8 à 6. A pH 5.8, les agrégats
sont plus denses localement. Il est difficile d’avoir des mesures reproductibles pour les
valeurs absolues mais le même facteur de structure est obtenu.
Tout comme le pH l’augmentation de la force ionique6 à pH 7 conduit également à une
densification locale de la structure. En augmentant la force ionique, la dimension fractale
augmente et passe de 1.7 sans ajout de sels à 2.
III.2-Influence de la concentration en protéine et du pH sur la croissance des agrégats
La figure IV.III.11 montre la dépendance en concentration en protéine sur la masse
molaire moyenne en poids (Mw) pour les différents pH étudiés. Il est important de noter que la
concentration utilisée pour calculer Mw est la concentration en agrégats qui a été déterminée
en SEC. Le rayon hydrodynamique Rh en fonction de la concentration a également été
déterminé.
Df
Densification locale
Chapitre IV. Agrégation thermique de la β-lactoglobuline
71
C (g/L)
10 100
Mw
(g
/mo
l)
106
107
108
109
pH6pH6.5pH7pH8
C(g/L)
10 100
Rh
(nm
)
10
100
Figure IV.III.11 : (a) Evolution de Mw avec la concentration pour des agrégats dilués obtenus pour différents pH (b) Rayon hydrodynamique en fonction de la concentration en protéines pour différents pH La croissance des agrégats est très dépendante de la concentration en protéine initialement
présente dans la solution.
Aux faibles concentrations (jusqu’à environ 30g/L), quelque soit le pH Mw est quasiment
constante. Elle augmente ensuite rapidement lorsque la concentration augmente et diverge
proche de Cg. La valeur de Mw à faible concentration augmente lorsque le pH diminue (elle
est proche pour les pH 7 et 6.5). La variation de Rh est en accord avec celle de Mw.
Il est possible de comparer la taille des agrégats formés en comparant les volumes d’élution
mesurés pour le pic des agrégats obtenus en SEC (figure IV.II.3). Une diminution du volume
d’élution signifie une augmentation de la taille des objets formés. L’intérêt de la SEC est
d’avoir accès à la taille des agrégats formés aux faibles concentrations (inférieures à 10g/L).
A forte concentration, des agrégats de grande taille sont formés et sont totalement exclus par
la colonne utilisée. Au delà d’une certaine taille tous les agrégats sortent au même volume
d’élution (environ 9mL).
Aux pH 7 et 6.5, des agrégats de même taille sont formés indépendamment de la
concentration de 2g/L jusqu’à 30g/L avec Mw de l’ordre de 106g/mol : à plus faible
concentration le volume d’élution augmente ce qui implique que Mw diminue pour ces faibles
concentrations. La SLS ne permet pas d’accéder à Mw pour les faibles concentrations car la
fraction de protéines agrégées est faible, les mesures sont donc imprécises.
Pour le pH 8, le volume d’élution diminue constamment lorsque la concentration augmente ce
qui indique que la taille des agrégats augmente continuellement avec la concentration. On
peut donc conclure qu’aux concentrations inférieures à 10g/L, Mw diminue et aucun plateau
n’est obtenu (jusqu’à 2g/L).
a
b
Chapitre IV. Agrégation thermique de la β-lactoglobuline
72
A pH 6 les agrégats formés sont trop grands pour être caractérisés en SEC.
IV-Structure des systèmes in-situ L’arrangement structural in situ des agrégats (C<Cg) et des gels (C>Cg) issus de la
dénaturation thermique de solutions natives de β−lactoglobuline formées à différentes
concentrations et pour plusieurs pH a été étudié en diffusion statique de la lumière pour les
systèmes transparents et en turbidimétrie pour les systèmes turbides.
En diffusion de la lumière, l’intensité diffusée des systèmes n’a pas de dépendance en q
puisque la longueur de corrélation est faible (inférieure à 20nm).
Parfois les deux techniques peuvent être appliquées pour la même solution. Dans ce cas, les
valeurs obtenues en SLS et en turbidimétrie sont cohérentes.
Dans le cas des systèmes turbides, il est nécessaire d’utiliser la turbidimétrie. L’interprétation
de la turbidimétrie nécessite la connaissance du facteur de structure. Une étude précédente6
sur des agrégats et des gels turbides de β-lactoglobuline formés à pH 7, à différentes
concentrations et différentes forces ioniques a permis de mesurer ce facteur de structure. Cette
étude a conduit à :
12a
2
3
Rq1)q(S
−
⋅+= pour toutes les valeurs de q ce qui implique une Df égale à 2.
Ra est la longueur de corrélation du système. La longueur de corrélation correspond à l’échelle
spatiale au-delà de laquelle le système est homogène.
Ma est la masse molaire apparente des systèmes et est inversement proportionnelle à la
compressibilité osmotique qui représente l’amplitude des fluctuations de concentrations.
Ces deux grandeurs dépendent des interactions répulsives et attractives présentes dans le
système.
Utilisant ce facteur de structure dans la formule qui relie la turbidité à Ma et S(q) (voir
chapitre II), il est possible d’accéder aux paramètres Ma et Ra par une simple mesure de
Chapitre IV. Agrégation thermique de la β-lactoglobuline
73
l’absorbance en fonction de la longueur d’onde. La taille maximale mesurable est de l’ordre
de 1 µm7.
Un exemple de la dépendance en longueur d’onde de la turbidité est donné dans la
figure IV.IV.12 pour des systèmes de différentes tailles et masses molaires apparentes.
λ (nm)1000
τ (c
m-1
)
0.1
1
10
100
Figure IV.IV.12 : Dépendance en longueur d’onde de la turbidité pour des gels formés à 100g/L à pH7 pour différentes concentrations en sels. L’ajustement théorique qui a permis le calcul de Ma et de Ra a été également ajouté.
A partir d’une turbidité proche de 50cm-1, la transmission est très faible (inférieure à 5%) et la
lumière diffusée de façon multiple domine, l’appareil sature donc à cette valeur d’où
l’obtention d’un plateau. Ceci est visible pour les plus grandes tailles aux faibles longueurs
d’onde.
L’ajustement théorique est en accord avec un facteur de structure de la forme
12a
2
3
Rq1)q(S
−
⋅+= .
Pour une meilleure visualisation des turbidités obtenues, des photos de gels obtenus
pour une concentration en protéine de 100g/L et pour différentes forces ioniques ont été
réalisées (figure IV.IV.13). De plus, une représentation de la transmittance mesurée à travers
des cuves de 1cm et de 1mm en fonction de la force ionique est donnée dans la figure
IV.IV.14. La longueur d’onde choisie est de 500nm, longueur d’onde à laquelle l’œil humain
est le plus sensible. Mais il est important de noter que les valeurs de transmittances dépendent
900
520
220
115
78
50
7.5x109
1.5x109
2.2x108 4.6x107 1.5x107
4.2x106
Ra (nm) Ma (g/mol)
Ajustement théorique
Chapitre IV. Agrégation thermique de la β-lactoglobuline
74
de la longueur d’onde à laquelle elles sont mesurées. La transmittance augmente et donc la
turbidité diminue lorsque la longueur d’onde augmente (figure IV.IV.12)
Figure IV.IV.13 : Illustration de la turbidité des gels en fonction de la force ionique (C=100 g/L, pH 7) à travers des cuves de 1cm et de 1mm.
La turbidité augmente progressivement lorsque la force ionique augmente. A partir de 0.1M,
il est nécessaire d’utiliser des cuves de 1 mm.
CNaCl (mol/L)
0.00 0.05 0.10 0.15
Tr
0.0
0.2
0.4
0.6
0.8
1.0
Figure IV.IV.14 : Transmittance mesurée à 500nm en fonction de la force ionique (C=100 g/L, pH 7) à travers des cuves de 1cm et de 1mm.
A travers une cuve de 1cm, la transmittance passe de 100% (système transparent) à
0.03M NaCl à 50% pour 0.05M NaCl et chute à 5% à 0.08mol/L.
Pour aumenter la transmittance, il suffit de réduire la taille de la cuve utilisée. A travers une
cuve de 1mm, la transmittance passe de 95% à 0.05M à 70% à 0.08M de NaCl. Ansi il est
possible de caractériser des systèmes avec une force ionique plus importante, ici 0.14M.
0.05M 0.07M 0.1M 0.12M 0.15M 0.1M
1cm 1mm
1mm
1cm
Chapitre IV. Agrégation thermique de la β-lactoglobuline
75
Notre objectif était de quantifier l’influence du pH, de la force ionique et de la concentration
en protéines sur la structure des systèmes in situ.
IV.1-Hétérogénéité des gels formés à 100g/L suivant le pH
L’effet du pH sur la masse molaire apparente pour des gels de β-lactoglobuline formés
à 100g/L a été étudié (figure IV.IV.15).
Figure IV.IV.15 : Dépendance de Ma en fonction du pH sans ajout de sels pour des gels formés à 100g/L et pour différentes températures (80°C à 67.5°C). Les gels formés à des pH supérieurs à 6 ont été chauffés pendant 15 heures et ont
ensuite été caractérisés en diffusion statique de la lumière.
Pour les pH inférieurs à 6 les gels sont turbides, nous avons alors suivi la variation de la
turbidité et donc de la structure dans le temps aux différentes températures. Nous nous
sommes assurés que la mesure de Ma est représentative de la structure finale. Pour cela elle a
été faite lorsque la turbidité est stabilisée dans le temps : 15 heures à 80°C est suffisant pour
atteindre cet état final.
En diminuant le pH à partir de 9 jusqu’à pH 6.5, il y a une très faible augmentation de
Ma (elle est de l’ordre de 105 g/mol). Puis il y a une forte augmentation. Pour des pH
inférieurs à 5.8 les systèmes ne peuvent plus être caractérisés par la turbidité (les tailles
obtenues sont de l’ordre de 1µm). Aux pH proches de 5.8, une faible variation du pH entraine
une grande variation de Ma d’où l’obtention de valeurs comprises entre 107 et 1010 g/mol.
pH
5.5 6.0 6.5 7.0 7.5 8.0 8.5 9.0
Ma
(g/m
ol)
104
105
106
107
108
109
80°C75°C 73°C70°C67.5°C
SLS
Turbidimétrie
pH6.1
pH6
pH5.8
Chapitre IV. Agrégation thermique de la β-lactoglobuline
76
Une augmentation de la température accélère le processus d’agrégation et de
gélification tout en conservant la même structure donc Ma et Ra. Une étude plus approfondie
de la cinétique a été menée mais nous en discuterons plus tard dans ce chapitre (partie V).
IV.2-Structure des systèmes in-situ suivant le pH sans ajout de sels L’évolution de la masse molaire apparente Ma des systèmes in situ avec la concentration en
protéine initiale (C) a été déterminée pour différentes teneurs en protéine et pour les pH
compris entre 8 et 6.
La figure IV.IV.16 représente la dépendance en concentration de la masse molaire apparente
Ma pour les pH compris entre 8 et 6.
C(g/L)
10 100
Ma
(g/m
ol)
104
105
106
pH 6pH 6.5pH 7pH 8
Figure IV. IV.16 : Dépendance de Ma avec la concentration pour des systèmes obtenus pour différents pH Quelque soit le pH, lorsque la concentration en protéine augmente, Ma augmente car il y a une
augmentation de la taille et de la quantité des agrégats formés. Lorsque les interactions
répulsives deviennent importantes, la masse molaire apparente diminue. C’est le cas pour les
pH 8 à 6.5. A pH 6, les interactions sont plus faibles puisqu’aux fortes concentrations Ma est
quasiment indépendante de C. L’augmentation de la quantité et de la taille des oligomères est
compensée par les interactions répulsives jusqu’à 100g/L.
Précédemment dans la figure IV.IV.15 nous avons mis en évidence une augmentation brutale
de Ma au voisinage du pH 5.8. Une étude de l’effet de la concentration pour des pH 5.8 et 5.9
Chapitre IV. Agrégation thermique de la β-lactoglobuline
77
a été menée. Pour vérifier la reproductibilité des mesures, pour chaque pH deux essais pour
les différentes concentrations ont été réalisés (figure IV.IV.17).
C(g/L)
10 100
Ma
(g/m
ol)
107
108
109
Figure IV.IV.17 : Dépendance de Ma avec la concentration en protéine pour des systèmes obtenus à pH 5.8 et 5.9
Comme pour les pH supérieurs à 6, à faible concentration Ma diminue lorsque la
concentration augmente indiquant une augmentation des interactions répulsives. Cependant
aux pH 5.8 et 5.9 au voisinage de 100g/L Ma augmente. Cette augmentation est beaucoup plus
marquée pour l’essai 1 à pH 5.8 et l’essai 2 à pH 5.9. Il est difficile de comprendre cette
augmentation de Ma pour ces fortes concentrations. Dans cette zone de pH, on obtient des
systèmes dont l’hétérogénéité est difficilement contrôlable due à une forte sensibilité au pH.
IV.3-Influence de la concentration en sels sur la structure des gels formés à 100g/L
Précédemment nous avons vu que les gels formés à 100g/L sans ajout de sels
deviennent de plus en plus hétérogènes à partir de pH 6 lorsque le pH diminue. Il est
intéressant de coupler l’effet du pH et de la force ionique pour comprendre comment cette
hétérogénéité dépend des deux paramètres.
Une étude systématique de la turbidité en fonction de la concentration en NaCl pour
différents pH a été menée pour des systèmes de β-lactoglobuline à 100g/L (figure IV.IV.18).
Les valeurs de Ma et de Ra ont été déduites de la dépendance de la turbidité avec la longueur
d’onde comme dans le cas de la figure IV.IV.11 : la dépendance en longueur d’onde la
turbidité est en accord avec un facteur de structure de la forme
12a
2
3
Rq1)q(S
−
⋅+= .
pH 5.8 Essai 1 pH 5.8 Essai 2 pH 5.9 Essai 1 pH 5.9 Essai 2
Chapitre IV. Agrégation thermique de la β-lactoglobuline
78
CNaCl (mol/L)
0.00 0.04 0.08 0.12 0.16 0.20 0.24 0.28
Ma
(g/m
ol)
104
105
106
107
108
109
1010
1011
Ra (nm)
101 102 103
Ma
(g/m
ol)
106
107
108
109
1010
Figure IV.IV.18 : (a) Dépendance de Ma en fonction de la concentration en NaCl pour des gels formés à 100g/L, à 80°C et pour différents pH : ∇ pH 6, ◊ pH 6.5, ○ pH 7, ∆ pH 8, pH 9 (b) Dépendance de Ma en fonction de Ra en échelle log-log. La pente de la droite est de 2.3. Quelque soit le pH, Ma augmente progressivement avec la concentration en NaCl puis
augmente brutalement à une concentration qui augmente lorsque le pH augmente. A cette
concentration les systèmes sont très hétérogènes avec une longueur de corrélation proche de
1µm et Ma se situe au voisinage du 1010g/mol. L’ajout de sels permet un écrantage des
charges présentes sur la protéine. Plus le pH est proche du pI plus la quantité de sels
nécessaire pour écranter les charges est faible. Cette étude permet de conclure que
l’augmentation brutale de Ma visible dans la figure IV.IV.14 précédente à partir de pH 5.8
sans ajout de sels apparaît à des pH plus forts lorsque la concentration en sel augmente. Il faut
donc tenir compte de l’effet couplé du pH qui est responsable du nombre totale de charges et
de la force ionique qui écrante les charges présentes.
Le tracé de Ma en fonction de Ra en échelle log-log pour les différents pH et forces ioniques
permet d’obtenir une droite avec une pente de l’ordre de 2.3.
Les agrégats dilués et les gels formés à pH 7 et à différentes forces ioniques fixées8 et pour
différentes concentrations en protéine ont une structure autosimilaire caractérisée par une
dimension fractale de 2. L’évolution de la masse molaire apparente avec le rayon apparent
s’écrit : fDaa RaM ⋅= où a est un préfacteur qui est relié à la densité locale du système. A
pH 7 lorsque la force ionique augmente le préfacteur a augmente indiquant une densification
locale.
Nous avons également vu que lorsque le pH diminue sans ajout de sels il y a aussi
densification locale des systèmes in-situ.
pH6 pH6.5 pH7 pH8 pH9
SLS
Turbidimétrie
a
b
Chapitre IV. Agrégation thermique de la β-lactoglobuline
79
A une concentration donnée, la croissance des agrégats est due à une augmentation de la force
ionique ou à une diminution du pH. La croissance est couplée à une densification et donc à
une augmentation de a d’où l’obtention d’une pente plus importante.
IV.4-Influence de la concentration en protéine sur l’hétérogénéité des systèmes suivant le pH et la force ionique
L’effet de la concentration en protéine et de la force ionique a été étudié pour les
différents pH (figure IV.IV.19).
CNaCl (mol/L)
0.00 0.05 0.10 0.15 0.20 0.25
Ma
(g/m
ol)
104
105
106
107
108
109
1010
50g/L100g/L
20g/L
CNaCl (mol/L)
0.00 0.04 0.08 0.12 0.16 0.20
Ma
(g/m
ol)
104
105
106
107
108
109
1010
50g/L100g/L
20g/L
CNaCl (mol/L)
0.00 0.02 0.04 0.06 0.08 0.10 0.12
Ma
(g/m
ol)
104
105
106
107
108
109
1010
50g/L100g/L
20g/L
CNaCl (mol/L)
0.00 0.01 0.02 0.03 0.04
Ma
(g/m
ol)
105
106
107
108
109
1010
50g/L100g/L
20g/L
Figure IV.IV.19 : Dépendance de Ma en fonction de la concentration en NaCl pour des systèmes formés à 80°C à 100g/L, 50g/L et 20g/L, et pour différents pH (8, 7, 6.5 et 6)
pH6.5 pH6
pH8 pH7
Chapitre IV. Agrégation thermique de la β-lactoglobuline
80
Pour les pH 8, 7 et 6.5, à CNaCl fixée Ma augmente lorsque la concentration en protéine
diminue et diverge mais à une concentration en NaCl qui diminue lorsque la concentration
diminue. En augmentant la concentration en protéine (figure IV.IV.16), les interactions
électrostatiques répulsives présentes deviennent de plus en plus importantes ce qui fait
diminuer Ma.
A pH 6, la faible influence de la concentration en protéine est due aux faibles interactions
électrostatiques déjà constatées sans ajout de sels (figure IV.IV.16).
Les valeurs de Ma en fonction de Ra pour les différents pH, concentrations en protéine et
concentrations en sels sont représentées sur la figure IV.IV.20.
Ra (nm)
101 102 103
Ma
(g/m
ol)
106
107
108
109
1010
Figure IV.IV.20 : Dépendance de Ma avec Ra des systèmes formés à différentes forces ioniques et différentes concentrations en protéine et à différents pH. Les symboles sont les mêmes que ceux de la figure IV.IV.18. La pente de la droite est de 2.3.
Le même comportement est observé pour les trois concentrations.
IV.5-Visualisation des hétérogénéités formées en microscopie confocale pour des gels formés à 100g/L suivant la force ionique et le pH
Précédemment nous avons vu que lorsque la concentration en sels augmente ou que le
pH diminue, les systèmes deviennent de plus en plus hétérogènes. Pour permettre de
visualiser cette hétérogénéité des images en microscopie confocale ont été réalisées : (a) pour
des gels formés à 100g/L à des pH compris entre de 5.8 et 5.3 sans ajout de sels et (b) pour
des gels formés à 100g/L à pH 7 et pour différentes concentrations en NaCl (0.15, 0.2 et
0.3mol/L).
Chapitre IV. Agrégation thermique de la β-lactoglobuline
81
La concentration en rhodamine (marqueur utilisé) est la même pour tous les systèmes et vaut
5.5ppm. Nous nous sommes assuré que l’ajout de rhodamine n’influence la structure des gels
obtenus en faisant varier la concentration en rhodamine. Les conditions de mesures sont
identiques pour les différentes images afin qu’elles soient comparables.
a-Gels formés sans ajout de sels
pH 5.3 pH 5.5 pH 5.6 pH 5.7 pH 5.8
(a) (b) (d) (c) (e)
Figure IV.IV.21 : Images de microscopie confocale réalisées sur des gels de β-lactoglobuline formés à 100g/L à différents pH. La taille des images est de 40x40µm.
Sans ajout de sels, les gels formés à 100g/L à pH 5.8 ont une longueur de corrélation
inférieure à 1µm et sont homogènes à l’échelle de la microscopie confocale. Une faible
variation du pH conduit à l’apparition d’hétérogénéités de plus en plus marquées lorsque le
pH passe de 5.7 à 5.3. De plus, le contraste augmente également lorsque le pH diminue.
A ce stade aucune différence de structure de gels n’est visible lorsque le pH diminue : on ne
peut pas conclure à l’apparition brutale de gels particulaires pour les pH inférieurs à 6 comme
l’on fait de nombreux auteurs2,3,9. Notre conclusion est que des systèmes de plus en plus
hétérogènes sont formés progressivement lorsque le pH diminue.
b-Influence de la force ionique à pH 7
L’ajout de sel permet d’obtenir également des systèmes plus hétérogènes. Des images
ont été réalisées pour des gels formés à 100g/L à pH 7 pour différentes concentrations en
NaCl : 0.15, 0.2 et 0.3mol/L (figure IV.IV.22).
Chapitre IV. Agrégation thermique de la β-lactoglobuline
82
Figure IV.IV.22 : Images de microscopie confocale réalisées sur des gels de β-lactoglobuline formés à 100g/L à différentes forces ioniques à pH 7. La taille des images est de 40x40µm. A 0.15mol/L, le gel formé a une longueur de corrélation de 500nm (figure IV.IV.17), il est
donc homogène à l’échelle de la microscopie confocale. A partir de 0.2mol/L les gels
deviennent hétérogènes à l’échelle microscopique (Ra supérieur à 1µm). L’augmentation de la
longueur de corrélation est visible lorsque la concentration en sels passe de 0.2 à 0.3mol/L.
L’hétérogénéité est plus marquée lorsque le pH passe de 5.8 à 5.3 que lorsque la force ionique
augmente de 0.15mol/L à 0.3mol/L. Il faut donc ajouter davantage de sels pour voir de plus
grandes hétérogénéités.
L’augmentation brutale au-delà de 0.2M visible sur la figure IV.IV.18 n’est pas une
divergence mais une augmentation progressive de Ma.
V-Cinétiques d’agrégation et de gélification
V.1-Influence de la température
Une étude en diffusion statique de la lumière a été réalisée pour suivre la cinétique
d’agrégation et de gélification de solutions de la β-lactoglobuline à 100g/L pour des pH
supérieurs ou égaux à 6 (pH pour lesquels les gels sont transparents). Dans la figure IV.V.23
un exemple de cinétique est donné pour une solution à pH 6.8. Les mêmes essais ont été
menés pour les pH 7, 6.5 et 6.2.
0.15M 0.2M 0.3M
Chapitre IV. Agrégation thermique de la β-lactoglobuline
83
(t-t0)(s)
101 102 103 104
Ma
(g/m
ol)
105
aT.(t-t0)
102 103 104
Ma
(g/m
ol)
105
Figure IV.V.23 : Variation de Ma en fonction du temps à trois températures (67, 70 et 75°C) pour un gel formé à pH 6.8 et 100g/L Obtention d’une courbe maîtresse en utilisant comme température de référence 67°C Il s’agit de suivre l’évolution de la masse molaire apparente Ma en fonction du temps à un
angle fixé, ici 30°. Les systèmes sont suffisamment homogènes pour que l’intensité diffusée
des systèmes n’ait pas de dépendance angulaire. Trois températures ont été choisies : 75, 70 et
67°C.
Quelle que soit la température, lorsque les solutions sont chauffées, Ma augmente rapidement
car il y a formation d’agrégats. La concentration et la taille des agrégats augmentent ensuite
ce qui fait augmenter Ma. Quelle que soit la température, Ma se stabilise ensuite après
l’apparition de fluctuations lentes caractéristiques de la formation d’un gel. Les interactions
deviennent plus rapidement importantes ce qui fait stagner Ma.
La forme des courbes est la même et la structure finale (Ma) des gels ne dépend pas de la
température. Il est possible d’obtenir des courbes maitresses par des décalages horizontaux :
la température est donc uniquement un paramètre cinétique. Une augmentation de la
température augmente seulement la cinétique d’agrégation et de gélification.
Les expériences menées aux autres pH donnent des résultats similaires.
V.2-Influence du pH sur la cinétique de gélification et d’agrégation Une étude plus approfondie de l’influence du pH sur la cinétique d’agrégation et gélification a
été faite sur des gels de β-lactoglobuline à 100g/L à une température fixée à 75°C pour des pH
compris entre 8 et 6 (figure IV.V.24).
67°C
70°C
75°C
t(s) aT.t(s)
Chapitre IV. Agrégation thermique de la β-lactoglobuline
84
(t-t0)(s)
102 103
Ma
(g/m
ol)
105
106
Figure IV.V.24 : Evolution de la masse molaire apparente Ma en fonction du temps pour des solutions formées à différents pH à 100g/L et chauffées à 75°C La forme des courbes est la même pour tous les pH comme discuté précédemment. On peut
définir le temps de gélification (tg) comme le temps à partir duquel ces fluctuations
apparaissent. Il semble que tg dépend peu du pH.
V.3-Influence de la concentration Comme précédemment la cinétique d’agrégation et de gélification a été suivie dans le
temps à une température de 75°C pour des solutions de protéines à différentes concentrations
(figure IV.V.25).
pH8
pH7
pH6.8
pH6.5
pH6.3
pH6.2 pH6.1
pH6
t(s)
Chapitre IV. Agrégation thermique de la β-lactoglobuline
85
(t-t0)(s)
102 103 104
Ma
(g/m
ol) 105
Figure IV.V.25 : Evolution de la masse molaire apparente Ma en fonction du temps pour des solutions chauffées à 75°C à différentes concentrations (100 à 10g/L) à pH 7. Il est important de noter qu’à pH 7 Cg est de l’ordre de 90g/L donc un gel stable n’est formé
qu’à 100g/L et les autres concentrations choisies ne permettent que de former des agrégats.
Seules aux fortes concentrations (100 et 85g/L), les interactions électrostatiques deviennent
plus importantes et dominent l’accroissement d’où l’obtention d’un maximum. Pour les plus
faibles concentrations la cinétique étant plus lente l’état final n’a pas été atteint et Ma continue
d’augmenter.
10g/L
20g/L
100g/L
85g/L
40g/L
t(s)
Chapitre IV. Agrégation thermique de la β-lactoglobuline
86
Références bibliographiques : (1) Stading, M.; Langton, M.; Hermansson, A.-M. Journal of Rheology 1995, 39, 1445-
1450. (2) Stading, M.; Hermannsson, A. Food Hydrocolloids 1990, 4, 121-135. (3) Langton, M.; Hermannsson, A. Food Hydrocolloids 1991, 5, 523-539. (4) Baussay, K.; Le Bon, C.; Nicolai, T.; Durand, D.; Busnel, J. International Journal of
biological Macromolecules 2004, 34, 21-28. (5) Renard, D.; Lefebvre, J. International Journal of Biological Macromolecules 1992,
14, 287-291. (6) Pouzot, M.; Durand, D.; Nicolai, T. Macromolecules 2004, 37, 614-620. (7) Aymard, P.; Williams, M. A. K.; Clark, A. H.; Norton, I. T. Langmuir 2000, 16,
7383-7391. (8) Pouzot, M.; Nicolai, T.; Durand, D.; Benyahia, L. Macromolecules 2004, 37, 614-
620. (9) Stading, M.; Hermannsson, A. M. Food Hydrocolloids 1991, 5, 339-352.
Chapitre V.
Propriétés rhéologiques linéaires des gels
de β-lactoglobuline
Chapitre V. Propriétés rhéologiques linéaires des gels de β-lactoglobuline
87
I-Influence de la concentration et du pH
L’élasticité des gels thermiques a été caractérisée dans le domaine linéaire par des
mesures des modules de conservation G’ et de perte G’’ à une fréquence de 1Hz.
Ces modules ont été mesurés au cours du temps de chauffage à 80°C pour diverses
concentrations en protéines supérieures à Cg. Le module de conservation obtenu aux temps
longs peut être assimilé au module élastique des gels si la dépendance en fréquence est
négligeable. Nous avons vérifié systématiquement cette dépendance aux temps longs et elle
est très faible. Par ailleurs une étude1 détaillée de la dépendance en fréquence de G’ pendant
la gélification des systèmes a montré qu’elle est faible dès que G’ est mesurable.
La figure V.I.1 montre l’évolution des modules G’ et G’’ pour un système à pH 6 et à 97g/L
(C>>Cg).
t(s)
101 102 103 104 105
G',
G''
(Pa)
100
101
102
103
104
Tem
pér
atur
e (°
C)
20
40
60
80
t(s)
102 103 104 105
G',
G''
(Pa)
0
2000
4000
6000
8000
10000
Figure V.I.1 : Evolution des modules en fonction du temps pour une solution chauffée à 80°C (pH6, 97g/L) : ∆ G’’, ○ G’, □ Température : (a) représentation logarithmique (b) représentation semi- logarithmique
Initialement une forte augmentation des modules est observée lorsqu’un gel est formé suivie
d’un ralentissement progressif de la croissance. En échelle semi-logarithmique (figure V.I.1
b), on observe que G’ continue d’augmenter de façon logarithmique avec le temps. Aux temps
très longs, des déviations de ces comportements sont observées (par exemple dans le cas de la
figure V.I.1 une chute des modules) mais les déviations ne sont pas reproductibles.
a b
Chapitre V. Propriétés rhéologiques linéaires des gels de β-lactoglobuline
88
Pour les faibles concentrations, ces déviations sont observées mêmes pour les temps courts.
Ces mesures ne sont donc pas prises en compte dans la suite de l’étude. La figure V.I.2 donne
un exemple de mesure pour une même solution sur deux essais différents.
t(s)
102 103 104 105
G',
G''
(Pa)
10-1
100
101
102
G' Essai 1G'' Essai 1G' Essai 2G'' Essai 2
Figure V.I.2 : Evolution des modules en fonction du temps pour une solution chauffée à 80°C pour deux essais (pH7, 100g/L). La forme des courbes est différente pour les deux essais alors qu’il s’agit d’une même
solution mesurée deux fois indépendamment. Il est difficile d’avoir des mesures
reproductibles pour les concentrations proches de la Cg.
Pour les temps longs, la structure des gels obtenus ne varie plus alors que les modules
continuent d’augmenter : ceci est visible si l’on suit à la fois l’évolution dans le temps des
modules et de la turbidité pour une même solution. Un exemple est donné dans la figure
V.I.3 pour une solution à 100g/L à pH 7, 0.1M NaCl à 80°C.
Chapitre V. Propriétés rhéologiques linéaires des gels de β-lactoglobuline
89
t(s)
100 101 102 103 104
τ(cm
-1) 10
G' G
" (P
a)
10-1
100
101
102
103
104
tG'G''
t(s)
100 101 102 103 104
τ(cm
-1) 10
G' G
" (P
a)
0
104
2x104
Figure V.I.3 : Evolution des modules et de la turbidité mesurée à 350nm en fonction du temps pour une solution chauffée à 80°C (pH7, 100g/L, 0.1M NaCl) : (a) représentation log-log pour les modules et la turbidité (b) représentation semi-logarithmique pour les modules
En rhéologie, le croisement entre G’ et G’’ définissant la formation d’un gel se situe
autour de 1000 secondes puis le module continue d’augmenter pour les temps longs (figure
VI.I.3 b) indiquant un renforcement du gel.
La turbidité augmente dès le début avant qu’un gel ne soit formé puis un plateau est
obtenu aux temps longs indiquant que la structure finale du gel ne varie plus.
Une comparaison de l’évolution des modules G’ en fonction du temps pour différentes
concentrations en protéine à pH 6 et à pH 5.5 sans ajout de sels est donnée dans la figure
V.I.4.
t(s)
102 103 104 105
G' (
Pa)
100
101
102
103
104
105
85g/L65g/L
150g/L130g/L97g/L
t(s)
101 102 103 104
G' (
Pa)
100
101
102
103
104
105
106
165g/L
100g/L81g/L65g/L
150g/L
226g/L
Figure V.I.4 : Evolution des modules de conservation G’ en fonction du temps pour différentes concentrations en protéine à 80°C sans ajout de sels (a) pH 6 et (b) pH 5.5.
a b
a b
Chapitre V. Propriétés rhéologiques linéaires des gels de β-lactoglobuline
90
Dans les cinétiques, il est important de prendre en compte la mise en température.
Pour les températures inférieures à 70°C, la vitesse d’agrégation est faible, on définit alors un
temps à partir duquel l’agrégation n’est plus négligeable. Ce temps se situe entre 70 et 80
secondes (temps pour atteindre les températures de 70 et de 75°C). Par la suite (y compris
dans les figures V.I.3 et V.I.4 précédentes) nous avons systématiquement retiré ce temps.
Pour des questions de clarté dans les figures suivantes le temps noté t tient compte de ce
temps de mise en température.
Le temps de gel, qui est le croisement entre les modules G’ et G’’, se situe au niveau
de l’augmentation rapide des modules. Quelque soit le pH, le temps de gel diminue et le
module aux temps longs augmente lorsque la concentration augmente mais pour le pH 5.5, le
temps de gel diminue très peu avec la concentration.
Les courbes pour les différentes concentrations en protéine sont similaires à un pH
donné, il est possible d’obtenir des courbes maitresses pour les différents pH par des
décalages horizontaux et verticaux.
Les courbes maitresses sont obtenues en normalisant les modules par la valeur de ceux
obtenues à 100tg et le temps par le temps de gel tg (figure V.I.5).
t/tg
1 10 100
G'/G
' 100t
g
0.0
0.5
1.0
t/tg
1 10 100
G'/G
' 100
t g
10-4
10-3
10-2
10-1
100
Figure V.I.5 : Courbes maitresses obtenues par superposition des modules pour différents pH. (a) représentation lin-log (b) représentation log-log
Comme déjà discuté auparavant on distingue deux régimes de croissance dans le temps. Le
premier est rapide et fortement marqué à tg et correspond à la formation du gel. Le deuxième
est plus lent et correspond à un renforcement du gel. Dans le cas des pH 6 et 5.5
l’augmentation initiale n’est pas visible sur l’échelle semi-logarithmique.
pH 8pH 7pH 6pH 5.5
a b
Chapitre V. Propriétés rhéologiques linéaires des gels de β-lactoglobuline
91
Les décalages horizontaux donnent accès aux temps de gel pour les différents pH (figure
V.I.6).
C (g/L)
80 90 200100
t g (s
)
101
102
103
pH8pH7pH6.5pH6
Figure V.I.6 : Influence de la concentration sur le temps de gel pour différents pH sans ajout de sels.
Pour les pH compris entre 8 et 6, la dépendance de tg avec la concentration est similaire :
celui-ci augmente lorsque la concentration diminue. Pour les fortes concentrations, tg est très
faible et l’agrégation démarre pendant la mise en température. Pour le pH 5.5, pour toutes les
concentrations testées l’agrégation démarre pendant la mise en température, la forme de la
courbe maitresse n’étant pas connu précisément, le temps de gel est mal défini.
Les décalages verticaux représentent la variation de G’ avec la concentration à un t/tg
donné. La dépendance en fréquence de G’ étant faible, G’ peut être assimilé au module
élastique des gels. De plus ce module varie très peu en fonction du temps pour les temps
supérieurs à 10tg. Dans notre cas, nous avons choisi 100tg et ce module élastique est noté Ge.
La dépendance en concentration de Ge pour les différents pH est représentée dans la figure
V.I.7.
Chapitre V. Propriétés rhéologiques linéaires des gels de β-lactoglobuline
92
C (g/L)
50 60 70 80 90 200100
Ge (P
a)
102
103
104
105
pH 7pH 6.5pH 6pH 5.5
pH 8
Figure V.I.7 : Dépendance en concentration du module élastique Ge des gels de protéines pour différents pH sans ajout de sels. A un pH donné, pour des concentrations supérieures à Cg Ge augmente initialement fortement
avec la concentration en protéine. Ceci est liée à l’augmentation de la fraction gel. Pour
C>>Cg la fraction sol devient négligeable. Les gels se renforcent ensuite seulement par une
augmentation de la densité de réticulation. A une concentration donnée, Ge augmente lorsque
le pH diminue.
Kavanagh et al2 ont également suivi l’évolution des modules dans le temps à différentes
concentrations et pour différents pH. A pH 7 les mêmes phénomènes sont observés mais des
modules plus faibles sont mesurés avec une Cg de l’ordre de 120g/L. Des courbes maitresses
sont également mesurées à un pH donné pour les différentes concentrations en protéines. La
dépendance en concentration des modules obtenus à temps longs est similaire pour les
différents pH mais à forte concentration en protéine il diminue lorsque le pH diminue de 3 à 2
puis augmente jusqu’à 7.
II-Influence de la concentration et de la force ionique à pH 7
Une étude de l’évolution de G’ en fonction du temps a été réalisée pour différentes
concentrations en protéine et pour différentes forces ioniques à pH 7. La gamme de forces
ioniques testées est comprise entre 0.003mol/L (sans ajout de NaCl) et 0.3mol/L.
Un exemple d’évolution de G’ en fonction du temps pour différentes concentrations en
protéine à 0.05mol/L de NaCl est présenté dans la figure V.II.8.
Chapitre V. Propriétés rhéologiques linéaires des gels de β-lactoglobuline
93
t(s)
101 102 103 104 105
G' (
Pa
)
10-1
100
101
102
103
104
105
120g/L100g/L80g/L
147g/L
61g/L50g/L45g/L
Figure V.II.8 : Evolution du module de conservation G’ en fonction du temps pour différentes concentrations en protéine à pH 7, 0.05mol/L, 80°C. La forme des courbes est la même que celle discutée précédemment : une augmentation
rapide du module suivie par un ralentissement de la croissance.
Des courbes maitresses sont aussi obtenues de la même façon par normalisation du temps par
le temps de gel et du module par celui obtenu à 100tg (figure V.II.9).
t/tg
1 10 100
G'/G
' 100t
g
0.0
0.5
1.0
t/tg
1 10 100
G'/G
' 100
t g
10-4
10-3
10-2
10-1
100
Figure V.II.9 : Courbes maitresses obtenues pour différentes forces ioniques à pH 7.
Le renforcement visible aux temps longs est plus rapide lorsque la force ionique augmente à
pH 7. Ceci a été également observé précédemment lorsque le pH diminue.
A l’aide de ces courbes, le temps de gel est déterminé en fonction de la concentration en
protéine pour les différentes forces ioniques à pH 7.
0.03M
0.2M0.1M0.05M
0.3M
0.003M
Chapitre V. Propriétés rhéologiques linéaires des gels de β-lactoglobuline
94
C (g/L)
20 30 40 50 60 80 20010 100
t g (s
)
101
102
103
104 0.003M0.03M0.05M0.1M0.2M
Figure V.II.10 : Influence de la concentration sur le temps de gel pour différentes forces ioniques à pH 7
Le tg augmente lorsque la concentration diminue. Il semble que l’ajout de sels accélère la
gélification à une concentration donnée contrairement à une variation de pH. A 0.3M, le
temps de gel est rapide donc difficile à estimer ce qui conduit à une incertitude sur G’ obtenu
à 100tg dans la figure V.II.11.
Le module Ge est tracé en fonction de la concentration en protéine. Pour plus de clarté nous
avons séparé les fortes et les faibles concentrations en sel (figure V.II.11).
C (g/L)
20 30 40 50 60 80 200100
Ge (P
a)
101
102
103
104
105
106
0.003M
0.1M Pouzot et al.
0.03M0.05M0.1M
C (g/L)
20 30 40 50 60 80 200100
Ge
(Pa)
101
102
103
104
105
106
0.1M Pouzot et al.
0.2M0.3M
0.1M
Figure V.II.11 : Dépendance en concentration du module élastique Ge pour différentes concentrations en NaCl à pH 7. Les faibles forces ioniques sont représentées à gauche et les fortes forces ioniques à droite.
Chapitre V. Propriétés rhéologiques linéaires des gels de β-lactoglobuline
95
Lorsque la concentration en protéine augmente le module élastique augmente rapidement
juste au delà de Cg à cause d’une augmentation rapide de la fraction gel. A C>>Cg lorsque la
fraction sol est négligeable, le module suit une loi de puissance avec la concentration.
Pour les concentrations en sels supérieures à 0.05M, Ge suit une loi de puissance sur toute la
gamme de concentrations testée puisque Cg est relativement faible à ces fortes forces
ioniques. La pente de la droite diminue légèrement lorsque la force ionique augmente et passe
de 4.5 à 0.1M à environ 4 à 0.3M NaCl.
Pour les forces ioniques inférieures à 0.05M compte tenu des fortes répulsions électrostatiques
Cg est importante. L’augmentation initiale de Ge est observée à des concentrations fortes,
donc pour pouvoir voir une évolution en loi de puissance du module il faut se placer à des
plus fortes concentrations en protéine.
A une concentration forte en protéines, Ge montre un maximum en fonction de la
concentration en NaCl autour de 0.1M NaCl (figure V.II.12).
CNaCl(mol/L)
0.0 0.1 0.2 0.3
Ge
(Pa
)
102
103
104
105100g/L150g/L
80g/L
Figure V.II.12 : Modules élastiques Ge en fonction de la force ionique à pH 7 pour différentes concentrations en protéines (150, 100 et 80g/L).
III-Relation structure-propriétés rhéologiques
Dans le chapitre précédent, nous avons vu qu’une diminution du pH conduit à la formation de
gels de plus en plus hétérogènes mais en conservant la même structure. L’hétérogénéité
augmente rapidement pour des pH inférieurs à 6 et est bien visible en microscopie confocale à
pH 5.5. Par contre la diminution du pH s’accompagne d’une augmentation progressive des
Chapitre V. Propriétés rhéologiques linéaires des gels de β-lactoglobuline
96
modules sur cette gamme de pH. Il est donc difficile de trouver une corrélation entre la
modification de la structure et la variation des modules élastiques.
A pH 7 lorsque la concentration en NaCl augmente jusqu’à 0.1mol/L, Ge augmente pour une
concentration en protéine fixée. A 0.1M NaCl sur la gamme de concentrations en protéine
testée3, le module suit une loi de puissance avec la concentration telle que : 5.4e CG ∞ . Une
étude antérieure3 a été menée et a permis de conclure que le système peut être décrit par un
ensemble de blobs monodisperses fractals interconnectés avec une énergie élastique dominée
par leur énergie de flexion4. L’exposant de 4.5 est cohérent avec des mesures de la dimension
fractale réalisées en diffusion de la lumière. Ce modèle pourrait être applicable pour les fortes
forces ioniques mais il faut tenir compte de la polydispersité des blobs qui est difficile à
quantifier.
Dans le cas des forces ioniques inférieures à 0.1M la longueur de corrélation est inférieure à
20nm et aucune structure fractale n’est observée. Par conséquence, le modèle du gel fractal
n’est pas applicable.
Renard et al5 ont également suivi l’évolution du module élastique avec la concentration à
0.1M NaCl. La pente de la droite obtenue est plus forte (proche de 6) que dans notre étude
mais les modules ont été mesurés pour un même temps de chauffe (1 heure) à 80°C. Or
puisque la cinétique est ralentie lorsque la concentration diminue, les modules mesurés pour
les plus faibles concentrations ne correspondent pas à l’état final. Ceci est d’autant plus
marqué pour les faibles concentrations (proche de Cg) où il est nécessaire de mesurer par
exemple plus de 30h à 17g/L pour atteindre 100tg à 80°C.
Une comparaison a été faite par Ikeda et al6 pour des gels de WPI (composé en majorité de β-
lactoglobuline) sur une faible gamme de concentration en protéine pour trois concentrations
en NaCl (25, 100 et 500mM). Le module élastique suit une loi de puissance avec la
concentration en protéine : à 25, 100 et 500mM NaCl, les exposants de cette loi de puissance
sont 5.4, 2.7 et 3.4 respectivement. L’exposant mesuré à 25mM n’est pas fiable car à cette
force ionique la concentration nécessaire pour atteindre la gélification est grande (de l’ordre
de 80g/L), la dépendance en concentration du module ne peut donc pas être assimilé à une loi
de puissance puisque l’échelle de concentrations exploitable est trop petite. Cependant les
valeurs des modules élastiques obtenues sont proches de nos mesures.
A 100 et 500mM NaCl, les valeurs des modules sont du même ordre de grandeur que nos
mesures. La gamme de concentrations testées étant plus faible dans leur cas, l’exposant de la
loi de puissance est moins fiable.
Chapitre V. Propriétés rhéologiques linéaires des gels de β-lactoglobuline
97
A une concentration donnée en protéine, un maximum de Ge est visible à 0.1M NaCl. Les
auteurs proposent l’explication suivante : autour de cette force ionique la microstructure des
gels est intermédiaire entre une structure fibrillaire et particulaire avec une structure
intermédiaire à 0.1M NaCl.
Verheul et al7 ont également étudié l’influence de la force ionique à pH 7 sur le module
élastique pour des concentrations en NaCl allant de 0.1 à 3M. Le module suit une loi de
puissance avec la concentration avec un exposant indépendant de la force ionique et proche de
4.5 sur une gamme de concentration en protéine comprise entre 30 et 100g/L. A une
concentration fixée en protéine, G’ diminue avec l’augmentation de la force ionique. Cette
diminution de modules est liée à l’apparition de domaines denses observables en microscopie.
Dans notre cas, les images de microscopie confocale présentées dans le chapitre précédent
confirment également la présence de ces domaines denses : nous avons observé que l’ajout de
sels conduit à une augmentation continue de l’hétérogénéité des gels. Le maximum obtenu en
rhéologie ne peut donc pas s’expliquer par l’hétérogénéité des gels. Dans le cas du pH sans
ajout de sels, aucun maximum n’est visible en rhéologie même si comme dans le cas de la
force ionique à pH 7 la baisse du pH conduit à une augmentation progressive de
l’hétérogénéité.
Il est donc difficile d’établir une relation entre les propriétés rhéologiques mesurées et la
formation de systèmes de plus en plus hétérogènes.
IV-Influence de la température sur Ge par l’intermédiaire de rampes de températures
A la fin de chaque essai, des rampes de températures sont effectuées et une
augmentation systématique réversible du module élastique d’un facteur allant de 2 à 5 est
observée lorsque la température passe de 80°C à 20°C indépendamment du pH sans ajout de
sels ou indépendant de la force ionique à pH 7 (figure V.IV.13). Une exception est visible à
pH 5.5 où ce rapport se situe autour de 8.
Un exemple de rampes de températures à pH 8 est donné en figure V.IV.13 pour
quelques concentrations ainsi que le rapport entre le module élastique obtenu à 20°C aux
temps longs et celui obtenu à 80°C.
Chapitre V. Propriétés rhéologiques linéaires des gels de β-lactoglobuline
98
Température (°C)
0 20 40 60 80
G' (
Pa)
103
104
C (g/L)
0 50 100 150 200
Ge
(20
°C)/G
e (8
0°C
)
0
2
4
6
8pH8pH7pH6.5pH6pH5.5pH7 0.03MpH7 0.05MpH7 0.1MpH7 0.2MpH7 0.3M
Figure V.IV.13 : (a) Rampes de températures réalisées sur des gels formés en fin de cinétique à pH 8 et pour quelques concentrations en protéines. La vitesse des rampes est de 5°C/min. Les montées en températures (de 80 à 5°C) sont représentées par des symboles ouverts et les descentes (de 5 à 80°C) par des symboles fermés. (b) Rapport entre les modules élastiques obtenus pour les temps longs mesurés à 20°C et ceux mesurés à 80°C pour différents pH sans ajout de sels et pour différentes forces ioniques à pH 7.
Quelque soit le stade du processus de gélification, le système est formé de liens
réversibles et irréversibles. Lorsque la température passe de 80°C à 20°C le module augmente
il y a donc un renforcement des gels formés par l’intermédiaire de liaisons hydrogène
puisqu’elles sont favorisées par une diminution de température. La structure des gels reste la
même durant ce refroidissement puisque l’intensité de la lumière diffusée des gels ne varie
plus.
Par ailleurs les différentes vitesses de rampes de températures testées n’influencent pas les
valeurs des modules.
136g/L
121g/L
115g/L
108g/L
a b
Chapitre V. Propriétés rhéologiques linéaires des gels de β-lactoglobuline
99
Références bibliographiques : (1) Pouzot, M.; Nicolai, T.; Benyahia, L. J. Rheology 2004, 48, 1123-1134. (2) Kavanagh, G. M.; Clark, A. H.; Ross-Murphy, S. B. Langmuir 2000, 16, 9584-9594. (3) Pouzot, M.; Nicolai, T.; Durand, D.; Benyahia, L. Macromolecules 2004, 37, 614-
620. (4) Shih, W.; Shih, W. Y.; Kim, S.; Liu, J.; Aksay, I. A. Physical Review A 1990, 42,
4772-4779. (5) Renard, D.; Axelos, M. A. V.; Lefebvre, J. In Food macromolecules and colloids;
Dickinson, E.; Lorient, D., Eds.; The Royal society of chemistry.: Cambridge, 1995; pp 390-399.
(6) Ikeda, S.; Foegeding, E. A.; Hagiwara, T. Langmuir 1999, 15, 8584-8589. (7) Verheul, M.; Roefs, S. P. F. M. Journal of Agricultural and Food Chemistry 1998, 46,
4909-4916.
Conclusion
Conclusion
Cette thèse comportait deux objectifs principaux. Le premier objectif visait l’étude
structurale des agrégats dilués et des systèmes in-situ (agrégats en solution et gels) issus de la
dénaturation thermique de solutions de β−lactoglobuline suivant le pH sans ajout de sels.
Une fois la structure caractérisée et mieux comprise, l’objectif était d’étudier l’effet couplé du
pH et de la force ionique sur les systèmes in-situ.
Le second objectif consistait à étudier les relations existantes entre la structure des gels et
leurs propriétés mécaniques aux faibles déformations. Pour cela, nous avons tenté de corréler
la dépendance en concentration du module élastique à la structure des gels pour différents pH
sans ajouts de sel et en variant la force ionique à pH 7.
La protéine native a été caractérisée en diffusion de la lumière pour quantifier les
interactions électrostatiques présentes suivant le pH sans ajout de sels. Les paramètres
importants dans ce cas sont la masse molaire apparente Ma qui tient compte des interactions
présentes et le rayon hydrodynamique apparent Rha qui rend compte à la fois des interactions
et de la friction. Ma et Rha augmentent lorsque le pH diminue car la charge globale diminue
conduisant à la réduction des répulsions électrostatiques. Pour les pH loin du pI (pH 8, 7 et
6.5) Ma diminue lorsque la concentration augmente due à l’augmentation des répulsions
électrostatiques. Pour les pH intermédiaires (pH 6 et 5.5), la masse molaire apparente ne
dépend pas ou très peu de la concentration à cause de la compensation des interactions
répulsives et attractives. Enfin, pour le pI (5.2), les interactions deviennent attractives, Ma
augmente donc continuellement lorsque la concentration augmente. La dépendance de Rha
avec la concentration est la même que celle de Ma sauf aux fortes concentrations où la friction
domine et conduit donc toujours à une augmentation de Rha.
La protéine existe sous la forme d’un mélange monomère-dimère en équilibre. En augmentant
le pH, l’équilibre se déplace vers le dimère.
La protéine native est instable dans une zone de pH qui se situe entre les pH 5.5 et 4.5.
Les valeurs exactes des pH qui délimitent cette zone dépendent des conditions expérimentales
(concentration, temps d’agitation, lots…). Dans cette zone, à température ambiante, la
solution devient opaque et des précipités sont formés. Cette précipitation est liée à une
agrégation de la protéine pour des températures bien inférieures aux températures de
dénaturation. Une augmentation de la température accélère ce processus d’agrégation. Un
protocole de préparation a été mise au point et permet l’obtention de solutions stables pour
une durée de temps qui dépend du pH et de la concentration. Les précipités donc les agrégats
formés dans cette zone de pH se redispersent complètement si le pH est ajusté au-delà de 6 ou
en dessous de 3.5.
Nous avons montré que la structure des agrégats de β-lactoglobuline formés à faible
force ionique est indépendante du pH. Des agrégats sont formés au dessus d’une
concentration critique d’association (CCA) qui augmente lorsque le pH augmente. La taille de
ces agrégats reste constante jusqu’à 30g/L. A partir d’une concentration critique notée Cg, un
gel est formé. Les agrégats ont une structure autosimilaire caractérisée par une dimension
fractale proche de 1.7 quelque soit le pH sans ajout de sels. Pour les pH inférieurs à 5.8, les
agrégats précipitent. Aux concentrations inférieures à CCA, il y a une dénaturation
irréversible de la protéine sans formation de grands agrégats mais des oligomères sont formés.
Les systèmes in-situ sont caractérisés par deux paramètres déterminés en diffusion de
la lumière et en turbidimétrie : la masse molaire apparente Ma qui est inversement
proportionnelle à la compressibilité osmotique et qui caractérise l’amplitude des fluctuations
de concentrations et le rayon apparent Raaa qui caractérise la longueur de corrélation et
représente la distance au-delà de laquelle le système est homogène. Ma augmente fortement
lorsque le pH diminue en se rapprochant du pI ou lorsque la force ionique augmente. Cette
forte augmentation de Ma s’accompagne d’un changement de l’aspect visuel des gels qui
deviennent très opaques sur une étroite gamme de pH ou de force ionique. Cependant, la
forme du facteur de structure reste la même et tous les gels ont une structure autosimilaire
caractérisée par la même dimension fractale de 2 (pour des distances inférieures à Ra).
La longueur de corrélation augmente et passe de 20nm pour les gels transparents à
1µm pour les gels turbides. La microscopie confocale montre que l’hétérogénéité continue
d’augmenter si le pH diminue ou si la force ionique augmente davantage. La caractérisation
de l’hétérogénéité par la turbidimétrie (pour les pH inférieurs à 5.8 sans ajout de sels ou pour
les forces ioniques supérieures à 0.2M à pH 7) n’est alors plus possible.
Cette forte augmentation de l’hétérogénéité des gels ne peut pas être expliquée par les
structures des agrégats formés puisqu’elles sont identiques. On peut supposer que des grandes
fluctuations de concentrations, voir des micro-séparations de phase induisent des fortes
hétérogénéités qui sont figées par la gélification. Ceci peut expliquer la présence de domaines
denses visibles en microscopie confocale.
Nous avons également mené une étude systématique des propriétés rhéologiques
linéaires des gels formés d’abord suivant le pH sans ajout de sels, puis suivant la force ionique
à pH 7. Le module élastique des gels augmente fortement lorsque la concentration en protéine
augmente. Lorsque la fraction sol est négligeable c’est-à-dire pour des concentrations très
supérieures à Cg, le module suit une loi de puissance avec la concentration. En diminuant le
pH de 8 à 5.5 sans ajout de sels, le module élastique augmente continuellement tandis qu’en
fonction de la force ionique à pH 7 un maximum est observé au voisinage de 0.1mol/L NaCl.
Lorsque le pH diminue en se rapprochant du pI ou que la force ionique augmente à pH 7
l’hétérogénéité des systèmes in-situ augmente progressivement alors que la dépendance en
concentration du module élastique n’est pas la même. Il n’est donc pas possible de corréler la
variation du module élastique avec l’apparition d’hétérogénéités.
Notre principale conclusion dans le cas des gels est qu’une faible variation des
modules élastiques avec la force ionique ou le pH s’accompagne de fortes variations des
hétérogénéités. Ces hétérogénéités apparaissent de façon progressive par diminution du pH
sans ajout de sels ou par augmentation de la force ionique à pH 7. La transition entre la
formation de gels fibrillaires et de gels particulaires est donc progressive. Il n’y a pas de
corrélation claire entre la structure et les modules élastiques des gels.
Perspectives de recherche
Ce travail de thèse a permis de quantifier la structure à la fois des agrégats dilués en
fonction du pH et des gels de β−lactoglobuline en fonction du pH et de la force ionique à pH
7. L’étude des systèmes in-situ montre qu’il n’y a pas de corrélation claire entre les
hétérogénéités qui apparaissent pour des pH proches du pI ou aux fortes forces ioniques et les
propriétés rhéologiques linéaires des gels de β-lactoglobuline.
Les systèmes turbides ont été caractérisés via la turbidimétrie, cette technique nécessitant la
connaissance préalable du facteur de structure. Des études précédentes sur des agrégats et des
gels turbides de β-lactoglobuline en fonction de la force ionique à pH 7, à différentes forces
ioniques et différentes concentrations ont conduit à un facteur de structure de la forme
12a
2
3
Rq1)q(S
−
⋅+= pour toutes les valeurs de q, ce qui implique une Df égale à 2. Les
ajustements théoriques de notre étude sont en accord avec un facteur de structure de cette
forme. Il serait intéressant d’utiliser la diffusion multiple de la lumière pour mesurer ce
facteur de structure en fonction du pH afin de vérifier si les ajustements sont en accord.
Nous avons également montré l’existence d’une concentration critique d’association CCA qui
est la concentration minimale pour former des agrégats. Aux concentrations inférieures à la
CCA, des monomères dénaturés sont formés ainsi que des oligomères, ces derniers étant
favorisés aux plus forts pH. Des études en électrophorèse capillaire permettraient de mettre en
évidence quels types de liens sont présents dans ces structures.
Pour des pH inférieurs à 5.8 sans ajout de sels ou à des fortes forces ioniques, il n’a pas été
possible de déterminer la longueur de corrélation par la turbidimétrie. Cependant la
microscopie confocale via des programmes de calcul permettant de déterminer les fonctions
de corrélation de paire pourrait permettre d’estimer des longueurs de corrélation plus grandes
que le µm donc associées à des pH proches du pI ou aux très fortes forces ioniques. Avec
cette technique il serait ainsi possible de quantifier la polydispersité des systèmes.
D’une façon plus générale, il serait intéressant de mener les mêmes types d’études
(structurales, rhéologiques et en SEC) pour les pH inférieurs à 3.5 que ce soit sur les agrégats
dilués ou sur les systèmes in-situ.