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Chapitre 4 PROTECTION THERMIQUE DES PAROIS POREUSES PAR TRANSPIRATION D'UN LIQUIDE

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Chapitre 4

PROTECTION THERMIQUE DESPAROIS POREUSES PAR

TRANSPIRATION D'UN LIQUIDE

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Le refroidissement des parois poreuses par effusion de gaz frais peut être optimisé par

utilisation de la chaleur latente de changement d'état du fluide réfrigérant. Un liquide est

injecté à travers un matériau poreux, lui-même en contact avec un écoulement pariétal d'air

chaud. Au sein du matériau poreux, se produit le changement de phase liquide-vapeur du

réfrigérant. Ce procédé de protection thermique est appelé transpiration.

Les problèmes de stabilité de l’interface liquide-vapeur sont relativement délicats. Ils

font l’objet de notre premier paragraphe par l'intermédiaire d'une étude bibliographique. Par la

suite, une étude expérimentale du procédé de transpiration est menée. Il s'agit en particulier

d'en étudier la stabilité et de comparer l'efficacité de la transpiration avec celle de l'effusion

d'air frais. Enfin, les bilans de masse et d'énergie concernant les parois poreuses refroidies par

transpiration sont présentés ainsi que les résultats de simulations des transferts de masse dans

la couche limite pariétale.

4.1. Etude bibliographique

Les travaux sur la transpiration d’un fluide à travers un matériau poreux ont

particulièrement portés sur la stabilité de l'interface liquide-vapeur. En effet, toute

perturbation de pression, de température ou de débit de réfrigérant entraîne un déplacement de

l'interface jusqu'à l'extérieur du matériau poreux. Koh et al. (1970) ont qualitativement mis en

évidence la raison des instabilités rencontrées. Considérons le système décrit sur la figure 4.1.

Fig. 4.1 : Système considéré.

∆P

L -

S -

vapeur, (ρv)v

liquide, (ρv)l

Tw, Pe

interface liquide-vapeur, Psat, Tsat

Tr , Pr

x2

réserve de liquide

plaque poreuse

0 -

Flux thermique incident, q

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Un écart de pression est imposé entre les deux côtés d'une paroi poreuse et un débit de

fluide la traverse. La face aval de la plaque poreuse est à une température Tw, supérieure à la

température de saturation (à la pression Pe) du fluide injecté. Le fluide entre sous forme

liquide par la face amont, change d'état à l'intérieur de la plaque poreuse et sort sous forme de

vapeur.

Selon la loi de Darcy, le gradient de pression est proportionnel à la vitesse et à la

viscosité dynamique du fluide traversant le milieu poreux. Or la vitesse est beaucoup plus

élevée en phase vapeur qu'en phase liquide. Puisque la viscosité dynamique varie dans des

proportions moindres que la vitesse, la perte de charge correspondant à un débit massique

donné est plus faible en phase liquide qu'en phase vapeur. Cette constatation qualitative

permet à Koh et al. (1970) d'expliquer les mécanismes qui engendrent le déplacement

irrémédiable de l'interface hors du milieu poreux. A titre d’exemple, regardons l’effet d’une

perturbation de pression, puis de flux thermique incident, sur la position de l’interface liquide-

vapeur.

Effets d’une perturbation de la pression amont

Si l'on impose à la pression amont une augmentation finie (de type échelon), le débit

massique de réfrigérant augmente et la température de la paroi diminue. L’interface liquide-

vapeur se déplace donc vers l’aval et, à l’intérieur du matériau poreux, une partie de la vapeur

est remplacée par du liquide. Ceci entraîne une augmentation du débit massique afin de

maintenir les pertes de charges constantes (l'écart de pression amont-aval étant imposé). Cette

augmentation de débit provoque une amélioration de la protection thermique de la paroi et

donc, à nouveau, le déplacement du front d’évaporation vers l’aval. Le processus se répète

jusqu’à ce qu’il n’y ait plus que du liquide dans le matériau poreux.

Effets d’une perturbation du flux thermique incident

Suite à une augmentation du flux thermique incident, l’interface liquide-vapeur se

déplace vers l'amont. Ce déplacement entraîne une augmentation des pertes de charges par

unité de masse et donc une diminution du débit massique de fluide. Cette diminution de débit

provoque à nouveau le déplacement de l’interface qui se répète jusqu'à ce que le front

d'ébullition atteigne le réservoir de liquide.

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A noter que les différences de pertes de charge entre les phases liquide et vapeur ont

moins d'influence aux hautes températures (lorsque l'on se rapproche du point critique). En

effet, la différence entre les caractéristiques de phases vapeur et liquide diminue (notamment

le rapport ρl/ρv).

4.1.1. Etude analytique de la transpiration

Luikov et al. (1975a et 1975b), Rubin et Schweitzer (1972) et El Masri (1983) ont

résolu analytiquement les équations régissant l'écoulement du réfrigérant en vue d'étudier

principalement la stabilité du système de transpiration. Le système (figure 4.1) est considéré

monodimensionnel et l'interface liquide-vapeur plane. De plus, il y a équilibre thermique entre

le fluide et la matrice solide (le système milieu poreux + fluide est alors traité comme un

continuum, caractérisé par une conductivité thermique équivalente λeq). Enfin, les propriétés

du fluide sont considérées constantes dans chaque phase. Les équations (4.1) à (4.3) régissent

les transferts de masse, de quantité de mouvement et de chaleur dans les phases liquide et

vapeur :

∂ρ∂

v

x20= (4.1)

ρ ∂∂

µ ∂∂

v

t Kv

P

x+ = −

2 (4.2)

( ) ( )ρ ∂∂

ρ ∂∂

∂∂

λ ∂∂

cT

tc v

T

x x

T

xp eq f p f eq+ =2 2 2

(4.3)

avec (ρ cp)eff = (1- ϕ) ρs cps + ϕ ρf cpf

où ϕ est la porosité ; l'indice eq correspond au milieu unique équivalent phase solide +

phase fluide et les indices s et f aux phases solide et fluide (liquide ou vapeur). v est la vitesse

de filtration du fluide.

Les conditions aux limites à l'interface liquide-vapeur sont données par la conservation

de masse et d'énergie et l'équilibre thermodynamique liquide-vapeur :

( ) ( ) ( ) ( ) ( )ρ ρ ϕ ρ ρv t v tdS

dtv l l v= − − (4.4)

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dT1&Cl--

h dS

&2=q

aTv =

&2Pl CCP --v1)~v

dt(4-V

T1 = TV = f (P,,s (4.6)

S est la position de l’interface, Ah, l’enthalpie de changement de phase liquide-vapeur ;

les indices 1 et v correspondent aux phases liquide et vapeur.

Conditions aux limites sur la surface supérieure du milieu poreux

Sur la face supérieure de la plaque, sont envisagés les cas de température de paroi

imposée (Rubin et Schweitzer 1972), flux imposé (Rubin et Schweitzer 1972 et Luikov et al.

1975a et 1975b) et de température à l’infini imposée (El Masri 1983).

Le système étudié par El Masri (1983) est représenté sur la figure 4.2. Le flux de

chaleur reçu par la plaque est de nature convective. Sur la face aval de la plaque poreuse

existe un écoulement pariétal d’air à température T,, supérieure à la température de saturation

du réfrigérant à la pression P,. Cette configuration permet de coupler les phénomènes

thermiques et hydrodynamiques dans la plaque et dans la couche limite pariétale.T

Limite d’ébullition -/

nt de gaz chaud

Fig. 4.2 Profil de température dans une section de la plaque poreuse (El Masri 1983).

L’auteur fait l’hypothèse d’une relation linéaire entre le flux de chaleur auquel est

soumise la paroi (quantifié par le nombre de Stanton) et le taux d’injection. Pour cela, il prend

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en compte le taux d'injection critique Fcrit, au de là duquel se produit le décollement de la

couche limite thermique :

St

St

F

Fcrit01= − (4.7)

Méthode de détermination de la stabilité

Les critères de stabilité d’un système de transpiration diffèrent d’un auteur à l’autre

sans qu’il soit possible d’en privilégier un a priori.

Luikov et al. (1975a et 1975b) s’intéressent à l’écoulement en régime permanent du

fluide réfrigérant. Le débit massique, la chute de pression aux bornes de la plaque et les

températures sont calculés en fonction de l'abscisse relative de l'interface l = S/L qui devient

alors le paramètre de l'étude. La condition de stabilité du système est dq

dl< 0 c'est à dire

qu'une augmentation du flux incident doit provoquer un recul l’interface liquide-vapeur. La

limite de stabilité est donc obtenue pour dq

dl= 0.

Dans l’étude de Rubin et Schweitzer (1972), la solution du système d'équations est tout

d'abord déterminée pour le régime permanent avec une condition de température imposée sur

la surface supérieure de la paroi poreuse. Les températures des phases liquide et vapeur sont

des fonctions explicites de l'abscisse, du débit massique et des propriétés du fluide. La

position S de l'interface est déterminée par une équation implicite qui, dans ce cas, n'a qu'une

solution pour 0 < S < L. Dans le cas du régime permanent avec condition de flux imposé, les

solutions pour la température sont obtenues analytiquement et la position S de l'interface est

également solution d'une équation implicite. Mais, dans ce cas, plusieurs solutions peuvent

être trouvées pour 0 < S < L. Afin d'analyser la stabilité du système, les auteurs reviennent à

une formulation en régime transitoire du problème (avec condition de flux imposé) et

introduisent de petites variations de température, débit ou position de l'interface, autour de

solutions établies pour le régime permanent. La réponse du système est alors calculée afin de

déterminer si celui-ci revient à une position d'équilibre ou non.

Pour El Masri (1983), la relation (4.7) permet d’éliminer le flux convectif incident sur

le milieu poreux dans l’équation de bilan d'énergie. La résolution analytique des équations

permet de déterminer, en régime permanent, une position de l’interface, une température de

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paroi, côté chaud, et un débit de fluide dans la plaque. La stabilité des positions d’interface

calculées analytiquement est alors analysée. Le critère de stabilité est WV) > 0

d(&-,) l

Résultats

L’application des critères de stabilité aux solutions du système d’équations (4.1) à

(4.3) permet des discriminer les positions stables du système de transpiration des positions

instables. Des abaques donnant les régions de stabilité sont alors obtenus.

Luikov et al. (1975b) montrent qu’une solution du système d’équations correspond à

un état stable si deux conditions sont respectées : le flux imposé doit être supérieur à une

valeur limite et la conductivité thermique équivalente de l’ensemble milieu poreux-vapeur

limite doit être inférieure à une valeur maximale. Les deux valeurs limites sont exprimées en

fonction d’autres paramètres tels le débit de réfrigérant, la température du liquide dans le

réservoir, l’épaisseur et la perméabilité du milieu poreux... De la même façon, il est également

possible de déterminer un domaine de “fonctionnement sûr” c’est à dire un fonctionnement

pour lequel la température maximale du milieu (en x2 = L) est inférieure à un niveau T, max

admissible par le matériau. Le domaine hachuré sur la figure 4.3 représente la superposition

des deux conditions de stabilité et de sûreté pour T, max = 1000

écoulement d’eau à travers un milieu poreux en acier.

OC et dans le cas d’un

q (W/m2K) ”

Fig. 4.3 Région de stabilité et de sûreté (Luikov et al. 1975b).

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Luikov et al. (1975b) concluent leur étude en estimant que de nombreuses

expérimentations sur le refroidissement par transpiration avec changement de phase liquide -

vapeur se sont révélées instables du fait de l'extrême minceur de la région de stabilité et de

sûreté de tels systèmes.

Rubin et Schweitzer (1972), quant à eux, montrent que si trois positions de l'interface

liquide-vapeur sont possibles en régime permanent, l'une d'entre elles représente un état

instable et les deux autres un état stable. Les situations stables correspondent à une position de

l’interface liquide-vapeur proche de la face aval ou de la face amont du milieu poreux. La

situation correspondant à une interface située au milieu de la plaque est instable. Ce sont les

conditions initiales qui déterminent la position qui sera atteinte par l'interface.

El Masri (1983) étudie la stabilité en fonction d’un « nombre de Péclet modifié », Pe’,

correspondant au produit du nombre de Péclet (Pevc Lpv

eqv=

ρλ

) par le rapport des viscosités

cinématiques de phases liquide et vapeur. Selon la valeur de Pe’, existent une deux ou trois

solutions du système d’équations. S'il n’existe qu’une solution, elle correspond à une position

instable ; s'il en existe plusieurs, une seule correspond à une situation d'équilibre stable.

L'auteur conclut son étude en estimant possible l'obtention d'un système de transpiration

stable.

4.1.2. Aspects expérimentaux

Koh et Del Casal (1967) et Koh et al. (1970) ont étudié expérimentalement le

phénomène de transpiration. Ils proposent une solution "multicouches" pour que le système de

refroidissement soit stable. Une combinaison optimale de couches de matériaux poreux

(nature, épaisseur, nombre...) est déterminée par des considérations qualitatives sur les

équations de transferts masse et de chaleur dans les milieux poreux. Le dispositif expérimental

est représenté sur la figure 4.4. Trois couches sont nécessaires. Le milieu poreux de la partie

centrale doit avoir une forte perméabilité et les plaques externes une faible. Si le front

d'évaporation se situe dans la couche centrale, une petite variation de sa position (due à une

variation de la pression ou du flux thermique incident) a peu d'effet sur les pertes de charges

totales du système car celles-ci se produisent essentiellement au niveau des deux couches à

faible perméabilité. Le débit massique de réfrigérant est donc constant et le système stable.

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T,, pet

vapeur

11 faible perméabilité1

interface liquide-vapeur, P,,, T,,II-forte perméabilité

I

i 1 faible perméabilité 1

L Pr+

+*liquide

Fig. 4.4: Systèmepréconisépar Koh et al. (1970).

L’étude expérimentale du refroidissement par transpiration d’eau d’un système chauffé

par rayonnement est menée dans le cas de deux géométries différentes ; à savoir un disque

plan et un tube. Le modèle du disque plan est décrit sur la figure 4.5. Les observations

stable si le frontexpérimentales confirment les prévisions des auteurs : le système est

d’ébullition est préalablement dans le milieu à forte perméabilité, instab

deux autres milieux.

Ile s’il est dans les

probl

Lampes

1 9plaques poreuses

:n acier inoxydable

Injection de réfrigérant -7HERMOCoUPLES

Fig. 4.5 Cellule porte-échantillon pour un système multicouches Koh et al. (1970).

Comme nous venons de le voir par l’intermédiaire de cette étude bibliographique, les

èmes de stabilité de l’interface liquide-vapeur ont fait l’objet d’une attention particulière

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dans les travaux portant sur le procédé de transpiration. La raison essentielle des instabilités

est la différence de pertes de charges entre le passage d'un débit donné en phase vapeur et

liquide. Dans la présente étude, les conditions expérimentales ne permettront certainement pas

d'atteindre l'ébullition du fluide réfrigérant et les instabilités ne seront alors probablement pas

observables. Cependant, il semblait nécessaire de ne pas omettre ces importants phénomènes

pouvant intervenir lors de la mise en oeuvre d'un procédé de transpiration.

4.2. Refroidissement par transpiration d'eau

Le refroidissement des milieux poreux par transpiration est tout d'abord étudié avec

l'eau comme fluide réfrigérant. Le faible coût, la grande disponibilité ainsi que l'importante

enthalpie de changement de phase liquide-vapeur de ce fluide en font un réfrigérant, a priori,

optimal. Dans un premier temps, une étude numérique préliminaire (Bellettre et al. 1997c et

1998b) est menée de façon à prédire les échanges de quantité de mouvement et de chaleur sur

la face supérieure des parois poreuses lorsque de la vapeur d'eau est injectée dans la couche

limite pariétale. L'étude expérimentale du système de refroidissement par injection de liquide

est ensuite menée. Le dispositif expérimental d’injection est donc préalablement modifié pour

pouvoir assurer l’injection de liquide à travers les milieux poreux.

4.2.1. Prédiction de la protection thermique des milieux poreux par effusion de

vapeur d'eau

Le refroidissement des parois poreuses par transpiration d'un liquide combine

l'absorption par chaleur latente et la protection vis à vis de l'écoulement pariétal chaud par

soufflage de vapeur. Aussi, l'étude numérique, présentée au chapitre 2, est étendue au cas du

soufflage de vapeur d'eau dans une couche limite turbulente d'air. L'objectif est de prédire

l'évolution des coefficients de frottement et nombre de Stanton avec le taux d'injection. Sur la

figure 4.6, est rappelée la configuration de l'étude numérique. La paroi poreuse est à nouveau

modélisée de façon discrète (cf. chapitre 2).

La température de l'écoulement principal est de 200 °C et l'écoulement secondaire est à

100 °C. Cette seconde condition aux limites correspond à une interface liquide-vapeur pour

l'eau sous une pression de une atmosphère.

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Fig. 4.6 Configuration de l'étude numérique.

Les équations régissant les écoulements principal et secondaire sont présentées ci-

dessous. Par rapport à celles présentées au chapitre 1, une équation de bilan (4.8) portant sur

la conservation de la masse de vapeur d'eau est ajoutée et une contribution de la diffusion de

vapeur est intégrée dans le bilan d’énergie (relation (1.9 ter)). Le système d'équations est donc

le suivant :

ρUjxj

=0 (1.7)

( )∂∂

ρ∂∂

∂∂

µ µ∂∂

∂µ µ

∂∂

ρ δ

x jUiU j

P

xi

x jt

Uix j

U jxi

tUlxl

k ij

= − +

+ +

− + −

( ) ( )

2

3

2

3

(1.8 bis)

( )( )

∂∂

ρ ∂∂

λ µσ

∂∂

∂∂

∂∂

x jU j H

x j cp

t

h

H

x jU j

P

x j

x jHv Ha J

= +

+

− −

( )

( ) (1.9 ter)

avec H = C Hv + (1 - C) Ha

Ecoulement d'airU1 = 10 m/s

Ix1 = 1 %Te = 200 °C

Plaque poreuseTw = 100 °C

Injection de vapeur d'eauT = 100 °C

0.2 m

(0,0)

1,27 m

0,3 mx1

x2

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et ( )∂∂

ρ ∂∂xj

UjC xjJ= − ( ) (4.8)

avec J DC

xjc uj= − +ρ ∂

∂ρ ' '

U, H et P sont les valeurs moyennes de la vitesse, de l'enthalpie et de la pression. C est

la valeur moyenne de la fraction massique de vapeur et J est le flux de diffusion de la vapeur

dans l'air. Dans ces équations les propriétés thermophysiques, ρ, µ, cp et λ, sont celles du

mélange air-vapeur d'eau. Elles dépendent de la température et de la concentration en vapeur.

D est le coefficient de diffusion de la vapeur dans l'air et dépend de la température. Hv et Ha

sont respectivement les enthalpies de l'air et de la vapeur : H c dTvoua p voua

T

= ∫0

.

La corrélation double fluctuation de concentration-fluctuation de vitesse est reliée au

gradient de concentration moyen par l'intermédiaire d'un "nombre de Schmidt turbulent", σm :

c u jt

m

C

x j' ' = − ν

σ∂∂

(4.9)

avec σm = 1.

La viscosité turbulente est calculée par le modèle RNG k-ε (relation 1.31) après

résolution des équations de transport pour k et ε (équation (1.28) et (1.29)). Le maillage utilisé

ainsi que les conditions aux limites sur la plaque poreuse sont inchangés par rapport à ceux

décrits au chapitre 2.

Les profils de température, obtenus par la présente étude numérique, sont comparés

pour un même taux d’injection dans le cas d’effusion d’air et de vapeur d’eau (figure 4.7). On

constate une déviation plus importante du profil de température dans le cas d’effusion de

vapeur d’eau.

Par conséquent, il est intéressant de calculer et de comparer les nombres de Stanton

pour l'injection d'air ou de vapeur d'eau. La corrélation intégrale (2.10) est utilisée. Rappelons

qu’elle permet de calculer le nombre de Stanton après intégration des profils numériques de

vitesse et température. Les résultats sont comparés à ceux issus de la bibliographie sur les

couches limites turbulentes avec effusion. Les seuls résultats de la littérature sur l'effusion de

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vapeur d'eau sont les résultats numériques de Landis et Mills (1972). Ils ont étudié l'effusion

de dix espèces chimiques différentes. Ces résultats numériques ont été validés par

comparaison avec des données expérimentales dans le cas d'effusion d'air, d'hélium et de R12.

350

370

390

410

430

450

470

490

0 10 20 30 40 50 60

X2 (mm)

T (K)

vapeur d'eau

air

Fig. 4.7 Profils de température avec effusion d’air ou de vapeur d’eau

(x1 = 1,55 m, F = 0,5 %).

Sur la figure 4.8, les nombres de Stanton, obtenus dans le cas d'injection de vapeur et

dans le cas d'effusion d'air, sont présentés pour différents taux d'injection.

0

0,1

0,2

0,3

0,4

0,5

0,6

0,7

0,8

0,9

1

0 0,5 1 1,5 2 2,5 3

F / St0

St / St0

Landis et Mills (effusion de vapeur)Landis et Mills (effusion d’air)Présente étude (effusion de vapeur)Présente étude (effusion d’air)

Fig. 4.8 Nombres de Stanton avec effusion d’air ou de vapeur d’eau (x1 =1.55 m).

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130

On peut remarquer que le nombre de Stanton avec effusion de vapeur est inférieur à

celui obtenu dans le cas d'injection d'air, particulièrement quand le taux d'injection augmente.

Par ailleurs, on observe que les résultats de cette étude sont proches des résultats de Landis et

Mills (1972) notamment pour des taux d’injection élevés. Les écarts constatés peuvent

s'expliquer par le fait qu'entre 100 °C et 200 °C, la conductivité thermique deux espèces

étudiées sont proches mais non identiques (de 0,025 à 0,032 pour la vapeur d’eau contre 0,033

à 0,038 pour l’air) alors que la corrélation de Whitten et al. (1970) a été établie pour de l’air

sans tenir compte de l’évolution des propriétés thermophysiques.

L’étude de l’évolution du frottement fluide-solide est menée de façon similaire. La

corrélation intégrale (2.9) est utilisée pour calculer les coefficients de frottement. Un écart

important (Bellettre et al. 1997c et 1998b) est trouvé entre les résultats de la présente étude et

ceux de Landis et Mills (1972). Cet écart peut être attribué à la différence des viscosités

dynamiques entre l'air et la vapeur d'eau (environ deux fois plus faible que celle de l'air à

100 °C) qui n'est pas prise en compte dans la corrélation. Ceci entraîne une surestimation des

coefficients de frottement obtenus avec effusion de vapeur. L'utilisation de la corrélation de

Simpson et al. (1969) dans le cas d'injection de vapeur d'eau n'est donc pas licite.

Pour résoudre ce problème, les coefficients de frottement sont déterminés par

l'intermédiaire de la vitesse de frottement ( U C kpτ µ= 1 4 1 2/ / ), qui est calculée sur chaque

élément solide de la paroi poreuse. Les résultats sont portés sur la figure 4.9 et montrent que

nos calculs prennent correctement en compte la décroissance du frottement plus importante

dans le cas d'injection de vapeur que dans le cas d'effusion d'air.

0

0,1

0,2

0,3

0,4

0,5

0,6

0,7

0,8

0,9

1

0 0,5 1 1,5 2 2,5 3

2F / Cf0

Cf / Cf0

Landis et Mills (effusion d’air)Landis et Mills (effusion de vapeur)

Présente étude (effusion d’air)Présente étude (effusion de vapeur)

Fig. 4.9 Coefficients de frottement, x1 = 1,55 m (utilisation des vitesses de frottement Uτ ).

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Cette première étude a donc permis de mettre en oeuvre une méthode pour le calcul

des échanges convectifs et des contraintes de frottement sur la surface aval des milieux poreux

refroidis par transpiration d'eau. Il convient maintenant de quantifier l'augmentation de

l'efficacité du système du fait l’absorption d’énergie par changement de phase liquide-vapeur.

Dans un premier temps, la détermination de l’efficacité est menée expérimentalement puisque

le code utilisé (FLUENT, 1995) ne permet pas la simulation du changement de phase liquide-

vapeur en présence de gaz incondensables.

4.2.2. Etude expérimentale de la transpiration d'eau

L'installation expérimentale, décrite au chapitre 1, est adaptée à l'étude de l'injection de

liquide au travers de parois poreuses. Un nouveau caisson d'injection est notamment conçu.

Installation hydraulique

Les taux d'injection nécessaires pour protéger les parois poreuses par transpiration

d'eau sont, a priori, plus faibles que ceux requis pour l'effusion d'air (El Masri 1983). Du fait

de la faiblesse des débits de réfrigérant, le choix s'est porté sur l'utilisation de la gravité

comme force motrice du liquide. Une réserve d'eau est placée à 3 mètres au-dessus de la

veine. Ceci implique une installation hydraulique de grande taille, schématisée sur la figure

4.10.

L’eau est acheminée par deux flexibles, de diamètres 9/11 et 25/32 mm. Par le plus

petit, sont acheminés de faibles débits pendant les expériences. Le second permet d'alimenter

rapidement le caisson (phase de remplissage) et de purger l’ensemble de l’installation.

Réglage et mesure du débit de liquide

Le débit d'eau est mesuré à l’aide d’un rotamètre (ROSEMOUNT R-2-15-C). Une

courbe d’étalonnage a été préalablement obtenue dans une gamme de 0 à 14 l/h. Le réglage du

débit est effectué par l’intermédiaire d’une vanne pointeau. Elle permet un réglage fin ainsi

qu’une grande stabilité de ce débit. Cette partie de l’installation hydraulique est isolée du reste

de l’installation par une vanne quart de tour.

Caisson d'injection

Une vue en coupe du caisson est présentée sur la figure 4.11. Il est construit en

duralumin et s'insère dans le plancher de la veine d’essais de la soufflerie. Afin de diminuer le

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132

poids du caisson, sa hauteur est minimisée. D'une hauteur de 80 mm, il pèse environ 12 kg

quand il est rempli d'eau. Les plaques poreuses sont fixées sur un plancher intermédiaire pour

rendre possible le "montage multicouches" proposé par Koh et al. (1970). Les milieux poreux

utilisés sont identiques à ceux décrits dans le chapitre 3 (mêmes caractéristiques et mêmes

dimensions 200 x 500 x 3 mm) afin de pouvoir comparer directement l'efficacité de la

transpiration d'eau avec celle de l'effusion d'air.

Fig. 4.10 Installation hydraulique.

Le caisson est muni de deux arrivées d'eau. La plus importante (purge) est munie d'une

vanne quart de tour. Une plaque déflectrice est placée au-dessus de l'autre entrée de manière à

homogénéiser la distribution d'eau dans le caisson. Afin de visualiser l'intérieur du caisson,

deux hublots en verre (PYREX 6 mm) sont placés sur les parois latérales. L'étanchéité du

Cuve

Caisson d'injection

Vanne de purge

Egoût

Ecoulement d'air chaud

Veine d'essais dela soufflerie

Rotamètre

VanneVanne quart

de tour

eaupermutée

3 m

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133

système est réalisée à l'aide de joints en silicone. Le silicone a été choisi pour sa résistance aux

hautes températures (jusqu'à 250 °C).

Fig. 4.11 Schéma du caisson d'injection.

Instrumentation

Les mesures de températures sont effectuées à l'aide de thermocouples (type K,

diamètre 0,1 mm) soudés sur chaque face des parois poreuses (dans le cas d'un montage

multicouches, les deux plaques comportent des thermocouples au-dessus et au-dessous de

chacune d'elles). Le positionnement optimal des thermocouples sera obtenu après les premiers

essais. Dans le caisson, 1 mm en dessous de la plaque poreuse, une mesure de la température

du liquide est effectuée (thermocouple gainé de type K, diamètre 2 mm).

Une prise de pression dans le caisson est située sur une paroi latérale sans hublot. La

vitesse et la température de l’écoulement principal sont mesurées respectivement par un tube

de Pitot et par un thermocouple.

Expérimentation

Des expérimentations ont été effectuées avec un montage de une ou deux plaques

poreuses et diverses combinaisons, entre les trois différentes classes de matériaux poreux, ont

été testées. Cependant, les résultats expérimentaux se sont révélés inexploitables car il n'a pas

été possible d'obtenir une transpiration uniforme de l'eau. Dans toutes les configurations

testées, l'eau traverse les parois en plusieurs endroits spécifiques alors que les autres régions

de la plaque restent sèches, même pour un fort débit d'injection (figure 4.12). L'efficacité et la

stabilité du système n'ont donc pas pu être étudiées.

veine d'essais

parois poreuses

thermocouple

x2

x1

plaque déflectrice

arrivée de liquide(faibles débits)

purge

plancherintermédiaire

prise depression

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zone mouilléew

Fig 4.12 Vue de dessus de lu paroi poreuse mouillée de façon héterogene.

Le problème d’hétérogénéité résulte d’une absence d’étalement de la phase liquide sur

knsemble de la plaque poreuse. C’est un problème de mouillabilité, et plus généralement un

lroblème de surface. Il convient donc de s’y intéresser plus particulièrement.

4.2.3. ~~uillubilité

Différents liquides s’étalent plus ou moins bien sur une surface plane donnée. Ils

“mouillent“ plus ou moins cette surface. L’angle de contact, 8, caractérise le mouillage d’un

liquide sur une paroi (figure 4.13). Il est considéré qu’il y a un bon mouillage lorsque l’angle

de contact est aigu. Si 8 = 0, le liquide mouille parfaitement le solide et une goutte de liquide

s’étale suivant un film fin sur la surface.

1 ,mq............................. * ........ * , . ......... ..s......~.~ ..og............................................: : : : : : : :J : i~~~~:~~::.:,:~.:.:.~ ......................._.f ...... ,_ ..................................

....................................,.., . 5, ...._,A** .&.&_. : .....:.#+y .. <+y

.y,....... ..A. ....vi.-+: ....... :. .c:.:“:.~~,~.~~....:..~ .v ..... ..>...< + ............... .... _ .<.: .-.. Sk<

I e>90° 8 < 9o"

Fig. 4.13 Angle de contact et mouillage (Le Neindre 1993)

La tension superficielle du liquide, 0, est une caractéristique prépondérante dans

l’étude des phénomènes de surface. Elle est définie comme la force de traction, existant à la

surface d’un liquide et qui s’oppose à la dilatation de celle-ci.

Zisman (1963) introduit la notion de tension superficielle critique oc pour prédire le

,mouillage des surfaces par les liquides. Tout liquide dont la tension superficielle est inférieure0

134

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135

à la tension superficielle critique d'une surface mouille celle-ci. Un liquide dont la tension

superficielle est plus basse que celle de l'eau pourra donc mouiller l'acier inoxydable.

Cependant, l’étanchéité du caisson d'injection est réalisée à l'aide de divers joints en silicone.

Or les vapeurs de silicones (polysiloxanes) s'adsorbent très facilement sur les surfaces et sont

très difficiles à désorber. A ce phénomène s'ajoute celui d'une volatilité importante, qui

entraîne une migration aisée et rapide du silicone vers une surface. Au mouillage de l'eau sur

l'acier inoxydable se substitue alors le problème du mouillage de l'eau sur le silicone. Les

angles de mouillage donnés dans la littérature varient de 101 à 104°, c'est à dire que l'eau ne

mouille pas le silicone. Un traitement de surface pour améliorer la mouillabilité de l'eau sur

l'acier inoxydable perdra toute efficacité très rapidement en présence de silicone.

Du fait du non-mouillage de la plaque poreuse par l'eau dû, au moins en partie, à une

"pollution du silicone", et à cause de l'impossibilité de l'élimination du silicone du montage

expérimental, il est apparu nécessaire de remplacer l'eau par un autre liquide. Le choix s'est

porté sur l'éthanol dont la tension superficielle est sensiblement plus faible que celle de l'eau

(23 10-3 N/m contre 73 10-3 N/m à la température ambiante). Ce liquide est retenu pour

l'ensemble de la poursuite de l'étude de la transpiration.

4.3. Refroidissement par transpiration d'éthanol

Dans un premier temps, une étude expérimentale du refroidissement par transpiration

permet de caractériser le système de refroidissement et d'en mesurer l'efficacité. Par la suite,

les calculs de transferts de masse et de chaleur entre le milieu poreux et son environnement

font l'objet d'une étude théorique et numérique.

4.3.1 Etude expérimentale

Le réfrigérant utilisé est un mélange azéotropique d'eau et d'éthanol d'une

concentration volumique en alcool de 95 %. Les limites d'autoinflamation (490 °C sous une

atmosphère) et d'inflammabilité (3,3 % en volume à 20 °C, De Soete 1976) de l'éthanol sont

suffisamment élevées pour ne pas être atteinte lors de l’étude expérimentale du

refroidissement par transpiration. Les caractéristiques thermophysiques de l'éthanol peuvent

être trouvées dans les références suivantes : Dunn et Reay (1978), Eckert et Drake (1972) et

Liley (1985).

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136

Efficacité du procédé de refroidissement par transpiration

L'étude expérimentale est menée sur le banc d'essais initialement prévu pour la

transpiration d'eau. Expérimentalement, on observe que le réfrigérant mouille uniformément

les parois. Les températures de la plaque sont alors mesurées pour différents taux d'injection et

différentes températures d'écoulement pariétal. Dans toutes les configurations étudiées,

l’éthanol n'est pas porté à sa température d'ébullition (78 °C sous une atmosphère). Le présent

système de transpiration s'est révélé stable contrairement aux cas, décrits dans la littérature, où

le réfrigérant est porté à ébullition (paragraphe 4.1). La mise en place d'un "système

multicouches" n'a donc pas été nécessaire. Les premières mesures de température de paroi

mettent en évidence d'une part, une uniformité de la température dans la direction

longitudinale et, d'autre part, un gradient vertical de température inférieur à 1 K. Les parois

poreuses ont donc été instrumentées uniquement sur leurs faces inférieures puisque la

précision des mesures par thermocouples est également de 1 K. Par ailleurs, la différence de

température entre l'éthanol injecté (sous la paroi) et la température de paroi est très faible (2 à

3 K). L'hypothèse d'équilibre thermique entre les phases solide et fluide est donc admise et

l'influence de la surface d'échange interne aux parois poreuses est négligée. Les mesures sont

réalisées pour une seule classe de matériaux poreux (la classe 5).

Sur les figures 4.14 à 4.16 sont portées les températures de paroi mesurées pour des

écoulements potentiels à 10 m/s et de températures comprises entre 100 et 200 °C. Le

comportement du système de refroidissement par transpiration est très différent de celui du

système de protection par effusion d'air. On observe deux régions distinctes (numérotées I et

II) . Pour les très faibles taux d'injection (inférieurs à 0,05 %), la paroi est sèche et chaude,

l'évaporation du réfrigérant se produit dans le caisson d'injection sous la plaque poreuse. Pour

des taux d'injection un peu plus élevés, la paroi est humide et refroidie par le réfrigérant.

L'évaporation se produit alors sur la face supérieure de la paroi. Entre ces deux régions, se

produit une forte chute de la température avec le taux d'injection. L'existence d'une zone de

transition entre les deux régions est due à l'imparfaite horizontalité du plancher de la veine

d'essais. Le réfrigérant pénètre dans le milieu poreux par le "point bas" et une augmentation

du taux d'injection est nécessaire pour que toute la surface de la paroi soit protégée. Une fois

la paroi uniformément protégée, une augmentation du débit de réfrigérant n'apporte aucune

amélioration de la protection de la paroi. Expérimentalement, on observe que la quantité

supplémentaire injectée ne s'évapore pas et s'écoule "en film" sur la paroi. L'épaisseur du film

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137

d'éthanol, mesurée à l'aide d'un système de déplacement micrométrique, n'excède pas 0,4 mm

pour les plus forts taux d'injection présentés sur les figures 4.14 à 4.16.

0

20

40

60

80

100

0 0,03 0,06 0,09 0,12 0,15 0,18 0,21

F (%)

Tw (°C)

I

II

Fig. 4.14 Température de paroi refroidie par transpiration d'éthanol (Te = 100 °C).

0

20

40

60

80

100

120

140

0 0,05 0,1 0,15 0,2 0,25 0,3

F (%)

Tw (°C)

I

II

Fig. 4.15 Température de paroi refroidie par transpiration d'éthanol (Te = 150 °C).

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138

0

20

40

60

80

100

120

140

160

180

0 0,05 0,1 0,15 0,2 0,25 0,3 0,35 0,4

F (%)

Tw (°C)

I

II

Fig. 4.16 Température de paroi refroidie par transpiration d'éthanol (Te = 200 °C).

L'efficacité, η, du système de protection par transpiration peut être quantifié de la

même façon que dans le cas de la protection par effusion d'air :

η = −−

T T

T Tw e

inj e (3.10)

où Tw est la température de paroi et Tinj la température de l'éthanol sous la paroi

poreuse.

L'efficacité en fonction du taux d'injection est représentée sur la figure 4.17 pour les

différentes températures d'écoulement potentiel. Une efficacité proche de celle obtenue par

effusion d'air (environ 97 %) est obtenue pour toutes les températures. Cependant, les taux

d'injection requis pour l'atteindre sont beaucoup plus faibles (de l'ordre de 0,1 % alors que 3 à

5 % sont nécessaires dans le cas d'effusion d'air).

Par ailleurs, plus la température de l'écoulement potentiel est élevée, plus un taux

d'injection important est nécessaire pour atteindre l'efficacité optimale du système. Le débit

d'éthanol évaporé augmente donc avec la température de l'écoulement. Afin d'étudier de façon

plus détaillée ce phénomène d’évaporation, il convient de s’intéresser aux transferts dans la

couche limite pariétale.

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139

0

0,2

0,4

0,6

0,8

1

0 0,1 0,2 0,3 0,4

F (%)

η

Te = 100°C

Te = 150 °C

Te = 200 °C

Fig. 4.17 Efficacité du système de transpiration.

Couche limite turbulente avec effusion de vapeur éthanol

Il s’agit d'étudier expérimentalement le comportement des couches limites turbulentes

en présence d'effusion de vapeur d'éthanol, c'est à dire lorsque la paroi est uniformément

protégée par transpiration. On mesure notamment la concentration massique en vapeur

d'éthanol en fonction de la distance à la paroi. La technique de mesure utilisée est la

chromatographie en phase gazeuse. Son principe repose sur des équilibres d’adsorption-

désorption entre une phase stationnaire emprisonnée dans une colonne et une phase mobile,

constituée d'un gaz vecteur (ici l'hélium) et de l'échantillon à analyser. Les différents

composants de l'échantillon se déplacent plus ou moins vite selon leur adsorption sur la phase

stationnaire. Cette différence d’entraînement des composés permet leur séparation. En fin de

colonne, un détecteur permet mesurer le temps de rétention (temps entre l'instant d'injection

dans la colonne et l'arrivée sur le détecteur) qui caractérise chaque espèce chimique. Le signal

délivré par le détecteur est enregistré en fonction du temps et l’on obtient un

chromatogramme. Ce chromatogramme est une succession de "pics" correspondant à chaque

espèce présente dans l'échantillon injecté. La mesure de l'aire des différents pics permet de

déterminer la concentration de chaque composé.

Le chromatographe utilisé est un appareil de la société MTI (cf. descriptif en annexe VI). Il

s'agit d'un chromatographe portable caractérisé par des temps d'analyse très courts (quelques

dizaines de seconde pour l'analyse d'une substance). Cet appareil est spécialisé dans la mesure

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140

des échantillons gazeux. Il est relié à un tube de prise d'échantillon, d'un diamètre extérieur de

1/16 de pouce, lui-même introduit dans la veine d'essais. L'étalonnage du chromatographe est

présenté en annexe VII. La principale incertitude sur les mesures est liée à la distance à la

paroi x2. Elle est de l'ordre du dixième de millimètre. La distance minimale à la paroi pour

effectuer les mesures est de 1 mm. La taille du tube de prise d'échantillon (rayon extérieur 0,8

mm) ainsi que ses vibrations induites par la turbulence de l'écoulement pariétal rendent

impossible une mesure plus proche de la paroi.

Les profils de fraction massique de vapeur d'éthanol, C, sont obtenus pour différents

taux d'injection et températures d'écoulement potentiel. Un exemple de résultat expérimental

est présenté sur la figure 4.18. Pour chaque température d'écoulement, les taux d'injection

étudiés sont au moins égaux au taux pour lesquels la paroi est uniformément protégée. Tous

les résultats expérimentaux montrent qu'il n'y a pas d'influence du taux d'injection sur le profil

de concentration attestant que la quantité d'éthanol évaporée reste constante même si le débit

de réfrigérant augmente.

0

0,01

0,02

0,03

0,04

0,05

0 5 10 15 20 25 30

X2 (mm)

C

F = 0,14 %

F = 0,21 %

F = 0,28 %

Fig. 4.18 Profil de concentration d'éthanol (Te = 150 °C, x1 = 1,55 m).

Le profil de concentration (exprimée sous forme de fraction massique) varie de façon

exponentielle avec la distance à la paroi (figure 4.19). On remarque une augmentation encore

plus forte du gradient de concentration à proximité de la paroi. Le tracé de la dérivée de la

concentration, sur la figure 4.20, souligne particulièrement ce phénomène.

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141

Cette augmentation très importante du gradient de concentration met en évidence une

modification des transferts de masse au voisinage immédiat de la paroi. Aussi, peut-on faire

l'hypothèse de l'existence d’une sous-couche limite visqueuse analogue à celle qui existe dans

une couche limite dynamique y compris en présence d’injection (Simpson et al. 1969).

Cependant, du fait du peu de mesures disponibles dans cette sous-couche, il n'est pas

envisageable d'extrapoler le gradient de concentration pour déterminer sa valeur à l'interface

liquide-vapeur.

0,001

0,01

0,1

0 5 10 15X2 (mm)

C

F = 0,16 %

F = 0,31 %

Fig 4.19 Profil de concentration d'éthanol (Te = 200 °C, x1 = 1,55 m).

-0,018

-0,015

-0,012

-0,009

-0,006

-0,003

00 5 10 15 20 25

X2 (mm)

F = 0,14 %

F = 0,21 %

F = 0,28 %

exponentielle

dC

dx2(mm-1)

Fig. 4.20 Dérivée de la concentration (Te = 150 °C, x1 = 1,55 m).

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142

Par ailleurs, d'autres expériences montrent que le taux d'injection n'influence pas les

profils de vitesse et de température (figure 4.21). Ces résultats confirment que la quantité

d'éthanol évaporée, que nous allons quantifier, n'est déterminée que par la température de

l'écoulement potentiel.

0

20

40

60

80

100

120

140

160

0 5 10 15 20 25 30 35 40 45

X2 (mm)

T (°C)

F = 0,14 %

F = 0,21 %

F = 0,28 %

Fig. 4.21 Profils expérimentaux de température (Te = 150 °C, x1 = 1,55 m).

4.3.2. Etude théorique de la transpiration d'éthanol

L'efficacité du refroidissement par transpiration d'éthanol dépend de l'équilibre entre

les transferts de masse et de chaleur entre la paroi poreuse et son environnement. Une certaine

quantité d'éthanol s'évapore et absorbe de l'énergie reçue par la paroi par convection ou

rayonnement. Il est donc intéressant de calculer le débit de réfrigérant évaporé pour différentes

températures de l'écoulement potentiel.

Détermination des transferts de masse

Considérons un mélange de deux espèces se déplaçant à la vitesse V. Le débit

surfacique d'une espèce, �m, traversant un plan perpendiculaire à V est donné par la relation

(4.10).

�m J CV= + ρ (4.10)

J est le flux diffusif de l'espèce (J DC

xi= −ρ ∂

∂), C est sa concentration et ρ est la masse

volumique du mélange.

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143

En présence d’un gaz incondensable, un bilan de masse à l'interface liquide-vapeur

permet de calculer le débit surfacique de réfrigérant évaporé (Shembharkar et Pai 1986) :

�mC

JC

DC

xii

ii i

=−

= −−

1

1

1

1 2ρ ∂

∂ (4.11)

où l'indice i correspond l'interface liquide-vapeur et D est le coefficient de diffusion de

la vapeur d'éthanol dans l'air.

Il convient alors de déterminer le gradient de concentration à l'interface. L'analyse des

mesures de concentration a permis d'admettre l'existence d'une sous-couche limite visqueuse

proche de la paroi. L'équation (4.12) exprime la conservation de masse de la vapeur d'éthanol

en régime laminaire. Elle est obtenue en négligeant les variations longitudinales de vitesse et

de concentration et en considérant les propriétés thermophysiques du mélange air-vapeur

constantes (ce qui entraîne un gradient de vitesse verticale nul).

ρ ∂∂

ρ ∂∂

UC

xD

C

x22 2

= ²

² (4.12)

Dans cette équation, la vitesse verticale U2 est induite par la diffusion de la vapeur et

s'exprime en fonction du gradient de concentration :

UD

C

C

x221

=−

∂∂

(4.13)

En substituant la vitesse U2 dans la relation (4.12), on obtient une équation différentielle de C

en fonction de x2. Prenons pour conditions aux limites, d'une part, l'interface liquide-vapeur et, d'autre

part, un point de la sous-couche visqueuse défini par son ordonnée x2vis. Si les concentrations en x2

= 0 et x2 = x2vis sont respectivement Ci et Cvis, la résolution de l'équation (4.12) conduit à la relation

suivante (Brouwers et Chesters 1992) :

C x Cx

x

C

Civis

vis

i( ) ( )exp ln2

2

21 1

1

1= − − −

(4.14)

La loi de variation de la concentration (4.14) peut donc être appliquée entre l'interface liquide

- vapeur et notre premier point de mesure situé dans la sous-couche visqueuse. Ainsi, le gradient de

concentration à l'interface liquide-vapeur est donné par la dérivée de l'équation (4.14) pour x2

= 0. Le débit d'éthanol évaporé s'exprime alors par :

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144

� lnmD

x

C

Civis

vis

i= − −

−ρ

2

1

1 (4.15)

Notons que la méthodologie de calcul, mise en oeuvre ici, pourrait s’appliquer à la

détermination de gradients de température ou de vitesse. Simpson et al. (1969) ont d’ailleurs

appliqué une technique analogue, appelée "viscous sublayer model method", pour confirmer

les coefficients de frottement mesurés par la méthode de l’équation intégrale de quantité de

mouvement (cf. paragraphe 2.1).

La connaissance de la concentration de vapeur d'éthanol à l'interface liquide-vapeur est

nécessaire pour l'application de la relation (4.15) à nos résultats expérimentaux. Cette

concentration est calculée par application de la loi de Dalton :

CM

P

P

MP

PM

P

P

i

ethsat

ethsat

airsat

=+ −

1

(4.16)

où Psat est la pression de vapeur saturante d'éthanol, P la pression totale, Meth et Mair

les masses molaires de l'éthanol et de l'air.

La pression de saturation est déterminée en estimant qu'il y a équilibre thermique entre

la matrice solide de la paroi et l'éthanol qui s'écoule en film très fin (épaisseur maximale de

0,4 mm) sur sa face supérieure. La relation (4.16) suppose que la vapeur d'éthanol se comporte

comme un gaz parfait. En observant les propriétés données par Dunn et Reay (1978), il

semble que ce ne soit pas le cas lorsque les phases liquide et vapeur sont en équilibre sans

présence de gaz incondensable. Cependant, notons que la relation (4.16) a été employée

comme condition à la limite pour l'étude numérique du refroidissement d'un film d'éthanol par

évaporation (Yan et Lin, 1991), étude qui a donné des résultats conformes l'expérience (Yan et

al. 1991).

La détermination du gradient de concentration à l'interface liquide-vapeur puis du débit

d'éthanol évaporé est alors conduite. Les résultats, traduits en taux d'évaporation

( Fm

Uévapi

e=

( )ρ 1), sont reportés dans le tableau 4.1. Pour chaque température d'écoulement

potentiel, une moyenne est effectuée à partir des résultats obtenus pour les différents profils

expérimentaux de concentration. La dispersion des résultats est de ± 8 %.

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145

Te (°C) Févap (%)

100 0,026

150 0,033

200 0,051

Tab. 4.1 Taux d'éthanol évaporé.

Comparés aux taux d'injection mesurés au rotamètre, les taux d'éthanol évaporés sont

situés dans la zone de transition (séparant les régions où l'évaporation se produit au-dessous

ou au-dessus de la paroi). Un exemple de comparaison entre les taux d'injection mesurés et le

taux d'évaporation calculé est donné sur la figure 4.22. Cette constatation permet de confirmer

le fonctionnement du procédé présent : si le taux d'injection est inférieur au taux

d'évaporation, le débit d'éthanol injecté est insuffisant pour assurer la protection de la paroi et

le front d'évaporation se déplace vers le caisson d'injection ; en revanche, si F > Févap, une

partie du réfrigérant s'évapore et l'excédent s'écoule en film au-dessus de la paroi. Les

résultats, portés dans le tableau 4.1, sont donc les taux d'injection optimaux dans le cas d'une

transpiration à travers une paroi parfaitement horizontale.

0

20

40

60

80

100

120

140

160

180

0 0,05 0,1 0,15 0,2 0,25 0,3 0,35 0.4

F (%)

Tw (°C)

Taux d'évaporationcalculé

Fig 4.22 Comparaison entre les taux d'injection et le taux d'évaporation d'éthanol

(Te = 200 °C).

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146

Transferts thermiques

Le calcul du débit de fluide réfrigérant évaporé permet de connaître la quantité de

chaleur absorbée par évaporation. Il est donc intéressant de la comparer aux quantités de

chaleur échangées entre le système et son environnement (figure 4.23).

convection

Plaque poreuse

rayonnement

évaporation

conduction

Fig. 4.23 Echanges thermiques entre le système étudié et son environnement.

Outre l’absorption d'énergie par changement de phase, existe également une protection

de la paroi vis à vis de l'écoulement pariétal par "effusion de vapeur". Le modèle du film

(Brouwers et Chesters 1992) permet de comparer les échanges convectifs en présence de

diffusion de vapeur par rapport au cas sans diffusion. Le "modèle du film" considère une

idéalisation des transferts au voisinage de la paroi, comme s'ils se déroulaient entièrement

dans un film de mélange air-vapeur mince près de la paroi poreuse imbibée de liquide

(figure 4.24).

Fig. 4.24 Schéma de principe du modèle du film.

L'écoulement y est bidimensionnel, stationnaire, incompressible. La vitesse verticale est

considérée constante dans tout le film et les variations longitudinales de tous les paramètres sont

négligées. Il en résulte que le modèle n'est valable qu'à proximité de la paroi et peut servir par

exemple à l'évaluation de la variation du nombre de Stanton avec la vitesse de diffusion. En utilisant

les développements analytiques de Brouwers et Chesters (1992), le résultat suivant est obtenu

Vitesse de diffusion

film

Paroi poreuse humide

écoulement pariétal

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147

:

St

St =

FSt

expF

St - 10

évap

0

évap

0

(4.17)

St est le nombre de Stanton en présence de diffusion et St0 sans diffusion.

On se place dans le cas d’un taux d’injection égal au taux d’évaporation de l’éthanol.

Le nombre de Stanton sans diffusion est calculé par une corrélation en considérant une paroi

sèche (Nux1 = 0,0288 Rex1

0,8 Pr1/3). Le rapport du nombre de Stanton avec diffusion de vapeur

sur le nombre de Stanton sans diffusion est présenté dans le tableau 4.2 (colonne 3). On

constate que la réduction des échanges convectifs entre le système et l’écoulement pariétal est

faible : 8 % au maximum. Par conséquent, l’ordre de grandeur de la réduction des échanges

convectifs est le même que la précision des mesures de taux d’évaporation de l’éthanol. Il

n’est donc pas envisageable de mener un calcul plus précis des échanges convectifs entre le

système et l’écoulement pariétal puisque d’éventuelles améliorations apportées à ce calcul ne

seraient pas significatives.

Par ailleurs, une adaptation de la modélisation du rayonnement mise en oeuvre au

chapitre 3 (relation 3.15) serait intéressante : prise en compte de l’absorption d’une partie du

rayonnement incident par l’éthanol, modification des caractéristiques radiatives du matériau

poreux lorsqu’il est humide... Toutefois les ordres de grandeur du flux radiatif incident sont de

5 à 10 fois plus faibles que les quantités de chaleur absorbées par l’évaporation du réfrigérant.

Les améliorations apportées ne seraient donc pas validables.

Te (°C) Févap (%) St / St0 Φconvectif

(kW/m²)

Φabsorbé

(kW/m²)

100 0,026 0,95 1,8 2,1

150 0,033 0,94 2,4 2,4

200 0,051 0,92 3,3 3,4

Tab. 4.2 Calcul des échanges convectifs entre la paroi et son environnement.

Il est intéressant de souligner, dans cette étude sur la transpiration, la faiblesse de la

concentration en vapeur d’éthanol mesurée à proximité de l’interface liquide-vapeur comparée à celle

calculée théoriquement (relation (4.16)) sur l’interface (tableau 4.3). L’ampleur de ce saut de

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concentration constitue une caractéristique significative des profils de concentration relevés

expérimentalement. En outre, la détermination du débit d'éthanol évaporé permet une étude

numérique des transferts de masse dans la couche limite pariétale. Une vérification numérique

de la très forte décroissance de la concentration au voisinage immédiat de la paroi est donc

effectuée.

Te (°C) Ci C x2 ≈ 1 mm

100 0,18 0,022

150 0,26 0,048

200 0,30 0,079

Tab. 4.3 Concentration en vapeur d’éthanol au voisinage de l’interface liquide-vapeur.

Etude numérique des transferts de masse au voisinage de la paroi poreuse.

Cette étude des transferts de masse dans la couche limite pariétale soumise à la

diffusion de vapeur d’éthanol reprend la configuration numérique habituelle (figure 4.6). On

se place dans le cas d'une paroi parfaitement plane et d'un taux d'injection égal au taux

d'évaporation. Il n'y a donc pas de film liquide au-dessus de la paroi et le front d'évaporation

correspond à la surface supérieure de la plaque poreuse. Dans cette configuration, les

conditions aux limites sur la paroi poreuse sont les suivantes :

- équilibre thermique entre la phase vapeur et les éléments solides de la paroi,

- température de paroi correspondant aux mesures,

- lois de paroi pour la vitesse et la température au-dessus des éléments solides de la paroi,

- concentration en éthanol à la sortie d’un pore calculée par la relation (4.16),

- vitesse de la phase gazeuse calculée de façon à ce que le débit de vapeur d’éthanol injectée

corresponde au taux d’évaporation déterminé à partir des mesures de concentration :

UF U

wévap

sat

e2

1=ρ

ρϕ

( ) (4.18)

ϕ est la porosité de la plaque (ϕ = 33 %) et ρsat la masse volumique de la vapeur

d’éthanol en équilibre thermodynamique avec la phase liquide.

Le maillage et le modèle de turbulence restent inchangés par rapport aux études numériques

précédentes. Sur la figure 4.25, sont portés les profils numériques et expérimentaux de

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concentration en vapeur d'éthanol. La très forte décroissance de la concentration au voisinage

de la paroi poreuse est bien reproduite par les simulations. Ces résultats numériques

confirment donc la validité d'une part, du calcul de la concentration à l'interface liquide-

vapeur et d'autre part, la méthodologie employée pour déterminer le débit d'éthanol évaporé.

0

0,05

0,1

0,15

0,2

0,25

0,3

0 5 10 15 20 25 30 35X2 (mm)

C

simulations

mesures Te = 100 °C

mesures Te = 200 °C

Fig 4.25 Profils expérimentaux et numériques de concentration.

En revanche, les profils de vitesses et de température (figure 4.26) ne sont pas

correctement simulés. Cet écart peut s’expliquer par la différence de configuration entre

l’étude expérimentale et l’étude numérique. En effet, les mesures de vitesse et température

sont effectuées en présence d’un film liquide s’écoulant au-dessus de la paroi poreuse. D’un

point de vue numérique, le recours à des lois de parois sur les éléments solides du milieu

poreux ne permet pas donc pas de reproduire correctement les profils de vitesse et de

température. Toutefois, constatons que les épaisseurs des couches limites dynamiques et

thermiques simulées et mesurées concordent (tableau 4.4) : les écarts sont de 6,5 % au

maximum.

Te (°C) δ (mm) δT (mm)

expérience simulation expérience simulation

100 27 26 25 24

150 28 29 29 29

200 30 29 33 31

Tab. 4.4 Epaisseurs de couches limites (± 2 mm).

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150

300

320

340

360

380

400

420

440

460

480

0 10 20 30 40 50 60

X2 (mm)

T (K)

simulations

mesures Te = 100°C

mesures Te = 200 °C

Fig. 4.26 Profils numériques et expérimentaux de température

(x1 = 1,55 m).

Conclusion

L’étude du refroidissement d'une paroi poreuse par transpiration de liquide a mis en

évidence la nécessité d’un bon mouillage du fluide réfrigérant. L’éthanol a été préféré à l’eau

car sa faible tension superficielle permet un bon mouillage de l’acier inoxydable. L’efficacité

de ce procédé de refroidissement a fait l’objet d’une détermination expérimentale. Une

efficacité de 97 % a été mesurée. Elle est égale à celle obtenue par la protection par effusion

d’air dans une configuration identique. Toutefois, les taux d’injection nécessaires pour

l’atteindre sont environ 50 fois moindre que dans le cas de l’effusion d’air.

La mesure des profils de concentration en vapeur d’éthanol dans la couche limite

pariétale a révélé l’existence d’un très fort gradient à proximité du milieu poreux. En utilisant

les équations de transport dans la sous-couche visqueuse, le gradient sur l’interface liquide-

vapeur a pu être estimé et le débit d’éthanol évaporé a été calculé. Pour différentes

températures d’écoulement potentiel, les débits calculés sont conformes aux taux d’injection

nécessaires à l’obtention d’une protection uniforme de la paroi. De plus, les résultats de

simulations numériques des transferts de masse dans la couche limite pariétale confirment nos

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calculs de débit d’éthanol évaporé. Par ailleurs, des considérations théoriques ont montré que

la réduction des échanges convectifs entre le milieu poreux et l’écoulement pariétal, du fait de

la diffusion de vapeur, est négligeable devant la quantité d’énergie absorbée par l’évaporation.

Si l'étude du refroidissement par transpiration d'éthanol a permis de comprendre et de

chiffrer d'importants phénomènes, à l’avenir une mise au point d’un système de

refroidissement par transpiration d’eau (avec ajout de tensio-actif pour améliorer la

mouillabilité) pourrait être envisagée et serait intéressante pour des applications industrielles.

De même, un couplage entre une modélisation du changement de phase liquide-vapeur et le

modèle des transferts en couches limites avec injection permettrait une étude numérique plus

précise du système de protection thermique par transpiration de liquide.