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lnnovation@Forbes Transformation digitale : Le cloud-first ou pourquoi pas tout miser sur le «nuage»? Quel est l intérêt de démarrer de nouvelles applications entièrement sur une infrastructure informatique externalisée sur le « nuage » en mode cloud-first ? Cette démarche est très prisée des start-up de la Tech. Et intéresse de plus en plus les grandes entreprises. PAR PIERRE MANGIN P our les spécialistes du sujet, la démarche « cloud-first » est un pari : il ne sagit pas moins que de basculer toute l informatique sur le cloud. « Pour cela, il faut acquérir des compétences nouvelles et seformer à un mode de pilotage des systèmes d information radicalement différent », explique Matthieu Bouchard, directeur Infrastructure & Cloud au sein de la société de services Umanis. Le principal avantage est de parvenir à des délais très courts pour la mise en œuvre des applications grâce à la possibilité de tout englober : logiciels, plateformes et infrastructure réseau, stockage des données. Pour se projeter plus avant encore, certaines Matthieu Bouchard, directeur Infrastructure & Cloud, Umanis entreprises vont jusqu à se défaire de leur informatique traditionnelle (ou legacy). Elles décident de refondre totalement leurs applications en préparant le « 100 % cloud » ou mode « cloud natif ». Elles choisissent de tout externaliser ou presque sur des clouds publics comme AWS dAmazon, Azuré de Microsoft ou Google. En général, ces entreprises ont commencé par faire l expérience, S 92 1 FORBES N"13 -2020 www.forbes.fr Tous droits de reproduction réservés PAYS : France PAGE(S) : 92-95 SURFACE : 387 % PERIODICITE : Trimestriel JOURNALISTE : Pierre Mangin 21 décembre 2020 - N°13

Transformation digitale : Lecloud-first ou pourquoi pas

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Page 1: Transformation digitale : Lecloud-first ou pourquoi pas

lnnovation@Forbes

Transformationdigitale :Le cloud-firstou pourquoi pastout misersur le «nuage»?Quel est l ’intérêt de démarrer de nouvelles applications

entièrement sur une infrastructure informatique

externalisée sur le « nuage » en mode cloud-first ?

Cette démarche est très prisée des start-up de la Tech.

Et intéresse de plus en plus les grandes entreprises.PAR PIERRE MANGIN

Pour les spécialistes du sujet, la démarche

« cloud-first » est un pari : il ne s’agit

pas moins que de basculer toute

l ’informatique sur le cloud. « Pour

cela, il faut acquérir des compétences nouvelles

et seformer à un mode de pilotage des systèmes

d ’information radicalement différent », explique

Matthieu Bouchard, directeur Infrastructure &

Cloud au sein de la société de services Umanis.

Le principal avantage est de parvenir à des délais

très courts pour la mise en œuvre des applications

grâce à la possibilité de tout englober : logiciels,

plateformes et infrastructure réseau, stockage des

données.

Pour se projeter plus avant encore, certaines

Matthieu Bouchard,

directeur Infrastructure

& Cloud, Umanis

entreprises vont jusqu ’à se défaire de leur

informatique traditionnelle (ou legacy). Elles

décident de refondre totalement leurs applications

en préparant le « 100 % cloud » ou mode « cloud

natif ». Elles choisissent de tout externaliser ou

presque sur des clouds publics comme AWS

d’Amazon, Azuré de Microsoft ou Google.

En général, ces entreprises ont

commencé par faire l’expérience,S

92 1FORBES N"13 -2020 www.forbes.fr

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OVHcloudSOUVERAINETÉ ET ALTERNATIVE EUROPÉENNE AVEC GAIA-X

Parmi les challengers des géants du cloud figure OVH, récemment rebaptisé

OVHcloud. Loin du flop des clouds souverains soutenus par les pouvoirs publics

il y a six ans, cette ex-start-up née à Roubaix en 1999 est devenue une « licorne »,

très prisée des développeurs web. Son fondateur, Octave Kabla, fan de Steve

Jobs, débarque en France à 17 ans. Aujourd'hui, avec son compagnon de route,

Alban Schmutz (vice-président), il est à la tête d'un fleuron européen du cloud

comptant 2400 personnes et visant le milliard d ’euros grâce à une croissance à

deux chiffres, dépassant parfois les 20 %. Pour la France, le Benelux et lAfrique,’c’est Caroline Comet-Fraigneau qui tient les rênes depuis cet été,

aux côtés de Michel Paulin, nouveau CEO (ex-SFR). Ingénieure

Télécom Paris, cette ex-manager de France Télécom/Orange

confesse son enthousiasme pour l'actuel «move to cloud».

Elle se réjouit qu'OVHcloud soutienne activement le projet

européen Gaia-X initié par la France et l ’Allemagne. OVHcloud

s'y investit en partenariat avec l'ESN allemande T-Systems

(filiale de Deutsche Telekom), et aux côtés de Français comme

Cap Gemini, Sopra-Steria... Le pari : construire une alternative européenne aux

hyperscalers américains.

Fort d ’un patrimoine d ’une trentaine de data centres. OVHcloud veut répondre

aux attentes d ’un cloud souverain protégeant les données de toute « réquisition »

étrangère. « Le fait de posséder une société aux États-Unis [acquisition de

vCloudAir] n'expose absolument pas nos clients au PatriotAct [éventualité de

requêtes judiciaires ou du FBI], Car,sur le plan juridique, nos deux organisations

ont établi une étanchéité totale », insiste Caroline Comet-Fraigneau.

Pour contrer les géants du cloud, OVHcloud a recruté des responsables grands

comptes et accentue sa coopération avec les grands intégrateurs (ESN) comme

Atos, Capgemini, Sopra-Steria, Thaïes... Vers les start-up, la proposition est

incisive : proposer des ressources informatiques gratuites durant 12 mois. Et

depuis le premier confinement, une nouvelle offre (Open trusted cloud) donne

accès à diverses plateformes de logiciels ouverts (open source) et donc une

promesse de souveraineté et de portabilité au sein de la communauté des éditeurs

de logiciels.

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■>»positive, d ’applications dites « software as a

service » (SaaS) sur le cloud de grands éditeurs de

logiciels. Ces applications, accessibles depuis un

simple navigateur sur le web, s’appellent Office 365

de Microsoft ou Salesforce, la gestion de clients

(CRM), ou Workday (RH) - et beaucoup d’autres.

Services de cloud privé

hébergés en Europe.

Forr ester

THE FORRESTER WAVE™

Hosted Private Cloud Services In Europe

Q2 2020

Challengers Conte nders

Stronger

current

offering

Liberté et agilité

Quel est l’intérêt de cette approche ? « Le cloud-

first apporte de manière certaine plus de liberté

et une plus grande agilité », résume Matthieu

Bouchard (Umanis). Il s’ensuit des mesures

radicales comme l ’arrêt des investissements

informatiques. Fini la construction

d ’infrastructures et de data centres nécessairement

surdimensionnés. On s’en remet aux géants du

cloud dits hyperscalers que sont Amazon AWS,

Google ou Microsoft, ou à leurs challengers

comme IBM ou Oracle, ou encore à des acteurs

de proximité comme OVHcloud, Orange Business

Laurent Dirson, directeur

Solutions business &

technologies, Nexity

Weaker

current

offering

Weaker strategy

SungardQ

AvaüabilityServices

Strong

Performers Leaders

Stronger strategy

Market presence

AttentionAU COÛT DES TRANSFERTS DE DONNÉES

L’un des pièges de l’option 100 %

cloud peut être le coût des transferts

de données. « Porter les données dans

le cloud ne coûte généralement rien. En

revanche, les en sortir peut s ’avérer très

coûteux », affirme Mathias Robichon,

directeur technique de NetApp France.

Alors, quelle est la parade ? Il faut

stocker les données en les rangeant

par ordre de criticité (tiering) : « Il est

possible de réduire sa facture mensuelle cloud public [Amazon AWS, Google...]

de 70 %en utilisant un stockage adapté et en gérant mieux les pics d ’utilisation.

C'est souvent plus efficace que de chercher à profiter de promotions ponctuelles

à des prix cassés, mais sans visibilité sur la durée. » À noter que NetApp vient de

racheter la start-up israélienne Spot.io dont la solution de calcul d ’optimisation

pourrait permettre d ’économiser jusqu ’à 90 % (!) des dépenses de cloud.

Storage RAID

13

ObSpOT

Compute clustering

fl NetApp

Terminoted Spot

launched

Services, 3DS Outscale, etc.

De mois en mois, le succès des options cloud

ne se dément pas. Les avantages, pressentis

depuis une décennie, se confirment : une

grande flexibilité liée à la possibilité d’ajuster la

consommation des ressources informatiques

à la demande et donc à un coût en rapport avec

les besoins réels, à la baisse comme à la hausse.

L’informatique se recentre autour d’un ensemble

de services - infrastructure réseau, serveurs,

applications ou outils de développement. Tout est

payable mensuellement.

C ’est aussi la possibilité de puiser dans de

vastes catalogues de services informatiques

standardisés et de dernière génération, mis à

jour et, le plus souvent, mieux sécurisés que ceux

développés en interne.

Un pari audacieux ?

Le cloud-first, c ’est également la conversion

aux nouvelles pratiques dites « agiles ». Les

cycles de production et de déploiement sont

radicalement accélérés grâce à des méthodes de

travail et d ’échanges plus étroits et itératifs entre

les développeurs et les opérationnels (« DevOps »).

« Nous avons démarré il y a près de quatre ans.

C ’était un pari audacieux de vouloir tout construire

“nativement ” sur le cloud, expliquait, lors d ’une

récente table ronde, Laurent Dirson, directeur

Solutions business et technologies au sein du groupe

immobilier Nexity. Le retour sur investissement

s’est vite avéré intéressant, car nous avons choisi de

nous en remettre à des services managés, avec des FORRE

STER

RESEA

RCH

IC./NETAPP

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CLOUD

If

Il faut prévoir, par contrat,

un encadrement des

responsabilités pour chacune

des parties en présence • Alexandra Iteanu

partenaires - essentiellementsur AWS (Amazon).

Aujourd ’hui, noussommescapablesde construire

de façon itérative, en quelques semaines, des

solutions complètes.C’est sanscommune mesure

aveccequel ’onpeutfaire seulsen interne. »

Même avischezRenault-Nissan.«Pourchaque

nouvelleapplication, nouscommençonspar évaluer

la possibilité de la porter sur un cloud public »,

observe StéphaneGamondes, Product leader of

thecloud office.

Outre la rapidité de « provisionnement » des

ressources informatiques, l ’option cloud-first

permet une montée en chargetrès rapide. « Nous

manipulons quotidiennement des péta-octets

[milliers de giga-octets], poursuit-il. Le cloud

public nous apporte beaucoup desouplesse.» Et,

ici aussi, pour des raisons de coûts et d ’efficacité,

l’exploitation est externalisée, confiée à des

partenairesspécialisés.

S’en remettre àdeschampions du cloud et àdes

sociétésde servicesne signifie pas leur accorder

un blanc-seingadvitam. Pasquestionde selaisser

verrouiller. « Il faut prévoir, contractuellement,

un encadrementdesresponsabilitéspour chacune

desparties en présence », explique Alexandra

Iteanu, avocate du cabinet qui porte son nom.

Deux points cruciaux sont à surveiller : le niveau

de qualité de service et la réversibilité, c’est-à-

dire lesconditions de sortie du contrat en étant

sûr de récupérer toutes sesdonnées (encryptées

ou non) sansqu’il en coûte une fortune. « Pour

cela, il est essentielde réunir régulièrementautour

de la table lesdifférents services- informatique,

juridique, sécuritéet achats.Tout le mondey gagne

encompétences», assureun expert.

Travailler en équipe s’avère précisément

indispensablepour tirer le meilleur parti possible

des services cloud. « L’infrastructure disparaît

pour devenir une “commodité” et la production de

solutionsbusinessdevientuneagrégationdeservices.

Si cetteacculturation sepassebien,l ’accélérationest

fulgurante »,ponctue LaurentDirson. *

Stéphane Gamondes,

Product leader of the cloud

office, Renault Nissan

■■■■■■■■■■■

SAP et OracleAIDENT À DÉVELOPPER LE E-COMMERCE DANS LE CLOUD

Les champions du « logiciel intégré » d ’entreprise

rivalisent de propositions pour accompagner

le « move to cloud » à l ’heure de la Covid-19.

Ainsi, SAP introduit SAP Upscale qui permet de

réaliser en sept jours sa boutique e-commerce.

Le géant allemand, il est vrai, a déjà l’expérience de

sa Cloud Platform qui gère l'agrégation de contenus,

le déploiement de portails en allant puiser aussi

bien sur un cloud public que dans un data centre

de l'entreprise cliente. Pour rappel, dans le domaine

des RH en mode SaaS, SAP avait acquis en 2011et

« intériorisé » tout le savoir-faire du Danois Success-

Factors. Aujourd'hui, avec SAP AppCenter, l'éditeur

propose pas moins de 600 solutions compatibles

avec la plateforme ouverte Cloud Foundry (open source). Stratégie similaire chez

Oracle : « Notre offre de démarrage sur le cloud est directement accessible sur

internet, certains services étant gratuits », explique Damien Rilliard, responsable

Sécurité cloud d'Oracle Europe. Il est ainsi possible de commencer, sans avancer

un euro, avec deux processeurs VM (virtual machines) et deux bases de données

de 20 Go. L'offre Autonomous propose

une capacité, également gratuite et sans limite de temps, étendue à 100 Go et,

en stockage objet (équivalent de Dropbox), 10 Go à disposition sans frais.

« Après avoir testé et vérifié les ressources disponibles, certains clients vont cher

cher à nous contacter pour aller plus avant. Mais beaucoup s'orientent plutôt vers

un partenaire. De fait, le cloud conduit le plus souvent à des "services managés"

dès que le projet d'application se développe à grande échelle. » Cela dit, avec son

offre de deuxième génération (OCI, Oracle Cloud Infrastructure), le numéro un

mondial des bases de données multiplie les process automatiques (autonomous)

- ce qui facilite grandement la tâche.

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