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Travail de fin d'études: "ANALYSE TEMPORELLE DE LA REPRESENTATIONDU
RISQUE D'INONDATION DE 1980 A 2018 A DOUALA-CAMEROUN"
Auteur : Amanejieu, Amelie
Promoteur(s) : Ozer, Pierre; Bruckmann, Laurent
Faculté : Faculté des Sciences
Diplôme : Master de spécialisation en gestion des risques et des catastrophes
Année académique : 2017-2018
URI/URL : http://hdl.handle.net/2268.2/5575
Avertissement à l'attention des usagers :
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et le droit de paternité et ce dans toute utilisation que l'utilisateur entreprend. Ainsi, à titre d'exemple, lorsqu'il reproduira
un document par extrait ou dans son intégralité, l'utilisateur citera de manière complète les sources telles que
mentionnées ci-dessus. Toute utilisation non explicitement autorisée ci-avant (telle que par exemple, la modification du
document ou son résumé) nécessite l'autorisation préalable et expresse des auteurs ou de leurs ayants droit.
Faculté des Sciences
Département des Sciences et Gestion de l'Environnement
Master de Spécialisation en Gestion des Risques et Catastrophes
Année académique 2017-2018
ANALYSE TEMPORELLE DE LA REPRESENTATION
DU RISQUE D’INONDATION DE 1980 A 2018 A
DOUALA-CAMEROUN
Mémoire présenté par :
AMANEJIEU Amelie
en vue de l’obtention du diplôme
de Master de spécialisation en gestion des risques et des
catastrophes
Promoteur : Pierre OZER
Co-promoteur : Laurent BRUCKMANN
Année académique 2017 – 2018
i
DEDICACE
A mes chers parents : Mr Nguefack Chretien et Mme Makougué Régine. Pour votre amour
inconditionnel et le sacrifice consenti depuis mon enfance. Trouvez ici les fruits de vos
sacrifices.
Et à mon petit neveu Ngeuf Samuel.
ii
REMERCIEMENTS
Au terme de ce parcours de recherche en Gestion des Risques et des Catastrophes, je tiens à
témoigner toute ma reconnaissance et ma gratitude :
à l’’Académie de Recherche et de l’Enseignement Supérieure (ARES) qui m’a accordé cette
bourse ainsi qu’aux Universités de Liège et de Louvain qui m’ont offert cette formation de
qualité ;
à mon promoteur et coordonnateur de ce master, Docteur Pierre Ozer. Pour toutes les
modifications et les éclaircissements apportés à l’amélioration de cette recherche ainsi que
l’appui méthodologique qu’il n’a cessé de m’apporter tout au long de ce travail, sa rigueur pour
le travail bien fait et pour tous les conseils qu’il a apportés pour mon amélioration dans la
recherche. Je ne saurais oublier de relever ici l’opportunité qu’il m’a donnée de participer à de
multiples conférences et colloques ;
à mon Co promoteur, Docteur Laurent Bruckmann, pour sa disponibilité constante, pour ses
précieux conseils et orientations pendant la phase de collecte de données au Cameroun ;
au très cher Professeur André OZER, pour avoir accepté de lire ce travail malgré ses multiples
occupations, pour son soutien inconditionnel et pour toutes les connaissances transmises au
cours de nos sorties de terrain en Baie des Sommes et en région liégeoise ;
à tous les autres enseignants GRC qui m’ont doté de nouvelles connaissances, ainsi qu’à tous
mes promotionnaires.
Je ne saurais terminer sans adresser mes vifs remerciements à Fouedjeu Leonnel et à Ngata
Thierry pour leurs inébranlables soutiens et encouragements. A tous les membres de ma famille,
qui ont contribués, de près ou de loin, à l’élaboration de ce travail, en particulier à Amanekeu
Balbine, Kenfack Mandise et Atadougang Tchopé, pour tous les espoirs placés en moi. Que
tous ceux dont les noms n’apparaissent pas ici, mais qui ont contribués de près ou de loin à
l’édification et à la réalisation de ce mémoire trouvent ici un mobile pour leur satisfaction
iii
RESUME
Douala, ville côtière située à 30 kilomètres de l’océan Atlantique fait depuis plusieurs décennies
l’objet de nombreuses convoitises. Ces convoitises, dans un contexte de crises économique et
foncière ont favorisé l’absorption des vides urbains et des mangroves sur la côte générant ainsi
des problèmes d’inondation.
Cette étude se présente comme une contribution à l’analyse des représentations spatio-
temporelles et socio-temporelles du risque d’inondation à Douala de 1980 à 2018. La
méthodologie de recherche exploitée repose essentiellement sur deux approches d’analyse : une
approche géo-historique permettant la reconstitution d’une banque de données sur les
inondations antérieures et une approche d’analyse systémique permettant de mettre en exergue
les relations entre les populations et leurs milieux de vie.
Les résultats révèlent une augmentation de la surface urbaine de 14018.6 ha entre 1986 et 2017,
soit 452 ha par an et de 9 ha environ par semaine ; et une extension de la ville vers les zones de
basses altitudes potentiellement inondables. En 31 ans, 2830 ha de zones basses ont été
urbanisées par le biais de remblais, soit environ 74 ha par an. Cette conquête des zones basses
a conduit à des inondations dont les premiers cas ont été enregistrés à partir des années 1984.
De 1984 à 2018, 34 inondations ont été recensées et ont occasionné 49 pertes en vies humaines,
71 blessés, 90923 sinistrés et 547 recasés. On est passé de 8 inondations pour 8 décès et 8023
sinistrés entre 1984-2000, à 26 inondations pour 41 décès et 82.900 sinistrés entre 2001-2018.
Pour faire face à ces inondations de plus en plus fréquentes, les autorités ont, depuis les années
1993, opté pour une nouvelle forme de gouvernance urbaine : le drainage et le déguerpissement.
De 1993 à 2018, 16 cas de déguerpissements ayant occasionné le déplacement d’environ de
89060 personnes ont été recensés. Malgré tout, le risque perdure
Du côté des populations, les résultats révèlent que, majoritairement constituées de migrants
ruraux, leur installation en zone inondable relève bien avant toute chose d’une stratégie
d’insertion, de survie. Plus elles côtoient le risque ; plus leur perception du risque est avérée ;
plus elles développent une accoutumance face à celui-ci et moins elles cherchent à se prémunir.
Toutefois, si aujourd’hui, cette population très vulnérable réussit à s’insérer et à survivre en
zone à risque en dépit de la fréquence des inondations observées, il est possible que dans les
années à venir, la situation se complique davantage. La ville de Douala fait montre d’une
croissance démographique très importante et face à elle, l’urbanisation se poursuit à un rythme
manifestement inapproprié et contribuera malencontreusement à une augmentation des
inondations. Par ailleurs, les études récentes indiquent une élévation du niveau marin 23,6 cm
d’ici 2025 par rapport à 2008 (Domguia, 2016.) et une augmentation de la pluie moyenne
annuelle de l’ordre de 35% à l’horizon 2050 (CLUVA, 2012) . Il s’agit des données non
négligeables dont devraient tenir compte les politiques de développement sur le long terme.
Mots clés : Inondation, Douala, géo-historique, déguerpissement, Cameroun.
iv
ABSTRACT
Douala, a coastal town located 30 kilometres from the Atlantic Ocean, has been the object of
many desires for several decades. These desires, in a context of economic and land crises,
favoured the absorption of urban voids and mangroves on the coast, thus generating flooding
problems.
This study is presented as a contribution to the analysis of spatio-temporal and socio-temporal
representations of flood risk in Douala from 1980 to 2018. The research methodology used is
essentially based on two analysis approaches: a geo-historical approach that allows the
reconstruction of a database on past floods and a systemic analysis approach that highlights the
relationships between populations and their living environments.
The results reveal an increase in the urban surface area of 14018.6 ha between 1986 and 2017,
or 452 ha per year and about 9 ha per week; and an extension of the city towards areas of
potentially floodable low altitudes. In 31 years, 2830 ha of low areas have been urbanized by
means of embankments, or about 74 ha per year. This conquest of low areas led to floods, the
first cases of which were recorded from 1984 onwards. From 1984 to 2018, 34 floods were
recorded, resulting in 49 deaths, 71 injuries, 90923 victims and 547 settlers. There were 8 floods
for 8 deaths and 8023 victims between 1984-2000, 26 floods for 41 deaths and 82,900 victims
between 2001-2018. To cope with these increasingly frequent floods, the authorities have, since
1993, opted for a new form of urban governance: drainage and drainage. From 1993 to 2018,
16 cases of evictions involving the displacement of approximately 89060 persons were
recorded. Despite everything, the risk persists
As far as the populations are concerned, the results reveal that, mainly made up of rural
migrants, their settlement in flood-prone areas is above all a strategy of integration and survival.
The more they are exposed to risk; the more their perception of risk is proven; the more they
develop an habituation to it and the less they seek to protect themselves. However, if today this
highly vulnerable population succeeds in integrating and surviving in risk zones despite the
frequency of floods observed, it is possible that in the years to come the situation will become
more complicated. The city of Douala is experiencing very significant population growth and,
faced with it, urbanisation is continuing at a clearly inappropriate pace and will unfortunately
contribute to an increase in flooding. Moreover, recent studies indicate a rise in sea level of
23.6 cm by 2025 compared to 2008 (Domguia, 2016.) and an increase in average annual rainfall
of around 35% by 2050 (CLUVA, 2012). These are important data that development policies
should take into account over the long term.
Keywords : Flood, Douala, geo-historical, eviction, Cameroon.
v
SIGLES ET ABREVIATIONS
AFCM : Analyse à Factorielle à Composante Multiple
AFD Agence Française de Developpement
BM : Banque Mondiale
BUCREP : Bureau Central de Recensement et d’Etudes de la population
CAH :Cadre d'Action de Hyogo
CAS: Cadre d'Action de Sendai
CLUVA : Climate change and Urban Vulnerability in Africa.
CRED : Centre for Research on the Epidemiology of Disasters
CT : Cameroun Tribune
CUD : Communauté Urbaine de Douala
EEA : European Environment Agency
EEE : Espace Economique Européen
Fig: Figure
HYSACAM : Hygiène et Salubrité du Cameroun
INS : Institut National de Statistique
MAETUR : Mission d’Aménagement et d’Entretien des Terrains Urbains et Ruraux
MNT : Modèles Numériques de Terrain
OCHA : United Nations office for coordination of humanitarian affairs
ONU : Organisation des Nations Unies
ORSEC : Organisation de la Réponse de Sécurité Civile
PAS : Plan d’Ajustement Structurel
PDU : Plan Directeur d'Urbanisme
PDUE : Projet de Développement des secteurs Urbains et d’approvisionnement en Eau
PPRi : Plan de Prévention des Risques d'inondations
PSO : Plan d'Occupation des Sols
RGPH : Recensement Général de la Population et de l’Habitat
SIC : Société Immobilière du Cameroun
SPSS : Statistical Package for the Social Sciences
STM : Service Technique Municipal
vi
TABLE DES MATIRES
DEDICACE ................................................................................................................................. i
REMERCIEMENTS .................................................................................................................. ii
RESUME ................................................................................................................................... iii
ABSTRACT .............................................................................................................................. iv
SIGLES ET ABREVIATIONS .................................................................................................. v
LISTE DES FIGURES .............................................................................................................. ix
LISTE DES TABLEAUX ......................................................................................................... ix
LISTE DES PLANCHES ET PHOTOS .................................................................................... x
INTRODUCTION ...................................................................................................................... 1
1.1 Contexte et problématique ........................................................................................... 1
1.2 Objectif principal ......................................................................................................... 4
1.3 Hypothèse générale ...................................................................................................... 4
1.4 Etat de l’Art sur les inondations .................................................................................. 4
1.4.1 Inondations urbaines ............................................................................................ 4
1.4.2 Mesures de réduction des risques de catastrophes ............................................... 5
1.6 Cadre conceptuel : Représentation du risque .............................................................. 6
1.6.1 Perception du risque et de l’espace à risque ......................................................... 6
1.6.2 Vécu ..................................................................................................................... 7
1.6.3 Projection ............................................................................................................. 7
PARTIE I : METHODOLOGIE ET DIAGNOSTIC TERRITORIAL DE LA VILLE DE
DOUALA ................................................................................................................................... 9
PARTIE I.1 : METHODOLOGIE DE RECHERCHE .............................................................. 9
I.1 Technique de collecte des données .............................................................................. 9
I.1.1 Approche géo-historique .......................................................................................... 9
I.1.2 Démarche d’enquête de terrain .............................................................................. 11
I.2 Test du questionnaire ................................................................................................. 14
I.3 Administration du questionnaire ............................................................................... 14
I.4 Dépouillement des questionnaires et codification des questions ............................... 14
I.5 Conception du plan d’analyse .................................................................................... 14
I.6 Calcul des indicateurs ................................................................................................ 15
PARTIE I.II : DIAGNOSTIC TERRITORIAL DE LA VILLE DE DOUALA ...................... 16
II.1 Localisation de la zone d’étude ................................................................................. 16
II.2 Prédisposition naturelle de la ville de Douala aux inondations ................................. 16
II.2.1 Densité du réseau hydrographique ......................................................................... 16
II.2.2 Platitude du relief ................................................................................................... 17
vii
II.2.3 Abondance pluviométrique et régime de marées ................................................... 17
II.2.4 Caractéristiques des sols ........................................................................................ 18
II.3 Contexte démographique ........................................................................................... 18
II.4 Gestion des déchets ................................................................................................... 19
PARTIE II : RESULTATS ET DISCUSION .......................................................................... 20
PARTIE II.1 : CONSTRUCTION ET REPRESENTATION SPATIO-TEMPORELLE DU
RISQUE D’INONDATION ..................................................................................................... 20
INTRODUCTION .................................................................................................................... 20
I. Dynamique urbaine et anthropisation des zones potentiellement à risque : facteur
d’amplification de l’aléa et des vulnérabilités .......................................................................... 20
II. Analyse spatio-temporelle des inondations à Douala et politiques de gestion.............. 24
II.1 Analyse temporelle des inondations .......................................................................... 24
II.1.1 Inondations de 1984 à 1989 ............................................................................... 25
II.1.2 Inondations de 1990 à 1996 ............................................................................... 26
II.1.3 Inondations de 1998 à 2001 et de 2002 à 2006 .................................................. 26
II.1.4 Inondations de 2007 à 2018 ............................................................................... 29
II.2 Fréquence annuelle et mensuelle des inondations ..................................................... 33
II.3 Analyse spatiale des inondations et cartographie des zones inondées ...................... 37
CONCLUSION ........................................................................................................................ 41
PARTIE II.2. REPRESENTATION SOCIO DU RISQUE D’INONDATION ....................... 42
INTRODUCTION .................................................................................................................... 42
I Profil des enquêtés et nature des sites d’enquête .............................................................. 42
II Perception ......................................................................................................................... 45
II.1 Proximité perçue du risque d’inondation ................................................................... 45
II.2. Raisons et choix de la zone de résidence. .................................................................. 47
II.2 Connaissance de l’espace avant l’installation ........................................................... 48
II.3 Perception de la réglementation en vigueur .............................................................. 49
II.4 Acceptabilité du risque .............................................................................................. 51
III. Vécu .............................................................................................................................. 52
III.1 Stratégies d’adaptions individuelles et collectives .................................................... 52
III.2 Stratégies d’adaptation étatique ................................................................................. 55
IV. PROJECTION ............................................................................................................... 58
V. Synthèse de la représentation du risque ............................................................................ 61
CONCLUSION ........................................................................................................................ 62
CONCLUSION GENERALE ET RECOMMANDATIONS .................................................. 63
REFERENCES ......................................................................................................................... 66
ANNEXES ................................................................................................................................. x
viii
ix
LISTE DES FIGURES
Figure 1 : Centres géographiques des inondations dans le monde de 1985 à 2010. ............................... 1
Figure 2 : Composantes de la représentation du risque .......................................................................... 7
Figure 3 : Conceptualisation de la représentation du risque. .................................................................. 8
Figure 4 : Localisation des sites enquêtés. ........................................................................................... 13
Figure 5 : Localisation de la ville de Douala. ....................................................................................... 16
Figure 6 : Dynamique urbaine à Douala entre 1986 et 2017. ............................................................... 21
Figure 7. Altimétrie de la ville de Douala. ........................................................................................... 22
Figure 8 : Mesures de gestion annoncées à la suite des inondations d’août 2000. ............................... 27
Figure 9 : Intervention du Délégué du gouvernement auprès de la CUD suite aux inondations d’Août
2000. ...................................................................................................................................................... 28
Figure 10 : Intervention de Fritz Ntone Ntone à la suite des inondations du 25 juillet 2018. (Extrait de
la CT N°14740/620 du 30 juillet). ......................................................................................................... 31
Figure 11 : Fréquence annuelle des inondations de 1984 à 2018. ........................................................ 34
Figure 12 : Répartition mensuelle des inondations et de la pluviométrie entre 1984 et 2018. ............. 34
Figure 13 : Mobilité des populations des zones à risque à Douala. ...................................................... 35
Figure 14 : Quartiers où les déguerpissements se sont déroulés entre 1993-2018. .............................. 37
Figure 15 : Carte des quartiers inondés entre 1984-2018. .................................................................... 38
Figure 16 : Quartiers inondés à Douala de 1984 à 2000. ...................................................................... 39
Figure 17 : Quartiers inondés à Douala de 2001 à 2018. ..................................................................... 39
Figure 18 : Carte de la fréquence des zones inondées à Douala de 1984 à 2918. ................................ 40
Figure 19 : Carte des zones inondables à Douala. ................................................................................ 41
Figure 20 : Réparation des enquêtes par tranches d’âges. ..................................................................... 43
Figure 21 : Répartition des ménages en fonction de leur taille. ........................................................... 43
Figure 22 : Répartition des enquêtés en fonction de la nature de la zone habitée. ............................... 44
Figure 23 : Origine des enquêtés. ......................................................................................................... 44
Figure 24 : Problèmes majeurs à Douala selon la population enquêtée. .............................................. 45
Figure 25 : Répartition des ménages selon leur exposition aux risques. .............................................. 45
Figure 26 : Perception réelle du risque en fonction du nombre d’années passées dans la zone
d’habitation. ........................................................................................................................................... 47
Figure 27 : Perception de l’espace à risque en fonction du niveau d’instruction. ................................ 47
Figure 28 : Raisons du choix de la zone de résidence par les enquêtés. .............................................. 48
Figure 29 : Répartition des enquêtés en fonction des activités pratiquées près de leur habitation. ...... 49
Figure 30 : Connaissance de la loi en matière d’occupation des sols. .................................................. 51
Figure 31 : Acceptabilité du risque chez les enquêtés. ......................................................................... 52
Figure 32 : Répartition des aménagements stratégies individuelles en zone inondable. ..................... 53
Figure 33 : Répartition des enquêtés en fonction des interventions des autorités ................................ 56
Figure 34 : Fréquence du risque selon les enquêtés. ............................................................................ 57
Figure 35 : Attitude des enquêtés face aux effets probables des changements climatiques. ................ 60
Figure 36 : Analyse Factorielle à Composante Multiples (AFCM). .................................................... 61
LISTE DES TABLEAUX
Tableau 1 : Répartition des enquêtés en fonction de leur niveau d’instruction. .................................. 42
Tableau 2 : Répartition des enquêtés en fonction du nombre d’années passé dans leurs résidences. .. 43
Tableau 3 : Perception de l’espace à risque en fonction du quartier. ................................................... 46
Tableau 4 : Répartition des enquêtés en fonction de la possession du titre foncier. ............................ 51
x
Tableau 5 : Participation des enquêtés aux stratégies d’aménagements collectifs. .............................. 55
Tableau 6 : Vécu en fonction du quartier. ............................................................................................ 57
Tableau 7. Répartition des enquêté en fonction de leurs attitudes face aux inondations futures. ........ 58
Tableau 8 : Options d’aménagement contre les inondations futures. ................................................... 59
Tableau 9 : Estimation du niveau de projection chez les enquêtés. ..................................................... 61
LISTE DES PLANCHES ET PHOTOS
Planche 1 : Matériaux pour les remblais à Douala. .............................................................................. 23
Planche 2: Inondations de 1984 et 1986 à Douala. ............................................................................... 25
Planche 3 : Quelques inondations marquantes à Douala entre 1998 et 2006. ...................................... 28
Planche 4 : Quelques inondations à Douala entre 2009 et 2018. .......................................................... 32
Planche 5 : Quelques cas de déguerpissements à Douala de 2014 à 2018. .......................................... 36
Planche 6 : Marquage des maisons à détruire : 1) Makepe Missoke, 2) Bois des singes. .................... 46
Planche 7 : Quelques mesures d’adaptation individuelle au Bois des singes. ...................................... 54
Planche 8 : Autres stratégies de gestion collective des inondations à Bonapriso et à Makepe Missoke.
............................................................................................................................................................... 55
Planche 9 : Qualité de l’espace construit aux Bois des singes. ............................................................ 60
Photo 1 : Inondation à Douala en 1998. ................................................................................................ 26
1
INTRODUCTION
1.1 Contexte et problématique
Les inondations représentent la principale cause des catastrophes naturelles dans le monde
(Bertoni, 2006 ; De Groeve et al., 2008; Paprotny et al., 2018.) . Elles se présentent comme les
risques les plus récurrents ayant un effet dévastateur sur les vies humaines (Khan et al., 2011).
De 1985 à 2010, 3713 centres géographiques des inondations ont été enregistrés, via des
données satellitaires dans le monde, par l'Observatoire des inondations de Dartmouth1 (Fig. 1).
En 2017, le même observatoire faisait état de 4536 centres. Le CRED (Centre for Research on
the Epidemiology of Disasters) estime qu’en moyenne 37 inondations catastrophiques par an
ont été recensées à travers le monde entre 1900- 2013. Ces phénomènes, en constante évolution
à l’échelle du globe, sont fortement aggravés par les activités humaines, notamment la
croissance urbaine ou encore, la paupérisation absolue et l’urbanisation continue et non
contrôlée des zones inondables (Kundzewicz et al., 2014).
Figure 1 : Centres géographiques des inondations dans le monde de 1985 à 2010. (Source : Observatoire des inondations de Dartmouth).
Entre 1870 et 2016, l'Europe a connu un développement économique important et une
croissance substantielle de sa population urbaine. De fait, le nombre de personnes exposées
aux inondations est en constante évolution depuis 1870 dans certaines parties de l’Europe,
notamment dans les pays d'Europe occidentale et méridionale : France, Allemagne et Italie
(Paprotny et al.,2018.). Selon la base de données NatCatService2, près de 1 500 inondations et
1 Il s’agit d’un observatoire fondé en 1993 au Dartmouth Collège, Hanover, NH USA. L’essentiel de ses missions consiste à : mesurer, cartographier et modéliser l'eau de surface dans l'espace, pour les applications de recherche, d'aide humanitaire et de gestion de l'eau : Consultable au http://floodobservatory.colorado.edu 2 Il s’agit d’un ensemble de bases de données les plus complètes au monde pour l'analyse et l'évaluation des catastrophes naturelles : Consultable au https://natcatservice.munichre.com/.
2
mouvements de masse humides se sont produits dans les pays membres de l'EEE3 entre 1980
et 2013, dont plus de la moitié depuis 2000. Sur la même période, European Environment
Agency4 (EEA) estime à plus de 4 700, le nombre de décès et des pertes économiques directes
d’une valeur supérieure à plus de 150 milliards d'euros causés par les inondations, soit près d'un
tiers des dommages causés par tous les risques naturels cumulés.
L’Afrique est la région du monde la plus vulnérable aux risques hydro climatiques (ONU,
2005). Cette vulnérabilité est décuplée par la combinaison de plusieurs facteurs tels que la
pauvreté endémique, les limites d’une mal-gouvernance, l’accès aux capitaux, l’insuffisance
des infrastructures et des technologies, la dégradation des écosystèmes, les catastrophes
complexes et les conflits (Ahouangan et al., 2010). L’inefficacité des systèmes de collecte des
déchets solides, l’extension du bâti en zones inondables et les réseaux d’assainissement
modestes sont également des facteurs qui aggravent l’aléa. Ces derniers renforcent l’effet
prévisible des risques d’inondations sur les enjeux (populations urbaines fortement paupérisées)
(Issaka, 2010) . En Afrique de l’Ouest, plus de 600 000 personnes ont été affectées par les
inondations entre juin et septembre 2009, entraînant des dégâts matériels et humains estimé à 2
milliard 442 Millions de FCFA (OCHA5, 2009). Le Cameroun ne fait pas exception, tant les
inondations sont considérées par les experts comme la catastrophe naturelle la plus fréquente.
En effet, selon les études publiées en 2016 par le CRED, 367 276 personnes ont été victimes
d’inondations entre 2007 et 2015. La ville de Douala, capitale économique du pays, n’est pas
en reste. De par sa situation géographique, cette ville côtière bâtie sur l’estuaire du fleuve Wouri
est un excellent client aux phénomènes d’inondation. Entre 1980 et 2018, 34 cas d’inondations
ont été recensé à Douala. Son relief plat, sa nappe phréatique sub-affleurante, la densité de son
réseau hydrographique et une pluviométrie abondante (environ 4 000 mm par an) sont autant
de facteurs qui la prédisposent aux risques d’inondations. Les pluies quasi continues toute
l’année augmente la probabilité des risques d’inondations à 80% durant la saison de forte
pluviométrie (juin, juillet, août). Même les mois les plus secs (novembre, décembre et janvier)
totalisent des pluies quasiment supérieures à 50 mm (Zogning et al., 2015; Amanejieu, 2015).
Entre 2000 et 2010, les inondations ont causé plus de 100 morts à Douala et occasionnés des
dommages matériels et humains importants (Zogning, et al., 2015).
Par ailleurs, l’exode rural important entraîne l’augmentation de la population urbaine au
détriment d’espaces urbanisés prompts à les accueillir. Ce cas de figure contraint ainsi les
personnes souhaitant s’installer en ville à construire ou à louer des habitations de fortune de
manière anarchique sur des terrains non constructibles, sans droit de propriété, ni statut légal et
sans respect de la loi de l’urbanisme. A Douala, l’incapacité des autorités à réguler l’occupation
des sols dès les années 1990 a conduit à la suppression de l’offre foncière (Mbaha, et al, 2013).
Aujourd’hui, les terrains coutumiers sont contigus aux terrains titrés et l’accès au terrain se fait
désormais par la discrimination du plus offrant. Certaines personnes négociant avec les
détenteurs de terre en marge de la loi, contribuent ainsi au désordre urbain et à la construction
du risque d’inondation. Ce désordre urbain se manifeste aussi bien sur le plan de la densification
3 Pays de l’Espace Economique Européen 4 L'EEA est une agence de l'UE chargée de fournir des informations fiables et indépendantes sur l'environnement. 5 United Nations office for coordination of humanitarian affairs.
3
que sur celui de l’extension. Dans le premier cas, on assiste à l’étouffement et à la disparition
des vides urbains (marécages, jardins publics, stades, lit des cours d’eau ….). Dans le second
cas, la ville s’agrandit au détriment des mangroves exposant ainsi les populations aux risques
d’inondations et en détruisant un milieu important pour la biodiversité.
Ces phénomènes d’inondation soulèvent aujourd’hui un grand nombre de débats dont les plus
importants sont liés à la miniaturisation de l’aléa et aux moyens de réduire la vulnérabilité des
populations. À cela sont associés d’autres enjeux tels l’aménagement du territoire, notamment
la constructibilité de zones inondables, ou encore la culture du risque. Depuis bientôt une
quarantaine d’année, la gestion des risques est donc un enjeu pour les différents acteurs du
territoire au Cameroun. C’est donc en ce sens que les autorités gouvernementales et locales
œuvrent depuis les années 1980. Des efforts ont été ainsi faits, notamment au niveau
institutionnel, où il existe un cadre normatif relevant des textes aussi bien législatifs que
réglementaires, servant de socle à l’action de réduction du risque à l’échelle locale. Ce cadre
juridique est inspiré par un ensemble de protocoles internationaux à l’instar des Cadres d’Action
de Hyogo (CAH) 6 et de Sendai (CAS)7.
Cependant, il apparait que l’abondance des stratégies visant à réduire le risque dans la ville de
Douala se nourrit quelque peu de l’idée de sa maîtrise. Toutefois, malgré ces efforts, le risque
demeure omniprésent et les inondations plus récurrentes que jamais. Lorsque de tels scenarii se
répètent et ont tendances à s’accélérer au fil des années, il est urgent de se questionner sur
l’efficacité du système de gestion en vigueur. Par ailleurs, la dernière inondation de cet été a
accentué le sentiment de vulnérabilité des populations, mettant en lumière les limites d’un
système à bout de souffle, inadapté. Dans ce contexte, plusieurs questions se bousculent et la
question de sécurité des populations ressurgit.
Quelles sont les limites du système actuel ? Est-ce le laisser-faire des autorités ou le non-respect
des normes établies par les populations ? L’inconscience ou la sous-information des riverains ?
Les mauvais choix en matière de stratégies de gestion ? Autant d’interrogations qui nous
conduisent à la question principale constituant l’ossature de cette recherche : Quelle est la
représentation du risque d’inondation dans le temps, aussi bien par les populations que par les
autorités à Douala ?
C’est autour de cette question de recherche, que les objectifs et les hypothèses de l’étude sont
développés.
6Cadre d’Action de Hyogo pour 2005-2015 : Pour des nations et des collectivités résilientes face aux catastrophes.
Tenu du 18 au 25 Janvier 2005 à Kobé (Hyogo-Japon) et inspiré de la « Stratégie de Yokohama pour un monde
plus sûr : directives pour la prévention des catastrophes et la préparation aux catastrophes et l’atténuation de leurs
effets et du plan d’action correspondant » adopté en 1994, il donne des orientations fondamentales pour la
réduction des risques de catastrophes et atténuer les conséquences de ces catastrophes. Vise à promouvoir une
approche systématique de la réduction de la vulnérabilité et de l’exposition aux aléas afin de bâtir des collectivités
plus résilientes face aux catastrophes. 7 Le Cadre d'Action de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe 2015-2030 a été adopté lors de la
troisième Conférence mondiale de l'ONU tenue à Sendai au Japon le 18 mars 2015. Il est le résultat de consultations
lancées en mars 2012 et de négociations intergouvernementales menées de juillet 2014 à mars 2015 sur demande
de l'Assemblée générale de l'ONU et avec l'appui du Bureau des Nations unies pour la réduction des risques de
catastrophe.
4
1.2 Objectif principal
Analyser les représentations spatio-temporelle et socio-temporelle du risque
d’inondation à Douala de 1980 à 2018.
Objectifs spécifiques
- Analyser la représentation spatio-temporelle du risque d’inondation à Douala 1980 à
2018 ;
- Analyser la perception du risque par la population et les autorités afin de comprendre le
choix des stratégies d’aménagement actuels et futurs.
1.3 Hypothèse générale
A Douala, l’inondation est bien avant tout une construction sociale résultant d’une certaine
représentation du risque et de l’espace à risque par la communauté.
Hypothèses spécifiques
- L’anthropisation des zones potentiellement inondables se traduit par une amplification
et une dynamique spatio-temporelle du risque.
- La perception du risque d’inondation conditionne le choix des aménagements actuels et
futurs.
1.4 Etat de l’Art sur les inondations
1.4.1 Inondations urbaines
En 1800, seulement 1% de la population mondiale était concentrée dans les villes (Bertoni,
2006). La Banque Mondiale (BM)8 estime que la population urbaine a atteint 4,108 milliard en
2017, soit plus de la moitié de la population mondiale. L’ONU projetait en 2014 que 2,5 milliard
de personnes supplémentaires vivraient en zones urbaines d’ici 2050. Cette concentration rapide
de la population en milieu urbain accentue le phénomène d’urbanisation. Pour Serre (2011), ce
dernier est le corollaire d’un étalement urbain important générateur de risques puisqu’il aboutit
à des constructions dans des zones à aléas forts. A ce sujet, plusieurs auteurs considèrent
l’urbanisation comme le principal facteur du risque d’inondation. Une étude de Roussel et
Auchet (1989), sur les inondations dans l’agglomération de Nancy (France) le démontre. Elles
mettent en évidence qu’une pluie orageuse occasionnera d’importants dégâts matériels et
humains si le périmètre bâti est très dense et les réseaux d’évacuation trop étroits. Elles montrent
également qu’en l’absence de travaux d’aménagement d’envergure, les bas quartiers du centre-
ville seront les plus exposés aux risques d’inondations. Ledoux (1994), révèle la particularité
du contexte humain dans la chaine des causes des inondations sur l’ile de la Réunion (France).
Il estime que l’urbanisation trop rapide et surtout « sauvage » entraine un accroissement de
l’écoulement des eaux vers les bas-fonds et que le problème de drainage des eaux pluviales est
à l’origine de dommages importants. Aussi, la précarité de l’habitat, généralement situé dans
les sites à risque renforce la vulnérabilité du milieu face aux inondations.
A Cotonou (Bénin), Wallez (2010), souligne que divers facteurs participent à la vulnérabilité
des populations aux inondations. Ils sont liés à l’environnement urbain (densité, croissance
8 https://donnees.banquemondiale.org/indicateur/SP.URB.TOTL?end=2017&start=1960&view=chart
5
démographique, urbanisation incontrôlée et galopante, imperméabilisation du sol...), à sa
gestion et à la pauvreté des populations.
Au Cameroun, Tchotsoua, (1996), montre qu’au fur et à mesure que les versants sont urbanisés
et pour la plupart sans aménagements adéquats, la fréquence des inondations catastrophiques
devient plus importante et n’est plus exclusivement liée aux précipitations de fréquence rare.
Des études réalisées par ce même auteur dans certains quartiers des bas-fonds de la ville de
Yaoundé (Mokolo-Elobi, Briqueterie-Est, Melen-Parc et Nkolmesseng …) montrent une
recrudescence des phénomènes d’inondations sur la durée. Il nous apprend également qu’en
1875, trois inondations maximum par an étaient enregistrées dans ces quartiers ; mais depuis
1982, presque chaque averse provoque des inondations (cas de l’inondation de Mai 2007 à
Melen-parc). Des résultats similaires intégrant de nouveaux paramètres, notamment les limites
de la planification et la gestion des systèmes de drainage des eaux pluviales ont été obtenus par
Lambi et al., (2000). A Douala, Zogning et al. (2015) notent que deux principaux facteurs :
anthropiques (occupation des lits, absence de maintenance des équipements hydrauliques ...) et
naturels (précipitations, géologie, proximité de la mer et surtout topographie) conditionnent la
fréquence des inondations.
1.4.2 Mesures de réduction des risques de catastrophes
Au plan international, la réduction des risques et des catastrophes est soutenue par le CAH
(2005-2015) et le CAS (2015-2030). Ces différentes cadres proposent des recommandations
qui sont ici reprises : le CAH recommande que la réduction des risques de catastrophes soit une
priorité nationale et locale fondée sur un cadre institutionnel solide dans tous les Etats, sur
l’identification, l’évaluation et la surveillance des risques de catastrophes et le renforcement
des systèmes d’alerte rapide. Le CAS qui succède au CAH, recommande l'amélioration de la
compréhension de tous les facteurs de risques de catastrophe (exposition, vulnérabilités,
caractéristiques des aléas, ….), le renforcement de la gouvernance des risques de catastrophe
(notamment des plateformes nationales), la mise en place de mécanismes de recevabilité en
matière de gestion des risques de catastrophe, la préparation à reconstruire mieux, la
reconnaissance des intervenants et de leurs rôles, la mobilisation d'investissements raisonnés
en fonction des risques afin d'éviter la création de nouveaux risques, la résilience des structures
médicales, du patrimoine culturel et des sources d'emploi, le renforcement de la coopération
internationale et des partenariats mondiaux, ainsi que des politiques et programmes de dons
raisonnés en fonction des risques, y compris pour les aides et prêts accordés par les institutions
financières internationales.
Au Cameroun, plusieurs lois et décrets sous-tendent la gestion des risques à différentes échelles.
Les lois N 67-LF-9 du 12 Juin 1967, portant organisation générale de la défense et N°86/016
du 06 décembre 1986, portant réorganisation générale de la protection civile ayant abrogé la loi
de 1973. L’Etat s’appuie également sur la loi N ° 80-22 du 14 Juillet 1980, portant répression
des atteintes à la propriété foncière et domaniale. Cette loi stipule en son article 4 que, toutes
personnes qui, en violation de la législation en vigueur exploitent ou se maintiennent sur une
parcelle non aedificandi, ou sur une dépendance du domaine public ou du domaine national,
devraient être déguerpies après une mise en demeure de 30 jours. Il y a également la loi
6
N°2004/017 du 22 Juillet 2004 portant orientation de la décentralisation (articles 2 al. 1 et 2 ;
art. 3 al. 1, art.4 al.1 et art.5), conforment au CAH qui préconise la mise en place au niveau des
collectivités territoriales des moyens nécessaires à la gestion des risques et catastrophes. Aussi,
au terme de la loi N°2004/018 du 22 Juillet 2004 fixant les règles applicables aux communes,
des compétences sont transférées aux communes leur permettant d’être plus efficaces dans la
gestion et la réduction des risques du fait leur proximité aux zones exposées (Cf. articles 16,
17, 18 et 19). Au plan règlementaire, on a le Décret N°68-DF-7 du 15 janvier 1968 qui renforce
la protection des installations civiles d’importance vitale, le Décret N°96/054 du 12 mars 1996
fixant la composition et les attributions du Conseil National de la Protection Civile, le Décret
N°98/031 du 09 mars 1998 portant organisation des plans d’urgence et de secours en cas de
catastrophes ou de risque majeur, le Décret N°2002/018 du 18 janvier 2002 portant ratification
de la convention cadre d’assistance en matière de protection civile adopté à Genève le 22 mai
2000 et l’Arrêté N°037/PM du 19 mars 2003 portant création, organisation et fonctionnement
d’un Observatoire National des Risques. A l’échelle locale, les autorités interviennent
également au travers de la prévention par l’information, la sensibilisation et l’éducation de
masse. La mise œuvre d’un plan de contingence et des plans ORSEC (Organisation de la
Réponse de Sécurité Civile) a renforcé les mesures de réhabilitation et de prise en charge des
victimes.
La gestion des risques dans la ville de Douala s’est réellement amorcée au début de la décennie
1980 par la création du Service Technique Municipal (STM) de la commune de Douala, au
cours du Ve plan quinquennal (1981-1986) du Cameroun. Ce Service avait pour mission le
curage des lits mineurs des principaux cours d’eau, la réhabilitation des caniveaux de la ville et
la démolition des obstacles à l’écoulement des eaux pluviales (Mbaha et al., 2013). En plus, La
ville de Douala, dans son « Agenda 21 local » prend conscience de la réalité des risques hydro-
climatiques et cherche des voies et moyens pour orienter son développement en dehors de ces
zones écologiques.
1.6 Cadre conceptuel : Représentation du risque
Nous retenons deux dimensions pour caractériser la représentation : la dimension spatio-
temporelle et la dimension socio-temporelle. La représentation du risque est entendue par la
plupart des auteurs comme la perception et le comportement des acteurs face au risque
(Harrison, 1988). Par représentation sociale du risque, entendons aussi la manière dont le risque
et l’espace à risque sont perçus par les communautés, la manière dont ces communautés vivent
dans les espaces à risque à travers les modes d’occupation du sol et les stratégies
d’aménagements actuels et futurs. Cette représentation peut provenir aussi bien des experts, de
par leurs calculs, que des communautés, fruit de leur ressenti, de leur vécu et de leur système
de valeurs (Kermisch, 2012). Il convient alors d’individualiser trois variables clés liées à la
notion de représentation. Ces dernières nous permettent de mieux appréhender la représentation
dans le temps. Il s’agit de la perception du risque et de l’espace à risque, du vécu et de la
projection.
1.6.1 Perception du risque et de l’espace à risque
La perception du risque désigne la compréhension et l’interprétation du risque ou de l’espace à
risque par une communauté. Cette perception est fortement liée à la connaissance du risque, des
7
enjeux (volonté de s’exposer au risque) et du contexte économique, social et culturel (familiarité
au risque).
1.6.2 Vécu
Le terme vécu est utilisé ici pour caractériser l’attitude et le comportement d’une communauté
donnée dans une zone précise face au risque. En règle générale, le vécu se traduit par des
aménagements et la mise en place de stratégies ponctuelles de gestion du risque. Il dépend
entièrement de la perception.
1.6.3 Projection
La projection est l’appréhension du risque et de l’espace à risque par une communauté donnée
sur le long terme. C’est la dimension prospective du risque et de l’espace à risque ainsi que les
modes de stratégies individuels et collectifs visant à limiter voire stopper le risque sur le long
terme.
Figure 2 : Composantes de la représentation du risque
Projection
Vécu
PerceptionPerception
8
Figure 3 : Conceptualisation de la représentation du risque.
Representation
du risque
Perception
Situation en zone à risque;
Contexte economique, socio-culturel;
Enjeux en zone à risque.
VécuStratégies d'amenagement et de gestion des inondations
Projection
Vision à long terme
Anticipation des risques futurs
Coût
Concept Variables Indicateurs
9
PARTIE I : METHODOLOGIE ET DIAGNOSTIC TERRITORIAL DE LA VILLE DE
DOUALA
PARTIE I.1 : METHODOLOGIE DE RECHERCHE
La méthode générale adaptée dans le cadre de cette étude est une méthode analytique combinant
deux approches de collecte de données quantitatives et qualitatives. Une approche dite géo-
historique pour la collecte des données d'archives des journaux, des sites internet utiles à
l’élaboration des banques de données sur les inondations à Douala. Ces données géo-historiques
nous ont permis de mettre en évidence les variations spatiales et temporelles des inondations
ainsi que les stratégies de réponse qui en résultent. Une approche par enquête de terrain dont la
démarche est tournée vers la représentation sociale du risque par les élus locaux et les
populations locales.
I.1 Technique de collecte des données
I.1.1 Approche géo-historique
Cette approche est préalable à la démarche d’enquête de terrain. Elle permet d’une part
de quantifier et de qualifier la dynamique spatiale évolutive de l’occupation urbaine et d’autre
part, de recenser, d’analyser et de cartographier la tendance des inondations dans la ville de
Douala.
I.1.1.1 Données sur la dynamique de l’occupation du sol
En terme d’occupation des sols, notre regard est beaucoup plus porté sur l’analyse des
dynamiques historiques des espaces urbanisés par rapport aux zones potentiellement à risque,
et sur la dynamique du niveau d’élévation des sols par les remblais. Pour ce faire, nous avons
eu recours aux images Landsat-8 de 2017 et Landsat TM de 1986, d’une résolution de 30 m et
ASTER GDEM 1.0 à une seule scène (60x60km) et d’une précision de 20 m obtenues sur Earth
Explorer9. Les images Landsat ont été traitées dans le logiciel ENVI10. Il s’agit d’un logiciel,
largement utilisé en télédétection pour la visualisation, le traitement, l’analyse et la présentation
de nombreux types d’images numériques, dont les images satellites (Denis, 2016). L’opération
de traitement privilégiée a été la classification des entités spatiales que nous avons regroupées
en trois classes (tâche urbaine, espace vert et eau de surface). Après classification, les images
ont été importées sur le logiciel de cartographie Arcgis 10.4 pour le calcul des superficies des
différentes classes. Cette opération nous a permis de qualifier et de quantifier la densification
et l’extension de la ville de Douala. Chaque image a fait l’objet d’un traitement afin de
cartographier la limite de l’occupation urbaine. Il s’agit ici d’une approche diachronique de
l’étude de la dynamique de l’occupation du sol inspirée des travaux de Varnnier et al., ( 2011).
9 Plateforme qui intègre des images satellite de haute résolution avec les frontières politiques, les littoraux, les
fleuves, 267 pays et régions, 40000 villes rangées, 15000 îles et 1700 tremblements de terre historiques
remarquables depuis 1980 dans un globe fantastique de la terre en trois dimensions (3D). 10 Environment for Visualizing Images.
10
L’image ASTER11 quant à elle (traitée sur Arcgis) nous a permis d’estimer la superficie des
zones basses ayant fait l’objet de remblayage avant l’installation des populations. Nous
entendons par zones basses, toute zone dont l’altitude varie entre 0 et 5 m. Cette méthode est
inspirée de Zogning et al., (2015) pour la détermination des zones inondables.
I.1.1.2 Données sur les inondations passées et stratégies de gestion
La constitution d’une base de données sur les inondations à Douala nous a permis de mieux
cerner la représentation spatiale du risque. Par ailleurs, cette approche devrait s’appuyer sur un
socle solide comme des archives urbaines ou communales recensant les séquences
d’inondations antérieures. Il n’en est rien. La ville Douala, tout comme la plupart des villes
africaines souffrent encore aujourd’hui, de l’absence de données sur les inondations dans la
longue durée. Toutefois, les données existantes demeurent éparses et discontinues. Il est donc
urgent de mener des projets visant à combler ces manquements car une meilleure gestion du
risque passe par une meilleure connaissance du risque. Cette étude épouse parfaitement cette
logique mais les résultats obtenus méritent d’être poursuivis et complétés.
Pour cette étude, nous avons dépouillé 12 000 numéros du journal Cameroun Tribune12 (CT)
de 1980 à 2018. A l’issu, nous avons dénombré près de 1000 numéro manquants. Cette enquête
archivistique a tout de même permis de constituer une base de données qui recense plusieurs
événements couverts par le journal. Chaque évènement recensé comporte des caractéristiques
(lieu, hauteurs d’eau, fréquences), des causes (phénomènes météorologiques, anthropisation) et
des conséquences (dégâts environnementaux, matériels et humains).
Cependant, le recours à cette méthode pour la constitution d’une telle base de données se veut
insuffisante et se heurte à plusieurs écueils. La principale limite est que tous les évènements
n’ont pas été couverts par le journal. Par ailleurs, il n’existe pas dans Cameroun Tribune, une
rubrique consacrée essentiellement à la problématique des risques au Cameroun. La publication
d’un évènement dommageable dépend essentiellement de son ampleur et de son étendue
spatiale. Tout compte fait, le choix de ce journal tient surtout du fait que celui-ci est la référence
concernant la fiabilité des sources au Cameroun.
A l’issue de cette étape, nous avons établi une carte spatiale du risque. Cette carte spatiale,
réalisée à partir d’une méthode exploratoire est confrontée à la cartographie plus affinée des
zones à risque réalisée par des chercheurs tel que Zogning et al. (2015). Le but est de confronter
la cartographie des zones inondées à la cartographie des zones inondables. Une telle
comparaison a permis de montrer que, contrairement à ce que l’on pourrait croire, les zones à
risque d’inondation dans une ville anarchiquement construite comme Douala ne sont pas
nécessairement les zones de basse altitude (mangrove, marécage). Dans des villes où les réseaux
de drainage sont quasi inexistants, les causes des inondations peuvent être bien plus éloignées
de la zone inondée ; il s’agit d’une information que les Modèles Numériques de Terrain (MNT)
ne prennent pas en compte.
11 Advanced Spaceborne Thermal Emission and Reflection Radiometer. 12 Quotidien généraliste camerounais créé par le gouvernement en 1974.
11
Une fois recensés, les journaux ont fait l’objet d’une analyse minutieuse. Le but ici est d’étudier
les données archivistiques en intégrant les discours des autorités en charge de la gestion des
risques à Douala sur la longue durée. Lors de cette analyse, nous avons été particulièrement
attentifs aux dates des évènements et à l’argumentaire des autorités. Cette méthode d’analyse
de corpus de presse est inspirée des travaux d’Idelson, (2000). Cette démarche est une étape
nécessaire sur plusieurs points. Les résultats obtenus nous ont permis de sélectionner les
différents sites pour l’approche par enquête sur le terrain.
I.1.2 Démarche d’enquête de terrain
Afin de mieux cerner l’évolution du risque en relation avec les stratégies adoptées de
1980 à 2018 dans la ville de Douala, nous avons réalisé plusieurs entretiens auprès des
personnes ressources et des enquêtes par questionnaire auprès des populations cibles. La
sectorisation de la ville de Douala a permis de faire le choix de l’échantillon d’enquête sur la
représentation sociale.
I.1.2.1 Choix des sites à enquêter
Compte tenu de la taille de la ville, trois quartiers ont été sélectionnés pour les enquêtes de
terrain. Le choix a été inspiré de la méthode d’abduction usitée en sciences de la
communication. Pour cette étude, nous l’appellerons « méthode du lien avec le mot clé ». En
science de la communication, les auteurs tels que Cavalière et al., (2016) utilisent l’abduction
pour l'exploration de la donnée « tweet ». Il s’agit ici de voir le lien entre la densité de la
population et le nombre de tweet en s’appuyant sur des mots clés. Pour cette étude, les mots
clés sélectionnés sont « Inondation » et « Douala ».
Sur base de l’hypothèse selon laquelle dans un texte, il existe une étroite correspondance entre
les termes « Inondation », « Douala » et les noms des quartiers de la ville, nous tentons de
mettre en évidence, les liens forts ou faibles entre les noms de quartiers et le risque d’inondation.
Le but de cette manœuvre est de faire un zonage avec la plus haute résolution possible des
principaux secteurs les plus sujets aux inondations. La recherche internet s’est faite via les
moteurs de recherche libre accès « Google » et « Google scholar ». Le premier permet d’avoir
une gamme de résultats plus large et le second qui est un service proposé par Google est
spécialisé dans la recherche d’articles scientifiques. La combinaison des résultats issus de ces
deux moteurs offre une information riche, continue et à la fois scientifique et grand public.
Une fois le moteur de recherche lancé, nous inscrivions dans la barre de recherche les mots clés
« Inondation », « Douala » et le nom d’un quartier : soit : « Inondation + Douala + Bonapriso ».
Cette requête a été reproduite 192 fois, soit le nombre de quartiers de la ville. A l’issue de
chaque requête, nous avons systématiquement relevé le nombre de fois que les mots clés
revenaient dans les textes trouvés via les moteurs de recherche. Les résultats obtenus ont été
par la suite confondus avec ceux de notre base de données d’où les critères des choix des
quartiers à enquêter qui suivent :
- Quartier inondé :
12
- Intérêt d’étude et de médiatisation : Forte, faible.
- Epoque et type de d’urbanisation : quartiers anciens (entre 1980 et 2000),
quartiers récents (de 2001 à 2017) ; extension et densification.
- Situation spatiale du quartier : zone de mangrove, de marécage ….
A partir de ces critères, nous avons individualisé trois quartiers :
1. Bois des singes : quartier d’extension, nouvellement urbanisé sur une zone de mangrove, à
forte fréquence d’inondations, à faible intérêt d’étude et de médiatisation ;
2. Bonapriso : quartier central, anciennement urbanisé, à forte récurrence d’inondations, à fort
intérêt d’étude et de médiatisation ;
3. Makepe Missoke : quartier de densification et marécageux, anciennement urbanisé,
fortement inondé et à fort intérêt d’étude et de médiatisation Ces quartiers nous ont servi de
base à l’étude de la représentation sociale du risque à travers les différentes campagnes de
terrain, notamment la comparaison avec les données issues de l’étude de la presse et des médias
sociaux.
I.1.2.3 Description des quartiers d’enquête
1) BOIS DES SINGES. Zone d’estuaire située au sud de l’aéroport international de Douala, le
Bois des Singes est un quartier classé zone non aedificandi d’après le PDU (Plan Directeur
d’Urbanisme). Il s’agit d’un quartier très récent impropre à l’habitat dans lequel aucun permis
de construire ou même d’implanter ne devrait être délivré. Il fait partie de la zone D-4, qui
d’après le PDU, correspond aux espaces verts et constituent des réserves pour des
aménagements futurs particuliers. Tout type d’aménagement ou de construction est interdit tant
qu’une autorisation d’occupation particulière n’a pas été fournie par les autorités compétentes
et la mise à jour du P.O.S (Plan d’Occupation des Sols). La conquête de cet espace a commencé
dans les années 2010 et s’est accélérée à partir de 2015. Aujourd’hui, certaines habitations ne
sont accessibles que par voie maritime surtout en période de hautes eaux.
2) BONAPRISO. Quartier planifié mais qui connait aussi des inondations du fait du colmatage
des drains et des comportements des résidents. Il est d’ailleurs présenté comme l’un des plus
beaux quartiers résidentiels de la ville.
3) MAKEPE MISSOKE. Ancien quartier, non planifié et traversé par deux principaux cours
d’eau (Tongo’o Bassa et le Ngonghe), Makepe Missoke est le résultat de l’occupation
anarchique et spontanée de l’espace et des vides urbains, notamment des zones marécageuses
et lits des cours d’eau. La Communauté Urbaine de Douala (CUD) le qualifie de « noyaux
villageois ancien », absorbé par l’urbanisation, et ayant accueilli les nouveaux arrivants dans sa
périphérie, le rendant parfois très étendus.
13
Figure 4 : Localisation des sites enquêtés.
I.1.2.4 Approche d’entretien direct
Afin d’analyser la représentation du risque par les autorités locales, un guide d’entretien
comprenant 9 questions ouvertes a été élaboré. Chaque entretien, d’une durée variable entre 45
minutes et 1 heure s’est déroulé à l’heure du déjeuner afin de s’assurer de la disponibilité de
l’enquêté. Ces entretiens ont été menés auprès de 5 personnes ressources, donc dans 5
institutions en charge de l’aménagement du territoire et de la préservation du bien-être des
populations à Douala (Préfecture du département du Wouri, Communauté Urbaine de Douala,
Communes d’Arrondissement de Douala I, II et V). Le choix des différents interviewés s’est
fait d’après les critères suivants : fonction et ancienneté à la fonction occupée. Les principales
thématiques abordées au cours de ces entretiens étaient la perception du risque d’inondation,
les mesures et les moyens mises en œuvre, ainsi que les perspectives futures de gestion du
risque et d’aménagement durable de la ville.
I.1.2.5 Approche d’enquête par questionnaire
Pour l’analyse de la représentation sociale du risque par les habitants des quartiers
Makepe Missoke, Bois des Singes et Bonapriso, 100 questionnaires de 16 questions ont été
établis. Une enquête dure environ 20 minutes. Le choix de l’échantillon à enquêter s’est
principalement fait sur la base des ménages. C’est le scénario minimal qui consiste à interroger
environ 2,5% des ménages qui a été retenu. Les principales thématiques abordées au cours des
questionnaires étaient perception du risque, le comportement des populations en zone à risque
14
ainsi que les futures options d’adaptation. Chaque enquête est généralement suivie de quelques
minutes de communication ouverte afin de recueillir le ressenti de chaque enquêté sur la
problématique abordée. Ces données supplémentaires, qui constituent par ailleurs une donnée
et non négligeable, sont par la suite utilisées pour mieux comprendre et interpréter les résultats
des enquêtes. L’intérêt d’une telle démarche réside dans le fait que, au moment où les questions
sont posées et les réponses notées, l’enquêté a toujours un peu de retenue par rapport à ce qu’il
devrait ou ne devrait pas dire. Aussi, ces commentaires ont été considérés comme des mini-
entretiens en complément aux questionnaires d’enquêtes qui, même s’ils permettent d’obtenir
des données quantitatives et parfois qualitatives pour des analyses statistiques, ils ne suffisent
pas toujours pour faire des analyses de manière objective.
I.2 Test du questionnaire
Notre enquête test a été faite auprès de 5 ménages. Cette enquête test nous a permis de nous
imprégner du terrain, de vérifier la qualité des réponses ainsi que la pertinence des questions.
A l’issu de cette étape certaines questions ont été modifiées ou validées et d’autres rejetées.
I.3 Administration du questionnaire
Pour l’administration du questionnaire, l’interlocuteur du ménage devrait satisfaire aux
conditions ci-après :
- Etre un membre du ménage de préférence depuis l’installation du ménage dans ce
quartier (chef de ménage, enfant du ménage ou tout autre résident permanant dans le
ménage)
- Être une personne majeure (plus de 18 ans)
I.4 Dépouillement des questionnaires et codification des questions
Tous les questionnaires remplis ont été dépouillés dans un masque de saisi établi à cet effet
dans le logiciel statistique CSPRO 4.0 (Census and Survey Processing System)13. Lors du
dépouillement, nous avons recodé les modalités des questions ouvertes afin de faciliter les
analyses.
I.5 Conception du plan d’analyse
Analyse bi-variée :
Croisement de la variable dépendante (situation en zone inondable) avec les variables
indépendantes (facteurs explicatifs : existence ou non de titre foncier, niveau d’instruction,
région d’origine, etc.).
13 Census and Survey Processing System(CSPro) est un logiciel libre utilisé par des centaines d'organisations et
des dizaines de milliers de personnes pour la saisie, modification, la tabulation et la diffusion des données de
recensement et d'enquête. CSPro est conçu pour être aussi convivial que possible, mais suffisamment puissant pour
gérer les applications les plus complexes.
15
Variable
indépendante
Variable indépendante
1er
modalité
2ème modalité 3ème Modalité … …… …
1er modalité 1.Effectif
2.%
…….
…….
…….
Croisement de certaines variables avec les caractéristiques du ménage et du chef de
ménage (taille du ménage, âge ou sexe du chef de ménage), les variables d’indentification
(quartier, profession, niveau d’instruction).
Variable de contrôle
Variable dépendante
1er modalité 2ème modalité 3ème Modalité … … …
Sexe de l’enquêté 1.Effectif 2.%
Age de l’enquêté
Quartier
…….
I.6 Calcul des indicateurs
Pour analyser la représentation du risque par les ménages, nous avons utilisé le logiciel
statistique SPSS (Statistical Package for the Social Sciences) et Excel. Ce logiciel de traitement
et d’analyse de données quantitatives a permis de construire trois variables composites que nous
avons nommé « le Perçu, le Vécu et la Projection ». Nous avons également eu recours à
l’Analyse Factorielle à Composante Multiple (AFCM), construit à partir du logiciel statistique
Spadv5514 en utilisant les variables relatives à la connaissance du risque, à l’âge, au nombre
d’années passées dans le quartier, au quartier et aux comportements des ménages en zone à
risque, aux options sur les adaptations futures et à la détention d’un titre foncier ...
14 Logiciel de Data Mining
16
PARTIE I.II : DIAGNOSTIC TERRITORIAL DE LA VILLE DE DOUALA
II.1 Localisation de la zone d’étude
Douala est compris entre 4° et 4°10’ de latitude Nord et 9°35’ et 9°80’ de longitude Est. C’est
une ville portuaire située dans l’estuaire du Wouri au fond du golfe de Guinée et implantée à
30 kilomètres de l’océan Atlantique. Elle s’étale sur 21 000 hectares (2009) et est administrée
par la Communauté Urbaine de Douala (Tchuikoua, 2010). Elle comprend six communes
d’arrondissement dont cinq communes centrales et une île très peu habitée, située au sud de
Youpwé qui constitue la sixième commune
Figure 5 : Localisation de la ville de Douala.
II.2 Prédisposition naturelle de la ville de Douala aux inondations
II.2.1 Densité du réseau hydrographique
La ville est constituée d’un réseau hydrographique relativement dense. L’on dénombre environ
827 km de drains naturels. Elle compte 9 bassins hydrologiques (Bonassama, Besséké,
Bobongo, Mgoua, Kambo, Nsapé, Mbopi, Mbanya et Tongo bassa) qui se jettent tous dans le
Wouri. Le Wouri, principal fleuve de la ville prend sa source dans les hauts plateaux de l’Ouest-
Cameroun ; il traverse la ville avant de se jeter dans la mer. La ville est encadrée de part et
d’autre par les fleuves Sanaga, Dibamba, Moungo et Nyong. Dans l’ensemble, ces cours d’eau
sont formés en méandres qui ont tendances à ralentir l’écoulement des rivières et à stagner.
17
L’estuaire du Wouri est régulièrement envahi par les eaux marines et comporte de nombreuses
criques, des mangroves et de nombreuses zones marécageuses qui très souvent encerclent de
rares petites zones à peine aménageables envahies par la ville (CUD, 2011)
II.2.2 Platitude du relief
La ville entière s’étale dans une zone de plaine dont l’altitude varie de 0 à 12 m avec de faibles
pentes (2,9% à 6,45%) interrompues par de bas plateaux (Joss, Akwa, Bonapriso) dont les
altitudes oscillent entre 20 et 60 mètres (CLUVA15, 2012). Les faibles pentes limitent la vitesse
des écoulements et favorisent la stagnation et l’infiltration des eaux de pluie. On distingue les
zones de basses terres et les zones de légers bombements. Les basses terres sont constituées
d'alluvions récentes plus ou moins bien consolidées avec une bonne aptitude de rétention de
l'eau. Toutes ces conditions facilitent la mise en place des marécages. Les plateaux et les
collines sédimentaires sont formés d'alluvions consolidées coupées de vallées constituées
d'alluvions récentes mal consolidées (CUD, 2011). Cette platitude est plus accentuée sur la rive
droite (de zéro mètre au niveau des mangroves, à un mètre à Mambanda, 2 à 3 mètres à la pointe
Bonabéri et Bonendalé) et est l'un des facteurs d'amplification de la fréquence des inondations
(Meva'a et al., 2010).
II.2.3 Abondance pluviométrique et régime de marées
En raison de la proximité de l’océan Atlantique et des influences directes et régulières de la
mousson guinéenne, Douala et ses environs présentent de fortes averses presque toute l’année
(Suchel, 1972) ; avec une légère baisse de novembre à février. La hauteur moyenne annuelle
des précipitations est de 4 000 mm correspondant à une pluie journalière moyenne de près de
150 mm étalées sur 217 jours en moyenne (Zogning et al 2015 ; Amanejieu, 2015). Ces
précipitations s’étalent sur une longue saison de pluie qui va de mars à novembre, les mois les
plus pluvieux (juillet et août) peuvent cumuler jusqu’à 1500 mm de précipitation. (Tchadeu et
Ketchemen, 2009). Hormis ce cumul mensuel, on observe également une certaine régularité,
voire une grande concentration des pluies en quelques séquences. Pendant ces averses
successives, la terre absorbe l’eau saturant les nappes souterraines et les strates rocheuses. Les
inondations peuvent donc résulter soit de précipitations courtes mais intenses (en une seule
séquence d’un jour) soit de précipitations durables (une séquence de plusieurs jours de pluie).
C’est cette répartition temporelle qui est à l’origine des pluies tous les mois de l’année. Au sein
de ces mois les événements pluvieux sont inégalement répartis et parfois très rapprochés
(Amanejieu, 2015).
Pour ce qui est du régime de marée, la ville de Douala est soumise à la remontée des eaux issues
de l'estuaire du Cameroun et qui alimentent les rivières dans les quartiers. On y note la présente
de deux "criques" : la crique Docteur au sud et la crique Olga. Ces criques se vident et se
remplissent au gré des marées. La différence maximale entre les altitudes du plan d’eau en haute
et basse mer est de l’ordre de 3 mètres. La cote des plus hautes eaux est de 2,70 m, alors que
certaines zones de la ville ont une altitude inférieure à 1 m. Ce n’est qu’à l’issue d’importants
remblais, que certains quartiers initialement marécageux, comme New-Bell, Congo, Mbopi,
15 Climate change and Urban Vulnerability in Africa. Consultable à http://www.cluva.eu/
18
Mbanya, Tongo Bassa, ont pu s’urbaniser. Toutefois, ces remblais ont parfois perturbé
l’écoulement naturel des eaux » (CUD, 2011). La fluctuation de la marée fait varier les débits
dans les drains qui y sont connectés car l’écoulement par drainage du continent vers le fleuve à
marée haute est très réduit ( Ndongo et al., 2015). Il apparaît clairement que de nombreuses
zones sont inondées lors des averses et que la stagnation des eaux d'origines diverses est
inévitable à Douala.
II.2.4 Caractéristiques des sols
Le site de Douala est constitué de deux types de sols : sablo - argileux et argilo – sableux aux
caractéristiques topographiques différentes(INS16, 2015). D’après une étude réalisée par la
CUD en 2009 ; ces sols varient en fonction de leur aptitude à l’assainissement. Dans les
formations sablo-argileuses, favorables à l’assainissement, le niveau d’eau au sol varie entre 2
et 5 m, la profondeur du substratum se situe entre 1 et 2 m, la perméabilité au sol est de l’ordre
de 1 à 3 cm/heure. Les formations argilo-sableuses par contre ne présentent aucune aptitude à
l’assainissement, le niveau d’eau au sol est inférieur à 1 m et la perméabilité à 1 cm/heure. De
plus, la nappe phréatique est très peu profonde et même parfois affleurante et la capacité
d’infiltration des eaux de pluie est très limitée. Ainsi, pendant la saison des pluies les sols sous
l’influence de fortes pluies très rapprochées atteignent rapidement leur niveau de « saturation »
ce qui entraîne le gonflement de la nappe phréatique qui renvoie rapidement l’eau en surface
d’où les inondations fréquentes. C’est généralement dans cette zone qu’on enregistre les
grandes hauteurs d’eaux et les plus longues durées de submersion.
II.3 Contexte démographique
La ville de Douala a connu depuis l’époque coloniale une croissance démographique qui s’est
amplifiée après les indépendances (Mbaha et al., 2013; Nsegbe et al., 2014). Déjà en 1950, le
nombre d’habitant est estimé à environ 100.000 contre 30.000 et 60.000 pour Yaoundé et à
Abidjan. En 1976, la population de Douala est estimée à près de 458.400 habitants ( Gubry,
Negadi, 1983). Elle passera ensuite à 1.907.479 habitants en 2005 (RGPH17) avec un taux de
croissance de 4,87% (1987-2005). En 2005, elle concentre environ 10,92 % de la population
urbaine camerounaise contre 6.9% en 1976 (Nsegbe et al., 2014). En 2010, la population
« doualaise » est estimée à 2,5 millions d’habitants (BUCREP18, 2010, CUD, 2011) et les
projections indiquent que Douala comptera en 2025, entre 1,3 et 1,6 millions d'habitants
supplémentaires, soit près de 4 millions. Considérant qu'une partie de cette population va
s'installer dans les zones déjà urbanisées, et encore peu denses, il est possible de considérer
qu'environ 11 000 hectares seront nécessaires pour accueillir les autres (PDU, 2011).
La ville concentre environ 10 % de la population du Cameroun et près de 20 % de la population
est urbaine (CUD, 2011), avec un taux annuel moyen de croissance démographique estimé à
16 Institut National de la Statistique du Cameroun, 17 Recensement Général de la Population et de l’Habitat 18 Bureau Central de Recensement et d’Etudes de la Population
19
5% sur les 30 dernières années. Ce taux est largement au-dessus du taux national estimé à 2,8%
et la population de Douala pourrait tripler à l’horizon 2035 (INS-Cameroun19, 2015)
II.4 Gestion des déchets
Les déchets produits à Douala sont surtout les déchets hospitaliers et emballages issues des
ménages (boîtes de peinture, bouteilles de détergent, emballage divers, sachets plastiques,
bouteilles d’eau ...). Le ramassage insuffisant de ces ordures par la société d’Hygiène et de
Salubrité du Cameroun (HYSACAM) explique en partie la présence de grandes quantités de
déchets solides dans les chenaux de drainage. Cela entraîne un affaiblissement de leur capacité
hydraulique et des nuisances pour les riverains (Sogreah, 2006). Le rejet de ces déchets dans
les cours d’eau entraîne leur obstruction ce qui empêche les eaux de s’écouler librement. C’est
le cas dans le dalot de New-Bell Ngangué au niveau de la chefferie Bonapriso où le cours d’eau
constitue désormais le moyen par excellence d’évacuation des déchets domestiques
(Amanejieu, 2015). Ces derniers, qui sont ensuite piégés par la végétation réduisent la capacité
hydraulique du collecteur et entrainent le débordement des rivières à la moindre précipitation.
19 Institut National de Statistque-Cameroun
20
PARTIE II : RESULTATS ET DISCUSION
PARTIE II.1 : CONSTRUCTION ET REPRESENTATION SPATIO-TEMPORELLE
DU RISQUE D’INONDATION
INTRODUCTION
Si l’inondation est tout d’abord un alea naturel, l’homme à contribuer à son aggravation à
travers les modes d’occupation et d’aménagement de l’espace (Baggio et Rouquette, 2006).
Depuis les années 1980, la ville de Douala s’agrandit au détriment des mangroves sur la côte et
des vides urbains. Après l’occupation générale du site initialement prévu pour l’urbanisation,
les populations envahissent graduellement les zones à risque (lits majeurs, lits mineurs,
marécages, mangroves…) décuplant ainsi leur vulnérabilité.
I. Dynamique urbaine et anthropisation des zones potentiellement à risque : facteur
d’amplification de l’aléa et des vulnérabilités
L’analyse des images Landsat TM de 1986 et Landsat 8 de 2017 a permis d’estimer différentes
phases d’extension de la ville et de régression des mangroves depuis 1986. En 1986, la surface
occupée par la ville de Douala était de 10708,5 ha. Cette surface est passée à 24726,6 ha en
2017 ; soit une augmentation 14018,6 ha. En 31 ans l’espace urbain à plus que doublé. On
estime à environ 452 ha la superficie de l’espace conquis par les habitations par an (soit 9 ha
par semaine). On est passé d’une agglomération parsemée d’espaces verts en 1986 à une
agglomération très compactée en 2017 envahissant inéluctablement les mangroves suite au
développement urbain continu du fait de l’installation des quartiers spontanés (Fig. 6). De 1986
à 2017, la ville de Douala est passée de 98 à 196 quartiers, soit le double de ces quartiers se
seraient rattachés au noyau central de 1986. 3 quartiers en moyenne naissent dans la ville de
Douala chaque année.
Si pour les autochtones, les mangroves sont considérées comme des espaces sacrés à préserver,
les allogènes par contre y voient des espaces disponibles donc aménageables et urbanisables.
C’est ainsi que dès le début des années 1980, la mangrove commence à faire l’objet de
convoitise par les migrants ruraux. Entre 1986 et 2017, 14008,6 ha d’espaces verts sont perdus
aux environs de la ville de Douala. On estime à 451,8 ha la superficie d’espace vert perdue
chaque année au profit de l’habitat. Compte tenu des projets d’aménagement urbain initiés par
la communauté urbaine depuis 2015, il est fort probable que la perte des espaces verts tende à
s’accentuer dans les années à venir. C’est malheureusement dans une perspective
d’aménagement de la mangrove de la façade fluviale sud que s’inscrit le projet « Sawa beach ».
Il s’agit d’un projet de construction d’un centre d'affaires (hôtels, palais des congrès, centre
culturel...), d’une zone administrative, d’un port de plaisance, d’une base nautique, des espaces
verts et de jardins publics, d’un parc d'attraction, des espaces commerciaux et résidentiels,
logements sociaux ….
21
Figure 6 : Dynamique urbaine à Douala entre 1986 et 2017.
A Douala, la conquête spatiale se traduit par l’absorption progressive des villages périphériques
et des zones non aedificandi qui deviennent de nouvelles formes de villages urbains ; des
espaces dont la seule caractéristique de l’urbain demeure le nom de la ville à laquelle ils
appartiennent. Une fois l’espace apte à l’urbanisation saturé, la population commence à envahir
les zones basses transformant les risques potentiels en risques réels.
L’altitude varie entre 0 et 77 m. La partie nord, plus accidentée, concentre les points les plus
hauts de la ville et est plus apte à l’urbanisation. Cependant, le coût élevé des parcelles dans ces
zones limite les installations. La partie sud par contre, plus basse, moins apte à l’urbanisation
est plus densifiée du fait de la facilité à l’accès à la terre. Depuis 1980, la conquête spatiale des
zones dont l’altitude se situe entre 0 et 5 m s’est accélérée à Douala. Déjà en 1986, la surface
de zones basses (entre 0 et 5 m) urbanisées était de 3180 ha. En 2017, elle est passée à 6010 ha,
soit 2830 ha supplémentaire en 31 ans. Cette superficie représente environ le ¼ de la surface
totale urbanisée en 2017. On estime à 74 ha en moyenne la superficie des zones basses
urbanisées par an. En 1981, Mainet soulignait que le site originel de la ville coloniale, une
succession de trois plateaux en bordure du Wouri, est désormais très largement dépassé. Le flot
des habitations s'est répandu sur les hauteurs de plus de 25 m et ensuite sur les bas niveaux,
inférieurs à dix mètres d'altitude et constitué essentiellement d’un habitat spontané et mal
maitrisé.
22
Figure 7. Altimétrie de la ville de Douala.
Avant l’installation dans ces zones basses, de multiples aménagements préalables sont fait afin
de se prémunir contre les inondations. Il s’agit entre autres des remblayages. Pour se faire, les
populations achètent ou prélèvent du sable ou de la terre sur les berges des rivières et du fleuve
Wouri pour surélever les fondations et les pistes desservant la maison (Planche 1a). Ce
prélèvement des sédiments, couplé à la destruction des mangroves accélère le processus du
débordement des cours d’eau et par conséquent celui des inondations. Les moins nantis utilisent
de déchets ménagers, car financièrement plus abordables, voire gratuits. Cependant, les ordures
23
utilisées contiennent principalement des matières organiques qui entraînent l’affaissement de
la maison après leur décomposition, ce qui augmente leur vulnérabilité.
Dans les zones d’estuaire telles que le Bois des Singes, la slikke est prélevée directement autour
de la zone délimitée pour la construction afin de procéder à la surélévation du niveau de la
fondation (Planche 1b). Une fois la maison construite, la pratique se renouvelle chaque année
avant la saison de pluie. Le sol est remblayé au maximum en fonction des moyens dont dispose
le propriétaire et le niveau des murs est surélevé. Involontairement, les populations contribuent
non seulement à dénaturer le profil initial des cours d’eau en ces zones humides, mais aussi à
créer un relief artificiel et parfois instable qui accentue le caractère endémique des inondations
dans l’espace conquis. Aussi, la ville étant drainée par un réseau hydrographique très dense et
une pluie quasi continue le long de l’année, une bonne partie des produits des remblais est
transportée par les eaux de pluies vers les drains, ce qui contribue à leur colmatage. En
conclusion pour parler comme November (1994), la ville de Douala est désormais victime de
son « gigantisme ». L’installation des populations dans les zones non aedificandi a contribué à
créer ou du moins à aggraver, le risque aussi bien dans les zones potentiellement inondables
(Makepe Missoke, Mabanda, Bois des singes, Youpwé et etc.) que dans les zones jadis viables
(Bonapriso, Akwa et etc.).
A B
Prélèvement du sable pour du remblais à
Makepe Missoke.
Remblais à l’aide de la slikke au Bois des singes.
Planche 1 : Matériaux pour les remblais à Douala.
De manière générale, la diminution du couvert végétal à Douala de 1986 à 2017 est consécutive
à la croissance urbaine sur la même période. Ce résultat corrobore celui de Moutila beni (2011),
qui a démontré que l’urbanisation accélérée et anarchique de Youpwe est étroitement liée à la
croissance démographique de la ville de Douala, à laquelle on peut ajouter la course foncière et
surtout la crise économique qui a frappé le Cameroun au milieu de la décennie 1980. Cependant,
les chercheurs associent de plus en plus la fréquence des inondations en Afrique en général et
24
à Douala en particulier aux changements climatiques caractérisés par la récurrence des pluies
exceptionnelles (Gemenne et al., 2014; Wallez, 2012 ; Feumba et al, 2012). Toutefois, sans nier
l’influence du changement climatique sur la recrudescence des inondations à Douala, les
facteurs majeurs demeurent sans doute l’urbanisation et le développement des activités
humaines en zones inondables. Elle est donc bien avant tout une construction sociale issue des
modes d’occupation de l’espace. Dans ce cas précis, nous pouvons affirmer comme
Gourbesville (2008) que, l’urbanisation est à elle seule génératrice du risque puisqu’elle aboutit
à construire la ville dans des zones où les aléas sont plus forts d’une part et d’autre part, les
réseaux techniques urbains ne sont plus adaptés et sous-dimensionnés pour la collecte et
l’évacuation des eaux. Aussi, l’analyse de la série pluviométrique à Douala depuis 1950 par
Yengoh et al. (2008) n’a présenté aucune anomalie significative, au contraire, elle montre une
baisse de la tendance pluviométrique depuis les années 1980. Cependant, la population de la
ville a presque doublé pendant cette même période et les superficies des espaces urbanisés aussi.
Dans ce cas précis, il est logique que la composante majeure du risque d’inondation urbains
réside dans l’aggravation de la vulnérabilité, c’est-à-dire l’occupation anarchique des zones
fragiles (mangroves, marécages, drains …).
La pratique des remblais dont fait usage la population de la ville de Douala depuis plusieurs
décennies a permis de dompter les eaux et de gagner quelques mètres supplémentaires de
parcelles à construire sur la mangrove. Une étude récente de Domguia (2016) révèle une
avancée du trait de côte d‘environ 4,78 m soit une vitesse linéaire de 31,86 cm/an depuis 1978.
Les espaces laissés par la mer ont été conquises par les populations. Si aujourd’hui l’homme se
réjouit d’avoir vaincu la nature, il est possible que le faisant, il a lui participé à sa propre
destruction. Même si, de par les remblais les populations réussissent à éloigner les eaux et à
s’installer, il est fort probable que le retrait du trait de côte suite à une augmentation du niveau
marin ait des conséquences désastreuses sur la ville de Douala si les mesures de réduction du
risque ne sont pas envisagées. Des projections indiquent d’ailleurs une augmentation du niveau
marin de l’ordre de 23,6 cm à Douala d’ici 2025 par rapport aux observation de 2008 (Domguia,
2016).
II. Analyse spatio-temporelle des inondations à Douala et politiques de gestion
II.1 Analyse temporelle des inondations
D’après les enquêtes réalisées au sein de la CUD et de la DPC-Cameroun, les premières traces
de submersion des espaces habitables enregistrés à Douala, particulièrement dans le petit village
Akwa, dateraient de l’époque coloniale. Toutefois, les archives font état de cas ne constituant
aucune réelle menace pour les populations de la zone côtière, bien habituées à vivre les pieds
dans l’eau. Ce n’est qu’à partir des années 1980 que la problématique des inondations
commence à prendre de l’ampleur et de faire l’objet d’une couverture médiatique par les médias
locaux, comme Cameroun Tribune. En effet, après les indépendances, le premier plan directeur
d’urbanisme de 1959 pose les premiers jalons des modes d’occupation des sols dans la ville de
Douala. Il s’agit en effet des prémisses de l’urbanisation planifiée de la ville, caractérisée par
les premières politiques de logements sociaux pilotées par la Mission d’Aménagement et
d’Entretien des Terrains Urbains et Ruraux (MAETUR) et la Société Immobilière du Cameroun
25
(SIC) jusqu’à la fin des années 1970. Les années 1980 marquent le relâchement de ces
politiques et des plans quinquennaux en vigueur à cause de la crise économique que traverse le
pays. Cette crise accentue l’exode rural, notamment en direction des zones portuaires ce qui
favorise la conquête des zones marécageuses puisque les zones urbanisables prévues par le plan
directeur commencent à atteindre, voire dépasser leur capacité d’accueil. L’occupation
anarchique des zones marécageuses va entrainer des inondations importantes dont les plus
dangereuses sont recensées dès 1984.
Le recoupement temporel de inondations a permis de quantifier leur fréquence dans le
temps mais aussi de juger de leur représentation par les différentes autorités en charge de la
gestion de la ville de 1984 à 2017. Ces représentations s’appuient sur les résultats de l’analyse
des journaux comme présentés dans la méthodologie.
II.1.1 Inondations de 1984 à 1989
De 1984 à 1989, le délégué du gouvernement auprès de la CUD est Christian Tobie Kuoh.
Durant cette période, Cameroun Tribune fait état de 3 inondations occasionnant 2 pertes en vies
humaines et 23 sinistrés. Il s’agit surtout d’inondations de plaines inondables caractérisées par
le débordement des lits des cours d’eau pendant les épisodes pluvieux. Les sinistrés sont surtout
des personnes installées en zones inondables et surtout sur les lits des cours d’eau. Alors pour
faire face à ces inondations, un service municipal technique est créé au sein de la CUD après
les inondations du 5 septembre 1984 et du 23 août 1986 (Planche 2). Ce service municipal a
pour principale mission le curage des lits mineurs des cours d’eau et la démolition des obstacles
à l’écoulement des eaux pluviales. A partir de 1987, les campagnes de curage des drains sont
initiées à Douala. Ce programme s’étend de 1987 à 1989, à la veille de l’entrée du Cameroun
dans les PAS (Plan d’Ajustement Structurel).
Inondation en 1984. Source : CT N° 3054 du 21 août.
P5.
Inondation en 1988. Source : CT N°4150 du 6 juin.
Planche 2: Inondations de 1984 et 1986 à Douala.
26
II.1.2 Inondations de 1990 à 1996
Entre 1990 et 1996, le délégué du gouvernement auprès de la communauté urbaine et autorité
en charge de la planification urbaine est Joseph Pakossy Ndoumbe Dipita. Sous son autorité, 3
inondations sont recensées pour 12 blessés et 300 sinistrés. En effet, la décennie 1990 marque
l’entrée du Cameroun dans les PAS, le début de la libéralisation du secteur de l’urbanisme et le
relâchement des politiques d’aménagement de l’espace par les autorités qui jusque-là étaient
les seuls acteurs dans la transaction foncière. De la dévaluation du FCFA à la suspension des
subventions accordées aux agriculteurs, on assiste à l’afflux massif des migrants ruraux vers la
ville portuaire à la recherche des conditions de vie meilleure. Les prix des produits générateurs
de revenus ayant chuté (cacao, café, etc…), le milieu rural n’est plus attractif, car les
populations ne disposent plus des moyens suffisants pour assurer la productivité de leurs
plantations. A Douala, les autorités en charge de la planification urbaine disposent de moins en
moins la capacité d’offrir à ces migrants des espaces de vie décents. La population migrante
s’installe donc dans les zones peu viables qu’elles aménagent par leurs propres moyens et se
l’approprient. Ceci étant, elles contribuent à augmenter le risque dans des espaces naturellement
prédisposés aux inondations. Durant cette période, les inondations sont bien avant tout
considérées comme des phénomènes isolés et ponctuels. Elles sont surtout perçues comme une
conséquence de l’incivisme des populations villageoises voulant s’installer à tout prix en milieu
urbain. Pour faire face à ces inondations, le délégué du gouvernement ordonne en 1993 la
démolition de près de 20 maisons d’habitations situées sur les emprises des drains et le curage
des drains obstrués dans les quartiers Makepe, Bependa, Akwa Deido.
Photo 1 : Inondation à Douala en 1998.
(Source ; CT N°2950 du 13 aout. P 11)
II.1.3 Inondations de 1998 à 2001 et de 2002 à 2006
Il s’agit d’une phase importante de l’histoire des risques à Douala car elle est marquée par les
inondations catastrophiques des 2, 3 et 9 août 2000. Cette succession d’évènements
catastrophiques ayant fait plusieurs victimes (6 morts, 11 blessés et 80000 sinistrés) va
provoquer une véritable prise de conscience chez les populations riveraines. Pour les autorités
et certains experts, l’ampleur de ces dégâts est une sans aucun doute une combinaison de
facteurs aussi bien naturels, que climatiques (pluies exceptionnelles) et anthropiques. « Le
niveau d’eau enregistré à Douala est largement au-dessus de la normale…Nous avons
enregistré 175 mm d’eau après le relevé de 10 h ce matin » précise Tchouanwo, Augustin, chef
du service de la climatologie à la direction de la météorologie (CT N° 5550 du 4 aout 2000.
27
P18). Pour le délégué du gouvernement auprès de la CUD, Thomas Tobbo Eyoum, « la pluie
tombée la nuit du 2 au 3 aout dernier était exceptionnelle même s’il est vrai qu’il y’a quelques
décennies, les pluies de cette nature avaient une fréquence plus régulière et que l’on
enregistrait pas de sinistre de cette importance pour la simple raison que les lits des drains ou
des marigots, voire leurs abords n’étaient pas habités » (CT N° 5553 du 7 aout 2000. P6).
Cependant, malgré la multitude des causes désormais évoquées, au même problème, la même
solution : « il faut démolir, il faut reconstruire les drains ». Ainsi, à partir du 17 août 2000,
Koungou Edima (Ministre de l’administration territoriale) annonce la démolition des maisons
construites dans les zones à risque (Fig.8). Après l’inondation de 2001, de vastes campagnes de
curage de drain sont lancées (Crash Pogram, Programme de drainage pluvial) suivies de
campagnes de déguerpissement des abords des drains. Ces programmes passent aussi par la
sensibilisation. C’est en sens que les autorités multiplient des campagnes auprès des riverains
afin de les interpeller sur leur rôle dans les processus d’aménagement urbain et dans la lutte
contre les inondations (Fig. 9). « Certes, on peut admettre que Douala a connu une trop grande
poussée démographique à laquelle l’Etat n’était pas préparé, mais enfin, cela est aussi une
question de responsabilité pour chacun de nous. Pour parler sans détour, le préfet ne peut pas
tout faire…Que chacun prenne ses responsabilités, que chacun aime son pays… La rivière
traverse une route dans une grande ville et tout le monde regarde, et personne ne sait rien faire
» déclare Laurent Mindja, préfet du Wouri (CT N° 5551 du 5 août 2000. P14). Ces paroles du
préfet incitent clairement les riverains à prendre leur responsabilité et montrent tout aussi, les
limites d’un système à bout de souffle.
Figure 8 : Mesures de gestion annoncées à la suite des inondations d’août 2000.
(Source : CT N° 5563 du 17 août 2000. P6.)
28
Figure 9 : Intervention du Délégué du gouvernement auprès de la CUD suite aux inondations
d’Août 2000. (Source : CT N° 5553 du 7 août 2000. P6.)
CT N°2950 du 13 août 1998. P 11. CT N° 5555 du 8 août 2000. P 10.
CT N° 5563 du 17 août 2000. P6 CT N° 6694 du 26 avril 2001. P22
Planche 3 : Quelques inondations marquantes à Douala entre 1998 et 2006.
29
II.1.4 Inondations de 2007 à 2018
De 2007 à 2018, nous dénombrons 16 inondations à Douala, soit en moyenne 1 inondation par
an. En termes de conséquences, 3 personnes en moyenne périssent chaque année depuis 2007.
Durant cette période, la conquête spatiale est arrivée à son niveau maximum. Les migrants
ruraux ne sont plus les seuls à convoiter la ville de Douala. Elle devient le point de chute de
plusieurs étrangers et surtout des réfugiés venant des pays voisins (RCA, Nigeria). Des quartiers
pour étrangers se créent et portent même des noms des pays étrangers (Quartier Congo,
Brazzaville,). L’inondation n’est plus la seule véritable menace générée par les zones
marécageuses. On assiste désormais à de nouveaux problèmes sociaux ayant un impact direct
sur la vie des populations. Il s’agit entre autres des problèmes d’adduction en eau potable, de
mobilité urbaine, de gestion des déchets, de maladies liées à l’eau et surtout des
déguerpissements. Tous ces problèmes combinés concourent à créer plus de panique au sein de
la population. Les zones inondables sont désormais perçues non plus comme des zones à risque
d’inondations uniquement mais aussi, comme des zones dépourvues d’infrastructures de base
et de système d’assainissement. La multiplication des épisodes pluvieux confirme l’hypothèse
des changements climatiques chez les autorités et certains experts. Le problème se complexifie
de plus en plus, et pour les autorités locales, il n’est plus question de penser aux stratégies de
lutte contre les inondations dans un contexte isolé et à court terme. Aussi, il faut surtout
privilégier les mesures d’action préventives au profit des stratégies réactives éclipsées dans
l’urgence. Ainsi, en 2009, le document de stratégie de développement de la ville de Douala et
de son Aire métropolitaine est élaboré. En termes d’objectifs, la prise en compte de
l’environnement et la mise en place d’un système de régulation foncière en réponse aux
inondations.
En juillet 2010, les autorités locales élaborent un nouveau dispositif de résilience : l’Agenda 21
local. En élaborant cet « Agenda 21 local », composante de la stratégie de développement de la
ville de Douala et de son aire métropolitaine, la ville s’engage, dans un plan multiparti et
multisectoriel de 10 ans, à s’investir dans la réduction des risques d’inondation et la lutte contre
les changements climatiques, afin de créer une société résiliente conformément à l’approche
préventive du CAH. Au cours de la même année, la ville fait l’objet d’une inondation faisant
trois victimes. Cette inondation amène les autorités à opérer de nouvelles campagnes de curage
de drain et de déguerpissement des personnes installées sur les emprises des drains. Pour Alain
Dogoua Gbaman, chef de département de génie urbain à la CUD, pour faire face aux
inondations, les populations ne doivent pas paniquer car il s’agit d’un phénomène normal qu’on
observe dans les grands centres urbains pendant les pluies. Elles doivent simplement s’assurer
que les caniveaux aux alentours des maisons soient biens curés et surtout éviter de jeter les
ordures ou les déchets de toutes sortes dans les drains afin de permettre un bon écoulement des
eaux. « Nous devons prendre des mesures contre la menace, les changements de climat
auxquelles nous sommes exposés vont accentuer le problème des inondations dans les zones
marécageuses…il faut donc les déguerpir », déclare Joseph Beti Assomo, gouverneur de la
région du littoral (CT N° 9658/5859 du 15 octobre 2010 P20). Cependant, pour Ewolo Alexis
Christian, directeur adjoint à la direction météorologique « People are confused about climate
change ? They see l everyhere but the real explanation obout the rains in Douala now can only
be by the meteorilogical station. If rainfall was less last year than this year, it does not mean
this is climate change. To know a significant change, statical study with data has to be done for
30
at least 30 years. What is happening now is variability » (CT N° 9658/5860 du 14 octobre 2010,
P7). Cette intervention du météorologue confirme bien l’hypothèse selon laquelle parfois les
autorités en charge de la gestion des risques n’ont pas toujours de connaissance suffisantes de
ces risques.
En 2011, le projet de Drainage pluvial est initié conformément aux objectifs de l’Agenda
21. La finalité du projet est d’améliorer les conditions de vie des populations de Douala en
assurant le drainage pluvial et en aménageant plusieurs quartiers riverains. Plus précisément, le
projet aspire à limiter les inondations et à éviter les eaux stagnantes dans la ville. En 2013, la
ville de Douala bénéficie d’un financement dans le cadre du Projet de Développement des
secteurs Urbains et d’approvisionnement en Eau (PDUE). Elle bénéficie également du Projet
« Douala ville Durable » en partenariat avec l’AFD20. Ce projet a pour objectif d'améliorer la
prévention et la maîtrise du risque d'inondations en facilitant la circulation des eaux pluviales à
travers la ville. Le projet vise à réaliser 39 km de canaux qui suivent globalement les neuf cours
d’eau naturels principaux correspondants aux neuf bassins versants, et à recalibrer leurs
exutoires, afin d’augmenter leur capacité de drainage. Toutefois malgré la multiplication de ces
documents stratégiques dans le but de la réduction du risque et de catastrophe, la ville continue
d’être le théâtre d’inondations de plus en plus croissantes d’années en années. Ceci laisse
l’échec d’une politique de développement au sein de laquelle, les projets élaborés deviennent
obsolètes avant leur opérationnalisation.
A partir de 2015, le problème de drainage est de moins en moins évoqué par les autorités et
les experts comme principale cause des inondations. Elles sont désormais imputables aux
changements climatiques, et donc à la fréquence des pluies exceptionnelles. Cependant, malgré
le fait que l’on observe une évolution dans le discours des autorités, la solution envisagée face
à chaque inondation reste inchangée : le déguerpissement et le curage des drains « Nous vivons,
habitons tous Douala. Il est tombé un niveau d’eau inhabituel, un véritable déluge, des pluies
qui ont eu pour conséquence d’importants dégâts matériels et des pertes en vies humaines…les
rivières sont sorties de leur lit, occasionnant des inondations spectaculaires …….Le délégué
du gouvernement auprès de la communauté urbaine de Douala, Fritz Ntone Ntone et les sous-
préfets des cinq arrondissements de la ville doivent engager les opérations de libération forée
et immédiate des zones à risque dans la ville de Douala.» déclare Joseph Béti Assomo,
Gouverneur de la région du littoral lors de l’inondation du 25 août 2015 (CT N° 10866/7064 du
28 août 2015, P 13).
Face à cette déclaration du préfet, il est logique de demander si l’hypothèse des chargements
climatiques de plus en plus avancée par les autorités publiques ne marque-t-elle un aveux
d’impuissance face au risque ou encore un moyen politique de se déresponsabiliser de la
situation ? L’intervention du délégué du gouvernement auprès de la CUD après les inondations
récentes du 24 et 25 juin dernier répond bien à cette question (Fig. 10). « Depuis que nous avons
eu cette pluie diluvienne avec des inondations telles qu’on n’en voit pas souvent, on nous pose
des questions sur les drains, sur les caniveaux, et parfois sur le ramassage des ordures. Mais
si nous ramenons ce débat à cela, nous serons toujours surpris. La pluie qui s’est déversée à
20 Agence Française de Développement
31
Douala dans la nuit de mardi à mercredi, on doit l’analyser côté météorologique, côté
changements climatiques. On doit l’analyser beaucoup plus finement. Une telle pluie, même si
elle tombe dans une ville où tous les caniveaux sont ouverts, il y aura inondation. Quand le
niveau d’eau arrive aux toits, je ne vois aucun caniveau qui peut stopper cela. Et imaginez si
ces pluies arrivent en moment de marée haute, comme à Limbe, où même l’océan est sorti de
son lit », déclare Fritz Ntone Ntone, delegué du gouvernement auprès de la CUD à la suite des
inondations du 25 juillet 2018 (CT 30 juillet 2018). L’attribution des inondations à la seule
cause des changements climatique revient à innocenter la politique d’aménagement urbaine
observée dans la ville de Douala.
Figure 10 : Intervention de Fritz Ntone Ntone à la suite des inondations du 25 juillet 2018.
(Extrait de la CT N°14740/620 du 30 juillet).
32
CT N° 8740/8890 du 22 juin 2009. P16 CT N° 9658/5859 du 10 août 2010. P20
CT N° 10866/7065 du 28 juin 2015. P17 CT N°11123/7322-41 du 22 juin 2016. P14 °
CT N° 12649/450 du 13 août 2017. P34 CT N°14740/620 du 30 juillet 2018
Planche 4 : Quelques inondations à Douala entre 2009 et 2018.
Au vu ce qui précède, force est de constater que même s’il y a eu à Douala une succession
d’acteurs en charge de la gestion de la ville, les solutions apportées sont restées les mêmes alors
que les vulnérabilités augmentent. On observe depuis les années 1980 une sorte de copier-coller
des mêmes stratégies de gestion et de prévention : Le déguerpissement et le drainage. On est
certes passé d’une époque où le problème de drainage et de conquête des zones marécageuses
étaient considérés comme cause des inondations (entre 1984-2000) à une époque où les
inondations sont bien avant toute chose liées à des pluies exceptionnelles, une époque de prise
33
de conscience du risque et d’élaboration des documents stratégiques (entre 2000-2018).
Cependant, si la cause a évolué, les solutions sont, quant à elles sont restées les mêmes. Les
autorités actuelles en charge de la gestion de la ville estiment que si ce discours est resté
inchangé depuis les années 1980, c’est tout simplement que les mesures initiées depuis ces
années ont toujours été en adéquation avec la situation. « Les déguerpissements et le drainage
sont la solution car la ville étant entièrement construite et sur des zones basses, un retour en
arrière n’est plus possible, nous ne pouvons qu’envisager des mesures d’ajustement car c’est
l’organisation, le développement harmonieux de la ville de manière équitable qui est un
problème. Une ville qui reçoit mille personnes par mois, à un moment, vous allez retrouver les
gens sur les toitures. La population doit faire la corrélation entre ce que la ville lui propose et
ce qu’elle vit maintenant. Quand une ville ne dispose pas de stratégies pour son
développement, quand une partie des populations est passive, attend tout, alors nous n’aurons
que nos yeux pour pleurer. Nous devons donc continuer la sensibilisation sur la participation
des populations à leur développement » explique Fritz Ntone Ntone.
Toutefois, elles estiment quand même qu’il y a eu une certaine évolution dans les stratégies de
gestion des inondations depuis les années 2000 avec l’initiation des projets tels que « le drainage
pluvial » en 2001, le projet « Douala ville durable » en 2013. Mais aussi, le principal problème,
reconnaissent-elles, réside dans leur implémentation car il n’existe toujours pas d’offre foncière
formelle à Douala et les populations comptent sur la tolérance de l’administration en s’installant
en zone à risque. « Tant que nous ne pouvons pas offrir des espaces décents aux populations, il
nous est difficile voire impossible d’user des sanctions afin de respecter les projets établis ».
« Un autre problème qui n’est pas des moindres est qu’il existe une diversité d’acteurs en
charge de la gestion de des villes au Cameroun. Du MINDUH au MINEPDED en passant par
les CUD et les CAD, les objectifs de chacun ne sont pas clairement définis ; Malgré les
aménagements mis en place à Douala, on aura toujours des zones inondables, on ne peut pas
lutter définitivement contre les inondations dans cette ville déjà construite, on ne peut que les
réduire » mentionne Olinga Olinga Joseph Magloire, Chargé d’Etudes, Aménagement et
Développement Durable au sein de la Communauté Urbaine de Douala.
II.2 Fréquence annuelle et mensuelle des inondations
Les médias font état de 34 inondations à Douala, inégalement réparties de 1980 à 2018 et dont
la plus récente en date est celle du 25 juillet 2018. Toutefois, il faut tenir compte de l’irrégularité
des notifications par CT et des lacunes dans la collecte des données. En 34 années, les
inondations ont occasionné 49 victimes, 71 blessés, 900923 sinistrés et 547 personnes recasées.
Si celles enregistrées au début de la série renseignent environ un cas par an, à partir des années
1996, on passe à 2 cas, 3 durant la décennie 2.000 et 4 durant 2010. Cette tendance évolutive
des phénomènes est la conséquence d’une conquête spatiale de plus en plus importante. La
décennie 2010 est celle où on a enregistré le plus d’inondations ; elle cumule à elle seule 18 cas
en 8 années, soit plus de la moitié du total enregistré en 34 années (Fig. 11). De 1980 à 2000, 8
inondations sont recensées avec 8 pertes en vies humaines et 8023 sinistrés ; par contre, sur la
période 2001-2018, 26 inondations sont recensées, occasionnant 41 décès et 82 900 sinistrés.
34
Figure 11 : Fréquence annuelle des inondations de 1984 à 2018.
Pour ce qui est de l’analyse mensuelle, la tendance générale est consécutive au comportement
de la pluviométrie mensuelle dans la ville de Douala (Fig. 12). On individualise ici deux types
d’inondations. Les inondations de la saison sèche et de la saison de pluie. Les mois de juin,
juillet et août sont les mois les plus pluvieux à Douala et logiquement les périodes à forte
fréquence d’inondations. Le mois d’août totalise à lui seul 30% des inondations enregistrées à
Douala depuis 1980. C’est généralement durant ce mois que l’on enregistre le plus fort cumul
de pluies ainsi que les séquences pluvieuses les plus longues (Pouvant aller jusqu’à 30 jours).
Toutefois même si la problématique des inondations à Douala n’est pas nouvelle, les
inondations de la saison sèche quant à elles sont très récentes. Elles sont récurrentes depuis la
décennie 2010. Généralement à Douala, les pluies de la saison sèche sont très faibles (inférieure
à 10 mm) et contribuent essentiellement à l’alimentation de la nappe phréatique. Si leur intensité
est forte, elles peuvent engendrer des inondations à certains endroits. C’est le cas des pluies du
15 janvier 2013 (13,4 mm) ayant occasionné des inondations dans les bas-fonds marécageux de
Ngangue, Missoke Mabanda et Cité des palmiers.
Figure 12 : Répartition mensuelle des inondations et de la pluviométrie entre 1984 et 2018.
0
0,5
1
1,5
2
2,5
3
3,5
4
4,51
98
4
19
85
19
86
19
87
19
88
19
89
19
90
19
91
19
92
19
93
19
94
19
95
19
96
19
97
19
98
19
99
20
00
20
01
20
02
20
03
20
04
20
05
20
06
20
07
20
08
20
09
20
10
20
11
20
12
20
13
20
14
20
15
20
16
20
17
20
18
FREQUENCE ANNUELLE DES INONDATIONS DE 1984 A 2018
INONDATIONS ANNUELLES Linéaire (INONDATIONS ANNUELLES)
0,00%
5,00%
10,00%
15,00%
20,00%
25,00%
30,00%
35,00%
0
100
200
300
400
500
600
700
800
Hau
teu
r m
oye
nn
e m
ensu
elle
des
p
luie
s
Repartition mensuelles des inondations et des pluies entre 1984 et 2018
Pluies mensuelles Fréquence mensuelle des inondations
35
Depuis 1993, les opérations de déguerpissements, initiées d’abord par le maire de la commune
de Douala II, Dagobert Fampou, se sont multipliées à Douala, conformément à la loi N° 80-22
du 14 Juillet 1980 portant répression des atteintes à la propriété foncière et domaniale. La
fréquence des inondations a amené les autorités à mettre en place des opérations de
déguerpissement en vue de la libération des emprises des cours d’eau et des espaces verts
(notamment la mangrove). Ces opérations se renouvellent après chaque inondation. De 1993 à
2018, nous avons recensé 16 cas de déguerpissements s’étendant sur 23 quartiers (Fig.14). Ces
déguerpissements ont entrainé le déplacement d’environ 17812 ménages. La taille moyenne de
ménage à Douala étant estimée à 5 personnes, on estime à environ 89060 le nombre de
personnes privées de logement ; soit la taille de tout un quartier de Douala effacé de la carte de
la ville. Le nombre de pertes directes en vies humaines durant les opérations de
déguerpissement s’élève à 23 personnes. Ces déguerpissements, opérés dans un contexte où les
personnes déguerpies, majoritairement constituées de migrants ruraux, sont complètement
dépossédées de leurs biens, sans indemnisation ni processus de recasement, ne sont pas sans
conséquence aussi bien sur les vies des populations que sur les zones d’estuaires faciles à
conquérir. Tandis que certains déguerpis retrouvent refuge, soit dans la même zone déguerpie,
soit dans des zones plus vulnérables (Bois des singes) en attendant le prochain déguerpissement,
les moins nantis par contre optent tout simplement pour la migration retour
Figure 13 : Mobilité des populations des zones à risque à Douala.
36
Déguerpissement à la cité des palmiers. Source :
(CT N° 9617/6845du 7 août 2014)
Déguerpissement à Makepe
Missoke2015.
(CT N° 10866/7065 du 22 juin. P9)
Déguerpissement à Makepe missoke en 2018
(Source : Cliché Amanejieu)
Déguerpissement au bois des Singes.
(Source : Cliché Amanejieu)
Planche 5 : Quelques cas de déguerpissements à Douala de 2014 à 2018.
37
Figure 14 : Quartiers où les déguerpissements se sont déroulés entre 1993-2018.
II.3 Analyse spatiale des inondations et cartographie des zones inondées
L’analyse de la banque de données sur les inondations nous conduit à l’élaboration d’une
cartographie des zones inondées en prenant comme unité primaire d’analyse le quartier. Cette
base de données nous permet de classifier les quartiers en quatre catégories en fonction de la
fréquence des inondations :
- Fréquence élevée : il s’agit des quartiers ayant cumulé plus de 20 inondations au cours
de la série (New-Bell Ngangué, Makepe Missoke, Bependa, quartier Nylon, Citée des
palmiers, Mabanda, Foret bar etc… ;
- Fréquence moyenne : quartiers ayant cumulé entre 10 et 20 inondations au cours de la
série ;
- Fréquence faible : quartiers ayant cumulé moins de 10 inondations au cours de la série ;
- Fréquence nulle : aucune information.
La fréquence des inondations à Douala augmente du sud vers le nord. L’aile nord de la ville,
constituée de quartiers planifiés et semi-planifiés tel que Bonomoussadi, Denver, Nkotto
semble moins inondée que la partie sud. Ceci s’explique par le fait que c’est au nord que l’on
retrouve les points les plus hauts de la ville et aussi, on n’y retrouve pas de mangrove (Fig 15).
Cependant, même si cette zone fait l'objet de nombreux plans de lotissements, elle est aussi très
accidentée. Des cours d'eau et des ravins la traversent de tout sens et même si elle présente des
38
terrains urbanisables, la structuration de l'ensemble nécessitera de construire des ouvrages
importants pour faire passer les routes principales (PDU/PSO, 2011).
Figure 15 : Carte des quartiers inondés entre 1984-2018.
Le sud et l’ouest étant moins aptes à l’urbanisation que le nord, réunissent des conditions qui
font en permanence craindre la catastrophe. Elles sont constituées en grande partie des quartiers
marginaux anarchiquement construits tels les Bois des singes, Youpwé, Nkomba, Mabanda,
Foret-Bar. Le centre de la ville constitué des quartiers anciens tels que Bonapriso, Akwa,
souffre d’un problème d’étouffement lié à une densification excessive, à une installation des
populations sur les voies d’évacuation des eaux. Aussi, le risque tend à se spatialiser dans le
temps. L’urbanisation des zones marécageuses, périphériques entraîne l’augmentation des
zones inondées avec le temps. Sur la période 1984-2000, seuls 29 quartiers sur 98 étaient
inondés (Fig. 16) tandis que de 2001 à 2018, ce chiffre passe à 81 quartiers inondés sur 196
(Fig. 17).
39
Figure 16 : Quartiers inondés à Douala de 1984 à 2000.
Figure 17 : Quartiers inondés à Douala de 2001 à 2018.
40
Il existe une différence de spatialisation entre la carte des zones inondées (Fig. 18), basée sur
des faits réels, sur des faits observés et la carte des zones inondables basée sur les éléments
physiques de l’espace (Fig. 19). Même s’il est admis que les cartes des zones inondables
donnent des informations précises sur des zones susceptibles d’être inondées, il arrive parfois
à Douala que l’inondation se produise bien loin de la zone inondable. Cette cartographie des
zones inondables repose essentiellement sur la nature de l’espace étudié : saturation du sol en
eau, perméabilité du sol, l’altitude et qualité du drainage. De ce fait, toutes les zones de fond
marécageux sont susceptibles d’être inondées (Bois des singes, Mabanda, Kumba, Foret-bar,
Youpwé). Le colmatage des réseaux de drainage, pourtant l’une des causes majeures des
inondations, n’est pas pris en compte dans l’élaboration de cette cartographie. Par contre,
d’après la carte des zones inondées, l’inondation se produit à n’importe quel point de la ville
dépourvu d’égouts souterrains et traversé par un réseau de drains naturels mal curés ou un
réseau de canalisation colmaté. Il ne suffit pas nécessairement de se trouver en zone inondable
pour être inonder. C’est ainsi que même les quartiers situés sur le plateau Jos se retrouvent
submergés en cas de pluies (Bonapriso, Ngangué, Akwa etc…). On estime à 16945.9 la
superficie des espaces inondé à Douala soit 69,53% contre 54,78% pour les zones inondables
proposé par Zogning et al. (2015).
Figure 18 : Carte de la fréquence des zones inondées à Douala de 1984 à 2918.
41
Figure 19 : Carte des zones inondables à Douala.
(Source : Zogning et al., 2015)
Ces cartes des zones inondables, communément utilisées dans les stratégies d’aménagement du
territoire, peuvent présenter des limites dans le contexte « doualais ». Certaines zones étant
susceptibles d’être inondées en dépit des aménagements des zones inondables ou des
déguerpissements des abords des drains. A ce sujet, Esposito et al., (2014) estiment que, même
si la cartographie hydrogéomorphologique apporte des résultats pertinents, elle n’est pas
toujours fiable car les trois cartes des PPRi21 en France ont montré leur inexactitude face à
l’évènement réel, puisque plus de 30 % du linéaire réglementaire a été dépassé par l’inondation.
CONCLUSION
Au vue de ce qui précède, le constat est clair, Douala est une ville à haut risque d’inondation.
La recherche effrénée des parcelles pour les constructions couplées à l’absence d’une offre
foncière s’est soldée par l’envahissement progressif des zones humides et des vides urbains
sans aménagements préalables. A travers les remblais, les populations ont conquises les zones
non constructibles. Cette conquête des zones potentiellement inondables a conduit à des
problèmes d’inondations dont les premiers cas se font ressentir en 1984. D’une inondation en
1984 à 5 inondations en 2018, le risque a bel et bien évolué à Douala car les mesures initiées
par les autorités pour y faire face se sont montrées insuffisantes voire inefficaces.
21 Plan de Prévention des Risques d'inondations
42
PARTIE II.2. REPRESENTATION SOCIO DU RISQUE D’INONDATION
INTRODUCTION
L’analyse de la représentation sociale consiste à analyser la manière dont le risque et l’espace
à risque sont perçus par les communautés, la manière dont ces communautés vivent dans les
espaces à risque à travers les modes d’occupation du sol et les stratégies d’aménagements
actuels et futurs.
I Profil des enquêtés et nature des sites d’enquête
Il ressort des analyses que, 82 enquêtés sont chefs de ménages. 15 et 3 sont respectivement
enfants du chef de ménage et autres membres de la famille résidant dans le ménage. 66 enquêtés
sont de sexe masculin et 34 de sexe féminin.
Aussi, l’enquête révèle que le pourcentage de répondants dont le niveau d’éducation est
sommaire est faible (27%). La proportion de ceux qui n’ont reçu aucune instruction ne
représente que 2 % contre 26% pour ceux ayant le niveau supérieur (Tab. 1). La proportion des
enquêtés ayant un niveau secondaire est plus importante (45%).
La proportion des groupes d’âges des enquêtés augmente progressivement et atteint sont
optimum entre 25 et 54 ans, puis chute tout aussi graduellement pour la valeur minimale à partir
de 55 ans. Ainsi, les individus âgés de 18-24 ans révolus représentent 20 % des enquêtés tandis
que ceux âgés de 25-54 ans et 60 ans et plus représentent respectivement 67 % et 13 %.
La taille des ménages, quant à elle, varie entre 15 personnes pour les ménages de grandes tailles
et 1 personne pour les ménages de petites tailles. La taille moyenne des ménages étant d’environ
7 personnes ; plus de la moitié des enquêtés se retrouvent dans cette moyenne.
Tableau 1 : Répartition des enquêtés en fonction de leur niveau d’instruction.
Niveau d’instruction Quartiers (%)
Bois des singes Makepe Missoke
Bonapriso Total général
Sans niveau 2 0 0 2
Niveau primaire 16 7 4 27
Niveau secondaire 12 18 15 45
Niveau supérieur 3 8 15 26
Total général 33 33 34 100
43
Figure 20 : Réparation des enquêtes par
tranches d’âges.
Figure 21 : Répartition des ménages en
fonction de leur taille.
Le nombre d’années passées dans les zones d’habitation varie entre 1 et 71 ans. Dans
l’ensemble, les populations installées dans les le zones enquêtées y sont établies depuis 14 ans
en moyenne. La proportion des ménages ayant passé plus de 10 dans leurs résidences
respectives est plus élevée dans les quartiers Makepe Missoke et Bonapriso. Au Bois des singes
par contre, cette proportion est la plus faible. Ceci est dû au fait qu’il s’agit d’une zone
d’urbanisation très récente dont les premières installations remontent aux années 2008. Cette
urbanisation a été freinée par les déguerpissements en 2010 et ce n’est qu’à partir des années
2011 que le quartier a recommencé réellement à faire l’objet de convoitise.
Tableau 2 : Répartition des enquêtés en fonction du nombre d’années passé dans leurs
résidences.
Quartiers Nombre d'années de résidence
1-4 ans 4-9 ans 10 ans et plus Total général
Bois des singes 15 12 6 33
Makepe Missoke 4 7 22 33
Bonapriso 8 10 16 34
Total général 31 29 40 100
Pour ce qui est de la nature des quartiers enquêtés, la cartographie de l’occupation des sols nous
amène à distinguer deux types de quartiers enquêtés. Les zones inondables que sont le Bois des
singes et Makepe Missoke (PDU/PSO, 2011) et zones inondées que sont Bonapriso. Alors sur
100 ménages enquêtés, 66 font partie de la zone inondable et 34 de la zone inondée.
0,00%
20,00%
40,00%
60,00%
80,00%
Enquêtés par tranches d'âges
Bois des singes
Makepe Missoke
Bonapriso
0
4
8
12
16
20
Bois dessinges
MakepeMissoke
Bonapriso
Taille des menages enquêtés
1 à 4
4 à 9
10 à 15
44
Figure 22 : Répartition des enquêtés en fonction de la nature de la zone habitée.
Les populations enquêtés dans ces différents quartiers sont d’origine diverses. On y rencontre
majoritairement les migrants ruraux en provenance des parties ouest et nord du Cameroun. Ces
quartiers attirent également la curiosité de nombreux étrangers qui y viennent soit pour des
affaires (français, chinois, nigérians…) soit en tant que refugié de guerre (République centre-
africains).
Figure 23 : Origine des enquêtés.
Zone inondable66%
Zone inondée34%
Répartition des enquêtés en fonction de la nature de la zone occupée
Zone inondable Zone inondée
45
II Perception
Nous rappelons que la perception du risque dans le cadre de cette étude dépend de la
connaissance du risque, des enjeux (volonté de s’exposer au risque), et du contexte
économique, social et culturel (familiarité au risque).
II.1 Proximité perçue du risque d’inondation
Au vu de la fréquence du risque d’inondation dans la ville de Douala, l’on pourrait de prime
abord que celui-ci constitue un problème majeur pour les populations et pour les autorités. Il
n’en est rien. Les enquêtés estiment être le plus confrontés aux problèmes d’insalubrité suivi
du désordre urbain et de déguerpissement. Seulement 9 répondants estiment être confrontés à
un problème d’inondation (Fig. 24). Dans ce cas précis, Il est donc clair que comme le déclare
November (1994), les risques naturels sont parfois moins obsédants que d’autres risques urbains
dits sociaux tels que la pauvreté, le chômage ou l’insécurité. A titre illustratif, en prenant cet
exemple de Olinga (2012) : lors des travaux des journées publiques de dialogue décentralisé
(JDPD) organisées par la Communauté Urbaine de Douala dans les Communes Urbaines
d’Arrondissement (CUA) en vue de la réalisation de l’Agenda 21 local, il a été demandé à un
échantillon réduit de personnes toutes directement concernées par le risque d’inondation (habite
ou travaille dans une zone d’inondation), regroupées en ateliers de travail d’énumérer par ordre
de priorité les problèmes les plus préoccupants pour elles. Il en est ressorti que ces populations
ne l’on curieusement pas évoqué en tant que problème préoccupant. La même observation est
faite chez les autorités qui estiment que la ville de Douala fait face aux problèmes majeurs de
l’insuffisance du réseau viaire et de drainage. Par contre, la simple évocation du terme
inondation rappelle aux enquêtés que le risque existe et qu’ils vivent avec. Même si celui-ci ne
constitue pas un problème majeur pour eux, ils affirment quand même y être exposés
majoritairement (80 % des répondants) (Fig. 25).
Figure 24 : Problèmes majeurs à Douala
selon la population enquêtée.
Figure 25 : Répartition des ménages selon
leur exposition aux risques.
34%
27%
25%
9%5%
Problemes majeurs à Douala d'après les
enquêtés
Insalubrité
Desordre urbain
Deguerpissement
Inondation
Excès de chaleur0
10
20
30
40
50
60
70
80
90
oui non
No
mb
re d
'en
qu
êté
s
Repartition des enquêtés selon leur
exposition aux risques
inondation
Probleme lié àl'eau
Incendie
Aucun probleme
46
Pour ce qui est de la perception de la proximité au risque. 59 ménages affirment être installés
en zone inondable et 41 affirment être installé en zone non inondable. Cependant, d’après le
PDU, 66 ménages enquêtés sont installés en zone inondable. Il s’agit essentiellement des
enquêtes des quartiers Makepe Missoke et du Bois des singes. La corrélation entre la perception
de l’espace par les enquêtés et la réalité empirique permet de constater que les enquêtés ont une
très bonne perception de l’espace dans lequel ils sont installés. 85 ménages ont une perception
réelle de leur espace et seulement 15 ménages ont une perception biaisée (Tab.3). Par perception
réelle de l’espace, nous entendons le fait pour un enquêté vivant dans les bas-fonds marécageux
de savoir qu’il est installé en zone inondable ou pour un enquêté installé dans une zone
d’altitude haute de savoir qu’il n’est pas en zone inondable. A Bonapriso, seulement 2 ménages
sur 34 ont une perception biaisée de leur espace. Il s’agit des ménages qui estiment être installés
en zone inondable. Il convient de rappeler que même si Bonapriso n’est pas une zone inondable,
elle est une zone inondée. Donc à force d’être submergés à chaque averse certains ménages
finissent par penser qu’ils sont en zone inondable. Pour Makepe Missoke et les Bois des singes,
certains ménages réfutent l’hypothèse d’une installation en zone inondable pour la simple raison
qu’ils ont peur des déguerpissements par les autorités. Dans ces quartiers, la quasi-totalité des
maisons ont été marquées par la CUD (Planche 6) et portent l’insigne AD/24heures, (A Détruire
dans 24 heures) ; donc accepter qu’ils sont en zone inondable reviendraient à légitimer les actes
de la CUD.
Tableau 3 : Perception de l’espace à risque en fonction du quartier.
Quartiers Perception de l'espace
Perception réelle Perception biaisée Total général
Bois des singes 25 8 33
Makepe Missoke 28 5 33
Bonapriso 32 2 34
Total général 85 15 100
1 2
Planche 6 : Marquage des maisons à détruire : 1) Makepe Missoke, 2) Bois des singes.
47
La corrélation entre la perception de l’espace à risque et le nombre d’années passées dans le
quartier nous donne une relation positive de 0,2071. Plus l’enquêté passe du temps dans le
quartier, mieux est sa perception de l’espace à risque. Les populations ayant passé 10 ans et
plus dans le quartier ont une meilleure perception de leur espace que les individus récemment
installés (Fig. 26). Aussi, les enquêtés ayant un niveau d’instruction secondaire et supérieur
perçoivent mieux la nature de l’espace dans lequel ils sont installés (Fig. 27).
Figure 26 : Perception réelle du risque en fonction
du nombre d’années passées dans la zone
d’habitation.
Figure 27 : Perception de l’espace à risque en
fonction du niveau d’instruction.
II.2. Raisons et choix de la zone de résidence.
A Makepe Missoke et au Bois des Singes, l’une des principales raisons de l’installation dans le
quartier est d'ordre psychologique. Environ 28 enquêtés justifient leur installation par le désir
de se sentir chez eux (Fig. 28). Habituellement, le mode d’intégration des migrants ruraux se
fait selon deux principes. Le principe de location et le principe d’entraide. Dans ce second cas,
l’intégration se fait par l’affinité et le relationnisme ; ou le premier à arriver en milieu urbain
une fois intégré, constitue désormais la personne d’accueil pour les autres ressortissants de sa
localité. Il est chargé d’accueillir les personnes de sa famille proche ou lointaine qu’il encadre
jusqu’à ce qu’elles aient la possibilité de se mettre sous leur propre toit et bien évidemment
accueillir à leur tour les nouveaux venus.
Après cette raison psychologique, interviennent les raisons économiques et celles liées aux
déguerpissements. En ce qui concerne les raisons économiques, 21 des personnes affirment
vivre dans ces quartiers en raison de l’accès à la terre peu coûteuse. Le faible prix de vente des
parcelles fait l’objet de convoitise malgré l’absence des titres fonciers délivrés. Pour ce qui est
des déguerpissements des enquêtés disent s’être installé dans ces quartiers indépendamment de
leur volonté car ils ont été victime de campagnes de délogement par la CUD dans d’autres
quartiers et se sont retrouvés contraints de s’installer dans le premier endroit qui s’offrait à eux.
A Bonapriso par contre, seules les raisons positives expliquent la raison de leur installation dans
le quartier. Il s’agit, entre autres, de la bonne réputation du quartier (18 répondants). Bonapriso
0,00%
10,00%
20,00%
30,00%
40,00%
50,00%
60,00%
1-4 ans 5-9 ans 10 ans et plus
perception reelle
0
10
20
30
40
Perceptionreelle
Perceptionbiaisée
Perception de l'espace par les enquêtés en fonction du niveau
d'instruction
Sans niveau
Niveau primaire
Niveausecondaire
Niveau supérieur
48
est l’un des quartiers les plus prisés de la ville de Douala. Sa proximité avec le centre des
affaires, son architecture et son standing fait de lui un quartier résidentiel très convoité par les
riches. Aussi, ils affirment y être pour des raisons culturelles. Bonapriso reste la terre des
ancêtres de plusieurs « doualais » malgré la mixture culturale observée aujourd’hui.
Figure 28 : Raisons du choix de la zone de résidence par les enquêtés.
II.2 Connaissance de l’espace avant l’installation
Comme nous l’avons énoncé précédemment, sur 100 ménages enquêtés, 59 affirment être
installés en zone inondable. Ce qui est d’autant plus curieux est qu’étant installé dans la zone
depuis en moyenne 14 ans, 41 des ménages affirmant être installés en zone inondable affirment
également qu’ils savaient que la zone s’inondait avant leur installation. Ces derniers donnent
l’impression d’avoir choisi délibérément le marécage car contrairement à ce que l’on pourrait
croire, ils en tirent des avantages. Il n’est pas question d’investir en ville car leur objectif à
Douala n’est pas d’y vivre toute la vie. Alors une fois la parcelle acquise, quelques matériaux
récupérables suffisent pour se faire une petite case, après que le sol ait été remblayé. Autour de
la maison, ces passionnés des zones humides exercent des activités telles que l’agricultures du
maïs, des légumineuses et autres, et dont ils commercialisent les produits directement dans le
marché de la place. Ils y font également du petit élevage (élevage de porcs, poules, canards
etc…) car la qualité de l’espace le leur permet. Il convient de mentionner que ces populations
installées en zones marécageuses sont principalement des migrants ruraux venus
majoritairement de la partie ouest du Cameroun et qui précédemment ne vivaient que de
l’agriculture et de l’élevage. On observe donc dans ces milieux une sorte de conflit entre
l’urbain et le rural ou une population installée en milieu urbain, adapte les modes et les
comportements du milieu rural.
A la base, certaines personnes achètent des parcelles en zone marécageuses uniquement pour
la pratique de l’agriculture mais ensuite, elles s’y plaisent au point d’élire domicile et d’y vivre.
Encore, le marécage devient plus attractif lorsque l’enquêté est installé à proximité d’un cours
d’eau. Celui-ci devient inéluctablement la zone par excellence de prélèvement de terre et de
sable pour les remblais. Pour certains, cette pratique constitue même une activité génératrice de
Bois des singes Makepe Missoke Bonapriso
Besoin de se sentir chez soi 8 13 0
raisons économiques 12 11 0
Déquerpissements 13 9 0
standing qu quartier 0 0 18
raisons culturelles 0 0 16
02468
101214161820
Raisons du choix de la zone de residence
49
revenu. « Lorsque tu as la chance d’être installé à proximité du cours d’eau, tu ne te donnes
plus la peine de parcourir d’énormes distance pour acheter du sable ou de la terre pour les
remblais. En plus, il arrive parfois que les enfants extraient ce sable et le vendent au point de
payer tout seul leur frais de scolarité. Aussi, comme l’eau est rare dans le quartier, il m’est
plus facile de faire la lessive directement dans la rivière », déclare une habitante du quartier
Makepe Missoke. Sur 100 ménages enquêtés, 48 affirment pratiquer une activité près de leur
habitation (Fig. 29). Il s’agit entre autres de l’extraction de la terre et du sable pour des remblais
(20 répondants), de l’élevage (12 répondants) et le l’agriculture (16 répondants).
Figure 29 : Répartition des enquêtés en fonction des activités pratiquées près de leur
habitation.
A côté de ces passionnées des zones inondables, il y a ceux qui déclarent résider dans le quartier
par contrainte car ne sachant pas que la zone s’inondait avant l’achat de la propriété (18
ménages sur 59). “Lorsque j’achetais ce terrain il y’a 38 ans, pendant la saison sèche, je ne
savais pas que la zone s’inondait. Quelques mois après, j’ai remarqué que les eaux
commençaient à stagner par endroits et s’inondait parfois seulement, elle ne se faisait pas à la
même fréquence qu’aujourd’hui. J’espérais qu’avec le temps j’allais gagner de l’argent et
quitter le quartier. Malheureusement, après avoir fondé une famille, mes problèmes se sont
multipliés je n’ai pas pu m’offrir une portion de terre ailleurs. Maintenant je fais, du
remblayage régulier afin d’éviter de graves dégâts pendant la saison pluvieuse ”, déclare
Tagnifou, 61 ans, habitant de Makepe Missoke.
II.3 Perception de la réglementation en vigueur
Pour ce qui est de la possession du titre foncier, seuls 33 ménages enquêtés déclarent
que leur terrain est titré. La quasi-totalité des ménages enquêtés installés en zones inondables
ne détiennent pas de titres fonciers. Sur les 66 enquêtés de la zone inondable (Makepe Missoke
et Bois des singes). Seuls 6 affirment détenir un titre foncier. Il convient tout de même de se
s’interroger sur la véracité de ces titres fonciers en zone inondable car comme le déclare. Jean
0
5
10
15
20
25
EXTRACTION DE TERRE ETSABLE
ELEVAGE AGRICULTURE
Répartition des enquétés en fonction des activités pratiquées près de
leur habitation
50
Yango22, « Les marécageuses sont des zones déclarées dangereuses et ne peuvent en
conséquence faire l’objet ni d’une vente, ni d’une rétrocession, ni de l’attribution d’un permis
de bâtir ou d’un titre foncier ». Cependant, pour Denise Fampou, Maire de la Commune
d’arrondissement de Douala II, « Il est possible que certains aient des titres fonciers dans ces
zones car lors de vérifications nous remarquons bel et bien que c’est la CUD qui le leur
octroie ». Dans ce cas précis, il est logique que les autorités, soient, elles aussi un acteur dans
l’anarchie urbaine telle qu’observé à Douala. A ce sujet, Laurent Mindja, préfet du Wouri
répond : « on peut demander une concession à l’Etat dans une zone impropre à l’habitation
pour faire un champ, une porcherie par exemple. Mais si on obtient cette concession et qu’au
lieu du champ déclaré, on bâtisse une maison et qu’on s’y établisse, en quoi l’Etat se serait-il
rendu complice ? » (CT N°9658/5859 du 10 août 2010. P20). Par contre, sur les 34 ménages
enquêtés en zone non inondable, 27 déclarent détenir un titre foncier (Tab. 4). Deux raisons
principales justifient l’absence des titres fonciers chez la population enquêtée. La première
étant, Makepé Missoke et le Bois des singes sont classés comme des zones inondables d’après
le PDU et donc ne peuvent faire l’objet d’une demande de titre foncier sauf en cas d’autorisation
particulière. La seconde est, qu’au Cameroun, il existe deux niveaux de droit foncier qui
s’opposent. D’une part, le droit coutumier qui stipule que la terre appartient aux chefs
traditionnels en tant qu’héritiers et donc, ils ont le droit de vente. D’autre part, l’Etat fixe la loi
d’obtention des titres fonciers et des permis de bâtir tout en délimitant les zones non
constructibles. Cette dualité du régime foncier camerounais se traduit par une certaine
discrimination à l’échelle locale où le plus riche à la possibilité de s’octroyer un titre foncier et
le plus pauvre négocie directement avec le propriétaire de la terre en marge de la loi. Le faisant,
l’Etat a donné la possibilité aux migrants ruraux de prendre d’assaut les zones à risque et le
résultat est ce que l’on observe à Douala aujourd’hui. Au Cameroun en général, seul 13,6% de
ménages propriétaires de leur logement avaient un titre foncier en 2014 (INS, 2015).
La plupart des ménages installés en zones marécageuses savent qu’ils y sont de manière illégale.
Sur 59 ménages affirmant être installés en zone inondable, 39 déclarent être conscient d’être en
illégalité et 20 ménages déclare ne pas connaitre cette loi (Fig. 30). Pour ce qui est de la
possibilité de quitter les quartiers inondables et inondés si l’occasion est donnée, la totalité des
enquêtés à Bonapriso répond par la négative. A Makepe Missoke et au Bois des singes par
contre, les enquêtés sont moins attachés à leur lieu de résidence. 63 ménages sur les 66 enquêtés
affirment partir si les autorités leur offrent des zones de recasement ailleurs contre 3 ménages
qui refusent toute hypothèse de départ. Compte tenu des avantages que tirent les populations en
zone inondable et de leur volonté de s’installer dans ces zones même sachant qu’elles
s’inondaient, on se serait attendu à ce que la population soit fortement attaché à leur espace ;
mais tel n’est pas le cas. Deux raisons principales justifient ce non attachement à la zone habitée.
La première raison est qu’en s’installant en zone inondable, certaines personnes pensent
pouvoir maitriser le risque mais plus elles avancent dans le temps, plus elles comprennent que
la nature est parfois plus forte que l’homme. La seconde raison est que l’installation en zone à
risque est le seul moyen d’insertion d’une population pauvre venant du monde rural ; cette
population s’installerait dans des zones plus viables si elle avait la possibilité. « Les populations
prennent d’énormes risques en allant s’installer dans les zones à risques même si
22 Directeur des études, de la planification des investissements et du développement durable au sein de la CUD.
51
individuellement elles voient bien qu’il y a un risque. Je suis très mal placé pour le juger car il
s’agit de populations venant du monde rural et si elles persistent par tous les moyens à vivre
en ville c’est bien la preuve qu’elle trouve en cela l’unique chance de s’en sortir » déclare Jean
Yango.
Tableau 4 : Répartition des enquêtés en fonction de la possession du titre foncier.
Possession du titre foncier
oui non Total général
Zone inondable 6 60 66
zone non inondable 27 7 34
Total général 33 67 100
Figure 30 : Connaissance de la loi en matière d’occupation des sols.
II.4 Acceptabilité du risque
La corrélation des variables sur l’exposition au risque d’inondation, la perception de l’espace à
risque et l’attachement à la zone d’habitation permettent de juger de l’acceptabilité du risque
chez les enquêtés. Contrairement à Makepe Missoke et au Bois des singes, le risque est
beaucoup mieux accepté à Bonapriso (Fig. 31). Cette acceptabilité du risque est fonction des
avantages que tire la population de son espace vital (zone planifiée, absence d’embouteillage,
proximité des centres actifs de la ville, moins de désordre urbain…). Tout comme la perception
de l’espace, le risque est beaucoup plus accepté avec le temps. Les populations ayant passé 10
ans et plus dans la zone d’habitation acceptent plus le risque que les nouveaux venus.
L’exposition permanente au risque agit sur le jugement de celui-ci par la population. Nous
convenons donc avec Olinga (2012) que l’accoutumance au danger conduit à optimiser le degré
d’acceptabilité du risque. Au fil du temps, la mémoire du risque se déforme au sein de la
conscience individuelle ou collective et la population finit par tomber dans une « amnésie
cindynique », jusqu’à ce qu’un autre évènement dramatique vienne rappeler le contexte réel de
Somme de ligne
je suis conscient mais je n'ai pasd'autres choix
23
je suis conscient mais personne ne larespecte
16
je ne connais pas cette loi 20
0
5
10
15
20
25
30
Connaissance de la loi en matiere d'occupation des sols
52
vulnérabilité. Ce fut le cas lors des grandes inondations de 2000 et 2009 où les populations ont
été « surprises » par le caractère soudain et dévastateur des inondations.(Mbaha et al., 2013)
Figure 31 : Acceptabilité du risque chez les enquêtés.
III. Vécu
Nous entendons par vécu, le comportement de la communauté « doualaise » face aux
inondations. Ce comportement varie en fonction de la nature de la zone habitée (zone inondable
et zone inondée), du niveau d’exposition au risque et de la capacité du ménage à se prémunir
ou à s’adapter contre l’inondation. A Douala, acquérir une parcelle de terre en zone inondable
est une chose, réussir à se l’approprier au point de s’y installer en est une autre. La zone
inondable est chargée d’un ensemble de contraintes qui limitent des installations sans
aménagements préalables. La multiplication des séquences d’inondation oblige la population à
être à la quête permanente de solutions visant à réduire sa vulnérabilité. Il s’agit aussi de
mesures de gestion individuelle, collectives et/ou étatiques.
III.1 Stratégies d’adaptions individuelles et collectives
De manière individuelle, la plupart des ménages enquêtés dans la zone inondable a déjà eu
recours à des stratégies visant à réduire sa vulnérabilité au risque d’inondation. Ces stratégies
vont des modes de construction des maisons aux stratégies d’aménagement des espaces habités.
La stratégie couramment utilisée est le remblayage. 56 enquêtés affirment premièrement y avoir
recours aussi bien avant qu’après les constructions (Fig. 32). Cette stratégie consiste à surélever
un espace considéré comme bas, apporter un supplément de terres au niveau normal d’altitude
de la zone dans le but de le surélever, d’augmenter sa hauteur. Les propriétaires avant de
procéder à l’élévation des murs réalisent ces travaux de dénivellement de sol dans le but de
surmonter la portion de terre sur laquelle la maison doit être bâtie. Le surplus de terre ou de
O U I N O N
Acceptabi l i té du r i sque par les enquêtés
Bois des Singes Makepe Missoke Bonapriso
53
sable utilisé est généralement transporté sur les pistes impraticables ou dans les rivières et le
fleuve. Certains ménages utilisent des déchets ménagers qui, quelques années après leur
décomposition, le sol repose sur un sol instable. Outre les remblais, 36 enquêtés affirment en
seconde place que la construction en matériaux provisoire constitue également une mesure
d’adaptation contre les inondations car elle permet de limiter les dommages ainsi que de lourds
investissements. Il s’agit de ce qu’on appelle communément « carabotte » dans le langage
camerounais. Ici, quelques vieilles tôles et quelques mètres de planches suffisent pour s’offrir
une maison et prétendre vivre en pleine capitale économique (Planche 7). Cette technique
consiste à construire des maisons peu durables, à moindre coût et à les renouveler après deux
ou trois ans. Très prisée aux Bois des singes où certaines maisons sont inondées environ deux
fois par jour (par le phénomène de marée), les eaux qui pénètrent ressortent aisément et évite la
corvée de l’évacuation. Troisièmement, 27 ménages affirment curer régulièrement les drains et
les rigoles aux alentours de leurs habitations afin de faciliter la circulation des eaux, 8 ménages
construisent les murs de protection et enfin, seulement 4 ménages affirment n’avoir recours à
aucune stratégie face aux inondations.
Dans la zone inondée par contre, la quasi-totalité totalité de la population affirme
qu’individuellement, elle ne fait rien lorsque les inondations surviennent (30 répondants). Elles
attendent tout simplement que la hauteur de submersion diminue pour vaquer à leurs
occupations. Pour les plus nantis, la situation est beaucoup plus simple. « Une fois que vous
avez une voiture haute, il est simple de sortir quand bien même la route est inondée car les voix
sont goudronnées ici et cela ne nous pose pas trop de problème sauf en cas de hauteurs d’eaux
excessives ». Déclare Njoh Paul, 38 ans, habitant de Bonapriso
Figure 32 : Répartition des aménagements stratégies individuelles en zone inondable.
0
20
40
60
80
100
120
Oui Non
Répartition des stratégies individuelles en zone inondable
Remblais Construction en materiaux provisoirs Curage de drain Mur de protection rien
54
Remblayage des sols avant les construction au bois des
singes.
Remblayage à l’aide de débris de ménages à
Makepe Missoke.
Construction des maisons à l’aide de materiaux récuperables.
Planche 7 : Quelques mesures d’adaptation individuelle au Bois des singes.
En terme d’aménagements collectifs, les enquêtés participent très peu aux plans de
développements locaux de leur quartier. A Douala, depuis l’élaboration de l’Agenda 21 local,
il existe à l’échelle de chaque commune des journées d’hygiène et d’insalubrité visant au
nettoyage des caniveaux et des drains, à l’aménagement des abords des cours d’eau et au
ramassage des ordures. Cependant, très peu de personnes y participe. « Pour résoudre le
problème des inondations à Douala, il faut s’attaquer au problème de l’urbanisation…, je ne
pense pas que se balader chaque jour dans les quartiers pour ramasser les bouts de papiers
qui trainent finirait par résoudre ce problème. Donc je n’ai pas le temps à perdre avec ces
causeries de Fritz Ntone » déclare Soppo Njoh Felix, habitant du quartier Bonapriso. Seuls 14
ménages affirment prendre part à ces comités de développement locaux (Tab. 5). Certains
ménages déclarent ne pas savoir qu’il existe et encore moins que toute une journée par mois
leur est dédiée.
55
Tableau 5 : Participation des enquêtés aux stratégies d’aménagements collectifs.
Participation à un
comité ou
association de
développement
local
Quartiers
Bois des
singes
Makepe Missoke Bonapriso Total
général
Oui 0 8 6 14
Non 33 25 28 86
Total général 33 33 34 100
Hormis ces comités, il existe également des regroupements de jeunes volontaires dans les
quartiers qui effectuent des travaux d’assainissement (Planche 8). Malgré que ces
regroupements soient très peu structurés et non légalisés, ils se réunissent une fois par mois
pour débattre sur la marche à suivre pour tenir le quartier propre. Seulement, le manque de
soutiens financiers et même matériels aussi bien de la part de leurs parents que des autorités
locales limite leurs actions.
Séance de travail de nettoyage des drains organisée par les
jeunes du quartier Bonapriso. Plaque de l’association de jeunes œuvrant dans
l’assainissement du quartier Makepe
Planche 8 : Autres stratégies de gestion collective des inondations à Bonapriso et à Makepe
Missoke.
III.2 Stratégies d’adaptation étatique
Les mesures de gestion des inondations adoptées concernent essentiellement les campagnes de
sensibilisation des populations sur les comportements à avoir et l’entretien des équipements à
travers le curage systématique des ouvrages de drainage des eaux de ruissellement avant la
saison de pluie. A Bonapriso, la quasi-totalité des enquêtés reconnaissent l’intervention des
autorités dans les gestions des inondations (Fig. 33). Elles évoquent premièrement
l’aménagement des voies praticables en pavés (18 répondants) ensuite la construction et le
56
curage des réseaux d’évacuation des eaux (11 enquêtés) et enfin les travaux d’assainissement
(2 répondants). A Makepe Missoke, ces mesures vont de la construction du pont et du drain (6
répondants) aux déguerpissements (19 répondants). Au Bois des singes, seuls les
déguerpissements en cours au moment notre enquête ont été évoqués par la population (14
répondants)
Figure 33 : Répartition des enquêtés en fonction des interventions des autorités
La corrélation des variables sur les stratégies individuelles et collectives permet de juger du
comportement des enquêtés en zone à risque. Nous individualisons de ce fait trois types de
comportement en zone inondable et en zone inondée (Tab.6) Ceux qui développent
individuellement des stratégies et qui sont impliqués dans les comités de développement locaux
ou les associations de quartier (Vécu élevé), ceux qui développent uniquement soit des
stratégies individuelles soit des stratégies collectives (Vécu moyen) et ceux qui ne font rien, qui
attendent tout simplement l’intervention des autorités ou qui quittent leur maison à chaque
saison de pluie (Vécu faible). Alors, il apparait que, contrairement à Bonapriso et/ou les Bois
des singes, les enquêté du quartier Makepe Misssoke ont un vécu plus élevé (8 ménages). Le
vécu le plus faible est observé à Bonapriso (26 ménages). Cependant, il convient également de
noter que ce n’est pas parce qu’un individu développe des stratégies face à un risque qu’il y
réduit forcement sa vulnérabilité. Parfois, les mauvaises stratégies et surtout des stratégies
ponctuelles éclipsées dans l’urgence, conduisent à aggraver la vulnérabilité de la population
exposée (mal-adaptation). C’est d’ailleurs ce qui explique aujourd’hui l’augmentation des
inondations dans la ville de Douala.
Bois des singes Makepe Missoke Bonapriso
Curage et construction des drains etdes ponts
0 6 11
Amenagement des routes 0 0 18
Déguerpissements 14 19 0
Ramassage des ordures 0 0 2
rien 19 8 3
02468
101214161820
57
Tableau 6 : Vécu en fonction du quartier.
Vécu Quartiers
Bois des singes Makepe Missoke Bonapriso Total
général
Elevé 0 8 2 10
Moyen 31 23 6 60
Faible 2 2 26 30
Total 33 33 34 100
38 enquêtés estiment que les inondations sont devenues plus fréquentes et 22 estiment qu’elles
sont restées équivalentes. 30 des enquêtées par contre estiment que le risque est moins fréquent.
Il s’agit totalement de la part des enquêtés ayant bénéficié des travaux de drainage effectué dans
le cadre du Projet « Douala Ville Durable » à partir de 2017 et qui au moment de notre enquête
étaient animé par le sentiment d’un risque maitrisé. Il s’agit d’un projet de la CUD visant à
lutter contre le changement climatique et la préservation des milieux naturels au cœur d’une
politique de développement urbain. Etant donné que la population à tendance à se souvenir
uniquement du dernier ou des derniers évènements en date, les populations ayant bénéficié du
projet Douala ville Durable estiment que les inondations ont baissé car elles n’ont pas été
victimes des inondations du 25 février et du 1er avril 2018
Figure 34 : Fréquence du risque selon les enquêtés.
Pour les autorités, il est extrêmement difficile de gérer les inondations à Douala car tout émane
d’une question politique. « Nous sommes aujourd’hui dans un climat social assez sensible où
la ligne à suivre est de faire le moins de dégâts possibles pour empêcher la population de se
soulever. Tout se décide plus haut et nous ne sommes que de simples exécutants. Donc tant que
le politicien ne change pas son plan d’action, je crains la catastrophe » déclare Carlos
Ngoualem, Adjoint au maire de Douala V.
La corrélation entre la variable perception de l’espace et le vécu donne une relation faible de, -
0,1100. Les enquêtés ayant une perception réelle de l’espace à risque développent moins de
stratégies que ceux ayant une perception baissée. Le fait pour les enquêtés de réaliser qu’ils
38%
22%
30%
10%
Fréquence des inondations selon les
enquêtés
Oui, c'est de plus enplus fréquent
C'est équivalent
Non moins fréquent
NSP
58
sont installés en zone à risque et d’être inondés à la moindre occasion développe chez eux une
sorte d’accoutumance et un sentiment d’incapacité. « On ne peut pas lutter contre la nature, on
ne peut pas empêcher la pluie, le seul moyen de s’en sortir c’est de partir, de quitter la zone
marécageuse » nous affirme M. Folefack, 54 ans, habitant du quartier Makepe Missoke. Nous
convenons donc avec Guillemot et al., (2014) qu’il n’y a pas toujours de relation directe entre
une évaluation forte du risque et l’engagement dans des actions d’adaptation. Les enquêtés et
les autorités se disent exposés aux inondations mais la stratégie de réponse reste largement
individuelle et surtout réactive.
Aussi, la volonté de l’enquêté de réduire sa vulnérabilité se dégrade avec le temps. La
corrélation entre le vécu et la durée dans le lieu de résidence nous donne une relation positive
moyenne de 0,42. Les enquêtés ayant passé plus de 10 ans dans le quartier ont un vécu plus
faible que les enquêtés récemment installées. La même tendance est observée chez les
populations âgées de plus de 55 ans. Le temps agit donc sur la capacité et dans une moindre
mesure sur la volonté du ménage à se défendre contre le danger. Ceci s’explique par le fait que,
la plupart des ménages installés en zones inondables sont des ménages ayant été victimes d’au
moins une opération de déguerpissement. Alors pour eux, il ne sert pas à grand-chose de
dépenser du temps et de l’argent pour investir sur des stratégies tout en sachant que la
probabilité que les autorités surgissent à n’importe quel moment pour les déguerpir existe.
IV. PROJECTION
La réponse des enquêtés concernant leur comportement en cas d’une augmentation de la
fréquence des inondations dans le futur confirme bien leur attachement à leur espace. 58
enquêtés affirment que quel qu’en soit l’ampleur du risque, elles resteraient sur place (Tab. 7).
Cette proportion est majoritairement constituée des personnes ayant passé plus de 10 ans dans
le quartier. Quand on examine les raisons de cet attachement, on se rend compte qu’elles sont
majoritairement liées au fait que ces derniers n’ont aucun autre endroit où aller (47 enquêtés) ;
et aussi, à un attachement à la terre natale (9 enquêtés). 36 enquêtes par contre affirment qu’ils
partiraient si le risque s’amplifiait et 6 répondants affirment ne pas savoir ce qu’ils feraient.
Tableau 7. Répartition des enquêté en fonction de leurs attitudes face aux inondations futures.
Durée dans la résidence actuelle
1-4 ans 5-9 ans 10 ans et plus
Je resterai sur place 15 12 31 58
Je partirai dès que possible 8 24 4 36
NSP 3 2 1 6
26 38 36 100
En terme de vision du futur, pour les enquêtés, le futur varie entre demain et 15 ans. Pour 72
enquêtés, le futur varie entre demain et 9 ans et pour seulement 28 enquêtés, ce futur varie entre
plus de 9 et 15 ans. Pour ce qui est des options d’aménagements futurs contre les inondations
la plupart ayant affirmé rester sur place en cas d’augmentation des inondations disent ne pas
savoir ce qu’ils feront dans l’avenir face aux inondations (21 enquêtés). 18 enquêtés estiment
59
qu’ils ne seraient plus là dans le futur. Les principales raisons avancées pour expliquer cette
affirmation sont le poids de l’âge (6 enquêtés) et les menaces du déguerpissement (12 enquêtés).
14 affirment continuer avec les remblais et les drainages des rivières.
Tableau 8 : Options d’aménagement contre les inondations futures.
Étiquettes de lignes Bois des
singes
Makepe Missoke Bonapriso Total général
Je ne serai peut-être plus la 6 10 2 18
Je ferai des remblais et des
drainages
6 8 0 14
Les autorités devront
intervenir
0 0 5 5
NSP 8 8 5 21
Total général 20 26 12 58
Une bonne partie de la population ne s’inquiète pas encore de leur avenir face aux changements
climatiques. Dans les quartiers enquêtés et surtout au Bois des singes ou la population s’installe
directement dans les espaces submergés (Planche 9). Fort est de constater que face à la
problématique d’élévation du niveau de la mer, 43 enquêtés comptent sur les zones d’estuaires
pour se protéger et pourtant, ils s’y installent progressivement. Ils estiment qu’en cas de
potentielle montée du niveau de la mer, la zone d’estuaire de Manoka jouera un rôle de barrière
et que les eaux n’arriveraient pas jusque dans les quartiers. 19 enquêtés estiment ne pas être
concernés. « Nous avons dimensionné nos habitations en fonction du niveau maximum de la
marée folle23 qui varie très peu d’une année à une autre et même s’il nous arrive d’être inondés
de temps en temps, un niveau d’eau plus important ne pourra pas nous atteindre », déclare
Ibrahim Gora, 43, habitant du quartier Bois des singes. Pour 22 enquêtés, il ne sera plus possible
de vivre à Douala donc ils partiraient. 16 enquêtés estiment y penser le moment venu (Fig. 35).
27 % des enquêtés estiment qu’ils ne sauront pas quoi faire face à une augmentation de la
pluviométrie car “on ne peut arrêter la nature“ disent-ils. 45 % affirment qu’ils partiraient car
en plus des causes déjà connues des inondations, une augmentation de la pluviométrie rendrait
leurs quartiers invivables.
23 Marée exceptionnelle selon les habitants du quartier Bois des singes.
60
Figure 35 : Attitude des enquêtés face aux effets probables des changements climatiques.
Planche 9 : Qualité de l’espace construit aux Bois des singes.
La corrélation des variables telles que « que feriez-vous face à une augmentation encore plus
importante des inondations dans le futur ? » et « pour vous le futur c’est quand ? » nous permet
de déduire le niveau de projection des enquêtés. Seulement 11 enquêtés présentent un certain
optimisme face à la situation future. Il s’agit ici de la part des enquêtés qui affirment qu’ils
développeront des stratégies face à une fréquence plus importante des inondations et qui
perçoivent le futur dans 9 à 15 ans. 89 enquêtés ont une projection pessimiste ou aucune
projection. Aussi, le niveau de projection diminue avec le temps. Les personnes nouvellement
installées paraissent plus optimistes à affronter les risques futurs que les personnes
0
10
20
30
Bois des singes Makepe Missoke Bonapriso
Attitude des enquêtés face à l'élévation probable du niveau de la
mer
L'estuaire nous protegera Je ne serai pas concerné
j'y penserai le moment venu Je m'en irai
0
5
10
15
Je ne saurai quoifaire
Nous mourronstous
nous ferrons desmaisons plus
hautes
Je m'en irai peuêtre
Réamenagementpar les autorités
Attitude des enquêtés face à l'augmentation de la pluviométrie
Bois des singes Makepe Missoke Bonapriso
61
anciennement installées. Il existe une relation faible de 0,06 entre la perception du risque et la
capacité du ménage à se projeter dans l’avenir.
Tableau 9 : Estimation du niveau de projection chez les enquêtés.
Durée de résidence dans le quartier
Niveau de projection 1-4 ans 5-9 ans 10 ans et plus
Optimiste 5 5 1 11
Pessimiste ou aucune
projection
21 33 35 89
Total général 26 38 36 100
V. Synthèse de la représentation du risque
L’AFCM (Analyse Factorielle à Composante Multiple) donne la représentation du risque par
les enquêtés.
Figure 36 : Analyse Factorielle à Composante Multiples (AFCM).
En observant le graphique ci-dessus, on remarque que l’axe vertical au centre discrimine la
représentation du risque d’inondation par les enquêtés en fonction de la nature de la zone dans
laquelle ils se trouvent. Le côté droit du graphique représente les contributions des enquêtés
situés en zone inondable (66% des enquêtés). Il s’agit essentiellement des enquêtés des Makepe
Missoke et Bois des Singes, qui ne détiennent pas de titre foncier (60% des enquêtés), qui sont
installés dans la zone depuis plus de 10 ans (40% des enquêtés). Le côté gauche représente la
part des enquêtés de la zone non inondable (Bonapriso), ayant des titres fonciers. L’axe
horizontal quant à lui discrimine les enquêtés en fonction de leur comportement en zone à
risque. La partie supérieure représente la part des enquêtés dont la durée dans la zone de
résidence varie entre 1 et 4 ans. Il s’agit des enquêtés faisant partie de la classe de la population
62
active (25 et 54 ans), dont le nombre de temps passé dans la résidence varie entre 1 et 4 ans et
qui développent plus de stratégies face aux risque et qui se projettent dans le futur.
Alors plus l’enquêté passe du temps dans le quartier, plus sa perception de son espace
s’améliore et moins il s’engage dans l’élaboration des mesures actuelles et futures de réduction
du risque. Les trois variables utilisées sont donc très pertinentes dans la mesure où elles ne sont
pas corrélées ; ceci revient à dire que ces variables sont complémentaires. Une forte corrélation
entre ces variables revient à dire qu’elles sont identiques. Ces trois entités sont totalement
indépendantes ; donc la représentation dépend de la perception, du vécu et la projection.
CONCLUSION
De manière générale, En terme de représentation sociale du risque d’inondation dans les
quartiers enquêtés, les populations ont une bonne perception de leur espace et du risque auquel
elles sont exposées. Cette perception s’améliore avec le temps ; et plus elle s’améliore, moins
le risque est accepté. Cependant, il existe une relation très faible entre la perception et les
capacités de réponse au risque actuelle et future. Fort est de constater que plus les enquêtés
côtoient la zone à risque, mieux est leur perception et moins ils s’engagent dans les
aménagements aussi bien de « coping24 » que sur le long terme. Nous convenons donc avec
Guillemot et al. (2014) qu’il n’y a pas toujours de relation directe entre une évaluation forte du
risque et l’engagement des acteurs dans des actions d’adaptation.
24
63
CONCLUSION GENERALE ET RECOMMANDATIONS
La présente étude, intitulée : « analyse temporelle de la représentation du risque d’inondation
dans la ville de Douala de 1980 à 2018 » a eu pour objectif principal de contribuer à l’analyse
des représentations spatio-temporelles et socio-temporelles du risque d’inondation à Douala de
1980 à 2018. De cet objectif principal, ont découlé des objectifs spécifiques constituant ainsi
les parties de notre travail. Pour atteindre ces objectifs, nous avons eu recours à une démarche
méthodologique combinant deux approches de collecte de données quantitatives et
qualitatives ; une approche dite geo-historique pour la collecte des données d'archives des
journaux. Une approche par enquêtes de terrain dont la démarche a été tournée vers la
représentation sociale du risque par les élus locaux et les populations locales.
A partir des images Landsat-8 de 2017 et Landsat TM de 1986, d’une résolution de 30 m et
Aster, une analyse diachronique de l’occupation du sol a révélé une augmentation de la surface
urbaine de 14018,6 ha entre 1986 et 2017, soit 452 hectares par an et de 9 ha environ par
semaine. En 31 ans, le nombre de quartiers à Douala a doublé avec une extension de la ville
vers les zones de basses altitudes potentiellement inondables (entre 0 et 5 m). Durant cette
même période, 2830 ha des zones basses ont été urbanisées par le biais des remblais, soit
environ 74 ha par an. L’analyse de données sur les inondations antérieures, révèle que les
multiples convoitises dont a fait face la ville de Douala dans un contexte de crise économique
et foncière favorisent au fil des ans une multiplication des risques d’inondation, dont les
premiers cas se sont manifestés à partir des années 1984. De 1884 à 2018, une série de 34
inondations a été recensée avec une fréquence croissante à partir des années 2000 et
inégalement répartie sur l’ensemble des 34 années d’observation en raison de l’absence de
régularité des notifications par la CT et des lacunes dans la collecte. On est passé d’une
inondation par an en 1984, à 2 inondations à partir des années 1996 et de 4 à 5 à partir de la
décennie 2010. Ces inondations ont occasionné 49 pertes en vies humaines, 71 blessés, 90.923
sinistrés et 547 recasés. Si durant la décennie 1980, seul l’incivisme des populations était
évoqué par les autorités et certains experts comme principale cause des inondations, à partir de
la décennie 2000, le changement climatique et donc la fréquence des pluies exceptionnelle
commencent à être pointées du doigt. Cependant, le curage des drains et le déguerpissement
des emprises des drains, initiés suite aux inondations de 1984 et 1986 sont restés à l’ordre du
jour malgré la tendance évolutive du risque. La cartographie des zones inondées permet de
mesurer l’ampleur de l’extension des inondations dans le temps. On est passé de 29 quartiers
inondés entre 1984-2000 à 81 entre 2001-2018. Aussi, l’analyse a révélé que l’inondation se
produit en plus des zones inondables, dans toute zone dépourvue d’un réseau d’assainissement.
Nous avons estimé en 2018, la superficie des espaces inondés à Douala à 16945,9 ha soit
69,53% contre 54,78% pour les zones inondables.
En terme de représentation sociale du risque, elle se décline en trois dimensions. Le perçu, le
vécu et la projection. L’analyse de ces trois dimensions a révélé que les populations des zones
inondées (34 enquêtés) ont une meilleure perception de leur espace que celles des zones
inondables (66 enquêtés). Aussi, plus les personnes enquêtées passent du temps dans le quartier,
64
mieux est leur perception de l’espace. En terme d’acceptabilité, le risque est beaucoup plus
accepté en zone inondée (Bonapriso : 29 enquêtés) qu’en zones inondables. L’analyse du
comportement des enquêtés en zone à risque révèle que les populations ayant passé plus de 10
ans dans le quartier s’engagent moins dans les mesures d’adaptation aux inondations. La
corrélation entre la variable perception de l’espace et le vécu donne une relation faible de -
0,1100. Aussi, la corrélation entre la perception de l’espace et la projection future donne une
relation faible de-0,0699. Ce résultat nous permet d’invalider notre hypothèse de départ selon
laquelle la perception du risque influence le choix des aménagements actuels et futurs. Les
enquêtés ayant une perception réelle de l’espace à risque développent moins de stratégies que
ceux ayant une perception baissée.
Il est donc évident que l’installation en zone à risques constitue une stratégie d’insertion, une
stratégie de survie pour une population dont l’objectif premier n’est pas d’investir en ville mais
juste de gagner sa vie afin de pouvoir venir en aide à la famille laissée derrière soi. L’inondation
constitue donc le prix à payer pour vivre dans la prestigieuse capitale économique. Toutefois,
si aujourd’hui, cette population déjà vulnérable réussit à s’insérer et à survivre en zone à risque
en dépit de la fréquence des inondations observées, il est possible que dans les années à venir,
la situation se complique davantage. Certes, il est vrai que la gestion durable des inondations
dans une telle ville peut se heurter à un principal problème : Il s’agit d’un espace d’ores et déjà
anarchiquement construit. Néanmoins, le renforcement des mesures structurelles déjà engagées
pourraient contribuer à réduire la vulnérabilité des biens et des personnes. Il s’agit, entre autre
de repenser les modes d’occupation de sol à travers l’extension de la ville au-delàs de ses limites
administratives, en vue de la libération des zones humides et des emprises de drains. Pour ce
faire, une politique de régulation foncière devrait être initiée accompagnée d’une redistribution
des parcelles aux personnes occupants les zones non aedificandi.
Il convient également de développer le civisme chez les populations ainsi que des
politiques de préservation des vides urbains. Même si cela parait banal, le risque d’inondation
à Bonapriso est en essentiellement lié à des constructions sur les drains. L’on pourrait croire
que le contexte socio-économique soit à l’origine de cette expansion dans des zones non
indiquées pour l’habitation, mais tel n’est pas le cas dans ce quartier planifié où toutes les
maisons situées sur les drains sont des habitations de haut standing et appartiennent aux
personnalités les plus importantes du pays.
Compte tenu du volume d’eau important qui tombe dans la ville de Douala, la prise en
compte des évènements pluvieux par les aménageurs est nécessaire. La protection contre ces
inondations peut se faire par des solutions techniques telles que l’amélioration de la qualité des
drains naturels et des caniveaux de manière à pouvoir contenir convenablement les eaux de
pluies et ménagères. L’initiative entreprise par le gouvernement camerounais en termes de
gestion de risque repose essentiellement sur le curage de ces drains. Ces derniers, ne facilitant
pas la circulation des eaux du fait de leur insuffisance et de leur sous dimensionnement, seront
d’une aucune efficacité à long terme avec la problématique des changements climatiques qui
induiront la fonte des glaciers polaires et entraineront par conséquent une élévation du niveau
de la mer estimée de 23,6 cm d’ici 2035 à Douala (Domguia, 2016). L’élévation du niveau du
fleuve Wouri conduirait à une introduction des eaux à travers l’embouchure des drains qui
inonderaient l’ensemble de la ville. L’augmentation probable des pluies d’environ 35 % à
l’horizon 2050 (CLUVA, 2012) ainsi, l’augmentation attendu des pluies maximales de 1 et 5
jours de 27 mm et 40 mm respectivement (McSweeney et al., 2008) pourraient occasionner des
inondations plus fréquentes que celles d’aujourd’hui. Il est donc nécessaire, pour de meilleures
65
prévisions, d’installer un marégraphe dans le fleuve Wouri afin d’analyser les séries et de
prévoir le niveau futur de l’océan et de l’estuaire. Pour ce qui est des précipitations, une analyse
sérieuse sur le long terme devrait être faite en prenant en compte les intensités, la durée et la
fréquence afin de détecter si la ville fait face ou pas à des pluies exceptionnelles.
66
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N° 2004/017 du 22 juillet 2004.
http://www.ifrc.org/docs/idrl/853FR.pdf; Arrêté n° 037/PM du 19 mars 2003 portant création,
organisation et fonctionnement d'un Observatoire National des Risques .
x
ANNEXES
ENQUETE SUR L’ANALYSE REPRESENTATION SOCIO-TEMPORELLE DU RISQUE D’INONDATION
A DOUALA-CAMEROUN
BON A SAVOIR : Ce questionnaire a été conçu essentiellement pour un objectif de recherche académique
Code de Confidentialité : Les informations obtenues à travers ce document sont confidentielles au terme de la loi N° 91/023 du 16 décembre 1991 sur les Recensements et Enquêtes Statistiques qui stipule en son article 5 que « les renseignements individuelles d’ordre économique ou financier figurant sur tout questionnaire d’enquête statistique ne peuvent en aucun cas être utilisés à des fins de contrôle ou de répression économique ».
QUESTIONNAIRE MENAGE
I.
1)- 2)- 3)- 4)- 5)- 6)- 7) 8 9 10 11 12
IDENTIFICATION DU MENAGE
/___/___/ /___/___/ /___/___/ /___/___/ /___________________________________________/ 1-SN/___/2-NP/___/ 3-NSec/__/ 4-NSup/_____/ /___/ /___/___/
1. Chef du Ménage 2. Epouse ou époux 3. Fils ou fille du CM 4. Père ou mère du CM 5. Autre Parent du CM. 6 Sans lien de parenté avec le CM
/___/___/ an(s) /__________________________________________/ /__________________________________________/
/_________________________________________/
Quartier Numéro du ménage N° du questionnaire Date de l’enquête Nom de l’enquêté/interviewé/répondant Niveau d’instruction de l’enquêté Age du répondant Statut du répondant (membre de ménage de plus de 18 ans) Nombre d’années de résidence dans le quartier Secteur d’activité Province d’origine Nombre de résidants permanant du ménage /___/___/
xi
II PERCEPTION DU RISQUE D’INONDATION
Q0 Position GPS de la maison Nature de la zone
N S Altitude
1- ZI/______________/ 2- ZNI/_________________/
Q1 Quel est votre point de vue sur l’aspect de la ville de Douala actuellement ? Quels sont les problèmes majeurs auxquels vous faites face ?
________________________________________________
Q2 Avez-vous remarqué des mutations/des changements de l’espace depuis votre installation dans ce quartier ? Si oui, lesquels ?
1-oui/___/ 2-non/___/
________________________________________________
Q3 Pratiquez-vous des activités près de votre maison d’habitation ou près du cours d’eau le plus proche ?
1-oui/___/ 2-non/___/ Si oui, pouvez-vous en préciser _____________________ ________________________________________________
Q 4 A quel(s) risque(s) estimez-vous être le plus exposé ? (plusieurs réponses possibles)
Inondation Incendie Problèmes liés à la qualité de l’eau Aucun Autres
Q5 Pensez-vous être installés en zone
inondable (Une réponse possible)
Si oui, le saviez-vous avant de votre
installation ?
Il existe des lois interdisant des
constructions dans ces zones. Etes-
vous conscient que vous êtes en
violation de ces lois ?
1-oui/___/ 2-non/___/ 3-NSP/__ / 1-oui/___/ 2-non/___/ 1-Je suis conscient car je connais ces lois /______/ 2-Je ne suis pas conscient car le ne connais pas ces lois /_/ 3-Je suis conscient mais personne ne les applique /______/
Q6
Quelle est la nature de votre acquisition
de la terre ?
1-Don/___/ 2- Achat/___/ 3 Autre_________________________________________
xii
Avez-vous un titre foncier ?
1-oui/___/ 2-non/___/
Q7 Quelles sont les raisons qui vous ont
poussé à vous installer dans cette
zone?
Besoin de se sentir chez
soi_________________________________
Economiques_____________________________
Culturelles________________________________
Déguerpissement_________________________________
Autres____________________________________
III COMPORTEMENT EN ZONE A RISQUE
Q8 En dehors de votre activité professionnel,
quelles actions menez-vous afin d’améliorer
vos conditions de vie dans votre espace ?
______________________________________________
Q9 Que faites-vous actuellement pour limiter ou
éviter les dommages d’inondations ?
Construction en matériaux provisoires
Curage de drain
Remblais pour relever le niveau du sol
Murette/barrière en parpaing
Rien 10-autres___________________________________
Q10 Les autorités, interviennent-ils dans la gestion
de ce risque ?
Si oui, comment ?
1-oui/___/2-non/___/
______________________________________________
Q11 Etes-vous engagé gans un comité de développement local ou dans une association de développement local ?
1-oui/___/ 2-non/___/
III PROJECTIONS FUTURES
Q12 Comment voyez-vous votre quartier dans le futur ?
A préciser
_______________________________
xiii
Pour vous ce futur là c’est quand ?
Q13 Que feriez Vous face à une augmentation des
inondations dans le futur ?
Rester sur place Quitter les lieux inondables dès que
possible ; Autre___________________________
Q14 Si vous resteriez sur place, que feriez-vous pour vous
protéger de ces inondations ?
Q15 Le Niveau de la mer va augmenter et les villes côtières
comme Douala en seront assez vulnérables. Quel est
votre avis par rapport à cela ?
______________________________________
Q16 Aussi, avec les changements climatiques, la ville de
Douala enregistrera certainement de plus en plus de
précipitations. Quel est votre avis par rapport à cela ?
________________________________________
COMMENTAIRES
xiv
GUIDE D’ENTRETIEN SUR LA REPRESENTATAION SOCIO-TEMPORELLE DU RISQUE
D’INONDATION A DOUALA-CAMEROUN.
Merci de nous accorder cet entretien. Je suis étudiante en Master de spécialisation en Gestion des risques
et des Catastrophes à l’Université de Liège en Belgique et je fais cet entretien avec vous afin de discuter
sur des problématiques auxquelles font face dans votre ville. D’abord je vais vous laisser vous présenter,
Nom et prenom :______________________________________________________________
Institution :__________________________________________________________________
Fonction :___________________________________________________________________
Missions :___________________________________________________________________
Nombre d’année d’occupation du poste__________________________________________
Quartier de résidence________________________________________________________
Nous venons de faire des présentations générales. Entrons maintenant un peu dans le concret. J'aimerais
vous interroger sur vos opinions, votre manière de cerner l’espace de la ville de Douala,
I PERCEPTION DU RISQUE
1. En tant qu’autorité principal chargée de la gestion des affaires locales en vue du
développement économique, social et culturel de des populations, quelle est votre
perception de l’espace urbain Doualais aujourd’hui ? Quels sont les problèmes majeurs
auxquelles font face la communauté ? Ces problèmes sont-ils récents ?
_____________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
2. En parlant du risque d’inondation, comment le qualifieriez-vous ? Avez-vous déjà été
particulièrement affecté ?________________________________________________________
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
xv
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
3. Dans la plupart des métropoles Africaines telles que Cotonou, Ouagadougou, et voire même
Yaoundé etc.) les inondations sont bien avant tout liées au colmatage et au non entretien des
réseaux de drainage. Est-ce le cas dans la ville de Douala ?____________________________
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
4. Avez-vous des zones définies comme zone à risque dans la ville de Douala ? quelle est leur
pourcentage surfacique ? Sont-elles constructibles ?_______________________________
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
___________________________________________________________________________
5. A l’échelle des villes comme Douala, vous disposez d’un schéma directeur d’Aménagement
de la ville, d’un schéma directeur de l’urbanisme, d’un plan d’occupation des sols etc. Alors
comment expliquez-vous l’installation progressive des populations dans ces zones non
constructibles ? certaines disposent des permis de bâtir, qui le leur octroi ?
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
Nous avons tenté de faire le tour sur votre perception de l’espace urbain de Douala. Essayons donc
maintenant de voire, quelles actions vous et votre institution initiez dans un tel espace en constante
mutation.
II COMPORTEMENT DES AUTORITES FACE AUX INONDATIONS
6. Quelles actions menez-vous ou considérez comme prioritaires à Douala actuellement ?
xvi
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
7. Quelles sont les mesures, et les stratégies qui ont été et qui sont mis en œuvre dans le cadre de
la régulation d’occupation des sols du part et de la lutte contre les inondations d’autres part ?
quels sont leur niveaux d’importance dans la gestion des sols
?__________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
Si ces stratégies existent, comment sont-elles appliquées dans un environnement déjà construit
? comment gérez-vous les constructions anarchiques dans ce type de stratégies ?
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
8. Dans les stratégies misent au point ou en cours d’étude, la collaboration avec la population locale
est-elle prise en compte ?
Parlez-moi projet « Douala, une ville durable »
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____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
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____________________________________________________________________________
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III REGARD SUR LES FUTURES OPTIONS D’ADAPTATION
9. Quels sont les futurs défis et enjeux pour la ville de Douala ?
_______________________________________________________________________________
_______________________________________________________________________________
xvii
_______________________________________________________________________________
_______________________________________________________________________________
10. Plusieurs pays africains à l’instar du Nigeria voisin font face à une explosion de la population
urbaine depuis quelques décennies, comment voyez l’évolution de la population de la ville de
Douala D’ici 2050 ? et en 1980, à combien était-elle estimée ?
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
11. La plupart des scenarios sur les changements climatiques indique une augmentation de la
pluviométrie d’ici 2050 dans les zones côtières. Alors que pensez- vous de Douala face à un tel
scenarii ?
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________
12. Parmi les enjeux d’une telle augmentation de la pluviométrie, les scientifiques prévoient une
submersion quasi-totale d’une ville, où seulement quelques mm d’eau suffisent pour générer une
inondation. Alors que pourrait à votre avis faire le politicien pour gérer les inondations actuelles
et futures ?__________________________________________________________________
xviii
INONDATION 2018
xix
xx
xxi