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Exemple d’études et de recherche ONCFS RAPPORT SCIENTIFIQUE 2012 51 UNITÉ SANITAIRE DE LA FAUNE VFigure 1. Exemple de traitement de données GPS d’un blaireau : en orange, domaine vital (Kernel 95 %) et en jaune centre d’activité (Kernel 50 %), complet à gauche et partie incluant uniquement les pâtures à droite. VMatériel de vidéo-surveillance dans une exploitation agricole. Tuberculose de la faune sauvage en Côte-d’Or : état des lieux Depuis 2005, on assiste à une persistance, voire à une recrudes- cence, de la tuberculose bovine dans plusieurs régions françaises, les secteurs les plus touchées étant la Côte-d’Or, la Dordogne, les Pyrénées- Atlantiques, la Corse et la Camargue. Depuis 2001, des cas isolés voire groupés de tuberculose impliquant différentes espèces de la faune sauvage (cerf élaphe, sanglier, blaireau et de manière marginale, chevreuil et renard) ont été découverts*. Dans un premier temps, nous cherchons à mieux comprendre les différents facteurs pouvant conduire à l’émergence et au maintien de la tuberculose dans la faune sauvage en analysant les cas connus en France à la lumière des situations déjà connues à l’étranger. Une étude bibliographique et une étude rétrospective et descriptive des cas de tuberculose dans la faune sauvage française permettent d’atteindre cet objectif. Les facteurs de risque connus de transmission entre la faune sauvage et la faune domestique sont également étudiés. Dans un deuxième temps, nous cherchons à déterminer de manière expérimentale le risque de transmission entre deux espèces sauvages sensibles à la tuberculose bovine, le blaireau et le sanglier, et les bovins en Côte-d’Or où la prévalence de la tuberculose bovine est élevée. Le risque de transmission est conditionné par différents para- mètres qu’il est nécessaire d’estimer : le niveau d’infection des espèces sauvages, leur capacité d’excrétion ainsi que l’intensité des contacts qui existent entre ces populations et les bovins. Pour ce dernier para- mètre, les moyens mis en œuvre sont d’une part le suivi télémétrique de 10 blaireaux et 11 sangliers avec des colliers GPS et d’autre part un protocole de vidéosurveillance mis en place dans les exploitations agricoles. Les animaux équipés de radio-émetteurs ont été suivis pendant 1 à 8 mois. L’intensité du contact entre individus équipés et bovins est évaluée par leur utilisation des pâtures. Les contacts directs interspécifiques sont rares et la transmission se fait plutôt par contact indirect dans la mesure où Mycobacterium bovis peut être résistant dans l’environ- nement. Deux estimateurs à deux échelles temporelles différentes sont utilisés : le nombre de localisations sur les pâtures par nuit des animaux équipés et la surface des pâtures incluse dans leur domaine vital, d’une part, et leur centre d’activité, d’autre part, par mois (figure 1). La variabilité de ces estimateurs en fonction de différents paramètres paysagers, météorologiques et temporels sont étudiés à travers des modèles mixtes. L’intensité des contacts et la capacité d’une population à main- tenir un agent pathogène étant également sous-tendues par sa densité, il est nécessaire de mieux connaître les niveaux de densité des popu- lations étudiées. Des indicateurs et des données existent pour le grand gibier, en revanche, les densités de blaireaux sont très peu renseignées. En conséquence, un protocole fondé sur une estimation des densités de terriers et une évaluation de la taille des groupes par piégeage photographique a été mis au point pour pallier cette carence. À terme, cette étude devrait permettre de proposer des mesures de prévention et de lutte contre la tuberculose pour la gestion sani- taire de la faune sauvage, d’une part, et pour les pratiques d’élevage, d’autre part. * Ce travail fait l’objet d’une thèse universitaire (Ariane Payne - Université Lyon 1). © A. Payne © A. Payne VBlaireau équipé d'un radio-émetteur.

Tuberculose de la faune sauvage en Côte-d’Or : état … · bibliographique et une étude rétrospective et descriptive des cas de ... en Côte-d’Or où la prévalence de la

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Exemple d’études et de recherche

ONCFS RAPPORT SCIENTIFIQUE 2012 51

UNITÉ SANITAIRE DE LA FAUNE

Figure 1. Exemple de traitement de données GPS d’un blaireau : en orange, domaine vital (Kernel 95 %) et en jaune centre d’activité (Kernel 50 %), complet à gauche et partie incluant uniquement les pâtures à droite.

Matériel de vidéo-surveillance dans une exploitation agricole.

Tuberculose de la faune sauvage en Côte-d’Or : état des lieuxDepuis 2005, on assiste à une persistance, voire à une recrudes-

cence, de la tuberculose bovine dans plusieurs régions françaises, les secteurs les plus touchées étant la Côte-d’Or, la Dordogne, les Pyrénées-Atlantiques, la Corse et la Camargue. Depuis 2001, des cas isolés voire groupés de tuberculose impliquant différentes espèces de la faune sauvage (cerf élaphe, sanglier, blaireau et de manière marginale, chevreuil et renard) ont été découverts*.

Dans un premier temps, nous cherchons à mieux comprendre les différents facteurs pouvant conduire à l’émergence et au maintien de la tuberculose dans la faune sauvage en analysant les cas connus en France à la lumière des situations déjà connues à l’étranger. Une étude bibliographique et une étude rétrospective et descriptive des cas de tuberculose dans la faune sauvage française permettent d’atteindre cet objectif. Les facteurs de risque connus de transmission entre la faune sauvage et la faune domestique sont également étudiés.

Dans un deuxième temps, nous cherchons à déterminer de manière expérimentale le risque de transmission entre deux espèces sauvages sensibles à la tuberculose bovine, le blaireau et le sanglier, et les bovins en Côte-d’Or où la prévalence de la tuberculose bovine est élevée.

Le risque de transmission est conditionné par différents para-mètres qu’il est nécessaire d’estimer : le niveau d’infection des espèces sauvages, leur capacité d’excrétion ainsi que l’intensité des contacts qui existent entre ces populations et les bovins. Pour ce dernier para-mètre, les moyens mis en œuvre sont d’une part le suivi télémétrique de 10 blaireaux et 11 sangliers avec des colliers GPS et d’autre part un protocole de vidéosurveillance mis en place dans les exploitations agricoles. Les animaux équipés de radio-émetteurs ont été suivis pendant 1 à 8 mois.

L’intensité du contact entre individus équipés et bovins est évaluée

par leur utilisation des pâtures. Les contacts directs interspécifi ques sont rares et la transmission se fait plutôt par contact indirect dans la mesure où Mycobacterium bovis peut être résistant dans l’environ-nement. Deux estimateurs à deux échelles temporelles différentes sont utilisés : le nombre de localisations sur les pâtures par nuit des animaux équipés et la surface des pâtures incluse dans leur domaine vital, d’une part, et leur centre d’activité, d’autre part, par mois (fi gure 1). La variabilité de ces estimateurs en fonction de différents paramètres paysagers, météorologiques et temporels sont étudiés à travers des modèles mixtes.

L’intensité des contacts et la capacité d’une population à main-tenir un agent pathogène étant également sous-tendues par sa densité, il est nécessaire de mieux connaître les niveaux de densité des popu-lations étudiées. Des indicateurs et des données existent pour le grand gibier, en revanche, les densités de blaireaux sont très peu renseignées. En conséquence, un protocole fondé sur une estimation des densités de terriers et une évaluation de la taille des groupes par piégeage photographique a été mis au point pour pallier cette carence.

À terme, cette étude devrait permettre de proposer des mesures de prévention et de lutte contre la tuberculose pour la gestion sani-taire de la faune sauvage, d’une part, et pour les pratiques d’élevage, d’autre part.

* Ce travail fait l’objet d’une thèse universitaire (Ariane Payne - Université Lyon 1).

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A. P

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Blaireau équipé d'un radio-émetteur.