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ÏES SCIENCES AUXILIAIRES UL. . ... L'HISTOIRE IÎU: IJIIOIT PAR - EUGNE LELONG (Extiail (le la /lc?nte internationale do l'Enseignement) PARIS LIBRAIRIE MARESCQ AINÉ A. CHEVALIER-MARESCQ & d'° ÉDITEURS 20, RUE SOUFFLOT 1900 _ • Document - il il il il Ili iiii E l Ili lftl 0000005561476 -

UL. . LHISTOIRE IÎU: IJIIOIT

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ÏES SCIENCES AUXILIAIRESUL.....

L'HISTOIRE IÎU: IJIIOITPAR -

EUGNE LELONG

(Extiail (le la /lc?nte internationale do l'Enseignement)

PARIS

LIBRAIRIE MARESCQ AINÉ

A. CHEVALIER-MARESCQ & d'° ÉDITEURS20, RUE SOUFFLOT

1900

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Document -

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LES- SCIENCES AUXILIAIRES

DE L'HISTOIRE DU DROIT

Messieurs,

- Ma première parole doit être une parole de remerciement.• 3e dois remercier tout d'abord M: le doyen 4e la Faculté dedroit (2), qui n accueilli avec une particulière bienveillance l'offreque j'étais venir faire, il y n quelques mois, d'un cours deSciences auxiliaires de l'histoire du di-oit.--

Je 'dois remercier ensuite la Faculté et Je Conseil général de l'Uni-versité, qui ont bien voulu,par un vote unanime, autoriser un ensci-gnement dont le rapport avec les études juridiques aurait bien pu.leur paraltre un peu incertain. -

Assurément, s'il revenait en ce monde, le législateur de l'an XIIserait singulièrement, surpris de voir ce qui s'enseigne aujourd'hui,-sous couleur de droit - fût-ce même titre purement complémen-taire - dans l'enceinte de ces écoles restaurées par lui.

Il relirait l'article 2 de sa loi du 22 ventôse, organique des Écolesde droit « On enseignera [dans les Écoles de droit] 40 Le droit« civil français dans l'ordre établi par le Code civil, les éléments du, droit, naturel et du droit des gens, et le droit romain dans ses« rapports avec le droit français 20 Le droit public français et le« droit, civil dans ses rapports avec l'administration publique« 30 La législation criminelle et la procédure civile et criminelle »et, sa lecture terminée, il se demanderait quel rapport peuvent bienavoir, avec le droit civil français, enseigné dans l'ordre établi par JeCode ou considéré dans ses rapports avec l'administration publique,les enseignements si nombreux et si variés dont il lirait les titres etles programmes sur les affiches - grandes ou petites - placardéesà l'entrée de cette École.

Mais rien, 'j'imagine, ne l'étonnerait - et ne le scandaliseraitd'avantage - que les quatre mots qu'il lirait en sous-titre sur laplus petite de ces affiches Bibliographie. Epigraphie, Paléographie,Diplonrntigue,

Grands flots que Pradon croit des termes de chimie.

Messieurs, vous êtes venus nombreux à cette première leçon -

t4) Leçon d'ouverture (45 décembre 1897) d'un cours libre de Sciences auxi-liaires de l'histoire du droit, autorisé à. la Faculté de droit de p aris pourl'année scolaire 4897-4898. . -.

(2) M. Garsonnet, qui avait montré beaucoup d'intérét pouf un enseignementdont il ne devait voir que l'es débuts, et à la rndnioirc regrettée duquel je tiensà témoigner encore une fois de toute ma gratitude,.-

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LES SCIENCES AUXILIAIRES DE L'HISTOIRE DU DROIT

etje veux vous en reriiercier tout de suite, d'autant que je n'ai pasla téméraire présomption d'espérer vous retenir tous aux 'suivantes- et votre seule présence témoigné que vous ne partagez en rienles inquiétudes du législateur de 1804 ou de sessuccesseùrs attardés.Vous n'ignorez pas que, depuis longtemps déjà, et particulièrement

• -

depuis un quart de siècle, un esprit nouveau d inspiré l'enseigne-ment des Facultés de droit heur les transformer 'd'écoles purement

• professionnelles qu'elles étaient au début de ce siècle en établisse-ments de haute culture scientirique. Elles redoutent moins aujour-dhui qu'en 1804 de former des idéologues, et, sans sacrifier enaucune façdn 'e vieux fonds des études de droit civil, qui doiventtoujours demeurer le centre et comme le noyau solide de leur ensei-gnement, elles estiment qu'il convient de vivifier ce qu'il pourraity avoir d'un peu trop scolastique dans cet enseignement exclusif,

' d'une part, par l'étude des sciences politiques, économiques etsoèiales qui nous font pénétrer dans la vie de la société contempo-raine, et, de l'autre, par l'étude de l'histoire qui, en nous faisant

connaître la lente évolution des institutions du passé, nous prépareà mieux comprendre et à mieux juger cellesdu présent.

Pour m'en tenir à ce dernier ordre d'études qui doit être le nôtre,il me suffira de rappeler quelques dates qui jalonnent, pour ainsi

•dire, la marche progressive des études de droit historique dans les•Facultés de droit.

- C'est sous la Restauration au moment même où Guizot fondait,par ses premières leçons de la Sorbonne, l'enseignement de Ibistoire moderne dans notre pays, que fut créée en cette École, sous letitre d'liisloire du droit romain et du droit français, la première chaired'histoire du droit qu'aient possédée nos facultés françaises c'estaujourd'hui la chaire d'histoire du droit du doctorat de droitpublic. Ceci se passait en 1819; niais depuis plus de vingt ans déjà,Hugo et Savigny enseignaient histoire du droit dans les universitésallemandes.

• Quarante ans plus lard, on 4859, une seconde chaire, consacréespécialement à l'histoire du développement du droit privé étaitinstituée sous le titre d'histoire du droit f'açais étudie dans ses origines féodales et coutumières c'est aujourd'hui la chaire d'histoiredu droit du doctorat juridique.

La môme année, une troisième chaire d'histoire du droit étaitcréée dans mie de nos facultés de province, à Toulouse, et conriée àl'un des rares hommes qui, à cette époque, s'occupaient cri Francede l'étude historique du droit, à Ginouilbac.

•Tel est l'état de choses qu'ont connu les étudiants de ma généra-

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LES SCIENCES AUXILIAIRES DE L'HISTOIRE DU DROIT 3

lion. Deux cours d'histoire du droit, à Paris,pour les candidats au- doctorat, un autre à Tàulouse; rien dans les autres facultés deprovince. -

Rien non plus, même à Paiqs, pour les candidats à la licence.Pour eux, l'histoire du droit français commençait aux travaux pré- -paratoircs. du C6de civil, et Cambacérès, avec ses trois projets,aurait risqué de passer ii leurs yeux pour le plus ancien des juris-consulles français et pour le successeur immédiat de Tribonien, siles professeurs de Code civil n'avaient eu, pour la plupart, l'habi-tude de combler une lacune trop criante par une large introductionhistorique consacrée à une :vue d'ensemble sur l'évolution de notre

ancien droit. -Il existait bien, il est vrai, en dehors des Facultés de droit, deux -.

cours d'histoire du droit; l'un à l'École des chartes, l'autre au Col-lège de France (1). Mais les leçons si nourries et si lucides d'AdolpheTardif,professées dans une école spéiaIe, loin du centre des études,ne profitaient guère qu'aux futurs archivistes, et- la chaire duCollège de France était, par son titre même, une chaire d'histoiredes ldqislaiions comparées, dont le brillant titulaire avait le droit, dontil usait, d'étudier à son gré et tour à tour les institutions de la vieilleÉgyp!e ou celles de la jeune 1 mérique, celles de la Grèce ou celles

de Rouie, d même celles de la France (2). Pendant les années où ilm'a été donné de le suivre, le cours était professé plutôt par lemordant auteur de Paris en Amérique que par l'érudit historien duDroit (le propriété foncière en Occidentt de la Condition civile et politique

des femmes-. Aucun de ses auditeurs, du reste,. ne s'en plaignait, etquand nous nous entassions dans la salle no 8 pour applaudir laleçon de l'orateur libéral, nous-savions bien pie, ce jour là, il n'yserait pas question des destinées du sénatus-consulte Velléien Tout-cela n'empêche pas Laboulaye d'avoir été en France le véritablefondateur de l'enseignement historique du droit, et je ne regretteaucun de mes applaudissements.

Mais revenons aux Facultés de droit. Elles sont bien-changées dece qu'elles étaient en. 1870. Dans toutes, il existe maintenant deuxcours d'histoire du droit pour les aspirants docteurs. Dans touteségalement on a institué, en 1879, un cours général d'histoire dudroit français, placé avec juste raison au début des études de.licence. .

(1) La conférence d'histoii'e du droit de l'École des- hautes études queM. TJiêvenin dirige depuis sa création, n'a été établie qu'après 1870.

(2) Voy. Trente ans desiseiqnemenu CotUge.de France (1849•188e),Paris, 1888. ----- -

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4 LES SCIENCES AUXILIAIRES DE L'HISTOiRE. DU DROIT

Pour être moins apparent dans l'enseignement du droit romain,le changénient n'en estpas moins profond. Le nombre et le titre deschaires n'a pas varié, niais si vous ouvrez un des manuels qui ser-vaient aux étudiants d'il y a cinquante ans, celui de Du Caurroy, parexemple, et si vous le comparez aux livres que vous avez mainte-nant entre ks mains,-vous ne serez pas longtemps 4i vous apercevoirque, sous le même titre, ce sont des choses toutes différentes qu'onvous apprend aujourd'hui. D'exégétique qu'il était alors, l'ensei-gnenient du droit romain est devenu surtout historique. Ce n'estplus, comme en l'an XII, dans ses rapports avec le droit français etcomme source directe de quelques-unes des dispositions de nosCodes, ce n'est plus même seulement à un point de s'ue.d'esthétiquejuridique et comme le monument le plus parfait élevé k la sciencedu droit par la logique d'esprits à la fois pratiques et subtils, quele droit romain vous est enseigné dans cette Faculté; c'est k titrede témoin et de débris grandiose d'une des plus remarquables civi-lisations qui aient paru dans le monde, d'une de celles qui, s'éten-dant sur le plus grand nombre de siècles, nous permet de suivre ledéveloppement et la transformation des institutions dans des mi-.lieux.sociaux plusieurs fois renouvelés. Ainsi entendue, l'étude dudroit romain doit servir de correctif hune tendane fâcheuse querisque de faire naître l'étude exclusive des textes d'un droit envigueur, celle de regarder, parle seul fait qu'elles existent., les insti-tutions du présent comme la forme définitive et, pour ainsi dire,nécessaire deschoses, comme la formule ne varietur du droit.

C'est donc historiquement que le droit est maintenant enseignédans nos Fjicultés, du moins en celles de ses branches qui compor-tent la méthode historique. La création récente d'une agrégationspéciale d'histoire du droit marque le dernier terme du progrèscommencé par la modeste création de 1819.

C'est la part désormais considérable faite à l'élément historiquedans l'enseignement et dans les concours qui est la raison d'étre deces leçons sur les sciences auxiliaires de l'histoire du droit que la.Facùlté a bien voulu m'autoriser à vous faire.

Il me reste à vous dire brièvement comment je conçois cet ensei-gnement, quel en sera l'objet et quel but il se proposa.

Disons tout d'abord ce qu'il ne sera pas.li ne serapas un neuvième cours d'histoire du droit venant s'ajou-

ter aux huit cours entre lesquels se partage, dans cette Faculté,l'enseignement historique du droit romain et celui du droit fran-çais. Ce n'est pas que, malgré les progrès si considérables réalisés àcette heure, on ne pùt découvrir quelques provinces de l'histoire du

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LLS Sf11 M IAUXILIAIRES Dl LII ISJ 01111 1)13 DROIT b

droit sur lesquelles pourrait s'installer avec grand profit un ensei-gnement'complémentaire.

J'aurais plaisir pour mapart'à pouvoir suivre dans .cette Écoleun cours de droit grec, un cours d'histoire du droit publie -.romain (f), même un cours d'histoire du droit canonique, bien quece dernièr enseignement soit déjà donné k quelques pas d'ici etsous deux formies différentes par deux membres de cette Faculté,je n'ai pas à dire avec quelle autorité.

Mais je n'ai à aucun degré la compétence.i-equise pour l'un quel-conque de ces enseignements.

Mes intentions sont- autres et- beaucoup plus modestes.Je suppose un jeune homme qui a suivi régulièrement les cours

de cette École. IL a été particulièrement intéressé par ceux qui trai-tient de matières histoNques, et il a conçu le dessein de terminerpar une thèse d'histoire du droit ses études de doctorat; pQut-ètresonge-t-il k se consacrer spécialement à cette branche des étudesjuridiques et à préparer l'agrégation d'histoire du droit. Ou bien,plus simplement, c'est un étudiant qui, sans aucune arrière-penséede grade ou de concours, se sent attiré par un goût particulier vers.les recherches historiques.. Ses années de droit terminées, il sou-haiterait pouvoir employer les loisirs probables que lui laissera audébut la profession qu'il a le dessein d'embrasser h étudier quel-qu'une des institutions de sa province, de sa ville, 1e son village. ila emporté de l'enseigneiient de cette École , un fond solide de cul-ture juridique, et des notions précises et exactes sur les grandeslignes du développement historique des institutions et du droit.Cependant, le jour où, quittant les sommets de l'histoire générale'du droit, il veut aborder une question de détail, il se sent commedépaysé. Il ne sait quels livres ouvrir, quels documents consulter.'Il à bien aperçu, sur les rayons inférieurs de quelque bibliothèque,de longues rangées d'in-folios on lui a dit que c'était des recueils,de sources: il n'a pas osé insister. Par, les fenêtres grillées d'undépôt d'archives, il a pu entrevoir de grandes salles garnies, duplancher au plafond, de cartons, de liasses, de registres. [t soup-çonne vaguement que dans quelque recoin de ces vastes galeries sedissimulent des documents qui éclaireiaient d'un jour nouveau laquestion encore obscure et mal élucidée qui le préoccupe, mais ilignore s'il existe quelque fil conducteur qui puisse le guider dansce labyrinthe. IL se risque cependant h y entrer. On lui apporte surd'imprécises indications un carton dont le titre parait répondre en

(1) Depuis quecesparoles ont été prononcées, une chaire d'histoire du droitpublie romain n été créée à la Faculté de droit de Paris.

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GLES SCIENCES AUXILIA!RES DE L'llISTOIflE Di) DRÔlE

effet à ses désirs et à Les espérances. Et l'ouvre avidemment,. et lereferme bientôt désespéré, abjurant à jamais lu vaine prétention de

• faire jrri liii' une étincelle de vérité de ces vieux parchemins dont iln'est pas parvenu à déchiffrer une ligne.

Que de forces ainsi perdues, que de lionnes volontés inutilisées,

• . que de vocations découragées à pu il n'a manqué, pour porter désfruits utiles à la science, pour faire une riche récoltedans un champoù la moisson est abondante et où il y a peu d'ouvriers, que quel-ques conseils de direction, quelques indications à la rois très si rnples,

• mais tout à fait indispensables, qu'un apprentissage très court desoutils qu'un historien juriste doit apprendre avant tout à connattreet à manier. -

Un indicateur, un alphabet, une grammaire, voilà tout le bagage,le viatique nécessaire, niais suffisant, dont doit se munir l'étudianten histoire du droit avant de s'engager dans la voie des recherchespersonnelles et des travaux d'érudition. La éihiwgrvphie lui fournira

l'indicateur, la paléographie l'alphabet, la fl iplonifflique la grammaire'.

La bibi-io,gvaphie,qui est, dans un sens large, la science des livres,- s'entend, dans un sens plus restreint, de la connaissance des réper-

toires de livres. Qu'a-t-on écrit suice sujet? '[elle est la premièrequestion que se poe celui qui aborde un problème quelconque: pour

- nous ce sera un problème d'histoire du droit. Or, sur tous les sujets,on commence à avoir passablement'-écrit. La Bibliothèque natio-nale possédait sur ses rayons; au fer janvier 1897, 2,048.893 vo-Rimes, dont 515.097 se rapportaient à l'histoire et 160,459 au droit:Le British Mu seum en renferme presque au Lant, et il n'y n perrt-trepas iiù volume sur trois qui soit commun à ces deux dépôts. Etpar toute l'Europe, et au-delà de l'Atlantique. la production littéraire

• ,s'accroit d'année en année avec une vitesse accélérée. Rien que pourla France, le ,lou)'nai de /W1 enregistre chaque année près de15.000 articles déposés au Ministère de l'intérieur, et ce chiffre necomprend pas les revues ., ni les autres périodiques par lesquels, àl'heui'e actuelle, la science se fait autant et plus que par les livres,

La pt'oduetiorr est presque aussi considérable en Angletèrre ellel'est plus encore en Allemagne. Comment se reconnaltre et s'orien-ter au milieu de cet océan de littérature? Ce sont les répertoiresbibliographiques, disposés suivant des plans et des méthodes diver-ses, qui serviront aux travailleurs de boussole et de cartes marines.De ces répertoire,, les uns sont généraux, d'autres nationaux, d'au-Ires spéciaux. Ces derniers, qui sont les plus utiles, se rapportentsoit à l'ensemble d'une kience, soit à un point particulier de cettescience. ..'• .

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LES SCIENCES AUXILIAIIIIiS FIE L'IIISi'OlIlIi DU. DROIT7

Le nombre et la valeur des répertôires bibliographiques vachaque jour s'augmentant, et c'est un grand service que rendentà la science les auteurs consciencieux, patients et modestes de cesinestimables compilations: Rien de plus dangereux, en 'effet, pourun travailleur que de s'engager dans un sujet sans en avoir faitavec soin la bibliographie il risque d'avoir ignoré le livre capitalqui rendra son propre travail ou sans valeur, -ou tout au moinsinutile, au easoà il serait arrivé, avec beaucôup de peine, au mômerésultat que son devancier. Nous devrons donc avant toutes chosespasser en revue et ajprécier ceux,eu des répertoires bibliographiquestlu'un historien du droit ne peut ignorer sans péril.- Les répertoires bibliographiques font connaître les livres qu'il

peutètre utile de consulter sur une question donnée il est uneautre catégorie d'ouvrages dont il est indispensable que l'ap-prenti historien possède familièrement, dès le début de ses études,la connaissance et le maniement. Ce sont ces grandes collections detextes et de documents, ces recueils de sources, comme on dit, quidoivent étre dans les travaux d'histoire du droit ce que nos recueilsde lois et de décisions dejurisprudence sont dans la pratique quoti-dienne des affaires. --

Les sources! B.emonter toujours aux sources I Ne pas se conten-ter d'ouvrages cl de citations de seconde maitil Voilà un mot, voilàdes conseils qui reviendront souvent dans nos entretiens. Le conseilau surplus nest pas nouveau. La Bruyère le donnait déjà, il y a deuxsiècles « L'étude des textes ne peut jamais être assez recom-mandée ; c'est le chemin le plus court, le plus sûr et le plus agréa-ble pour tout genre d'érudition. Ayez les choses de la premièremain puisez à la source maniez, remaniez le texte ; apprenéz-lede mémoire citez-le dans les occasions; songez surtout à en péné-trer le sens dans toute son étendue et dans ses circonstances; con-ciliez un auteur original, ajustez ses principes, tirez vous-nième lesconclusions (1\ - et la suite qu'il faudrait citer en entier.

Nous étudierons. donc ces grands recueils d'érudition danslesquels, depuis trois siècles, en France et hors de France, la sciencedes Bénédictins et celle de leurs émules ou de leurs continuateursont accumulé les matériaux solides de tout travail historique. Ilimporte, en effet, que, dès le début de ces études, vous appreniezà. connaltre autrement que de nom les oeuvres de Du Chesne etde Bu Cange, de Baluze et de Dachery, de Mabillon et de Marlène.ce qu'est le Recueil des historiens de la France, celui des Ordonnances,

(I) De quelques usages.

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s LE SCIENCES AUXIlIAIRES DE L'FIIStOIRF: DU DROIT

la collection des Documents inédits, et, à l'étranger, Ntiratori, lesMonumenta Gernaaniae et la collection du Maître des rôles. -

Trouverez-vous dans ces grands recueils et dans d'autres ana-logues touk les documents nécessaires à la solution de la questiond'histoire du droit que vous vous proposez de traiter? Vous entrouverez déjà beaucoup, plus peut-être que vous ne pourriez vous

•y attendre. Il ne faut pas avoir le fétichisme de l 2 inédit. 01) a déjàimprimé énormément de textes, et dont les historiens sont bienloin d'avoir tiré tout ce qu'ils contiennent. Il est arrivé, il y aquelques années, à un éminent écrivain de dire qu'en fait de docu-ineuts,ce qu'il y avait de moins connu, c'était ce qui était imprimé- et il y a dans ce paradoxe une bonne part de vérité. Pour l'anti-quité et pour le haut moyen âge, tous les textes ont été édités et«une façon généralement satisfaisante. Ceux «entre vous qui vou-dront entreprendre quelque travail sur l'histoire du droit romain011 sur celle du droit mérovingien n'auront rien à chercher endehors des livres. Dans ce double domaine, en effet, le hasard âpeu près seul aujourd'hui peut amener des découvertes. On a misah jour récemment, sur un débris de papyrus, quatorze lignes mu-tuées d'un fragment d'un jurisconsulte classique, probablement dePomponius, relatives au contrat de société. li est licite cependant àtout le monde d'écrire sur les sociétés en droit romain sans allerfouiller préalablement les tombeaux égyptiens.

La situation est différente pour ceux qui voudront étudier ledroit ou les institutions du moyen âge, à partir, si vous voulez, duXII' siècle, et surtout les institutions des trois derniers siècles,moins connues peut-être, si singulier que cela puisse paraltre, quecelles du xiii' siècle pat- exemple. ici, la part de l'inédit est considé-rable. Elle le sera toujours, quelque zèle que puissent déployer lespublicateurs de textes. Beugnot a imprimé in extenso les quatre plusanciens registres du Parlement, ceux qu'on appelle les 01M; flou-tarie en a analysé, arrêt par arrèt, une dizaine. il en reste à dé-pouiller près de douze mille. Vous voyez qu'il y a encore pour leslesplus laborieux d'entre vous des registres sur la planche.

Ces documents inédit, il vous faudra les aller chercher là où ilsse trouvent, c'est-à-dire dans les bibliothèques et dans les archives:Aux bibliothèques appartiennent, par définition, les manuscrits,c 'est-à-dire les copies exécutées à la main d'oeuvres littéraires,scientifiques, historiques, juridiques, théologiques. Dans les archi-ves sont conservés les actes de l'autorité publique, les collections dedécisions judiciaires, les correspondances diplomatiques et admi-nistratives, enfla un nombre prodigieux d'anciens titres ou contrats

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LES SCIENCES AUXILIAIRES 0E L'HISTOIRE DU DROITi

entre particuliers qu'on appelle des chartes. Mais cette répartitiondes documents entre bibllothèques et archives est plus lliéQriqueque réelle. Par suite de circonstances diverses sur lesquelles je nepuis insister, en ce moment, la plupart des grandes bibliothèquesde manuscrits, et plus' que toute autre ,notre incomparable Bi-bliothèque 'nationale, possèdent, en quantité considérable, desdocuments d'archives qui sont,' par suite. 'abserils des dépôts oùla logique conduirait à les aller chercher. Dans ces grands dépôtsmôme OÙ , il y a un siècle, la Révolution a concentré pour le plusgrand bi eui des études ' historiques - mais non pas, il faut bienle reconnaltre aussi, sans des pertes à jamfls déplorables - desmillions de dépôts, de fonds particuliers jusque là isolés et souventinaccessibles, aux Archives nationales surtout, les idées qui dominaient alors en la matière ont amené des triages, des classementssoi-d isa ut rationnels, dont nous subissons encore actuellement lesconséquences et: qui rendent souvent difficile la découverte dudocumént que l'on poursuit. L'histoire de la formation de nosdépôts de manuscrits et d'archives, le résumé des travaux qui yont été exécutés en ce siècle, l'indication des règles qui y présidentaux connunications, lénumération' des principaux catalogues ouinventaires qui pertnettcnt d'y trouver ce qu'on y cherche, voilà,avec l'étude des répertoires biblio graphiques et des recueils desources. ce qui fera l'objet de: nos pi-emiers entretiens.

L'ensemble des opérations préliminaires qui ont pour but larecherche des sources et la réunion des documents, préalable indis-pensable de tout travail historique, a reçu récemment un nom par-ticulier. Ce nom, usité depuis quelque temps déjà en Allemagne, nobtenu chez 'nous droit de cité dans le livre que viennent de faireparaltre MM. Langlois et Seignobos sous le lifte d'introduction auxétudes historiques: c'est celui d'Heuristique. La bibliographie, sciencedes répertoires, n'est, dans cette terminologie, qu'une branche del'heuristique.

Voilà donc, grâce aux opérations dont nous venons de prendreun aperçu, l'étudiant en histoire du droit en possession dé sesdocuments tant manuscrits qu'imprimés. Il s'agit maintenant pourlui de les lire. de les interpréter et de les mettre en oeuvre.

Mettons tout de suite à part une première catégorie de docu-ments qui se rapportent exclusivement à l'antiquité, o veux parlerdes inscriptions grecques et latines. Laissons. de côté les inscrip-tions greetjues, puisque la Grèce doit demeurer en dehors denos études. Les inscriptions latines - vous là savez déjà par 'vosétude de droit romain - sont la source principale de nos con-r

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40 LES SCIENCES &UXILIÂIIIES DE L'HisTOiRE DU DROIT

naissances sur histoire du droit public romain, et une sourceencore rie grande •importance péur l'histoire du droit privé. Mais

• ici) il n'y a pas de longues recherches & faire. Toutes les inscrip-tions latines sont réunies ou le séront sous peu dans. les quatorze

-volumes du Corpus ivscri)tiomnn latinoruni 4iie public l'Académie

de Berlin. Le tome XII qui contient le.s inscriptions dé la Narbon-

naise a paru. il y a quelques années, lie tonic XII]. consacré aux

inscriptions des trois Gaules et des cieux Gerniaties. le dernier-quireste à publier, s'imprime en ce moment. D'autre part, les inscrip-tions latines, écrites dans cette belle capitale romaine dont vousavez tous vu des exemples ati Louvre, ne présentent pas de diffi-

cultés matérielles de lecture. Toute la difficulté réside dans ]'inter-prétation des abréviations, qui exige une connaissance sérieuse desantiquités et de l'organisation politique et administrative de l'Em-pire romain. -- La science qui enseigne à déchiffrer les inscriptions s'appelle

l'Épigraphie J'ai inscrit son nom sur mon programme à la placequ'elle inc parait devoir logiquement occuper dans le groupe dessciences auxiliaires de l'histoire du droit. Mais, cette année dumoins, je n'ai pas l'intention de l'aborder sérieusement. Tout au

• plus pourrai-je, en quelques conférences, vous faire connaître lesrègles essentielles les plus élémentaires applicables à tous lesgenres d'inscriptions, celles qui se rapportent aux noms des per-sonnages qui (Igurent dans les inscriptions, Û l'indication de leurstitres, des fonctions qu'ils ont successivement occupées - ce qu'on

appelle le cu'svs honondn. L'épigraphie juridique, en effet, méri-

terait de faire à elle seule l'objet d'un cours pendant une année

entière) et il serait très désirable que quelqu'un voulùt bien secharger de vous en exposer ]es principes- Mon regretté ami Henry

• - Michel en avait fait, en $885, l'objet d'une conférence complémen-

taire. Le tome i lr du Droit de cité romaine est le résumé de cet ensei-gnement la mort nous & privés à jamais de la fin de l'oeuvre.

Si la lecture des inscriptions ne présente, du moins pour l'oeil,

-aucune difficulté, il en est autrement des écritures si variées quevous rencontrerez dans les documents du moyen Me, et aussi

• dans ceux du nie et méme du commencement du xvuLc siècle.

Ici, un apprentissage de l'oeil est indispensable Aussi est-ce à laPaléographie - c'est par ce nom qu'on désigne la science des an-ciennes écritures et l'art de les déchiffrer -,- que je compte consa-crer la majeure partie de ces leçons. Nous étudierons ensemble lasuccession des diverses écritures depuis les premiers siècles denotre ère; nous suivrons la série des changements qui ont insen-

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LES SCIENCES AIJXILIAIR1iS.I)E LIIISTOIIIE DU I)BOIT 4

sihlement transformé le belle et robuste capitale romaine en l'écri-ture contournée et souvent décourageante du xvi 0 sièdle ; nousapprendrons à résoudre tes abréviations qui se reiîcontrent danslés manuscrits et dans les chartes nous dirons quelques mots desmatières subjectives de l'écriture (papyrus, parchemin, papier),(les instruments de l'écrivain, de la foi-me extérieure des livresdansl'antiquité et au moyen âge-; nous verrons comment ils émientfabriqués et de quelle hiçon ils nous sont parvenus.

La difficulté de se procurer, en nombre suffisant pour les exer-cices de lecture, des facsimilés d'anciennes écritures est le-.prin -cipal obstacle que renco'ntre un enseignement pratique - le seul-profitable - de la paléographie. La bienveillance de M. le direc-teur de l'École des chartes et'l'intérèt qu'il porte aux études paléo-graphiques me donnent tout lieu d'espérer que cet obstacle pourraêtre surnionté,-dù moins poûr les fac-similés de chartes: Pôur lesmanuscrits juridiques, assez pauvrement représentés dans ],a

de l'École, nous verrons à aviser, et, si ce.couts peut sepoursuivre pendant quelques années, je ne désespère pas que nousarrivions à lui constituer un petit matériel de paléographie jnri•

r dique.-La paléographie apprend à lire les -documents. Une science voi-

• sine, qu% tort l'on confond parfois avec elle, la Diploma?que,apprend ÎY les critiquer, à en vérifier 'authenticité, à en déterminerht date, h distinguer leg actes vrais et sincères des actes faux putout an moins remaniés. Iiétude paléographique du docunient,l'examen de lécriture. do l'encre, du parchemin ont déjà fourni àcetégard des indices précieux à l'historien. L'analyse des formulesaiployées par le rédacteur de l'acte, des éléments qui constituent

la date de cet acte , l'examen des caractères intrinsèques du docu-ment, comme l'on dit quelquef6ls, achèvent de former sa convic-tion. L'étude de toutes les parties de la science édifiée d'un seul jetau x\Ile siècle par te génie critique d'un Mabillon ne saurait évi-demment se faire ici en détail. le vous en ferai cepêndant counaitre,

• soit par un 'exposé théorique, •soit incidemment, à l'occasion de la•lecture des docunents que j'apporterai devant vous, les parties

essentielles, en insistant particulièrement sur la chronologie.Ce programme, fort vaste déjà, comme vous pouvez en juger, de

ce 'qui constitue les Sciences avxiiio-îres de titi sbire du, droit pourraitsans doute s'élargir encore. Des notions sur lesprocédés de l'histo-riographie du moyen Age, des règles générales de critique des do-cuments historiques et juridiques autres que les chartes - critiquede restitution, critique de provenance - n'y seraient certainement

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42 LES S1ENCÉS AUXILIAIRES DE L'HISTOIRE DU DROIT

pas déplacées. Le temps ne me permettrait pas d'entrer utilementcette année dans cet ordre sensiblement différent d'idées et d'études:Il me parait préférable de le réserver complètement. Je me bornepour aujourd'hui à vous renvoyeràux chapitres excellents que MM.Langlois et Seignobos ont écrit sur ce sujet dans le volume.dontj'ai déjà eu l'occasion de vous donner le titre.-

Ce que nous pourrions peut-être faire dès cette année si, parmivous, il s'en trouvait quelques-uns disposés à travailler un peu eudehors de nos réunions ordinaires, ce sérait de nous retrouverde temps à autre diins une conférence supplémentaire qui pourraitêtre consacrée à l'examen critique de quelques-uns des travauxparus récemment dans-le domaine de l'histoire du droit. Bien mieuxqu'un exposé théorique, ces exercices vous initicraientaux procédés(le la critique historique; ils vous feraient, en outre, toucher dudoigt l'utilité des notions que fournissent les sciences auxiliaires del'histoire du drôit. Les sujets ne vous manqueraient pas. Les Roma-'nistes pourraient étudier 5 par exemple, h dissertation de M. Girardsur la date de la loi iEbutia. À ceux qu'intéresse.plutèt l'histoire dudroit et des institutions du moyen âge, je signalerai quelques-unesdes Questions rnél-ovi?Iyiennes de Julien Fiavét, ces modèles achevés decritique pénétrante, leé mémoires en sens divers publiés depuis unequinzaine d'années sur la question des Fausses Décrétales, la dis-sertationd'Adolphe Tardif surla date du Formulaire de Marculf, ouencore celle déjà ancienne, mais toujours si digne d'être étudiée,d'JTenri L6t sur l'authenticité des OHm; enfin, dans le domaine dudroit coutumier, les travaux de M. Viollet sur les Éuvbli.-.s-ements de

.-u.int Louis ou ceux qui se poursuivent en ce moment sur les coit-tumà de Bretagne, de Normandie et d'Anjou; il est inutile d'ajou-ter à cette énumération les Mélanges d'histoire du droit et de critiqué

de M. Esmein, qui sont connus de chacun de vous.Un enseignement comme celui que nous inaugurons ensemble

aujourd'hui, ne peut avoir la prétention, en une trentaine deleçons, de faire de vous des érudits. Ceux d'entre vous qui ont ledésir de le devenir savent bien que c'est ailleurs qu'ils doivent allerchercher la science complète et approfondie. Le but de ce cours estplus modeste, et toute son ambition sera satisfaite si vous emportezde ces entretiens, avec une orientation générale dans un ordred'études qui, jusqu'ici, vous était demeuré à peu pi-ès étranger, legoût et, déjà un peu, la pratique des documents originaux: -

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