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Rencontre Olivier Toma, fondateur de l’agence Primum non nocere page 4 Portrait Dominique Proisy, la médecine libérale « chevillée au corps » page 6 Le journal de la 23 novembre 2018 • n°1314 ISSN : 0399-385X Dossier médical partagé : Un nouveau départ ?

Un nouveau départ? · nous attachons à les promouvoir dans l’univers de la santé, en accompagnant les entreprises, les établissements de soins et au-delà l’ensemble des orga-nisations

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RencontreOlivier Toma, fondateur de l’agencePrimum non nocerepage 4

PortraitDominique Proisy,la médecine libérale« chevillée au corps » page 6

Le journal de la 23 novembre 2018 • n°1314

ISSN : 0399-385X

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Le Médecin de France n°1314 • 23 novembre 20183

Le Médecin de France • Bimensuel79, rue de Tocqueville 75017 Paris Tél. 01 43 18 88 33 • Fax : 01 43 18 88 34E-mail : [email protected] • Site : www.csmf.orgLes articles originaux du Médecin de France peuvent être reproduitspar tout organisme affilié à la CSMF sans autorisation spéciale,à condition de faire figurer les mentions habituelles. Édité par la SEPMF, SARL au capital de 32 000 € • Durée : 50 ansà partir du 1er juin 1978 • Associés : CSMF et ACFM.Gérant : Jean-Paul Ortiz • Directeur de la publication :Jean-Paul Ortiz • Rédacteur en chef : Laurent VerzauxCrédits photos : P. Chagnon - Cocktail SantéColin Anderson - Gettyimages.frRéalisation : Aliénor Consultants - Tél. 05 49 62 69 00Impression : Megatop • Distribution : Info RoutageAbonnement : 40,00 € par an. Prix du numéro : 2 €Commission paritaire : 1018 G 82702.

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Les États Générauxde la « Pertinence »des Médecins Spécialistes …

C’est devenu le traditionnel rendez-vous des médecins spécialistes organisé par Patrick Gasser, le Président de l’UMESPÉ. Cette année les États Généraux de la Médecine Spécialisée étaient consacrés à la pertinence, et ils furent de très bon niveau et d’une grande richesse.

La pertinence, un enjeu dont chacun sait qu’il reposera sur le développement de l’innovation, de l’expertise et de la performance. Trois thèmes, que chaque médecin intervenant aux différentes tables rondes veut faire siens, et comme l’a fort bien résumé Christine Kowalcyk, médecin généraliste et Présidente de l’URPS de l’Océan Indien, « ce qui se fait sans moi, se fait contre moi ! ».

L’innovation, l’expertise et la performance source d’efficacité que les médecins veulent piloter en étant entourés d’industriels, d’ingénieurs, de « start upper » mais aussi du réseau de la Santé et de l’État. Si la pertinence c’est viser juste, il faut donc entourer le médecin généraliste et spécialiste de tout ce qui peut l’aider à réussir son diagnostic et à pratiquer le meilleur acte. Cette équation pertinence = innovation + expertise + performance, doit être imaginée sans tabou à condition que le médecin soit au cœur du système. Car il sera toujours le seul à pouvoir transgresser dans l’intérêt du patient.Oui, la pertinence est un enjeu essentiel pour le patient, pour le médecin, mais aussi pour les comptes de la Sécurité Sociale.

Nous avons tous à y gagner.

Dr Jean-Paul Ortiz,président de la CSMF

sommaire

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4. Rencontre Olivier Toma, fondateur de l’agence Primum non nocere

6. Portrait Dominique Proisy : la médecine libérale « chevillée au corps »

7. L'événement Les Généralistes-CSMF Ma Santé 2022 : une réforme mal engagée ?

8. Dossier Dossier Médical Partagé : Enfin sur les bons rails ?

12. Actu en bref Les actualités de la médecine

13. Produits de santé Valproate, médicaments et antibiotiques

14. À la loupe Formation des personnels médicaux : changement de cap ?

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Le Médecin de France n°1314 • 23 novembre 201844

« Pour une démarche écoresponsable dans la santé »Ses trois idées fortes• « A l’instar des autres secteurs de l’économie, la santé doit davantage s’impliquer dans la réduction des polluants et dé-chets toxiques rejetés dans la nature. » La Responsabilité So-ciale et Environnementale devient un élément de la valeur socié-tale de toute entreprise ou organisation.

• « Il y a encore de nombreux combats à mener pour ancrer la notion de santé durable, et en premier lieu celui contre les perturbateurs endocriniens. » Son agence se conçoit comme un acteur du « lobbying éthique », cherchant à sensibiliser le public, les professionnels et les autorités sanitaires.

• « A leur échelle, les médecins peuvent contribuer à la santé durable, d’abord en maîtrisant leur empreinte carbone, mais également en militant auprès des patients sur certains sujets.» Il songe notamment à la qualité de l’air intérieur ou à la bonne ges-tion de l’armoire à pharmacie familiale.

Olivier Toma, fondateur de l’agence Primum non nocere

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Le Médecin de France n°1314 • 23 novembre 2018

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Avec l’agence que vous avez créée, Primum non nocere, vous militez pour la santé durable. Comment votre parcours professionnel vous a-t-il engagé dans cette voie ?Issu d’abord de l’hôtellerie, après un passage dans le groupe Accor, j’ai en-suite été recruté pour diriger un groupe de cliniques. J’ai très vite orienté ma carrière sur l’enjeu de la qualité et de la maîtrise des risques environnemen-taux. A l’époque, c’était une démarche inédite, dans un secteur peu sensibili-sé à ces questions. Pourtant, à l’instar d’autres branches de l’économie, l’im-pact de la santé n’est évidemment pas neutre sur le plan environnemental. Outre les pollutions liées à l’activité de l’industrie pharmaceutique, l’accueil des patients dans les établissements sanitaires génère par exemple de nom-breux effluents, ainsi que des déchets liés aux soins dont certains peuvent être potentiellement toxiques. En 2005, lorsque j’ai quitté mes fonctions dans l’hospitalisation privée, j’ai décidé de m’engager dans cette voie peu explorée, en créant le Comité du Développement Durable en Santé C2DS. L’initiative a très vite rencontré un écho impor-tant. De 25 pionniers, l’association est passé en quelques mois à plus de 500 adhérents, devenant la première asso-ciation de ce type en Europe. Puis j’ai fondé plus tard Primum non nocere, une agence dédiée à la politique RSE (Responsabilité Sociale et Environne-mentale) et au développement durable en santé.

Qu’entend-t-on par développe-ment durable en santé ? et com-ment se traduit-il concrètement ?Le concept fait bien sûr écho à celui plus large du développement durable. Il part du principe que la croissance des activités liées à la santé est compa-tible avec une utilisation responsable des ressources financières, sociales et environnementales. Inspiré notam-ment du terme « sustainable health » anglo-saxon, il est inscrit parmi les 17 Objectifs du Développement durable posés par l’ONU. Ces objectifs, nous nous attachons à les promouvoir dans

l’univers de la santé, en accompagnant les entreprises, les établissements de soins et au-delà l’ensemble des orga-nisations du secteur sanitaire et social dans leur démarche de Responsabilité Sociale et Environnementale. Depuis le Grenelle de la Santé, en 2009, la RSE fait partie intégrante de la valeur sociétale produite par les entités économiques. Elle devient par exemple un élément d’appréciation des entreprises sur les marchés financiers. Et elle exige de s’in-terroger en permanence sur les activi-tés de production de biens et services, et sur leurs conséquences au plan envi-ronnemental. Chez Primum non nocere, nous avons par exemple travaillé sur les alternatives à l’usage de substances no-cives dans les établissements de santé, comme les phtalates ou le bisphénol. Le chemin est encore long, à l’instar du dé-bat actuel sur la prévention de l’expo-sition aux perturbateurs endocriniens, qui reste difficile à faire passer auprès du grand public. C’est pourquoi nous nous considérons également comme un acteur de ce que j’appelle le « lobbying éthique », un concept que nous avons d’ailleurs déposé auprès de l’INPI.

Quels sont vos combats actuels dans le champ de la santé ?Ils sont nombreux, mais je citerai quelques thèmes, dont certains sont encore peu identifiés. Qui sait, par exemple, qu’il n’existe pas de filière spé-cifique de traitement des médicaments non utilisés (MNU) dans les établisse-ments de santé ? Sait-on par ailleurs que près de 100% des laits infantiles premier âge contiennent des perturba-teurs endocriniens ? Nous cherchons également à mobiliser les pouvoirs pu-blics sur des sujets méconnus. C’est le cas des excrétats produits par les pa-tients en chimiothérapie. 90% de ces traitements sont aujourd’hui effectués à domicile. Or, ces excrétats contiennent des métabolites, substances nocives pour l’environnement et la santé hu-maine. Et rien n’est fait pour obliger les stations d’épuration à les éliminer avant le rejet dans la nature. Pourtant, cette obligation s’applique dans le champ de la santé animale ! Nous mili-tons par ailleurs pour que les autorités

sanitaires adoptent un indice suédois, le PBT (pour Persistance, Bioaccumu-lation et Toxicité), qui permet d’évaluer les risques liés aux résidus de médica-ments rejetés dans la nature. De nom-breuses études démontrent aujourd’hui l’impact négatif de ces résidus sur les milieux aquatiques. En premier lieu, il convient de sensibiliser davantage les industries pharmaceutiques à la com-position de leurs produits et à leurs effets sur l’environnement. Et il faut également mieux informer les prescrip-teurs ( et les pharmaciens) , qui peuvent par exemple prendre en compte l’éco-toxicité d’un médicament avant de le prescrire.

Que peuvent faire selon vous les médecins de ville pour contribuer à la santé durable ?Comme tous les acteurs économiques, ils peuvent d’abord réfléchir à leur em-preinte carbone, en gérant mieux leurs déplacements, en utilisant du matériel recyclable et en veillant à la prise en charge sécurisée des déchets médi-caux qu’ils génèrent. Mais ils ont aus-si un rôle majeur à jouer auprès de la population, en sensibilisant leurs pa-tients sur des thématiques comme la qualité de l’air intérieur, la composition des produits cosmétiques ou encore la bonne gestion de l’armoire à pharma-cie familiale. Nous proposons d’ailleurs une Journée nationale dédiée au « net-toyage » de cette armoire à pharmacie, avec récupération organisée des pro-duits périmés. De façon plus globale, il serait souhaitable que les questions de santé durable soient intégrées dans les programmes de DPC, avec l’ambi-tion de former demain des « écoméde-cins », impliqués dans la prévention des risques et la promotion de démarches écocitoyennes. A l’instar de tous les sec-teurs de l’économie, la santé doit s’en-gager dans la voie de l’écoconception. L’idée est simple : toute production de bien ou de service de santé doit s’ac-compagner d’une réflexion sur leur im-pact en termes d’environnement, avec pour objectif de réduire au maximum les effets polluants. Le secteur de la san-té doit participer davantage au mouve-ment dit de la « croissance verte ».

Ancien dirigeant de cliniques privées, Olivier Toma est à l’origine de la création du Comité pour le Développement Durable en Santé (C2DS). Il a également fondé Primum non nocere, une agence de conseil sur la stratégie RSE des organisations. Très impliqué sur les questions de santé environnementale, il propose quelques clés pour mieux inscrire le secteur de la santé dans une démarche écoresponsable.Rencontre

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portrait

Selon Dominique Proisy, l’avenir de la médecine libérale passera inévi-tablement par une modernisation des modes d’organisation et des outils de travail, mais aussi par une meilleure connaissance de ses spécificités, notamment auprès des jeunes mé-decins.

Pneumologue de formation, Domi-nique Proisy s’est installé en mars 1987, seul, dans la ville de Sois-

sons. « Le choix d’une activité libérale n’avait rien d’une évidence à l’époque », précise-t-il. Qu’importe, il saisit sa chance. En 1989, il décide pourtant de rejoindre une maison médicale qui regroupe une vingtaine de pro-fessionnels de santé, toujours à Sois-sons. « Chaque praticien disposait de son propre espace de travail. Nous mu-tualisions simplement les charges immo-bilières », souligne-t-il. Vingt ans plus tard, l’expérience prend fin. Inversion de la pyramide des âges oblige. « Plu-sieurs départs à la retraite ont eu raison de la structure ! »

Il profite néanmoins des avantages fiscaux d’une zone franche pour ins-taller un nouveau cabinet, sur un pla-teau technique de 200 m², qu’il par-tage à part égale avec un groupe de quatre cardiologues, réalisant ainsi un pôle cardio-thoracique. Encore et toujours à Soissons, où il aura effec-tué toute sa carrière.

Un médecin engagéSon adhésion syndicale est rapide. « Convaincu » par ses confrères, il rejoint assez naturellement la cen-trale « la mieux organisée et la seule à communiquer », à savoir la chambre syndicale des médecins de l’Aisne, affiliée à la CSMF. Membre actif, il est finalement élu vice-président de la CSMA en 1999. La même année, il entre également au conseil d’admi-nistration du Centre départemental des professions de santé, le CDPS 02, en tant que représentant des mé-decins. Trois ans plus tard, il obtient un siège au Conseil confédéral de la CSMF, cette fois en tant que re-présentant de la Picardie. En 2005, il sera nommé membre du bureau national. Il est aussi trésorier-adjoint de la Confédération depuis 2010.

Membre de l’association des pneu-mologues de Champagne-Ardenne, très impliquée sur les questions de formation médicale continue, Dominique Proisy est également membre du Syndicat de l’appareil respiratoire (SAR), une verticalité de l’UMESPE. Il exerce par ailleurs des responsabilités importantes au niveau professionnel. Il est notam-ment élu vice-président de l’URPS ML de Picardie en 2010, une fonc-tion qu’il continue d’exercer au sein de l’URPS ML des Hauts-de-France, après sa réélection en 2015.

Plaidoyer pour un exercice « plus attractif » Dominique Proisy dit avoir l’exer-cice libéral « chevillé au corps ». Il s’applique non seulement à le dé-fendre (avec ferveur), mais aussi à le faire évoluer. « Dynamique, riche et diversifiée, notre activité n’en reste pas moins menacée par des contraintes administratives croissantes », regrette-t-il. Seule une vision entrepreneu-riale forte permettra aux méde-cins libéraux de se « réinventer », pourquoi pas en capitalisant sur le binôme médecin traitant/spécia-liste de proximité, qui doit être « le pivot de la coordination des soins ». Selon lui, la profession doit prendre son destin en main. « Nous devons bâ-tir de nouveaux modes d’organisation, mais nous devons également mieux faire connaître les spécificités de l’exercice libéral, notamment auprès des jeunes médecins. Il faut les inviter à découvrir nos différents modes d’exercice pour éclairer leur décision », assure-t-il. Cette quête d’attractivité ira de pair avec une nécessaire modernisation des outils de travail, qu’il s’agisse de la généralisation des messageries sé-curisées de santé et du dossier médi-cal partagé pour « optimiser la prise en charge des patients », ou des agendas électroniques pour « mieux planifier la demande de soins non programmés ».

Dominique Proisy : la médecinelibérale « chevillée au corps »

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l'événementl'événement

Le 15 novembre, à l’occasion d’une conférence de presse, le président des Généralistes a exprimé de fortes réserves sur le plan Ma Santé 2022 lancé par Emmanuel Macron« Ma Santé 2022, c’est, pour l’instant, une partition inachevée ! » Le 15 novembre dernier, le président des Généralistes-CSMF, Luc Duquesnel, n’hési-tait pas à prendre ses distances face aux projets du président de la République, au vu des premières mesures notamment traduites dans le PLFSS 2019. « Cette réforme s’appuie sur un diagnostic partagé, ce-lui d’un constat d’échec sur les actions menées depuis 30 ans. Nous saluons la volonté d’Emmanuel Macron de décloisonner la médecine de ville et l’hôpital, de créer des postes d’assistants libéraux, de refonder les études de santé, de former des infirmières de pratique avancée, de soutenir l’innovation ou encore de développer l’exercice coordonné. » Mais derrière l’affichage, Luc Duques-nel déplore que les premières décisions n’aillent pas réellement dans le sens des intérêts des méde-cins généralistes. « Prenons le cas des CPTS, précise-t-il. C’est une mesure emblématique et certes positive, mais depuis quelques mois, on assiste à une véritable course à l’échalote entre ARS, afin d’afficher la création de CPTS. Les médecins de terrain sont lourdement sol-licités pour s’engager dans ces projets, qu’ils perçoivent comme des nouveaux «machins» qui rallongent les journées de travail ou suppriment les temps de consul-tation. » Pour Les Généralistes-CSMF, le risque est de créer « 1000 coquilles vides », alors que l’urgence est d’abord d’accompagner les professionnels dans la conception de leur projet de santé. « Deux ques-tions majeures doivent être abordées: comment garantir à chaque Français le choix d’un médecin traitant ? Et comment prendre en charge les soins non programmés pour éviter les passages non justifiés aux urgences ? »

Des assistants médicaux… pour qui ?Second dossier ciblant les critiques, la création de postes d’assistants médicaux se présente sous de mauvais auspices. « Une fois de plus, c’est une bonne idée qui risque d’être pervertie au service d’une doctrine politique. L’accompagnement financier est en effet condi-tionné au fait d’exercer en cabinet de groupe (au moins 3 médecins), d’être en exercice coordonné et d’apporter un bénéfice mesurable en termes d’accès aux soins. Un concept restreint et qui ne sera profitable qu’à 15 ou 20% des praticiens. » Luc Duquesnel rappelle également que le financement du poste ne serait garanti « que pendant deux ans, alors que nous n’aurons pas la pos-sibilité de supporter la totalité de la charge financière de ces postes, avec un modèle économique à 25 euros la

consultation. » Une réalité d’autant plus lourde que les évaluations de la DGOS portent sur un coût de 50 000 euros par an et par poste.

Espace numérique : des outils insuffisantsAu moment où l’assurance-maladie annonce la généralisation de « son » DMP, Les Généra-listes-CSMF tiennent à rappeler les attentes des médecins. « Nous devons d’abord pouvoir communi-quer de façon traçable et sécurisée, par le biais de messa-geries sécurisées de santé. Or les logiciels métier ne sont pas tous compatibles. » Seconde exigence, le DMP n’aura d’intérêt que s’il s’appuie sur le Volet de Synthèse Médical (VSM). Or, « la moitié des logiciels ne sont pas compatibles avec le VSM. Et la structuration VSM dure en moyenne une demi-heure, qu’il faudra in-demniser aux praticiens. » Enfin, il évoque la néces-sité du Système d’information parcours, « un outil que le rapport Pon-Coury appelle de ses vœux tout en dénonçant l’anarchie totale du côté des ARS, qui plus est pour un coût estimé à 70 millions d’euros ! ».

PLFSS : la douche froideA propos du PLFSS, le diagnostic des Généra-listes-CSMF est sans appel : c’est « la douche froide » pour la médecine de ville. Alors que Ma Santé 2022 promet des investissements, le PLFSS réclame 4 milliards d’euros d’économies, assorti d’une ré-serve prudentielle de 120 millions d’euros sur les soins de ville. « Ce texte vient malheureusement confirmer nos craintes, estime Luc Duquesnel. C’est la réalité budgétaire qui l’emporte, avec des contraintes supplémentaires et des moyens insuffisants. Dans ces conditions, les médecins ne sauraient être tenus respon-sables si l’accès aux soins ne s’améliore pas d’ici à 2022.»

Ma Santé 2022 : une réforme mal engagée ?

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Le Médecin de France n°1314 • 23 novembre 20188

ossier

Comme prévu, c’est le 6 novembre der-nier que les pouvoirs publics ont annon-cé les conditions de la généralisation du DMP pour tous les Français. Un outil essentiel pour la coordination des soins, à condition qu’il s’appuie sur un Volet de Synthèse Médicale structuré par le mé-decin traitant.

14 ans après son lancement, est-ce enfin le bon départ ? Les plus anciens se souviendront de la

réforme Douste-Blazy en 2004, quand le ministre de la santé promettait la création du Dossier médical personnel en 2007 et annonçait « 3 milliards d’euros d’économies par an » grâce à une meil-leure coordination des soins autour du patient. Depuis, de l’eau a coulé sous les ponts, et plusieurs tentatives ont avorté pour créer enfin ce « carnet de santé élec-tronique du patient ». D’abord porté par un GIP, puis relayé par la création de l’ASIP Santé en 2010, le DMP a accumu-lé les erreurs de scénario, les défauts de gouvernance, les failles technologiques et l’absence de promotion efficace au-près de la population de cet outil jugé pourtant essentiel par une majorité de Français. Entre 2004 et 2012, la Cour des comptes fustigeait d’ailleurs le gâchis de ce projet pharaonique, évaluant à 500 millions d’euros les sommes inves-ties pour le développer. En 2014, l’ASIP Santé pouvait certes annoncer que 400 000 DMP avaient été créés… mais

la plupart ne contenaient aucune in-formation de santé. Autant dire que ces «coquilles vides» ont clairement desser-vi la cause de la santé numérique. En 2013, la ministre de la santé de l’époque, Marisol Touraine décidait de relancer le sujet, en initiant le « DMP 2 ». Il de-vient le dossier médical partagé, son élaboration est confiée à la CNAM et plusieurs évolutions sont actées : ou-verture possible du dossier en ligne par le patient, intégration automatique des données de remboursement par l’as-surance-maladie, déploiement d’une fonctionnalité «blue button» permettant au patient de récupérer l’ensemble des données en un clic…

100 000 DMP créés par semaineUne phase d’expérimentation est dé-ployée dans neuf départements à partir de décembre 2016 : Bas-Rhin, Pyrénées-Atlantiques, Côtes d’Ar-mor, Doubs, Haute-Garonne, Indre-et-Loire, Puy-de-Dôme, Somme et Val-de-Marne. L’objectif est notam-ment de tester les conditions d’accès au DMP pour le médecin traitant, ainsi que les usages utiles au patient. Un an après cette phase de lancement, l’as-surance-maladie annonçait que « plus de 400 000 dossiers ont été crées dans les régions pilotes. » Et, conformément au plan de charge, le directeur général de l’assurance-maladie, Nicolas Revel, et la ministre de la santé, Agnès Buzyn, présentaient officiellement la générali-sation du DMP le 6 novembre dernier. «

Le Dossier Médical Partagé a été longtemps attendu, maintes fois annoncé, maintes fois repoussé, précisait la ministre ce jour-là. Il doit devenir demain une évidence pour tous les Français, comme l’est devenue la carte Vitale. Evidemment, le Dossier Mé-dical Partagé, pour se réaliser pleinement, nécessitera toute notre énergie. Je sais pouvoir compter sur les établissements de santé et plus largement sur l’ensemble des professionnels de santé pour veiller à son développement et pour le faire vivre, dans l’intérêt des professionnels et des patients. »

Sûr et sous contrôle du patientDurant la conférence de presse de pré-sentation du DMP, Nicolas Revel s’est déclaré confiant sur la réussite du pro-jet. « Actuellement, 1,88 million de dossiers ont été ouverts, et 100 00 sont créés chaque semaine, précisait-il. Nous avons pour ambition de créer 40 millions de DMP d’ici à 2022. » Une dynamique notam-ment portée par la négociation, avec les pharmaciens, d’un forfait d’un euro par DMP créé en officine. Depuis juil-let dernier, ce sont ainsi 300 000 d’entre eux qui ont été initiés à partir des phar-macies d’officine. Le DMP peut égale-ment être créé par le patient lui-même, sur le site www.dmp.fr. Le patient y re-çoit des identifiants adressés par l’assu-rance-maladie et le procédé s’effectue en quelques clics. L’assurance-maladie mise également sur les 30 millions de visites des Français faites chaque année dans les CPAM pour promouvoir l’ou-til. Et une vaste campagne de commu-

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Le Médecin de France n°1314 • 23 novembre 20189

nication a été lancée dans les médias à partir du 9 novembre.

La « mémoire de la santé »Comment «vendre» le DMP auprès de la population ? La campagne de pro-motion se positionne sur le thème de la « mémoire de la santé » de chaque patient. Accessible partout sur le ter-ritoire, il centralise en un seul endroit, en ligne, l’ensemble des informations concernant le suivi médical. Le patient a ainsi la garantie « de ne plus oublier ni de perdre son historique de santé ». « La finalité profonde du Dossier Médical Par-tagé, c’est de favoriser la meilleure qualité et la plus grande sécurité des soins. En bref,

il doit permettre à chacun d’être mieux soi-gné et mieux pris en charge », précise le ministère de la santé. La communica-tion autour du DMP insiste également sur le fait que les données sont la pro-priété du patient, et qu’il dispose donc d’un certain nombre de droits : c’est lui qui choisit les professionnels de santé habilités à y accéder, qui ne peuvent le faire qu’avec leur carte CPS. « Les laboratoires pharmaceutiques, mutuelles, banques et assurances n’ont aucun droit d’accès aux DMP des citoyens », souligne le ministère de la santé. Le patient peut également bloquer à tout moment l’ac-cès au DMP à certains professionnels. Et il peut également masquer certains documents, sauf à son médecin traitant.

Il peut enfin ajouter lui-même des do-cuments, indiquer s’il souhaite que son DMP soit consultable en cas d’urgence.

La CSMF insiste sur le VSM structuréLes médecins feront-ils la promotion du DMP auprès de leurs patients ? Sans doute, mais à la condition que certains points sont précisés dans les mois à ve-nir, comme l’illustre le communiqué de la CSMF. « Le DMP est un outil indis-pensable, parce que la prise en charge d’un patient se fait de plus en plus aujourd’hui dans le cadre de transmissions d’informa-tions entre les différents médecins et autres professionnels de santé afin de coordonner au mieux l’intervention de chacun » , in-

dique la CSMF. « Ceci passe par une mes-sagerie de santé sécurisée mais surtout par un dossier médical personnel qui doit ras-sembler et mettre en partage l’ensemble des éléments pertinents concernant la santé de chaque Français. Le DMP n’apporte rien au patient si celui-ci ne contient pas un volet de synthèse médicale structuré. Si le DMP se résume à une boîte dans lequel chaque Français aurait en vrac toutes les données concernant sa santé, il sera inexploitable, raison de ses échecs répétés. Le volet de syn-thèse médicale nécessite des données struc-turées qui ne peuvent être élaborées que par le médecin traitant. L’élaboration de ce volet de synthèse médicale nécessite un temps de travail médical qui doit être reconnu et être financé lors de sa publication, en particu-lier pour les patients polypathologiques, en affection de longue durée ou atteints d’un handicap. Pour faciliter la création de ce volet de synthèse médicale structuré, les lo-giciels professionnels des médecins doivent devenir beaucoup plus ergonomiques. Force est de constater que cette évolution indis-pensable des logiciels médicaux est très variable suivant les différents éditeurs de logiciels. »

Vers la dématérialisation des pres-criptionsEnjeu politique majeur pour le gouver-

nement, après les échecs des versions précédentes, le DMP devient la colonne vertébrale d’une ambition plus large : la création d’un Espace numérique de santé accessible à chaque patient. « En soutien de ce virage numérique, trois objectifs ont été fixés dans la stratégie de transformation du système de santé, sou-lignait Agnès Buzyn. En premier lieu, il convient de favoriser l’accessibilité en ligne, pour chaque patient, de l’ensemble de ses données médicales. En second lieu, il convient de parvenir à la dématérialisation de l’intégralité des prescriptions. Enfin, il est impératif d’opérer une simplification du partage de l’information entre tous les pro-fessionnels de santé. De manière globale, nous avons donc opté pour la création d’un Espace Numérique de Santé. »

Un espace numérique de santéDerrière ce projet, d’autres chantiers sont donc en cours, comme la e-pres-cription, actuellement discutée avec les médecins et les pharmaciens dans le cadre conventionnel. Plus largement, l’espace numérique de santé aura voca-tion à proposer ‘un «bouquet de services numériques intégrés», avec un début de déploiement auprès des professionnels fin 2019. Ce bouquet, accessible en mo-bilité, comprendra des outils de trans-

mission sécurisée d’avis médicaux, de partage des données de santé via le dos-sier médical partagé (DMP), d’alertes et d’images ainsi qu’un service d’agendas partagés. Des outils d’e-prescription y seront disponibles pour une généra-lisation d’ici 2021. Les professionnels pourront aussi accéder à un service de prise de rendez-vous en ligne, dont le ministère entend «systématiser» l’usage afin de diminuer le nombre de consultations non honorées, estimées à 100 millions par an. « L’ensemble de ces services sera proposé dans un cadre d’inte-ropérabilité renforcé et s’appuyant sur un identifiant unique du patient », expliquait le ministère de la santé, au moment de la présentation de Ma Santé 2022. Quant à l’espace numérique person-nel de santé de chaque citoyen, il devra permettre à l’usager d’accéder à ses données de santé (compte rendu d’hos-pitalisation, résultats d’examens, pres-criptions dématérialisées, documents déposés dans le DMP), à des informa-tions sur ses droits à l’assurance mala-die, et à des informations sur l’offre de soins sur son territoire.

Dossier Médical Partagé :Enfin sur les bons rails ?

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Le Médecin de France n°1314 • 23 novembre 201810

Dossier Dossier Médical Partagé :Enfin sur les bons rails ?

En pratiqueQue dire à vospatients pourpromouvoir le DMP ? Le médecin traitant sera sans aucun doute sollicité par ses patients sur l’opportunité de créer ou non un DMP. Voici quelques réponses appropriées pour les convaincre.

Quel est l’intérêt pour moi de créer un DMP ? Si vous êtes atteint d’une pathologie chronique, si vous devez prendre plu-sieurs catégories de traitement ou êtes confrontés à un parcours de soins au long cours, le DMP permet à tous les professionnels de connaitre en temps réel votre état de santé, vos éventuelles allergies ou votre passé médical. Il évite également les erreurs en cas d’urgence. C’est un outil essentiel pour sécuriser votre prise en charge médicale.

Suis-je obligé de donner l’ac-cès de mon DMP à tous les professionnels ? Non, vous restez libre de donner l’ac-cès à votre DMP à qui vous le souhai-tez. Vous pouvez également décider de

masquer certains documents, sauf pour votre médecin traitant qui gère avec vous le DMP et doit pouvoir accéder à tous les documents.

Mon banquier, mon assureur ou mon employé peuvent-ils demander à accéder à mon DMP ? Absolument pas, le DMP contient des informations confidentielles sur votre santé. Ces entreprises n’ont pas le droit d’en demander l’accès, ni même exiger des extraits ou une copie du DMP. C’est interdit, même avec l’accord du patient, et puni par la loi.

Mon DMP sera-t-il consul-table à l’hôpital ? Oui, c’est même l’un des objectifs pour favoriser la continuité des soins. Tout membre de l’équipe de soins peut y ac-céder, à la condition de s’identifier avec sa carte de professionnel de santé. Le personnel administratif n’a accès qu’à la partie administrative, pour l’alimen-ter et non le consulter.

Je n’ai ni téléphone mobile, ni adresse e-mail. Puis-je avoir un DMP ? Oui, l’ouverture du DMP n’est pas conditionnée à la communication de ces informations. Mais il devra alors passer par un tiers (professionnel) pour visualiser son DMP ou en obtenir une copie.

Comment être sûr que les données sont protégées ? Elles le sont totalement, car elles sont stockées par un hébergeur de données agréé par le ministère de la santé, qui doit respecter un cahier des charges ex-trêmement strict.

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Le Médecin de France n°1314 • 23 novembre 201811

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« Un outil majeur si les données sont structurées »Vous étiez aux côtés d’Agnès Buzyn et de Nicolas Revel lors de la présentation du DMP. Pourquoi cette participation à la conférence de presse ?

J’ai été sollicité par l’assurance-maladie en tant que «référent professionnel», car je fais partie des médecins qui ont expérimenté la nouvelle version du DMP ces derniers mois. En réalité, je suis investi depuis plus de dix ans sur ce dossier, dont le développement me parait essentiel pour améliorer la prise en charge de nos patients. Le potentiel que représente cet outil, en matière de partage d’informations, est considérable, à condition que son fonctionnement soit aisé et source de gain de temps pour les professionnels de santé qui interviennent auprès du patient et renseignent le dossier. Je suis notamment l’un des artisans de la conception du Volet de synthèse médicale (VSM), un projet por-té par la CSMF, et qui vise à permettre aux praticiens de produire automatiquement un résumé du dossier médical de leur patient à partir d’informations structurées dans leur logiciel métier. Je constate avec plaisir que l’importance de ce VSM était peu évoquée il y a encore quelques semaines, mais que tout le monde en parle aujourd’hui, depuis la présentation officielle du DMP.

Vous insistez notamment sur la né-cessité que ce VSM soit structuré. Qu’entend-t-on par-là ?

Structurer un dossier médical, c’est, pour un praticien, saisir les antécédents et les pa-thologies chroniques de son patient en les sélectionnant dans un répertoire transcodé CIM10 (CIM10, CISP, DRC …) plutôt qu’en texte libre. Concrètement, ceci permet d’en-visager l’édition d’un VSM structuré et ac-tualisé en un clic et sa mise en partage dans le DMP du patient en un second clic. On voit bien l’intérêt de ce dispositif, pour que l’ensemble des intervenants partagent des informations fiables et à jour, au moment où ils consultent le DMP du patient. Sachant que ses confrères auront accès à cette in-formation synthétique, le médecin traitant pourra se concentrer sur le problème de santé actuel à résoudre lors d’échanges avec ses correspondants. C’est un gain de temps précieux pour le praticien et une sécurisa-tion du parcours de soins. Aujourd’hui, on peut aussi parfaitement alimenter le DMP à

partir de documents non structurés, ce qui présente l’avantage de la simplicité. Mais il s’agira alors d’une compilation de PDF (classés en 8 sous dossiers), difficile voire impossible à exploiter sans un moteur de recherche performant aujourd’hui inexis-tant sur le DMP. La structuration du dos-sier médical ouvre par ailleurs de réelles perspectives de progrès technologique, en permettant demain de recourir à des algo-rithmes intégrés et à l’intelligence artifi-cielle, facilitant le diagnostic et la décision thérapeutique.

L’assurance-maladie est-elle favorable à cette évolution du DMP ?

Elle en parle dans ses documents de pré-sentation, et son directeur évoque le VSM comme un élément-clé pour une meilleure organisation du parcours de soins. Mais, pour l’instant, il n’est pas question de pré-voir d’indemniser les médecins pour la mise en partage de VSM structurés sur le DMP. Or, il faut en moyenne une demi-heure pour structurer un dossier médical un peu com-plexe (ALD), préalable indispensable. Avec une moyenne de 300 patients en ALD par médecin traitant, cela représente au mini-mum 150 heures de travail. Autant dire qui si l’on veut réussir cette évolution néces-saire du DMP, le sujet de la rémunération devra être mis sur la table par les parte-naires conventionnels. Les pharmaciens ob-tiennent 1 euro par DMP créé non alimenté, les médecins ne réclament rien pour cette création. Mais il faudra bien reconnaitre l’effort fourni par les praticiens qui s’im-pliquent dans la structuration du VSM et sa mise en partage à très forte valeur ajoutée.

A quelles conditions, selon vous, le DMP sera-t-il une réussite ?

Il faut que tous les acteurs concernés s’in-vestissent en même temps, et notamment les établissements. S’ils consultent les DMP (VSM, documents…) et les alimentent, cela représentera un gain de temps conséquent pour nous, médecins traitants. De même, ils doivent très rapidement s’impliquer dans le développement et l’usage des messageries sécurisées, pour mieux communiquer avec les acteurs de l’ambulatoire. Le temps gagné sur la gestion du courrier pourra être consa-cré par le médecin ou son secrétariat à de la coordination de parcours bien plus utile aux patients. A la clé, les gains médico-éco-nomiques sont potentiellement élevés. Et il faudra les documenter pour attester de la réussite du DMP.

Jean-Michel Lemettre, généraliste à Amboise

« Il faut que tous les acteurs

concernés s’investissent »

Jean-Michel Lemettre, généraliste à Amboise

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Le Médecin de France n°1314 • 23 novembre 201812

actu en brefMa Santé 2022Lancement opérationnelLa ministre de la Santé Agnès Bu-zyn a donné le 19 novembre le coup d’envoi du plan «Ma Santé 2022», en présence de 120 professionnels de santé. Doté de 3,4 milliards d’eu-ros de crédits, il doit permettre de désengorger les hôpitaux à bout de souffle, d’améliorer l’accès aux soins sur l’ensemble du territoire, ou en-core d’adapter le système de santé au vieillissement de la population et aux maladies chroniques. A ce stade, le plan compte 60 projets répartis en 9 chantiers. La ministre de la San-té a notamment détaillé les 5 dos-siers prioritaires : l’installation de 400 médecins généralistes en zone sous-dense, avec un exercice parta-gé ville/hôpital ; la création de 1.000 communautés professionnelles ter-ritoriales de santé (CPTS), chargées d’assurer en réseau les urgences de ville ; le recrutement de 4.000 assis-tants médicaux pour les médecins ; la création de 500 à 600 hôpitaux de proximité et la fin du numerus clau-sus à la rentrée 2020. La question du financement des actes à l’hôpital sera également abordée. «La tarifica-tion à l’activité a montré ses limites. Au-jourd’hui, il nous faut un financement plus tourné vers la qualité et la perti-nence, un financement lié à la prise en charge d’une population ou sous forme de forfait. Nous proposerons différents modèles selon les activités et commen-cerons par un financement forfaitaire pour deux pathologies, le diabète et l’in-suffisance rénale chronique, à l’hôpital en 2019 et chez les libéraux en 2020 », a rappelé la ministre.

Evaluationdes compétencesLe chantier de la recertifica-tion est lancéAttendu depuis plusieurs mois, la publication du rapport Uzan consa-cré à la recertification des médecins a finalement fait l’objet d’une confé-rence de presse d’Agnès Buzyn , le 5 novembre dernier. « A l’issue d’une large concertation menée par le Co-mité de pilotage sur la recertification auprès des syndicats, des ordres, et des organisations représentatives des médecins et des étudiants, le rapport préconise une certification et une valorisation périodique du parcours professionnel et des acquis tous les 6 ans, qui concerne tous les médecins, et tous les modes d’exer-cices », a-t-on pu entendre ce jour-là. Plus qu’un contrôle, la procédure proposée se veut « un exercice de promotion et de valorisation, voire d’évolution des compétences. ». Le rapport Uzan recommande que « la démarche s’applique à tous les médecins diplômés à partir de 2021, dans le cadre du 3ème cycle rénové des études médicales, et qu’elle soit ouverte à tous les autres profession-nels inscrits au tableau de l’Ordre des médecins, et fortement encou-ragé. Entièrement dématérialisée, chaque professionnel disposant d’un espace personnel numérique, la recertification devra « reposer en grande partie sur l’auto-évaluation. » Et la certification pourrait reposer sur cinq critères d’évaluation et un critère de valorisation.

Parmi les critères d’évaluation, le rapport inclut deux éléments spé-cifiques : le médecin doit montrer qu’il s’inscrit dans une démarche d’amélioration de la relation méde-cin-patient. C’est le « prendre soin » qui est ici valorisé. La procédure donne également une place à « la qualité de vie et à la santé du profession-nel. » A l’occasion de sa prochaine édition, dans le n°1315, Le Médecin de France consacrera un dossier de six pages à la recertification.

Etats généraux de la médecine spécialiséeRassembler, valoriser, convaincreLe 17 novembre, Les Spés-CSMF or-ganisaient, à la Maison de la chimie à Paris, les 2eme Etats généraux de la médecine spécialisée. Un événe-ment devenu incontournable, avec près d’une centaine de participants, et la contribution des principaux dé-cideurs sanitaires du pays. Agnès Buzyn a ainsi répondu longuement et en détail aux questions du pré-sident des Spés-CSMF, Patrick Gas-ser, à l’occasion d’une vidéo diffu-sée dans l’après-midi. « Les médecins spécialistes sont un maillon essentiel de la chaine de soins, expliquait la mi-nistre. Je compte sur leur expertise pour mieux organiser les parcours de santé des patients et contribuer à la néces-saire transformation du système de santé. » Directeur général de l’assu-rance-maladie, Nicolas Revel rap-pelait à quel point les négociations qui s’ouvriront en janvier prochain sur la coordination des soins seront essentielles. « La concentration démo-graphique dans les zones urbaines va se poursuivre, c’est pourquoi il va falloir mobiliser davantage certains dispositifs, comme les consultations avancées et la télémédecine. Les CPTS ne sont que des outils, il nous revient, ensemble et avec l’aide de moyens financiers, d’en faire de vrais instruments au service des pa-tients. Evitons les pièges de la suspicion habituelle ! » Patrick Gasser, pour sa part, a profité de ces Etats généraux pour annoncer le grand projet des Spés-CSMF : lancer un vaste mou-vement de rassemblement, intersyn-dical, pluristatutaire, afin de peser ensemble en faveur d’une meilleure reconnaissance des spécialistes dans la chaine de valeur du soin. « Ensemble, nous créerons prochai-nement la Maison de la création et de l’Innovation, un lieu destiné à accueillir tous les acteurs, au service d’outils mo-dernes d’organisation et de délivrance des soins ». Pour le président des Spés-CSMF, l’un des enjeux de ce mouvement est « d’affir-mer que les spécialistes peuvent et doivent contribuer à l’excellence du premier recours, en tant qu’experts de la maladie qui touche le patient. » Le Méde-cin de France reviendra plus en détail sur ces Etats généraux dans sa prochaine édition.

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Le Médecin de France n°1314 • 23 novembre 201813

ValproateDes mesures additionnelles de réduction des risquesAprès les cas de malformation et de troubles du com-portement constatés chez certains enfants nés de femmes traitées au valproate, l’Agence nationale de sécurité du médicament a diffusé, le 6 septembre der-nier, de nouvelles mesures de minimisation du risque destinées à mieux informer médecins et patientes sur les conditions de délivrance de ces produits. Ac-cessible sur le site de l’ANSM, ces informations rap-pellent d’abord que « le valproate (comme ses dérivés : acide valproïque, valpromide et divalproate), lorsqu’il est administré pendant la grossesse, est associé à un risque de malformations congénitales dans 10,7% des cas et un risque de troubles du développement jusqu’à 30 à 40% des cas. » Un Programme de Prévention des Grossesses contenant un certain nombre de mesures, dont la nécessité d’une contraception efficace et la ré-alisation de tests de grossesse en cas de traitement par valproate, est mis en place afin d’éviter la survenue de toute grossesse. Enfin, il est possible de téléchar-ger plusieurs documents pour mieux maîtriser ces prescriptions. Un guide destiné aux professionnels de santé fournit des informations sur les risques térato-gènes et neurodéveloppementaux associés à l’usage du valproate durant la grossesse et les actions à mettre en place pour réduire les risques pour les patientes. Une brochure à destination des filles et femmes en âge d’avoir des enfants est également disponible, de même qu’un formulaire annuel d’accord de soins. Ce dernier document doit en effet être complété et signé par le médecin spécialiste et la patiente, à chaque ini-tiation ou renouvellement de traitement (au minimum une fois par an). Enfin, une carte patient à diffuser à la patiente à chaque délivrance est téléchargeable.

MédicamentsDes Français confiants… mais méfiants sur les labosHuit Français sur dix ont confiance dans les médica-ments, selon les résultats du 8eme Observatoire socié-tal du médicament du Leem. Les produits prescrits et remboursés obtiennent un meilleur score (84% des personnes interrogées) que les médicaments en vente libre (65%), les médicaments de marque (79%) et les génériques (69%). La cote des vaccins remonte,

à 52%, contre 44% l’année dernière, mais reste encore faible. Les Français sont encore 17% à penser que les risques associés sont supérieurs aux bénéfices et 31% à juger que risques et bénéfices sont équivalents.. Les 25-34 ans, tranche d’âge avec des enfants en âge d’être vaccinés, sont toutefois moins réticents, avec une progression de leur confiance de 18 points. Cette enquête, menée par Ipsos, sonde également la percep-tion des Français des laboratoires pharmaceutiques. Ils les jugent ainsi légitimes sur un certain nombre de sujets, tels la recherche (88%), les essais cliniques (80%), la sécurité des médicaments (79%) ou la par-ticipation aux discussions sur les enjeux du système de santé (66%). En revanche, seulement 49% (55% chez les patients chroniques) affirment leur confiance dans ces entreprises. Ils donnent une mauvaise note à l’éthique et la transparence du secteur (34% et 16%), ainsi qu’à l’attention portée aux patients à travers la prise en compte des risques d’effets secondaires des traitements (37%), l’accompagnement tout au long de leur maladie (36%) et l’écoute (36%). Sur l’innovation enfin, une nette majorité de Français pensent que les progrès en santé à l’horizon 2030 viendront avant tout du médicament.

Antibiotiques40 millions d’euros pour la rechercheLa lutte contre la résistance aux antibiotiques va bé-néficier de 40 millions d’euros d’investissement, a an-noncé la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. Il s’agit de « comprendre les mécanismes d’apparition et de diffusion des résistances et découvrir de nouvelles cibles thérapeutiques », explique Frédérique Vidal. Le programme sera coordonné par l’Inserm. Parallèlement, le ministère de la Santé lance un logo pour alerter sur la surconsommation des antibio-tiques. Couplé avec le slogan « ils sont précieux, utilisons les mieux », celui-ci sera diffusé sur les réseaux sociaux et apposé dans tous les documents officiels. Depuis les progrès réalisés au début des années 2000, la consom-mation globale d’antibiotiques en médecine de ville en France a augmenté, de 28,6 doses pour 1.000 habi-tants en 2007 à 29,2 doses/1.000 en 2017. L’objectif du gouvernement est désormais de réduire de 25% de la consommation d’antibiotiques d’ici 2020.

Produits de santé

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Le Médecin de France n°1314 • 23 novembre 201814

Formation des personnelsmédicaux : changement de cap ?

La réforme de la formation profes-sionnelle modifie en profondeur le fonctionnement des organismes paritaires collecteurs agréés. La branche des personnels médi-caux doit désormais choisir son opérateur de compétences. La proximité ou la santé ? Telle est la question.

La réforme de la formation professionnelle est entrée en vigueur le 6 septembre der-

nier. Elle se propose de regrou-per les organismes paritaires collecteurs agréés, mais aussi de les transformer en opérateurs de compétences. Les 21 OPCA fe-ront désormais place à 11 OpCo. Ces nouvelles structures de-vront notamment financer l’ap-prentissage, aider les branches à construire les certifications pro-fessionnelles et accompagner les PME pour définir leurs besoins de formation. Elles perdront en revanche la collecte des cotisa-tions, au profit de l’Urssaf.

Dans le cadre d’une négocia-tion avec les partenaires sociaux, chaque branche professionnelle

devra désigner un opérateur de compétences avant le 31 dé-cembre prochain. Des conven-tions d’objectifs et de moyens devront ensuite préciser les res-sources mises à la disposition des OpCo pour réaliser leurs mis-sions. Les nouveaux agréments seront accordés par l’Etat d’ici au 1er avril 2019.

Un choix à déterminerLa branche des personnels mé-dicaux se trouve confronté à un choix cornélien : la santé ou la proximité ? « Nous menons actuelle-ment un travail de fond pour trouver les meilleures orientations possibles, selon les intérêts des différents mé-tiers. La piste des services de proxi-mité et de l’artisanat semble tenir la corde, en raison de la taille et de la spécificité de nos entreprises. C’est également une question de continuité, de cohérence et d’agilité », explique Laurent Verzaux, radiologue au Havre.

L’hypothèse a du sens pour les 85 000 salariés du secteur. Appelé à devenir un OpCo, Actalians as-surait traditionnellement le finan-cement et la gestion des actions

de formation mises en œuvre par les entreprises relevant des pro-fessions libérales, des établisse-ments de l’hospitalisation privée et de l’enseignement privé.

Préserver et développer l’emploiLe développement professionnel continu est une obligation légale, mais c’est surtout un levier de transformation des métiers. Une analyse prospective sur l’évolu-tion des emplois dans la branche le démontre amplement. « L’émer-gence des plates-formes de télé-se-crétariat pourrait entraîner la dispa-rition de nombreux emplois. Si nous développons nos métiers, notamment en matière de responsabilités et de compétences, nous parviendrons à maintenir et à gagner les emplois », souligne Laurent Verzaux.

Là aussi, le choix de la continuité constitue un argument de poids. «Nous avons déjà collaboré avec Ac-talians sur la construction des réfé-rentiels métiers des futurs assistants médicaux. Ils connaissent nos problé-matiques et nos enjeux », rappelle-t-il.

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