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20 1 Edito Pour ce Zig-Zag n°19, le comité de lecture adulte a souhaité mettre en avant deux auteurs de la région : Lucien Suel et Grégoire Delacourt. Et bien lui en a pris, puisque les critiques sont de très bonne facture notamment pour « Blanche étincelle » et la « Liste de mes envies ». Ces deux auteurs seront présents au mois d’avril à la médiathèque pour « Eloge de nos terres ». Durant trois semaines seront mis en avant les artistes de notre région : Jean-Michel Dutillie exposera ses œuvres, les voix du groupe « Apple Pie » résonneront dans l’auditorium et la troupe des « P’tits Quinquins » proposera des pièces en patois. Bonne lecture, L’équipe de la médiathèque UNE ANNÉE STUDIEUSE Roman / Anne WIAZEMSKY / éd. Gallimard Lu par Céline LEROUX En 1966, Anne, la narratrice, écrit à Jean-Luc Godard pour lui témoigner son admiration. En guise de réponse, le cinéaste lui exprime le désir de faire sa connaissance. Bien que vingt ans les séparent, cette rencontre devient le point de départ d'une histoire d'amour. Dans le même temps, Anne entre à Nanterre pour des études de philosophie et fait la connaissance d'un certain Daniel Cohn-Bendit. J’ai beaucoup aimé ce roman, plein de tendresse et de délicatesse. Anne Wiazemsky se livre avec une grande sincérité et beaucoup de pudeur à la fois. Les prémisses de cette histoire sont racontées très simplement et l’on oublie parfois le côté célèbre et reconnu de Jean-Luc Godard, qui apparaît le plus souvent comme un homme amoureux, passionné, anxieux de perdre la femme qu’il aime, dépendant de celle-ci et de son opinion. On navigue avec beaucoup d’intérêt et de plaisir dans le fourmillement artistique et culturel des années 60. Entre tournage de film, festival d’Avignon, avant- première, le lecteur est plongé dans un monde qu’il ne connaît pas toujours très bien mais qui est décrit sans prétention ni clinquant. On croise des personnes célèbres telles que Truffaut, Jeanne Moreau ou Maurice Béjart. Une plongée pleine de tendresse dans des souvenirs personnels. ENCYCLOPÉDIE DE LA WEB CULTURE Documentaire / Diane LISARELLI / éd. Robert LAFFONT Lu par Nadine COUAILLIER Ce livre documentaire nous propose une découverte amusante et instructive sur le monde du Net et sa culture. Comme par exemple de savoir faire la différence entre un geek ou un nerd grâce à ses lunettes ? Peut-on utiliser le mot « lol » passé 18 ans ? Les deux auteurs passent en revue à travers une centaine d’entrées et avec beaucoup d’humour le pire et le meilleur du Net. Un livre indispensable lorsqu’on a des ados à la maison qui ont beaucoup d’amis sur Facebook, si on veut par exemple avoir une chance d’arrêter de passer pour un « relou » pour les « kikoolol » notamment (ados qui utilisent un mélange de dialecte texto et de smileys). Bref un petit précis sociologique de la culture du net de ces dix dernières années, drôle, ludique et pédagogique : mdr !!!

UNE ANNÉE STUDIEUSE20 1 Edito Pour ce Zig-Zag n°19, le comité de lecture adulte a souhaité mettre en avant deux auteurs de la région : Lucien Suel et Grégoire Delacourt

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Page 1: UNE ANNÉE STUDIEUSE20 1 Edito Pour ce Zig-Zag n°19, le comité de lecture adulte a souhaité mettre en avant deux auteurs de la région : Lucien Suel et Grégoire Delacourt

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EditoPour ce Zig-Zag n°19, le comité de lecture adulte a souhaité mettre en avant deux auteursde la région : Lucien Suel et Grégoire Delacourt. Et bien lui en a pris, puisque les critiquessont de très bonne facture notamment pour « Blanche étincelle » et la « Liste de mesenvies ». Ces deux auteurs seront présents au mois d’avril à la médiathèque pour « Elogede nos terres ». Durant trois semaines seront mis en avant les artistes de notre région : Jean-MichelDutillie exposera ses œuvres, les voix du groupe « Apple Pie » résonneront dansl’auditorium et la troupe des « P’tits Quinquins » proposera des pièces en patois.

Bonne lecture,L’équipe de la médiathèque

UNE ANNÉE STUDIEUSERoman / Anne WIAZEMSKY / éd. Gallimard

Lu par Céline LEROUXEn 1966, Anne, la narratrice, écrit à Jean-Luc Godard pour luitémoigner son admiration. En guise de réponse, le cinéaste luiexprime le désir de faire sa connaissance. Bien que vingt ans lesséparent, cette rencontre devient le point de départ d'une histoired'amour. Dans le même temps, Anne entre à Nanterre pour desétudes de philosophie et fait la connaissance d'un certain DanielCohn-Bendit. J’ai beaucoup aimé ce roman, plein de tendresse et de délicatesse. AnneWiazemsky se livre avec une grande sincérité et beaucoup de pudeur à lafois. Les prémisses de cette histoire sont racontées très simplement et l’onoublie parfois le côté célèbre et reconnu de Jean-Luc Godard, qui apparaît

le plus souvent comme un homme amoureux, passionné, anxieux de perdre la femme qu’il aime,dépendant de celle-ci et de son opinion. On navigue avec beaucoup d’intérêt et de plaisir dans lefourmillement artistique et culturel des années 60. Entre tournage de film, festival d’Avignon, avant-première, le lecteur est plongé dans un monde qu’il ne connaît pas toujours très bien mais qui estdécrit sans prétention ni clinquant. On croise des personnes célèbres telles que Truffaut, JeanneMoreau ou Maurice Béjart. Une plongée pleine de tendresse dans des souvenirs personnels.

ENCYCLOPÉDIE DE LA WEB CULTUREDocumentaire / Diane LISARELLI / éd. Robert LAFFONT

Lu par Nadine COUAILLIERCe livre documentaire nous propose une découverte amusante etinstructive sur le monde du Net et sa culture. Comme par exemplede savoir faire la différence entre un geek ou un nerd grâce à seslunettes ? Peut-on utiliser le mot « lol » passé 18 ans ?Les deux auteurs passent en revue à travers une centaine d’entrées et avecbeaucoup d’humour le pire et le meilleur du Net. Un livre indispensablelorsqu’on a des ados à la maison qui ont beaucoup d’amis sur Facebook,si on veut par exemple avoir une chance d’arrêter de passer pour un «relou » pour les « kikoolol » notamment (ados qui utilisent un mélange dedialecte texto et de smileys). Bref un petit précis sociologique de la culturedu net de ces dix dernières années, drôle, ludique et pédagogique : mdr !!!

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LA TRISTESSE DU SAMOURAÏRoman policier / Victor DEL ARBOL / éd. Actes Sud

Lu par Vincent SOUVERAINCe roman démarre en 1941 lorsque, dans l’Espagne franquiste, unefemme visiblement en fuite, s’apprête à prendre le train avec son petitgarçon. Elle ne prendra jamais ce train et le petit garçon, Andrès, ne lareverra jamais. 35 ans plus tard, dans une Espagne en pleine évolution, une avocate,Maria envoie un flic en prison pour avoir roué de coups un homme.Quelques années plus tard, elle se met à douter : la victime n’est peutêtre pas si innocente et le flic pas si coupable… A partir de là, l’auteurnous plonge dans une histoire de famille complexe, sur fond politique etsocial…

Un thriller historique très palpitant qui révèle les atrocités du franquisme, et notamment envers lesfemmes et les enfants qu’on enlève et qu’on prive de leur famille. Un roman où la vengeance et lahaine sont récurrentes. Il tend vers la tragédie noire par les scènes de violences extrêmes (Certainesscènes sont à la limite du supportable et il conviendra de ne pas mettre ce roman entre toutes lesmains). Un roman à lire donc avec beaucoup de vigilance, également par le fait que les époqueschangent et les personnages abondent. Tous les personnages ont un lien les uns avec les autres etl’intérêt du roman est de découvrir quels sont ces liens et quels sont les secrets de familleabominables qu’ils laissent entrevoir. J’ai donc été très accroché par l’intrigue parfaitement maîtriséeet par le souci de reconstruire les liens entre les personnages. Ce qui m’a plu en outre est lacomplexité et l’ambigüité des personnages. On ne peut jamais se fier à un personnage tant ilsapparaissent tour à tour innocents et coupables…

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LE BANC DE L’INJUSTICE Roman policier / Simone GÉLIN / éd. Les nouveaux auteurs

Lu par Lucie BOIVINPlusieurs thèmes apparaissent dans ce roman : le secret de Victoire, ladisparition de Romain, le meurtre de Charlotte ainsi que la corruption dansles milieux de la finance, de la justice et de la politique mais il est difficile pourle lecteur de s’émouvoir et d’y croire tant il manque de rythme et d’intrigueet que le secret de Victoire s’étire tout au long du livre. Le style est inégal,obscur, plat, sans rythme. Ce roman aurait pu n’être qu’une nouvelle.

LÀ EST LA DANSE Roman/ Amy SACKVILLE/ éd. Les Escales

Lu par Vincent MINNE3 romans en 1 ! D’abord le journal de bord de l’explorateur anglaisEdward Mackley, parti à la découverte du Pôle Nord en 1899. Ondécouvrira son corps en 1959, enterré avec ses écrits. Puis vient la vied’Emily, son épouse. Elle n’a vécu que quelques mois avec son marimais l’a attendu toute sa vie. Et enfin, celui de Julia Mackley,descendante de l’explorateur qui s’efforce de trier les archivesfamiliales et de résoudre ses problèmes conjugaux.Le principal intérêt du livre réside dans la construction. L’auteur alterne les3 histoires qui entrent souvent en résonnance. La partie « Expédition auPôle Nord » est vraiment captivante et nous découvrons l’acharnement

d’Edward et de ses équipiers à atteindre le Pôle Nord en bateau, puis à pied sur la banquise. Unsecret de famille vient dynamiser le livre mais il arrive à la page 269, donc un peu tard ! Un premierroman prometteur et aussi le premier livre de la maison d’éditions « Les escales ».

3’’ Bande dessinée / Marc-Antoine MATHIEU / éd. Delcourt

Lu par Bérengère SÈDECet album se présente sous la forme d’un story-board en noiret blanc avec des planches de 9 vignettes sans aucun dialogue…Et c’est le choc. L’auteur fixe dans une préface le contexte deson histoire sensée ne durer que 3 secondes, soit le temps pourla lumière de parcourir 900.000 km. Par le jeu de 33 miroirs, 33réverbérations, l’auteur déroule l’action condensée dans ces 3secondes où tout bascule : un sms reçu, un complot, un coup defeu… L’auteur a construit sa BD comme un puzzle et c’est aulecteur de mener l’enquête.

J’ai eu l’impression de tomber dans un puits sans fond, une abîme. Entre micro et macro, entre zoomet grossissements, les images m’ont fait osciller, tanguer. Tout paraît crédible, même si les perspectiveschoisies servent uniquement l’histoire dans toutes ses facettes. Un peu de manipulation donc pourjouer avec le lecteur, le balader, le perdre parfois pour finalement le ramener dans la pièce du début.Beaucoup d’interrogations, de mystères non résolus mais ce n’est pas vraiment important puisquereste l’imagination du lecteur…Une vraie expérience de lecture, l’effet est bluffant, saisissant quel’on se prête au jeu de l’enquête, ou tout simplement subjugué par les effets de miroir. J’ai trouvéfascinant que le lecteur soit aussi impliqué, happé, mis au centre de l’œuvre…Chapeau !!!

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L’ÉCRIVAIN DE LA FAMILLERoman / Grégoire DELACOURT/ éd. JC LattèsLu par Céline LEROUX et Bérengère SÈDE

Ce roman nous conte l’histoire familiale d’Edouard, déclaré « futurécrivain » à l’âge de 7 ans par les membres de sa famille ! En effet,après avoir écrit un court poème, ses parents sont persuadés qu’ilsera un brillant écrivain et semblent voir pour lui un avenir touttracé… Cette carrière sera finalement vite avortée, l’inspiration lequittant assez précocement… De plus, on suit tout au long du roman,les aléas et péripéties d’une vie familiale mouvementée entre desparents qui ne s’aiment plus et un frère « différent »… Cemalentendu autour d’une carrière d’écrivain perdurera avec larencontre de sa femme qui, elle aussi, est convaincue qu’une brillantecarrière attend Edouard. Finalement, il se lance presque par hasarddans une carrière de publicitaire où il peut mettre à profit sa passion

pour les jeux de mots et figures de style. Carrière dans laquelle il excelle tandis que sa viefamiliale se détériore…

Céline : Un roman simple et touchant sur la famille, ses joies et ses souffrances. De la difficileséparation des parents à la douleur de voir un frère « différent », l’auteur ne perd jamais un certainsens de l’humour plein de délicatesse même si le ton m’a parfois semblé un peu larmoyant ouplaintif…Par ailleurs, j’ai suivi avec amusement et plaisir l’entrée dans le monde de la publicité etl’ascension assez fulgurante du personnage dans cet univers. Entre références à des produits ouslogans connus et l’agitation autour des campagnes publicitaires, le personnage principal sembletoujours être le premier étonné de son succès. Le ton du roman est volontairement détaché, léger eten même temps nous ouvre sur de vraies réflexions sur la famille.

Bérengère : Ce roman nous replonge dans les années 70, dans un halo de fumée de Gitanes…Très amusant. J’ai beaucoup souri… C’est aussi une histoire qui m’a attendrie. On reste toujoursl’enfant de ses parents. Petite leçon de vie sur comment devenir adulte et dépasser les imposturesde l’enfance. L’écriture est fluide et légère, la lecture, aisée. Avec ce premier livre, on est tout de suitemis dans la confidence. C’est un roman très intime, écrit avec beaucoup de subtilité et de sensibilité.Ce livre raconte une libération : celle de l’auteur, enfin capable de choisir sa vie et qui a retrouvé lesmots. A suivre puisque ce n’est que le début…

LOST GIRLSRoman fantastique / Andrew PYPER / éd. L’Archipel

Lu par Virginie CAUBERGHSBartholomew Crane est un jeune avocat de la pire espèce, qui penseplus à gagner ses procès qu’à faire régner la justice. Il est envoyé dansune petite ville perdue du Canada pour défendre un professeur accuséd’avoir assassiné deux de ses étudiantes, bien que leurs corps n’aient pasété retrouvés….Le résumé du livre et le côté fantastique présent m’ont tout de suite donnéenvie de le lire, et c’est vrai que le début est plutôt prometteur, on suitrapidement l’enquête de Bartholomew Crane. Mais très vite, je me suis perdue

dans les longueurs de la lecture, des descriptifs à n’en plus finir, des personnages sombres etmanquant de consistance, un côté fantastique peu présent qui se résume à des hallucinations et desvoix, je m’attendais à quelque chose de plus fort. L’enquête finit par être complètement floue et j’aieu la sensation de lire des pages de « remplissage ». Tenace, j’ai terminé le livre en m’attendant àune fin qui aurait sauvé le « milieu » du livre, malheureusement très décevante également…. C’estbien dommage car l’intrigue était là, juste l’intrigue….

LES COMBATTANTS DE L’OMBRE : 1939-1945DES RÉSISTANTS EUROPÉENS CONTRE LE NAZISME

Documentaire/ Ambre ROUVIÈRE/ Bernard GEORGE/ Albin MichelLu par Aline CARDON

Livre documentaire sur ces "combattants de l'ombre", ces hommes etces femmes qui ont eu le courage, chacun à leur façon, de résister àl'occupant nazi, partout en Europe.Ce livre est très fort dans son propos car il est principalement écrit avec lestémoignages directs des résistants. Il se déroule dans l'ordre chronologiquedes évènements avec, pour chaque chapitre, un rappel historique de ceux-cipuis le témoignage de ceux et celles qui les ont vécus. Cela rend sa lectureparticulièrement poignante car nous aurions pu être à leur place. Enfin, sarichesse se trouve également dans les photographies qui illustrent chaque

chapitre (certaines, sur le génocide, sont difficilement soutenables). Un livre pour ne pas oublier.

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LA PATIENCE DE MAURICETTERoman / Lucien SUEL/ éd. La table rondeLu par Vincent MINNE et Lucie BOIVINPatience signifie aussi « Souffrance ». Le livre aurait pu s’intituler« les désespoirs de Mauricette » tant cette dame a connu detragédies familiales qui l’ont rendue mentalement fragile. A 75 ans,lors d’un séjour à l’EPSM d’Armentières, Mauricette fugue. Son ami,Christophe Moreel, entreprend de la retrouver et nous emmène à ladécouverte de cette ancienne institutrice, poète à sesheures.Alternent le récit de sa vie et les écrits personnels deMauricette, consignés dans le cahier donné par la psychologue,forcément marqués par ses troubles intérieurs.

Vincent : Un coup de cœur pour Mauricette car cette femme m’a beaucoup touché…et pourl’auteur qui nous livre un ouvrage plein de poésie et d’humanité. On sent que Lucien Suel est « habité» par son livre, écrit lors d’une résidence à l’EPSM. La construction du livre, alternant passé etprésent, nous permet de découvrir progressivement les blessures de Mauricette. J’ai apprécié aussile portrait des 2 compagnons, Christophe et Alfonsina, qui témoignent d’une amitié simple et belle.

Lucie : Ce livre est de la poésie à l’état pur. J’ai aimé me promener dans le Nord avec lespersonnages, les villes, etc. L’histoire est troublante de vérité, d’authenticité et vraiment poignante.

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LA LISTE DE MES ENVIESRoman / Grégoire DELACOURT / éd. JC LattèsLu Nadine COUAILLIER et Vincent SOUVERAIN

Jocelyne rêvait d’être styliste à Paris, elle est mercière à Arras…Ellerêvait d’épouser Kevin Costner, elle a épousé Jocelyn, ouvrier àl’usine et gentiment grassouillet… Bien qu’elle soit banale, la vie deJocelyne est heureuse et elle ne veut pas en changer, même si lehasard fait qu’elle est la gagnante de l’euro millions… Elle se metalors à rédiger la liste de ses envies, sans pour autant lesconcrétiser….

Nadine : Ce roman est un plaisir de lecture du début à la fin, le personnage de Jocelyne nouspartage, malgré l’apparente simplicité de sa vie, sa grande lucidité, son humour, sa compassion, pourelle et pour les autres...Et c’est un régal, une parenthèse d’amour émouvante mais aussi pourquoipas une ouverture à une réflexion personnelle sur nos envies, nos besoins.

Vincent : Une histoire pleine de charme et d’humour, qui par un style concis et vif se lit avec aisanceet un énorme plaisir. Pour autant le propos n’est pas naïf ou simpliste, une réelle profondeur sedégage du personnage principal. En effet, sous des apparences bienveillantes et rêveuses, Jocelyneest déterminée par exemple à ne pas empocher le gros lot et préfère se contenter du peu qu’elle aparce qu’elle est sûre de l’avoir plutôt que de risquer de tout perdre. Les épreuves de la vie l’ontaguerrie (perte d’un enfant à la naissance, mort brutale de sa mère). Pourtant, un événement va laforcer à bousculer ses certitudes, mais ce ne sera que pour mieux rebondir…Un roman qui poseclairement la question du bonheur et un portrait très touchant d’une femme écrit par un hommedont on peut se féliciter qu’il ait réussit à se mettre à sa place et à rendre sa sensibilité jusque dansl’intimité de la nudité. Un coup de cœur sans l’ombre d’une hésitation !!

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BLANCHE ÉTINCELLERoman / Lucien SUEL / éd. La table ronde

Lu par Virginie CAUBERGHS et Aline CARDONLa rencontre poétique de Mauricette, une dame âgée au passépsychiatrique marqué, et de Blanche, une femme plus jeune avecenfants et mari. Ensemble elles vont doucement partager leursexpériences, leurs passions et leurs souvenirs.

Virginie : Au début de ma lecture, j’étais un peu sceptique, une écriturelente, peur de m’ennuyer…et finalement le personnage de Mauricette,cette femme âgée marquée par un passé douloureux m’a entraînée autravers de son quotidien, parsemé de petits bonheurs et aussi de peines.Sa rencontre avec Blanche et sa famille, particulièrement ses deuxgarçons, va bouleverser petit à petit ce quotidien si bien rythmé. Cette

amitié qui prend de l’ampleur au fil du livre est simple mais aussi remplie d’un partage mutuel pourle goût des arts, la musique, la lecture, la peinture. La générosité de cœur de Mauricette pour lesenfants de Blanche est très touchante, elle devient un peu leur « grand-mère », elle qui n’a jamaiseu d’enfant. L’écriture est très poétique et les pensées de Mauricette sont de multiples jeux trèsfluides entre les mots. Ce roman fait suite à « La patience de Mauricette » que je n’ai pas lu maisun résumé permet de lire le suivant sans problème. Pour conclure, je dirai que les personnages sonttrès attachants et laissent au fil de la lecture une belle leçon d’espérance, j’en garde un agréablemoment de lecture, même si ce n’est pas mon style préféré.

Aline : Beaucoup de poésie et de tendresse dans ce roman écrit à la première personne où lelecteur suit les réflexions de Mauricette, et l'évolution de sa relation avec Blanche. On se laisse porterpar ce récit qui parle d'amour, de la nature... de choses simples et pourtant universelles. Une boufféed'oxygène et d'optimisme.

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ALL OR NOTHINGComédie dramatique / Réal. Mike Leigh, 2002

Vu par Christine HANNEDOUCHEC’est en 2002 que Mike Leigh réalise ce film présenté au festival deCannes. Il a une dizaine de réalisations à son actif depuis avecdernièrement « Another year » et « Be happy ». « All or nothing »raconte l’histoire de Phil, chauffeur de taxi, et de Penny, caissière, quivoient leur vie de couple et famille se disloquer. Leur fille Rachel faitle ménage dans une maison de retraite, tandis que leur fils Rory estchômeur. Survient alors un événement qui va transformer leur vie etleur faire à nouveau découvrir l’amour. Du moins c’est ce qu’annoncele synopsis. Car si parfois on espère (Be happy), très souvent on désespère. Et pour le

coup, le réalisateur va s’échiner à montrer la misère des travailleurs pauvres d’une cité HLMbritannique. De quoi servir son souci du réalisme et de l’authenticité. De quoi desservir le rythme dufilm dans lequel on attend désespéramment l’incident pour finalement être déçu. Tout ou rien, oupresque…

ON N’EST PAS LA POUR SE FAIRE ENGUEULERChanson francophone / Boris Vian, AZ, 2009Ecouté par Christine HANNEDOUCHEEcrivain, poète, parolier, chanteur, critique et musicien de jazz,scénariste, traducteur, conférencier, acteur et peintre, Boris Vian estdécédé en 1959, à juste 39 ans d’une crise cardiaque lors de laprojection de l’adaptation cinématographique de son livre « J’iraicracher sur vos tombes ». Comme beaucoup de ma génération, j’aiétudié au collège « L’écume des jours ». Mais Boris Vian, c’estégalement 500 chansons et thèmes musicaux méconnus pour ma part,sinon depuis sa découverte dans « Gainsbourg, vie héroïque ». C’est à

l’occasion du 5e anniversaire de sa mort que sort ce disque hommage auquel pas moins de38 artistes ont participé. Le premier disque rassemble les grands succès de l’artiste « chansons probables ». Le second disqueréunit des textes extraits de manuscrits originaux et mis en musique par des artistes actuels «chansons improbables ». Fred Pallem est l’unique arrangeur et prend le parti de moderniser lesthèmes originaux. Globalement, j’ai préféré le second Cd et notamment les lectures sur fond musicaldonnant plus de profondeur aux textes.

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LES PLUS GRANDS COMIQUES RETROMusique fonctionnelle / Divers artistes, Wagram Music SA, 2005

Ecouté par Daphné GOURVITCHOn retrouve presque tous les grands classiques. Fernand Raynaud avec le« 22 à Asnières », Fernandel et son « Félicie aussi ». Bourvil avec sa causerieanti alcoolique et son eau ferrugineuse. Ray Ventura et son orchestre avec« Tout va bien madame la marquise » et « Ca vaut mieux que d’attraperla scarlatine » en 1936 ; avec l’ami bidasse et son fameux Tous deux natifsd’Arras, chef lieu du Pas-de-Calais en 1958. Les frères Jacques, dont le nomest un condensé de « la chanson enfantine et faire le Jacques, le pitre, avecla queue du chat. Enfin Ouvrard et Je n’suis pas bien portant… Toutes ces

chansons, portées par une musique légère et des paroles invraisemblables montrent qu’en périodede crise avant et après guerre, il convient de continuer de s’amuser d’un rien et de garder un sensde l’humour aigu. A réécouter de temps en temps surtout quand on a du vague à l’âme.

AH ! LA LIBIDO (UN HOMME POUR LE PLAISIR) Comédie / Réal. Michèle ROSIER, 2009

Vu par Monique CAPLIERElles sont quatre très jolies copines et travaillent pour le quotidienLibération. L'aînée Paula est documentaliste, Betty et Charlotte ontla trentaine et sont respectivement photo reporter et rédactrice.Sandy, vingt ans, est standardiste. Pour tromper leur solitude physiquechacune va tenter d’avoir recours à un « toy-boy ».Michèle Rosier - fille de la fondatrice de l’hebdomadaire féminin « Elle »-fait du cinéma depuis les années 70, ne connaissant pas sa carrièrecinématographique, j’ai d’autant été plus surprise par ce film attachant àbien des égards, qui dégage une impression de premier film d’auteur, de

théâtre filmé et de film à sketches. Le thème de la libido des femmes et de la prostitution masculineest ici traîté joyeusement, avec humour et légèreté. Au-delà de certaines maladresses, j’ai apprécié leton et certains dialogues qui témoignent de l’humour et l’autodérision des femmes à l’égard de leurpropre sexualité (ou non sexualité). Les personnages masculins ne sont pas réduits à des faire-valoiret semblent tous avoir une histoire. Ceci dit, le propos reste très cérébral même si les corps sontfilmés avec beaucoup de connivence et de gourmandise.

A FOREIGN SOUNDMusiques du monde/Brésil / Caetano VELOSO, Universal Music, 2004

Ecouté par Monique CAPLIERCompositeur chanteur et guitariste brésilien, chef de file duTropicalisme, Caetano Veloso débute sa carrière dans lesannées 50 et connaîtra bien des vicissitudes sous la juntemilitaire qui a sévi jusqu’en 1985 et le contraindra à l’exil suiteà un enlèvement par celle-ci. Cet album de 2004 reprend lesgrands classiques de la chanson populaire américaine alors queles Etats-Unis font l’objet de vives critiques sur la scèneinternationale à cette époque.

Il s’agit de son premier album en anglais. On y retrouve pêle-mêle des « tubes »de Cole Porter, KurtCobain, Bob Dylan, Stevie Wonder ou Paul Anka. Son interprétation fait swinguer et balancer cesstandards : le « Sophisticated lady » de Duke Ellington prend une saveur tropicale, le « Summertime» de Gershwin a la langueur des fins d’été torrides. J’ai aimé l’interprétation expressive, chaude etsexy, ainsi que les arrangements soignés. Cela traverse les générations et fait cohabiter les années50 et les années 80. C’est vraiment autre chose que le « easy-listening »…

UN SINGE EN HIVER Comédie dramatique / Réal. Henri Verneuil, 1962

Vu par DAPHNE GOURVITCHLe film se déroule dans une bourgade normande, Tigreville, près deDauville. Albert Quentin et son équipier de beuverie remontent leYang Tsé Kiang à coups de gnole car Albert est un ancien militaire quia fait ses classes en Chine. Dehors les bombes pleuvent, noussommes en pleine guerre et Albert jure de ne plus boire s’ils enréchappent. On le retrouve 15 ans après, gérant de l’hôtel Stella,abstinent, bourru et suçant des bonbons sous l’œil bienveillant etinquiet de sa femme Zusanne Flon. L’origine du titre : quand les premiers froids de l’hiver arrivent en Chine, iln’est pas rare de voir des singes égarés déambulés en ville. Ce film est une

apologie de l’ivresse mais attention, l’ivresse des seigneurs, de ceux qui boivent pour voyager, l’un enChine, l’autre en Espagne où il pense être le meilleur toréador au monde et qui donne dans la rueune corrida imprévue. La rencontre des deux monstres sacrés que sont Gabin et Belmondo va fairelittéralement péter les bouchons de bouteille ! 15 ans de retenue pour Albert qui vont aboutir à uneexplosion de délire et à un gigantesque feu d’artifice à la fin du film. Cinq bons acteurs, un bonscénario, des dialogues « audariens » au top, que peut-on faire de mieux en matière de film. « Si laconnerie n’était pas remboursée par la sécu, vous seriez sur la paille ».

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AALTRA Comédie / Réal. Benoit Delépine et Gustave Kervern, 2004

Vu par Régis PRIEMRéalisé en noir et blanc, le film met en scène les deux réalisateursdans les rôles principaux et quelques guest-stars comme BenoitPoelvoorde et Aki Kaurismaki. Benoit Delépine est cadre, bellemaison, belle voiture et belle moto. Tout l’oppose à son agriculteurde voisin, Gustave Kervern. Ils se détestent cordialement. Suite àune dispute, les deux protagonistes sont écrasés accidentellementpar une benne agricole qui leur fait perdre l’usage des membresinférieurs. Ils décident de partir en Finlande, pays d’origine de labenne qui les a écrasés, afin de réclamer des dommages etintérêts. C’est parti pour un fauteuil-movie, fertile en rencontreaussi les unes que les autres, au cours duquel nos deux comparsesapprendront à se supporter et même s’apprécier…

Aaltra est un film décalé qui carbure à l’humour noir. Très peu de dialogues pour ce film qui met enscène 2 anti héros aigris souvent pathétiques mais attachants. En début de film, le noir et blanc meten valeur le décalage social entre les deux protagonistes et le côté misérable de leur vie. C’est unecomédie qui permet de réaliser les difficultés qu’on peut rencontrer en fauteuil roulant dans la viede tous les jours, surtout quand on prétend traverser l’Europe. Cela donne lieu à quelques situationsmémorables : la scène où ils volent le fauteuil d’une vieille dame, celle où Delépine fait du moto cross,la super apparition de Poelvoorde…et la fin est irrésistible !

RICHARD GOTAINER : L’INTEGRALERichard Gotainer / Chanson française/ Gatkess, 2006

Ecouté par David PALASZEWSKIGotainer démarre sa vie professionnelle dans une agence depublicité. Rappelez vous les mémorables : « Buvez, éliminez !Vittel », « y’a des fruits, y’a de l’eau ! Banga », « Le fromage Belledes champs », « On se lève tous pour Danette ! ». C’est biensimple tout consommateur vivant en France et ayant plus de 30ans possède de l’ADN Go-tai-ner en lui. A partir de 1980, «Primitif, Poil au tableau, Le sampa, Le youki, Le mambo dudécalco, femmes à lunettes,… » sont des hits incontournables età ma plus grande surprise indémodables.

L’intégrale rend justice aux albums que l’on connaît beaucoup moins, 12 albums remasterisés, latotalité des albums studios, un live, un best of et un cd avec les pubs. La palette musicale du trublionGotainer est très large avec pour seul maitre mot l’humour ! Omni-ovni de la chanson françaiseGotainer convoque les blagues carambar dans le rock, Pif magazine dans le blues, Tintin au pays dufunk, Astérix et Obélix dans le rock’n’roll. On se délecte des farces qu’il réserve à notre languefrançaise. L’œuvre bien qu’indigeste dans son ensemble passe à l’épreuve du temps avec brio. Cettesaison, nous étions tout foufou de vous voir débarquer à Armentières. Sachez que nous attendons «le forgeur de tempos » avec impatience dans notre ville.

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MAN OF THE MOONComédie / Réal. Milos Forman, 2000

Vu par David PALASZEWSKI« Man of the Moon » est à mi-chemin entre le comique et ledramatique. Ce biopic évoque la carrière du comique américain AndyKaufman. Né à New York en 1949, il débute dans de nombreuxcabarets avant de se faire remarquer à la télévision dans la célèbreémission « Saturday night Live ». Toute sa carrière, il refusera lescompromis et imposera des choix artistiques audacieux. Comiqueiconoclaste, clown odieux et surréaliste, mégalomane de génie, AndyKaufman fera de chacune de ses respirations une farce. Ironie du sort,il mourra, à l’âge de 35 ans, d’un cancer du poumon.

Milos Forman dépeint avec une finesse absolue la psychologie d’un être à la personnalité complexesans pour autant délivrer une réelle explication quant aux motivations qui animent Andy Kaufman(fou ? génie ? idiot ? schizophrène ?). Comme pour Amadeus (Biopic sur Mozart) le réalisateur nousinvite à découvrir ce qu’est, de façon intrinsèque, un inventeur de génie dont la vie entière estdévouée à cet art éphémère qu’est l’humour. Maitrise absolue de l’espace temps et des évènements,la réalisation est parfaite. Comme lu dans le Télérama à la sortie du film : « On assiste à un mégashow hollywoodien totalement ravagé de l’intérieur ». « Man of the Moon » avec le temps laisse uneempreinte forte et indéniable dans nos mémoires. Les niveaux de lecture du film sont tels qu’il estimpossible d’en rester à un seul visionnage. C’est ce qui en fait probablement une œuvre majeurede la filmographie du réalisateur.

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LE CINEMA DE BACH A WAGNER Musique et cinéma / Dimitri Shostakovich ; Wolfgang Amadeus

Mozart.vol.01 & 03 Naive, 2003Ecouté par Benjamin PEREZ et Laurent DEWUITE

Benjamin : Sur Chopin Préludes Op.28 présenté dans la bande son duJames Bond, Moonraker de 1979, je n’y entendais que cette envie depouvoir un jour savoir jouer ce morceau au piano ou d’en entendre lamélodie résonner d’une maison pleine de vie où les minutes de ce morceauprendraient toute sa force et beauté. L’écoute croisée de ce prélude m’apermis de connaître l’inspiration qu’a en a eue Serge Gainsbourg à lacomposition du morceau Jane B. pour sa muse de l’époque.

Laurent : L’écoute de ces deux albums montre que le premier volumesemble plus intéressant, plus cohérent et harmonieux, moins fouillis dans seschoix. Même si les variations sont très nombreuses et parfois brutales dansces deux volumes, elles sont plus digérables dans le volume 1. Lessentiments basculent trop violemment. Angoisse, lyrisme, calme, énergie,tristesse, puissance, tourment, cérémonie, mélancolie etc. c’est trop ! Pastoujours facile de passer d’un opéra à une ballade ou une symphonie.L’oreille a aussi besoin de cohérence dans les graves ou les aigus. L’autre

souci de cette anthologie réside dans ses choix et ses objectifs. Même si c’est malheureusementl’époque qui veut ça, on pense d’abord à des publicités pour les banques et les assurances. Pourquoiavoir spécifiquement fait ces choix-là ? Cela dit, on mesure deux choses. La première,c’est que le classique est présent absolument partout, la seconde explique la premièrepuisque les droits sont tombés dans le domaine public et que ça ne leur coûte pas unrond ! J’accuse donc Naïve de faire du fric sur une pseudo démocratisation de lamusique classique… avec en plus le cinéma comme alibi. A priori, je pensais que cet albumferait émerger des images mais à moins d’être un cinéphile averti, il est très difficile voire impossiblede retrouver la ou les scènes concernées par ces morceaux d’anthologie, à l’exception de quelquestitres (Symphonie n°9 de Beethoven pour Orange Mécanique, ou La Chevauchée des Walkyries deWagner pour Apocalypse Now), d’autant que le livret est d’une pauvreté redoutable. Pourtant, lesvolumes sont produits par le Label Naïve. Comment oublier des morceaux parfois sifortement ancrés à une image ? Ainsi, La Lettre à Elise et Sonate au Claire de Lune deBeethoven, sont présentes dans le film de Gus Van Sant, Elephant, et par l’acteur Alex Frost qui offreson interprétation au piano, et surpasse les précédentes ou futures utilisations de ces titres dans desfilms.

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DESIRE Rock, variété internationale / De Bob Dylan, Sony Music, 1975

Ecouté par Catherine NUTCHEYDylan, son timbre de voix nasillarde, son harmonica, tout le mondeconnaît ! Je m’arrêterai plutôt sur le fond de cet album Desire sorti en1975. Son titre phare Hurricane (littéralement Ouragan), est uneprotest song, pour la cause de Rubin Carter, boxeur noir, ancienprétendant au titre des poids moyens, accusé du meurtre de troispersonnes, en 1966. Clamant son innocence, Dylan le rencontra dans laprison d’Etat de Rahway (New-Jersey) et lui écrit plusieurs ballades.Hurricane est une chanson sous forme de scripte : « Des coups de feu

résonnent dans un bar la nuit, voici l’histoire de Hurricane… », Elle dure 8 mn33. Pendant la tournéede la sortie de l’album Desire, Dylan et le Rolling Thunder-Revue participent à La Nuit de l'Ouraganen l'honneur de Carter au Madison Square Garden de New York, le 12 août 1975. De nombreusesvedettes, dont Mohamed Ali, sont présentes à ce concert caritatif. Il récidivera le 25 janvier 1976,avec la Nuit de l'Ouragan II, à Houston. Ce super concert fut un fiasco malgré la présence de StevieWonder, Stephen Stills, Ringo Starr, Santana avec trente mille personnes qui assistent au spectaclealors que l’organisation en prévoyait plus du double… Dylan n’interprétera plus cette chanson !Après moult procès, Rubin Carter ne fut pas innocenté mais bénéficia d’un non-lieu. Je vous ai contél’histoire de « Hurricane », maintenant à vous de l’écouter. Dylan reste un classique pour lesnostalgiques.

ALEXANDRE Comédie / Réal. Yves Robert, 1967

Vu par Gaspard RAVATRéalisé en 1967, ce « film-fable » dépeint avec fantaisie les relationsentre l’homme et la nature (une sorte de retour au primitif).Alexandre, le paysan contemplatif, est interprété par PhilippeNoiret. Celui-ci joue son rôle avec beaucoup de plaisir et debonhomie. Un épicurien en herbe ! Au début du film, on assiste à la décadence d’un cultivateur harcelé,persécuté, castré et infantilisé par sa femme. Il aimerait profiter desplaisirs de la vie quotidienne dans sa campagne : entendre un oiseausiffler, pêcher, dormir, aller au bistro pour jouer au billard… Mais lamégère ne voit pas les choses sous le même angle que lui, elle lui impose

un tas de corvées à la ferme et dans les champs. Et dès qu’il se laisse un peu aller, elle le gourmandeférocement ou claque des doigts pour le rappeler à l’ordre. Il est considéré comme un animal et plusvraiment comme un homme (on se remémore « Les temps modernes » de Charles Chaplin). Bienévidemment, Alexandre aspire à la liberté, et il souhaite être en parfaite osmose avec sonenvironnement. Comme il le dit si bien dans ce long-métrage : « faut prendre le temps de prendreson temps ». Et puis un jour sa femme meurt dans un accident de voiture…Et là le bonheur ne sefait pas attendre…Il décide de rester allongé dans son lit pendant plusieurs semaines en compagniede son chien (qui est le seul à le comprendre d’ailleurs), le temps de récupérer quelques heures desommeil… Peu à peu la population du village commence à s’inquiéter, un habitant déclare : « unhomme qui ne travaille pas, c’est pas moral ». Mais peu à peu, la « paresse » gagne les foyers, lapaisible révolte d’Alexandre est adoptée par certains ; ce qui renvoie aux désirs profonds de l’hommes’il n’était pas obligé de suivre sa « raison ». Quelques temps après, Alexandre rencontre unemagnifique jeune fille répondant au nom d’Agathe (interprétée par Marlène Jobert)…risquerait-il dene plus profiter de sa « liberté » ? Je vous invite à visionner « Alexandre le bienheureux »…et méditez!

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SHORTBUS Comédie dramatique / Réal de John Cameron Mitchell, Bac Films, 2006

Vu par Benjamin PEREZShortbus ! Par où commencer ? Par ce long débat de la place du film dansun lieu culturel, il en a tout à fait la place et la légitimité, et si la sexualitéomniprésente dans nos vies gêne, alors ne prenez pas le temps de le voir.Shortbus n’est en aucune façon un film pornographique, il contient desscènes d’actes sexuels considérés comme non simulés et n’entre pas dansla catégorie des films interdit aux moins de 18 ans, ce second débat est luiaussi long à développer, mais si la nudité ouvertement affichée et l’actesexuel vous choquent, passez encore votre chemin. Ainsi doublementprévenu, avec plaisir et envie, vous pouvez alors entrer par la grande portedu Shortbus. Le film creuse l’esprit et la réflexion sur la place de la sexualitédans nos sociétés modernes, par un éventail de thèmes clairement ou

implicitement abordés. Cela va du simple plaisir personnel, de la jouissance, amour propre de chacunnécessaire pour être heureux en couple à des thèmes plus sensibles, on peut alors penser à toutela souffrance que parfois le sexe crée, physiquement ou avant tout psychiquement. Le film comporteune parfaite intégration de la musique avec la scène indépendante avec des groupes comme Yo LaTengo, Animal Collective où tout au long le musicien/compositeur Scott Matthew. Ceci accompagneparfaitement l’univers du film et les relations entre les personnages en ressortent gagnantes, avecce film on jouit, on rit, on vit, etc. et la conclusion se fait d’elle-même, nous devrions aimer tout lemonde, nous en avons besoin, mais là réside toute la complexité dans cette incapacité que connaîtle genre humain depuis le premier jour.

MACADAM COWBOY Comédie dramatique / Réal. de John Schlesinger, MGM, 1969

Vu par Catherine NUTCHEYDustin Hoffman joue le rôle inoubliable de Rasto Rizzo, un parasite,un magouilleur miteux à la petite semaine, mais grandes ambitions.Jon Voight est superbe dans le rôle de Jo Buck, le beau cow-boytexan, naïf et charmant, convaincu qu’il peut sauver toutes lesfemmes seules de New York en mal d’amour. Ces deux personnagessont réunis dans ce film puissant et compatissant. Récompensé par trois Oscar du meilleur : film, réalisateur et scénario,«Macadam Cowboy » (de son titre original « Midnight Cow-boy » nousoffre dans la fin des années 60, le premier road-movie, dénonçant le côtésombre et crasseux de New-York avec ses bas fond peuplés de

prostituées et de clochards ! Fini l’image idyllique de l’Amérique profonde avec la sacro sainte familleet ses valeurs. En 1969, il fallait oser !!! John Schlesinger fut déjà précurseur de Ridley Scott avec lecélèbre « Thelma et Louise ». Ici l’amitié se joue au masculin, Jon Voight le beau texan (quelleressemblance avec sa fille Angelina Joli) se prostitue avec homme comme femme pour sauver sonami Dustin Hoffman. Tout le long du film on est imprégné de la musique de John Barry (morceauxà l’harmonica) et le célèbre Everybody's talkin' chanté par Nilsson, qui fut un tube des années 70.Film culte, il fut très provocateur à son époque. Maintenant on le regarde surtout pour ces deuxacteurs que l’on découvrait et qui ont fait leur preuve et aussi pour cette B.O, envoûtante. Aujourd’huije trouve que le film manque de rythme et paraît un peu dépassé. A voir ou à revoir…