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DOSSIER Jo Seoka : l’esprit de Marikana Jeûne fédéral : au Brésil, des familles améliorent leur revenu éVéNEMENT « NON A LA MINE A CIEL OUVERT   DE TAMPAKAN ! »  UNE TERRE JOURNAL D’INFORMATION DE PAIN POUR LE PROCHAIN  N° 10 - JUILLET 2013 SEULE TERRE PORTRAIT

Une seule Terre N°10 Juillet 2013

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Journal d'information de pain pour le prochain. "Non à la mine à ciel ouvert de Tampakan!"

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Page 1: Une seule Terre N°10 Juillet 2013

Dossier

Jo Seoka : l’esprit de Marikana

Jeûne fédéral : au Brésil, des familles améliorent leur revenu

événement

« NON A LA MINE A CIEL OUVERT  DE TAMPAKAN ! » 

Une terreJOURNAL D’INfORMATION DE PAIN POUR LE PROChAIN  N° 10 - JUILLET 2013

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Portrait

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Fidèles à notre marque de fabriquePain pour le prochain continue son combat, qui ressemble parfois à celui de David contre Goliath. Notre fronde : tenir la loupe sur les injustices qui, sinon, passeraient inaperçues.

Aux Philippines, sur l’île de Mindanao, une filiale de la multinationale suisse Xstrata va ouvrir une gigantesque mine de cuivre à ciel ouvert. Peu de bénéfices de cette exploitation profiteront au pays, alors que les dégâts sur l’environnement et la vie de la population risquent d’être considérables, comme le démontre l’étude mandatée par Pain pour le prochain et Action de Carême.

En Afrique du Sud, la Bench Marks Foundation, un partenaire de Pain pour le prochain issu du milieu des Eglises, tient le projecteur sur les conditions d’exploitation dans les zones minières à proximité des townships. Faire la lumière sur ce qui se passe, voilà ce qui motive de jeunes activistes à réaliser des mini-docu-mentaires sur les conditions de vie indignes et la pollution des eaux qui rend toute vie future impossible. L’évêque Jo Seoka raconte comment les compagnies détournent le droit des communautés à être consultées sur le développement économique de leur région.

Pour contrer l’opacité des problèmes, il faut se réunir, partager les expériences et chercher ensemble des bouts de solutions. Que ce soit au Cameroun ou à Pékin, Pain pour le prochain favorise le dialogue avec les per-sonnes concernées pour lutter contre l’acca-parement des terres et réfléchir à la façon de sortir de la crise du développement. Les solutions ne sont pas à portée de main, nous le savons. Mais l’union fait notre force.

Face aux grands enjeux qui mettent en péril la Vie, Pain pour le prochain reste fidèle à sa réputation. Nous tissons des liens, là où le lien social se délite et les gens se trouvent seuls face aux injustices. Notre marque de fabrique : nous créons des « prochains » à travers le monde grâce au renforcement des réseaux capables d’agir. .

« La vie ne vaut rien. Mais rien ne vaut la vie. » André Malraux

Secrétaire romande Pain pour le prochain

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Accaparement des terres : la transparence pour lutter contre la corruption

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Photo de couverture : Un village Bla’an à Bong Mal, qui devra être évacué si le projet d’extraction minière aboutit

En avril, un atelier coorganisé par Pain pour le prochain au Cameroun, a réuni 45 participant-e-s de dix pays d’Afrique occidentale et centrale. Des militant-e-s surpris-es par la similitude de leurs combats, qui ont décidé de joindre leurs forces, car la lutte contre l’accaparement des terres peut être dangereuse, comme le montre la tentative de meurtre d’un participant camerounais. Parmi les principaux problèmes identifiés : la corruption, qu’il faut vaincre par la trans-parence, et le manque de reconnaissance du droit coutumier qui, en Afrique, coexiste à côté du droit national et régit la plupart des questions foncières. Celui-ci doit être officia-lisé et reconnaître l’accès des femmes à la terre. EW

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Avec le nouveau slogan « Voir et Agir » – qui servira de fil rouge pour les prochaines campagnes – et une nouvelle iden-tité visuelle, la campagne 2014 a su mobiliser et sensibiliser les citoyens et les citoyennes de notre pays. Pour symboliser le « Voir », une loupe révèle, derrière un épi de maïs ou un ham-burger, les conséquences de notre style de vie sur les popula-tions du Sud. De nombreux bénévoles ont souhaité « Agir » face à ces injustices en prenant part à la journée des roses, à l’action « Pain du partage » ou encore en se laissant guider par les recommandations de notre calendrier de Carême. Tout en témoignant leur solidarité envers les populations défavorisées, ils nous ont permis de récolter d’importantes sommes d’argent indispensables au financement des projets que nous soutenons et à nos engagements en politique de développement. DT

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Une campagne œcuménique active !

Agir en relayant notre campagne

Du 28 au 30 mai dernier s’est tenue, à Pékin, la deuxième ren-contre tripartite du dialogue Chine-Europe-Amérique latine. Au cœur des discussions, auxquelles participait aussi Pain pour le prochain, avec sa plateforme « Dialogue4change » : le rôle de la société civile dans l’avenir social et écologique de la planète. Après l’échéance des objectifs du millénaire en 2015, quel sera le modèle de développement porteur d’avenir ? Pour les participants, la résolution de problèmes tels que la crise écologique et le renforcement des inégalités nécessite une plus grande implication de la société civile. Cette dernière doit s’opposer à la croissance économique à tout prix et proposer des modèles alternatifs qui tiennent compte des limites de la planète et d’un partage plus équitable des ressources pour le bien-être de toutes et tous. MS

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Dialoguer sans frontières

Les dons enregistrés à ce jour pour l’action « 160’000 roses » sont de plus de 724’000.– et ceux pour l’action « Pain du partage » approchent les CHF 65’000.–

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A l’approche de l’orage, les villageois ramassent le

maïs. Celui-ci sera ressorti, dès que le soleil brillera

à nouveau, pour être séché.

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Dossier

Aux Philippines, l’extraction minière ne contribue guère à la richesse du pays : elle ne représente que 1% du PIB et les entreprises ne paient que 2% d’impôts.

« NON à LA MINE à CIEL  OUVERT DE TAMPAKAN ! » 

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Femme Bla’an passant près du camp ex-ploratoire de SMI

Champs de maïs et montagnes

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Au cours de la vingtaine d’années d’activité prévues, la compagnie va extraire 6,375 millions de tonnes de cuivre et 6,12 millions d’onces d’or pour un investissement de 5,5 milliards USD – un record en matière d’investissement étranger aux Philippines.

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Exploiter, dans le sud de l’île de Minda-nao, la plus grande mine à ciel ouvert

des Philippines et l’une des plus grandes du monde, voilà l’intention de Sagittarius Mines Inc (SMI), une entreprise philippine dont la multinationale suisse Xstrata détient le contrôle des opérations. Un mégaprojet dans l’air depuis les années 1990, maintes fois repoussé à cause de l’introduction du code environnemental de la province, mais qui pourrait finir par voir le jour en 2019. Au cours de la vingtaine d’années d’activité prévues, 6,375 millions de tonnes de cuivre et 6,12 millions d’onces d’or pourraient être arrachées aux entrailles des terres ancestrales de la communauté autochtone des B’laan. Mais que vaut le déplacement possible de 5’000 villageois face à un projet de 5, 5 milliards d’USD, un record en matière d’investissements étrangers aux Philippines ?

« Protégez l’intégrité de la création de Dieu ! Assurez le développement durable des communautés ! Respectez le droit des populations autochtones à l’autodétermi-nation ! Non à l’exploitation à ciel ouvert de la mine de cuivre et d’or de Tampakan ! » écrivent les trois diocèses de l’Eglise ca-tholique romaine locale, ajoutant que les maigres 2% de taxes dont l’entreprise s’acquitterait ne feraient pas le poids face aux dégâts sur la population et sur l’envi-ronnement.

Violation du droit à l’autodétermination Certes, SMI a mené une étude d’impact pour évaluer les conséquences du projet sur l’environnement et sur la société. Mais la population n’a pas pu donner son consen-tement de façon indépendante en raison de l’extrême dénuement dans lequel elle se trouve, estiment Pain pour le prochain, Action de Carême et l’ONG catholique allemande Misereor, qui ont fait évaluer,

par l’Institute for Peace and Development (INEF) de l’Université de Duisburg – Essen, l’impact des activités minières sur les droits humains des plus vulnérables. L’INEF arrive à la conclusion que, si Xstrata ad-hère bel et bien à la plupart des standards internationaux sur les droits humains, leur mise en œuvre dans le cas concret pose de nombreux pro-blèmes.

Au sein des communautés affectées, les avis sont par-tagés. Certains voient la mine comme la poule aux œufs d’or : SMI ne s’est-elle pas engagée à ouvrir des écoles et des dispensaires pendant la période d’exploitation, à reloger les per-sonnes déplacées et à créer des emplois ? Des promesses alléchantes pour une popu-lation marginalisée, dont les droits les plus

élémentaires à la santé, à l’éducation, à l’emploi et à l’alimentation sont violés par un gouvernement qui ne fournit pas les services sociaux de base.

Mais la plupart s’y opposent fermement, redoutant le déboisement massif, l’érosion des sols, la pollution de l’air et la diminu-tion de la biodiversité. Selon l’étude, même si des possibilités d’emploi et de formation sont offertes à la population locale pendant la durée du projet, l’extraction minière réduirait les terres arables et menacerait l’agriculture de subsistance qui y est pra-tiquée. L’arrivée massive de travailleurs extérieurs risque de faire augmenter les prix des denrées alimentaires et des loge-ments ; la pollution des cours d’eau pourrait menacer les cultures et l’extraction minière risque d’épuiser les nappes phréatiques, déjà mises à rude épreuve en période de

sécheresse. De surcroît , les r isques d ’ac-cident sont très élevés, notam-ment si les barrages du sys-tème d’appro-visionnement en eau venaient à céder, ce que reconnaît d’ail-leurs SMI elle-même.

L’ouverture de la mine violerait le droit même des populations autochtones à l’au-todétermination. Selon les standards inter-nationaux qu’Xstrata affirme respecter, celles-ci doivent donner leur consentement « libre, préalable et éclairé » à la réalisation

L’ouverture de la mine violerait le droit des populations

autochtones à l’auto-détermination. Selon les standards internationaux,

celles-ci doivent donner leur consentement « libre, préalable

et éclairé » à la réalisation de tout projet d’investissement

sur leur territoire.

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Des paysans Bla’an enlèvent les mauvaises herbes d’un champ de riz et d’arachides

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de tout projet d’investissement sur leur territoire. Le problème est que l’informa-tion est complètement asymétrique – c’est SMI qui la détient et c’est sa vision des choses qui est assénée, même par les auto-rités locales qui sont parfois ses sous-trai-tants. La plupart des personnes interrogées n’ont qu’une idée très vague des consé-quences de l’extraction minière sur leurs moyens d’existence. De surcroît, la fourni-ture des services sociaux de base par une entreprise privée pose problème, car elle est conditionnée à l’acceptation du projet et limitée dans le temps.

Responsabilités partagées entre gouvernements et entreprisesAvant même son ouverture, la mine divise. Les communautés et les familles se dé-chirent. Les affrontements entre l’armée et les forces de sécurité privées, d’un côté, et les activistes et le parti d’extrême gauche, de l’autre, ont déjà fait huit morts.

L’étude arrive à la conclusion que dans le contexte fragile, tendu et d’extrême margi-nalisation des communautés autochtones de Tampakan, le rapport de force entre la compagnie minière et les communautés locales est trop déséquilibré. Le gouverne-ment philippin est le principal responsable de cette situation car il n’assure pas les droits humains de ces populations pauvres. Mais SMI et ses principaux actionnaires violent aussi leurs responsabilités en matière de droits humains, car ils ne prennent pas suffisamment en compte la volatilité extrême du contexte. Conclusion : dans les conditions actuelles, il est impos-sible de réaliser un tel projet d’extraction minière de façon responsable. D’autres études de consultation avec les populations locales, qui respectent les standards sur les droits humains, sont nécessaires.

Finalement, les Etats où les entreprises ont leur siège principal doivent s’assurer qu’elles respectent les droits humains. Pour Pain pour le prochain et Action de Carême, les initiatives volontaires ne suffisent pas.

La Suisse – et les Philippines – doivent obliger leurs multinationales à faire preuve de diligence en appliquant les standards internationaux adoptés par l’ONU. IA

Le 27 mars 2013, le Conseil fédéral a publié un « Rapport de base sur les matières premières ». Très attendu, ce dernier fait le point sur les défis que soulève ce secteur d’activité pour notre pays et la synthèse entre les visions souvent diver-gentes des départements de l’administration fédérale. Le résultat est un texte qui analyse clairement les problèmes, mais qui manque de cohérence et refuse de proposer des solutions concrètes. Ainsi, pour diminuer le nombre de violations des droits humains commis par des entreprises suisses à l’étranger, le Conseil fédéral propose de soutenir le développement d’initia-tives volontaires internationales. Sur la responsa-bilité d’établir un cadre politique clair, en Suisse, il reste vague et renvoie aux travaux à venir en vue de rédiger « une stratégie Ruggie » pour la Suisse. Quant à la nécessité de légiférer, il ne dit rien.

La timidité de ce rapport n’a pas seulement déçu Pain pour le prochain et les 50 organisations nongouvernementales membres de la cam-pagne « Droit sans frontières ». Elle se situe aussi en marge des évolutions internationales. En

effet, la position du Conseil fédéral tient peu compte du changement de paradigme qui a été instauré par les « Principes directeurs pour les entreprises et les droits de l’homme », aussi appelés « principes Ruggie », adoptés à l’unani-mité par le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies en juin 2011. Ces principes affir-ment que les Etats doivent « appliquer des lois tendant à exiger des entreprises qu’elles res-pectent les droits de l’homme » et « périodique-ment, évaluer la validité de ces lois et combler les éventuelles lacunes » (Principe directeur 3a). L’Union européenne et les Etats-Unis ont intégré ce changement de paradigme en travaillant sur une série de lois (cf. loi Dodd-Frank, règlemen-tation sur les investissements en Birmanie) qui exigent, de façon contraignante, plus de trans-parence de la part de leurs entreprises. La dernière date d’avril 2013 : il s’agit d’une direc-tive de l’Union européenne qui oblige les firmes à publier des informations sur leur politique de responsabilité sociale dans leur rapport annuel (« reporting non-financier » ). CP

Des règles claires pour encadrer les entreprises suisses !

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Le camp exploratoire de SMI sur l’île de Mindanao, aux Philippines

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Micro et caméra à la main, de jeunes activistes sillonnent les townships

des grandes zones minières d’Afrique du Sud pour dénoncer un quotidien toujours plus sombre, malgré la fin de l’apartheid. Dans un langage direct, ils racontent les dégâts environnementaux causés par les mines, à commencer par la pollution des cours d’eau et des nappes phréatiques et les maladies dues aux produits chimiques – face à des compagnies qui récusent toute responsabilité.

« Depuis que Chaneng est devenue une zone minière, nous ne voyons que du dan-ger, écrit Tsholofelo Raphata. La terre fertile de nos grands-parents a été saisie sans aucune consultation digne de ce nom, ni compensation. Mais à qui donc appartient Chaneng ? » Et le chroniqueur de s’inquiéter des fortes vibrations qui fissurent les mai-sons et des maladies qui augmentent, tout

comme l’afflux de migrants et le chômage. Dans les récits de ces hommes et de ces femmes se retrouvent les problèmes sociaux de communautés oubliées : les intermi-nables files d’attente dans le seul hôpital des cinq townships ; la violence des rues et les viols récurrents ; les difficultés à se loger, les jeunes qui se droguent et boivent de plus en plus tôt pour oublier la détresse, l’ennui et le chômage… Et quand les habi-tants sont déplacés, cela devient encore pire. A Mmaditlhokwa, près de Marikana, pas de routes dignes de ce nom, d’électricité et d’eau courante. Quant à la mine de Tharisa, elle emploie surtout des travail-leurs migrants et favorise qui elle veut.

« Qui sont les véritables mineurs illégaux d’Afrique du Sud ? » se demande Pule Ledaka, après avoir réussi à filmer des hommes licenciés par les grandes compa-gnies minières – souvent pour des raisons

de santé qu’elles refusent de reconnaître –, parfois sans retraite ni dédommagement, et obligés de creuser illégalement la terre pour survivre ? Oubliés par les syndicats, brutalisés par la police, pointés du doigt par les médias traditionnels, ils ont accepté de se confier à ces chroniqueurs d’un autre genre, issus de leurs communautés et convaincus que la seule façon de les aider, c’était de raconter leur histoire.

Le rapport publié en août 2012 avait tiré la sonnette d’alarme sur les risques d’émeutes et de dégradation des condi-tions de vie à Marikana. Dix jours plus tard débutaient les émeutes qui ont fait 44 morts. Action Voices est aussi un acteur politique qui vise à favoriser l’organisation de ces communautés pour qu’elles dia-loguent avec les firmes et les poussent à respecter leurs engagements sociaux. IA

Depuis plusieurs années Pain pour le prochain soutien « Action Voices », un projet de la Bench Marks Foundation pour former des membres des communautés sud-africaines au journalisme, afin qu’ils puissent rendre compte, par leur propre voix, de leurs conditions de vie.

L’ACTION PAR LA VOIx

Dossier

Mineurs assemblés sur les collines de Marikana pendant la messe en souvenir des mineurs tués par la police

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Jo Seoka, l’esprit de Marikana

mobiLisationManifeste pour une gouvernance mondiale

Qui gouverne le monde ? Dans son dernier cahier, le Genevois Jean Rossiaud, sociologue de forma-tion et militant de longue date des mouvements sociaux et des principaux sommets onusiens, constate le besoin impérieux de créer un sys-tème politique global pour répondre aux immenses défis de l’humanité à l’ère de la mondialisation. Il appelle à la création d’un Etat mondial qui oppose un contrôle démocratique aux dominations impérialistes et à l’exploitation illimitée des ressources. L’instrument ? L’émer-gence d’un mouvement démocratique « cos-mopolitaire » qui s’appuierait sur les idées du mouvement social mondial, mais serait davan-tage un mouvement politique que social au sens strict. Un concept qui, aussi ambitieux soit-il, serait donc déjà en gestation.

Jean Rossiaud, Pour un mouvement démocra-tique cosmopolitaire, Forum pour une nouvelle gouvernance mondiale, novembre 2012

voYaGer UtiLeLa boussole du tourisme solidaire

Faut-il boycotter les pays qui violent les droits humains ou, au contraire, s’y rendre par solida-rité avec les citoyens opprimés ? Si la question a longtemps taraudé le voyageur responsable qui rêvait de se rendre en Birmanie, la réponse est loin d’être simple et univoque. Elle est pourtant abordée, avec une foule d’autres, par le Arbeitskreis Tourismus und Entwicklung (AKTE), une organisation suisse spécialisée dans le tourisme durable et soutenue, entre autres, par Pain pour le prochain : quelles sont les normes minimales en matière de travail, d’éthique, de politique de développe-ment, de droits humains, d’environnement et de culture à respecter pour que notre petit périple sous les tropiques profite aux populations locales et pas (seulement) aux tour-opérateurs occidentaux ? Un site internet fort utile pour ne pas perdre le nord, mais dont la section fran-çaise, malheureusement, reste sous-alimentée par rapport à la section allemande. Un bon tuyau de vacances surtout pour nos lecteurs bilingues, donc. Et un encouragement à AKTE à s’intéresser davantage aux voyageurs fran-cophones engagés !

http : //www. akte. ch/home/

En août 2012, le président de la Bench Marks Foundation a apporté un soutien sans faille à la grève des mineurs sud-africains. Portrait d’un homme qui croit au dialogue entre entreprises et communautés locales.

a DéCoUvrir

« L’extraction minière est cruciale pour le développement de notre pays et la

création d’emplois. Mais la plupart des res-sources ne profitent pas aux communautés. Lorsque les compagnies viennent pros-pecter, elles devraient consulter les gens », déclare à Une seule Terre Monseigneur Jo Seoka.

L’évêque anglican de Pretoria préside la Bench Marks Foundation, une orga-nisation à but non lucratif des Eglises sud-africaines, créée en son temps par l’ar-chevêque Desmond Tutu. Partenaire de Pain pour le prochain, elle se consacre à la promotion d’une culture d’investissement éthique et à la surveillance des activités des multinationales. Ses études montrent que les communautés locales s’opposent de plus en plus à l’extraction minière car elles en subissent les conséquences négatives. Le point culminant a été atteint en août 2012 à Marikana, lorsque 44 mineurs en grève ont été abattus par la police. Un massacre relayé par les médias du monde entier et lors duquel Jo Seoka s’était résolument rangé du côté des grévistes, en opérant une médiation avec Lonmin, la multinationale de la platine.

Eau contaminée, air pollué, maladies respi-ratoires et diminution des poissons dans les rivières : selon l’évêque, les compagnies devraient créer des fonds pour assainir l’environnement et promouvoir le dévelop-pement communautaire et l’éducation. « Elles affirment consulter les communau-tés, mais elles discutent seulement avec quelques chefs locaux qui ne s’intéressent qu’à leur enrichissement personnel. Parfois elles donnent même beaucoup d’argent, mais les gens n’en voient pas la couleur », s’emporte-t-il.

Pareil pour les impôts versés au gouverne-ment et aux autorités locales. « L’Afrique du

Sud est une nouvelle démocratie et elle cherche désespérément à attirer les inves-tisseurs, mais combien d’argent arrive aux gens ? La classe moyenne noire est passée de 1, 6 à 4 millions de personnes, mais il ne s’agit là que d’une poignée de privilégiés bien connectés. » Et si le gouvernement a sa part de responsabilité, les compagnies doivent assumer la leur aussi. « Le gouver-nement, les investisseurs et les commu-nautés doivent s’asseoir et discuter, par exemple des dégâts sur l’environnement qui persistent même après la cessation de l’extraction. »

La Bench Marks Foundation a développé des principes de surveillance des multina-tionales partagés par des Eglises de quatre continents. C’est donc tout naturellement que son président salue la campagne œcu-ménique 2011 que Pain pour le prochain avait menée sur le thème des matières pre-mières, ainsi que la campagne Droit sans frontières : « une initiative qui aurait dû voir le jour depuis longtemps. »

« J’ai grandi dans un pays où il y avait deux communautés distinctes : les Noirs et les Blancs, avec des églises pour les Noirs et des églises pour les Blancs. Nous avions le même Dieu, le même Evangile, mais nous étions divisés par nos lois. Je me suis demandé : est-ce cela l’Evangile ? » Sentant que Dieu lui demande d’être à côté des pauvres et des marginalisés, il se lance alors dans la bataille, autant religieuse que politique, pour l’intégrité humaine. « Avec Pain pour le prochain, nous partageons la croyance dans le même Dieu. Nous avons besoin d’organisations comme la vôtre pour nous soutenir moralement et finan-cièrement, nous aider à comprendre ce qui se passe dans les pays lointains et discuter des problèmes qui affectent toute l’humanité. » IA

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31 août9h30-17h : Conférence « Enracinement(s) ? Les migrations d’un point de vue théologique », Centre paroissial de St Paul, Freiestrasse 20, Berne

1er septembre18h-20h, Lausanne : Grande célébration œcuménique à la cathédrale de Lausanne, à l’occasion des dix ans d’existence de la Communauté des Eglises chrétiennes dans le canton de Vaud 15 septembreCollecte du Jeûne fédéral

24 septembre 18h-22h : Soirée publique « 10 ans de coopération au développementdans la Constitution vaudoise. Ça déménage ! » Casino de Montbenon, Lausanne

28 septembre A Crêt-Bérard, Ecologie et spiritualité : « L’homme, le jardinier de la création »

29 juillet au 9 aoûtPause d’été au secrétariat romand de Pain pour le prochain

24 octobre 201313h-18h : Conférence High Tech No Rights (HTNR)Des minerais du sang à une électronique « équitable »Hotel Kreuz, Zeughausgasse 14, BernInscription ouverte à tous auprès de [email protected]

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DimanChe DU JeUne feDeraL – 15 sePtembre 2013

Brésil – Des familles paysannes améliorent leurs revenus

Avenue du Grammont 9 – 1007 Lausanne

Tél. 021 614 77 17 – Fax 021 617 51 75

ppp@bfa-ppp. ch – www. ppp. ch

CCP 10-26487-1

Editeur : Pain pour le prochain

Rédaction : Isolda Agazzi, Anne-Lise Jaccaud Napi,

Chantal Peyer, Martina Schmidt,

Daniel Tillmanns, Ester Wolf

Corrections : Carine Huber Michoud

Graphisme : Corrado Luvisotto, Grafix, Fribourg

Impression : Imprimerie St-Paul, Fribourg

Prix de l’abonnement : 10 francs suisses

Tirage : 14 500 exemplaires

ISSN 2235-0780

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Au Brésil, le plus grand problème des petits paysans et pay-sannes reste l’accès à la terre. Dans le Cerrado, le deuxième écosystème après l’Amazonie, les ²⁄³ de la savane arborée ont été détruits pour faire place à des monocultures exten-sives. Dans cette région, deux cents familles ont cependant obtenu des droits collectifs sur deux réserves naturelles. Elles y cueillent traditionnellement des fruits et des plantes pour leur nourriture : pequí, macaúba, inajá, noix de barú… Pour préserver la végétation, seul un pourcentage des fruits peut être collecté depuis le sol, à l’aide d’outils adaptés.

Depuis plusieurs années, avec le soutien du Centre d’agro-écologie du Cerrado (CEDAC), les familles apprennent à transformer ces produits et à les commercialiser de manière équitable sous la marque Empório do Cerrado. Parallèlement, le CEDAC forme les paysans et les paysannes de la région à l’agroécologie. La culture de légumes et de plantes aroma-tiques leur permet de diversifier leur alimentation. C’est aussi une source de revenus bienvenue. Plus de 500 familles participent aujourd’hui à l’ensemble des activités du projet. Le dimanche du Jeûne fédéral, de nombreuses paroisses romandes s’engagent pour ce projet. Merci ! AJN

Projet No 422. 9026Pour en savoir plus : www. ppp. ch/dimancheJF

Le péqui, un fruit très ap-précié au Cerrado, agré-mente riz ou desserts

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10 ans de coopération au développement dans la constitution vaudoise, ça se fête !

A l’occasion du 10e anniversaire de l’inscription de la coopé-ration au développement dans la constitution vaudoise, la Fédération vaudoise de coopération (FEDEVACO) et ses associations membres, dont Pain pour le prochain, se retrouvent à Lausanne, le mardi 24 septembre (cf. agenda ci-dessous). Au menu de cette soirée riche en échanges : des débats, un film, des saveurs d’ici et d’ailleurs et bien d’autres animations, dont des dessins inédits de Barrigue réalisés en direct. En dix ans, quelles implications ici et là-bas ? L’ancrage du principe de la solidarité internationale s’est-il concrétisé sur le terrain ? Les autorités cantonales et communales s’engagent-elles dans ce domaine ? Avec la participation du président du Conseil d’Etat vaudois Pierre-Yves Maillard et de la Conseillère d’Etat Jacqueline de Quattro, ainsi que de personnalités politiques de tout bord. Entrée libre, sur inscription. Plus d’infos et programme détaillé sur www. fedevaco. ch Maxime Gindroz, FEDEVACO