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UNIVERSITÉ DU QUÉBEC À MONTRÉAL
GESTION ENVIRONNEMENTALE ET CAPACITÉ DE CHANGEMENT ORGANISATIONNEL À MINE RAGLAN
MÉMOIRE PRÉSENTÉ
COMME EXIGENCE PARTIELLE DE LA MAÎTRISE EN SCIENCES DE L'ENVIRONNEMENT
PAR JULIE BEAUCHEMIN
DÉCEMBRE 2007
UNIVERSITÉ DU QUÉBEC À MONTRÉAL Service des bibliothèques
Avertissement
La diffusion de ce mémoire se fait dans le respect des droits de son auteur, qui a signé le formulaire Autorisation de reproduire et de diffuser un travail de recherche de cycles supérieurs (SDU-522 - Rév.01-2006). Cette autorisation stipule que «conformément à l'article 11 du Règlement no 8 des études de cycles supérieurs, [l'auteur] concède à l'Université du Québec à Montréal une licence non exclusive d'utilisation et de publication de la totalité ou d'une partie importante de [son] travail de recherche pour des fins pédagogiques et non commerciales. Plus précisément, [l'auteur] autorise l'Université du Québec à Montréal à reproduire, diffuser, prêter, distribuer ou vendre des copies de [son] travail de recherche à des fins non commerciales sur quelque support que ce soit, y compris l'Internet. Cette licence et cette autorisation n'entraînent pas une renonciation de [la] part [de l'auteur] à [ses] droits moraux ni à [ses] droits de propriété intellectuelle. Sauf entente contraire, [l'auteur] conserve la liberté de diffuser et de commercialiser ou non ce travail dont [il] possède un exemplaire.»
REMERCIEMENTS
En premier lieu, j'offre un merci sincère et plein de gratitude à Jean-François Léonard, mon
directeur de recherche, qui m'a accompagnée tout au long de la rédaction malgré mes
absences prolongées et mon manque de disponibilité. Je Je remercie particulièrement de
m'avoir laissée étudier cette discipline, la gestion environnementale, qui m'était à peu près
inconnue sur le plan théorique avant que je ne m'y penche dans le cadre de ce mémoire. Un
merci tout aussi enthousiaste à Marie-France Turcotte qui, par son enseignement riche et
dynamique, a allumé en moi ce vif intérêt pour la gestion.
Merci aussi à Mine Raglan et, en particulier, à mon patron de l'époque, Joël Pagé, qui m'a
appuyée dans ma recherche en me laissant utiliser J'organisation comme cas d'étude. Je
remercie également les acteurs du changement de cette compagnie qui m'ont nourrie de leur
expérience et de leur connaissance de l' organisat ion.
En dernier lieu, merci à Philippe, mon amoureux qui, de loin ou de près, m'a encouragée à
chaque instant, à mes parents gui m'ont toujours soutenue dans mes entreprises ainsi qu'aux
membres de mon quatuor d'étude, Raphaëlle, Jean-Christophe et Cynthia, qui ont partagé
avec moi les moments d'excitation et de solitude, les joies et les frustrations de ces deux
années d'études.
TABLE DES MATIÈRES
TAB LE DES MATIÈRES iii
LISTE DES FIGURES ET TABLEAUX vi
LISTE DES ABRÉVIATIONS, SIGLES, ACRONYMES ET SYMBOLES vii
RÉSUMÉ viii
INTRODUCTION , 1
CHAPITRE 1 PROBLÉMATIQUE .4
1.1 L'industrie minière et la gestion environnementale .4
1.1.1 Vers la responsabilité sociale de l'entreprise minière ,4
1.1.2 Conséquences de l'éloignement des exploitations 6
1.2 Gestion environnementale et changement organisationnel 8
1.3 Pertinence d'une étude de cas relative au changement organisationnel 10
CHAPITRE Il ÉTAT DE LA QUESTION ET CADRE THÉORIQUE 12
2.1 Gestion environnementale et gestion du changement: des concepts liés 12
2.1.1 Notions de gestion environnementale 12
2.1.2 Définir le changement organisationnel 14
2.1.3 Facteurs de succès et d'échec du changement. 16
2.2 La réussite du changement: approches et théories 18
2.2.1 Rythme et profondeur du changement: évolutif ou révolutionnaire? 19
2.2.2 Degré de planification: changement planifié ou émergent? 21
2.2.3 Composantes de l'organisation affectées par le changement: culture, structure, stratégie? 22
IV
2.3 Construction d'un modèle de changement organisationnel 27
CHAPITRE III OBJECTIFS ET MÉTHODOLOGIE .35
3.1 Objectifs de l'étude 35
3.2 Énoncé des questions de recherche .36
3.3 Méthodologie de recherche 37
3.3.1 Stratégie de recherche 37
3.3.2 Unités d'analyse 38
3.3.3 Approche générale pour la collecte des données: la recherche-action participative 38
3.3.4 Sources de données et méthodes de collecte 40
3.3.5 Traitement des données .46
3.3.6 Validité, fiabilité et réactivité 47
CHAPITRE IV CAS D'ÉTUDE: MINE RAGLAN .49
4.1 Historique et particularités de Mine Raglan .49
4.2 Mine Raglan et la gestion environnementale .52
4.3 Les modèles de changement en vigueur à Mine Raglan 54
4.3.1 Processus de changement vécus par des agents 54
4.3.2 Le changement: comparaison des modèles empirique et théorique 62
4.3.3 Changement de nature environnementale: implantation d'un nouveau PGMR à Mine Raglan 68
4.3.4 Processus de changement: réponse à la première question de recherche 70
4.4 Facteurs de réussite et d'échec du changement à Mine Raglan: réponse à la deuxième question de recherche 75
4.4.1 Perception des récepteurs du changement 75
4.4.2 Perception des agents de changement.. 78
4.4.3 Comparaison des connaissances théoriques et pratiques 80
4.5 Forces et faiblesses de Mine Raglan en matière de changement organisationnel 83
4.5.1 Forces et faiblesses telles que perçues par les récepteurs 83
4.5.2 Performance des services responsables de l'implantation de changements telle que perçue par les récepteurs 85
4.5.3 Forces et faiblesses telles que perçues par les agents 87
v
4.5.4 Forces et faiblesses en matière de changement: réponse à la troisième question de recherche 100
CONCLUSION 110
APPENDICE A SOMMAIRES DES MODÈLES DÉVELOPPÉES PAR DIFFÉRENTS AUTEURS 115
A.I Modèles théoriques de changement organisationnel 116
APPENDICE B OUTILS DE COLLECTE DES DONNÉES 118
B.I Questionnaire d'entrevue 119
B.2 Information transmise aux sujets avant l'entrevue 122
B.3 Information transmise aux chercheurs avant le forum d'informateurs clés 121
LISTE DES RÉFÉRENCES 124
LISTE DES FIGURES ET TABLEAUX
Figures Page
2.1 Modèle théorique de changement organisationnel....................... .... 34
4.1 Localisation des sites de Mine Raglan............................... ...... .... 51
4.2 Modèle théorique de changement organisationnel corrigé et applicable à la mine Raglan.................................................... 72
Tableaux
3.1 Comparaison de la composition de la population étudiée et de l'échantillon interviewé......................................................... 42
4.1 Comparaison des sept cas de changements vécus par différents services de Mine Raglan........................................................ 61
4.2 Comparaison des modèles de changement théorique tiré de la littérature et empirique tiré de l'expérience des agents de changement de Mine Raglan................................................... 65
4.3 Facteurs de réussite ou d'échec du changement tels qu'énoncés par 34 récepteurs de changement.......................................... ..... 77
4.4 Facteurs de réussite ou d'échec du changement tels qu'énoncés par sept agents de changement............................................. ..... 79
A.1 Modèles théoriques de changement organisationneL................... ....... 116
3RV
ARK
CCCPP
CQEK
CSMOE
km
Ltée
MDDEP
MW
ONG
PGMR
REMM
RETIC
SGE
LISTE DES ABRÉVIATIONS, SIGLES, ACRONYMES ET SYMBOLES
Réduction, réutilisation, recyclage et valorisation
Administration Régionale Kativik
Comité Conjoint de Chasse Pêche et Piégeage
Commission de la Qualité de l'Environnement Kativik
Comité sectoriel de main d'œuvre en environnement
Kilomètre
Limitée
Ministère du Développement durable de j'environnement et des parcs
Mégawatt
Organisation non gouvernementale
Plan de gestion des matières résiduelles
Règlement sur les effluents des mines de métaux
Raglan employment and technical training committee
Système de gestion environnementale
RÉSUMÉ
Le présent mémoire s'appuie sur une étude de cas menée à la mine Raglan. Il vise à évaluer sa capacité de changement organisationnel en se basant sur les témoignages des acteurs du changement, c'est-à-dire les personnes qui l'implantent (les agents) et celles qui doivent l'appliquer (les récepteurs). Ces témoignages ont permis de éerner les modalités de changement organisationnel propres à cette entreprise minière, les facteurs de réussite et d'échec de ces mêmes changements ainsi que les forces et les faiblesses qui en affectent la réalisation. On souhaitait également déterminer les défis spécifiques auxquels l'entreprise étudiée est confrontée dans ses processus de changement en raison de ses caractéristiques propres, notamment son isolement géographique dans un milieu extrême. Enfin, nous voulions utiliser ces constats pour fonnuler des recommandations afin que Mine Raglan soit en mesure de mener à bien des projets de changement actuels et futurs tels que l'implantation de son nouveau plan de gestion des matières résiduelles (PGMR).
Grâce à des entrevues menées auprès de récepteurs du changement, à des exemples de changements vécus par sept agents de différents niveaux hiérarchiques à Mine Raglan et à l'observation participante et documentaire, trois questions de recherches ont été abordées. D'une part, nous voulions savoir si les processus de changement vécus par ]a mine Raglan suivaient les phases et les étapes décrites dans un modèle théorique tiré de la littérature et appliqué à notre étude. Nous souhaitions également décrire les facteurs de réussite et d'échec du changement ressentis par les acteurs de Mine Raglan et déterminer si ces derniers sont comparables à ceux que la littérature avait relevés. Enfin, J'étude visait à déceler les forces et les faiblesses de l'organisation en matière de changement et à proposer des recommandations pour soit en tirer profit, soit les surmonter.
Nous avons conclu que même si les changements vécus à Mine Raglan ne sont pas calqués sur le modèle théorique, l'organisation a su développer une assez bonne capacité de changement. Nous sommes aussi d'avis que cette capacité peut être accrue si, d'une part, cette société minière applique le modèle de changement qui a été construit pour elle et si, d'autre part, elle donne suite aux recommandations formulées. Nous affirmons enfin que cette amélioration pourrait lui permettre d'augmenter sa perforn1ance environnementale par une gestion plus efficace du changement, notamment dans le domaine de la gestion des matières résiduelles ainsi que dans le cadre de l'implantation de son nouveau PGMR.
Mots clés: changement; organisation; gestion; environnement; mine.
INTRODUCTION
Il est loin le temps où l'exploitation minière se faisait au pic et à la pelle. En Occident, on a
vu s'opérer une grande transformation de cette industrie dans la seconde moitié du 20e siècle.
Méthodes et équipements de travail, conditions d'emploi, mesures pour assurer la sécurité
des travailleurs et la protection de l'environnement sont apparus pour modifier le paysage
minier. Même si ces changements sont majeurs, l'industrie minière est aujourd'hui encore en
pleine transformation.
Pendant que s'observe la croissance de l'industrie min ière, les parties prenantes telles les
communautés locales, les gouvernements et le public en général, manifestent de plus en plus
leurs préoccupations et imposent leurs exigences en matière de responsabil ité sociale et
environnementale de ce type d'entreprise. Par ailleurs, des facteurs comme la rareté de la
ressource et les développements technologiques incitent aujourd'hui les exploitations
minières à s·éloigner encore plus des centres urbains. Ces phénomènes apportent à l'industrie
minière son lot de défis logistiques et organisationnels. Certaines mines doivent aujourd·hui
opérer dans le respect et avec l'accord des communautés autochtones dont elles se
rapprochent; de même, l'ensemble de l'industrie doit composer avec de nouvelles
responsabilités, normes et législations environnementales. Il en découle une complexification
de la gestion environnementale pour le monde minier.
Pour ces raisons, le secteur minier québécois a adopté de nouvelles pratiques de gestion
environnementale pour accroître sa performance en la matière. Cependant, qui dit gestion
environnementale dit aussi changements organisationnels; par conséquent les programmes
environnementaux constituent aujourd'hui de nouveaux défis de changement pour
l'entreprise. L'écochangement corporatif ou l'éco-innovation, soit le changement
organisationnel visant l' amél ioration de sa performance environnementale, fait partie de la
2
réalité des entreprises d'aujourd'hui et l'on s'accorde généralement pour dire que
perfonnance environnementale et capacité de changement sont positivement corrélées.
Dans le cadre de la présente recherche, nous nous sommes donc intéressée aux défis que pose
la gestion du changement afin de détenniner dans quelle mesure une organisation peut
implanter efficacement des programmes environnementaux et ainsi augmenter sa
performance en la matière. Pour ce faire, nous avons choisi d'étudier le cas de la mine Raglan
qui procède actuellement à l'implantation graduelle d'un nouveau plan de gestion des
matières résiduelles (PGMR).
Par des entrevues menées auprès des individus qui doivent appliquer les changements
demandés (les récepteurs) et grâce à des informations recueillies auprès de ceux qui les
développent et les implantent dans les divers secteurs de l'organisation (les agents), nous
dressons un portrait de la capacité de changement organisationnel de Mine Raglan. Ce
diagnostic se développe en trois points:
• Quelles sont les étapes retenues par Mine Raglan pour procéder au changement et
quel modèle devrait-elle mettre en application pour devenir plus performante en la
matière?
• De l'avis des récepteurs et des agents de changement de Mine Raglan, quels sont les
principaux facteurs de succès et d'échec du changement?
• D'après le diagnostic posé par les récepteurs et les agents, quelles sont les principales
forces et faiblesses de l'organisation en matière de changement?
Cette description empirique de notre cas d'étude s'effectue en comparaIson avec les
connaissances théoriques tirées de la littérature scientifique. Ainsi, après avoir décrit la
problématique de recherche au chapitre I, nous procédons au chapitre II à une revue de la
littérature sur laquelle s'appuie notre recherche. Cet état des connaissances permet de définir
ce qu'est le changement organisationnel ainsi que les angles sous lesquels il peut se présenter.
Ce chapitre regroupe aussi les facteurs de succès ou d'échec du changement qui sont signalés
par différents experts de la gestion du changement. Enfin, on y présente aussi un amalgame
des modèles de changement organisationnel proposés par différents auteurs.
3
Au chapitre 1JI, nous exposons la méthodologie de recherche employée pour finalement
présenter notre cas d'étude au chapitre IV. Nous répondons là à nos trois questions de
recherche pour finalement proposer à Mine Raglan des pistes de solutions pour améliorer sa
capacité de changement. Bien que ces conclusions ne soient pas généralisables à d'autres
entreprises, nous sommes d'avis que l'expérience de Mine Raglan peut être utile à tout
gestionnaire de l'environnement désireux d'aborder ('éco-innovation avec plus d'efficacité.
CHAPITRE l
PROBLÉMATIQUE
1.1 L" industrie minière et la gestion environnementale
J.1.1 Vers la responsabilité sociale de l'entreprise minière
De longue date, d'importants problèmes environnementaux ont été associés à l'exploitation
minière, traditionnellement caractérisée par des pratiques irresponsables sur les plans
environnemental et social (Jenkins, 2004). La mauvaise gestion des eaux et des sols
contaminés, J'abandon des parcs à résidus miniers ainsi que la perturbation du tissu social et
du milieu naturel des communautés locales sont devenus les problèmes environnementaux les
plus répandus de cette industrie.
Depuis la fin du 20e siècle, l'industrie minière se trouve confrontée à une augmentation des
critiques (Jenkins, 2004) et à de nouvelles attentes sociales et environnementales de la part
des communautés d'intérêts liées aux divers projets miniers. Ce secteur industriel prend de
plus en plus d"ampleur en raison du nombre de mines en exploitation, de la superficie des
territoires qu'elles affectent, de leur importance économique et dc la demande mondiale en
métaux qui ne cesse de croître. Ces facteurs augmentent la visibilité des mines, ce qui suscite
de plus en plus de préoccupations au sein de la société civile (Kemp, 2005). En plus des
communautés locales, les organisations non gouvernementales (ONG) nationales et
internationales s'impliquent maintenant dans les débats entourant J'ouverture de nouvelles
mines. Cela a notamment été le cas lors de la planification de l'exploitation minière du projet
Antamina au Pérou (Lambert-Pilotte, 2006; Pratt, 2001). Au fil du temps, il est donc devenu
5
nécessaire pour les compagnIes minières de porter attention à leurs impacts socIaux et
environnementaux (Jenkins, 2004) et d'adopter une approche transparente et ouverte à
l'égard des communautés locales, des gouvernements et du public en général (Kemp, 2005).
Même le consommateur s'intéresse de plus en plus à la provenance des métaux composant
les produits qu'il achète et s'interroge sur les conditions de leur extraction (Abbott et Arman,
1998). Aujourd'hui, ces diverses requêtes ne peuvent être ignorées. En effet, l'image de
l'entreprise et sa capacité à se développer ou à s'implanter dans de nouveaux lieux
d'exploitation est de plus en plus liée à sa capacité à tenir compte des besoins fonctionnels et
émotionnels de l'ensemble de ses parties prenantes, c'est-à-dire à maintenir une relation
d'affaire tout en s'impliquant personnellement et humainement avec chacune d'elles. Deux
signaux d'alarme du déclin d'une organisation seraient donc sa négligence à l'égard de
certaines de ses parties prenantes ainsi que la perte de contact émotionnel avec elles (Sheth et
Sisodia, 2005).
L'augmentation de la conscIence et des connaIssances environnementales du public, la
transformation générale de ses valeurs, l'apparition du consommateur vert, l'activisme de la
population et de groupes de pression de même que la mondialisation des enjeux
environnementaux et l'apparition de nouveaux outils législatifs, litiges environnementaux,
normes et instntments économiques favorisant les pratiques vertes sont autant de pressions
exercées sur ce secteur industriel par les parties prenantes. Ces pressions se manifestent avec
de plus en plus de force et encouragent l'adoption de pratiques plus respectueuses de
J'environnement (Schrader, 1995). Par conséquent, les entreprises minières doivent
maintenant avoir la capacité non seulement de répondre aux nouveaux standards
d'exploitation mais aussi d'anticiper ceux à venir afin de conserver ou d'obtenir leur droit à
l'exploitation d'un territoire (Kemp, 2005). Cette nouvelle orientation a mené à l'adoption de
stratégies misant sur le développement durable et la responsabilité sociale de l'entreprise, afin
de faire concorder besoin de rentabilité avec obligations communautaires et
environnementales (Jenkins, 2004).
6
1.1.2 Conséquences de l'éloignement des exploitations
Les sociétés minières sont aujourd'hui plus attentives au fait que la proximité entre une
population indigène et l'exploitation d'une mine peut engendrer des frictions et des pressions
sur l'entreprise pour qu'elle adopte des pratiques plus respectueuses de l'environnement dans
lequel elle évolue. On constate aussi que Je milieu social, naturel et géographique dans lequel
s'insèrent les compagnies minières s'est modifié avec le temps. Grâce aux développements
technologiques et en raison de la raréfaction des ressources, il est devenu possible et rentable
pour l'industrie de poursuivre son développement dans des régions de plus en plus éloignées
et isolées de même que dans des milieux aux conditions toujours plus extrêmes (Jenkins,
2004). Souvent, ces régions abritent aussi des écosystèmes particulièrement fragiles et
vierges. Les mines, comme les plateformes de forage pétrolières, repoussent sans cesse leurs
limites géographiques. Si elles peuvent compter sur des technologies de télécommunication
performantes et sur des équipements mieux adaptés aux conditions climatiques extrêmes
auxquelles elles font face, les défis organisationnels, eux, demeurent bien présents mais peu
considérés par les chercheurs des domaines de la gestion ou des sciences de l'environnement.
D'une part, avec l'éloignement des exploitations minières se produit souvent un
rapprochement avec des communautés traditionnellement isolées. Pour celles-ci, l'arrivée de
J'industrie est porteuse d'un choc culturel et de l'inquiétude de voir polluer l'environnement
sur lequel leurs traditions et une partie de leur subsistance sont basées. Qui plus est, ces
communautés sont aujourd'hui mieux structurées sur le plan politique et ont généralement
accès à des conseillers chargés de veiller à la sauvegarde de leurs intérêts. Tel que mentionné
précédemmen t, l'industrie minière n'a plus le loisir de négliger les préoccupations soulevées
par les habitants des territoires sur lesquels elle souhaite intervenir. Whiteway (1995) soulève
d'ailleurs que les développements miniers en territoires autochtones doivent aujourd'hui
prévoir la formation et l'embauche de membres des populations locales en plus d'assurer une
saine gestion environnementale et de négocier J'usage du territoire. Ces considérations
viennent s'additionner aux lois et règlements environnementaux en vigueur dans le pays hôte,
augmentent les standards à respecter et complexifient donc la gestion environnementale des
mmes.
7
D'autre part, cette complexité est aussi accrue par l'autonomie que doivent développer les
compagnies évoluant en milieu isolé. Alors qu'elles se rapprochent des communautés
autochtones, les mines s'éloignent par le fait même des centres urbains pourvoyeurs de
services. Elles se trouvent dès lors à gérer nombre d'aspects environnementaux qui
incombent normalement aux municipalités ou à des compagnies privées spécialisées. C'est
par exemple le cas du traitement de l'eau potable, des eaux usées domestiques ou des
matières résiduelles non dangereuses. L'apparition de ces nouvelles responsabilités force
l'industrie minière à se doter des moyens techniques d"y répondre el vient alourdir la
réglementation à laquelle elle doit déjà se soumettre.
Ainsi, en plus d'être assujetties à la Directive 019 (s'adressant spécifiquement aux mines) du
ministère du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs du Québec (MDDEP),
et au Règlement sur les effluents des mines de métaux (REMM) du gouvernement fédéral,
plusieurs mines sont aujourd'hui tenues de se soumettre à des réglementations
environnementales qui ne sont pas spécifiques à leur domaine. La plupart d'entre elles,
particulièrement celles qui sont éloignées d'un centre urbain, doivent se soumettre à des
règlements supplémentaires, comme ceux portant sur l'enfouissement et j'incinération de
matières résiduelles, sur la qualité de J'eau potable ou sur l'évacuation et le traitement des
eaux usées des résidences isolées. La gestion environnementale des exploitations minières
s'en trouve élargie et complexifiée. D'ailleurs, une grande enquête menée par le Comité
sectoriel de main-d'œuvre de l'environnement (CSMOE) et portant sur la gestion
environnementale dans les entreprises du Québec a démontré que la diligence raisonnable et
la réglementation arrivent en tête des facteurs menant à l'adoption de pratiques de gestion
environnementale. Dans le même ordre d'idée, Sheth et Sisodia (2005) confirment, quant à
eux, que la réglementation est le facteur propulsant le changement organisationnel avec le
plus de rapidité. Post et Altman (1994) soulignent aussi que ce sont principalement les lois et
règlements et les incitatifs financiers qui poussent les entreprises à adopter des pratiques plus
propices au respect de l'environnement. Tous ces exemples nous portent à conclure que
l'augmentation du nombre de règlements à respecter avec l'éloignement des mines motiverait
de façon importante l'adoption de nouvelles pratiques de gestion environnementale.
8
1.2 Gestion environnementale et changement organisationnel
On a vu comment l'évolution des préoccupations environnementales, la proximité
grandissante des communautés autochtones et l'augmentation des responsabilités
environnementales due à l'isolement de certaines mines et au resserrement de la
réglementation ont encouragé l'industrie minière à tourner ses modèles de gestion vers des
pratiques plus socialement responsables. D'ailleurs, l'étude du CSMOE (1999) révèle que le
secteur minier fait aujourd'hui partie des secteurs industriels québécois les plus avancés en
matière de gestion et d'engagement environnemental. Qui plus est, parmi les entreprises
québécoises, celles du secteur de la métallurgie, des mines et des métaux démontrent les plus
hauts niveaux de gestion environnementale. En effet, 75,0% d'entre elles se seraient dotées
de politiques, normes ou procédures environnementales et, dans 47,5% des cas, d'un service
interne de gestion environnementale (CSMOE, 1999). L'importante réglementation à laquelle
est soumise cette industrie au Québec a fort probablement contribué à l'amélioration de ses
pratiques de gestion. Bien que l'industrie minière dans le monde ne soit pas encore un
modèle en la matière, on retiendra pour la présente étude que les mines actives situées en
territoire québécois ont, règle générale, fait le choix d'une saine gestion environnementale
leur permettant d'accroître progressivement leur performance en la matière.
Or, la gestion environnementale et le principe de l'amélioration continue, soit l'accroissement
progressif de la performance environnementale d'une organisation par la mise en place et le
maintien d'un système de gestion et par l'atteinte d'objectifs et de cibles environnementaux,
supposent la réalisation de changements organisationnels sur une base régulière. Si la
performance environnementale peut parfois être accrue par des ajouts technologiques en fin
de procédé pour traiter les rejets (end 0/pipe technologies), on tente aujourd'hui d'agir aussi
à la source du problème. C'est d'ailleurs la méthode que prône Boiral (2005); il est d'avis
que les technologies palliatives n'encouragent pas les opérateurs d'une industrie à se soucier
des impacts environnementaux de leur travail. Selon lui, des approches préventives doivent
être mises de J'avant afin de compléter les outils technologiques et de réduire les émissions à
la source par des modifications des processus industriels, incluant le comportement des
opérateurs. Cependant, cette approche exige des changements organisationnels beaucoup plus
9
importants que le recours à la technologie et l'organisation doit par conséquent accroître ses
aptitudes en la matière.
Quelques auteurs se sont d'ailleurs intéressés à la mise en place de programmes
environnementaux ou de systèmes de gestion environnementale en tant que processus de
changement organisationnel (Blum-Kusterer et Hussain, 2001; Georg et Fussel, 2000;
Jorgensen, 2000; Judge et Elenkov, 2005; Lyon, 2004; Post et Altman, J994; Schrader,
1995). Des appellations spécifiques à cette réalité comme « écochangement corporatif» 1 ou
éco-innovation ont d'ailleurs été proposées pour décrire des modifications apportées à la
production ou à tout autre étape du cycle de vie d'un produit qui en diminuent l'impact sur
J'environnement naturel ou en augmentent l'équité intra- ou intergénérationnelle (Blum
Kusterer et Hussain, 2001).
Parmi les chercheurs s'étant penché sur la question, certains sont d'avis que la performance
environnementale d'une organisation est positivement corrélée à sa capacité de changement
(Jorgensen, 2000; Judge et Elenkov, 2005). C'est ce qu'ont démontré Judge et Elenkov
(2005) à l'occasion d'une vaste étude empirique menée sur des firmes bulgares. Jorgensen
(2000, p.60) affirme quant à lui que « La capacité de changement d'une organisation est
cruciale à l'établissement d'un système de gestion environnementale dynamique et à
l'accomplissement d'améliorations environnementales continues »2. Hoffman (2000, p.181)
affirme de son côté que « le changement organisationnel est une composante critique d'une
stratégie environnementale efficace »3. Post et Altman (1994) sont aussi d'avis que les efforts
de gestion d'une entreprise pour améliorer sa performance environnementale se heurtent à
des barrières organisationnelles qui affectent sa capacité de gérer tout type de changement,
incluant ceux d'ordre environnemental. Si J'entreprise parvient à amoindrir cet obstacle, sa
capacité d'augmenter sa performance environnementale s'en trouve accrue. Par conséquent,
1 « Corporate eco-change» (Blum-Kusterer et Hussain, 2001). 2 « The organizations' ability to change is crucial in order to establish a dynamic environmenlaJ management system and to achieve continuous environmental improvements.» (Jorgensen, 2000, p.60) 3 « [ ... ] organisational change is a critical component of effective environmental strategy. » (Hoffman, 2000, p.18l)
10
l'amélioration de la performance environnementale d'une entreprise passerait entre autres par
l'amélioration de sa gestion du changement.
1.3 Pertinence d'une étude de cas relative au changement organisationnel
À l'instar de Martin, Jones et Callan (2006) nous sommes d'avis que l'implantation efficace
et réussie de changements organisationnels passe par la compréhension et la prise en
considération des caractéristiques façonnant la capacité de changement d'une organisation.
Pour y parvenir, l'entreprise doit réfléchir à ses particularités et émettre un diagnostic de sa
capacité de changement organisationnel. C'est ce que nous nous proposons d'effectuer par la
présente étude d'un cas d'entreprise, celui de Mine Raglan, qui amorce actuellement un
processus de changement organisationnel visant l'amélioration de sa performance
environnementale. À terme, l'étude proposera non seulement un diagnostic, mais aussi des
moyens d'améliorer la capacité de changement de l'entreprise. Ces recommandations seront
par la suite mises en pratique dans le cadre de l'implantation du nouveau PGMR de la mine
Les travaux en cours à Mine Raglan pour intégrer les principes de réduction, réutilisation,
recyclage et valorisation (3R-V) à la gestion de ses matières résiduelles s'inscrivent dans un
processus de changement évolutif visant l'amélioration continue de sa performance
environnementale. Bien que ce changement ne s'attaque pas aux structures profondes de
l'organisation, mais à un processus en particulier, il affectera tout de même l'ensemble des
activités se déroulant sur le site de la mine et touchera par conséquent tous les secteurs. Ainsi,
cette période de planification et d'implantation d'un changement de grande ampleur au sein
de l'organisation s'avère un cas d'étude intéressant pour évaluer les obstacles et les leviers du
changement au sein d'une entreprise.
À travers les premières étapes de mise en œuvre du PGMR et à J'aide d'un retour sur des
changements réalisés dans le passé au sein de l'organisation, la présente étude posera un
regard critique sur les facteurs pouvant mener à la réussite ou à l'échec de changements dans
le cas spécifique de Mine Raglan. Il sera ainsi possible de tester un modèle théorique de
changement orgnnisationnel développé pour notre étude et d'en tirer des leçons pour faciliter
Il
les changements à venir au sein de cette organisation ou d'autres entreprises du secteur
minier partageant des similitudes avec le cas de cette société minière.
L'analyse du cas choisi sera fondée sur les connaIssances théoriques portant sur le
changement organisationnel qui sont décrites au chapitre II. Nous proposerons d'abord des
définitions pour les différents concepts liés au changement organisationnel et à la gestion
environnementale. Les facteurs théoriques de succès ou d'échec du changement seront
également énumérés. On verra par ailleurs que le changement peut être caractérisé par son
rythme d'implantation et degré de profondeur, son degré de planification ou de spontanéité et
enfin par la composante de l'organisation sur laquelle il agit. Nous énoncerons enfin les
étapes à suivre pour mener à bien une expérience de changement organisationnel en
amalgamant différents modèles proposés dans la littérature.
CHAPITRE II
ÉTAT DE LA QUESTION ET CADRE THÉORlQUE
2.1 Gestion environnementale et gestion du changement: des concepts liés
2.1.1 Notions de gestion environnementale
On l'a vu au chapitre précédent, la gestion environnementale et la mIse en place de
programmes visant à améliorer la performance environnementale de l'entreprise ne sont pas
étrangères au concept de changement organisationnel. Dans un premier temps, on doit donc
se demander si la théorie générale du changement organisationnel peut s'appliquer à un
domaine spécifique comme celui de la gestion environnementale. Gère-t-on les programmes
environnementaux comme n'importe quel type de changement ou, au contraire, des règles
spécifiques s'appliquent-elles à l'éco-innovation? Malheureusement, peu de recherches
semblent avoir eu pour objectif de démontrer que les changements de nature
environnementale peuvent être gérés comme tout autre changement organisationnel. Tous les
auteurs consultés appliquent d'ailleurs sans distinction les théories générales du changement
organisationnel à des exemples spécifiques comme l'éco-innovation. À titre d'exemple,
certains auteurs comme Post et Altman (1994) ont choisi d'aborder les préoccupations
environnementales de l'entreprise comme des défis analogues à la gestion de la qualité de sa
production. Ils ont donc eu recours aux théories classiques du changement organisationnel
pour analyser des changements de type éco-innovation.
Malgré J'absence de démonstration claire que les théories du changement organisationnel
s'appliquent à l'éco-innovation, il a été décidé d'adopter la position de Post et Altman (l994)
13
et de présumer que les changements de tout ordre se traitent de la même façon, qu'il s'agisse
de gestion environnementale ou non. Nous verrons d'ailleurs au cours de ce chapitre que les
facteurs de réussite ou d'échec du changement ne varient pas en fonction de sa thématique,
mais bien en fonction de l'état de l'organisation (son vécu en matière de changement, sa
culture, ses aptitudes à la communication, la qualité de ses leaders, etc.).
Ceci étant dit, on doit dans un deuxième temps s'attarder à la clarification de certains
concepts auxquels nous référerons régulièrement. Il importe d'abord de s'entendre sur la
définition donnée à la notion de gestion environnementale. Ainsi, Gendron (2004, p.59)
affirme qu'elle
[... ] constitue un outil pennettant à l'entreprise de contrôler et de réduire les impacts environnementaux de ses opérations. Il ne s'agit pas de gérer ['environnement, mais bien d'intégrer aux fonctions de gestion traditionnelles de nouveaux paramètres écologiques définis dans le cadre de politiques publiques de gestion de J'environnement.
La notion de gestion environnementale ne se définit donc pas de la même façon que celle de
gestion de l'environnement. La première correspond aux processus de gestion internes de
l'entreprise qui s'attaquent aux conséquences environnementales de ses activités. La
deuxième s'actualise plutôt par des politiques publiques qui voient à organiser, réglementer et
contrôler la pollution et l'exploitation des ressources naturelles dans une perspective globale
(Gendron,2004).
Dans le cadre de leur gestion environnementale, les finnes pourront mettre en œuvre des
programmes environnementaux qui viseront l'atteinte d'objectifs et de cibles d'amélioration
de leur perfonnance en la matière. Ces outils nécessitent le repérage de responsables, de
moyens et d'échéanciers de réalisation des actions à entreprendre (Gendron, 2004). Ils sont
donc intimement liés à la fois aux modalités de production de l'entreprise et aux processus de
changement organisationnel. Le PGMR de Mine Raglan constitue d'ailleurs un exemple de
programme environnemental qui permettra d'étudier le changement au sein de cette
organisation.
14
Un autre concept lié au changement organisationnel est celui de performance
environnementale. Il s'agit ici de la performance d'une organisation mesurée sous l'angle de
sa conformité à la réglementation environnementale, du contrôle de ses impacts
environnementaux et d'atteinte des cibles environnementales que l'entreprise s'est elle-même
fixée par ses objectifs et ses politiques en réponse à des pressions internes ou externes
(BoiraI, 2005; Gendron, 2004). La performance environnementale correspond donc aux
« résultats écologiques de l'engagement (ou de l'absence d'engagement) d'une entreprise à
préserver et à protéger J'environnement naturel »4 (Judge et Elenkov, 2005, p.895).
2.1.2 Définir le changement organisationnel
Quant au concept de changement organisationnel, Beaudoin (1990) le présente comme un
ajustement, une adaptation ou une transformation vécus par une entreprise. Selon Burke
(2002), le changement expérimenté par une organisation est généralement non planifié,
graduel et sert la plupart du temps à effectuer de légers réglages (fine-tllning). Dessler, Starke
et Cyr (2004) ajoutent que la planification des changements est de moins en moins possible
en raison du rythme auquel ils surviennent dans les organisations actuelles. Qui plus est,
Burke (2002) enseigne qu'il est évolutif dans 95% des cas, c'est-à-dire qu'il se manifeste par
des améliorations et des étapes incrémentales visant à régler un problème ou à changer une
partie d'un système pour atteindre une performance supérieure. Les notions de changement
incrémenta! ou radical, évolutif ou révolutionnaire seront abordées plus tard à l'intérieur de
ce chapitre.
Quoi qu'il en soit, l'expérience nous apprend que le changement se manifeste la plupart du
temps en réaction à une pression ou à une modification économique, technologique ou
politique provenant de l'environnement externe de l'entreprise (Burke, 2002). En d'autres
termes, l'organisation et sa culture doivent s'adapter à la modification de l'environnement
externe (Aquila, 2006) afin de pouvoir survivre (Sheth et Sisodia, 2005). On a vu
précédemment que les pressions politiques de la part des communautés, ONG et
gouvernements sont des motivations particulièrement importantes dans les cas de
4 « Environmental performance is the ecological results of an organization-wide commitment (or noncommilment) to preserve and protect the natural environment » (Judge et Elenkov, 2005, p. 895).
15
changements d'ordre environnemental. Wezel et Saka-Helmhout (2005) poussent la réflexion
plus loin en affinnant que selon la théorie comportementale de l'entreprise, le besoin de
changement survient lorsqu'un écart est observé entre le D\veau de performance de
l'organisation et le niveau auquel elle aspire. Or, ce sont justement les modifications de
l'environnement externe (réglementation, conscientisation de la population, etc.) qui
influencent les aspirations de l'entreprise quant à son niveau de performance
envirOlmementale. Ultimement, ce désire de performance doit se réaliser par la modification
du comportement de l'entreprise à travers un processus de changement organisationnel.
Associé au changement organisationnel, se trouve également le concept de gestion du
changement que Moran et Brightman (2001, p.lll cité dans Todnem, 2005, p.369)
définissent comme étant « le processus de renouvellement continuel de la direction, de la
structure et de la capacité d'une organisation à rencontrer des besoins changeants de clients
externes et internes »5 qu'on pourrait aussi définir comme parties prenantes. Le changement
est donc présent à tout moment de la vie d'une organisation, tant au niveau stratégique
qu'opérationnel. Celle-ci doit constamment se demander quels changements lui sont
nécessaires et comment les réaliser. C'est là l'essence de la gestion du changement. De plus,
stratégie et changement organisationnels sont indissociables et par conséquent savoir gérer le
changement est une aptitude recherchée de tout gestionnaire (Todnem, 2005) dont ceux
œuvrant dans la sphère environnementale.
Pour les besoins de la présente étude, nous avons retenu la tenninologie agent de changement
pour désigner un gestionnaire attitré à la réalisation d'un changement en pal1iculier. Nous
avons aussi adopté l'expression récepteurs du changement pour représenter l'ensemble des
individus d'une organisation qui subissent ou doivent intégrer le changement proposé par
l'agent. La notion d'acteurs du changement désignera quant à elle à ces deux groupes.
5 « the process of continually renewing an organization' s direction, structure, and capabilities to serve the ever-changing needs of external and internaI customers »(Moran et Brightman, 2001, p. 111 cité dans Todnem, 2005, p. 369).
16
2.].3 Facteurs de succès et d'échec du changement
L'aptitude d'un individu à gérer le changement et la capacité d'une organisation à l'implanter
sont influencées par nombre de caractéristiques d'une entreprise. L'étude du changement
organisationnel concerne donc ces facteurs qui semblent mener systématiquement à l'échec
ou à la réussite efficace du changement. L'efficacité est ici fondée sur la réalisation des
changements tels qu'ils ont été désirés et planifiés (Burke, 2002) afin que J'organisation
puisse s'adapter aux menaces ou aux opportunités survenant dans son environnement (Judge
et Elenkov, 2005).
Nombre d'auteurs se sont proposés d'énumérer les facteurs de succès et d'échec du
changement au sein d'une organisation. Pour la présente étude, 19 publications ont été
analysées (Armenakis et Harris, 2002; Atkinson, Schaefer et Viney, 2000; AxeJrod el al.,
2006; Burke, 2002; Dessler, Starke et Cyr, 2004; Florida et Davidson, 2001; Hoffman, 2000;
Ives, 2005; Judge et Elenkov, 2005; Karacsony, 2006; Lyon, 2004; Madsen et Gigy, 2005;
Martin, Jones et CaBan, 2006; Maurer, 2005; O'Connor et Fiol, 2006; Post et Altman, 1994;
Ramus, 2001; Reverdy, 2006; Schrader, ] 995) afin de présenter ici une liste des principaux
obstacles et leviers du changement organisationnel rencontrés dans la pratique:
Facteurs d'échec:
• résistance politique de la part de certains récepteurs qui sentent que le pouvoir et
l'influence qu'ils exercent au sein de l'organisation sont menacés par le changement;
• résistance de certains récepteurs due à la peur de l'inconnu;
• résistance de certains récepteurs due à la modification de leurs habitudes;
• résistance aveugle de la part de récepteurs refusant systématiquement tout
changement proposé;
• résistance idéologique de la part de récepteurs s'opposant au changement proposé de
façon réfléchie et honnête;
• agent de changement refusant de voir ou de tenir compte de la résistance rencontrée;
17
• cynisme et manque de confiance des récepteurs envers l'organisation en raison des
tentatives de changement antérieures ayant échoué et entraîné une diminution de la
crédibilité de l'organisation en matière de changement;
• barrières de l'industrie: l'organisation est aux prises avec les procédés traditionnels
de son industrie, J'inertie de celle-ci et la pression de compétition;
• mauvaises stratégies de l'agent de changement;
• manque de ressources pour implanter le changement;
• sentiment d'urgence insuffisant parce que l'entreprise semble bien se porter et que le
besoin de changement n'est pas bien communiqué.
Facteurs de succès:
• présence d'un ou de plusieurs leaders ou d'agents de changement qualifiés, possédant
de bonnes qualités de gestionnaire et ayant une bonne compréhension de
l'organisation;
• leader ou agent de changement inspirant confiance aux membres de J'organisation;
• employés qualifiés;
• organisation proactive et possédant une culture d'innovation;
• organisation possédant une culture de fiabilité;
• vision bien définie et clairement exprimée;
• bonne communication permettant de créer un sentiment d'urgence, d'engendrer
l'insatisfaction par rapport au statu quo, de contrer la résistance idéologique par une
argumentation fondée sur des données mesurables, de gagner confiance et crédibilité
auprès des membres de l'organisation;
• coalition pour le changement impliquant une diversité de membres de l'organisation,
ce qui provoque leur engagement envers le changement, accroît la collaboration et la
créativité et réduit la résistance politique;
• organisation présentant au départ de bonnes aptitudes de gestion et ayant développé
une pensée systémique;
• insatisfaction avec le statu quo et coût du changement inférieur à celui du statu quo;
18
• changement soutenu par les leaders et les décideurs de l'organisation, ce qui aide à
l'obtention des ressources nécessaires et facilite l'adhésion des autres membres de
l'organisation;
• changement appuyé par la culture de l'organisation;
• changement soutenu par la structure de l'organisation (définition des responsabilités,
systèmes de récompense, etc.);
• changement bien pensé et bien planifié;
• changement s'accompagnant d'une bonne gestion des ressources matérielles et des
ressources humaines pour contrer la peur, l'insécurité et la résistance aveugle;
• organisation faisant habituellement preuve de cohérence entre sa rhétorique et sa
pratique, ce qui aide à combattre le cynisme.
L'ensemble de ces facteurs sera utilisé au chapitre IV aux fins de comparaison avec les
facteurs identifiés par les acteurs du changement de Mine Raglan. Sur le plan théorique, nous
verrons dans la suite du présent chapitre comment l'organisation peut surmonter ses
faiblesses et multiplier ses forces en matière de changement organisationnel.
2.2 La réussite du changement: approches et théories
La réussite et le maintien du changement sont donc des défis de taille pour l'entreprise. En
plus des difficultés inhérentes à tout processus de changement mentionnées précédemment, le
rythme du changement dans les organisations actuelles est devenu si élevé que celui-ci se fait
maintenant souvent de façon réactive (Todnem, 2005). Selon les chercheurs, on estime que
de 70 à 75% des changements implantés en entreprise sont appelés à échouer, soit parce
qu'ils ne rencontreront pas les object ifs voulus, soit parce qu'ils ne seront pas maintenus
(Axelrod et al., 2006; Beer et Nohria, 2000; Balogun et Hope Hailey, 2004 cité dans
Todnem, 2005; Burke et Biggart, 1997 cité dans Burke 2002). Pour Kotter (1996), la plupart
de ces échecs sont dus à des facteurs humains comme ceux décrits précédemment, mais de
l'avis de Bumes (2004 cité dans Todnem, 2005), ces résultats indiquent aussi un manque
fondamental de cadre d'implantation du changement qui soit valide, d'autant plus que les
thèses qui circulent sont très contradictoires. En 1991, Porras et Silvers (cité dans Burke,
2002) affirmaient aussi qu'il n'existe aucune théorie unifiée et généralement acceptée du
19
changement organisationnel. Tout porte à croire que cette assertion est toujours d'actualité.
En effet, nombreuses sont les théories du changement organisationnel ainsi que les approches
et les modèles proposés pour le réussir; aucun cependant ne semble faire école, à l'exception
de celui de Lewin (1947). Pour cette raison, nous nous attarderons maintenant à comparer les
différents modèles et approches théoriques du changement organisationnel proposés par
divers chercheurs pour l'aborder de manière efficace tout en rencontrant un minimum de
résistance de la part des récepteurs. De là, il sera finalement possible d'amalgamer ces
modèles en un seul qui posera les bases théoriques de la présente recherche.
On constate, dans un premier temps, que le changement peut se manifester de nombreuses
façons par la combinaison de diverses approches. Il ressort principalement de la littérature
que le changement peut être différencié selon son rythme d'implantation, son degré de
profondeur, son degré de planification ou de spontanéité et, enfin, selon la composante de
l'organisation sur laquelle il agit.
2.2. j Rythme et profondeur du changement: évolutif ou révolutionnaire?
Le rythme du changement est un sujet largement couvert par la littérature et nombre
d'auteurs l'ont catégorisé selon des appellations différentes qui opposent somme toute deux
réalités: un changement se faisant par petits pas, de façon continue et sans modifier les
fondements de l'entreprise et un changement effectué à l'intérieur d'une courte période mais
transformant radicalement l'organisation en en redéfinissant les paramètres de base. Dans le
premier cas, on a qualifié ce type de changement d'évolutif (Burke, 2002; Miller, 1982;
Wilson, 1992), mais aussi d'incrémentai (Dunphy, Griffiths et Benn, 2003; Dunphy et Stace,
1990; Todnem, 2005), de superficiel (Buchanan et Huczynski, 2004 cité dans Buchanan et
al., 2005) ou de continu (Weick et Quinn, 1999 cité dans Burke, 2002). L'ensemble de ces
appellations regroupe une même réalité, soit un changement s'effectuant par une succession
et une accumulation de modifications ou d'altérations du système existant et pouvant ou non
mener à long terme à une refonte en profondeur de l'organisation. Ce type de changement
réfère au concept d'amélioration continue et cible les processus et les pratiques internes à
l'organisation.
20
Dans le second cas, on oppose au changement évolutif un changement qualifié de
révolutionnaire (Burke, 2002; Miller 1982; Wilson~ 1992), transformationnel (Dunphy,
Griffiths et Benn, 2003; Dunphy et Stace, 1990), discontinu (Todnem, 2005), profond
(Buchanan et Huczynski, 2004 cité dans Buchanan et al., 2005) ou épisodique (Weick et
Quinn, 1999 cité dans Burke, 2002). Ces qualificatifs réfèrent à une modification radicale et
majeure d'une organisation résultant en un système dont les principaux attributs (structure,
culture et stratégie) sont transformés. Ici, c'est l'interface organisation-environnement
externe qui est ciblée dans un processus de changement unique et brusque.
Puisque les conclusions du présent projet de recherche seront partagées avec des personnes
qui ne sont pas nécessairement familiers avec la théorie du changement organisationnel, les
appellations changement évolutif' et changement révolutionnaire seront retenues, car elles
sont plus accessibles du fait qu"elles sont régulièrement utilisées dans le discours populaire
(théorie de l'évolution, révolution industrielle, etc.). Qui plus est, puisque le principal
processus de changement qui sera étudié, l'implantation du PGMR de Mine Raglan, est un
changement évolutif, Je thème du changement révolutionnaire sera très peu abordé. En effet,
la modification d'un système de gestion des matières résiduelles est un élément très
spécifique d"une organisation s'inscrivant dans une perspective de changement beaucoup
plus large, celle de la responsabilité environnementale. Chez Mine RagJan, celle
responsabilité environnementale se développe par une approche incrémentaJe se manifestant
par une série de changements évolutifs tels que J'adhésion à la norme ISO 14001 et l'actuelle
mise en œuvre du PGMR. Il en va de même pour ses programmes de santé et de sécurité au
travail ainsi que d'optimisation de la production, thématiques qui seront aussi abordées à titre
d'exemples de changement.
Notons au passage que l'approche évolutive est généralement la plus répandue dans les
organisations. En effet, Schrader (1995) nous apprend que face aux pressions externes
motivant le changement, l'industrie agit à l'intérieur d'un continuum de réponses possibles
allant d'une résistance extrême à une réponse enthousiaste et volontaire pour repenser en
profondeur le modèle d'intervention de l'industrie. Évidemment, les réactions les plus
fréquentes se trouvent à mi-chemin de ces positions extrêmes et on revient ici à J'idée de
21
Burke (2002) que les changements choisis seront plus souvent évolutifs et dans peu de cas
révolutionnaires.
2.2.2 Degré de planification: changement planifié où émergent?
Le degré de planification du changement se présente en deux approches entre lesquelles le
leader ou l'agent de changement devra choisir. Ici s'opposent le changement planifié et le
changement émergent (ou non-planifié). Initiée par Kurt Lewin au cours des années 1950
(Bamford et Forrester, 2003), l'approche planifiée propose d'éliminer les anciens standards et
pratiques insti tutionnalisés dans l'organisation afin que celle-ci puisse passer d'un état fixe à
un autre par une modification des comportements de ses membres (Bamford et Forrester,
2003; Lewin, 1947). Le changement planifié est donc délibéré et conscient et vise
l'amélioration d'un aspect de l'organisation (évolutif) ou des fondements du système
(révolutionnaire) (Porras et Robertson, 1992 cité dans Burke, 2002). C'est un processus qui
est linéaire, divisé en étapes et fondé sur la consultation. Toutefois, cel1ains auteurs le jugent
mieux adapté au changement évolutif et à petite échelle et non applicable au changement
rapide et révolutionnaire (Bumes, 1996 et 2004 cité dans Todnem, 2005; Senior, 2002 cité
dans Todnem, 2005). En effet, il est souvent considéré comme mal adapté à la réalité des
entreprises actuelles, étant donné la rapidité des changements auxquels elles doivent faire
face et le peu de temps de planification disponible (Bamford et Forester, 2003 cité dans
Todnem, 2005; Bumes, 1996 et 2004 cité dans Todnem, 2005; Wilson, 1992). Il ne
permettrait pas non plus de faire face aux situations pour lesquelles des approches plus
directives et spontanées sont nécessaires, comme les situations de crise, et pour lesquelles il
n'est pas possible de consulter et d'impliquer l'ensemble des membres de l'organisation
(Bumes, 1996 et 2004 cité dans Todnem, 2005; Kanter, Stein et Jick., 1992).
C'est dans ces situations que surviendrait le changement émergent, un processus plus ouvert
et faisant place aux initiatives de la base (Bamford et Forrester 2003, Bumes 19962004). Ici,
le processus d"adaptation est continu, mais non linéaire (Bu mes, 1996 et 2004 cité dans
Todnem, 2005; Dawson, 1994 cité dans Todnem, 2005) et trop rapide pour être planifié
(Kanter, Stein et Jick., 1992). Cependant, la préparation à J'implantation de changements
rapides se fait par la promotion d"une compréhension profonde et extensive de l"organisation
22
et de ses forces et de ses faiblesses en matière de changement. Le succès du changement
dépendrait donc moins de plans détaillés que d'une compréhension de la complexité des
enjeux et de la sélection des options possibles. L'approche émergente se soucie donc plus de
la préparation et de la facilitation du changement (Burnes, 1996 cité dans Todnem, 2005).
Évidemment, chaque changement a ses particularités propres et certains, comme la mise en
œuvre d'un PGMR, nécessitent une planification singulièrement détaillée. L'approche
planifiée vise donc la réussite d'un changement spécifique alors que l'approche émergente a
pour objectif de préparer l'organisation à faire face à tout type de changement. Les deux
approches seront donc partie intégrante du présent projet de recherche, puisque d'une part les
cas étudiés font appel au changement planifié et que, d'autre part, les objectifs de la
recherche sont de rendre plus fluide la gestion environnementale et la gestion du changement
en général au sein de l'organisation. Celle-ci sera alors plus à même de réagir aux
changements externes non anticipés (Porras et Robertson, 1992 cité dans Burke, 2002).
2.2.3 Composantes de l'organisation affectées par le changement: culture, structure, stratégie?
Tout processus de changement s'attaque à une ou plusieurs des trois composantes de
l'organisation. La première composante, la culture, se reflète dans les postulats, valeurs,
normes et croyances servant de fondement à la façon dont ['organisation se comporte (Burke,
2002; O'Connor et Fiol, 2006). Il s'agit du code non écrit des comportements acceptables et
non acceptables au sein de l'organisation (Lyons, 2005-2006) qui sont acquis et exprimés par
ses membres (AquiJa, 2006). On la qualifie de positive (Lyons, 2005-2006) ou d'intégrée
(Braga Rodrigues, 2006; Meyerson et Martin, 1987) lorsque ce code informel est aligné avec
les valeurs, vision et mission formelles de l'organisation, c'est-à-dire lorsque la culture
organisationnelle désirée fait consensus et est la même que la culture en usage dans
l'entreprise. Au contraire, une culture négative présente un écart plus ou moins grand entre ce
que l'organisation est réellement et ce qu'elle dit être (Lyons, 2005-2006). Pour Braga
Rodrigues (2006) et Meyerson et Martin (1987), ce type de culture peut être différencié ou
fragmenté. Dans le premier cas, la culture abrite des sous-cultures qui sont en oppositions les
unes aux autres. Dans le deuxième cas, il n'y a à peu près pas de consensus à l'intérieur d'un
23
groupe; ni la culture désirée ni la ou les contre-cultures n'unifient les employés autour d'un
ensemble de valeurs communes.
La deuxième composante est la structure organisationnelle qui
[... ] correspond au cadre de travail permettant à la stratégie corporative d'avoir lieu. Elle réfère aux relations existant entre les différentes composantes de l'organisation et a un impact considérable sur les stratégies que la compagnie est en mesure de poursuivre 6
(Atkinson, Schaeffer et Viney, 2000, p. Il 0).
La structure est représentée par l'ensemble des systèmes supportant les fonctionnements de
base de J'organisation. Ces systèmes peuvent être divisés en quatre catégories. La première
regroupe les mécanismes indiquant aux membres de J'organisation quelles sont ses priorités.
Il s'agit par exemple des allocations budgétaires, des commentaires transmis par
J'organisation à la suite d'un évènement, des objectifs énoncés et planifiés, des systèmes de
mesure mis en place pour évaluer la performance ou encore des systèmes de récompense et
de reconnaissance. La deuxième catégorie englobe les système préparant J'organisation à
l'action comme des lignes directrices clairement énoncées et les modalités de sélection, de
rétention et de formation du personnel. La troisième catégorie est formée des systèmes
indiquant aux membres de r organisation de quelle façon ils doivent interagir à r intérieur de
celle-ci. Elle comprend entre autres les modalités de prise de décision, de résolution de
conflit et de communication (O'Connor et Fiol, 2006). Atkinson, Schaefer et Viney (2000)
ajoutent quant à eux une quatrième catégorie de systèmes définissant la structure
organisationnelle, soit les organigrammes de fonctionnement ou structures hiérarchiques.
La dernière composante sur laquelle peut porter le changement est la stratégie de l'entreprise.
Il s'agit ici des engagements que J'organisation prend à l'égard de ses modalités d'opération.
Comment s'assure-t-on d'améliorer la perfOlmance de l'entreprise? Adopte-t-on une
approche préventive ou réactive? Met-on en place un système de gestion environnementale
6 « Organizational structure is a framework that alJows corporate strategy to be pursued. It refers to the relationships of the various components of the organizalion with each other and impacts very considerably on the strategies that a company find itself able to pursue successfully. » (Atkinson, Schaeffer et Viney, 2000, p. 110)
24
(SGE)? Quelle réponse est offerte aux préoccupations des parties prenantes? Il s'agit là
d'autant de questions appartenant à la stratégie développée par une organisation. Ainsi, la
politique environnementale d'une entreprise est une partie de sa stratégie globale, mais les
outils pour la mellre en application appartiennent à sa structure. Les rapports entretenus entre
ces deux composantes (stratégie et structure) sont d'ailleurs définis différemment par deux
écoles de pensée. La première, l'école classique, affirme que la structure doit être adaptée à la
stratégie. La deuxième, s"appuyant plus sur les processus, soutient que les structures
existantes orientent le type de stratégies qui seront adoptées. (Atkinson, Schaefer et Viney,
2000)
Quoi qu'il en soit, avec tout changement organisationnel vient le nécessaire ajustement des
différentes composantes de l'entreprise afin qu'elles demeurent ou deviennent cohérentes et
compatibles entre elles. Le changement désiré doit être cohérent avec la culture et la structure
de l'organisation (Atkinson, Schaefer et Viney 2000; Dessler, Starke et Cyr, 2004; Ives,
2005; Lyon, 2004; O'Connor et Fiol, 2006; Post et Altman, 1994; Ramus, 2001; Schrader,
1995), sinon ces composantes agiront comme des barrières au succès de l'implantation des
changements nécessaires pour alleindre la vision ou la stratégie développée par l'organisation
(O'Connor et Fiol, 2006). Au cours d'un processus de changement, les différentes
composantes de l'organisation doivent donc être constamment ajustées entre elles pour en
maintenir la cohérence.
Quant au but visé par le changement, il peut s'adresser à l'une ou l'autre de ces composantes,
donnant lieu à diverses situations. Dans un premier cas, l'organisation constate que sa culture
n'est plus adaptée à son environnement interne ou externe (nouvelle technologie implantée
dans l'organisation, modification des valeurs de la société, etc.) et met en place un processus
de changement pour modifier cette culture. Cela peut aussi se produire au cours d'un
processus de changement visant une autre composante de l'organisation (Aquila, 2006). En
effet, « toute tentative d'encourager un nouveau comportement qui n'est pas cohérent avec
les réalités culturelles actuelles rencontrera probablement une forte opposition »7 (O'Connor
7 « [ ... ] any atlemplS 10 encourage new behaviours thal are inconsistent with current cu.ltural realities are likely to meel with sri ff opposition. }) (O'Connor et Fiol, 2006, p. 77)
25
et Fiol, 2006, p. 77) et il sera alors d'autant plus important d'agir sur la culture parallèlement
au changement. Au contraire, si le changement proposé est cohérent avec la culture, on
pourra le justifier en démontrant qu'il participe au maintien des valeurs culturelles
traditionnelles (O'Connor et Fiol, 2006).
Lorsqu'un changement culturel est nécessaire, Aquila (2006), Sheth et Sisodia (2005) et
Schrader (1995) proposent la mise en œuvre parallèle de trois items d'action. Le premier peut
s'accomplir par un programme de formation et vise à modifier le schème de pensée des
récepteurs du changement. Pour Aquila (2006), cet objectif peut aussi être accompli par une
nouvelle répartition ou un renouvellement des membres de l'organisation. Le deuxième item
d'action à mettre en œuvre pour modifier la culture serait de s'attaquer à la structure générale
de l'organisation en restructurant les rôles et les responsabilités des récepteurs et en révisant
les processus de gestion et de communication. Le troisième item d'action a trait à la mise en
place d'un système de mesure de la performance et d'un système de récompense. Il s'agirait
du levier de changement culturel le plus efficace, puisqu'il fait appel à des incitatifs positifs
et négatifs pour influencer les comportements des membres de l'organisation dans le sens
voulu. En ce sens, il encourage les comportements positifs et décourage le statu quo.
Lyons (2005-2006) insiste quant à elle sur le fait que ce sont les leaders qui doivent
personnellement mettre en application les visions, valeurs, comportements et engagements
théoriques afin d'influencer leurs subalternes et, conséquemment, la culture générale de
l'organisation. Toujours selon Lyons (2005-2006), la culture générale tendrait naturellement
à s'aligner sur celle de ses leaders, en autant que ceux-ci agissent de façon cohérente avec la
culture défendue sur le plan théorique. Dessler, Starke et Cyr (2004) abondent dans le même
sens et affirment que la modification d'une culture d'entreprise passe par un énoncé clair des
valeurs défendues, par des pratiques de gestion cohérentes avec celles-ci et par J'exemple des
leaders.
Dans un deuxième cas, c'est la structure de l'organisation qui n'est pas adaptée à ses autres
composantes et qui doit être changée. Cela survient principalement au cours d'un processus
de changement s'attaquant à la culture ou aux stratégies de J'organisation. Dans un cas
26
comme dans l'autre, un diagnostic des systèmes et structures de l'organisation doit être fait
pour évaluer si ceux-ci supportent et renforcent les changements visés (O'Connor et Fiol,
2006). Par exemple, si on souhaite inculquer un nouveau comportement dans la culture, le
système de bonus présent dans la structure organisationnelle doit récompenser ce
comportement pour qu'il y ait cohérence entre la volonté de changement de l'entreprise et sa
pratique réelle.
Dans un troisième et dernier cas, l'organisation vise à modifier une ou plusieurs de ses
stratégies de gestion afin de répondre à des pressions de l'environnement externe (nouvelle
réglementation, incitatifs financiers, demandes des parties prenantes, etc.) ou interne
(augmentation de la production, demandes syndicales, modifications structurelles, etc.).
Encore là, un changement stratégique nécessite l'ajustement de la culture et de la structure de
l'organisation pour que celles-ci en supporte la réalisation et la propulse.
D'ailleurs, Burke (2002) nous apprend à concevoir l'organisation comme un système ouvert
influencé non seulement par son environnement, mais aussi par ses composantes internes. Il
nous amène à la voir comme un tout et non comme la somme de ses parties. De ce fait, bien
que la modification d'une partie du système ait une influence sur l'ensemble de celui-ci, cette
seule modification ne sut1it pas pour changer le système entier dans la direction voulue. Par
exemple, si une modification des comportements individuels est souhaitée, les standards de
l'organisation devront aussi changer. À ce propos, Lewin (1958, p.2l 0 cité dans Burke, 2002,
p. 50) nous enseigne que:
Tant que les standards du groupe demeurent les mêmes, les individus résistent au changement, puisque celui-ci leur demande de s'éloigner des standards acceptés. Si les standards du groupe sont modifiés, cette résistance due à j'écart entre les comportements standards et attendus est éliminée. 8
8 « As long as group standards are unchanged, the individual will resist change more strongly the further he is expected to depart from group standards. If the group standard itselfis changed, the resistance which is due to the relation between individual and group standards is eliminated. » (Lewin, 1958, p.2l 0 cité dans Burke, 2002, p. 50)
27
De ce fait, bien que le changement vise d'abord l'une ou l'autre des trois composantes de
l'organisation, il devra être conduit de manière systémique, en modifiant au besoin plusieurs
caractéristiques de l'organisation pour qu'elles demeurent ou deviennent cohérentes entre
elles.
2.3 Construction d'un modèle de changement organisationnel
Afin de conduire le changement organisationnel de façon efficace et de faciliter sa réussite,
nombre d'auteurs ont suggéré des modèles de changement s'inspirant tous plus ou moins
d'un premier modèle en trois étapes proposé par Lewin (1958 cité dans Burke, 2002). Le
tableau présenté à l'appendice A.I résume les modèles développés par douze chercheurs ou
groupes de chercheurs. On y constate nombre de ressemblances. Ainsi, à l'exception de
Dunphy, Griffiths et Benn (2003), tous débutent le processus du changement par un
diagnostic de l'organisation, de son besoin de changement, de ses problèmes. Deux auteurs
reconnaissent aussi que la nécessité du changement survient en raison de pression internes,
externes (Dessler, Starke et Cyr, 2004; Schrader, 1995) ou anticipées (Dessler, Starke et Cyr,
2004). Cette étape est généralement suivie par le développement et la communication d'une
vision du changement, sauf dans le cas de Dessler, Starke et Cyr (2004), Hoffman (2000) et
Koller (1996) qui créent d'abord une coalition en faveur du changement pour ensuite établir
une vision commune. Quant à Dunphy, Griffiths et Benn (2003), ils se distinguent des autres
auteurs en adoptant en premier lieu une vision du changement pour ensuite diagnostiquer
l'état de l'organisation relativement à cet objectif ou à celle vision. L'ensemble de ces étapes
constitue la phase que Lewin (1958, cité dans Burke, 2002) nomme décristallisation et
Annenakis et HaJTis (2002), préparation au changement; il s'agit de la phase au cours de
laquelle on reconnaît la nécessité du changement et crée un sentiment d'urgence.
Vient ensuite le changement lui-même qui dans certains cas aura été planifié avant
l'identification d'un leader, agent de changement ou coalition (Dessler, Slarke el Cyr, 2004;
Dunphy, Griffiths et Benn, 2003), ou après (Kanter, Stein et Jick, 1992 cité dans Todnem,
2005; Schrader, 1995). D'autres insistent enfin sur la planification du changement sans traiter
de lïdentification d'un agent de changement (Galpin, 1996, cité dans Annenakis et Bedeian,
1999; Judson, 1991, cité dans Armenakis et Bedeian, 1999). Selon les auteurs, la phase de
28
changement sera plus ou moins divisée en sous-étapes. Ainsi, l'étalonnage (benchmarking)
(Schein, 1987 cité dans Burke, 2002), la création des ressources, les outils et les structures
nécessaires au changement, la planification de gains à court terme, la communication et la
consolidation de ces gains pour produire plus de changement sont autant d'étapes proposées
(Dessler, Starke et Cyr, 2004; Dunphy, Griffiths et Benn, 2003; Galpin, ] 996 cité dans
Arrnenakis et Bedeian, 1999; Hoffman, 2000; Kanter, Stein et Jick, 1992 cité dans Todnem,
2005; Kotter, 1996).
Enfin, la nécessité d'institutionnaliser le changement ou de recristalliser l'organisation en fin
de processus est une étape figurant à 12 des 13 modèles présentés. Quatre auteurs indiquent
aussi qu'il est nécessaire de s'assurer de la cohérence du changement avec l'organisation, ses
membres, sa culture et sa structure (Dessler, Starke et Cyr, 2004; Dunphy, Griffiths et Benn,
2003; Schrader, 1995; Shein, ]987, cité dans Burke, 2002). Dessler, Starke et Cyr (2004) et
Luecke (2003 cité dans Todnem 2005) et ils terminent le tout par un contrôle des progrès et la
mise en place des ajustements qui s'imposent. Dans une étude sur la durabilité du
changement, Buchanan et collègues (2005) ont d'ailleurs souligné l'importance de procéder à
une nouvelle décristallisation en fin de processus pour éviter que les nouvelles pratiques ne
deviennent obsolètes. Weick et Quinn (1999 cité dans Burke, 2002) sont aussi de cet avis,
mais uniquement lorsque le changement est continu, évolutif. Schrader (1995) va dans la
même direction en présentant son modèle de changement comme un cycle qui retourne à un
nouveau besoin de changement après la réalisation d'un premier changement.
Cependant, les auteurs se démarquent particulièrement par leur conception du rôle d'un
leader ou agent de changement versus celui d'une coalition dans le processus de changement.
À l'un des deux pôles du spectre d'opinion, on trouve Schein (1987 cité dans Burke, 2002)
qui propose un modèle directif où les récepteurs sont manipulés sur le plan émotif (créer de
l'anxiété face à la situation actuelle puis un sentiment de sécurité face au changement) pour
ensuite adopter la vision développée par un leader. Moins directifs, Lippitt, Watson et
Westley (1958 cité dans Burke 2002) et Schrader (1995) accordent néanmoins un rôle
prédominant à l'agent et à sa relation avec l'organisation en transition pour mener à bien Je
changement. Dunphy, Grjffiths et Benn (2003) insistent aussi sur l'identification d'un agent
29
de changement et mentionnent la nécessité de maintenir une collaboration et une
communication avec l'organisation. Kanter, Stein et Jick (1992, cité dans Todnem, 2005) et
Luecke (2003 cité dans Todnem, 2005) adoptent une position plus consultative en identifiant
un leader qui cette fois développe la vision du changement avec la participation de
l'organisation. Enfin, à l'autre pôle Dessler, Starke et Cyr (2004), Kotter (1996) et Hoffman
(2000) remplacent l'identification d'un agent par la création d'une coalition en faveur du
changement au sein de l'organisation. Ils accordent ainsi plus d'importance au support du
changement par le plus grand nombre que par un leader unique.
À partir de ces constatations, nous proposons à notre tour un modèle inspiré des trois phases
de Lewin et d'un amalgame des sous-étapes proposées par les 12 autres modèles décrits. Il ne
s'agit pas ici de réinventer la roue, mais bien de reformuler les étapes pour intégrer le
meilleur de ces modèles. Rappelons que les approches préconisées ici seront le changement
évolutif, planifié et systémique, c'est-à-dire recherchant la cohérence entre culture, structure
et stratégie organisationnelles. Les étapes retenues sont schématisées à la figure 2.1 et se
détaillent comme suit:
Décristallisation : L'organisation se prépare au changement.
Selon Schrader (l 995), la motivation au changement est basée sur la conviction que le
coût de ne pas changer est supérieur à celui de changer. L'organisation doit donc, au
cours de la phase de décristallisation, générer et maintenir une insatisfaction avec le
statu quo qui soit assez puissante pour dépasser J'inertie et la résistance au changement.
Qui plus est, la préparation au changement est un facteur de réussite de celui-ci
(Rimmer et al., 1996 cité dans Buchanan et al., 2005). Elle s'effectue par les étapes
suivantes qui peuvent être plus ou moins entrecoupées selon les organisations et le
contexte du changement.
1.1 Man!festa/ion de la nécessité du changement: L'organisation ressent le besoin de
changement en réponse à des pressions externes, internes ou anticipées. Ces pressions
sont le reflet d'un état à atteindre pour l'organisation.
30
On rejoint ici l'idée de Dunphy, Griffiths et Benn (2003) selon laquelle la première
étape du changement est de développer une vision de l'objectif vers lequel
l'organisation doit tendre.
1.2 Diagnostic: L'organisation mesure l'écart existant entre son état actuel (statu quo) et
l'état souhaité. Elle accumule pour ce faire des faits et des données sur lesquels seront
fondés le besoin de changement et, ultérieurement, sa planification.
Des changements fondés sur des données et des faits mesurables ont plus de chance de
succès (Burke, 2002).
1.3 Identification d'un agent de changement ou d'un groupe d'agents: L'organisation
choisi un (ou plusieurs) agent de changement.
Dunphy, Griffiths et Benn (2003) favorisent l'identification d'un agent de changement
à l'intérieur de l'organisation afin de profiter de sa connaissance de l'organisation et de
conserver à l'interne les aptitudes qui seront développées au cours du processus de
changement. Nombre d'auteurs insistent aussi sur l'importance que le changement soit
mené par un leader fort (Burke, 2002) et auquel les membres de l'organisation font
confiance (Ives, 2005; Judge et EJenkov, 2005; Maurer, 2005). Il doit être clair,
communicatif, exemplaire, cohérent dans ses actions (Dessler, Starke et Cyr, 2004) et
avoir une vision à long terme et systémique (Madsen et Gigy, 2005).
1.4 Consulter pour développer une vis/on d 'ensemble: L'organisation consulte ses
membres afin de définir clairement l'état à atteindre et les moyens généraux d'y
parvemr.
La consultation est selon plusieurs auteurs l'une des principales clés du succès du
changement organisationnel (Axelrod el al., 2006; Boirai, 2005; Dessler, Starke et Cyr,
2004; Judge et EJenkov, 2005; Karacsony, 2006). Axelrod et collègues (2006)
rapportent d'ailleurs que selon une étude de l'université d'Oxford, plus de 68% des
employés désirent s'impliquer de façon significative dans le changement. Lorsque la
consultation n'a pas lieu, il se crée un écart entre le niveau d'engagement des initiés
participant à la planification du changement et celui du reste de l'organisation qui n'y
31
est pas convié. Pour limiter la résistance et faire en sorte que le changement soit
possible, cet écart d'implication doit être réduit, ce qui devient de plus en plus difficile
à mesure que le changement progresse. Mieux vaudrait donc faire appel à la
consultation générale dès les débuts du processus.
Bien qu'exigeante pour l'agent, la consultation simplifie en bout de ligne le
changement, car l'ensemble de l'organisation en comprend les enjeux, les dangers et
les opportunités. Elle augmente aussi l'engagement, la collaboration et donc la
créativité par la mise en commun de l'ingéniosité du plus grand nombre. Enfin, elle
accroît la capacité de changement globale de l'organisation, puisque ses membres
apprennent à le gérer et deviennent plus efficaces pour cette tâche (Axelrod et al.,
2006).
1.5 Communiquer la vision et développer un sentiment d ·urgence: L'organisation
communique le diagnostic (le pourquoi du changement) et la vision (le comment) à ses
membres.
À cette étape, il est important de présenter d'abord les raisons du changement de façon
que les individus en ressentent le besoin sur le plan émotionnel. On misera sur des
images fortes et sur un niveau de langage adapté à l'audience (Maurer, 2005). Cela
permet d'augmenter le niveau d'insatisfaction avec la situation actuelle (Schrader,
1995), de faire croire à la nécessité du changement (Burke, 2002; Hoffman, 2000) et
d'augmenter le sentiment d'urgence (Burke, 2002; Kotter, 1995).
Une vision clairement définie et communiquée est aussi essentielle à la bonne marche
du changement (Kotter, 1995; Hoffman, 2000; Burke, 2002; Dunphy, Griffiths et Benn,
2003), puisqu'elle aidera à réduire le sentiment d'insécurité lié à celui-ci (Hoffman,
2000; Burke, 2002, Dessler, Starke et Cyr, 2004) et à convaincre les membres de
l'organisation de la direction choisie (Burke, 2002). Cette communication pourra
d'abord être effectuée avec les membres de la direction pour recevoir leur appui
(Atkinson, Schaefer et Viney, 2000; Hoffman, 2000; Ives, 2005; Karacsony, 2006; Post
et Altman, 1994; Schrader, 1995), ce qui diminuera ensuite la résistance au changement
32
au sein des niveaux hiérarchiques inférieurs. Devant les leaders de l'organisation, il
sera utile de faire la démonstration des avantages stratégiques du changement afin
qu'ils y adhèrent et l'intègrent à leur propre gestion (Hoffman, 2000).
1.6 Créer une coalition en faveur du changement: Une communication efficace du
diagnostic et de la vision pennettra de rallier un maximum d'individus autour de celle
ci. La coalition pourra être fonnelle (fonnée d'agents secondaires désignés pour aider
l'agent de changement principal) ou infonnelle (formée de récepteurs se ralliant d'eux
mêmes au changement et qui le supporteront naturellement).
La participation des récepteurs à différentes activités entourant la planification et la
réalisation du changement mène à leur engagement personnel envers celui-ci. Ces
individus impliqués deviennent des défenseurs naturels du processus de changement
(Rimmel' et al., 1996 cité dans Buchanan et al., 2005; Burke, 2002).
1.7 Planifier le changement: L'agent de changement, en partenariat avec la coalition,
planifie le changement de façon plus détaillée.
À cette étape, on s'assure que les changements planifiés seront soutenus par la culture,
la structure et les stratégies actuelles de l'organisation. Sinon, on planifiera également
de faire les ajustements nécessaires au maintien de la cohérence de l'organisation.
2 Mouvement: L'agent de changement et la coalition mettent en œuvre le programme de
changement.
Pour celte phase, on s'inspire directement des modèles de Dessler, Starke et Cyr
(2004), Hoffman (2000) et Kotter (1995). Les trois étapes qu'elle comprend peuvent
être répétées en boucle.
2.1 Rendre les outils et les ressources nécessaires au changement disponibles au sein de
l'organ isation.
2.2 Générer des gains à cour/terme.
33
2.3 Consolider les gains et produire plus de changement: Avec une communication
efficace des succès, il est possible d'utiliser les circonstances favorables pour produire
plus de changement.
3 Recristallisation : L'agent s'assure de la durabilité du changement.
3.1 Renforcer et institutionnaliser le changement: L'organisation s'assure que le
changement est cohérent avec sa culture, sa structure et ses stratégies. Si tel n'est pas le
cas, elle procède aux ajustements nécessaires. À cette étape, les résultats du
changement doivent être mesurés et communiqués au sein de l'organisation.
3.2 Surveiller le progrès etfaire les ajustements nécessaires: Le changement n'est jamais
réellement terminé, puisque la culture, la structure et les stratégies, anciennes et
nouvelles, sont en constant renouvellement.
C'est ce modèle qui servira de base à l'analyse des changements organisationnels passés et en
cours à Mine Raglan. Il sera intéressant de comparer le déroulement réel des changements
vécus par l'organisation étudiée à ce modèle théorique. Cependant, on gardera en mémoire
que les sous-étapes décrites peuvent s'entrecouper et même se présenter dans un ordre
différent mais tout aussi optimal selon les situations rencontrées. Chacune devra toutefois être
présente pour assurer l'efficacité de la réalisation des changements proposés et elles devront
respecter l'ordre Décristallisation-Mouvement-Recristallisation initialement proposé par
Lewin (1958).
34
1.1 1.2 1.3 14 1.5 I.ô 1.7
Manifestation de la nécessité du
changemcnt --+ Diagnostic
--+ Désignation d'un agent de
changement ou d'un grou[Je --+ Consultation [JOUI' dévclo[J[Jer
une \'ision d'ensemble --+ COl1lll1unication de la vision et
développement d'un sentiment --+ Création d'une co,liition en
LI\'eul' du changement --+
Planitication du changement
d'agents Jlurgence
Rendre les outils ct les ressources
nécessaires au changement
Générer des gains ~ court tenne --+
Consolider les gains et produire
[Jlus de changement
disponibles au sein de
l'organisation
31 32 Renforcer et institutionnaliser le
changement --+ Sun'eiller le [Jrogl'ès cl faire les
ajustements nécessaires
Figure 2.1 Modèle théorique de changement organisationnel
CHAPITRE III
OBJECTIFS ET MÉTHODOLOGIE
3.1 Objectifs de l'étude
Il a été démontré au cours des chapitres précédents comment le monde mImer doit
aujourd'hui affronter de grands défis de gestion environnementale. Préoccupations et
revendications des parties prenantes, resserrement de la réglementation, accroissement des
responsabilités avec l'éloignement des exploitations sont autant de facteurs favorisant la
multiplication des programmes d'amélioration de la performance environnementale de
l'industrie. Or, on constate aussi que gestion environnementale et gestion du changement sont
des défis organisationnels intimement liés. Cependant, le thème de la gestion du changement
dans les organisations, quoique largement exploré dans la littérature, n'est que très peu
développé en ce qui concerne la gestion environnementale. Peu d'outils spécifiques à cette
discipline sont offerts aux gestionnaires et conseillers en environnement. Par ailleurs, de tels
outils, bien qu'utiles, ne peuvent être utilisés efficacement sans une compréhension profonde
de J'organisation où l'on tente de les mettre en pratique.
La présente étude de cas vise donc trois grands objectifs. D'une part, elle permettra d'évaluer
la capacité de changement d'une organisation, Mine Raglan, en regard de ses modalités de
changement, des facteurs de réussite et d'échec qu'on y rencontre et des forces et des
faiblesses qu'on y observe. D'autre part, l'étude identifiera les défis spécifiques rencontrés
par cette organisation et liés à ses caractéristiques propres comme son isolement
géographique. Enfin, l'étude a pour but d'utiliser ces constats afin de formuler des
36
recommandations pour mener à bien les changements entrepris par l'organisation, en
particulier la mise en œuvre de son PGMR.
3.2 Énoncé des questions de recherche
Au cours de la recherche, différents processus de changement en cours ou passés s'étant
déroulés à Mine Raglan ont été analysés. Ces changements ont été ou seront implantés par
di fférents secteurs de l'organisation comme le Service de la prévention en santé et sécurité au
travail, le Service de la formation, le Service informatique, le Groupe d'optimisation des
procédés (Six Sigma) et le Service de l'environnement. Ce regard porté sur différents
processus de changement visait à répondre à trois questions de recherche:
Les processus de changement tels que vécus par Mine Raglan suivent-ils les phases et les
étapes décrites dans le modèle proposé à la section précédente? Un modèle plus
représentatif de la réalité pourrait-il être proposé:
1.1 Pour Mine Raglan?
J.2 Pour l'implantation de son nouveau PGMR?
2 Quels sont les facteurs de réussite ou d'échec du changement ressentis par les acteurs du
changement de Mine Raglan. Ces facteurs sont-ils comparables à ceux repérés dans la
littérature?
3 Quelles sont les forces et les faiblesses de l'organisation en matière de changement
organisationnel?
3.1 Comment Mine Raglan peut-elle surmonter ses faiblesses?
3.2 Comment Mine Raglan peut-elle exploiter pleinement ses forces?
Ultimement, l'étude de cas proposée visait à produire des outils pour faciliter la gestion du
changement à la mine Raglan et en particulier les changements à teneur environnementale.
37
3.3 Méthodologie de recherche
3.3.1 Stratégie de recherche
La stratégie de recherche sélectionnée pour répondre aux questions de recherche est l'étude
de cas. Yin (1994) définit cette approche comme étant une recherche empirique portant sur
des phénomènes actuels dans un contexte réel. Ce type de recherche a une pertinence
particulière lorsque les limites entre le phénomène étudié et son contexte ne sont pas bien
définies (Yin, ] 994), c'est-à-dire 'lorsque le phénomène est complexe et fait intervenir
« simultanément plusieurs variables dépendantes et plusieurs variables indépendantes dans un
modèle de relations interdépendantes. » (Contandriopoulos et al., 2005, p. 37) Ainsi, l'étude
de cas est utile lorsque les conditions dans lesquelles se déroule le phénomène, dans le cas
présent un processus de changement organisationnel, sont pertinentes à son explication (Yin,
1994). Puisque l'organisation est décrite comme un système ouvert présentant des
interactions fortes entre ses parties et avec son environnement (Burke, 2002), il est justifié de
l'étudier en tenant compte de l'ensemble de ces interactions. Cest ce que l'étude de cas, qui
se veut systémique, permet (Contandriopoulos et al., 2005).
Yin (1994) affirme que le design de recherche d'une étude de cas devrait énoncer:
• les questions de recherche;
• les propositions de l'étude;
• les unités d'analyse;
• le 1ien logique existant entre les données et les propositions;
• les critères d'interprétation des données.
Les questions de recherche ayant été énoncées à la section précédente et le modèle développé
au chapitre II constituant la proposition de recherche, nous nous attarderons ici aux trois
dernières composantes du design de recherche. Les unités d'analyses, les méthodes de
collecte de données choisies, les méthodes d'analyses qui seront utilisées pour lier données et
propositions et les critères d interprétation des données seront décrits. Les questions de
validité, de fiabilité, d'objectivité, de généralisation et d'éthique seront quant à elles abordées
au fur et à mesure qu'elles surviendront et résumées en fin de chapitre.
38
3.3.2 Unités d'analyse
L'unité d'analyse correspond à la définition du cas étudié. Pour la présente étude, il s'agit de
la capacité de changement d'une organisation. Puisqu'une seule organisation a été étudiée,
nous avons ici affaire à l'étude d'un cas unique. Par contre, nous avons eu recours à trois
niveaux d'analyse: les étapes préconisées par l'organisation dans son processus de
changement, les facteurs de réussite et d'échec qu'elle identifie et ses forces et faiblesses en
matière de changement. Selon Contandriopoulos et collègues (2005, p.. 38) « l'étude de cas
unique [... ] offre un potentiel élevé de validité interne» en raison de la profondeur d'analyse
qu'elle permet. La généralisation de ses conclusions est toutefois limitée. C'est d'ailleurs une
critique régulièrement formulée à l'égard des études de cas. Il sera démontré plus loin
comment cette limite peut être surmontée grâce à la technique d'analyse du pallern-matching
(appariement de modèles) (Contandriopoulos et al., 2005; Tellis, 1997, Yin, 1994).
3.3.3 Approche générale pour la collecte des données: la recherche-action participative
Les données collectées devraient permettre d'analyser les trois unités d'analyse proposées
afin de répondre aux questions de recherche énoncées précédemment. Pour cette pOltion de la
recherche, une approche basée sur les principes de la recherche-action participative
(parlicipatory action research) a été développée. Cette approche permet de lier science et
pratiques réelles par la collaboration entre le chercheur et des individus liés au phénomène
étudié (Coghlan, 2003; White, Suchowierska et Campbell, 2004). La recherche-action
participative est aussi une activité intégmnt la recherche sociale, l'éducation et le travail
pratique (Hall, 198] cité dans White, 2004). Elle a pour objectif la recherche d'informations
et d'idées permettant de résoudre des problèmes au sein d'une organisation (Coghlan, 2003;
Whyte, 1991 cité dans White, Suchowicrska et Campbell, 2004). Pour Reason (1988, cité
dans LOfman, Pelkonen et Pietila, 2004), la recherche-action participative se fait pour des
individus et non sur des individus. Relativement à l'enjeu du changement organisationnel,
Coghlan (2003) note quant à lui que la recherche-action contribue à générer des
connaissances utiles sur la façon dont les organisations gèrent Je changement et sur la
manière dont les principaux acteurs du changement perçoivent leur rôle. Elle vise donc à
résoudre un problème pour le client tout en contribuant à la recherche scientifique.
39
Par ailleurs, certains auteurs insistent aussi sur la pertinence que la recherche-action soit
menée par un insider, soit un membre de l'organisation agissant à la fois à titre d'acteur et de
chercheur (Coghlan, 2003; LOfman, Pelkonen et Pietila, 2004). Cette double fonction donne
au chercheur-acteur plus de crédibilité au sein de l'organisation et lui permet d'obtenir un
degré de collaboration plus élevé ce qui contribue à faciliter le processus de recherche-action
dans son ensemble (Lofman, Pelkonen et Pietila, 2004). De plus, le fait d'avoir une
expérience concrète de l'organisation permet au chercheur-acteur de disposer d'informations
impl ici tes comme le jargon de l'organisation, ses tabous, les préoccupations de ses membres,
la façon d'obtenir des renseignements informels, les écarts entre sa rhétorique et sa pratique
et les évènements critiques et leur signification pour l'organisation. Les données recueillies
par le chercheur-acteur ont le potentiel d'être plus riches et plus complètes que pour un
chercheur externe à l'organisation (Coghlan, 2003).
Ainsi, une recherche-action participative menée par un chercheur-acteur a été menée pour
amasser les données nécessaires à l'analyse. Notre rôle était à la fois celui d'agent de
changement lors de la mise en œuvre d'un PGMR et de chercheur se penchant sur la capacité
et les modalités de changement au sein de l'organisation. En tant qu'employée oeuvrant à
temps partiel au Service de l'environnement de cette organisation depuis 2002, nous
disposons déjà de connaissances officielles et non officielles sur celle-ci. Entre autres
bénéfices, cette expérience de l'organisation a été utile pour bâtir l'équipe qui a participé à la
recherche en tant que cochercheurs.
À ce sujet, Danley et Ellison (1999 cité dans White, Suchowierska et Campbell, 2004) notent
que la motivation et l'investissement des participants (cochercheurs) sont des facteurs clé de
leur participation active et durable dans le processus de recherche. Les cochercheurs doivent
être représentatifs des groupes à l'étude et, de préférence, retireront des bénéfices des
conclusions de la recherche. White, Suchowierska et Campbell (2004) décomposent la
sélection des participants en sept étapes: (1) sélectionner les participants potentiels, (2) faire
valoir les bénéfices attendus de la recherche, (3) pénétrer un groupe de participants potentiels,
(4) développer le lien de collaboration (avec et entre les participants), (6) recruter les
40
participants et (7) les retenir au sein de l'équipe de recherche. Le fait que les participants
potentiels soient des collègues de travail a certainement été utile à l'accomplissement de
chacune de ces étapes.
Les cochercheurs ont donc été choisis parmi les services de Mine Raglan agissant
régulièrement comme agents de changement. Des représentants des services de
l'environnement, de la prévention et de l'hygiène industrielle, de la formation, de
l'informatique et de l'optimisation des procédés ont accepté de participer à l'étude. Les
personnes désignées ont eu à accomplir trois tâches principales au cours de la recherche.
D'une part, ils ont collaboré à la construction des questionnaires d'entrevue. D'autre part, ils
ont participé à un forum sur le changement organisationnel dans la cadre duquel ils étaient
invités à partager leurs expériences en la matière afin de dresser un portrait des modalités de
gestion du changement à la mine Raglan.
3.3.4 Sources de données et méthodes de collecte
Pour mener une étude de cas, diverses sources de données sont disponibles telles les
documents, archives, observations directes, observations participantes et artéfacts. Une borme
étude de cas se doit d'utiliser plus d'un type de données de façon complémentaire afin de
permettre leur triangulation (Yin, 1994). « De cette façon, toute découverte ou conclusion
d'une étude de cas devient plus convaincante et exacte si elle est basée sur différentes sources
d'information »9 (Yin, 1994, p. 92) Yin, Bateman et Moore (1983 cité dans Yin, 1994)
confirment d'ailleurs que les études de cas faisant appel à plusieurs sources de données sont
de qualité supérieure à celles qui n'en utilisent qu'une seule. En effet, si l'analyse des
diverses sources de données converge vers une conclusion commune, la validité interne de
l'étude s'en trouvera accrue.
Pour les besoins de l'étude, il a donc été décidé d'utiliser quatre différentes sources
d'information permettant de trianguler une partie des données et d'accéder à des informations
précises que les autres sources n'auraient pas pu permellre d'obtenir.
9 « Thus any finding or conclusion in a case study is Iikely to be much more convincing and accurate if il is based on several different sources of infonnation [ ... ] }) (Yin, 1994, p. 92).
41
A. Entrevues semi-dirigées
Des entrevues semi-dirigées ont été menées auprès de récepteurs du changement de Mine
Raglan, qui occupent des fonctions à différents niveaux hiérarchiques de l'organisation. Les
questionnaires ont été construits en collaboration avec les cochercheurs et visent
principalement à identifier les perceptions des récepteurs quant aux facteurs de réussite et
d'échec et aux forces et aux faiblesses de la compagnie en matière de changement
organisationnel. Le questionnaire d'entrevue est présenté à l'appendice B.I.
L'échantillon de sujets ayant répondu au questionnaire est non probabiliste et formé par
quotas. La population ciblée était constituée de l'ensemble des individus à l'emploi de la
mine Raglan au mois d'août 2006, à l'exception des cadres supérieurs (membres de la haute
direction). Elle totalisait 531 personnes. Les répondants ont été choisis au hasard soit par leur
superviseur, soit en nous présentant directement sur leur lieu de travail. Comme dans le cas
d'échantillons non probabilistes les méthodes statistiques servant à déterminer la taille
requise d'un échantillon ne sont pas pertinentes (Contandriopoulos et al., 2005), Seidman
(1991) recommande gue le nombre de personnes soumises à un entretien reflète la variété des
pal1icipants et que des entrevues soient menées jusqu'à saturation de l'information. On a
donc interrogé un nombre proportionnel à la réalité de représentants de chaque niveau
hiérarchique et de chaque groupe culturel à l'intérieur de tous les secteurs de travail. Les
entrevues ont été menées jusqu'à ce que l'information devienne redondante. Ainsi, après 22
entrevues, soit 4% de la population, les réponses obtenues ont commencé à se répéter, mais
afin de s'assurer de recueillir un maximum d'opinions, 34 sujets (6% de la population) ont
été interrogés au total.
Tel que mentionné, l'échantillon formé devait être le plus représentatif possible des
proportions de chaque niveau hiérarchique, secteur de travail et groupe culturel. Pour les
besoins de l'étude, on a donc divisé l'organisation en deux niveaux hiérarchiques, soit le
niveau inférieur formé des travailleurs dits exécutants et le niveau supérieur formé des
gestionnaires intermédiaires portant le titre de superviseur ou de contremaître. Il s'agissait
d'employés relevant d'un surintendant et ayant un groupe de travailleurs sous leur
42
supervision. Afin de bien marquer la limite entre les deux niveaux, les individus ayant des
employés sous leur supervision mais ne relevant pas directement d'un surintendant ont été
placés dans le groupe de niveau inférieur. Suivant cette répartition, on a détenniné que 10,5%
de la population appartenait au groupe des superviseurs. Quant à notre échantillon, il était
fonné de six superviseurs, soit 18%. Notons enfin que les surintendants n'ont pas été
interviewés dans le cadre de cette étude.
Par ailleurs, 24% des employés interrogés étaient Inuits alors que ce groupe représente
actuellement 16% de la population des travailleurs de Mine Raglan (D. Colpron,
Communication personnelle, 18 août 2006). À cet effet, une traduction du questionnaire du
français vers l'anglais a été effectuée en prenant soin de conserver la signification exacte des
questions et des réponses. La traduction a d'ailleurs été révisée par un employé inuit dont la
langue maternelle est l'anglais. Enfin, d'autres différences culturelles pourraient être
attribuées au secteur de travail des employés, à leur sexe, à leur âge ou à leur ancienneté. Ces
informations ont donc été recueillies pour chaque répondant. Les caractéristiques de la
population et de l'échantillon soumis à un entretien sont résumées au tableau 3.1.
Tableau 3.1 Comparaison de la composition de la population étudiée et de j'échantillon
interviewé.
Pourcentnge Nombre de Pourcenlnge dela personnes de
population interviewées l'échantillon
Niveau Inférieur 89,5 28 82,4 hiérmchique
Supérieur 10,5 6 17,6
Origine Inuils 16 8 23,5
Non Inuits 84 26 76,5
Dépnrtemenl Ressources humaines 18,6 8 23,5
Environnement Snnté Sécurité 4,5 1 2,9
Services techniques el de surface 20,2 7 20,6
Mine 36,3 12 35,3
Concenlmteur 14,1 4 11,8
Approvisionnement 2,6 2,9
Services administratifs 1,8 2,9
Géologie 1,5 ° °
43
Du point de vue de la recherche, l'entrevue présente des avantages certains, maIS aussI
quelques inconvénients. Elle permet d'avoir un accès direct au sujet, donc à de l'information
dont lui seul dispose et à laquelle la seule observation ne permet pas d'accéder. Les
perceptions des individus appartiennent à cette catégorie d'information. Cependant, la
collaboration des individus implique le risque de la réactivité d'une mesure, c'est-à-dire
l'introduction d'un biais dû à la présence d'un observateur. Le phénomène de désirabilité
sociale est une forme de biais pouvant être induit au cours d'une entrevue et dont il a fallu se
méfier (Contandriopoulos et al., 2005; Mace et Pétry, 2005). Pour ce faire, nous avons insisté
au début de chaque entrevue sur le caractère confidentiel des réponses fournies et sur
l'importance de répondre avec honnêteté pour assurer la validité de la recherche. Cela a
probablement aidé à réduire la réactivité et ainsi augmenter la fiabilité de l'instrument.
D'ailleurs, nous avons rarement senti qu'un sujet éprouvait un malaise devant une question,
mais lorsque la situation se présentait, le sujet était encouragé à répondre en lui rappelant
qu'aucune information ne pouvait être retenue contre lui. À J'opposé, nous avons perçu que
la majorité des répondants ne craignait pas de dire le fond de sa pensée et semblait même
contente de pouvoir exprimer son opinion. D'autre part, comme les entrevues étaient menées
par une chercheure-actrice, il a été important de s'assurer qu'elles soient effectuées avec la
même profondeur que si nous avions été un élément extérieur à l'organisation. En effet,
Coghlan (2003) mentionne le danger que le chercheur-acteur déduise de l'information qui
n'ait pas été explicitement mentionnée par le répondant. Nous avons donc pris soin de
pousser les sujets à formuler clairement leur pensée pour ne pas prendre le risque
d'extrapoler faussement une réponse.
B. Forum d'informateurs clés
Décrit par Collerette et Schneider (2002) comme un outil de collecte de données sur l'état de
l'organisation, la technique du forum d'informateurs clés pennet de recueillir les opinions et
les impressions de personnes choisies au sein de l'organisation et s'exprimant sur un aspect
particulier de celle-ci. Pour la présente étude, des agents de changement choisis comme
cochercheurs ont été appelés à partager une expérience de changement organisationnel vécue
à Mine Raglan. Ils devaient s'exprimer, d'une part, sur leur perception du changement
44
organisationnel auquel ils ont participé en effectuant l'implantation de ce dernier dans la
compagnie et, d'autre part, sur la façon dont ils l'ont opéré. Le forum visait l'obtention de
trois principaux ensembles d'information, à savoir les étapes suivies par les agents dans leur
implantation d'un changement, les facteurs de réussite et d'échec rencontrés et les défis et
particularités propres à la mine Raglan quant à sa gestion du changement.
La technique du forum dïnformateurs clés ne visait pas la recherche de consensus entre les
participants, mais seulement la collecte d'information sur l'organisation. En confrontant les
propos des collaborateurs, on a pu dresser un portrait global et diversifié de l'état des
perceptions du groupe (Collerette et Schneider, 2002). Pour la mener à bien, les cochercheurs
ont été informés quelques semaines à l'avance des thèmes abordés au cours de la rencontre
afin qu'ils puissent préalablement réfléchir à leur expérience vécue à ('occasion d'un
changement organisationnel. Au cours de la rencontre, le rôle du chercheur-acteur était de
stimuler les échanges, de faciliter l'expression des idées et d'encadrer les débats (Collerette et
Schneider, 2002).
Comme pour l'entrevue, le degré de réactivité de cette méthode peut être assez élevé, mais le
fait de considérer les participants comme des cochercheurs et de leur expliquer clairement les
objectifs de l'étude a permis de diminuer ce risque. Par ai lieurs, les cochercheurs identifiés
étant de proches collègues de travail, la confiance existant entre ces individus était assez
élevée pour favoriser la libre expression des opinions de chacun. En tant qu'animatrice de la
discussion, nous avons tout de même pris soin d'équilibrer le temps de parole alloué à chacun
(Collerette et Schneider, 2002). Enfin, il est intéressant de noter que les objectifs de la
rencontre ont évolué au cours de celle-ci à la suite de commentaires reçus de la part de
certains cochercheurs qui jugeaient intéressant d'aborder un sujet plutôt qu'un autre. Les
participants ont donc rempli leur mandat en s'investissant au-delà de ce qui leur était
initialement demandé.
C. Observation participante
Afin de trianguler les données recueillies lors des entrevues et du forum, l'observation
participante a été pratiquée tout au long de l'intervention du chercheur-acteur dans
45
l'organisation. Pour garder trace des observations effectuées (comportements, témoignages,
etc.) ainsi que de l'évolution des perceptions du chercheur-acteur au fil de la recherche, des
notes ont été prises sur une base quotidienne. Par ailleurs, Contandriopoulos et coJlègues
(2005) ainsi que Mace et Pétry (2005) soulignent que la réactivité de cette méthode est faible,
puisque les sujets confondent le chercheur avec le collègue de travail. Sur le plan éthique,
bien que chaque individu ne soit pas systématiquement informé qu'il est observé,
l'organisation, elle, est au courant. De plus, les individus s'interrogeant sur le rôle du
chercheur-acteur ont été informés de la recherche et de ses objectifs.
D. Observation documentaire
L'utilisation de documents est venue compléter les trois autres sources de données par
l'apport d'informations principalement factuelles. Certains documents officiels dédiés à une
consultation interne ou externe ont été ciblés. 11 s'agit des rapports annuels de développement
durable, des résultats de sondages menés par le Département des ressources humaines et des
rapports de performance de certains des services participants. Des documents non officiels
comme des lettres, mémos ou courriels ont aussi servi de source de données.
L'observation documentaire est réputée être la moins réactive des méthodes de collecte de
données (Contandriopoulos el af., 2005). Il a toutefois fallu se méfier des documents officiels
et des communications s'adressant aux parties prenantes externes à l'organisation, car dans
ces cas le phénomène de désirabilité sociale est important et peut considérablement biaiser les
propos exprimés. Dans le domaine de la gestion environnementale, Rhee et Lee (2003)
traitent de ce phénomène comme de l'écart entre la rhétorique véhiculée par une organisation
et son action réelle. Aussi, dans les cas de discordance entre les documents et les autres
sources de données, c'est le contexte qui a dicté laquelle ou lesquelles des mesures devaient
être prises en compte. Cependant, à l'exception des rappol1s de développement durable ou de
performance destinés au public, aux autorités gouvernementales ou aux représentants des
communautés locales, la réactivité des documents étudiés est pratiquement nulle (Mace et
Pétry, 2005).
46
3.3.5 Traitement des données
Afin de compléter le design de notre étude de cas, la façon de lier les données à la proposition
a été arrêtée et les clitères d'interprétation de ces données ont été déterminés. À ces fins, la
méthode de l'appariement de modèles (patlern-matching) proposée par Yin (1994) a été
retenue.
Dans un premier temps, l'information récoltée a été classifiée afin d'obtenir un corpus
structuré de données pouvant servir à l'analyse (Mace et Pétry, 2005). Les informations ont
été regroupées en cinq catégories: les informations factuelles permettant de décrire le
contexte; les informations ayant trait aux forces et aux faiblesses de j'organisation en matière
de changement; les informations permettant d'ordonner les étapes suivies lors des processus
de changement; les informations énonçant les facteurs de réussite et d'échec du changement à
Mine Raglan; les défis et les particularités propres à la mine Raglan en matière de gestion du
changement.
À l'intérieur de ces catégories, un traitement statistique des données recueillies par entrevues
a été effectué afin de produire un portrait global de l'opinion de la population. Les données
recueillies lors du forum ont également été traitées de manière à tàire ressortir, si possible, un
schéma général d'implantation du changement à la mine Raglan. On visait ainsi à faire
émerger des expériences partagées par chaque cochercheur un modèle général représentatif
de la réalité de l'ensemble des agents de changement. Les leviers et les obstacles rencontrés
par chacun ont aussi été regroupés pour être analysés au chapitre suivant.
Dans un deuxième temps, on a procédé à l'analyse proprement dite des données. C'est là
qu'est intervenue la méthode de l'appariement de modèles. Il s'agissait essentiellement de
comparer le modèle et les données théoriques développés au chapitre II avec le modèle
ressortant des observations empiriques faites au cours de la recherche (Contandriopoulos el
al., 2005 et Yin, 1994). Contandriopoulos et collègues (2005) décrivent ce processus de
modélisation des données empiriques comme une formalisation théorique de celles-ci et une
construction progressive d'une explication optimale du phénomène étudié. Pour la présente
47
étude de cas, le critère d'interprétation des données était le degré d'appariement entre les
modèles empirique et théorique.
3.3.6 Validité, fiabilité et réactivité
La qualité du projet de recherche présenté ici repose entre autres sur sa validité interne, c'est
à-dire sur la certitude que ses conclusions reflèteront bien ce qui s'est effectivement passé au
cours de la recherche (Mace et Pétry, 2005). L'étude de cas unique, en raison de la
profondeur d'analyse qu'elle offre, présente en effet un potentiel élevé de validité interne
(Contandriopoulos et al., 2005). Par ailleurs, la validité des données collectées a été assurée
par la triangulation des sources de données, puisque la multiplication des mesures d'un même
phénomène augmente la validité de construit (Yin, 1994).
Pour ce qui est de la validité externe de l'étude proposée, elle correspond à la certitude que
les résultats puissent être généralisés à d'autres organisations (Mace et Pétry, 2005). Dans la
présente étude de cas, les résultats ne pourront être généralisés que s'il y a concordance entre
le modèle empirique développé à partir des données et le modèle théorique construit au
chapitre II. La validité, la fiabilité et la réactivité de chaque instrument de mesure ont quant à
elles été couvertes précédemment lors de la présentation des méthodes de collecte des
données.
Enfin, pour assurer le caractère éthique de la recherche, l'organisation ad' abord été informée
des objectifs visés par celle-ci. Pour ce qui est des sujets, leur consentement libre et éclairé a
été obtenu avant le début de chaque entrevue, de même que lors du forum auquel ont
participé les cochercheurs. Le consentement éclairé signifie que les sujets acceptent de
participer à la recherche en toute connaissance de cause. Le consentement libre des sujets
signifie quant à lui qu'aucune contrainte ou influence indue n'ait été exercée sur eux, qu'on
leur ait accordé un temps de réflexion suffisant et qu'ils connaissaient leur droit de se retirer
en tout temps de la recherche. Enfin le consentement devait être clairement exprimé, mais il
n'avait pas à être écrit, puisque la recherche n'entraînait pas de risques physiques (Mace et
Pétry, 2005). Ces conditions ont été respectées pour les sujets appelés à participer à une
entrevue et pour les cochercheurs. Les résumés de l"information transmise aux sujets et aux
48
cochercheurs avant leur participation sont présentés aux appendices B.2 et B.3. Toutefois,
pour limiter la réactivité de cet instrument de mesure, les informations recueillies par
l'observation participante n'ont pu répondre à ces critères. Pour ce qui est de l'observation
documentaire, elle n'a servi qu'à amasser des informations factuelles et non à rapporter des
propos exprimés par des individus et elle ne nécessitait donc pas le consentement de leur
auteur. Qui plus est, la majorité des documents consultés était de type officiel. Dans tous les
cas, la confidentialité et l'anonymat des infonnations recueillies ont été respectés.
CHAPITRE IV
CAS D'ÉTUDE: MINE RAGLAN
4.1 Historique et particularités de Mine Raglan
Mine Raglan, anciennement propriété de la compagnie Falconbridge Limitée, appartient
depuis août 2006 à la société minière Xstrata. Bien que ses bureaux administratifs soient
localisés à Rouyn-Noranda, les opérations d'extraction et de transformation du minerai de la
mine Raglan s'effectuent sur un site minier situé à l'extrémité septentrionale du Québec dans
la région du Nunavik. La propriété Raglan s'étend sur plus de 1600 hectares de terrain
(Roche, s.d.) au nord du 6l e parallèle, respectivement à 115 km au sud-est el 60 km à l'ouest
des communautés inuites de Salluit et Kangiqsujuaq (Falconbridge LIée - Mine Raglan,
2006). Le site n'est accessible que par voie maritime ou aérienne et seuls les employés de la
mine et de ses sous-traitants, originaires du sud et du nord de la province, y résident.
Avant son acquisition en 2006 par Xstrata, Falconbridge avait effectué des travaux
d'exploration sur la propriété Raglan à partir de 1957. Les développements miniers sur les
claims ne sont toutefois devenus économiquement intéressants qu'au début des années 1990
alors que le marché du nickel a commencé à croître, principalement en raison d'une hausse de
la demande en acier inoxydable (Roche, s.d.). Falconbridge, qui avait déjà entrepris une vaste
étude de caractérisation d.u milieu en 1981, a intensifié ses travaux en 1990 et en 1991 afin
d'acquérir une meilleure compréhension des environnements biophysique et humain dans
lequel la mine Raglan était appelée à s'implanter (Roche, s.d.) et afin « de recueillir les
données environnementales de base nécessaires à la bonne planification du projet minier»
(Roche, 1992, p.5).
50
En J995, FaJconbridge Limitée - Mine Raglan signe le Raglan Agreement (Entente Raglan)
avec la Société Makivik et quatre regroupements politiques représentant les communautés de
Salluit et de Kangiqsujuaq. Cette entente de principe accorde à la mine Raglan Je droit
d'exploiter les ressources minérales de son claim sous certaines conditions ayant trait à la
conservation de l'environnement, à J'attribution d'emplois aux Inuits, au développement
économique du Nunavik et au versement de redevances monétaires aux cinq parties
signataires de l'entente. Pour assurer le respect des différentes closes de l'entente, maintenir
un dialogue continu sur les questions qu'elle aborde et permettre aux Inuits d'exprimer leurs
préoccupations notamment à l'égard des enjeux environnementaux, le Raglan Committee
(Comité Raglan) est formé par les signataires de l'entente et depuis se réunit de deux.à quatre
fois par année (SNCcLavalin, 2006).
L'étude d'impact environnemental, l'Entente Raglan et l'approbation du projet minier par les
autorités gouvernementales ont permis de débuter la construction de la mine en 1996 pour
commencer à la fin de 1997 les activités d'extraction. Ce chantier a d'abord requis la
réhabilitation d'infrastructures déjà existantes dont un port de mer et 62 kilomètres (km) de
route ayant appartenu à la compagnie Asbestos Corporation Limited, qui avait exploité la
mine d'amiante Purtuniq dans la même région entre 1972 et 1984. Mine Raglan a également
dû procéder à J'aménagement de plus de 100 km de nouvelles routes, à la mise à niveau d'un
aéroport et à la construction d'un barrage afin de former un réservoir d'eau douce d'une
superficie de 9,5 km2 et d'une capacité de J 500000 m3 alimentant la mine en eau brute et
en eau potable. Diverses autres infrastructures essentielles à l'exploitation minière ont aussi
été construites, dont un concentrateur capable de traiter 800 000 tonnes de minerai par an,
une centrale énergétique au diesel de 18 mégawatts (MW) et divers autres lieux de services
relatifs à la production (complexe d'habitation, usines de traitement des eaux usées
domestiques et industrielles, bureaux, garages, site d'enfouissement, incinérateur, parc à
résidus miniers, etc.) (Roche, s.d.).
Ces différentes infrastmctures sont réparties sur trois sites (voire figure 4.]) soit Katinniq, où
se concentrent les activités minières actuelles, Baie Déception où se trouvent les installations
51
portuaires ct Donaldson où sont situés l'aéroport, le campement dédié aux activités
d'exploration minière et les prochains sites d'exploitation. Aujourd'hui, le concentrateur a
une capacité annuelle de 1,1 million de tonnes de minerai et produit environ 140000 tonnes
de concentré par an contenant environ 17% de nickel, 5% de cuivre et 0,3% de cobalt (Mine
Raglan, à paraître). L'ensemble des opérations requiert la production de 47 MW d'électricité
nécessitant une consommation de plus de 45000000 de litres de diesel par an. Raglan
compte aussi trois mines souterraines et une fosse à ciel ouvert en opération, cinq fosses à
ciel ouvert dont l'exploitation est terminée et projette J'exploitation de quatre mines
souterraines et quatre fosses à ciel ouvert. Les réserves de minerai, constamment renouvelées
par la découverte de nouveaux gisements, permettront de poursuivre l'opération du site pour
au moins 20 autres années.
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,~.-.- ~---r 'R I \ .,
.~~ 7( 'l.-- ----.=-,4f-';'-.'-----.
Figure 4.1 Localisation des sites de Mine Raglan
52
4.2 Mine Raglan et la gestion environnementale
Deux principaux facteurs ponctuent l'attitude de Mine Raglan quant à sa volonté d'honorer
ses responsabilités sociale et environnementale. D'une part, l'isolement du site d'exploitation
et conséquemment la multitude d'infrastructures qu'il comporte font en sorte que Xstrata
Nickel - Mine Raglan doive assurer elle-même un nombre de services environnementaux
plus grand que la moyenne des sites industriels. En effet, en plus des activités
environnementales traditionnelles dans le monde minier comme le traitement des eaux usées
industrielles (trois usines de traitement) et Ja gestion d'un parc à résidus, Mine Raglan
assume également la gestion de ses eaux usées domestiques (trois usines de traitement), de
ses matières résiduelles (un site d'enfouissement, un incinérateur et un site de brûlage à ciel
ouvert), d'un port de mer (une équipe de premiers intervenants maritimes en cas de
déversement) et d'un important parc pétrolier (un total de 24 réservoirs de plus de 10000
litres dispersés en divers endroits sur la propriété). Par ailleurs, Mine Raglan procède à un
très grand nombre de suivis environnementaux afin d'assurer Je maintien de la qualité du
milieu récepteur. Ces études visent l'évaluation de J'état de la faune aquatique (omble
chevalier (Sa/velinus a/pinus), organismes benthiques, moule bleue (Myli/us edulis), le
contrôle des retombées de poussières, Je suivi de la qualité physico-chimique de J'eau, etc. En
plus de ses suivis environnementaux et du contrôle de ses infrastructures présentant un
impact environnemental potentiel, Mine Raglan assure une communication ouverte et
constante avec ses partenaires inuits pour leur soumettre ses projets et entendre leurs
demandes et leurs préoccupations. Afin d'encadrer ces activités, elle s'est dotée en 2001 d'un
système de gestion environnementale enregistré selon la norme ISO 14001.
D'autre part, la gestion environnementale de Mine Raglan est influencée par Jes demandes de
la société mère. À l'époque où Raglan était propriété de FaIconbridge LIée, le bureau
corporatif imposait déjà certains standards environnementaux à ses exploitations. En outre,
l'enregistrement ISO 14001 répondait à une requête de Falconbridge LIée. Par ailleurs, la
compagnie s'était engagée à pratiquer une exploitation minière soutenable et produisait
chaque année un rappo11 de développement durable. Depuis J'achat de Falconbridge Liée par
Xstrata, ces standards d'exploitation sont mieux définis. On ne parle plus simplement de
53
respect du prIncIpe de développement durable, mais bien de 17 standards d'exploitation
auxquels les unités d'affaire (dont Mine Raglan) doivent se conformer. Face au respect de ces
standards, Xstrata agit à la manière d'un organisme réglementaire et audite ses exploitations
pour évaluer leur performance. Les standards de Xstrata visent à promouvoir la santé et la
sécurité au travail, l'environnement et les relations avec les communautés dans 17 contextes:
1. Leadership, responsabilité et éthique de l'entreprise;
2. Planification, ressources, objectifs et cibles en matière de santé, sécurité,
environnement et communauté;
3. Compétence et comportement des employés;
4. Communication et obligations à l'égard des parties prenantes;
5. Gestion des risques et du changement;
6. Réponse aux urgences et catastrophes;
7. Conformité légale et contrôle de documents;
8. Intégrité opérationnelle;
9. Santé et hygiène industrielle;
10. Biodiversité et gestion du territoire;
Il. Sous-traitants, fournisseurs et palienaires;
12. Communautés;
13. Gestion de projet;
14. Responsabilité commerciale du cycle de vie;
15. Gestion des incidents;
16. Évaluation et rapport de performance;
17. Urgences, crises et continuité de l'entreprise.
(Xstrata, 2006)
C'est donc principalement en raison de la diversité de ses activités et de l'influence de la
société mère que Mine Raglan a développé au fil des ans un système de gestion
environnementale complet permettant d·améliorer sa performance environnementale de façon
continue. Fait à noter, le niveau de gestion environnementale de Mine Raglan est
représentatif de celui de son secteur d·activité. Avec sa politique environnementale, ses
54
nombreuses procédures et normes de gestion environnementale internes et son Service de
l'environnement comptant actuellement sept employés à temps plein, Mine Raglan fait
montre d'un haut niveau de gestion environnementale, tout comme la moyenne des
entreprises de la métallurgie, des mines et des métaux (CSMOE, 1999).
4.3 Les modèles de changement en vigueur à Mine Raglan
4.3.1 Processus de changement vécus par des agents
Au cours du forum d'informateurs clés, sept témoignages ont été recueillis de la part d'agents
de changement amenés à exposer une expérience de changement déjà vécue. Ces agents
devaient présenter les étapes par lesquelles ils étaient passés pour réussir l'implantation du
changement désiré. Ces sept cas seront d'abord présentés et, par la suite, comparés entre eux.
A. Service prévention: augmentation de la présence du Service prévention lors des arrêts
planifiés au concentrateur
Le Service prévention présentait ici un cas de changement évolutif, planifié et visant d'abord
une composante stratégique de l'organisation, en l'occurrence sa participation active aux
arrêts planifiés. Le changement vécu répondait à un problème identifié par le Service
prévention et le Département du concentrateur, à savoir le nombre trop élevé d'accidents
survenus pendant les arrêts planifiés. La cause du problème avait été soulevée par les cadres
du Département du concentrateur qui affirmaient que le Service prévention devait être plus
présent dans l'usine lors des arrêts planifiés. C'est donc autour de ce besoin que se sont
articulées la planification et la réalisation du changement dans le respect des étapes
suivantes:
1. Identification du besoin de changement en réponse à un problème;
2. Planification de la solution;
3. Communication du plan et consultation;
4. Implantation du changement;
5. Évaluation du changement et ajustements;
6. Suivi et maintien du changement;
7. Documentation du changement effectué.
ss
Ce processus s'est effectué par une succession d'essais et erreurs. Le Service prévention a
noté que le besoin de changement avait été mal défini au dépaIt, et qu'en raison de cela, la
réalisation d'un changement adapté au problème s'est avérée plus difficile que prévu.
Aujourd'hui, le changement est encore maintenu et il continue de s'améliorer.
B. Service formation: augmentation du taux de représentativité des Inuits parmi les
employés de la mine
Mine Raglan s'est engagée dans son certificat d'autorisation initial à atteindre un nombre
d'employés inuits équivalent à 20% de sa main d'œuvre totale (Québec, 1995). Au moment
de conduire cette recherche, ce taux était de 16% (O. Colpron, communicat ion personnelle,
18 août 2006) et Mine Raglan n'est à ce jour jamais parvenue à honorer cet engagement.
Cette situation a graduellement mené à une perte de crédibilité de la firme vis-à-vis ses
partenaires inuits représentés au Raglan Employment and Technical Training Commiltee
(RETIC). L'augmentation du taux de représentativité des Inuits à Mine Raglan était le
besoin de changement identifié par le Département des ressources humaines. Ce besoin
agissait comme point de départ d'un processus de changement évolutif, planifié et visant en
premier lieu une stratégie de gestion de r organisation, soit ses engagements en matière de
formation et d'embauche de personnel inuit.
1. Identification du besoin de changement en réponse à un problème;
2. Recrutement d'une coalition en faveur du changement;
3. Planification du changement;
4. Production de gains à court terme pour renforcer la coalition.
Ce changement est toujours en cours et la stratégie de gestion n"est que partiellement
modifiée. Toutefois des changements culturels (accroissement de la volonté des superviseurs
à intégrer, accommoder et garder leurs employés inuits) et structurels (intégration de cet
indicateur de performance aux plans de performance individuels de certains cadres) s'opèrent
peu à peu pour appuyer le changement stratégique en cours.
56
C. Service informatique: changements structurels au sein du Service informatique
Le Service informatique nous présente ici un exemple de changement évolutif, planifié et
visant une composante structurelle du service: son organisation interne. Ce changement est
survenu dans un contexte où l'environnement de travail était constamment remodelé et où la
charge de travail s'accroissait de façon continue sans que le service ne se réorganise en
conséquence et de manière efficace. Plus qu'un simple besoin de changement, l'organisation
faisait alors face à une crise à laquelle devait répondre le changement proposé.
1. Identification du besoin de changement en réponse à un problème;
2. Planification de la solution;
3. Communication du plan et consultation;
4. Délégation de mandats;
5. Implantation du changement;
6. Implantation d'un système de mesure pour évaluer de façon proactive des besoins de
changement futurs.
L'implantation de ce changement a été accomplie avec succès et les indicateurs de
performance développés permettront maintenant de cerner de futurs besoins de changements
structurels avant que ceux-ci ne conduisent à une crise.
D. Ingénierie mine: implantation d'un nouveau système informatique
L'exemple de changement présenté par le Service de l'ingénierie mine est évolutif, planifié et
visait le remplacement d'une composante structurelle (un système infomlatique). Son agent
de changement affirme également qu'il est caractérisé par le manque de planification. Il se
distingue par ailleurs des trois exemples précédents, parce qu'il découle de la volonté d'un
surintendant d'implanter un changement structurel, plutôt que de répondre à un besoin se
manifestant par un problème vécu par l'organisation. La solution a donc été choisie par un
leader qui n'était pas l'agent de changement.
1. Identification d'un besoin de changement en réponse à la vision d'un leader;
2. Désignation d'un agent de changement;
3. Planification du changement;
4. Implantation du changement;
57
5. Maintien du changement.
Dans Je cas présenté, l'agent de changement signale qu'il aurait dû remettre en question les
hypothèses de départ de son surintendant (causes du problème à régler, solution choisie, plan
d'action et ressources allouées) avant de procéder au changement demandé.
E. Département concentrateur : la nouvelle ère du parc à résidus
La gestion du parc à résidus miniers de Mine Raglan présente des défis particuliers en raison
de l'éloignement du site et de la technique employée. En effet, plutôt que de conserver les
résidus sous fonne liquide à l'intérieur de digues comme cela se fait dans les exploitations
traditionnelles, Mine Raglan a choisi de diminuer le taux d'humidité de ses résidus afin d'en
faire un monticule et ainsi de les intégrer au pergélisol pour les rendre inertes. Cependant, les
connaIssances acquIses depuis les débuts de l'exploitation à propos des changements
climatiques et de leurs conséquences sur le réchauffement de l'Arctique et la fonte du
pergélisol viennent remettre en question les fondements techniques du mode de gestion du
parc à résidus initialement adopté par Mine Raglan. Ces inquiétudes, doublées d'un laxisme
quant au respect du plan de déposition et de recouvrement des résidus, ont entraîné une perte
de crédibilité de Mine Raglan en ce qui concerne sa faculté de gérer convenablement son parc
à résidus. Le Département du concentrateur a donc entrepris de redresser la situation:
1. Identification du besoin de changement en réponse à un problème;
2. Désignation d'un agent de changement;
3. Développement d'une vision;
4. Planification du changement;
5. Communication du problème, de la vision et du changement proposé;
6. Délégation de mandats;
7. Implantation du changement;
8. Évaluation du changement et ajustements;
9. Bilan: éélébration du changement.
Cet exemple de changement évolutif, planifié et visant une stratégie de gestion est toujours en
progression. L'implication de nombreux experts dans la planification du changement a par
58
ailleurs certainement pennis de développer une stratégie solide et crédible auprès des divers
acteurs chargés de l'appliquer.
F. Six Sigma: défis de l'implantation de la méthode Six Sigma à Raglan
Six Sigma est une méthodologie de gestion de projet développée par Motorola au cours des
années 1980 et adoptée par la compagnie Noranda (devenue Falconbridge Ltée puis Xstrata)
en 1999. Ressemblant en plusieurs points à la gestion de la qualité totale, les projets menés
selon la méthode Six Sigma visent à optimiser un processus en se fondant sur des données
fiables et en se fixant des cibles de perfonnance mesurables. Le tout est orchestré dans le but
d'obtenir « des résultats significatifs et durables» (Falconbridge, 2005, p.6). L'implantation
de cette méthodologie à Mine Raglan en réaction à une volonté corporative constitue le
processus de changement décrit par l'agent interviewé.
1. Identification du besoin de changement principal en réponse à une volonté
corporative;
2. Identification d'un agent de changement principal;
3. Communication: recrutement d'une coalition en faveur du changement;
4. Identification d'agents de changement secondaires;
5. Fonnation des agents de changement secondaires;
6. Sélection des projets de changement spécifiques;
7. Communication des projets de changement spécifiques;
8. Implantation des changements principal et spécifiques;
9. Communication des résultats;
10. Suivi et maintien des changements principal et spécifiques.
Ce changement évolutif et planifié visait lui aussi une composante stratégique de
l'organisation, mais devait à tenne modifier la culture organisationnelle pour que le recours à
la méthodologie Six Sigma devienne un réflexe naturel chez les gestionnaires. La structure
organisationnelle était elle aussi affectée, puisque certains effectifs étaient temporairement
retirés de leur département d'attache pour être assignés à la réalisation d'un ou de plusieurs
projets d'optimisation. Jusqu'à l'achat de Falconbridge Ltée par Xstrata, ce changement était
maintenu, amélioré et donnait des résultats tangibles en terme d'économies réalisées.
59
Cependant, l'administration de Xstrata a finalement décidé de ne plus avoir recours à la
méthodologie Six Sigma et le changement principal n'a donc pas été maintenu.
G. Service environnement: implantation d'un SGE ISO 14001
En 2000, les administrateurs du bureau corporatif de Falconbridge LIée expriment la volonté
d'obtenir une accréditation ISO 14001 pour chacune des exploitations canadiennes de la
compagnie. Pour ce faire, ils désignent un responsable de l'implantation des SGE qui à
l'époque est également surintendant du Service environnement de Mine Raglan. Ce
responsable exercera beaucoup de pression pour que Mine Raglan montre la voie aux autres
exploitations et devienne la première à recevoir l'accréditation ISO 14001 chez Falconbridge.
1. Identification du besoin de changement en réponse à une volonté corporative;
2. Identification d'un agent de changement principal;
3. Identification d'agents de changement secondaires;
4. Formation des agents de changement;
5. Préparation du changement;
6. Validation du travail accompli avec des pairs d'autres divisions;
7. Implantation du changement;
8. Suivi et adaptation du changement en fonction de l'expérience acquise.
Bien que ce changement planifié de stratégie de gestion se soit effectué sur une courte
période et qu'il ait engendré la modification d'un grand nombre de structures au sein de
l'organisation, nous le qualifierons néanmoins de changement évolutif. En effet, les
structures affectées sont aujourd'hui encore en continuelle amélioration et le changement
culturel ne s'opère que très graduellement. Qui plus est, les fondements même de l'entreplise
n'ont pas été affectés par l'implantation de cet outil de gestion, bien que celui-ci ait aidé
Mine Raglan à être plus rigoureux dans l'application de ses engagements environnementaux,
qu'ils soient légaux, internes ou élaborés avec ses parties prenantes.
Le tableau comparatif (tableau 4.1) de ces sept cas de changement permet de tirer certaines
observations. D'abord, on constate que Mine Raglan mise généralement sur des changements
évolutifs et planifiés et que ceux-ci visent en premier lieu les composantes structurelles ou
60
stratégiques de l'organisation. Ensuite, deux origines du changement se détachent également
des exemples énumérés. Dans les cas A, B, C et E, il s'agit d'un besoin de changement
émergeant d'un problème identifié par l'organisation (tant sa base que ses gestionnaires
intermédiaires et supélieurs) dans un mouvement bollom up. Dans les cas D, F et G, il s'agit
plutôt d'un besoin de changement découlant d'une volonté exprimée par le haut de la
pyramide hiérarchique (surintendant, bureau corporatif) selon une approche qui pourrait être
qualifiée de top dowl1. Aucune des deux origines ne semble faciliter l'implantation du
changement plus que l'autre, puisque, tel que présenté plus loin, des barrières et des leviers
du changement ont été identifiés pour chaque cas. Nous verrons cependant dans le
paragraphe qui suit comment ces deux modèles se distinguent et comment ils pourraient être
améliorés pour s'approcher du modèle théorique afin de faciliter le processus de changement
tout en respectant les caractéristiques de l'organisation.
Cli
Tableau 4.1 Comparaison de sept cas de changements vécus par différents services de Mine Raglan
A
Prévention
B Formation
C Informatique
D
Ingénierie mine
E Coneen trateu r
F
Six Sigma
G Environnement
.",
0. >.
1
Evolutif
Planitié
Stratégie
Evolutif
Planitié
Stratégie
Evolutif
Planil'ié
Structurc
Evolutif
Planitié
Structure
Evolutif
Planitié
Stratégie
Evolutif
PI,milié
Stratégic
[nllutif
Planitié
Stratégie
Manifestation du besoin de
changement en réponse il un
problème
Manifestation du besoin de
changement en réponse il un
problème
Manifestation du besoin de
changement en réponse il un
problème
Manifestation du besoin de
chilngemcnt en réponse il la "ision
d'un leader
Manifestation du besoin de
changement en réponse il un
prohlèmc
Manifcsl<.ltion du besoin dc
changemcnt en réponse il la ;'ision
d"un leader
Manifestation du hesoin de
changement en réflonse il la vision
d'un leader
Désignillion d'un agent de
changement
Désignation d'un agent de
changement
Désignation d'un agent dc
eh<.lngcmcnl principal
Désignation d'un agent de
changement princip;Ji
Communication: recrutement d"une Communication: Recrutement d'une
coalition en faveur du changement coalition en faveur du changement
Désignalion d'agents de ch,lngcment
second'lii·es
Désignation d'<.Igents de changement
secon da ires
Fonn,ltion des agents de changement
secondaires
Formation des agents de changemcnt
Dé,'c1llppenlent d"unc "ision
Planitication de la solution Planitication du changement Planitieation de la solution Plan i tieal ion du chilngement Planitication du changcmcnt Sélection des projets de ch<.lngement
spéci liqucs
Préparation du changement
Jl :.> 02
'l.LI Communication du plan ct
consultation
Communication du plan ct
consultation
V<.Ilidation du plan avcc des cxperts
Communic<.ltion du problèmc, dc la
vision ct du ehilngement proposé
Communication des projets de
changclllcilt sfléeitiques
Validation du tra"ail <.Ice()mpli a"ec
des fl<.lirs
Délégation de mandats Délegation de mandaIs
Implantation du changement Production de gains <1 court terme Implantation du changemcnt Implantation du changement Imfllantation du changcmcnt InlJ,l;mtation des changements Implantation du changement
princip<.ll ct spécitiques
Évalu<Jlion ct ajustements Évaluation et ajustemcnts
Communication des résultats pour Communic;ltion des n:-sultals
renforcer la coalition
Sui"i ct m<.lintien du changement Maintien du changement Suivi ct maintien du changement Suivi etmainticn des changelT\ents Suivi ct adapl<Jtion du changement en
princip<.I1 et spéeitiques fonction de l'expérience acquise
Documentation du changement lillplantation d'un système de mesure Bilan' célébrer le changemcnt
effectué pour évaluer de façon proactive des
besoins de changement futurs.
62
4.3.2 Le changement: comparaison des modèles empirique et théorique
De ces exemples de changement nous pouvons donc dégager deux modèles appJiqués par
Mine Raglan, le premier découlant de J'identification d'un problème par l'organisation et le
second s'appuyant sur un désir ou une vision manifestée par le haut de la pyramide
hiérarchique. Ces deux processus sont cependant très semblables, puisqu'une seule étape les
distingue réellement. En effet, lorsque le besoin de changement origine d'un problème
identifié de l'intérieur, la désignation d'un agent de changement se fait de façon non officielle
parmi les personnes ayant participé à définir le problème. De ce fait, les agents de
changement rencontrés n'ont pas mentionné Je choix d'un agent de changement comme une
étape précise du processus. À l'opposé, lorsque le besoin de changement émane de la vision
d'un leader ou d'un groupe de leaders, celui-ci doit désigner un agent qui implantera le
changement désiré. Les agents de changement interrogés, qui ont participé à ce type de
processus, ont tous identifié le choix du ou des agents comme une étape officielle de leur
expérience de changement.
Une exception a été rencontrée sur ce sujet, soit le cas de la modification du mode de gestion
du parc à résidus (E). L'agent ayant participé à ce changement n'a pas mentionné la
désignation de l'agent de changement comme une étape officielle du processus. Pourtant, des
informations recueillies par l'observation participante nous permettent d'affirmer que cet
agent a bel et bien été officiellement choisi par le surintendant du concentrateur pour
accomplir ce changement. Ainsi, bien que ce besoin de changement provienne d'un problème
identifié à l'interne, il y a tout de même eu identification formelle de l'agent.
En se basant sur les résultats recueillis, nous sommes d'avis que deux facteurs influencent le
degré de formalité de la sélection des agents de changement. D'une part, l'ampleur du projet
à réaliser de même que sa distinction par rapport aux tâches régulières nécessitent ou non
qu'un agent soit spécifiquement assigné à la réalisation du changement. Dans des cas comme
ceux de la prévention (A) ou de la formation (B), le changement à implanter relève des
responsabilités préétablies de ces secteurs et peut s'intégrer à leurs activités régulières. Il n'y
a donc pas nécessité de les désigner officiellement et spécifiquement comme responsables du
63
changement, puisqu'ils le sont par définition. Dans des cas comme ceux de l'ingénierie mine
(D), du concentrateur (E), de Six Sigma (F) ou de l'environnement (G), les changements
vécus exigeaient qu'une personne soit spécifiquement assignée à la tâche, puisque celle-ci
n'entrait dans la description de poste ou les responsabilités prédéterminées d'aucun individu.
D'autre part, si le changement est guidé par le leader en ayant identifié le besoin, comme
dans le cas de l'informatique (C), l'agent de changement n'a pas à être officiellement
désigné, étant donné que cette attribution se fait naturellement.
Deux approches du changement existent donc à Mine Raglan et se distinguent selon l'origine
du besoin de changement et la désignation officielle de l'agent responsable. Le reste du
processus est semblable pour les sept cas observés, bien que certaines étapes soient omises ou
ajoutées chez l'un ou chez l'autre. Nous proposons donc les étapes suivantes comme modèle
de changement empirique observé à Mine Raglan:
1. Détermination d'un besoin de changement en réponse à un problème diagnostiqué à
l'interne ou à une vision provenant du haut de la pyramide hiérarchique (7 cas sur 7);
2. Désignation officielle ou non officielle d'un agent de changement principal (4 cas sur
7);
3. Communication du besoin de changement pour recruter une coalition en faveur du
changement (2 cas sur 7);
4. Au besoin, sélection des agents de changement secondaires (2 cas sur 7);
5. Formation des agents sur le changement à accomplir (2 cas sur 7);
6. Développement d'une vision (l cas sur 7);
7. Planification et préparation de l'implantation du changement (7 cas sur 7);
8. Validation du plan avec des experts ou des pairs (2 cas sur 7);
9. Communication à l'interne des changements planifiés pour information, consultation
et approbation (4 cas sur 7);
lO. Au besoin, délégation de mandats (2 cas sur 7);
lI. Implantation du changement (6 cas sur 7) ou production de gains à court terme (l cas
sur 7);
12. Évaluation du changement et ajustements (2 cas sur 7);
13. Communication des résultats pour renforcer la coalition (2 cas sur 7);
64
14. Suivi, maintien et adaptation du changement en fonction de l'expérience acquise (5
cas sur 7);
15. Clore le changement: faire le bilan du changement, le célébrer, le documenter,
implanter un système de mesure pour évaluer de façon proactive des besoins de
changement futurs (3 cas sur 7).
Ce processus est comparé au modèle théorique développé au chapitre Il dans le tableau 4.2. Il
est intéressant de constater que si le modèle empirique observé à Mine Raglan présente
certaines lacunes, des étapes originales ont toutefois été spontanément développées par les
agents de changement de la mine. De ce fait, les deux modèles présentés gagneraient à être
améliorés.
On constate que le modèle ayant cours à Mine Raglan est déficient sur certains points.
D'abord, à l'étape de la décristallisation, le développement d'une vision claire de l'état à
atteindre n'a pas systématiquement lieu. Il semble que certains acteurs tiennent pour acquis la
clarté de leur vision sans s'attarder à la définir concrètement. Cette étape est pourtant
essentielle si l'on veut par la suite être en mesure de communiquer cette vision, qui sera
toutefois appelée à se raffiner au cours des étapes subséquentes. Aussi, aucun des agents n'a
mentionné avoir procédé à un diagnostic de J'écal1 qui doit être comblé entre la situation de
départ et l'état à atteindre. L'observation participante et documentaire nous apprend toutefois
que cette étape est effectuée dans plusieurs cas de changements à Mine Raglan. Par exemple,
la méthodologie Six Sigma tel qu'appliquée à J'époque chez Falconbridge Ltée prévoit une
étape de mesure qui vise à «établir et vérifier les métriques du projet pour évaluer la
performance» à atteindre (Falconbridge, 2005, p.6). Dans le cas du changement effectué par
le Service prévention au concentrateur, la cible à atteindre était de ne générer aucun accident
durant les arrêts planifiés. Cependant, le besoin qui avait été diagnostiqué n'était pas
seulement de diminuer les accidents, mais aussi d'accroître la présence du Service
prévention. Il aurait donc fallu évaluer en termes concrets (nombre d'heures, d'effectifs, de
services offerts, etc.) l'état actuel et l'état à atteindre pour réaliser la cible de zéro accident.
•
Tableau 4.2 Comparaison des modèles de changement théorique tiré de la littérature et empirique tiré de ['exJ1érience des agents de changement de Mine Raglan
65
§
.~ =~
'l; .;: :J
':J o
li E OJ > 3 ~ , N
.~
.~
'li
~
:Jc:: ~
Modèle théorique
1.1- Manifestation de la nécessité du changcment, vision d'un état ù atteindre en réponse à des pressions internes,
externes ou anticipées
.2- Diagnostic de l'écart entre la situation actuelle et l'état souhaité
.3- Désignation d'un agent de changement ou d'un groupe d'agents
1.4- Consultation pour développer une vision d'ensemble de l'état il atteindre et des moyens généraux d'y parvenir
1.5- Communication de la vision et du diagnostic et développement d'un sentiment d'urgence
.6- Création d'une coalition formelle ou informelle en faveur du changement
.7- Planitication du changement en tenant compte des composantes culturelles, structurelles et stratégiques de
l'organisation
2.1- Rendre les outils ct ressources nécessaires au changement disponibles au sein de l'organisation
2.2- Générer des gains à court terme
2.3- Consolider les gains en communicant les succès et produire plus de changement
3.1- Rentorcer et institutionnaliser le changement en s'assurant qu'il est cohérent a\'cc la culture, la structure et les
stratégies, en procédant aux ajustement nécessaires et en communicant les résultats
3.2- Surveiller le progrès et faire les ajustements nécessaires
Modèle empirique
1- Manifestation d'un besoin de changement en réponse à un problème identitié ù Ilnterne ou il une vision provenant du
haut de la pyramide hiérarchique
6- Dé\'eloppement d'une \'ision
2- Désignation officielle ou non oflicielle d'un agent de changement pl'incipal
4- Au besoin, idClllilication des agents de changement secondai l'CS
5- Fonnation des agents sur le changement à accomplir
3- Communication du besoin de changement dans le but de recruter ulle coalition en faveur du changemellt
7- Planitication et préparation de l'implantation du changement
8- Validation du plan avec des experts ou des pairs
t)- Communication à l'interne des ehangemcnts planltiés pour intiJrlllation, consultation et approbation
10- Au besoin, délégation de mandats
11- Implantation du changement ou production dc gains il court tenne
13- Communication des résultats pour renforcer la coalition
1~- Évaluation du changement ct ajustements
14- Suivi, maintien et adaptation du changement en t()netion de l'expérience acquise
15- Clore le changement: faire le bilan du changement, le célébrer, le documentcr, implanter un système de mesure pour
é\'aluer de façon proactive des besoins de changement futurs
1
66
La désignation fonnelle du ou des agents de changement est aussi une lacune dans plusieurs
cas de changement à Mine Raglan. Tout comme pour la définition de la vision, la clarté est de
mise pour responsabiliser un ou plusieurs individus quant à la réalisation du projet de
changement. Identifier un service responsable n'est pas suffisant. L'implantation du
changement doit être imputable à un ou à des individus clairement désignés. À Mine Raglan,
le système de rotation des effectifs fait en sorte que deux agents de changement principaux
sont dans certains cas responsables en alternance de l'implantation du changement. Nous
recommandons d'ailleurs que deux agents de changement soient désignés pour chaque
changement afin d'assurer une continuité dans J'implantation. Quant aux agents secondaires,
ils sont sélectionnés au besoin, selon le type de changement.
La communication et la consultation sont des lacunes majeures à Mine Raglan, qui mettent en
péril la réussite de bon nombre de changements. Cette question sera abordée plus en détail
dans la suite de notre analyse, alors que la perception des récepteurs du changement sera
interprétée. Cependant, nous pouvons d'ores et déjà affirmer que les agents devront
développer les moyens nécessaires à la création d'un sentiment d'urgence (Burke, 2002;
Kotter, 1995) pour chaque changement à implanter. Une insatisfaction avec le statu quo
(Schrader, 1995) doit être engendrée par une communication misant sur des images fortes et
sur un niveau de langage adapté à l'audience (Maurer, 2005). On s'attaquera ainsi à la
résistance au changement en faisant comprendre la nécessité (Burke, 2002; Hoffman, 2000).
La création d'un sentiment d'urgence permettra également de recruter une coalition officielle
ou non officielle en faveur du changement, étape qui est souvent négligée à Mine Raglan.
Pour conclure la phase de décristalJisation, tous les agents rencontrés à Mine Raglan
procèdent à la planification du changement désiré, mais aucun n'a mentionné tenir
spécifiquement compte des composantes culturelles, structurelles et stratégiques de
l'organisation dans cette préparation. Ces éléments sont peut-être considérés de façon
naturelle par les agents, mais ces derniers gagneraient à prendre conscience de la nécessité de
prévoir des changements qui soient cohérents avec l'organisation sinon de modifier les
aspects de l'organisation qui ne cadrent pas avec le changement souhaité.
67
Par ailleurs, nous constatons dans la phase mouvement que les agents ne désignent pas la
sélection des outils et des ressources nécessaires au changement comme une étape spécifique
de leurs projets de changement. Nous considérons qu'il est nécessaire de bien déterminer ces
besoins pour ensuite s'assurer d'y répondre afin de mener à bien le changement. Un seul
agent (exemple B), a mentionné viser de petites victoires ou gains à court terme dans son
implantation du changement. C'est pourtant ce que recommandent Dessler, Starke et Cyr
(2004), Hoffman (2000) et Kotter (1995). Il est à souligner que la communication des
résultats est aussi une lacune à Mine Raglan. Celle-ci permettrait toutefois d'augmenter le
niveau de confiance des récepteurs du changement vis-à-vis des gestionnaires et des agents.
Les changements subséquents, s'ils s'inscrivaient dans la poursuite d'un même projet ou d'un
autre, s'en trouveraient dès lors facilités.
La recristaJlisation semble être bien maîtrisée par les agents de changements de Mine Raglan.
En effet, cinq agents sur sept affirment avoir procédé au suivi, au maintien ou à l'ajustement
du changement implanté. Cependant, aucun n'a mentionné avoir estimé le niveau de
cohérence du changement avec la culture, les structures et les stratégies de l'organisation afin
de procéder aux ajustements nécessaires.
Cependant, les agents de changement ont également intégré à leurs projets de changement
certaines étapes d'une grande utilité que nous ajouterons à notre modèle théorique. Ainsi, la
formation des agents au changement à implanter s'est avérée une formule très intéressante
pour les projets qui y ont eu recours. Par exemple, les responsables de l'implantation du SGE
ISO 14001 et des projets Six Sigma ont été fonnés à la méthodologie à utiliser, aux outils
dont ils pouvaient disposer et également à la nature des changements à introduire. Cette étape
pourrait porter le nom de préparation des agents, puisque ceux-ci peuvent se fonner ou
s'infonner par divers moyens.
La validation du plan de changement avec des experts ou des pairs est aussi une approche
intéressante venant compléter les connaissances et aptitudes de base de l'agent. Bien qu'elle
ne soit pas toujours nécessaire, les agents gagneraient à y avoir recours aussi fréquemment
que possible. La communication à J'interne des changements planifiés est aussi une étape
68
pertinente du processus de décristallisation pour préparer l'organisation au changement.
Celle-ci vient s'ajouter aux étapes de la consultation et de la communication de la vision et
du diagnostic, qui sont préalables à la planification. Dans un même ordre d'idée, c'est à la
phase de décristallisation que des mandats pour la réalisation du changement doivent être
délégués, si le projet le requiert.
Trois agents de Mine Raglan ont mentionné des actions qui sont survenues à la toute fin du
projet et qui ont permis de clore le changement. Bien que celui-ci, comme toute composante
d'une organisation, doive constamment se renouveler, les trois agents de la mine Raglan
croient bon de poser certaines actions venant boucler la boucle. L'un d'eux propose de
documenter le changement implanté afin d'archiver l'expérience et les connaissances
acqUises en vue d'y référer ultérieurement (cas A). Un autre dit avoir développé des
indicateurs pour cerner de manière proactive les besoins de changement futurs (cas C). Un
dernier affirme avoir célébré le changement effectué avec les individus qui y ont pris part
(cas E). Dans tous ces cas, il semble que la clôture officielle du changement a permis à
l'organisation de se tourner vers l'avenir et de se préparer à faire face à de nouveaux
changements.
4.3.3 Changement de nature environnementale: implantation d'un nouveau PGMR à Mine Raglan
Nous avons vu au chapitre 1 que les approches préventives en gestion environnementale sont
un complément essentiel aux outils technologiques permettant aux industries d'accroître leur
performance environnementale (BoiraI, 2005). Plusieurs auteurs ont par ailleurs reconnu la
mise en œuvre de programmes environnementaux comme autant d'exemples de changements
organisationnels (Blum-Kusterer et Hussain, 200]; Georg et Fussel, 2000; Jorgensen, 2000;
Judge et Elenkov, 2005; Lyon, 2004; Post et Altman, ] 994; Schrader, 1995). Parmi les cas de
changements organisationnels introduits à Mine Raglan, nous avons présenté l'implantation
d'un SGE ISO 14001 comme un exemple de changement qui a été effectué avec succès et de
façon semblable aux autres projets de changement. Cela correspond à la position de Post et
Altman (1994) voulant que tous les types de changements organisationnels se traitent de la
même façon, peu importe qu'il s'agisse de gestion environnementale ou pas.
69
Tel que mentionné précédemment, Mine Raglan procède actuellement à la mise en œuvre
d'un PGMR développé en 2005-2006. Ce processus de changement s'est jusqu'ici effectué
selon les étapes suivantes:
1. Manifestation du besoin de changement: La volonté d'améliorer la performance de
l'organisation est venue des membres du Service de l'environnement, des
administrateurs du bureau corporatif et de certains autres membres de l'organisation.
2. Développement d'une vision par la consultation d'expeI1s: Par deux fois, des
consultants ont été interrogés afin de développer une vision des changements à
opérer, c'est-à-dire l'objectif à alleindre et les moyens à développer pour y parvenir.
3. Désignation d'un agent de changement: L'agent choisi n'œuvre pas à temps plein au
sein de r organisation, mais est périodiquement mandaté pour développer une
nouvelle phase du projet de changement.
4. Diagnostic de l'écart entre la situation actuelle et ['état à atteindre: L'agent évalue la
performance actuelle de l'organisation relativement à sa gestion des matières
résiduelles et précise les objectifs à atteindre et les moyens d'y parvenir.
5. Consultation de membres de l'organisation pour planifier et préparer le changement:
Un PGMR est développé en se basant, d'une part, sur les connaissances acquises et
visions développées au contact des experts et, d'autre p3l1, sur les informations
recueillies auprès des éventuels récepteurs du changement. Le PGMR propose un
ajustement de certaines structures de l'organisation (ex: une redéfinition des
responsabilités de certains secteurs appelés à s'impliquer dans la mise en œuvre du
plan) et s'appuie sur d'autres composantes structurelles (ex: le SGE) et sur ceI1ains
éléments de la culture organisationnelle (ex: l'habitude déjà acquise de trier les
matières résiduelles).
6. Communication du plan à la haute direction: Le PGMR est déposé au comité de
direction afin d'obtenir le soutien et le financement nécessaire à sa réalisation.
7. Obtention des ressources monétaires nécessaires à la mise en œuvre de la première
phase du PGMR.
70
Mine Raglan en arrive aujourd'hui à l'implantation de la première phase de son PGMR. Bien
que le processus de changement soit déjà bien amorcé, nous proposerons dans la section
suivante certains ajustements auxquels Mine Raglan devrait procéder pour solidifier les bases
du projet de changement encours en vue de réussir la phase de décristaJJisation de
l'organisation et de la préparer au changement. En nous appuyant, grâce au modèle
empirique, sur le modèle de changement organisationnel théorique adapté au cas de Mine
Raglan, nous suggérerons également une marche à suivre que nous jugeons optimale pour la
mise en œuvre de la suite du projet, c'est-à-dire les phases de mouvement et de
recristaJ Jisation.
4.3.4 Processus de changement: réponse à la première question de recherche
Nous sommes maintenant en mesure de répondre à la première question de recherche
énoncée au chapitre III. Il s'agissait dans un premier temps de déterminer si les processus de
changement vécus à Mine Raglan suivent les phases et les étapes décrites dans le modèle
théorique proposé au chapitre II. Nous pouvons répondre à celle question en trois points.
Premièrement, nous avons vu à la section 4.3.2 que les cas de changement étudiés diffèrent
entre eux, mais forment, somme toute, deux groupes:
Groupe J : Le besoin de changement découle du diagnostic d'un problème à l'intérieur de
l'organisation. Le choix de l'agent de changement est généralement non officiel.
Groupe 2: Le besoin de changement émane d'une volonté expnmée par le haut de la
pyramide hiérarchique. Le choix de l'agent de changement est généralement
officiel.
Deuxièmement, le modèle de changement empirique observé à Mine Raglan est un amalgame
des sept cas étudiés. Il n'y a donc pas de modèle unique qui a été développé au sein de cette
organisation, mais autant de modèles que de changements. Toutefois, cet amalgame nous a
permis 'de dégager un portrait global dans lequel chaque processus de changement est
représenté.
71
Troisièmement, ce portrait global, que nous nommons modèle empirique, est semblable mais
pas identique au modèle théorique proposé dans le cadre de ]a présente recherche. Comme le
modèle théorique, le modèle empirique se découpe en trois phases (décristallisation
mouvement - recristallisation); toutefois certaines étapes du modèle théorique sont
interverties ou absentes dans le modèle empirique. D'autres étapes préconisées à Mine
Raglan sont par ailleurs absentes du modèle théorique. Ces lacunes et ces ajouts pertinents
ont été décrits à la section 4.3.2.
Par conséquent, nous affirmons en réponse à la première question de recherche que les
processus de changement vécus à Mine Raglan ne suivent pas les phases et les étapes
proposées au modèle théorique. Cependant, à la question de recherche 1.], nous confirmons
qu'un modèle plus représentatif de la réalité peut effectivement être proposé pour Mine
Raglan. Comblant les faiblesses et utilisant les forces du modèle empirique, le modèle
théorique peut donc être bonifié pour être mis en application à la mine Raglan. Ce modèle
théorique corrigé pour le compte l'entreprise étudiée est présenté à la figure 4.2 et les ajouts
au modèle théorique de base y sont indiqués en italique.
72
1.11 1.1 1.2 1.3 14 1.5 Manifestation dç Diagnostiç dc Désignation Prépamtion des Consultation pour
[a nécçssité du --+ l'éçart entre la --+ ofticiçll<.: d'un ~ agents: Col/ecte --+1 dén:loppçi' une
changçment çt situation açtuelle agentdç d 'injiJrnwtions et vision d'ensemble dç
développemçnt et l'état souhaité. changement ou formation sur le l'état il atteindre el
d'unç vision çlairc groupç d'ag<.:nts. chal1gement à dçs moycns
de l'état il atteindrç Dans le cas I/ccomplir généraux d'y
cn réponsç il dçs spécifiqlle de parvenir.
prçssions internçs, Mine Raglan. çxtemes ou désignation de
anticipées. deux agents de
changen-lel!f
principaux pOlir
assurer une
présence ail site
en continll.
2.1
Cerner les outi Is et les ressources --+nécessaires au çhangement et les
rçndrç disponibles au sçin de
l'organisation.
31 Renforœr ct institutionnaliser le
changement en s'assurant qu'il est
cohérent avec les çomposantes --+ culturelles, structurdles et
stratégiques, en procédant aux
ajustements né<.:essairçs et cn
communiçant les résultats.
Figure 4.2 Modèle théorique de changement organisationnel conigé et applicable à la mine Raglan
1.6 Communiçation
--+ dc la \'ision ct du 1--+ diagnostic el
développement
d'un sentiment
d'urgenc<.:.
2.2
Générer des gains à <.:ourt terme.
32 Survei 11er le progrès et faire les
ajustements néc<.:ssaires.
1.7 1.8 Création d'une Planitiçation du
--+ -.1coalition fonndk ou çhangcment en
informelk <.:n t~l\'eur tcnant compte dçs
du changcment. composantes
culturelles,
struçturelles çt
stratégiqulc'S de
l'organisation.
2.3 Consolider les gains en çommunicant
--+ les succès pour renforcer la coalition
ct produire plus dc changement.
33 Clore le changement: faire le bilan
du changement, le célébrer, le
documenter. implanter 1111 système de -+
mesllre pOlir évaluer de façon
pl'Oactive des besoins de changement
futnrs.
1.9 1.10
Ali hesolll. Commllnicmion li Au h<:soin. --+ --+l',,/i'/otion dll 1ïl1leme des délég"tion de
pll/n avec '/es changemel1ls nll{/lIl"ts.
l'.Il'<:rts ail d<:s plall/fiés po"r
lilIirs. in{orn/{/tion,
cOlLwltation et
"pprobmion.
Les ajouts au modèle théorique de base inspirés du
modèle empirique observé à la mine Raglan sont
inscrits en italique.
73
En réponse à la question de recherche 1.2, nous sommes d'avis gue le processus de
changement proposé précédemment devrait être appliqué tel quel par les gestionnaires de
l'environnement, puisque, comme l'affinnent Post et Altman (1994), tous les projets de
changement organisationnel peuvent être gérés de la même manière, quelle que soit leur
nature. En effet, les cas observés à Mine Raglan nous pennettent de constater que la nature
d'un changement (c'est-à-dire qu'il se rapporte à l'opération, à la prévention, à la formation, à
l'optimisation, à l'environnement ou autre) n'est pas responsable des différences ou des
ressemblances qu'il peut présenter avec d'autres cas de changement. Par exemple, les
motivations typiques d'un changement visant un aspect environnemental (pressions des
parties prenantes, respect de la législation, outil de marketing, économies monétaires, etc.)
varient d'un projet à l'autre, mais peuvent également être les mêmes pour tout autre type de
changement. Les facteurs qui stimulent la coalition et éliminent la résistance sont aussi
multiples mais semblables d'un cas à l'autre (soutien des leaders, obligation réglementaire,
consultation et communication utilisant un langage accessible et faisant appel à l'émotivité
des récepteurs, à leurs valeurs et à leur sentiment d'appartenance). Enfin les étapes du
changement peuvent être interverties dans certains cas, mais devraient toutes apparaître au
processus de changement, qu' il soit de nature environnementale ou autre.
Il ne s'avère donc pas pertinent de proposer un modèle de changement spécifique à la gestion
environnementale. Cependant, en réponse à la question 1.2, le modèle de changement
développé peut être utilisé pour proposer des lignes directrices précises pour renforcer la
phase de décristallisation et mettre en œuvre les phases de mouvement et de recristallisation
de l'implantation du PGMR de Mine Raglan.
Jusqu'ici, les étapes 1.1 à 1.10 ont eu lieu pour ce projet de changement. Certaines n'ont pas
été réalisées dans]' ordre proposé, mais rappelons que le modèle peut-être adapté en fonction
des situations. Cependant, certaines étapes déjà effectuées nécessitent d'être approfondies
avant de passer à la phase mouvement du programme de changement. D'abord, tel que
mentionné à la seCtion précédente, nous savons par le biais de l'observation participante que
l'agent de changement n'est pas présent dans l'organisation à temps complet. Cela deviendra
nécessairement une lacune majeure lors de l'implantation du changement et des étapes
74
préalables à celle-ci. Qui plus est, l'agent de changement n'occupant pas un poste permanent
dans l'organisation, le projet de changement sera toujours susceptible d'être interrompu si
l'agent devait quitter l'organisation. Nous invitons donc Mine Raglan à sélectionner
officiellement soit un nouvel agent de changement principal et un ou deux agents
secondaires, soit deux nouveaux agents principaux afin d'assurer une présence continuelle
sur le site d'un représentant du programme. Au besoin, ceux-ci pourront mandater l'agent
principal aCluel qui pourrait devenir agent de changement secondaire ou consultant pour le
programme. Ce processus est d'ailleurs en train de s'opérer de façon officieuse au sein de
l'organisation, mais il serait utile d'officialiser les décisions prises en ce sens. Aussi, lorsque
la direction aura donné son appui, un groupe d'agents secondaires représentant chacun un
secteur d'activité de la mine pourra être choisi afin d'appuyer les efforts de mise en œuvre du
changement dans leurs services respectifs, tel que proposé dans le PGMR (Xstrata Nickel
Mine Raglan, 2006).Tous les nouveaux agents sélectionnés devront être informés ou formés
de façon appropriée en lien avec le programme de changement.
Ensuite, bien que Je PGMR ait été transmis au Comité de direction et que celui-ci ait été avisé
de la vision et du plan de changement, J'appui de ses membres n'a pas été officiellement
obtenu. Certaines propositions du PGMR, dont le choix des services responsables de sa mise
en œuvre ou le plan de la deuxième phase d'implantation, n'ont toujours par reçu
J'approbation officielle des surintendants. Lorsque l'aval aura été obtenu et que l'échéancier
visé aura été arrêté, une deuxième étape de communication devra être entreprise afin de faire
connaître à J'ensemble de l'organisation la vision, les objectifs et la planification du
programme de changement.
Une fois ces ajustements terminés, I·organisation pourra passer à la phase de mouvement du
changement. Au cours de la phase de décristallisation, les ressources humaines, monétaires et
matérielles nécessaires à J'implantation du PGMR ont été définies. Une partie de ces
ressources a déjà été rendue disponible, mais J'organisation doit maintenant procéder à
l'achat des équipements requis et préparer la formation qui devra être offerte aux employés
pour réaliser la première phase d'implantation du changement. Celle-ci permettra de générer
des gains à court terme et de mesurer ceux-ci pour ensuite communiquer les résultats obtenus.
75
Cela devrait stimuler la participation des récepteurs et permettre d'obtenir les ressources
nécessaires pour la mise en œuvre de la deuxième phase du PGMR.
À la fin de chaque phase d'implantation du projet, l'organisation devra évaluer les
changements effectués et procéder aux ajustements nécessaires, le tout en prenant en compte
les composantes culturelles, structurelles et stratégiques de l'organisation. Pour recristalliser
le changement au sein de l'organisation, on devra en assurer Je suivi et Je maintien et le
célébrer. Cela pourra être une occasion de formuler publiquement de nouveaux objectifs pour
poursuivre l'amélioration continue de la gestion des matières résiduelles à la mine Raglan.
4.4 Facteurs de réussite et d'échec du changement à Mine Raglan: réponse à la deuxième
question de recherche
La deuxième question à laquelle nous tentions de répondre par celle recherche était de savoir
quels sont les facteurs de réussite ou d'échec du changement à la mine Raglan tels que perçus
par ses acteurs (récepteurs et agents). Nous souhaitions également comparer ces observations
aux connaissances théoriques tirées de la littérature. Les réponses aux entrevues et le forum
d'informateurs clés ont été les sources de données utilisées pour répondre à celle question.
4.4.1 Perception des récepteurs du changement
Lors des entrevues, nous nous sommes intéressée à la perception des récepteurs du
changement face à la performance de J"organisation en matière de changement et à la faculté
des agents à le mener à bien. Dans un premier temps, les sujets interviewés étaient amenés à
réfléchir el à énumérer des expériences de changement qu'ils avaient eux-mêmes vécues à
l'intérieur de l'organisat ion. Comme suite à celte réflexion, 77% des répondants ont affirmé
que généralement, les changements implantés à Mine Raglan réussissent, contre 18% qui
pensent plutôt que les changements tendent le plus souvent à échouer. Deux sujets (6%) n'ont
pas été en mesure de répondre à celle question. Par ailleurs, les répondants se disaient en
général majoritairement très favorables (32%) ou plutôt favorables (53%) au changement,
15% de la population s'avouant plutôt défavorable au changement.
76
Pour ces questions, nous avons demandé aux répondants d'énumérer quels sont à leur avis:
1. les raisons faisant d'un changement une expérience positive ou négative;
2. les facteurs de succès ou d'échec d'un changement;
3. les raisons les incitant à être favorables ou défavorables au changement.
Aucun choix de réponse n'était suggéré. Aussi, les facteurs décelés par les répondants ont dû
être refonnulés pour être catégorisés et les réponses aux trois questions ont été regroupées en
un seul corpus de données. Si un même répondant donnait des réponses équivalentes à plus
d'une question, celles-ci n'étaient comptabi lisées qu'une fois. Les facteurs retenus sont
présentés au tableau 4.3 en ordre décroissant de fréquence.
77
Tableau 4.3 Facteurs de réussite ou d'échec du changement tels qu'énoncés par 34 récepteurs de changemenl
facteurs positifs
ch<lngement répondant à un besoin, présentant des avant<lges certains ou <lssuré dc donncr dc bons
résultats (logique, sensé et inspimnt contiance)
2 bonne;; communic<ltion
3 ch<lngement facilitant, accélér<lnt, améliorant ou ne nuisant pas au travail
4 ouverture au changement au sein de l'organisation
5 implantation du changement progressive, changement peu ou pas radic<ll
6 une amélioration de la perfonnance de l'organisation est constatée suite à dcs changements ayant
déjà eu lie;;u
7 r<lisons du ch<lngement sensées, claires et bien expliquécs
8 ch<lngement visant à accroître la sécurité au travail
9 changement nc demand<lnt pas unc adaptation ou unc moditication dcs habitudcs importantcs
10 le besoin de ehangemcnt est idcntitié à l'interne, p<lr les trav<lilleurs ou leur département
Il bonne collaboration des divers intervenants et entraidc cntrc collègucs
12
13 <lgent de changement inspirant contiance
14 les outils nécessaires à l'implantation du changement sont disponibles
15 changcment faisant appel à la consultation
16 un suivi du changcme;;nt e;;st effectué
17 changement entraînant une augmentation de la qualité de vie au site
18 ch<lngemenl suseitant l'approbation générale, faisant consensus
19 degré élevé de conscientisation des individus face <lU changcment proposé
20
21 compétŒcc des récepteurs du changement
22 changement visant un meilleur contrôle de la pelfonnancc de;; l'organisation
23 changement juste et équitable
24 implantation du ehangement s'adaptant aux individus
25
26 implantation simultanéc de plusieurs change;;ments visant un même objectif
27
28
29
30
31
32
facteurs négatifs
changcmcnt répondant III<1 1 <lUX besoins, présent<lnt dcs incoll\'énicnls supéricurs <lUX avanl<Jgcs cl
assuré dc donncr de mauvais résultats (Iacuncs d<lns la planitication ou la conception, utilité ct
possibilité dc réussite miscs e;;n doute;;)
manque de communication
changcmcnt augmentant 1<1 difficulté, la durée ou la chargc du tr<lvail ct cn diminuant la qualité
résistance <lU changement au sein de l'organisation, prétërence pour le statu quo (craintes, cynismc,
mauvaises cxpériences p<lssécs, manque;; de cohérence, etc.)
implantation du changem<:nt trop drastique, changemcnt trop radic<ll
raisons du ch<lngement pcu sensées, obscures et mal expliquées
changement demand<lnt une adaptation ou une moditication des habitudcs imp1ll1antes
manque de;; collaboration ct de soutien, entre collègues ou de la part de la supervision/direction
changement appliqué par simplc obéissance ou eocrcition
agent de changement n'inspirant pas contiance, non identitié ou extcrnc à l'organisation
les outils nécessaires à l'implanl<Jtion du changement sont peu disponibles ou nc sont pas lilUrnis
changement ne faisant pas ou pas assez appcl à l<l consultation
manque dc suivi du changcment
change;;me;;nt entraînant une diminution de la qU<llité de vie au sitc
changemcnt ne faisant pas consensus
telnps d'implantation du change;;ment trop long
récepteurs du changement peu expérimentés
changement réactif plutôt que préve;;ntif
le changeme;;nt n'est pas la solution détinitive;; au problème
changement basé sur de;;s impératifs opérationnels
planitication du change;;ment reposant <:ntièrement sur ses récepteurs
système de rotation rendant difticile la communication et la formation
l'organisation insiste;; sur des change;;ments moins prioritaires que;; d'autres
changement entraînant ulle réduction de personnel
fré1luencc des réponses
(nombre de répondants / 34)
2X
16
1(l
15
12
Il
9
x 7
6
6
6
5
5
5
5
4
4
3
3
3
2
2
2
78
4.4.2 Perception des agents de changement
Dans le cadre du forum d'infonnateurs clés, nous avons demandé aux agents de changement
rencontrés de nommer les facteurs de succès et d'échec auxquels ils ont eux mêmes fait face
lors de l'expérience de changement racontée. Comme pour les récepteurs, aucun choix de
réponse n'était suggéré et les observations ont été reformulées pour être regroupées par
catégories. Les réponses obtenues sont présentées au tableau 4.4.
79
2
Tableau 4.4 Facteurs de réussite ou d'échec du changement tels qu'énoncés par sept agents de changement
facteurs positifs facteurs négatifs
soutien et leadershir des cadres face au changement manquc dc soutien des cadres (superviseurs, surintcndants)
agcnt de changement compétent (bon leadership, accepte la critique, cherche il s'améliorer, dispose agent de changement n'ayant ras les compétences rcquiscs (lU manquant de connaissance dans Ic
d'outils de gestion du changement, \'olonté, vision) domainc "isé par le changement
3 manque de communication
4 enthousiasme vis-il-vis du changement résistance au changement au sein de l'organisation, préfércncc rour le statu quo
5 succès passés motivant au changement manque de crédibilité ou de succès préalables pour motiver l'engagcment
6 bonne équipe, coalition en fa"eur du changement difficulté de rassembler une équipe ou coalition
7 obligation pour les agents de changement de poursui \TC leurs activités régulières tout en
participant au changemcnt
8 diftleulté de profiter des circonstances favorablcs ct de maintenir la continuité du proJct
9 changement non supporté par la structure organisationnelle
10 pression "enant de l'externe, changement impérati f au maintien de la production (ex: arguments mentalité de production
légaux)
Il ressources financières limitées
12 difficulté de maintenir le changement (roulement du personnel, vente de la comragnie, ctc )
13 court délai de réalisation
14 hellchmarkillg, consultation, formation
15 mauvaise définition du bcsoin de changement
16 bonne détinition des responsabilités de chacun
17 objœlif clairement énoncé
18 stress
19 manque de préparation
20 bcsuin de changement émanant du bureau curpuratil'
fr'équence cles réponses
(noll1l>re d'agents /7)
7
6
5
4
4
3
3
3
'2
'2
'2
2
'2
2
80
4.4.3 Comparaison des connaissances théoriques et pratiques
JI est intéressant de comparer les facteurs de succès et d'échec du changement
organisationnel énumérés par les acteurs du changement de Mine Raglan à ceux relevés dans
la littérature et présentés au chapitre Il. Les sujets rencontrés lors des entrevues et du forum
d'informateurs clés semblent se reconnaître dans les facteurs de succès et d'échec théoriques
suivants. Pour chacun de ces facteurs théoriques, nous avons indiqué entre parenthèses quels
acteurs l'ont mentionné et à quel facteur pratique il correspond.
Échec
• Résistance due à la peur de l'inconnu (récepteurs - facteur 4; agents - facteur 4);
• Résistance due à la modification des habitudes (récepteurs - facteur 9; agents
facteur 4);
• Résistance aveugle menant au refus systématique du changement (récepteurs
facteur 4; agents - facteur 4);
• Résistance idéologique menant à une opposition réfléchie et honnête à un
changement spécifique (récepteurs - facteur 1);
• Agent de changement ne tenant pas compte de la résistance (récepteurs - facteur 13);
• Cynisme et manque de confiance des employés (récepteurs - facteurs 4 et 6; agents
facteur 5);
• Barrières de l'industrie (agents - facteur 10);
• Incapacité ou mauvaises stratégies de l'agent de changement (récepteurs - facteur 13;
agents - facteur 2);
• Manque de ressources pour implanter le changement (récepteurs - facteur] 4; agents
- facteurs 7,1] et 14);
• Sentiment d'urgence insuffisant (récepteur - facteur 7).
Succès
• Présence de leaders ou d'agents de changement qualifiés (récepteurs - facleur ]3;
agents - facteur 2);
81
• Leader ou agent de changement inspirant confiance (récepteurs - facteur 13; agents
facteur 2);
• Employés qualifiés (récepteurs - facteur 21);
• Organisation proactive (récepteurs - facteur 25);
• Organisation possédant une culture de fiabilité (récepteurs - facteur 6; agents
facteur 5);
• Vision bien définie et clairement exprimée (récepteurs - facteur 7; agents - facteur
17);
• Bonne communication (récepteurs - facteur 2; agents - facteur 3);
• Coalition en faveur du changement (récepteurs - facteur 18; agents - facteur 6);
• Insatisfaction du le statu quo (récepteurs - facteur 1; agents - facteur 4);
• Changement soutenu par les leaders et les décideurs de l'organisation (agents
facteur 1);
• Changement soutenu par la culture de l'organisation (agents - facteur 10);
• Changement soutenu par la structure de l'organisation (agents - facteur 9);
• Changement bien pensé et bien planifié (récepteurs - facteur 1, agents - facteur 19);
• Changement accompagné d'une bonne gestion des ressources matérielles et
humaines (récepteurs - facteur 14; agents - facteurs 7, Il, 14, 16 et 18);
• Organisation faisant habituellement preuve de cohérence entre rhétorique et pratique
(récepteurs - facteur 4).
Quelques constats s'avèrent particulièrement intéressants. D'abord, ni les récepteurs ni les
agents rencontrés ne soulignent la difficulté d'une résistance politique ou l'importance pour
l'organisation d'avoir développé des aptitudes de gestion et une pensée systémique pour
soutenir le changement. Ensuite, seuls les agents mentionnent les barrières de l'industrie et le
soutien des leaders et des décideurs, de la culture et de la structure de l'organisation en tant
que facteurs influençant le processus de changement. D'un autre côté, seuls les récepteurs
semblent considérer comme significatifs les facteurs de résistance aveugle ou idéologique,
sentiment d'urgence insuffisant, qualification des employés et organisation proactive ou
faisant habituellement preuve de cohérence entre rhétorique et pratique.
82
À l'inverse, 'panni les facteurs de succès ou d'échec du changement relevés par plus de 14%
des répondants (minimum de cinq récepteurs ou un agent), les suivants sont omis par la
littérature:
Facteurs positifs
• Utilité du changement (facilitant, accélérant, améliorant ou ne nuisant pas au travail
ou visant à accroître la sécurité au travail) (récepteurs);
• Implantation progressive du changement, changement peu ou pas radical, délai de
réalisation suffisant (récepteurs et agents);
• Besoin de changement diagnostiqué à l'interne par les travailleurs ou leur
département et non par le bureau corporatif (récepteurs et agents);
• Bonne collaboration des divers acteurs et entraide entre collègues (récepteurs);
• Changement faisant appel à la consultation (récepteurs);
• Étalonnage, consultation, fom1ation (agents).
Facteurs négatifs
• Changement appliqué par simple obéissance ou coercition (récepteurs);
• Difficulté de profiter des circonstances favorables et de maintenir la continuité du
projet (agents);
• Manque de suivi du changement et difficulté de le maintenir (récepteurs et agents);
• Mauvaise définition du besoin de changement (agents).
Ces informations nous apprennent quelle impor1ance accordent les acteurs du changement
aux différents facteurs agissant sur le processus de changement et sur sa réussite. Elles
révèlent aussi les aspects sur lesquels l'organisation serait la plus naturellement encline à
travailler pour améliorer sa gestion du changement. À titre d'exemple, les acteurs
reconnaissent la pertinence de se doter de bons outils de communication pour mener à bien le
changement. Toutefois, cette communication ne suffira probablement pas à réduire la
résistance politique, puisque ni les récepteurs, ni les agents n'ont identifié ce facteur comme
potentiellement néfaste à la réalisation du changement. L'organisation devra par conséquent
agir pour éliminer les obstacles potentiels et accroître son recours aux leviers du changement.
83
Elle devra pour ce faire considérer tant les facteurs identifiés dans sa pratique que dans la
littérature.
4.5 Forces et faiblesses de Mine Raglan en matière de changement organisationnel
En plus de mettre l'accent sur les facteurs de succès et d'amoindrir le potentiel d'échec du
changement, l'organisation doit identifier ses forces et ses faiblesses en matière de
changement afin d'accroître sa performance. Quelques forces et faiblesses de Mine Raglan
ont déjà été notées dans les sections précédentes. On pense notamment à ses difficultés de
communication mais aussi à l'originalité de certains outils de changement auxquels elle a
recours, comme la formation des agents de changement. Cependant, la présente recherche a
permis d'identifier de façon plus systématique ces forces et ses faiblesses en questionnant les
récepteurs et les agents de changement. La présentation des forces et des faiblesses de Mine
Raglan s'appuie donc sur les perceptions de ces deux groupes.
4.5.1 Forces et faiblesses telles que perçues par les récepteurs
Comme mentionné précédemment, 85% des récepteurs du changement interviewés se disent
favorables au changement et 77% sont d"avis que les changements implantés à Mine Raglan
réussissent la plupart du temps. Au premier abord, on pourrait donc penser que Mine Raglan
fait montre d'un niveau élevé de performance en matière de changement organisationnel.
Afin d'approfondir cette question, nous nous sommes demandée si les récepteurs
considéraient recevoir les outils nécessaires (ressources humaines et matérielles, formation,
etc.) à l'application des changements demandés: 59% de la population interviewée a affirmé
disposer des ressources requises alors que 41 % des sujets ont jugé ne pas avoir en main les
outils nécessaires à l'implantation des changements. Parmi ces derniers:
• 43% estiment qu'il y a des lacunes sur le plan de la formation lors de la mise en
œuvre de changements;
• 29% jugent que les modalités et les raisons du changement ne leur sont pas assez
communiquées et expliquées;
84
• 21 % croient que les superviseurs ne reçoivent pas assez de soutien de la part des
agents de changement ou des autres services pour expliquer et implanter le
changement dans leur secteur;
• 14% pensent que les changements ne sont pas assez préparés ou planifiés;
• 14% considèrent manquer de main d'œuvre pour implanter les changements requis.
On a également demandé aux récepteurs s'ils préféraient que le changement soit mené par un
agent qui les consulterait avant de prendre une décision ou par un agent compétent et
communicatif, mais qui ne ferait pas appel à la consultation: 85% ont préféré le premier type
d'agent, 12% Je deuxième et un répondant (3%) n'avait pas de préférence. Rappelons
d'aiJleurs, sur le plan théorique, que AxeJrod et coJlègues (2006) avaient rapporté que plus
de 68% des employés désirent s'impliquer de façon significative dans le changement. Quant
à s'avoir si les répondants s'estimaient suffisamment consultés préalablement à
J'implantation d'un changement, aucun n'a admis se sentir trop consulté, la moitié (50%) a
affirmé être assez consultée, mais 41 % des sujets ont exprimé ne pas se sentir assez consultés
et 9% pas du tout. À cet effet, 47% de l'ensemble des répondants préfèrent être consultés lors
de réunions de groupe, 24% lors de rencontres individuelJes et 27% par J'un ou l'autre de ces
deux moyens. 3% des répondants appréciaient aussi le sondage comme mode de consultation
complémentaire aux rencontres de groupe ou individuelles.
Sur le plan de la performance générale de l'organisation, on s'est enfin penché sur la question
de la communication des raisons et des résultats du changement, telle que perçue par les
récepteurs. Au chapitre des raisons du changement, 3% jugent qu'elles sont trop
communiquées, 62% qu'elles le sont assez, 29% qu'elles ne le sont pas assez et 3% qu'elles
ne le sont pas du tout. Lorsque ces raisons sont expliquées, 79% affirment que cela les aide à
accepter le changement et cela pour les raisons suivantes:
• 37% jugent que cela les aide à saisir la vision et les raisons fondamentales derrière le
changement proposé;
• 30% affirment être plus favorables, avoir moins de doute et être plus participatifs
face à un changement lorsque ces raisons sont bonnes;
85
• 7% notent qu'en faisant appel à l'intelligence des récepteurs, l'agent de changement
agit plus comme un partenaire que comme un vendeur;
• Un individu (3%) apprécie pouvoir exprimer son opinion;
• Un individu (3%) dit que cela l'aide à se préparer au changement;
• Un individu (3%) affirme que cela lui permet de rencontrer l'agent de changement et
d'évaluer ses compétences;
• Un individu (3%) soutien que cela rend le travail plus agréable et motivant.
Chez les six sujets (18%) dont J'acceptation du changement n'est pas influencée par la
connaissance de ses raisons, trois disent accepter le changement spontanément et sans raison,
deux ne l'acceptent que lorsqu'ils en perçoivent les résultats et un n'est simplement pas
intéressé par le changement. Quant à la communication des résultats du changement,
l'organisation fait moins bonne figure. En effet, 35% des répondants sont d'avis qu'ils sont
assez communiqués contre 41 % et 21 % qui jugent respectivement qu'ils ne le sont pas assez
ou pas du tout. Toutefois, Mine Raglan a plus de succès face à linitiative et à la participation
de ses travailleurs en matière de changement et au soutien qu'ils reçoivent. En effet, sur 34
répondants, 28 (82%) ont affirmé avoir déjà demandé l'implantation d'un changement. De ce
nombre, 19 (68%) l'ont vu se réaliser et parmi eux 14 (74%) ont participé à sa mise en
œuvre.
4.5.2 Performance des services responsables de J'implantation de changements telle que perçue par les récepteurs
Dans une deuxième section du questionnaire, nous avons demandé aux sujets s'ils avaient
déjà vécu un changement implanté par l'un où l'autre des services dont c'est spécifiquement
la fonction (prévention, environnement, Six Sigma, formation, infonnatique). Les sujets
répondant par l'affirmative devaient ensuite critiquer la performance du service en répondant
à trois questions fermées.
Panni les répondants, 28 (82%) ont déjà vécu un changement implanté par le Service de la
prévention. De ce nombre, 29% affirment avoir une très bonne opinion du service et 71 % une
bonne opinion; 71 % trouvent que le service est assez actif contre 25% qui ne le jugent pas
86
assez actif et un individu (4%) qui l'estime trop actif. En général, les 28 répondants ont
l'impression que les changements implantés par le service sont très utiles (46%) ou utiles
(50%). Un individu les jugeait quant à lui nuisibles. Somme toute, on peut donc affirmer que
le Service de la prévention est bien perçu par la communauté de Mine Raglan bien qu'il
gagnerait à communiquer plus efficacement ses réalisations afin de faire connaître aux
récepteurs ses activités.
Le même constat peut être établi pour le Service environnement. En effet, sur les 22
répondants (65%) ayant déjà vécu un changement implanté par ce service, la quasi-totalité
estime avoir une très bonne (46%) ou une bonne (50%) opinion du service. Un individu a
affirmé en avoir une mauvaise. Pratiquement de la même façon que le Service prévention, les
répondants jugent à 68% que le Service environnement est assez actif et à 23% qu'il ne j'est
pas assez. Un individu le trouvait trop actif et un autre n'a pas été en mesure de répondre.
Enfin, 55% voyaient les changements implantés par le Service environnement comme très
utiles, 36% comme utiles et un individu comme inutiles mais pas nuisibles. Un individu n'a
pu répondre à la question.
Les résultats varient un peu dans le cas du Groupe Six Sigma. En effet, seulement 32% de la
population interviewée avait déjà vécu l'implantation d'un changement par le groupe et
beaucoup nous ont mentionné n'avoir aucune idée de la fonction du Groupe Six Sigma ni de
ses projets en cours ou passés. Sur les 11 personnes ayant travaillé avec un agent de Six
Sigma, trois avaient une très bonne opinion du groupe (27%), six une bonne opinion (55%),
un en avait une mauvaise opinion (9%) et un autre, une très mauvaise opinion (9%). Six
répondants (55%) le jugeaient assez actif, deux (18%) pas assez actif, un (9%) inactif et deux
individus (18%) n'ont pu répondre. Finalement, les changements implantés par Six Sigma
étaient qualifiés de très utiles ou utiles par respectivement 9% et 55% des 11 répondants. Plus
du tiers de ceux-ci (36%) jugeaient quant à eux que CeS changements étaient inutiles mais pas
nuisibles. Ces résultats nous indiquent que le Groupe Six Sigma souffre d'une mauvaise
communication de ses objectifs et de ses résultats. Contrairement aux services prévention,
environnement et formation, l'utilité du Groupe Six Sigma n'est pas spontanément comprise
par les récepteurs.
87
Pour le Service fonnation, c'est 68% des répondants qui affirment avoir déjà expérimenté un
changement mené par celui-ci. De ces 23 individus, 35% en retirent une très bonne opinion,
52% une bonne opinion et 13% une mauvaise opinion. 52% jugent par ailleurs le service
assez actif contre 48% qui ne l'estiment pas assez actif. Enfin, les projets prônés par la
formation jouissent d'une grande popularité, 61 % des 23 sujets répondant que les
changements qu'elle met en œuvre sont très utiles et 30% qu'ils sont utiles. Un individu les
jugeait inutiles mais pas nuisibles et un autre n'a pu répondre.
Finalement, seulement 10 répondants (29%) affinnent avoir déjà vécu un changement
implanté par le Service infonnatique. Cela est en partie dû au fait que nombre d'individus
interrogés utilisent peu ou pas l'ordinateur pour accomplir leur travail. Quoi qu'il en soit, de
ce nombre, 50% ont une très bonne opinion du service, 30% une bonne opinion et 20% une
mauvaise opinion. 70% le jugent assez actif et 30% pas assez actif. Enfin, 20% estime que les
changements implantés par le service sont très utiles, 50% qu'ils sont utiles, 20% qu'ils sont
inutiles mais pas nuisibles et 10% (un individu) qu'ils sont nuisibles. La perfonnance du
Service informatique, telle qu'évaluée par les membres de l'organisation, est donc légèrement
inférieure à celle des services prévention, environnement et formation. À la lumière du
changement structurel récemment implanté à l'intérieur de ce service tel que décrit par l'un
des agents en début de chapitre, on comprend mieux que la qualité du service ne faisait pas
consensus dans la population à l'époque où les entrevues ont été réalisées. On pellt cependant
supposer que les récents ajustements contribueront à former une opinion de plus en plus
positive du service.
4.5.3 Forces et faiblesses teJJes que perçues par les agents
Lors du forum d'informateurs clés, nous avons demandé aux agents de changement
d'énumérer des particularités de Mine Raglan qui influencent positivement ou négativement
la capacité de changement de l'organisation. Les réponses présentées ici sont le fruit d'une
réflexion menée par le chercheur-acteur et quatre des sept agents rencontrés. Pour chaque
particularité, les explications du phénomène, ses causes fondamentales et directes, ses effets,
88
les forces et faiblesses engendrées et une proposition d'action étaient définis. Les constats
énoncés par les agents de changement sont présentés dans les lignes qui suivent.
Particularité 1 : L'héritage Raglan
Celte particularité réfère aux évènements qui sont survenus au début de l'exploitation cie la
mine et qui ont influencé la culture, les structures et les stratégies actuelles de l'entreprise.
L'une de ses causes fondamentales réside dans les problèmes financiers vécus par Mine
Raglan au tournant du siècle dernier alors que le prix du nickel avait chuté, réduisant de
manière draconienne la rentabilité des opérations. Celte situation s'est exprimée par des
restrictions budgétaires prolongées lors du démarrage de la mine et durant les premières
années de production. Cela a eu pour effet d'amener la mine à opérer en mode réactif plutôt
que proactif, et ce malgré la conception et la construction récentes des infrastructures. Ils' est
ainsi développé une réalité où les crises font partie du quotidien des opérations, alourdissant
la gestion, puisque des changements réactifs sont constamment nécessaires pour assurer la
production. De la même façon, les changements visant Je rattrapage et l'amélioration
préventive se sont retrouvés au deuxième et au troisième rang des priorités.
Les situations de crise dues à l'héritage Raglan ont l'avantage cie motiver le changement en
raison de leur criticité. Cependant, ces crises n'ont pas uniquement des effets positifs sur la
gestion du changement. Leur récurrence limite le temps qui peut être alloué à la planification
des changements. En plus d'être presque toujours réactifs, les changements sont
généralement intégrés en réponse immédiate à une crise et implantés par essais et erreurs. Par
ailleurs, avec les années où les budgets étaient restreints pour réduire les coûts des opérations,
il s'est développé une culture du « ça va coûter cher». Même si J"organisation a aujourd'hui
les moyens financiers d'implanter des changements importants, ses membres sont souvent
réfractaires à dépenser à d'autres fins que la production. Une gestion à court terme s"est
développée et l'organisation n'a pas intégré culturellement l'habitude d'investir dans des
projets qui ne rapporteront que des bénéfices à moyen ou à long terme ou encore des
bénéfices non monétaires.
89
Les agents constatent cependant qu'à mesure que les budgets aJloués au changement ainsi
qu'à leur marge de manœuvre augmentent, de nouvelles habitudes se créent et la culture tend
à progresser vers des actions préventives et une vision à plus long terme. On commence
également à dépasser cet héritage négatif dans certains secteurs comme celui du
concentrateur qui ont réussi à mettre leurs systèmes et leurs processus à niveau. Le rattrapage
s'opère graduellement et le changement préventif occupe de plus en plus de place.
L'autre cause fondamentale de l'héritage Raglan qui a forgé les caractéristiques profondes de
l'organisation est liée à la localisation géographique de la mine. L'expérience de
l'exploitation en milieu nordique était à l'époque peu développée, ce qui a forcé
l'organisation à innover et à employer régulièrement des techniques inconnues. Cela a eu
comme conséquence le développement et le recours à des technologies, systèmes et processus
uniques à Mine Raglan. Pour la gestion du changement, il s'agit là d'une grande force, car
l'organisation a développé une importante capacité d'innovation et a su choisir, retenir et
former des employés aptes à s'adapter à de nouvelles techniques et à de nouvelles situations.
Cependant, comme pour les causes monétaires, cette caractéristique fait en sorte que des
changements critiques sont régulièrement nécessaires, car les technologies, systèmes et
processus sont développés par essais et erreurs et améliorés avec l'acquisition graduelle
d'expérience en milieu arctique. Encore une fois, l'organisation est prise dans un cycle de
changements réactifs ou visant la production, ce qui laisse peu de place aux changements
préventifs ou qui s'attaquent à d'autres aspects des activités comme la protection de
J'environnement.
Particularité 2: Les valeurs de l'entreprise
De par sa situation géographique, ses choix de gestion et ceux de sa compagnIe mère
(Falconbridge LIée, puis Xstrata), Mine Raglan a adopté trois valeurs fondamentales qui se
greffent à ses objectifs de productivité et de rentabilité. Il s'agit d'assurer la santé et la
sécurité de ses employés, de protéger l'environnement et d'agir en partenariat et dans le
respect des communautés inuites voisines. Reflet des valeurs corporatives, cette vision
découle également de la nécessité d'éviter des accidents graves en raison de la difficile
accessibilité aux soins de santé, de la conscience de se trouver dans un environnement vierge
90
et fragile et de la proximité des communautés inuites qUI occupent et administrent le
territoire.
Relativement à la capacité de changement organisationnel, ces valeurs ont amené les
membres de l'organisation à travailler en équipes multidisciplinaires et à adopter un mode de
pensée plus global. Fortement défendues par Mine Raglan et Xstrata, ces valeurs
appartiennent à la culture organisationnelle et les changements qui s'appuient sur celles-ci
ont beaucoup de légitimité. Les raisons du changement sont plus facilement acceptées et,
comme on l'a vu précédemment, cela aide aux récepteurs à accepter le changement.
Cependant, lorsque les valeurs de l'entreprise entrent en conflit avec les valeurs de certains
individus, on observe un certain degré de résistance au changement. Qui plus est, certaines
incohérences entre la rhétorique de l'organisation et sa pratique apportent une certaine dose
de cynisme chez ses membres.
Certaines actions peuvent être entreprises pour utiliser pleinement ces forces et estomper ces
faiblesses. D'abord, avec le suivi serré du respect de ces valeurs par Xstrata, Mine Raglan
dispose aujourd'hui d'un levier très important pour motiver le changement. La compagnie
mère offre également de nombreux outils pour mettre en pratique ces valeurs et il est
fortement recommandé à Mine Raglan de les utiliser. Entre autres recommandations de
Xstrata, il est indiqué pour Mine Raglan de sonder les valeurs des candidats à l'embauche. Si
Mine Raglan interroge déjà ses futurs employés sur leur conscientisation face aux questions
de sécurité au travail et de relations interculturelles, il serait également nécessaire de leur
demander d'exposer leur vision de la responsabilité environnementale de la compagnie. Dans
la gestion du changement, les agents devraient former une coalition d'individus partageant les
valeurs de l'entreprise. Ils devraient aussi s'attarder à communiquer adéquatement et de façon
imagée les raisons du changement en justifiant la pertinence de ]'application des valeurs en
cause dans ce cas précis. Par exemple, on ne modifiera pas la gestion des matières résiduelles
seulement parce que c'est un geste responsable pour "environnement. On le fera en
démontrant entre autres l'ampleur du gaspillage de matériaux et ses conséquences précises
pour l'environnement. Enfin, si le changement est motivé par plus d'une valeur, on
s'attardera à le démontrer afin de toucher le plus grand nombre d'individus possible. C'est
91
aussi avec l'accumulation des exemples de respect des valeurs corporatives que
l'organisation pourra combattre le cynisme de ses employés.
Particularité 3 : Proximité des communautés inuites et statut tenitorial particulier
La situation géographique de Mine Raglan a mené à l'implication et à la consultation des
Inuits pour ses choix de gestion. Cela s'est traduit par la signature de l'Entente Raglan et par
la formation du Comité Raglan et de ses sous-comités. La mine doit rendre des comptes,
demander l'approbation des communautés pour certains projets et accepter que ses activités
soient surveillées par des employés inuits. Ces obligations peuvent être utilisées comme
levier pour expliquer et faire accepter les raisons du changement et créer une coalition en
faveur du changement. Cependant, le contexte multiculturel appolte son lot de difficultés. Par
exemple, les systèmes de valeurs et les priorités peuvent s'entrechoquer ce qui affecte le
niveau de compréhension et d'acceptation du changement et demande d'effectuer certains
compromIs.
Les ressources humaines ont déjà entrepris des démarches en ce sens, mais il serait pertinent
de poursuivre les efforts d'intégration des employés inuits dans l'organisation afin de
favoriser la compréhension mutuelle des deux principaux groupes culturels. À cet effet, la
formation multiculturelle devra être relancée et tous les agents de changement devraient y
être conviés.
Particularité 4 : Horaires de travail
À cause de l'éloignement du site d'exploitation minière, les employés doivent être transportés
par avion et logés sur le lieu de travail. L'horaire choisi consiste en des rotations de trois ou
quatre semaines de travail suivies d'un repos de deux semaines à la maison. Pour cette raison
les employés ne sont jamais rassemblés au site en même temps et dans la plupart des cas deux
employés sont affectés à une même tâche en alternance, l'un poursuivant le travail en
l'absence de l'autre. Nous nommerons ce phénomène employés à re/ais.
Cette particularité apporte certaines forces à l'organisation. En effet, les employés à relais
agissant comme agents de changement peuvent adopter deux approches différentes pour un
92
même changement, ce qui favoriserait son implantation en permettant de toucher un plus
grand nombre d'individus. Par ailleurs, en raison de la rotation des effectifs et du phénomène
des relais, les employés ont développé l'habitude de travailler en équipe. Il y a également
moins de territorialité ou de compétition entre employés, car celle-ci est désamorcée à chaque
fois que l'employé retourne à la maison. Enfin, des mécanismes de communication originaux
ont été développés pour pallier les problèmes de communication engendrés par cette situation
particulière.
En effet, l'absence permanente de près de la moitié des effectifs complique les
communications, consultations, formations et transmissions d'informations, ce qui représente
une faiblesse majeure de l'organisation quant à sa capacité de changement. De la même
façon, les évènements exceptionnels (colloque, conférence, inauguration, etc.) ne peuvent
rejoindre qu'une portion de la population concernée. Par ailleurs, les rotations et les employés
à relais provoquent aussi des problèmes de continuité dans le travail et donc dans les
processus d'implantation de changement. Dans plusieurs cas, l'implantation du changement
est complètement stoppée pendant l'absence de l'agent. Cela est particulièrement
problématique dans les périodes où les circonstances favorables doivent être saisies et où la
pression ne devrait pas être relâchée. Dans d'autres cas, une paire d'employés à relais agit
comme agents d'un même changement. Si la communication entre les agents est déficiente, il
peut être difficile de présenter une vision claire et unique du changement.
Pour contrer ces faiblesses, Mine Raglan s'est déjà doté d'un grand nombre d'outils de
communication dont certains ont démontré une grande efficacité. À titre d'exemple, les
formations par ordinateur offrent une grande flexibilité aux formateurs qui peuvent désormais
donner des cours sur une base individuelle sans trop de répétition et sans alourdir leur tâche.
Les rapports de fin de rotation transmis entre employés se relayant aident aussi à maintenir un
niveau acceptable de continuité dans le travail. Enfin, les médias de transmission à grande
échelle de l'information (affichage, courriel, etc.) permettent de rejoindre un nombre élevé
d'individus sur une période de temps prolongée. Une autre solution serait de décentraliser
l'implantation du changement en désignant une équipe d'agents secondaires pour assurer la
continuité de l'implantation du changement dans leurs secteurs respectifs.
93
Le modèle d'horaire de travail développé pour Mine Raglan implique aussi que les employés
sont en poste sept jours sur sept, Il heures par jour pendant les trois ou quatre semaines que
dure leur rotation. Il en découle nécessairement une accumulation de fatigue et une baisse
d'efficacité à mesure que la rotation avance. Bien que les longues journées permettent
d'exécuter beaucoup de travail, il peut aussi être difficile de solliciter des individus en fin de
journée ou de rotation. Les agents de changement sont généralement conscients de cette
réalité, mais gagneront à s'assurer de la considérer lorsqu'ils planifient des rencontres ou des
sessions d'information.
Particularité 5 : Vie en communauté
Tel que mentionné précédemment, en raison de l'éloignement du site, les employés sont
logés sur leur lieu de travail. Le complexe d'hébergement comprend des chambres pour
chacun, mais également des lieux communs comme la cafétéria et le gymnase. Ainsi, les
employés de tous les secteurs et de tous les niveaux hiérarchiques sont appelés à se côtoyer
en dehors des heures de travail et sur une base non protocolaire. Cela permet de créer des
relations plus étroites entre différents individus que si chacun rentrait chez soit à la fin de la
journée. Cette situation est à la base de plusieurs forces pour la gestion du changement à
Mine Raglan. D'abord, elle accroît le sentiment d'appartenance, favorise les communications
usuelles et encourage la solidarité et le soutien entre les employés. De la vie en communauté
naissent aussi des amitiés entre collègues, ce qui encourage le travail en équipe et facilite la
formation d'une coalition autour d'un projet. Le rapprochement entre employés et agents de
changements ou supérieurs encourage le respect mutuel el la diplomatie. Les membres de la
haute direction sont aussi très accessibles et il devient plus facile d'obtenir leur engagement
pour un projet de changement. Enfin, le rapprochement des employés apporte une meilleure
compréhension du travail de chacun, ce qui encourage à tenir compte des réalités de tout le
monde lors de la planification de changements.
Cependant, la solidarité peut devenir un obstacle au changement lorsqu "elle est utilisée par
des leaders négatifs. La proximité entre employés favorise également la circulation de
rumeurs et d'informations erronées. Dans certains cas, le rapprochement entre employés et
94
agents de changement ou supérieurs manquant de leadership peut mener au laxisme et à la
tolérance de comportements négatifs. Les agents de changements et superviseurs devraient
être sensibilisés à cette réalité.
Un autre effet de la vie en communauté est de favoriser le rapprochement entre les employés
de la mine et ses sous-traitants. Si cette situation présente les avantages et les inconvénients
énumérés précédemment, on remarque aussi qu'elle peut engendrer des malentendus. Ainsi,
la mine et les sous-traitants font parfois circuler des messages et des valeurs différents, voire
contradictoires parmi leurs employés. Lorsque ces derniers en discutent, il peut en découler
une confusion et une désinformation. La mine gagnera à effectuer une gestion plus serrée de
ses sous-traitants tel que suggéré par Xstrata (Xstrata Nickel - Mine Raglan, 2007) afin de
contrer ce problème.
Particularité 6: Sentiment d'appartenance
Le sentiment d'appartenance est tangible à Mine Raglan. Cette réalité peut s'expliquer par
l'éloignement des opérations et la fierté des employés de participer à une expérience unique
au sein d'une équipe de qualité. La vie en communauté sur le site même de la mine accentue
probablement aussi le sentiment d'app31tenance. Les valeurs positives de l'entreprise et une
volonté de la direction de créer ce sentiment ont certainement aussi participé à entretenir
l'appartenance de ses travailleurs. Cette particularité engendre un niveau élevé d'implication
et de dévouement de la part des employés et un appui au changement lorsqu'il est démontré
qu'il est positif pour la compagnie. Cependant, l'appartenance à l"organisation favorise
également un fort attachement au passé et aux vieilles habitudes. Les agents auront donc
avantage à démontrer le bien fondé du changement pour que le bien de la compagnie prime
sur le maintien des habitudes passées. Pour ce faire, ils pourront miser sur la consultation et
la collaboration des anciens et des leaders positifs.
Particularité 7 : Influence du corporatif
Que ce soit au temps de Falconbridge Ltée ou aujourd'hui sous la gestion de Xstrata, les
valeurs et les choix de gestion des administrateurs du bureau corporatif de la compagnie mère
ont toujours fortement influencé les actions de Mine Raglan. Très positives, ces valeurs sont
95
autant de leviers du changement et le corporatif offre généralemenl son soutien aux projets
qui en font la promotion. Qui plus est, l'engagement des surintendants de la mine s'obtient
plus aisément lorsqu'un changement est appuyé par le bureau corporatif. Cependant, ce
dernier impose occasionnellement des changements plus ou moins appropriés, ce qui
discrédite le changement en générai.
Comme nous l'avons vu précédemment, Xstrata a énoncé très clairement ses standards
d'opération en matière de santé et de sécurité au travail ainsi qu'en matière de respect de
l'environnement et des communautés. Si Falconbridge Limitée se voulait déjà une entreprise
socialement responsable, l'acquisition par Xstrata s'est accompagnée d'une revue en
profondeur des écarts existant entre les valeurs et les standards de la compagnie afin de
combler les lacunes. Les lignes directrices que la nouvelle compagnie offre pour opérer dans
le respect du principe du développement durable sont clairement énoncées et la mine est
fortement encouragée à s'y conformer. Les agents de changement gagneront à utiliser ce
puissant moteur du changement qu'est la pression exercée par Xstrata pour que la mine
apporte certaines modifications à ses installations, processus et systèmes.
Particularité 8 : Logistique compliquée
À cause de l'éloignement du site d'exploitation, une logistique d'hébergement et de transport
des employés et marchandises a dû être mise en place et supportée par des infrastructures
appropriées. Dans la gestion du changement, cette logistique compliquée agit parfois comme
un moteur du changement. Par exemple, les employés doivent faire montre d'habileté et
d'imagination pour palier les limites imposées par la logistique. Les qualités aIDSI
développées pourront par la suite servir en situation de changement. Par ailleurs, cette
particularité encourage le développement graduel d'une culture de prévention venant contrer
la culture réactive et à court terme qui est une conséquence de l'héritage Raglan. En effet, les
changements préventifs sont généralement acceptés, parce que les employés comprennent les
conséquences d'être pris au dépourvu à Raglan. Ainsi, la difficulté d'évacuer les blessés ou
les malades encourage les changements visant la prévention des accidents.
96
D'un autre côté, les complications dues aux problèmes de logistique accroissent l'inertie de
Mine Raglan. Il est difficile d'obtenir la main d'œuvre et l'équipement requis pour un projet
de changement, ce qui laisse peu de place à la spontanéité et au changement émergent. Tous
les changements s'implantent lentement et requièrent une planification importante. Le coût
d'un projet est également multiplié en raison de cette particularité. Pour palier ces faiblesses,
il est suggéré de miser sur une planification solide.
Particularité 9 : Climat
Parce que l'exploitation se déroule dans l'Arctique, les employés doivent affronter un climat
rigoureux presque toute l'année et une faible luminosité en hiver. Ces particularités
climatiques et géographiques ont des effets sur le bien-être psychologique des employés ce
qui, dans le cadre de la gestion du changement, peut accentuer certains phénomènes comme
la résistance aveugle. Par ailleurs, la planification des projets doit tenir compte de la réalité
climatique et des contraintes logistiques qu'elle entraîne. Il sera important que les agents de
changement gardent à l'esprit cette réalité dans leur planification.
Particularité JO: Taux élevé de renouvellement des employés
En raison des exigences et du rythme soutenu de travail et parce que le système des rotations
amène les travailleurs à être éloignés de la maison plus de la moitié du temps, Mine Raglan
doit composer avec un fort taux de remplacement de ses employés syndiqués et cadres.
Contre toute attente, certains avantages sont liés à celle situation particulière. Puisque peu
d'employés entrevoient une longue carrière à Mine Raglan, ceux-ci ont peu tendance à
considérer leur avancement comme menacé par la performance de leurs collègues. Le travail
d'équipe est donc peu affecté par la compétition entre collègues. De la même façon, les
employés ont tendance à vouloir laisser leur marque en peu de temps et font preuve d'une
grande efficacité. Le renouvellement constant des effectifs amène régulièrement une énergie
nouvelle dans l'équipe et permet de remplacer de façon graduelle les éléments réfractaires au
changement. D'ailleurs, les nouveaux employés tendent à accepter plus facilement le
changement, puisqu'ils doivent de toute façon intégrer de nouveaux standards de travail.
97
À l'opposé, le renouvellement continu des employés peut affecter négativement la capacité
de changement de l'organisation. Les nouveaux arrivants ont parfois une volonté de tout
changer, ce qui brusque leurs collègues et accentue la résistance au changement. La
formation est également toujours à refaire et il est parfois difficile de maintenir un
changement si les standards de l'organisation sont mal ou peu transmis aux nouveaux
employés. Pour certains individus, le fait de ne pas envisager une carrière de longue durée au
sein de l'organisation entraîne une vision à court terme et une préférence pour le statu quo.
Enfin, le dépalt d'alliés stratégiques pour un changement en cours a le potentiel d'en freiner
la réalisation ou le maintien.
Afin de bien former et informer les nouveaux employés et ainsi de maintenir les changements
déjà implantés, Mine Raglan a développé nombre d'outils que les agents de changement sont
appelés à utiliser. Entre autres, le processus d'accueil permet de transmettre une grande
quantité d'information aux nouveaux arrivants et le contenu de l'accueil doit être mis à jour
régulièrement afin de refléter les changements apportés à l'organisation. Par ailleurs, la
création d'une équipe d'implantation et de maintien du changement regroupant des agents de
changement secondaires de tous les secteurs permettrait de poursuivre le projet malgré le
départ d'un ou de plusieurs agents ou alliés stratégiques.
Particularité Il : Diversité d'origine des employés
Établie sur le territoire du Nunavik, Mine Raglan s'est engagée dans son certificat
d'autorisation global à engager un minimum de 20% d'employés inuits (Québec, 1995).
Malgré les efforts constants investis dans le recrutement et la formation d'employés
provenant des communautés de la région, Mine Raglan compte aujourd'hui 16% d'!nuits
parmi ses effectifs (D. Colpron, communication personnelle, 18 août 2006). Le reste des
employés est originaire du sud du Canada et majoritairement du sud du Québec. Ces derniers
proviennent d'ailleurs d'une grande diversité de régions éloignées les unes des autres comme
r Abitibi-Témiscamingue, la Gaspésie et la grande région de Montréal. Conséquemment, les
employés de Mine Raglan possèdent des références culturelles multiples. Sur le plan du
changement organisationnel, Mine Raglan est particulièrement bien outillée en raison de la
diversité des expériences professionnelles de ses employés qui peuvent inspirer de nouvelles
98
façons de procéder. Cependant, les processus de changement peuvent être ralentis par la
nécessité de communiquer en trois langues (français, anglais, inuktitut), ce qui complique la
diffusion des messages et les activités de consultation et de formation. Une bonne
communication doit par ailleurs s'adapter aux divers bagages culturels des employés.
Pour répondre à ses difficultés, il est fortement suggéré de reprendre les formations
multiculturelles pour l'ensemble des employés, mais particulièrement pour les superviseurs et
les agents de changement. Cela permettrait à ces derniers d'adapter plus facilement leurs
messages aux différentes réalités culturelles et de gérer de façon appropriée l'implantation du
changement. Les travaux de consultation préalables à la planification du changement
permettraient également d'utiliser l'expérience d'un grand nombre d'individus et de tenir
compte du bagage culturel de chacun. Pour ce faire, les agents de changement devraient
s'assurer de consulter des individus appartenant à chacun des deux principaux groupes
culturels (blancs et Inuits). L'observation participante révèle en effet que le niveau de
consultation officielle est plutôt faible à Raglan et que les Inuits sont généralement moins
consultés que les Blancs, probablement en raison des contraintes linguistiques et des postes
occupés par les Inuits. Cependant, nous ne pouvons juger du degré de consultation
individuelle et officieuse qui a cours à Mine Raglan. Il est fort probable que l'opinion des
Inuits est plus recueillie au moyen de rencontres de personne à personne.
Particularité 12 : Vente de Falconbridge Ltée à Xstrata
Décision relevant de l'exécutif de Falconbridge LIée, l'achat de la compagnie par la société
Xstrata est à la source de certains effets positifs et négatifs sur le changement. En effet,
l'achat de la compagnie a été suivi par un diagnostic exhaustif des besoins de changement de
J'organisation. Qui plus est, nous avons décrit précédemment comment les standards de
Xstrata en matière de santé et de sécurité au travail, d'environnement et de relations avec les
communautés s'apprêtent à propulser certains changements désirés depuis longtemps par
divers acteurs de la mine Raglan. Clairement exprimés, les standards et les principes
défendus par Xstrata se posent comme un appui substantiel et stratégique à divers projets de
changement en cours, comme l'implantation du nouveau PGMR. Cependant, certaines
stratégies de gestion sont appelées à être modifiées au sein de la nouvelle organisation, ce qui
99
remet en question la réalisation de certains projets. Par exemple, on ne sait toujours pas à
Mine Raglan si la méthodologie et le Groupe Six Sigma continueront d'être soutenus.
Particularité 13: Éparpillement géographique des sites d'opération
Tel que décrit précédemment, les activités de Mine Raglan sont dispersées sur plusieurs sites
dont l'éloignement peut dépasser les 100 km. Cette situation complique souvent
l'implantation de changements à grande échelle, puisque les agents doivent couvrir de
grandes distances pour réussir à communiquer avec l'ensemble des employés de la mine. Ils
doivent aussi s'efforcer d'adapter le changement aux réalités de chaque site. Pour mener à
bien le projet, il est important que les agents s'assurent de consulter des représentants de
chaque site impliqué pour produire des changements qui soient réalistes et réalisables. En
plus de prendre Je temps de se déplacer au besoin à chacun des sites visés par un changement,
les agents ont à leur disposition nombre d'outils de communication comme le courriel, les
babillards, la formation par ordinateur, etc. ]Js gagneront à y avoir recours et devraient aussi
s'efforcer de décentraliser l'implantation du changement en désignant une équipe d'agents
secondaires pour assurer la continuité du changement dans leurs secteurs respectifs.
Particularité 14 : Logement des employés
Certains agents consultés ont affirmé rencontrer de la résistance au changement clairement
liée au fait que certains travailleurs sont logés dans des campements où ils doivent partager
une chambre avec un collègue. Pour ces ]6% d'employés, la situation est source de stress et
de fatigue car leur sommeil s'en trouve affecté. Bien que l'organisation procède actuellement
à des travaux d'agrandissement du complexe d'habitation afin de corriger cette situation, les
agents se devraient d'être attentifs aux facteurs personnels affectant la réceptivité des
employés face au changement.
Particularité 15 : Système de bonus
L'entreprise a fait le choix de bonifier le salaire de ses employés en fonction de la
productivité de J'organisation et de sa performance dans le domaine de la sécurité au travail.
Sur le plan individuel, l'atteinte d'objectifs personnels ciblés annuellement influence aussi
l'augmentation salariale des employés non syndiqués. Il s'agit là d'outils d'acceptation du
100
changement qui peuvent être utilisés par les agents. Cependant, les bonis à la production
alimentent la culture de production avant tout et peuvent alimenter la résistance au
changement si celui-ci risque d'affecter négativement la production. Pour contrer cet effet, les
agents n'ont d'autre choix que de multiplier les communications pour consulter et convaincre
les employés du bien-fondé du changement ou de ses avantages à court, à moyen ou à long
terme.
Prises individuellement, les 15 particularités énoncées ne sont pas spécifiques à Mine Raglan,
mais la mise en commun de cet ensemble de caractéristiques en fait une organisation unique
et forge, comme nous l'avons vu, les forces et les faiblesses de cette organisation en matière
de changement. Afin d'accroître sa capacité de changement organisationnel, c'est donc sur
ces constatations que Mine Raglan devra tabler.
4.5.4 Forces et faiblesses en matière de changement: réponse à la troisième question de recherche
La présente section nous a permis d'énoncer les spécificités de Mine Raglan qui affectent sa
capacité de changement et de proposer des pistes de solutions qui permettraient J'accroître.
En réponse à notre troisième et dernière question de recherche, les lignes qui suivent
résument donc les forces et les faiblesses de Mine Raglan en matière de changement
organisationnel et proposent des recommandations pour surmonter les faiblesses et exploiter
pleinement les forces de l'organisation.
Au chapitre des forces, plusieurs caractéristiques de Mine Raglan peuvent être énumérées.
D'abord, on observe que les récepteurs ont une vision positive du changement. En effet, 85%
s'y disent spontanément favorables et 77% pensent que les changements implantés à Raglan
tendent généralement à réussir. La mine est aussi perfonnante en ce qui concerne la
communication des raisons du changement, 62% des récepteurs jugeant qu'elles sont assez
communiquées. Cela accroît la capacité de changement de l'organisation puisque 79% des
récepteurs sont d'avis qu'une bonne communication du changement les aide à l'accepter. Par
ailleurs, l'initiative des travailleurs en matière de changement est aussi une force de Mine
Raglan, 82% des récepteurs disant avoir déjà demandé la réalisation d'un changement. De ce
101
nombre, 68% l'ont vu se réaliser et panni ceux-ci, 74% ont participé à sa mise en œuvre. De
par leur initiative, les travailleurs participent activement à la mise en œuvre du changement.
Par ailleurs, les services agissant comme agents de changement sont généralement perçus de
manière positive par les récepteurs ayant vécu une expérience de changement avec chacun
d'eux. Ainsi, les récepteurs ont une bonne (71 %) ou très bonne (29%) opinion du Service de
la prévention qui es1 aussi perçu comme étant assez actif (7\ %) et proposant des
changements utiles (50%) ou très utiles (46%). Rappelons que huit répondants (24%) ont
affinné être particulièrement favorables à un changement augmentant la santé et la sécurité
au travail. Les récepteurs du changement ont également une bonne (50%) ou très bonne
(46%) opinion du Service de l'environnement. Celui-ci est perçu comme étant assez actif
(68%) et proposant des changements utiles (36%) ou très utiles (55%). L'image du Groupe
Six Sigma est elle aussi positive puisque les récepteurs en ont une bonne (55%) ou très bonne
(27%) opinion. Ce service est vu comme étant assez actif (55%) et proposant des
changements utiles (55%) ou très utiles (9%). Même son de cloche pour le Service de la
fonnation dont une majorité de répondants ont une bonne (52%) ou très bonne (35%)
opinion. Cet agent de changement est perçu comme étant assez actif (52%) et proposant des
changements utiles (30%) ou très utiles (61 %). Enfin, les récepteurs ont une bonne (30%) ou
très bonne (50%) opinion du Service informatique qui est également perçu comme étant assez
actif (70%) et proposant des changements utiles (50%) ou très utiles (20%).
Entre autres facteurs de réussite du changement, Mine Raglan présente certaines aptitudes qui
participent à accroître sa performance en la matière. D'une part, l'organisation a développé sa
capacité à utiliser les situations de crise pour stimuler le changement. Mine Raglan progresse
aussi graduellement vers un mode de gestion tourné vers la prévention et la réalisation
d'objectifs à moyen et long terme plutÔl qu'à court terme. L'organisation et ses effectifs ont
également acquis plusieurs qualités utiles à l'implantation du changement comme une
capacité d'innovation et d'adaptation à de nouvelles techniques et situations. Ils ont aussi
développé leur débrouillardise et l'imagination nécessaire pour palier les limites imposées par
la logistique. Parce que les employés n'envisagent généralement pas une carrière à long
terme à la mine Raglan, ils font souvent preuve d'un degré d'efficacité élevé afin de laisser
] 02
leur marque en peu de temps. Par ailleurs, ils présentent une diversité d'expériences
professionnelles et de bagages culturels et ont développé l'habitude de travailler en équipe
dans un contexte multidisciplinaire et multiculturel. Enfin, la mine et ses effectifs ont au fil
du temps acquis un mode de pensée global lié aux valeurs de la compagnie.
La culture organisationnelle de Mine Raglan aide aussi à la réalisation du changement. En
effet, celle-ci s'appuie sur des valeurs fortement défendues par ses membres ce qui donne
beaucoup de légitimité aux changements visant leur respect. Aussi cette culture fait peu appel
à la compétitivité et à la territorialité, ce qui amène plus de coopération. Outre la culture,
plusieurs caractéristiques de la mine agissent comme leviers du changement. Les projets
faisant la promotion des valeurs corporatives sont appuyés par Xstrata ce qui aide à obtenir
l'engagement du comité de direction. Les obligations prises face aux communautés inuites
peuvent aussi propulser le changement. Le phénomène des employés à relais qui agissent
comme agents d'un même changement peut mener à l'adoption de deux approches
différentes ce qui permet de rejoindre un maximum de personnes.
Dans le même ordre d'idées, le développement de mécanismes de communication originaux a
permis de pallier les difficultés de communication propres à Mine Raglan. Les longues
heures de travail qui sont parfois un handicap permettent toutefois d'abattre une importante
quantité de travail en peu de jours. Même chose pour le renouvellement constant des effectifs
qui, malgré ses côtés négatifs, représente un apport constant d'énergie nouvelle et permet de
remplacer les éléments réfractaires au changement par de nouveaux employés tendant à
J'accepter plus facilement. Le fort sentiment d'appartenance des employés à leur lieu de
travail est aussi source d'un niveau élevé d'implication, de dévouement et de support du
changement lorsque celui-ci est présenté comme étant bénéfique pour la compagnie. Par
ailleurs, la vie en communauté favorise les communications dans un cadre non officiel, la
solidarité, le soutien entre employés, Je respect mutuel, la diplomatie, l'accessibilité de la
haute direction, la compréhension du travail de chacun, le travail d'équipe et Je regroupement
d'une coalition autour d'un projet. Enfin, des mécanismes comme le diagnostic exhaustif des
besoins de changement de l'organisation réalisé à la suite de l'acquisition de Falconbridge
103
Ltée par Xstrata et les systèmes de bonus pouvant être utilisés comme outil d'acceptation du
changement sont des leviers impoltants du changement organisatiolll1el à Mine Raglan.
Toutefois, l'organisation doit aussi combattre nombre de faiblesses pour mener à bien le
changement. D'une part, il appert que la formation n'est pas assez disponible dans le contexte
du changement. Bien qu'une majorité de récepteurs juge recevoir les outils nécessaires à
l'implantation du changement, 41 % ne sont pas de cet avis et à cet effet, la formation serait
l'outil qui manque le plus. En effet, parmi les récepteurs jugeant ne pas disposer des
ressources nécessaires à l'implantation du changement, 43% estiment que c'est la formation
qui est l'outil le plus déficient. Aussi, chez les récepteurs ayant vécu un changement implanté
par le Service fonnation, 48% sont d'avis que celui-ci n'est pas assez actif.
Outre la formation, la consultation et la communication sont également déficientes. À cet
effet, les récepteurs du changement s'expriment sévèrement. 50% des récepteurs ne
s'estiment pas assez (41 %) ou pas du tout (9%) consultés dans le processus de changement et
62% jugent que les résultats du changement ne sont pas assez (41 %) ou pas du tout (21 %)
communiqués. De J'avis des récepteurs, la communication des projets, des objectifs et des
résultats du Groupe Six Sigma serait particulièrement problématique.
Mine Raglan doit aussi apprendre à composer avec la récurrence des situations de crise pour
mener à bien le changement. Bien qu'elles puissent être un facteur de réussite du changement
lorsqu'elles en motivent l'implantation, les situations de crise limitent le temps alloué à la
planification des changements, amènent J'organisation à travailler en mode réactif et
favorisent l'implantation des changements par essais et erreurs. Tout cela a le pouvoir de
miner les efforts de changement. De même, la résistance au changement, bien que non
généralisée, n'est pas étrangère à l'organisation étudiée. Celle-ci apparaît pour diverses
raisons, par exemple lorsque les valeurs individuelles entrent en contlil avec les valeurs
organisationnelles. Aussi, l'appartenance à l'organisation favorise r attachement au passé et
aux vieilles habitudes. Par ailleurs, la culture du ça va coûter cher développée alors que le
cours des métaux était à un bas niveau s'oppose aujourd'hui encore aux changements
nécessitant des dépenses destinées à d'autres fins que la production, même si les contraintes
104
financières ne sont plus aussi importantes. Spécifiques à Mine Raglan, les conditions
climatiques ou de logement ont également des effets sur le bien-être psychologique des
employés entraînant une résistance aveugle de leur part. Dans d'autres cas, c'est la vision à
court terme et la préférence pour le statu quo chez certains individus qui n'envisagent pas une
longue carrière au sein de l'organisation qui est source de résistance. Enfin, la peur que le
changement affecte la production et conséquemment les bonis salariaux peut mener à la
résistance.
Mine Raglan doit aussi composer avec l'héritage laissé par les circonstances de ses débuts.
Ainsi, la chute du prix des métaux au tournant du siècle a engendré une culture de gestion à
court terme qui rend aujourd'hui difficile l'investissement dans des projets rapportant
seulement des bénéfices (monétaires ou non) à moyen ou long terme. Le développement par
essais et erreur des connaissances et expériences sur les opérations en milieu arctique oblige
aussi la mine à réparer aujourd'hui certaines erreurs passées. Par ailleurs, les projets de
changement se butent parfois au cynisme des employés en raison de la persistance de
certaines incohérences entre la rhétorique et la pratique de l'organisation et de changements
peu appropriés imposés occasionnellement par le bureau corporatif.
La pal1icularité des horaires de travail engendre aussi certaines faiblesses de l'organisation en
matière de changement. Le contexte des rotations complique la communicat ion, la.
consultation, la formation et la transmission d'information. Des problèmes de continuité dans
l'implantation du changement sont aussi attribuables aux rotations et au phénomène des
employés à relais. Les longues heures de travail entraînent quant à elles une accumulation de
fatigue et une baisse d'efficacité en fin de journée ou de rotation. Autre caractéristique de
Mine Raglan, le sentiment d'appartenance à l'organisation peut être utilisé pour nuire au
changement si des leaders négatifs utilisent la solidarité de leurs pairs pour opposer une
résistance au projet. Par ailleurs, la proximité entre employés favorise la circulation de
rumeurs et d'informations enonées. Elle peut aussi être source de laxisme et entraîner la
tolérance de comportements négatifs en raison des relations étroites qui s'établissent entre
employés et membres de l'équipe de supervision. La proximité peut enfin engendrer
105
confusion et désinformation si les sous-traitants font circuler parmi leurs employés des
messages différents et même contradictoires par rapport à ceux émis par Mine Raglan.
L'opération en milieu arctique comporte également son lot de contraintes logistiques pour
l'organisation. Celles-ci engendrent un degré d'inertie très élevé car le changement requiert
une planification lourde et un temps d'implantation important. Ce contexte laisse aussi peu de
place à la spontanéité et au changement émergent et tend à augmenter les coûts du
changement. Autre particularité de Raglan, le renouvellement continu des effectifs n' a pas
que du bon. Ainsi, les nouveaux brusquent parfois les anciens avec leur volonté de
changement. De plus, le changement régulier du personnel nécessite de reprendre
constamment la formation. Enfin, le changement peut être freiné ou ne pas être maintenu en
raison du départ d'alliés stratégiques. Finalement, le changement peut être compliqué par les
grandes distances séparant les sites d'opération et par la nécessité de communiquer en trois
langues et de s'adapter aux différents bagages culturels, systèmes de valeurs et priorités des
individus formant la communauté de Mine Raglan. L'acquisition de Falconbridge LIée par
Xstrata a aussi engendré une remise en question de certains changements passés ou en-cours
de réalisation, comme le maintien du Groupe Six Sigma.
Afin de surmonter ses faiblesses et d'exploiter pleinement ses forces, nous suggérons à
l'organisation et à ses agents de changement de poser les actions suivantes pour chaque
processus de changement. D'une part, il est recommandé de suivre le modèle de changement
développé pour Mine Raglan dans le cadre de cette étude. Dans cette optique, Mine Raglan
devrait, pour chaque changement, développer une vision claire de l'état à atteindre et
effectuer un diagnostic de J'écart qui doit être comblé pour passer de la situation actuelle à
l'état désiré. Il serait souhaitable que l'organisation désigne officiellement soit deux agents de
changement principaux, soit un agent principal et deux agents secondaires pour assurer une
continuité dans l'implantation du changement en dépit des rotations. Parce que 85% des
récepteurs préfèrent cette approche et que les travailleurs font montrent d'initiative en matière
de changement, il est suggéré d'avoir plus systématiquement recours à la consultation. À cet
effet, on favorisera les rencontres de groupes parce qu'elles stimulent la réflexion et
106
l'échange d'idées, qu'elles permettent des économies de temps et que 74% des récepteurs
sont à l'aise avec cette méthode.
D'autre part, nous sommes d'avis que la mine doit poursuivre les efforts de consultation et
d'intégration des employés inuits dans l'organisation afin de favoriser la compréhension
mutuelle des deux principaux groupes culturels. Pour ce faire, on devrait entre autres relancer
la formation l11ulticulturelle et l'offrir en priorité aux agents de changement. Toujours dans
un objectif de transparence et d'implication des récepteurs au processus de changement, la
mine devrait accroître la communication des raisons du changement et utiliser (sans les tenir
pour acquis) la bonne réputation des services implantant du changement ainsi que la vision
généralement positive qu'ont les récepteurs à l'égard du changement. Pour mettre de l'avant
la communication, les agents peuvent avoir recours aux outils développés à Raglan comme la
formation par ordinateur, les rapports de fin de rotation, le processus d'accueil (trousse de
pré-arrivée, formation multimédia, parrainage, etc.), l'affichage sur des babillards visibles ou
dans les salles de bain, l'usage approprié des courriels, les réunions de production
quotidienne, les tao/ box meetings et réunions mensuelles de santé-sécurité, les présentations
à grande échelle sur un sujet donné, les activités spéciales, les concours mensuels, etc.
Les agents ne doivent pas hésiter à développer de nouveaux outils de communication et à
renouveler régulièrement l'information pour susciter l'intérêt. II est également suggéré que
les différents services mettent leurs efforts de communication en commun. On pourra aussi
profiter des avantages de la vie en communauté pour faire la promotion du changement de
façon non officielle, tout en sachant éviter les pièges de celle méthode. Les agents devraient
par ailleurs miser sur un discours imagé faisant appel à l'émotivité des récepteurs et justifier
la pertinence de l'application des valeurs organisationnelles dans ce cas précis. Pour motiver
l'adoption du changement, l'agent devra également travailler à développer un sentiment
d'urgence, promouvoir le refus du statu quo et démontrer le bien-fondé du changement pour
que le bien de la compagnie prime sur le maintien des habitudes passées. Il sera pertinent de
miser sur la consultation et la collaboration des anciens et des leaders positifs. Dans un même
ordre d'idée, les agents gagneraient à former une coalition d'alliés et d'agents secondaires
provenant de chaque secteur d'activité. Ils devront toutefois s'assurer que les alliés identifiés
107
partagent les valeurs de l'entreprise et faire en sorte de décentraliser l'implantation du
changement pour en assurer la continuité en dépit des rotations et du départ d'agents ou aIJiés
stratégiques.
Nombre de leviers du changement sont également disponibles au sein de l'organisation et
l'agent de changement doit savoir les exploiter. On pense par exemple aux obligations qu'a la
mine face à ses partenaires inuits. Les valeurs défendues par Mine Raglan et Xstrata ainsi que
les outils, recommandations et lignes directrices offerts par le siège social pour les mettre en
pratique peuvent aussi favoriser l'implantation du changement si l'agent y fait appel. La
détermination de Xstrata à faire respecter ses valeurs est certainement un levier non
négligeable du changement. Xstrata a d'aiIJeurs mené un diagnostic des besoins de
changement de l'organisation suite à l'acquisition de FaJconbridge LIée. D'autre part, la
récurrence des situations de crise peut agir comme facteur de motivation à l'implantation
rapide du changement, mais l'agent devra savoir en éviter les pièges. La qualité des effectifs
de Mine Raglan sera aussi d'une grande aide à l'agent qui saura reconnaître ce potentiel. En
plus de la compétence des employés, leur sentiment d'appartenance et leur volonté de
colJaboration sont des atouts que l'agent pourra exploiter. Les systèmes de bonus peuvent
également aider l'agent à rallier les employés.
Au chapitre de la méthodologie à adopter pour réussir l'implantation et le maintien du
changement, les agents de Mine Raglan gagneront à miser sur une planification solide du
changement et à tenir compte des contraintes logistiques et climatiques. Ils sont aussi
encouragés à considérer les facteurs de réussite et d'échec du changement cernés dans le
cadre de cette étude tant par les récepteurs et agents que par la littérature. Ils devraient s'en
inspirer pour éliminer les obstacles au changement et profiter des leviers. Pour que le
changement soit harmonieux, ils devraient tenir compte des composantes culturelles,
structureIJes et stratégiques de l'organisation lors de la préparation et de la mise en œuvre du
changement afin que celles-ci demeurent cohérentes entre elles. Autant que possible, les
agents qui planifient des rencontres ou des sessions d'information devraient aussi tenir
compte des facteurs personnels affectant les participants, comme leur degré de fatigue lié à
l'horaire de travail. Il est par exemple suggéré de ne pas organiser de réunion en fin de
108
journée, ni à la fin de la rotation des participants. Par ailleurs, l'agent devrait prendre soin de
cibler les ressources et les outils nécessaires à l'implantation du changement et s'assurer que
ceux-ci sont disponibles. Dans ce même ordre d'idée, nous recommandons à l'organisation
d'offrir au Service formation les ressources nécessaires à son fonctionnement optimal.
De façon plus générale, nous recommandons enfin à Mine Raglan d'assurer la
communication systématique des résultats de tout changement afin de faire la démonstration
que l'organisation mène à terme les projets qu'elle entreprend. Dans le même esprit,
l'organisation devrait faire la démonstration du respect des valeurs corporatives afin de
combattre le cynisme. Elle ne devrait pas cacher les incohérences, mais plutôt les expliquer et
montrer une détermination à les régler. D'autre part, Mine Raglan devrait sonder les valeurs
de ses candidats à l'embauche pour limiter les conflits de valeur entre les individus et
j'organisation. Nous l'encourageons aussi à miser sur un mode de gestion préventif plutôt
que réactif et à répondre à l'exigence de Xstratad'encadrer de façon plus serrée le travail de
ses sous-traitants afin d'assurer qu'eux aussi se conforment à ces valeurs, Finalement, s'il est
décidé de maintenir en activité le Groupe Six Sigma, celui-ci devra assurer une meilleure
communication de ses projets, objectifs et résultats.
Les actions proposées sont évidemment spécifiques au cas de la mine Raglan puisqu'elles
répondent à ses propres forces et faiblesses. Elles peuvent être appliquées par tous les
services et agents de changement œuvrant à la mine Raglan. En outre, il est fortement
suggéré au Service de l'environnement de tenir compte de ces suggestions dans la mise en
application de ses programmes environnementaux, dont l'implantation du nouveau PGMR.
Toutefois, ces conclusions ne sauraient être généralisées sans précaution à une autre
organ isa ti on.
Entre autres, les facteurs de réussite et d"échec du changement énumérés en priorité par les
récepteurs et les agents de changement de Mine Raglan sont susceptibles d'être différents
pour une autre organisation. Par ailleurs, les résultats de l'évaluation par les récepteurs du
changement des forces et des faiblesses de Mine Raglan en matière de changement sont
évidemment propres à cette organisation, Nous croyons cependant, que les organisations
109
œuvrant en milieu éloigné ou dans des conditions d'opération extrêmes pourraient s'inspirer
de nos conclusions afin d'accroître leur propre capacité de changement. En outre, de telles
organisations partageront avec Mine Raglan un certain nombre de ses particularités
identifiées par ses agents de changement. Conséquemment elles pourront adapter et mettre en
œuvre certaines des actions proposées ici pour utiliser pleinement leurs forces et estomper
leurs faiblesses. Elles gagneraient aussi à s'inspirer du modèle théorique corrigé pour
l'implantation de leurs propres changements.
CONCLUSION
L'étude du cas de Mine Raglan visait d'une part à évaluer la capacité de changement de cette
organisation en se basant sur sa façon de l'implanter, sur les facteurs de réussite et d'échec
que ses membres identifient et sur les forces et faible~ses qui affectent la réalisation des
changements. On souhaitait d'autre part identifier les défis spécifiques auxquels Mine Raglan
doit faire face dans ses processus de changement en raison de ses caractéristiques propres
comme son isolement géographique. Enfin, nous voulions utiliser ces constats pour formuler
des recommandations afin que Mine Raglan soit en mesure de mener à bien des projets de
changement actuels et futurs tel que l'implantation de son nouveau PGMR. Quant à la
possibilité de généraliser les conclusions de notre étude, nous sommes d'avis qu'elle se limite
principalement aux organisations évoluant en milieu éloigné et dans des conditions extrêmes.
Celles-ci pourront entre autres s'inspirer des particularités qu'elles partagent avec Mine
Raglan et utiliser les recommandations fom1Ulées par les agents de changement pour
accentuer leurs forces et surmonter leurs faiblesses. Elles pourront aussi s'inspirer du modèle
théorique corrigé pour l'implantation de leurs propres changements.
Pour ce qui est du cas spécifique de Mine Raglan, différents constats ont pu être effectués à la
suite de notre étude. D'une part, les processus de changement vécus à Mine Raglan ne
suivent pas exactement les étapes décrites dans Je modèle théorique que nous avons proposé.
Sans surprise, nous avons remarqué qu'il y avait à Mine Raglan autant de modèles que de
changements. Cependant, les cas de changements étudiés ont pu être divisés en deux groupes.
Dans le premier, le besoin de changement découlait de l'identification d'un problème à
l'intérieur de l'organisation et impliquait une sélection officieuse de l'agent de changement.
Dans le deuxième groupe, le besoin de changement émanait d'une volonté exprimée par le
haut de la pyramide hiérarchique et le choix de l'agent de changement était officiel. Si
l'ensemble des changements étudiés respectait les phases de décristallisation - mouvement
recristallisation, les sous-étapes proposées dans le modèle théorique étaient souvent
III
interverties ou absentes dans la pratique. Certains agents de changement ont cependant ajouté
des sous-étapes très pertinentes comme la validation du plan auprès d'experts ou de pairs.
Celles-ci nous ont pelmis de bonifier le modèle théorique pour l'adapter à la réalité de Mine
Raglan. Ce nouveau modèle a enfin servi à élaborer un programme de changement pour les
étapes à venir de l'implantation du PGMR.
D'autre part, la comparaison des facteurs de succès et d'échec du changement énoncés par la
littérature, les récepteurs et les agents a révélé certains faits. D'abord, ni les récepteurs ni les
agents rencontrés ne soulignent la difficulté d'une résistance politique ou l'importance pour
l'organisation d'avoir développé des aptitudes de gestion et une pensée systémique pour
soutenir le changement. Ensuite, seuls les agents mentionnent les barrières de l'industrie et
l'appui des leaders et des décideurs, de la culture et de la structure de l'organisation en tant
que facteurs influençant le processus de changement. D'un autre côté, seuls les récepteurs
semblent considérer comme significatifs les facteurs résistance aveugle ou idéologique,
sentiment d'urgence insuffisant, qualification des employés et organisation proactive ou
faisant habituellement preuve de cohérence entre rhétorique et pratique. Cependant, la
littérature ne fait pas mention de certaines préoccupations exprimées par les acteurs
rencontrés. À titre d'exemple, les récepteurs jugeaient que l'entraide entre collègues et la
bonne coHaboration des divers acteurs favorisait la réussite du changement. Les agents
mentionnaient quant à eux les problèmes que peut engendrer la difficulté à profiter des
circonstances favorables pour maintenir la continuité du projet. Omis par la littérature
consultée, ces facteurs de succès et d'échec sont très représentatifs de la réalité de Mine
Raglan.
Aussi, nombre de forces et faiblesses propres à Mine Raglan dans ses processus de
changement ont pu être jdentifiées et, conséquemment, des recommandations ont été
formulées. Nous sommes donc à même de constater que Mine Raglan présente une assez
bonne capacité de changement organisationnel. Visiblement: plusieurs changements
implantés ont réussi et ont été maintenus, mais l'organisation semble répéter régulièrement
des erreurs dans ses processus de changement. Parmi elles, on note la place insuffisante qui
est faite à la consultation des récepteurs du changement préalablement à la planification.
112
Également, la communication des résultats du changement est une lacune qui accentue de
fois en fois la résistance au changement, puisque les récepteurs n'ont pas connaissance des
réussites antérieures. Aussi, bien que les mentalités évoluent, la gestion préventive et la
planification à long terme n'ont pas la cote, ce qui limite l'appui que certains projets de
changement reçoivent. Enfin, la localisation géographique de la mine et les ajustements et
contraintes qui en découlent agissent souvent comme un frein au changement que plusieurs
abordent comme une fatalité. Loin d'être insurmontables, la discussion avec les agents a
permis de constater que certains défis pouvaient être relevés grâce à des outils de
communication ou des habitudes de travail développés à Raglan.
Les faiblesses de l'organisation dans son implantation du changement sont à notre aVIs
largement attribuables à l'inexistence de lignes directrices pour encadrer sa gestion. En effet,
à l'exception des membres du Groupe Six Sigma, aucun agent ne reçoit de formation sur la
gestion du changement et les méthodes qu'ils emploient sont soit improvisées, soit tirées
d'expériences de travail antérieures. Si la majorité des changements semblent réussir malgré
tout, on est en droit de s'attendre à ce que la capacité de changement de l'organisation soit
accme si Mine Raglan acceptait de souscrire aux recommandations formulées.
Parmi celles-ci, nous croyons que Mine Raglan gagnerait à former ses agents sur les notions
de changement organisationnel et à systématiser le recours au modèle de changement
développé pour elle. Si les agents rencontrés sont qualifiés dans leurs domaines respectifs,
leur plein potentiel pourrait être révélé s'ils disposaient d'outils et de lignes directrices pour
encadrer leur gestion du changement. Nous sommes aussi d'avis que Mine Raglan ne pourra
optimiser complètement sa gestion du changement sans accorder au Service de la formation
les ressources humaines et matérielles nécessaires à son bon fonctionnement. La formation
étant un élément incontournable de tout processus de changement, cette faiblesse devra
nécessairement être comblée pour accroître sa capacité de changement.
Nous avons également constaté que Mine Raglan a développé des outils de communication
performants qui sont malheureusement exploités de façon inégale par chacun des secteurs
implantant du changement. Certains individus ou départements ont tendance à travailler en
113
vase clos et leurs efforts et réussites s'en trouvent peu publicisés. Il serait pourtant pertinent
de diffuser à grande échelle les résultats du changement afin de combattre le scepticisme et le
cynisme et d'encourager les récepteurs à participer aux changements à venir.
En suivant les propositions fonnulées, Mine Raglan sera en mesure d'améliorer sa gestion du
changement et de devenir plus efficace sur ce plan. Nous l'avons vu, les besoins de
changement sont nombreux et tendent à se multiplier avec le rachat de Falconbridge par
Xstrata et le nombre élevé d'exigences de la nouvelle compagnie. Parmi ces nouveaux
standards nécessitant des ajustements, plusieurs concernent le Service de l'environnement. Si
Mine Raglan est déjà engagée dans un processus d'amélioration continue de sa performance
environnementale, on peut s'attendre à ce que l'arrivée de ce nouveau joueur augmente la
pression qui s'exerce sur le service pour accélérer la réalisation de changements qui jusqu'ici
étaient envisagés sans être planifiés.
Bien que déjà planifié, le nouveau PGMR de Mine Raglan appartient à ce groupe de projets
de changements qui pourraient profiter du puissant levier que peut être Xstrata pour la
réalisation de changements répondant aux valeurs corporatives. En utilisant cette pression
positive et en ayant recours aux recommandations formulées dans ce mémoire, Mine Raglan
pourrait aborder ce projet avec beaucoup plus d'efficacité. Entre autres recommandations,
nous avons suggéré de désigner officiellement un nouvel agent de changement venant
remplacer l'actuel agent qui est externe à l'organisation. Ce nouvel agent devra être secondé
soit par un deuxième agent principal, soit par deux agents secondaires qui pennettront
d'assurer une continuité dans la réalisation du changement. Dans un deuxième temps, il serait
pertinent d'identifier au mInImum un agent secondaire par secteur de travail qui serait
responsable du suivi de l'implantation du PGMR dans son service: Nous recommandons
également aux agents de s'assurer qu "ils reçoivent un appui officiel du Comité de direction
pour la mise en œuvre du PGMR. Enfin, Mine Raglan a prévu procéder en 2007 à une
première phase d'implantation de son PGMR. Cette étape devrait permettre de générer des
gains à court terme qu'il sera utile de publiciser afin d'encourager la p3lticipation à la
deuxième phase.
114
On constate à l'aide de cet exemple que la prise en compte des recommandations pour mener
à bien des programmes environnementaux permettra à Mine Raglan de déployer pleinement
sa capacité de changement au profit de sa performance environnementale. Elle pourra ainsi
répondre efficacement aux modifications de son environnement externe (nouveau
propriétaire, réglementation, demandes des partenaires inuits) et poursuivre j'amélioration
continue de ses pratiques environnementales. Enfin, la correction des faiblesses de
l'organisation en matière de changement et la préparation d'outils pour faciliter sa gestion
rendent plus probable la réalisation de changements émergents, peu ou pas planifiés.
L'organisation sera donc plus à même de faire face aux situations de crise et de réagir aux
pressions externes non anticipées.
APPENDICE A
SOMMAIRES DES MODÈLES DÈVELOPPÉES PAR DIFFÉRENTS AUTEURS
AI " Modèles théoriques de changement organisationnel 116
-
116
Tableau A.l Modèles théoriques de changement organisationnel
Lewin
(1958 cité dans Burke, 2002)
I-Décristallisation
2-Mouvement
3-Reeristall isation
Schein (1987 cité dans Burke, 2002)
I-Décristallisation
I.I-Nécessité du changement
2.I-Désigner un leader ct adopter sa vision
2.I-Désigner un Ieauel' et adopter sa vision
1.3-lnuuire un sentiment dc sécurité face au
changement
2-Mouvement
2.2 -BcJ1chnwrklllg
3- Recristall isation
3.I-Personnelle: s'assurer que les indi\'idus sont
eontùrtables a\'cc le changement
3.2-lnterrcrsonnelle: s'assurer que les nouveaux
comrortements sont eomratihlcs entrc eux
Lippitt, Watson et Westley (1958 cité dans Burke, 2002)
1-Décristall isation
2-Établir une relation cntre un agent de changement ct
l'organisation
3-Mouvement
4- Reeristall isation
5-Mettre tin à la relation entre l'agent de changement et
l'organisation
Dessler, Starkc cl Cyr (2004)
I-Constater la nécessité UU changcmcllt (répolhe il ues
rressions internes, externcs ou anticipéc.')
2-ReeonnaÎtre et accerter le hesoin de cit,lngelllcnt
3-Diagnostiquer le rrohlèmc (d'où 1'011 \Iellt) clics
conséquences souhaitées au changclllcnt (où l'on va)
5.I-Créer un sentiment d'urgence
5.2-Créer une coalition
5.3-Créer ct communiquer UIIC \'isioll COIllIllLlI1C
4-Planitier le changemcnt
5-Changement
5.4-Donner les outils du changemcnl
5.5-Générer ues victoircs il court lertlle
5.6-Consoliucr Ics gains ct r["(lduire plus de
changement.
5.7-Fixer le ehangcment ct s'assurer ue sa coitérence
avec l'organisation
5.8-Sun'eiller le rrogrés et ajuster la vision
Kanter et al.
(1992 cité dans Todnem, 2005)
I-Allalyse dc l'organisation ct UC son besoin de
c\Wllgclllcnt
4-Crécr un sentimcnt d'urgcncc
ô-Accumuler ues apruis rolitiques
2-CréCl" unc \'ision commune
3-laisscr le passé uCl"rièrc
5-Soulcllir un Ieadel'
7-l'lall i licr Ic changcment
X-Dé\'elorrcr Ics structurcs nécessaires au changement
')-Colnillun iquer
1(J-Rcnforcer ct institutionnaliser le changement
1
117
Kotter (1996 cité dans Todnem, 2005)
I-Créer un sentiment d'urgence
2-Creer une coallition
J-Développer une "ision et une stratégie
4-Communiquer la "ision
S-Passer à l'action
ô-Générer des gai ns il court tenne
7-Consolider les gains ct produire plus de changement
8-Anerer les changements dans la culture
Luecke
(2003 cité dans Todnem, 2005)
I-Identitier les prnblèmes et les solutions
2-Développer une vision commune
J-Désigner un leader
4-Focaliser sur les résultats
S-Commencer le changement en périphérie de l'organisation
pour qu'il s'étende naturellement vers le centre
6-Trouver plus de ressources pour poursuivre le changement
6-ll1stitutionnaliser le changement
7-Surveiller le progrès et faire des ajustements
Dunphy, Griffiths el Ben
(2003)
2-Diagnostiquer le problème
I-Dé,'c1opper une vision
4-Désigner un agent de changement
J-Planifier le changement
S-Implanler le changement
7-COlnmuniquer le succès ct étendre le progrès
7-Comllluniquer le succès ct étendre le progrès
8-Anerer le ehangerm:nt dans la structure
Hoffman (2000)
2-Decrist~d 1isarion
I-Diagnostic: constater la nécessite du changement
2.I-Créer un sCl1tilllcnt d'urgence
2.2-('récr· unc coal ition
2.J-Adoptcr unc ,ision
J.' -Comilluniquer la "ision
J-Mou"clllcnl
J.2-Donncr les outils du changemenl
J.J-Planilier des gains il court terme
:lA-Consolider' ct jlrnduire plus de changement
4-Reeristall iSalion
4. 1-II1,;t itutionnal iser le changement
APPENDICE B
OUTILS DE COLLECTE DES DONNÉES
B.1 Questionnaire d'entrevue 119
B.2 Information transmise aux sujets avant l'entrevue 122
B.3 Information transmise aux cochercheurs avant Je forum d'informateurs clés 123
119
QUESTIONNAIRE D'ENTREVUE
Répondant 1. Sexe 2. ç>rigine 3. Age 4. Secteur de travail (département) 5. Ancienneté 6. Niveau (inférieur, intermédiaire, supérieur)
Modalités, forces et faiblesses de Raglan en matière de changement 1. Nommez quelques exemples de changements que vous avez déjà vécus à Raglan?
(ex: implantation d'ISO 14001, ajout de caméras dans les lockers au complexe, surveillance accrue du respect des limites de vitesse, système de bonus à la prévention, salle d'entraînement, nouveau système informatique, modification de procédures de travail (opération, ISO, santé-sécurité), modification d'un équipement de travail, changement des heures de départ de J'avion dujeudi, projet 6 sigma, ... )
a. Parmi ceux-ci, nommez une expérience de changement positive et une négative à laquelle vous avez dû faire face.
b. Expliquez en quoi J'expérience était positive ou négative.
2. En général, avez-vous l'impression que les changements implantés à Raglan échouent ou réussissent? Expliquez pourquoi.
3. En général, êtes-vous: a. Très favorable b. Plutôt favorable c. Plutôt défavorable d. Très défavorable
aux changements proposés à Raglan?
4. En général, pour quelles raisons êtes-vous a. Favorable à un changement? b. Défavorable à un changement?
5. En général, trouvez-vous qu'on vous fournit les outils nécessaires pour appliquer le changement (ex: support technique, formation, temps d'adaptation, etc.)? Expliquez.
6. À quel degré vous consuJte-t-on avant d'implanter un changement? a. Trop b. Assez
]20
c. Pas assez d. Pas du tout
Expliquez.
7. Quelle attitude préférez-vous chez quelqu'un qui implante le changement? a. quelqu'un qui vous consulte pour prendre une décision; b. quelqu'un qui a une idée claire de la direction à prendre et qui vous la
communique bien. Expliquez.
8. Quel serait le meilleur moyen de vous consulter relativement au changement? a. Réunions de groupe b. Rencontres individuelles c. Sondage d. Autre? Précisez.
9. En général, trouvez-vous qu'on vous explique a. Trop b. Assez c. Pas assez d. Pas du tout
les raisons du changement? Expliquez.
10. En général, lorsqu'on vous explique ces raisons, est-ce que cela vous aide à accepter le changement? Expliquez
Il. En général, trouvez-vous qu'on vous communIque a. Trop b. Assez c. Pas assez d. Pas du tout
les résultats du changement? Expliquez.
12. Avez-vous déjà demandé un changement? a. Si oui, lequel? b. À qui l'avez-vous demandé? c. A-t-il été réalisé? d. Avez-vous participé à son implantation?
Critique des agents de changement 1. À votre connaissance, lesquels des services suivants ont déjà implanté des
changements vous affectant? Donnez un exemple pour chacun. a. Prévention b. Environnement c. Six Sigma d. Formation
121
e. Informatique
2. Votre opinion de chacun des services nommés précédemment est-elle: a. très bonne? b. bonne? c. mauvaise? d. très mauvaise?
3. En général, trouvez vous que ces services sont: a. trop actifs? b. assez actifs? c. pas assez actifs? d. inactifs?
4. En général, avez-vous l'impression que les changements implantés par ces services sont:
a. très utiles? b. utiles? c. inutiles mais pas nuisibles? (changer pour changer) d. nuisibles? e. très nuisibles?
122
INFORMATION TRANSMISE AUX SUJETS RÉPONDANT À L'ENTREVUE
1. L "étude vise à comprendre comment est géré le changement à la mine Raglan et à diagnostiquer nos forces et faiblesses en Ja matière. Ultimement, J'étude servira à améliorer notre façon d'aborder Je changement pour augmenter ses chances de réussite. Dans le cadre de notre étude, ces changements peuvent toucher l'environnement, la santé et la sécurité au travail, la formation, l'informatique ou l"optimisation de la production. Les conclusions de l'étude seront aussi publiées dans un mémoire de recherche et possiblement dans une publication scientifique.
2. Votre panicipation est requise pour une entrevue visant à amasser des données sur les perceptions des employés de tous les niveaux relativement au changement. Les questions posées traiteront de vos opinions sur les différents secteurs impliqués dans le changement, de vos opinions et sentiments vis-à-vis du changement et de votre expérience relativement à des processus de changement passés et à venir.
3. Aucun risque pour vous ou votre emploi ne pourrait être attribuable à votre participation à l'entrevue.
4. L'anonymat et la confidentialité de vos réponses seront assurés, puisque votre nom ne figurera pas sur le formulaire de réponse.
S. Cette entrevue devrait durer 20 minutes et votre panicipation ne vous engage à aucune collaboration ultérieure. Votre contribution cessera après J'entrevue, à moins que vous n'en décidiez autrement.
6. En tout temps, vous aurez le droit de vous retirer de J'étude et ce, sans aucune pénalité.
7. Si vous acceptez de pan iciper, il est imponant de fournir des réponses honnêtes. Soyez assurez qu'aucune information ne sera retenue contre vous, ni par moi, ni par quiconque.
123
INFORMATION TRANSMISE AUX COCHERCHEURS AVANT LE FORUM D'INFORMATEURS CLÉS
J. L'étude vise à comprendre comment est géré le changement à la mine Raglan et à diagnostiquer nos forces et faiblesses en la matière. Ultimement, l'étude servira à améliorer notre façon d'aborder le changement pour augmenter ses chances de réussite. Dans le cadre de notre étude, ces changements peuvent toucher l'environnement, la santé et la sécurité au travail, la fonnation, l'infonnatique ou J'optimisation de la production. C'est donc à vous que l'étude s'adresse et qu'elle est le plus susceptible de servir. Les conclusions de J'étude seront aussi publiées dans un mémoire de recherche et possiblement dans une publication scientifique.
2. Votre participation est requise pour l'élaboration du questionnaire d'entrevue, pour un forum sur le changement organisationnel d'une durée d'une journée et pour un retour sur les conclusions préliminaires de l'étude. Un maximum de 12 heures de travail devrait être requis pour accomplir ces tâches.
3. Aucun risque pour vous ou votre emploi ne pourrait être attribuable à votre participation à cette étude.
4. La confidentialité de vos réponses sera assurée. À l'exception des discussions tenues en groupe, moi seule aurai accès à l'information que vous aurez fournie et en aucun cas votre nom ne sera associé à ces renseignements. Lors des discussions tenues en groupe, il sera demandé aux autres cochercheurs de ne pas associer les informations qui y seronl divulguées aux noms des participants.
5. Votre collaboration cessera après la révision des conclusions préliminaires de l'étude, à moins que vous n'en décidiez autrement.
6. En tout temps, vous aurez le droit de vous retirer de l'étude et ce sans aucune pénalité.
7. Si vous acceptez de pal1iciper, il est impol1ant de fournir des réponses honnêtes. Soyez assurez qu'aucune infonnation ne sera retenue contre vous, ni par moi, ni par qUIconque.
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