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UNIVERSITE MONTPELLIER I CENTRE DU DROIT DE LA CONSOMMATION ET DU MARCHE MASTER 2 Droit privé économique Le contrat d'édition numérique Par M. Jérôme BORIAT Rapport de recherche réalisé sous la direction de Mme Isabelle ALVAREZ, Doctorante à la faculté de droit de Montpellier Année universitaire 2013-2014

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UNIVERSITE MONTPELLIER I

CENTRE DU DROIT DE LA CONSOMMATION ET DU MARCHE

MASTER 2 Droit privé économique

Le contrat d'édition numérique

Par

M. Jérôme BORIAT

Rapport de recherche réalisé sous la direction de Mme Isabelle ALVAREZ,

Doctorante à la faculté de droit de Montpellier

Année universitaire 2013-2014

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UNIVERSITE MONTPELLIER I

CENTRE DU DROIT DE LA CONSOMMATION ET DU MARCHE

MASTER 2 Droit privé économique

Le contrat d'édition numérique

Par

M. Jérôme BORIAT

Rapport de recherche réalisé sous la direction de Mme Isabelle ALVAREZ,

Doctorante à la faculté de droit de Montpellier

Année universitaire 2013-2014

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La Faculté n’entend donner aucune approbation ni aucune improbation aux opinions émises

dans ce rapport de recherche ; ces opinions doivent être considérées comme étant propres à

leur auteur.

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Remerciements

Je tiens à remercier Mme Isabelle Alvarez pour sa disponibilité ainsi que pour ses conseils.

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Sommaire

Partie I: La relation auteur-éditeur

Titre I: État des lieux sur le contrat d’édition

Chapitre I: Un contrat de collaboration

Chapitre II: Les autres formules contractuelles proches du contrat

d'édition

Titre II: Les nouveaux enjeux du contrat d'édition numérique

Chapitre I: L’adéquation entre les règles actuelles et le contrat d’édition

numérique

Chapitre II: Les solutions éventuelles

Partie II: La protection et le prix de l'œuvre

Titre I: La protection de l'œuvre

Chapitre I: La protection normative

Chapitre II: La protection contractuelle

Titre II: Le prix de l’œuvre

Chapitre I: Le mécanisme classique

Chapitre II: Les mécanismes encadrant le prix de l'œuvre numérique

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Liste des abréviations

Art. Article

CA Cour d’appel

Cass., civ. Chambre civile

Cass., 1re

civ. 1re

Chambre civile

CPE Conseil permanent des écrivains

D. Recueil Dalloz

DC Déclaration de conformité

DP Recueil Dalloz périodique et critique

HADOPI Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur

internet

JDI Journal du droit international

JCP G Juris-classeur périodique, édition générale

MTP Mesures techniques de protection

OMPI Organisation mondiale de la propriété intellectuelle

Rev. Crit. DIP Revue critique de droit international privé

RIDA Revue internationale du droit d’auteur

RTD com Revue trimestrielle de droit commercial

T. civ Tribunal civil

TGI Tribunal de grande instance

SGDL Société des Gens De Lettres

SNAC Syndicat National des Auteurs et des Compositeurs

SNE Syndicat National de l’Edition

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INTRODUCTION

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« Chaque progrès donne un nouvel espoir, suspendu à la solution d'une nouvelle difficulté.

Le dossier n'est jamais clos »

Le Cru et le Cuit, Claude Lévi-Strauss

1.- Avant d'entrer dans le vif du sujet, il sera nécessaire d'entreprendre quelques

recherches afin de pouvoir livrer certaines précisions terminologiques.

A la lecture de ce sujet, il apparaît que trois termes semblent présenter une importance

capitale justifiant un effort de définition afin d'en permettre une meilleure compréhension, ce

qui se révèle être impératif pour ne pas faire fausse route et pouvoir se livrer à une approche

acceptable de l'objet à étudier dans le cadre de ce rapport.

2.- Le premier terme à définir sera celui de “contrat”. Tout d'abord, le premier réflexe face

à ce terme est de citer l'article 1101 du Code civil, qui dispose que le contrat se trouve

être “une convention par laquelle une ou plusieurs personnes s'obligent, envers une ou

plusieurs autres, à donner, faire ou ne pas faire quelque chose”. Il convient de rajouter

que ce mot vient du latin juridique contractus, “convention, transaction”, lui-même

issu de contrahere au sens de “engager une affaire avec”, et contrat sert à désigner une

“convention passée entre deux ou plusieurs personnes, ayant pour effet de créer entre

elles une obligation légale”1

. Ce mot sert donc à désigner un acte créateur

d'obligations.

3.- Le second terme important est le suivant: “édition”. Ce mot prit stricto sensu vient du

latin editio pour “production”, puis “publication de livres”, de edere qui signifie

“éditer”. Il s'agit, au sens large, de “l'ensemble des opérations relatives au choix, à

l'impression, et à la publication d'un ouvrage” et, dans un sens plus spécialisé, cela

désigne “l'industrie et le commerce du livre en général”2.

4.- Mais bien que l'analyse de ce mot prit isolément ne soit pas sans intérêt, il sera sans

doute plus opportun de l'étudier sous son alliance avec le mot “contrat” à travers la

formule suivante: “contrat d'édition”. Selon l’article L 132-1 du Code la propriété

intellectuelle, « le contrat d'édition est le contrat par lequel l'auteur d'une œuvre de

l'esprit ou ses ayants droit cèdent à des conditions déterminées à une personne appelée

éditeur le droit de fabriquer ou de faire fabriquer en nombre des exemplaires de

1Dictionnaire de l'Académie française, V°« Contrat ».

2Dictionnaire de l’Académie française, V « Edition »

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l'œuvre, à charge pour elle d'en assurer la publication et la diffusion ». L’article L.

112-2 du Code de la propriété intellectuelle donne une liste assez longue de ce qui

peut être considéré comme une œuvre de l’esprit.

5.- Selon le dictionnaire Larousse, l’éditeur est une personne physique ou morale qui est

responsable de l’entreprise d’édition et des choix effectués.

6.- Tout ceci amène aussi à se questionner sur le sens du mot « publication ». Emprunté

du latin chrétien publicatio, « action de dévoiler », lui-même dérivé de publicare,

« adjuger à l'État ; rendre public, publier », le sens le plus approprié de ce terme à

notre sujet est le suivant : cela consiste en l’action de faire paraître, sous forme

d'imprimé, une œuvre littéraire ou scientifique, un périodique ou autre écrit3.

7.- Quant au terme « diffusion », toujours selon le dictionnaire de l'Académie française,

cela vient du latin diffusio, -onis, « action de répandre » : en terme de presse, ceci

renvoi à la mise en circulation, la promotion, la distribution commerciale et la vente.

8.- Enfin le terme « numérique », dérivé du latin numerus, « nombre », se dit, par

opposition à « analogique », du codage, du stockage, de la transmission d'informations

ou de grandeurs physiques sous forme de chiffres à signaux à valeur discrète (ou

discontinue).

9.- Le secteur de l'édition n'a pas échappé aux grandes évolutions sociétales. Avec

l'arrivée de l'électronique, les modes de diffusion des œuvres de l'esprit se sont

modernisés, entraînant quelques modifications quant au sujet de leur accessibilité.

10.- Cela se matérialisa dans de nombreux domaines, comme avec le passage de la

VHS au DVD, puis avec la VOD, et les risques de piratages qui se sont nettement

développés suite à la démocratisation d'Internet. Le secteur musical fut aussi victime

de cette évolution. En passant de 45 tours aux CD à la musique téléchargeable

légalement sur Internet via des sites comme Itunes, les moyens d'accès aux œuvres

musicales se sont adaptés aux évolutions technologiques.

3 Dictionnaire de l’Académie française, V°« Publication »

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11.- Bien entendu, on ne peut arrêter le progrès, mais cette course à la modernité a

aussi eu des inconvénients pour nombre d'auteurs compositeurs et d'interprètes qui se

sont trouvés confrontés au piratage, rendu possible grâce à ces nouvelles méthodes.

Les moyens classiques de protection de l'œuvre se sont révélés dépassés.

12.- Le scénario se posa également au sujet des livres. Des moines copistes à

l'invention de l'imprimerie, la production des œuvres littéraires s'est développée de

plus en plus rapidement, ce qui en a permis une plus grande diffusion auprès du public.

De nombreuses évolutions techniques ont modifié et standardisé la production du livre,

en augmentant sa production, et en modifiant sa forme. L’écran n’est qu’un nouveau

support, fruit de cette inlassable évolution, mais il faut se souvenir qu’évolution ne

rime pas toujours avec succès. L’effet principal de la rapidité de ces évolutions serait

surtout de mettre en difficulté les éditeurs ou les libraires, plus que de parvenir à créer

un support durable4.

13.- Face à tous ces changements évoqués, il pourrait être intéressant de resserrer le

sujet à l’étude des livres. Lorsque l’on évoque la thématique du contrat d’édition, la

première idée en termes d’application qui puisse venir à l’esprit concerne les livres.

Bien que ce ne soit pas le seul type d’œuvre de l’esprit existant, cantonner l’étude au

livre pourrait être intéressant dans la mesure où les livres n’ont pas échappés à

l’évolution technique ambiante, ce qui a eu pour conséquence de faire apparaître des

livres numériques.

14.- Mais qu’est-ce qu’un livre numérique ? Un livre numérique est un livre

téléchargeable sur support numérique, à l’image d’une tablette par exemple, et on peut

le feuilleter comme un ouvrage classique5. Voici une définition simplifiée du livre

numérique.

15.- Partant du postulat suivant lequel le Droit peut être en retard par rapport à la

réalité du fait de la lenteur de réaction du législateur, il paraît opportun de se demander

comment les règles en vigueur actuellement vont pouvoir être adaptées à ces

nouveautés.

4 R. CHARTIER et H-J. MARTIN, Histoire de l’édition française : Le livre concurrencé, édition Fayard, 1991.

5 Edition numérique: une actualité législative édifiante, RTD com., 2012.557.

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16.- En clair, actuellement, il existe le contrat d’édition, régit par le Code de la

propriété intellectuelle. Ce contrat était, jusqu’à présent, adapté, mais avec l’apparition

du livre numérique, il faut se demander si les règles l’encadrant seront suffisantes pour

régir le cas des œuvres numérique6.

Ceci explique donc l’intérêt du sujet, qui consisterait à étudier les limites du contrat d’édition

classique dans l’optique d’une œuvre numérique, et de se questionner pour savoir si un

nouveau type de contrat encadré par des règles plus en phase avec ce phénomène ne serait pas

indispensable.

17.- Pour l’instant, il est vrai que la place économique de l’œuvre numérique reste

encore inférieure à celle de l’œuvre papier. Les habitudes ont la vie dure, et bien que le

secteur du livre numérique n’en soit plus au stade de l’échec initial7, le succès tant

attendu n’est pas encore apparu, même s’il devrait finir par arriver durant les

prochaines années, en conséquence de l’explosion du progrès technologique et de la

véritable invasion des écrans dans la vie quotidienne en découlant.

18.- Un autre élément doit être indiqué, celui de la difficulté à décoller du marché

des ebooks par-rapport aux Etats-Unis, par exemple, ce qui pourrait s’expliquer par

l’arrivée tardive des tablettes comme l’Ipad ou autres liseuses sur le marché français,

contrairement au marché anglo-saxon8. A titre d’exemple, la Kindle fire d’Amazon,

qui est une liseuse, est sortie en 2011 aux Etats-Unis, et il a fallu attendre un an de plus

avant de la voir arriver en France.

19.- Ces nouveaux supports vont entraîner de nouvelles interrogations en termes de

protection de l’œuvre, de respect du droit moral de l’auteur, de prix de l’œuvre, mais

aussi des questions quant au mode de rémunération de l’auteur. Il convient donc

d’étudier l’adaptation du droit de la propriété intellectuelle à ces nouvelles approches.

20.- Afin de traiter ce sujet portant sur le contrat d’édition numérique, il conviendra

de tenter de répondre à la problématique suivante :

Le renouvellement des modes d’exploitation entraîné par l’évolution numérique va-t-il avoir

une influence sur la mise en œuvre des règles classiques en matière contractuelle ?

6 http://www.reynaud-avocat.com/livre-numérique-et-contrat-d-édition/

7 B. JUANALS, Le livre et le numérique : la tentation de la métaphore, in Communication et langage, n°145,

3ème

trimestre 2005, p. 82. 8 C. DE MALET, Le livre numérique perce timidement en France, Le Figaro, 09/10/2013

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21.- Après avoir analysé cette relation particulière qui se noue entre les auteurs et

les éditeurs (Partie I), il conviendra d’examiner les dispositions existantes en termes

de protection et de fixation du prix de l’œuvre (Partie II).

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Partie I : La relation auteur-éditeur

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22.- La relation qui se noue entre un auteur et un éditeur est assez particulière. Il

s’agit d’une relation économique née sur la base d’un besoin de l’auteur, puis

s’ensuivent des intérêts croisés. L’un sans l’autre n’est rien, même si l’éditeur se

trouve dans une position de force. En clair, l’éditeur est la partie forte du contrat tandis

que l’auteur se trouve être la partie faible. L’auteur devient donc dépendant de

l’éditeur, à l’image d’un salarié envers son employeur.

23.- Le schéma peut vraisemblablement même faire penser à celui qui s’opère en

droit de la distribution, avec des contrats passés entre des fournisseurs dépendants et

des distributeurs nécessiteux également, bien que l’importance du besoin soit moindre.

Cependant, l’inverse n’est pas invraisemblable, un distributeur pouvant voir son

succès dépendre du maintien de sa relation contractuelle avec un fournisseur précis.

24.- En droit de la propriété intellectuelle, il apparaît que le scénario se répète. La

vie est ainsi faite, les opérateurs économiques auront toujours besoin d’autrui pour

satisfaire leurs projets propres, même si les évolutions techniques peuvent parfois

changer le cours des choses. Cette scène contractuelle permet donc de comprendre les

enjeux de ce sujet. Si l’auteur est encore actuellement dépendant des éditeurs, il

conviendra de suivre la mutation ou au contraire la stagnation de cette situation suite

aux changements du contexte.

25.- Face à toutes ces évolutions techniques et technologiques, il faudra tout

d’abord examiner les règles de droit positif en matière de cession de droits d’une

œuvre de l’esprit (Titre I), puis il conviendra ensuite de s’interroger sur les nouveaux

enjeux apportés au débat avec l’évocation de la possible nécessité d’un contrat

d’édition numérique (Titre II).

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Titre I : Etat des lieux sur le contrat

d’édition

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26.- Le contrat d’édition est très règlementé. De nombreuses règles encadrent cette

cession de droits afin de protéger l’auteur néophyte en Droit, qui a accepté de se

déposséder, de se faire spolier par un éditeur peu scrupuleux.

27.- Comme cela fut déjà évoqué, les auteurs ont besoin des éditeurs et les éditeurs

ont besoin des auteurs. Ceci induit un caractère collaboratif du contrat d’édition

(Chapitre I). Il faut notamment préciser qu’il existe des formules contractuelles

proches du contrat d’édition, bien qu’elles présentent quelques différences (Chapitre

II).

Chapitre I : Un contrat de collaboration

28.- Selon l’article 1134 du Code civil, un contrat s’exécute de bonne foi. Il se

pourrait que la nature collaborative trouve sa source dans ce texte, ou alors il s’agirait

plutôt de raisons totalement opportunistes. Si l’on reprend la formule latine homo

homini lupus est9, qui signifie littéralement « l’homme est un loup pour l’homme », il

est possible d’en déduire que cette collaboration aurait surtout pour fondement la

deuxième hypothèse avancée, autrement dit, que chacun utilise les capacités de l’autre.

29.- Cette constatation s’explique par le rôle précis que joue l’éditeur (Section I).

Mais ce rapport contractuel n’est pas sans conséquence aucune pour l’auteur (Section

II).

Section I : Le rôle classique de l’éditeur

30.- Le rôle principal de l’éditeur consiste en la promotion de l’œuvre (I). Pour cela,

différentes méthodes peuvent être employées (II).

9 PLAUTE, Asinaria ou La comédie des ânes, vers 195 av J.C.

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I) La promotion de l’œuvre

31.- La promotion de l’œuvre est de l’essence même du contrat d’édition (A). Le

contrat d’édition s’avère ainsi indispensable (B).

A) La promotion de l’œuvre, principale mission de l’éditeur

1) L’éditeur, un lien entre l’auteur et le public

32.- L’éditeur assure la connexion synaptique entre l’œuvre de l’auteur et son

public10

. Cela peut se résumer très clairement. L’auteur est la personne qui crée une

œuvre de l’esprit. Etant donné que ce rapport va porter essentiellement sur le livre, il

convient d’imaginer l’auteur d’un ouvrage. Ce personnage, une fois l’œuvre

accomplie, n’aura probablement pas les fonds nécessaires pour financer la production

de celle-ci en de nombreux exemplaires pour en permettre ensuite la parution auprès

du grand public. C’est pourquoi l’éditeur, ce maillon de la chaîne qui joue un rôle

indispensable11

à la manière d’un chef d’orchestre, intervient12

.

33.- Ce rôle de l’éditeur n’est pas nouveau. Le premier contrat d’édition aurait été

signé en 1762 pour permettre la diffusion de l’œuvre de Jean-Jacques Rousseau,

l’Emile.

34.- D’un point de vue constitutionnel, il serait envisageable d’avancer que l’éditeur

s’inscrit dans le cadre du développement d’une activité en lien avec l’application du

droit à la culture, qui est un droit constitutionnellement reconnu par le bloc de

constitutionnalité, via le préambule de la Constitution de 1946, et le Conseil

constitutionnel a reconnu, a posteriori, le caractère constitutionnel de cette

disposition13

.

2) Le détenteur des moyens nécessaires à cette diffusion

35.- Cette question des moyens nécessaires peut s’analyser sous plusieurs angles.

10

L. THOUMYRE, Les notions d’éditeur et d’hébergeur dans l’économie numérique, D. 2010. 837. 11

http://www.alliance-editeurs.org/formation/sequence-10-l-editeur 12

Voir annexe 1. 13

Conseil constitutionnel, n° 71-44 DC du 16 juillet 1971.

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36.- La première explication à cela touche, encore une fois, aux moyens financiers

des éditeurs. Les opérations d’impression et de publication d’ouvrages à grande

échelle nécessitent des sommes importantes.

37.- La seconde explication repose sur des fondements juridiques. Si l’on reprend la

définition du contrat d’édition donnée par l’article L 132-1 du Code de la propriété

intellectuelle, soit : « le contrat d'édition est le contrat par lequel l'auteur d'une œuvre

de l'esprit ou ses ayants droit cèdent à des conditions déterminées à une personne

appelée éditeur le droit de fabriquer ou de faire fabriquer en nombre des exemplaires

de l'œuvre, à charge pour elle d'en assurer la publication et la diffusion », une analyse

s’impose. En clair, l’auteur vend ses droits à l’éditeur. Il vend ses droits matériels à

l’éditeur, ce qui lui permet de se livrer aux opérations nécessaires de diffusion et de

publication de l’œuvre, ce qui peut faire penser au contrat d’entreprise14

, ce contrat

étant celui par lequel une personne s’engage envers une autre personne, contre

rémunération, à faire quelque chose de manière indépendante et non représentative15

.

B) La passation d’un nécessaire contrat d’édition

1) La nature du contrat d’édition

38.- Il s’agit d’un contrat de vente, l’auteur vend ses droits. Le contrat d’édition est

un contrat spécial, réglementé par le droit de la propriété intellectuelle.

39.- Comme cela fut déjà évoqué, l’auteur vend ses droits à l’éditeur. Il apparaît

ainsi que ce contrat présente un caractère particulier. Cela se matérialise par un écrit

dans lequel il faudra mentionner chaque droit cédé, et le domaine d’exploitation de ces

droits qui doit être limité quant à son étendue, sa destination, ainsi que sur le lieu et la

durée de son exploitation selon l’article L 131-1 du Code de la propriété intellectuelle.

40.- Le principe solo consensu ne semble donc pas s’appliquer au contrat d’édition.

La nécessité d’un écrit montre un formalisme qui s’inscrit sûrement dans le cadre d’un

mouvement de protection de la partie faible qu’est l’auteur. Ce protectionnisme n’est

en réalité qu’une trace de l’héritage laissé par la Révolution française et l’esprit des

14

M. VIVANT et J-M. BRUGUIER, Droit d’auteur, Dalloz, Précis, 2009 15

F. LABARTHE, Le contrat d’entreprise, LGDJ, 2008

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Lumières, qui étaient venus réduire les droits des éditeurs en rendant plus efficaces

ceux des auteurs16

. Cette application pratique du principe selon lequel c’est la forme

qui libère et la liberté qui asservit montre donc l’aspect socialiste et protecteur de notre

droit, bien que cela soit surtout illusoire car les éditeurs ont toujours plus de pouvoir

que les auteurs.

2) La nécessité économique de ce contrat

41.- Ce contrat est une nécessité si l’auteur veut pouvoir satisfaire à son activité

économique, soit vendre son œuvre au public afin d’en tirer des revenus.

L’éditeur est au droit de la propriété intellectuelle ce qu’est le grand distributeur en droit de la

distribution.

42.- L’éditeur endosse l’habit d’un investisseur prenant des risques financiers en

finançant et en rendant, de ce fait, possible, la parution de l’ouvrage. Véritable

lotisseur de la diffusion de l’œuvre littéraire, il permet la propagation de la culture,

bonne ou mauvaise, au choix selon les auteurs, auprès du grand public. Les auteurs lui

doivent, en partie, leur succès, et les consommateurs peuvent en arriver au stade où ils

se souviennent davantage du nom des éditeurs que des auteurs.

43.- Par conséquent, l’auteur ne pourra vendre son œuvre que si son partenaire

économique accepte de signer un tel contrat, mais ce partenaire ne sera pas l’ami de

l’auteur. On retrouve cette ambigüité des relations aux intérêts croisés. Le contrat

d’édition n’est pas un contrat de travail, mais un contrat de collaboration. Il est donc

parfaitement possible de le négocier17

, même si en pratique, rares sont les auteurs qui

osent tenter la négociation. Ce contrat peut alors, de fait, s’apparenter à un contrat

d’adhésion, mais entre professionnels.

16

Edition numérique : une actualité législative édifiante, RTD Com. 2012.557 17

http://www.snac.fr/pdf/cpe-snac-comptes.pdf

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II) Les techniques mises en œuvre dans le contrat d’édition

44.- A travers ce contrat, un certain nombre de droits spécifiques seront cédés à

l’éditeur (A). Mais des droits ne pourront être cédés et resteront propres à l’auteur (B).

A) Les droits cédés par l’auteur à l’éditeur

1) L’ensemble des droits cédés

45.- En général, l’éditeur bénéficie de l’ensemble des droits d’exploitation : ceci

comprend les droits de reproduction et d’adaptation graphique, les droits de traduction,

les droits de reproduction, d’adaptation et de traduction sur des supports autres que

graphiques, ainsi que de représentation18

.

Cette cession de droits est encadrée par l’article L 131-3 du Code de la propriété intellectuelle,

qui dispose: « La transmission des droits de l'auteur est subordonnée à la condition que

chacun des droits cédés fasse l'objet d'une mention distincte dans l'acte de cession et que le

domaine d'exploitation des droits cédés soit délimité quant à son étendue et à sa destination,

quant au lieu et quant à la durée. ». Il y a, par conséquent, un encadrement légal de cette

opération juridique.

46.- L’éventail est donc large, afin de permettre à l’éditeur de mener à bien sa

mission en disposant des prérogatives nécessaires pour la réaliser.

2) Les difficultés découlant de la qualification de ce contrat en cession

47.- La liste des droits cédés se matérialise dans le cadre d’un contrat d’édition,

appelé aussi « contrat de cession du droit d’exploitation ou de reproduction à

l’éditeur ».

48.- Mais cela peut poser difficulté quant à l’acception du terme « cession ». Dans

le sens commun, le terme « céder » pourra évoquer un transfert de propriété. Pour

cause, lorsqu’est évoqué un contrat de vente, le terme de cession pourra être employé.

Justement, le propre d’un transfert de propriété est d’être définitif.

18

http://www.sne.fr/editeurs/editeur-et-auteur/principales-regles-du-contrat-d-edition.html

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49.- Or, ce terme est inapproprié en matière de contrat d’édition car le droit cédé à

l’éditeur demeure toujours précaire puisqu’il est conditionné, selon l’article L 132-12

du Code de la propriété intellectuelle, à une exploitation permanente et suivie, et le fait

que l’éditeur ne puisse pas céder son contrat à des tiers sans l’autorisation de l’auteur

selon la règle posée par l’article L 132-16 du Code de la propriété intellectuelle est une

ultime preuve du fait que l’éditeur n’est pas un véritable cessionnaire de ces droits19

.

B) Les droits conservés par l’auteur

1) Le droit moral

50.- Le droit moral est un droit atypique, propre au droit de la propriété

intellectuelle. Il se compose en réalité de plusieurs droits

51.- Les premiers sont en lien avec la naissance de l’œuvre. On y trouve le droit de

divulgation, existant depuis l’affaire Whistler20

. Dans cette affaire, il s’agissait d’un

peintre qui avait reçu une commande d’un couple. Après avoir terminé l’œuvre, bien

qu’il eut été rémunéré en avance, il refusa de la livrer à ses clients, qui décidèrent

d’ester en justice afin d’obtenir l’exécution forcée du contrat sur le fondement de

l’abus de droit, mais la Cour de cassation ne leur accorda que des dommages-intérêts.

Cela prouve que l’artiste reste maître de son œuvre jusqu’à ce qu’il décide de la

divulguer. Cette jurisprudence fut reprise par la suite. Il fut affirmé que ce droit de

divulgation de l’auteur existe jusqu’à la livraison effective21

.

Puis, l’article L 131-1 du Code de la propriété intellectuelle prohibe la cession globale des

œuvres futures, ce qui, par exemple, empêchera un auteur de s’engager à réécrire des

ouvrages autobiographiques dont le nombre serait indéterminé22

. Il y a aussi le droit à la

paternité, permettant par exemple de remettre en cause un contrat de ghost writer23

. Le contrat

de ghost writter ou de nègre littéraire est un contrat de commande qui peut s’analyser comme

un contrat d’entreprise. Seulement, au regard du caractère particulier de l’objet de la

commande, cet acte juridique peut être remis en cause par l’auteur qui s’appuierait derrière

son droit de paternité ou de divulgation afin de refuser la délivrance de l’œuvre à son

19

A-R. BERTRAND, Droit d’auteur, Chapitre 112-Transmission, cession et contrats relatifs aux droits d’auteur,

Dalloz action, 2010. 20

Cass. civ., 14 mars 1900 : DP 1900, 1, p. 497, rapp. Rau, concl. Desjardins, note M.P. 21

CA Paris, 19 mars 1947 : D. 1949, p. 20, note Desbois 22

CA Paris, 10 juin 1986 : RIDA 3/1987, p. 193 23

CA Paris, 10 juin 1986 : RIDA 3/1987, p. 193

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23

commanditaire. La seule technique pour le commanditaire d’être sûr de pouvoir exploiter

l’œuvre consiste en l’inscription au contrat de ghost writter d’une cession expresse du droit

d’exploitation24

.

52.- Les seconds sont en lien avec la circulation de l’œuvre. L’article L 121-4 du

Code de la propriété intellectuelle prévoit un droit de retrait ou de repentir qui ne

pourra être exercé qu’en vertu d’un intérêt moral25

. Enfin, il y a le droit au respect de

l’œuvre, qui permet d’éviter toute modification de l’œuvre sans l’accord de l’auteur ou

de ses ayants-droit26

.

53.- Quoi qu’il en soit, selon l’article L 121-1 du Code de la propriété intellectuelle,

ce droit est inaliénable, il reste propre à l’auteur. Cela peut s’expliquer par la tendance

jurisprudentielle à qualifier le droit moral de droit naturel27

, comme dans un jugement

du tribunal civil de la Seine, ayant pour solution que: « la propriété des œuvres

littéraires, musicales ou artistiques dérivant du droit naturel, les étrangers jouissent, en

France, de tous les droits qu'elle comporte »28

. Des tribunaux ont même conjugués le

droit moral avec la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme29

.

54.- Le principal avantage du droit moral sera de permettre une protection de

l’œuvre de l’auteur car selon l’article L 132-11 du Code de la propriété intellectuelle,

l’éditeur ne pourra pas modifier l’œuvre sans l’accord préalable de ce dernier

55.- Tout ceci permet de démontrer la particularité de ce droit propre à la matière.

2) La particularité des droits pécuniaires

56.- Cette question épineuse du contrat d’édition mérite un certain intérêt.

57.- Contrairement au droit moral qui est, selon l’article L 121-1 du Code de la

propriété intellectuelle, imprescriptible, les choses sont différentes en ce qui concerne

24

S. DURRANDE, Fasc. 1342 : Droit d’auteur. Exploitation des droits.-Dispositions particulières à certains

contrats. Contrats de commande (CPI, art. L 131-1 à L 131-9), JurisClasseur Civil Annexes, 02 janvier 2012 25

Cass. 1re civ., 14 mai 1991 : JCP G 1991, II, 21760, note Pollaud-Dulian 26

B. EDELMAN, Entre Copyright et droit d'auteur : l'intégrité de l'œuvre de l'esprit, D. 1990, chron. p. 295 27

B. EDELMAN, Fasc. 1112 : PROPRIÉTÉ LITTÉRAIRE ET ARTISTIQUE. – Droit d'auteur. – Nature du droit

d'auteur. Principes généraux, JurisClasseur Civil Annexes, 29 novembre 2000. 28

T. civ. Seine, 6 déc. 1953 : Rev. crit. DIP 1954, p. 421, note Niboyet 29

TGI Paris, aff. Huston, 23 nov. 1988 :JDI 1989, 67, obs. B. Edelman

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le droit pécuniaire de l’auteur. Ce droit est une émanation du droit patrimonial de

l’auteur. Pour information, le droit patrimonial contient en réalité quatre droits, que

sont le droit de représentation, le droit de reproduction, le droit de suite, et le droit de

destination. Il convient de préciser que le droit de suite n’intéresse que les œuvres

relevant de domaines tels que la peinture ou la sculpture, la valeur principale de

l’œuvre se trouvant dans le support. Le droit de suite permet à l’auteur de prélever une

partie du prix de vente de son œuvre lorsqu’elle est faite aux enchères ou par un

commerçant30

. En ce qui concerne le livre, le droit pécuniaire le plus approprié sera le

droit de reproduction, même si, par la suite, il sera susceptible de donner lieu à un

droit de représentation31

en faisant l’objet, par exemple, d’un contrat de cession de

droits d’adaptation audiovisuelle32

.

58.- Selon l’article L 123-1 du Code de la propriété intellectuelle, l’auteur jouit d’un

droit pécuniaire issu de l’exploitation de son œuvre durant toute la durée de sa vie, et

ce droit se prolonge encore pendant l’année civile et les soixante-dix années suivant

son décès au bénéfice de ses ayants droits.

Au-delà de ces délais, les droits pécuniaires de l’auteur de l’œuvre tombent dans le domaine

public, à l’image, par exemple, des droits de propriété industrielle plus de vingt années après

l’obtention d’un brevet industriel, selon l’article L 611-2 du Code de la propriété intellectuelle.

Mais il est vrai que cette durée des droits pécuniaires de l’auteur est supérieure à celle

concédée par un brevet d’invention, comme cela fut souligné. Il fut ainsi avancé l’idée suivant

laquelle il pourrait être judicieux de diminuer cette durée des droits pécuniaires de l’auteur

afin de favoriser l’accès à ces œuvres, dans le respect du droit moral de son créateur. L’une

des techniques qui pourrait être mise en place consisterait en le maintient des mêmes délais,

sauf que le décompte des soixante-dix ans ne devrait plus démarrer à la mort de l’auteur mais

à partir de la date de divulgation ou de publication de l’œuvre33

.

30

G. BLANC-JOUVAN, Droit de la propriété intellectuelle, Vuibert, Collection Dyna’Sup Droit, 2011 31

B. EDELMAN, La propriété littéraire et artistique, PUF, 2010 32

Voir annexe n°5 33

A-R. BERTRAND, Droit d’auteur, Chapitre 106-Droits de l’auteur, Durée des droits patrimoniaux, Dalloz

action, 2010

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25

Section II : Les conséquences de ce rapport contractuel

59.- Ces transferts de droits permettent à l’éditeur de se trouver dans une situation

très confortable (I), ce qui favorisera le développement d’un rapport de domination (II).

I) La toute puissance de l’éditeur

60.- L’éditeur va détenir la plupart des droits matériels sur l’œuvre (A). La

thématique des œuvres orphelines ne fait que renforcer ce pouvoir (B).

A) La détention des droits sur l’œuvre par l’éditeur

1) Les conséquences d’un transfert de propriété

61.- Selon l’article 544 du Code civil, « la propriété est le droit de jouir et disposer

des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu’on en fasse pas un usage prohibé

par la loi ou les règlements ».

62.- En général, la propriété va se transmettre de manière définitive avec un contrat

de vente. Or, en l’espèce, il n’y a pas de contrat de vente. Un autre contrat est dans le

viseur, soit le contrat d’édition, qui a pour principal effet d’entraîner une cession du

droit de reproduction. En réalité, il s’agit même, d’une manière plus générale, d’une

cession de l’ensemble des droits d’exploitation de l’œuvre.

Donc, il fut démontré que cet acte juridique n’entraînait pas un transfert total de propriété à

l’éditeur sur l’œuvre de l’auteur. Cela s’illustre, par exemple, avec le droit moral qui reste

propre à l’auteur et qui l’empêche de modifier l’œuvre sans son accord.

Il y a également l’obligation de rémunérer l’auteur qui démontre qu’un lien demeure entre le

créateur de l’œuvre et son exploitant, comme dans le cadre d’un contrat de licence34

. A ce

sujet, il faut mentionner le mécanisme de la reddition des comptes, qui est une opération

annuelle ayant pour objectif de permettre à l’auteur de se renseigner quant à la situation de

l’exploitation de son œuvre35

.

63.- Par conséquent, on ne peut que constater qu’il existe des nuances à apporter à

34

A. BOISSON, La licence de droit d’auteur, Thèse Université Montpellier 1, 2011 35

http://www.reynaud-avocat.com/livre-num%C3%A9rique-et-contrat-d-%C3%A9dition

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l’idée selon laquelle un contrat d’édition entraînera un vrai transfert de propriété, mais

au regard des nombreuses prérogatives dont va disposer l’éditeur suite à leur abandon

par l’auteur, il est vrai que l’hypothèse d’un droit de propriété portant sur les droits

cédés existe. La soutenance de l’existence d’un droit de propriété partiel, ne portant

que sur les éléments essentiels, n’est alors pas incongrue, bien que certains impératifs

viennent encadrer l’utilisation de ces droits cédés aux éditeurs quant à leur façon de

les utiliser. Cela s’illustre avec la nullité réservée aux clauses potestatives insérées

dans des contrats d’édition, qui sont des clauses visant à laisser à la libre discrétion de

l’éditeur la décision de procéder à la publication de l’œuvre36

.

64.- Quoi qu’il en soit, ce droit de propriété partiel qui ne porte que sur certains

droits comprend néanmoins les droits les plus importants en pratique, et l’éditeur

pourra agir comme s’il éditait une œuvre qui lui est propre. On peut, par exemple, le

constater avec les nouvelles éditions qui sortent parfois pour des œuvres de Balzac :

l’auteur n’est plus, ses héritiers disposent encore du droit moral qui est imprescriptible

et transmissible à cause de mort selon l’article L 121-1 du Code de la propriété

intellectuelle, mais guère plus car les droits pécuniaires s’arrêtent au-delà des

soixante-dix années suivant la mort de l’auteur selon l’article L 123-1 du Code de la

propriété intellectuelle et l’éditeur se trouve donc libre d’agir comme il l’entend.

2) Une opération comparable à un usufruit

65.- Selon l’article 578 du Code civil, l’usufruit peut se définir comme étant « le

droit de jouir des choses dont un autre a la propriété, comme le propriétaire lui-même,

mais à la charge d'en conserver la substance. ».

66.- Il convient tout d’abord d’expliquer ce qu’est un usufruit. Pour simplifier les

choses, il conviendra d’écrire que l’usufruit est un démembrement du droit de

propriété en trois éléments que sont l’usus, le fructus et l’abusus. L’usus correspond à

l’usage que l’on peut faire de la chose. Le fructus désigne les fruits de la chose,

autrement dit, dans un sens civiliste, les produits financiers que la chose pourra créer.

Enfin, l’abusus fait référence au pouvoir de disposer de la chose comme on le souhaite,

en tant que véritable propriétaire. Le but d’un usufruit est de transmettre l’usus et le

36

A-R. BERTRAND, Droit d’auteur, Chapitre 112 Règles particulières au contrat d’édition, in Transmission,

cession et contrats relatifs aux droits d’auteur, 2010.

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27

fructus à une personne dénommée l’usufruitier, tandis que l’abusus restera au

propriétaire d’origine de la chose, appelé le nu-propriétaire.

67.- Ce type d’opération est, en général, surtout appliquée pour des biens meubles

ou immeubles corporels. Mais quid des biens meubles incorporels ? Cette question

n’est pas incongrue. L’usufruit, qui vient du droit romain, est avant tout construit pour

s’appliquer aux biens corporels et non aux biens immatériels. Il n’existe pas de textes

spécifiques à l’usufruit dans le Code de la propriété intellectuelle, à l’exception de

l’article L 123-6 qui vise l’usufruit du conjoint survivant de l’auteur. Mais le simple

fait qu’un article de ce code évoque cela permet de penser que cette opération doit

exister en matière de propriété intellectuelle, et qu’elle se rapprochera des usufruits

plus particuliers tels que ceux portant sur les droits sociaux, les créances ou encore les

fonds de commerce37

.

C’est pourquoi il conviendrait de se demander si le contrat d’édition, par son mécanisme de

cession partielle des droits d’auteur, ne s’apparenterait pas plutôt à un usufruit. L’auteur serait

le nu-propriétaire, grâce à son droit moral. Quant à l’éditeur, il serait l’usufruitier, et son droit

d’usage de la chose se caractériserait par son droit d’exploitation de l’œuvre. Et le fait de

permettre à l’usufruitier de céder son droit ne mettrait pas à mal l’usufruit que constitue le

contrat d’édition38

.

Cette approche permet de mieux justifier les mécanismes du contrat d’édition.

B) Un renforcement des pouvoirs de l’éditeur avec la thématique des œuvres

orphelines

1) Les œuvres orphelines

68.- La notion d’œuvre orpheline désigne des œuvres dont les auteurs ou les ayants

droit ont disparu ou n’ont pas été retrouvés.

69.- Plus précisément, selon l’article L 113-10 du Code de la propriété intellectuelle,

l'œuvre orpheline « est une œuvre protégée et divulguée, dont le titulaire des droits ne

peut pas être identifié ou retrouvé, malgré des recherches diligentes, avérées et

37

B. LARONZE, L’usufruit des droits de propriété intellectuelle, Presses Universitaires d’Aix-Marseille

(PUAM), 2006. 38

C. SIFFREIN-BLANC, Fasc. 20 : USUFRUIT . – Prérogatives de l'usufruitier . – Pouvoir de l'usufruitier,

JurisClasseur Civil Code, 19/07/2010.

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28

sérieuses ». Dans le cas où l’œuvre aurait plus d’un titulaire de droits, si jamais un seul

d’entre eux est identifié et retrouvé, alors l’œuvre ne sera pas considérée comme

orpheline.

2) Les enjeux des œuvres orphelines

70.- Le principal enjeu des œuvres orphelines touche aux possibilités d’exploitation

de l’œuvre.

71.- Le problème d’une telle œuvre est qu’elle n’est plus exploitable car sans

autorisation, un éditeur qui l’exploiterait pourrait se rendre coupable de contrefaçon au

sens de l’article L 335-2 du Code de la propriété intellectuelle. Mais cela est surtout

théorique. Plusieurs techniques permettent, en effet, de passer outre cette impossibilité

apparente d’obtenir un consentement.

La première consiste à apposer la mention « droits réservés », mais cela ne permet pas de

limiter la responsabilité du contrefacteur, bien que l’argument de défense de la gestion

d’affaires ait déjà été accepté par la jurisprudence39

.

La seconde méthode consiste en l’obtention d’une autorisation judiciaire d’exploitation de

l’œuvre40

. L’avantage de cette manière de procéder est qu’elle concède à l’éditeur une marge

de manœuvre assez confortable car il ne pourra pas être poursuivi pour contrefaçon, et tant

que l’auteur ou qu’un de ses ayants droit ne se manifeste pas, alors l’éditeur aura le champ

libre.

II) Une exploitation des auteurs

72.- Les auteurs vont se trouver démunis face aux éditeurs (A) et il conviendra de

s’intéresser à leurs modes de rémunération (B).

39

F-M. PIRIOU, “Œuvres orphelines”: approche d’un nouveau statut juridique européen et français,

Communication Commerce électronique n° 7, juillet 2012, étude 14. 40

F-M. PIRIOU, « Les œuvres orphelines » en quête de solutions juridiques, RIDA, octobre 2008, p. 3.

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29

A) Des auteurs dépossédés

1) Une cession de droits forcée

73.- Historiquement, la condition des auteurs était peu enviable. Ils perdaient tous

leurs droits au profit des éditeurs, et ne profitaient que très peu du succès de leurs

œuvres.

74.- Sous l’Ancien Régime, en effet, les monopoles offerts aux intermédiaires en

charge de la diffusion culturelle permirent aux éditeurs de capter tout le profit, dans le

mépris le plus profond des droits des auteurs41

. Suite à la Révolution française de 1789,

les méprisés sont parvenus à reconquérir des droits au détriment des méprisants.

75.- Mais comme cela fut évoqué, les auteurs restent la partie faible du contrat

d’édition. L’éditeur reste le principal lien entre l’auteur et le public, et cela passe par

des cessions de droits au profit de l’éditeur afin qu’il puisse mener à bien sa mission

d’exploitation et de diffusion de l’œuvre. Les éditeurs sachant tout cela, ils ont profités

de leur position de dominant afin de créer des contrats d’édition qui, tout en étant

respectueux des droits des auteurs, permettent de favoriser les avantages des éditeurs.

Les éditeurs savent que les auteurs ont besoin d’eux. On se retrouve ainsi dans une

situation où l’auteur se verra contraint de céder ses droits à l’éditeur à travers la

signature d’un contrat préétablie par l’éditeur, rarement négocié, car tous les auteurs

ne sont pas juristes et beaucoup ne pensent pas à prendre conseil auprès d’un avocat

avant de signer un tel acte. On se retrouve alors dans la logique des « contrats

d’adhésions »42

tels qu’il y en a en droit de la consommation, excepté qu’en l’espèce,

il s’agit de contrats conclus entre professionnels. Ce sont des contrats déséquilibrés car

si l’auteur est, très souvent, dépendant de l’éditeur, la situation s’inverse pour l’éditeur

qui ne réalise qu’une partie de son chiffre d’affaire avec un auteur. Le droit de la

propriété intellectuelle permet de faire un parallèle avec le droit de la distribution et

les contrats conclus entre fournisseurs et distributeurs, mais le mécanisme des clauses

abusives du droit de la consommation fut transposé au droit de la distribution via le

déséquilibre significatif avec l’article L 442-6, I, 2° du Code de commerce. Cela

pourrait inspirer un mécanisme de protection propre au domaine du contrat d’édition

41

Edition numérique : une actualité législative édifiante, RTD Com. 2012.557 42

Ibid

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30

avec une transposition du mécanisme du déséquilibre significatif dans le Code de la

propriété intellectuelle, avec un texte spécial qui permettrait de dissuader les abus des

éditeurs qui profitent de leur position dans ce type de contrat.

2) Une cession de droits pour le meilleur et pour le pire

76.- De la même façon que le mariage, lorsque l’on signe un contrat d’édition, on

ne peut jamais vraiment savoir où cet engagement mènera.

77.- Par cela, il faut entendre que le contrat d’édition réserve une part d’aventure

dans la mesure où il accepte le fait que tout ne soit pas prévisible à l’avance.

Cela se justifie par le mécanisme des clauses de cession des droits pour des modes

d’exploitation non prévisibles ou non connus à la date de la signature du contrat43

, tel que le

permet l’article L. 131-6 du Code de la propriété intellectuelle. Ceci permet d’envisager les

dangers que cela peut représenter pour un auteur, surtout si le nouveau mode d’exploitation

créé ne permet plus à l’auteur de garder la maîtrise de son œuvre. Bien que cela puisse

paraître totalement alarmiste, il convient de penser au fait que ces questionnements sont

justifiés dans la mesure où ils se sont posés pour les contrats d’édition conclus avant

l’apparition des livres numériques. Suite à cette invention, les éditeurs ont activés ces clauses,

et de nombreuses interrogations ont été soulevées au sujet du contrôle de l’œuvre par son

auteur, ou encore sur la thématique de sa rémunération.

B) Les modes de rémunération des auteurs

1) Le principe de la rémunération proportionnelle

78.- Il s’agit du mode de rémunération des auteurs d’œuvres de l’esprit le plus

encouragé.

79.- Ce système de la rémunération proportionnelle est prévu par l’article L 131-4

du Code de la propriété intellectuelle. Ce mode de rémunération doit être basé sur le

PPHT, autrement dit, le Prix Public Hors Taxes44

. Un arrêt de la cour d’appel de Paris,

43

http://www.reynaud-avocat.com/livre-num%C3%A9rique-et-contrat-d-%C3%A9dition/ 44

http://www.reynaud-avocat.com/livre-num%C3%A9rique-et-contrat-d-%C3%A9dition/

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31

du 23 janvier 201345

est venu préciser que selon l’article L 131-4 du Code de la

propriété intellectuelle, la rémunération doit être proportionnelle aux recettes brutes de

la vente ou de l’exploitation de l’œuvre. Il faut également préciser que l’éditeur ne

doit pas payer l’auteur avec du retard46

.

80.- La norme, aujourd’hui, consiste à lier la rémunération de l’auteur au succès de

son œuvre. Par conséquent, la rémunération proportionnelle demeure le principe tandis

que la rémunération forfaitaire se trouve plutôt être l’exception47

. La rémunération

doit donc faire corps avec l’œuvre, la vie économique de l’auteur sera liée à son mérite

professionnel. Ce relent de méritocratie paraît être en parfaite harmonie dans le cadre

d’une société actuelle, clairement libérale, mais l’explication est ailleurs.

81.- Enfin, il paraît important de signaler que les parties liées par un contrat

d'édition ne peuvent choisir l'assiette de la rémunération proportionnelle de l'auteur

mais sont libres d'en fixer le taux selon les modalités de commercialisation de l'œuvre,

ce qui signifie que le contrat pourra prévoir des taux différents selon que le mode

d’exploitation consiste en des exemplaires ordinaires ou en format de poche48

. Mais

pour la Cour de cassation, il ne faut pas oublier que seul le prix de vente peut

constituer l’assiette de la rémunération proportionnelle de l’auteur49

. Dans tous les cas,

l’éditeur est tenu d’une obligation de transparence envers l’auteur sur les moyens de

détermination du prix50

.

2) L’exception du système de rémunération forfaitaire

82.- Il convient maintenant de se pencher sur ce second système de rémunération,

qui se fait plus rare dans les contrats d’éditions classiques, portant sur des œuvres

imprimées.

83.- Le système sur la rémunération au forfait est prévu par l’article L 131-4 et L

131-6 du Code de la propriété intellectuelle. Cela consiste à verser une somme fixe à

45

CA Paris P. 5 ch. 1, 23 janv. 2013, SARL 15-30 Publishing c/ MM. Jean-Philippe Goude et François Moity et

SARL Another Way 46

P-Y. GAUTIER, Propriété littéraire et artistique, PUF, Collection Droit fondamental classiques, 2010 47

Rapport sur le livre numérique, 30 juin 2008, remis par Bruno Patino à Christine Albanel. 48

CA Paris, 6 juin 2012, n° 09/20877 49

C. BERNAULT, Modalités de la rémunération proportionnelle dans un contrat d’édition, Droit de la propriété

intellectuelle, L’ESSENTIEL, 01/11/2012 n°10, p. 3. 50

M. VIVANT et J-M. BRUGUIERE, Droit d’auteur et droits voisins, Dalloz, Précis, 2012

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32

l’auteur. Cette somme ne pourra plus évoluer, indépendamment du succès ou de

l’échec commercial de l’œuvre.

On veut surtout éviter aux auteurs de se faire spolier par des éditeurs sans scrupules qui

auraient obtenus la cession des droits d’auteurs à un prix dérisoire pour pouvoir ensuite

gagner des sommes bien plus importantes, au détriment du père de l’œuvre. C’est pourquoi il

est nécessaire que le système forfaitaire ne reste appliqué que dans de rares cas, afin d’éviter

ce genre de situation, même si le droit positif prévoit un mécanisme correctif en ayant étendu

la rescision pour lésion en matière de cession du droit d’exploitation par un mécanisme

forfaitaire, en vertu de l’article L 131-5 du code mentionné.

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33

Chapitre II : Les autres formules contractuelles proches du contrat

d’édition

84.- Il existe aussi d’autres types de contrats pour un auteur désireux de faire

paraître ses œuvres que le contrat d’édition, bien que ce dernier soit le plus connu et le

plus couramment pratiqué dans ce secteur. Mais comme la différence est une forme de

richesse et que tous les chemins mènent à Rome, il ne semble pas totalement absurde

de se pencher sur ces autres types de contrats.

85.- Ces contrats proches du contrat d’édition présentent des caractéristiques qui

leurs sont propres (Section I), mais un risque de confusion subsiste (Section II).

Section I : Des contrats particuliers

86.- Il existe un certain nombre de méthodes alternatives au contrat d’édition (I) qui

se justifient par le rapport de force existant entre auteurs et éditeurs (II).

I) Des modes alternatifs d’édition des œuvres

87.- Il existe différents types de techniques permettant à l’auteur de contourner le

contrat d’édition (A). Ces différentes techniques entraîneront diverses conséquences

(B).

A) Les différents contrats en question

1) Le contrat d’édition à compte d’auteur

88.- Il s’agit de la première alternative au contrat d’édition classique qu’il convient

d’étudier.

89.- Ce contrat est prévu par l’article L 132-2 du Code de la propriété intellectuelle

qui dispose : « Ne constitue pas un contrat d'édition, au sens de l'article L 132-1, le

contrat dit à compte d'auteur. Par un tel contrat, l'auteur ou ses ayants droit versent à

l'éditeur une rémunération convenue, à charge par ce dernier de fabriquer en nombre,

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dans la forme et suivant les modes d'expression déterminés au contrat, des exemplaires

de l'œuvre et d'en assurer la publication et la diffusion. Ce contrat constitue un louage

d'ouvrage régi par la convention, les usages et les dispositions des articles 1787 et

suivants du Code civil. ». Le schéma diffère donc du contrat d’édition classique. Le

scénario s’inverse. L’auteur ne va plus céder une partie de ses droits à l’éditeur, qui se

rémunérera ensuite selon le succès de l’œuvre tandis que l’auteur sera rémunéré en

dernier si le système de rémunération proportionnelle est convenu ou dès le début de

la relation si le système de rémunération forfaitaire fut retenu. Ici, l’éditeur se verra,

dès la conclusion du contrat, attribuer une certaine somme par l’auteur, et il devra

ensuite se charger de fabriquer, publier et diffuser l’ouvrage selon les stipulations du

contrat. Il s’opère alors un basculement dans le droit des contrats spéciaux, avec le

contrat de louage d’ouvrage qui est un contrat d’entreprise. Cette distinction entre le

contrat d’édition et le contrat à compte d’auteur est classique, ce n’est pas une

nouveauté51

.

90.- Seul l’auteur supportera les risques de l’opération52

. Et il convient de préciser

que la responsabilité de l’éditeur pourra être engagée s’il n’exécute pas

convenablement les obligations que le contrat a mises à sa charge, comme s’il livre un

travail de mauvaise qualité par exemple53

.

2) Le contrat de compte à demi

91.- Le contrat de compte à demi est la seconde alternative au contrat d’édition.

92.- Ce contrat est prévu par le Code de la propriété intellectuelle à l’article L 132-3

qui dispose : « Ne constitue pas un contrat d'édition, au sens de l'article L 132-1, le

contrat dit de compte à demi. Par un tel contrat, l'auteur ou ses ayants droit chargent

un éditeur de fabriquer, à ses frais et en nombre, des exemplaires de l'œuvre, dans la

forme et suivant les modes d'expression déterminés au contrat, et d'en assurer la

publication et la diffusion, moyennant l'engagement réciproquement contracté de

partager les bénéfices et les pertes d'exploitation, dans la proportion prévue. Ce contrat

constitue une société en participation. Il est régi, sous réserve des dispositions prévues

51

M.-G. SCHILLING-RANCAZ, Les éditions à compte d'auteur, Thèse Paris 2, 1985 52

CA Paris, 15e ch., 14 avr. 1977 : RIDA 1977, n° 93, p. 152 53

CA Paris, 4e ch. A, 14 févr. 1996 : Juris-Data n° 1996-021478

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35

aux articles 1871 et suivants du Code civil, par la convention et les usages. ».

93.- Dans ce contrat, il appartiendra donc à l’éditeur de faire fabriquer les œuvres à

ses frais, dans le respect des modalités prévues au contrat. Puis, les pertes et les

bénéfices seront partagés entre l’auteur et l’éditeur. L’article précise qu’il s’agit d’un

contrat de société, et plus précisément, d’un contrat constituant une société en

participation. Une société en participation est un mode de collaboration économique

rendue possible par la création d’une société sans personnalité morale, non soumise à

publicité et pouvant demeurer occulte. Par conséquent, cette société demeure à l’état

de contrat. L’avantage de cette règle se trouve dans le fait que les parties n’auront pas

à respecter le formalisme du contrat d’édition, mais seront plus libre quant aux

modalités de rédaction du contrat de compte à demi54

.

Avec ce contrat, l’auteur et l’éditeur se trouve ainsi placé sur un pied d’égalité, contrairement

au contrat d’édition où l’éditeur est en position de domination, et au contrat à compte d’auteur

où l’éditeur se transforme en simple entrepreneur au sens du contrat d’entreprise.

Mais ce type de contrat se fait rare en pratique pour la simple et bonne raison qu’il n’attire pas

les éditeurs car les auteurs conservent l’intégralité de leurs droits sur l’œuvre.

B) Les conséquences de ces contrats

1) Une place plus gratifiante pour l’auteur dans le processus d’édition

94.- Il ne faut pas faire d’amalgames.

95.- S’il est vrai que les deux types de contrats présentés peuvent paraître réservés

aux auteurs « sans talent », dans la mesure où, pour pouvoir publier leurs œuvres, ils

les obligent à payer ou à supporter les éventuelles pertes de l’exploitation de l’œuvre,

il conviendrait plutôt d’envisager les choses sous un autre angle.

Avec une certaine relativisation, ces contrats peuvent s’analyser en tant qu’un moyen de

permettre aux auteurs de garder leurs droits sur leurs œuvres contrairement au contrat

d’édition.

De plus, que ce soit pour le contrat à compte d’auteur ou le contrat de compte à demi,

l’investissement personnel dans le processus d’édition est plus marqué que dans le contrat

54

CA Paris, 5e ch., 16 nov. 1989 : Juris-Data n° 1989-026342

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d’édition où l’éditeur s’occupe de tout. Dans le contrat à compte d’auteur, l’auteur prendra

l’initiative financière de lancer le projet. Et dans le contrat de compte à demi, il collaborera

avec l’éditeur.

La dimension de l’investissement personnel est toute autre, et le succès, s’il intervient, n’en

sera que plus gratifiant pour le père de l’œuvre.

Ces types de contrats mériteraient d’être plus souvent utilisés à la place du contrat d’édition,

et cela commence à se réaliser dans l’édition en ligne55

.

2) Des risques plus élevés

96.- La valorisation de la place de l’homme dans la création de son propre succès

n’est pas sans risque.

97.- Aussi primaire que cela puisse paraître, les différentes alternatives au contrat

d’édition qui furent présentées illustrent le principe suivant lequel « qui ne risque rien

n’a rien ». Dans le contrat à compte d’auteur, des investissements sont nécessaires car

l’éditeur n’œuvrera pas sans financement. Le client devra être prêt à courir le risque de

faire un investissement sans retour, et inutile de préciser qu’avant de réaliser une telle

dépense, encore faut-il en avoir les moyens. Or, bien souvent, les gens de lettre ne sont

pas les plus fortunés.

Quant au contrat de compte à demi, une fois encore, des fonds disponibles sont nécessaires

mais pour une raison différente. Bien qu’il appartienne à l’éditeur de s’occuper du

financement de l’exploitation de l’œuvre, si jamais des pertes surviennent, l’auteur devra les

supporter au même titre que l’éditeur. Par conséquent, dans ce contrat aussi, l’auteur devra

disposer des sommes nécessaires.

55

http://portaildulivre.com

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37

II) Une variété de contrats s’expliquant par le rapport de forces en vigueur

98.- La relation éditeur-édité peut être comparée à d’autres relations existantes dans

une économie de marché (A). Ces contrats peuvent aussi refléter un contraste entre ce que

souhaitent les édités et la réalité (B).

A) L’équivalent d’une relation fournisseur-distributeur

1) L’auteur dépendant

99.- La dépendance de l’édité peut s’expliquer pour plusieurs raisons.

100.- L’idée serait de tenter d’établir une comparaison entre cette relation et l’abus

de dépendance économique au sens de l’article L 420-2 du Code de commerce. Par cela, il est

nécessaire de comprendre que le succès dépendra des éditeurs, de la même manière qu’un

fournisseur qui ne pourra vendre ses produits s’il n’est pas a minima référencé par un

distributeur.

101.- Cela permet de mieux comprendre pourquoi un écrivain désireux de faire

connaître son travail au public sera dans un état de dépendance vis-à-vis de l’éditeur, dans un

état de dépendance économique car il s’agit d’enjeux économiques, même si le parallèle

s’arrête ici puisqu’il faudrait prouver que l’écrivain n’a aucune autre alternative alors que le

point de vue défendu en l’espèce est qu’un auteur est dans un état de dépendance envers le

monde de l’édition en général et non pas envers un éditeur précis.

2) L’éditeur, un souverain tout puissant

102.- Ceci n’est que le pendant logique de ce qui a été écrit.

103.- Les éditeurs savent que dans le cadre d’une édition classique des œuvres, à

savoir avec l’édition papier, ils sont indispensables à la réussite des auteurs.

104.- Dans un tel contexte, des abus ont pu se produire, ce qui contribua à

l’alimentation d’un courant d’idées péjoratives au sujet des éditeurs, développé au fil des ans

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38

par les édités56

. Cela fut notamment alimenté par des personnes aux écrits de piètre qualité qui

s’étaient vu refuser leurs manuscrits par des éditeurs. Néanmoins, de nombreux abus furent,

tout de même, commis par les professionnels de l’édition et aujourd’hui encore, des pratiques

non cautionnables peuvent être appliquées.

105.- L’homme est ainsi fait. Dès qu’une once de pouvoir lui est donnée, il aura une

tendance naturelle à vouloir en abuser. Lord Acton avait très bien résumé ceci par une simple

phrase : « le pouvoir tend à corrompre »57

.

106.- Ce qu’il conviendra de retenir sera que l’éditeur se trouvant être à un poste clé,

il pourra être tenté d’en profiter.

B) Des contrats à visée sociale

1) Une possible recherche de la satisfaction du désir d’indépendance des

auteurs

107.- Ceci peut se déduire des contrats alternatifs au contrat d’édition.

108.- Avec le contrat d’édition, comme cela fut déjà souligné, le créateur d’une

œuvre sera dépendant de l’éditeur. Toutefois, avec les contrats à compte d’auteur et les

contrats de compte à demi, les choses changent.

Le contrat à compte d’auteur est celui qui permet véritablement de satisfaire à ce besoin

d’indépendance, l’auteur étant seul maître de la décision finale d’exploitation, de publication

et de diffusion de l’œuvre.

Quant au contrat de compte à demi, ce désir ne sera qu’en partie remplie étant donné que

l’auteur sera sur un pied d’égalité avec l’éditeur.

2) Des chances de succès plus réduites

109.- Ce peut être le mauvais côté de ces contrats alternatifs.

110.- On pourrait légitimement penser que si un auteur se voit contraint d’utiliser la

56

http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/la-tumultueuse-relation-auteur-28534 57

Citation extraite de son œuvre Historical Essays and Studies

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voie du contrat à compte d’auteur ou du contrat de compte à demi, c’est que son œuvre n’a

pas su plaire à l’éditeur qui aura donc refusé de signer un contrat d’édition. Aujourd’hui, les

contrats d’édition sont la norme pour les œuvres à succès.

111.- A contrario, il faut en déduire que les œuvres publiées suite à un contrat à

compte d’auteur ou à un contrat de compte à demi ne sont que des œuvres de moindre qualité,

et que l’auteur est obligé de passer par ce chemin s’il veut voir son œuvre publiée, ayant déjà

subi le refus des éditeurs pour un contrat d’édition comme cela se fait en temps ordinaire pour

les œuvres présentant un faible potentiel.

Mais cela n’est pas toujours vrai. Pour preuve, l’histoire en donna des exemples avec des

écrivains tels que Gustave Flaubert, Marcel Proust, ou encore André Gide, qui publiaient, le

plus souvent, à compte d’auteur, mais cela ne les empêcha pas de connaître le succès.

112.- Seulement, de nos jours, il est vrai que les livres édités suite à un contrat à

compte d’auteur ne réalisent pas les meilleures ventes, et il n’y a presque jamais de

conclusion de contrat de compte à demi.

Enfin, il faut également soulever l’hypothèse suivant laquelle l’éditeur ferait moins d’efforts

pour la promotion d’un ouvrage dont l’édition résulte d’un contrat alternatif que pour celui

résultant d’un contrat d’édition, cela s’expliquant par le fait que les contrats alternatifs sont

moins attractifs pour ses intérêts personnels.

Section II : Des possibilités de confusion

113.- Afin d’éviter certaines confusions, il convient de distinguer le domaine des

contrats de l’audiovisuel (I) de celui des contrats d’édition (II).

I) Les contrats de l’audiovisuel

114.- Ces contrats particuliers (A) peuvent engendrer des confusions (B).

A) Des contrats spécifiques

1) Définition

115.- Par audiovisuel, il faut entendre tout ce qui touche à la fois au son et à l’image.

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116.- Ce sont des contrats qui s’appliquent aux œuvres audiovisuelles. Par œuvre

audiovisuelle, il conviendra d’en retenir une définition large telle que l’article L 112-2, 6° du

Code de la propriété intellectuelle le laisse entendre : « Les œuvres cinématographiques et

autres œuvres consistant dans des séquences animées d'images, sonorisées ou non,

dénommées ensemble œuvres audiovisuelles ».

Tout d’abord, l’œuvre audiovisuelle est protégée en tant que création intellectuelle, et il faut

reconnaitre un droit exclusif d’exploitation à ses auteurs.

Puis, l’œuvre audiovisuelle est également considérée comme une création culturelle dont il est

nécessaire d’encourager la production et la diffusion dans l’intérêt du public.

2) Champ d’application

117.- L’œuvre audiovisuelle se verra appliquer une forme particulière de contrat.

118.- Le contrat en question n’est autre que le contrat de production audiovisuelle.

Selon l’article L 131-2 du Code de la propriété intellectuelle, ce type de contrat doit être

constaté par écrit. L’article L 132-24 du même code précise l’étendue des droits cédés par

l’auteur au profit des producteurs.

Selon l’article L 132-23 de ce code, le producteur s’entend comme « la personne physique ou

morale qui prend l’initiative ou la responsabilité de l’œuvre ». Quant à l’auteur, il pourra

s’agir de l’auteur du scénario original ou de l’adaptation, du dialoguiste, du compositeur de la

musique originale, ou encore du réalisateur58

.

B) Une confusion possible

1) Du contrat de production audiovisuelle au contrat d’édition

119.- Entre ces deux contrats, il n’y a qu’un pas.

120.- Il serait même possible de dire que la seule véritable distinction entre eux serait

d’ordre sémantique. La loi le prouve. Pour s’en convaincre, il suffit de se pencher sur les

personnes pouvant légalement prendre le titre d’éditeur aujourd’hui. En réalité, il existe trois

58

B. MONTELS, Fasc. 6085 : CONTRATS DE PRODUCTION ET D'EXPLOITATION DES OEUVRES

AUDIOVISUELLES,JurisClasseur Communication, 15/03/2006

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41

types d’éditeur59

.

Le premier type pourrait être considéré comme l’éditeur classique du contrat d’édition, celui

dont fait mention l’article L 132-1 du Code de la propriété intellectuelle et qui a pour rôle de

fabriquer des exemplaires de l’œuvre puis d’en assurer la publication et la diffusion.

Le second genre d’éditeur fut celui créé par la loi 2009-669, du 12 juin 2009, favorisant la

diffusion et la protection de la création sur internet : il s’agit de l’éditeur de services de presse

en ligne.

Enfin, le dernier genre d’éditeur est celui qui sera le plus intéressant dans le cadre de cette

partie du rapport de recherche. Il s’agit de l’éditeur issu de la loi 2009-258 du 5 mars 2009,

relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision. Avec

cette loi, il est apparu qu’existait également un éditeur dans le domaine de l’audiovisuel, alors

que la tendance était de qualifier cette personne de producteur dans ce secteur. Ainsi, il est

nécessaire de constater qu’un glissement s’opère entre le contrat de production audiovisuelle

et le contrat d’édition, sinon, aucune mention de l’éditeur ne serait faite par la loi.

2) Les définitions ambigües données par la jurisprudence

121.- La jurisprudence est venue confirmer cette idée d’adaptation du contrat

d’édition en matière audiovisuelle.

122.- Le premier exemple jurisprudentiel en la matière est tiré d’un arrêt de la cour

d’appel de Paris60

. En l’espèce, il s’agissait d’une affaire de contrefaçon de sketchs diffusés

sans autorisation de leur auteur et interprète sur Youtube, mais ce qui est le plus intéressant se

trouve être le fait que cet auteur et interprète avait passé un contrat d’édition avec une société

pour lui céder ses droits au lieu, non pas d’un contrat de production audiovisuelle, l’œuvre

ayant déjà été créée, mais d’un contrat d’exploitation des œuvres audiovisuelles. Cela prouve

donc que le contrat d’édition ne porte pas que sur les livres.

Un autre arrêt illustre tout autant ces propos61

. Sur fond d’un litige portant sur de la

contrefaçon, ce qu’il convient de retenir en l’espèce est qu’une société de production de films

long métrage avait produit un documentaire. Puis, elle confia à une autre société la

distribution du film par DVD et VOD depuis son site internet, ce qui se matérialisa sous la

forme d’un contrat d’édition vidéographique au lieu, là encore, d’un contrat d’exploitation des

59

L. THOUMYRE, Les notions d’éditeur et d’hébergeur dans l’économie numérique, Dalloz 2010, p. 837 60

CA Paris_Pôle 01 CH.04_26/03/10_n° 09/12552 61

CA Paris_Pôle 05 CH.02_09/04/2010_n° 08/09558

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œuvres audiovisuelles.

Le contrat d’édition vidéographique n’est pas resté un cas marginal dans la mesure où il fut

également mentionné dans d’autres litiges, comme dans un arrêt62

où ce contrat avait servi à

la distribution d’un film sous forme de DVD et VOD.

Ces exemples permettent d’illustrer la confusion possible suite au glissement du contrat

d’édition en matière d’œuvres audiovisuelles au côté d’autres contrats pré existant et

spécifiques à ce secteur.

II) Le domaine large des contrats d’édition

123.- Plus classiquement, le contrat d’édition est surtout utilisé dans le domaine des

œuvres littéraires (A), mais aussi dans d’autres secteurs accessoires (B).

A) Le secteur des livres

1) Les livres classiques

124.- Selon l’article L 112-2, 1° du Code de la propriété intellectuelle, les « livres,

brochures et autres écrits littéraires, artistiques et scientifiques » sont considérés comme

œuvre de l’esprit.

125.- Le contrat d’édition aura pour application classique de s’appliquer aux livres

traditionnels, tels que les romans, les biographies, les autobiographies. D’ailleurs, d’un point

de vue historique, le premier contrat d’édition aurait été signé pour permettre la diffusion de

l’Emile de Rousseau.

Par conséquent, classiquement, ce contrat s’est développé avec l’industrie du livre traditionnel.

2) Les livres d’un genre plus récent

126.- Les contrats d’édition se sont adaptés aux évolutions.

127.- A partir des années 1830, la bande dessinée est apparue. Son succès n’a cessé

de s’accroître. Les bandes dessinées sont des œuvres de l’esprit, et des contrats d’éditions

62

CA Paris_Pôle 05 CH.02_ 14/01/2011_n° 09/11729

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doivent être passés par les auteurs avec les éditeurs afin d’en permettre la diffusion. Bien

entendu, ce secteur posa également des difficultés entre les auteurs rarement juristes et des

éditeurs ayant tenté d’en profiter63

. Face à ces situations, des modèles de contrats furent

publiés en ligne par des syndicats d’auteurs soucieux de rétablir un équilibre des forces entre

l’auteur ignorant et l’éditeur sachant64

.

Autre genre particulier de livre contemporain, les mangas, qui sont des bandes dessinées

japonaises. Apparu en France dans les années 1990 avec Akira, publié aux éditions Glénat, le

manga n’a eu de cesse, depuis, de se développer. Les problèmes sont les mêmes que pour la

bande dessinée classique, sauf que des ennuis supplémentaires viennent se greffer avec, entre

autres, les difficultés de traduction ou d’adaptation. Il faut aussi préciser que les négociations

se dérouleront surtout entre l’éditeur français et l’éditeur japonais, détenteur des droits sur

l’œuvre.

B) Les autres types d’œuvres visées

1) Les journaux et magazines

128.- Cela peut se déduire de la loi.

129.- La loi 2009-669, du 12 juin 2009, relative aux services de presse en ligne, fait

mention d’un éditeur de ces services. Par conséquent, pour qu’il y ait un éditeur, un contrat

d’édition doit nécessairement avoir été signé. Ce qui est intéressant avec cette loi est qu’elle

fait référence aux services de presse « en ligne », mode d’édition de plus en plus développé. Il

conviendra d’étudier plus en profondeur ce type d’édition dans la suite du rapport.

2) Le secteur musical

130.- Le contrat d’édition trouve à s’appliquer dans ce domaine.

131.- Selon l’article L 112-2, 5° du Code de la propriété intellectuelle, les

« compositions musicales avec ou sans paroles » constituent des œuvres de l’esprit. Un

contrat de cession et d’édition d’œuvre musicale comporte deux volets. Tout d’abord, le

contrat de cession, qui vise à permettre à un auteur-compositeur voulant céder ses droits de le

63

http://www.du9.org/dossier/auteurs-et-editeurs-une-situation-tendue/ 64

http://www.snac.fr/pdf/contratcommentoct2011.pdf

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44

faire à une maison de disques ou à un éditeur65

.

Quant au contrat d’édition musicale, il vise, en général, à prévoir la fabrication et la diffusion

d’exemplaires tels que des partitions ou encore des phonogrammes selon les cas66

.

65

http://www.fitoussi-avocat.com/droit-spectacle-artistes/les-etapes-du-disque/le-contrat-des-auteurs-de-

musique/ 66

F. POLLAUD-DULIAN, Contrat d'édition. Destination de l'œuvre. Edition musicale. Obligations essentielles

de l'éditeur. Œuvres destinées à l'illustration musicale. Usages. Droit moral. Ensemble contractuel. Indivisibilité,

RTD com. 2006, p. 593

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Titre II : Les nouveaux enjeux du

contrat d’édition numérique

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132.- L’une des plus grandes vertus du progrès est de ne jamais s’arrêter. Or, l’un des

plus grands problèmes du Droit dans notre société est qu’il permet de créer des règles, certes,

mais parfois avec un certain retard. Cela résulte de la mécanique même du Droit, consistant

dans l’observation préalable à l’édiction de règles nouvelles et propres au phénomène étudié.

133.- A l’heure actuelle, le progrès a permis la création de l’œuvre numérique, mais

le Droit, face à cette technique, en est encore au stade de l’observation. Ce constat peut

amener à se questionner sur la suffisance des règles légales existantes face à l’édition

numérique (Chapitre I) et à soulever des propositions dans le but de pallier les éventuels

manquements recensés (Chapitre II).

Chapitre I : L’adéquation entre les règles actuelles et le contrat d’édition

numérique

134.- Dans une logique conservatrice, il peut sembler profitable de ne rien changer et

de s’adapter aux œuvres numériques avec le droit positif, sans rien apporter de véritablement

nouveau. L’idée de faire du neuf avec du vieux peut paraître séduisante, mais elle comporte

parfois certaines limites.

135.- L’analyse des règles de droit positif (Section I) permet de mettre en lumière les

failles en présence (Section II).

Section I : Les règles actuelles

136.- Ces règles reflètent un droit classique (I) non adapté à l’évolution numérique

(II).

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I) Les règles en vigueur

137.- Une recrudescence des clauses d’adaptation aux modes d’exploitation inconnus

(A) ainsi que des avenants aux contrats (B) est à souligner.

A) Les clauses d’adaptation aux modes d’exploitation inconnus

1) Le danger de ces clauses

138.- Ces clauses existent dans les contrats d’édition.

139.- Ce type de stipulation contractuelle est autorisé par l’article L 131-6 du Code

de la propriété intellectuelle, qui dispose : « La clause d'une cession qui tend à conférer le

droit d'exploiter l'œuvre sous une forme non prévisible ou non prévue à la date du contrat doit

être expresse et stipuler une participation corrélative aux profits d'exploitation ». Ceci permet

à l’éditeur d’exploiter l’œuvre sur laquelle l’auteur lui a cédé une partie de ses droits

patrimoniaux en cas de survenance de nouveaux modes d’exploitation, sans avoir à recueillir

l’accord préalable du créateur de l’œuvre en question.

140.- Seulement, l’utilisation d’une telle clause risque de se révéler dangereuse en ce

qu’un éditeur pourrait l’utiliser dans l’objectif de contourner les articles L 122-7 et L 131-3 du

Code de la propriété intellectuelle qui exigent une délimitation précise de la portée de la

cession, en fonction des modes d’exploitations existant à la date de signature du contrat67

.

141.- Ces clauses servent à faciliter le travail des éditeurs mais il serait sûrement plus

sécurisant d’obliger les éditeurs à demander l’accord du contractant au contrat d’édition avant

toute nouvelle exploitation de l’œuvre par un procédé qui ne pouvait être envisagé à la date de

signature du contrat.

2) L’utilisation faite de ces clauses en pratique

142.- Les clauses d’adaptation aux modes d’exploitation inconnus ont connu un

intérêt grandissant ces dernières années.

67

http://www.droit-technologie.org/actuality-1467/le-livre-numerique-et-les-contrats-d-edition.html

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143.- Bien entendu, l’avantage procuré par ces stipulations contractuelles profita aux

éditeurs. La cause de ce regain d’intérêt se trouve dans le développement des œuvres

numériques sur le marché. Lorsque le contrat d’édition contient ce type de clause, l’éditeur

n’aura pas besoin de faire signer un avenant au contrat à l’auteur et pourra, sans son

autorisation, exploiter l’œuvre telle quelle sous forme numérique. Cette pratique permet donc

de mettre en lumière le risque de dépossession pesant sur les édités, qui ne peuvent pas

s’opposer à une telle forme d’exploitation de leur œuvre, même s’ils sont contre, puisque cette

fameuse clause incluse dans le contrat d’édition le permet à l’éditeur. L’auteur s’est engagé, il

doit en assumer les conséquences.

144.- Mais une nuance fut apportée afin de limiter les cas de fraude à la loi. Tout

d’abord, si ce mécanisme fut prévu, alors les règles portant sur la rémunération de l’auteur

devront aussi avoir été prévues. Ensuite, une clause de ce genre ne sera efficace que si elle est

inscrite dans un contrat d’édition datant d’avant l’apparition des livres numériques.

L’explication tient au fait que si les parties connaissaient ce mode d’exploitation à la date de

la signature du contrat, alors l’efficacité de cette clause sera entravée par l’application des

articles L 122-7 et L 131-3 du Code de la propriété intellectuelle, qui exigent une délimitation

précise de la portée de la cession en fonction également des modes d’exploitation existant68

.

Sur ce point, un aspect semble critiquable: la protection est plus forte pour l’auteur avertit que

pour celui qui n’avait pas les moyens techniques de l’être à la date de la signature du contrat.

Autrement dit, pour un contrat d’édition signé postérieurement à l’apparition des œuvres

numériques, les dispositions impératives du Code de la propriété intellectuelle seront

rigoureusement appliquées tandis que pour un contrat conclu avant cette création, l’article

1134 du Code civil reste le principe, et cette clause d’adaptation s’appliquera selon le bon

vouloir de l’éditeur.

145.- Enfin, la dernière condition de validité de cette clause consiste à prévoir une

rémunération proportionnelle69

.

Les éditeurs se servent donc de ces fameuses clauses pour pouvoir exploiter une œuvre sous

format numérique sans avoir à obtenir l’autorisation préalable de l’édité car elle leur fut déjà

donnée, bien que ce consentement fut, en raison des connaissances techniques en vigueur, ni

clair ni éclairé.

68

http://www.reynaud-avocat.com/livre-num%C3%A9rique-et-contrat-d-%C3%A9dition/ 69

A-R. BERTRAND, Droit d’auteur, Chapitre 112, Transmission, cession et contrats relatifs aux droits d’auteurs

Interprétation restrictive des contrats en faveur de l’auteur, Dalloz action, 2010

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49

B) La multiplication des avenants au contrat

1) Une preuve d’un droit non adapté

146.- Les avenants constituent la seconde technique utilisée en matière de contrat

d’édition.

147.- L’avenant est un accord commun des parties ayant pour objet d’apporter des

changements à une convention initiale pour permettre la réalisation de l’objectif économique

poursuivi, sans rompre le lien de droit originaire70

.

Par déduction, ces avenants doivent sûrement surgir dans le cas où le contrat d’édition n’a pas

prévu de clause d’adaptation aux modes d’exploitation inconnus, la fameuse clause déjà

mentionnée, ou alors lorsque cette clause est écrite dans le contrat mais qu’il fut conclu à une

date où l’édité ne pouvait pas ne pas connaître l’existence du format numérique.

Ces avenants constituent alors la seconde technique d’adaptation des contrats d’édition au

secteur du numérique. En pratique, les éditeurs ont même multipliés les avenants

numériques71

.

148.- Mais si un si grand nombre d’avenants numériques sont contractés dans le but

de compléter les contrats d’édition actuels, ce n’est pas anodin. Il s’agit d’un signal, d’un

signe révélateur de l’insuffisance des contrats d’édition classiques à l’heure de l’exploitation

numérique des œuvres.

Si le recours à des clauses de prévision de l’imprévisible ou à des avenants deviens une étape

obligatoire, cela ne peut que signifier le côté dépassé des contrats d’édition traditionnels à

l’heure du numérique.

2) La dangerosité des avenants numériques

149.- Ces avenants peuvent présenter un véritable danger pour les auteurs.

150.- Tout d’abord, il est nécessaire de se souvenir qu’actuellement, l’exploitation

numérique d’œuvres anciennes est dans une incertitude juridique. Pour cause, le vide législatif

70

S. PELLET, L’avenant au contrat, IRJS Editions, Bibliothèque de l’Institut de Recherche Juridique de la

Sorbonne-André Tunc, Thèse Paris I, parution 04/2010. 71

http://www.reynaud-avocat.com/livre-num%C3%A9rique-et-contrat-d-%C3%A9dition/

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50

à ce sujet le prouve.

Dans un tel contexte, le risque se trouve dans la tentation que pourrait avoir certains éditeurs

de faire signer des avenants numériques aux édités en restant évasif sur certains points

pourtant mentionnés dans l’écrit, dans l’espoir que l’auteur n’y prête pas garde ou n’en

comprenne pas véritablement le sens. Ainsi, un professionnel de l’édition pourrait facilement

faire signer à l’édité un avenant lui permettant de se voir céder la totalité des droits

numériques de l’auteur à ses conditions, sans possibilité aucune de renégociation72

.

151.- Sachant les enjeux, l’idéal pour un édité serait de refuser de signer un avenant

numérique tant que la situation juridique ne s’est pas éclaircie à ce sujet, ou alors de ne

l’accepter qu’après en avoir suffisamment négocier les termes en ce qui concerne la durée de

cession des droits, les taux et assiettes de rémunération, ainsi que les possibilités de contrôle

sur l’exploitation numérique.

II) La démonstration d’un droit non adapté à l’évolution numérique

152.- Le numérique à eu pour effet de soulever de nouvelles questions (A) et de

permettre une modification du rôle du consommateur (B).

A) De nouvelles problématiques soulevées par le numérique

1) La thématique de la chaîne du numérique

153.- Le numérique bouleverse les conceptions traditionnelles.

154.- La fabrication des livres numériques entraîne des modifications au processus

classique, ce qui s’explique par la différence de nature entre les deux objets. Pour comprendre,

il suffit de reprendre les définitions antagonistes du livre classique et du livre numérique.

Parler de « livre numérique » constitue un oxymore car cela fait référence à la fois à un

« objet physique bien identifié, en trois dimensions, résultat d’une chaîne d’opérations de

fabrication, dont le contenu est définitivement figé », et au « numérique, désignant un

ensemble de technologies basées sur un ensemble de transformations (la numérisation) d’un

signal en nombres (suites de 0 et de 1), impliquant en général l’usage d’un ordinateur »73

. Ces

72

http://syndicatbd.blogspot.fr/2010/05/faut-il-ou-pas-signer-les-avenants.html 73

Le livre numérique, Rapport de la commission Cordier, mai 1999

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extraits ont le mérite de percevoir toute l’ambigüité de la chose, et ce changement d’objet va

conduire inéluctablement à une modification des procédés de fabrication.

155.- Concrètement, les modifications apportées concerneront le nombre d’acteurs

jouant un rôle dans le processus d’élaboration. Schématiquement, pour le livre papier, la

chaîne implique traditionnellement cinq acteurs. Tout part de l’auteur, qui prendra contact

avec un éditeur. Puis, si un contrat d’édition est signé, l’éditeur entrera lui-même en contact

avec un diffuseur ou distributeur. Celui-ci se chargera ensuite d’acheminer les exemplaires en

librairie, et le libraire vendra les livres au dernier maillon de la chaîne qu’est le consommateur.

Avec le livre numérique, désormais, des maillons sont évincés. Trois circuits sont, dorénavant,

possibles :

Le premier part de l’auteur, qui prendra contact avec un éditeur, lui-même se

chargeant ensuite d’utiliser des agrégateurs. Un agrégateur est une application

permettant de rassembler et de synthétiser des informations. Ensuite, les différentes

données seront transférées à des agents commerciaux, des opérateurs, ou des libraires,

qui auront pour objectif de parvenir à vendre ces livres numériques aux clients.

Dans le deuxième circuit praticable, l’auteur pourrait lui-même contacter directement

un opérateur, un agent commercial, ou un libraire, qui devront ensuite vendre les

exemplaires numériques aux consommateurs.

Enfin, dans le dernier scénario, le plus court, l’auteur pourrait directement s’adresser

aux consommateurs.

156.- Les divergences entre ces deux chaînes de production74

permettent de voir

comment l’œuvre numérique permettra de raccourcir considérablement les chemins classiques

de la production et de l’exploitation des livres. Il faut aussi souligner que ce nouveau marché

risquerait de conduire à des situations oligopolistiques, car des éditeurs tels que Hachette

auront plus de facilité à s’y adapter que des petits éditeurs aux moyens financiers plus réduits.

Par conséquent, le marché des œuvres numériques risque de créer des distorsions de

concurrence.

2) Les conditions d’accès à l’œuvre

157.- La numérisation entraîne la disparition de l’objet livre au profit d’un

74

F. BENHAMOU et O. GUILLON, Modèles économiques d’un marché naissant: le livre numérique, Culture

prospective, 2010/2 n°2, p. 1-16

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52

environnement de fenêtres et d’une interface utilisateur graphique75

.

158.- Cela va conduire à examiner la notion d’interopérabilité et ses enjeux.

Avec l’ascension du numérique, les éditeurs ont chacun utilisés leurs propres techniques. Cela

reflète un comportement assez naturel sur le marché, les professionnels visant à créer un

standard qui leur est propre afin de se réserver une clientèle verrouillée. Divers types de

supports furent créés. Il y eut des supports dédiés, comme la tablette Sony, la tablette Kindle

d’Amazon, ou encore la tablette Nook de Barnes and Noble. A côté de ces supports dédiés,

coexistent aussi des objets non dédiés au livre électronique mais qui offrent un confort de

lecture non négligeable, à l’image de l’Ipad d’Apple. En plus de tous les supports possibles,

se pose le problème de la diversité des formats utilisés: les deux plus utilisés sont le format

PDF et le format EPub, mais les formats HTML, LIT, et d’autres encore sont présents.

Tous ces éléments ont entraîné une complexification du marché du livre numérique. C’est

pourquoi la notion d’interopérabilité trouverait à s’y appliquer76

. Cela consiste en l’adoption

de normes communes, surtout des types de fichiers communs, afin de permettre aux lecteurs

de lire un même livre sur plusieurs supports différents sans avoir à supporter un coût de

transfert.

159.- Toutefois, une limite doit être apportée à la notion d’interopérabilité, tenant au

fait que cela pourra ne pas intéresser tous les consommateurs car certains supports

numériques, à l’image de l’Ipad, pourraient entièrement suffire à leurs utilisateurs en offrant

l’accès à un large catalogue avec un format propre77

.

B) Le changement de rôle du consommateur

1) Le consommateur devient actif

160.- Le consommateur, souvent considéré comme un fainéant, devient de plus en

plus actif dans notre société.

161.- Cela s’illustre avec les décisions conscientes du consommateur, qui en font,

75

B. JUANALS, Le livre et le numérique: la tentation de la métaphore, Communications et langage, n°145, 3ème

trimestre 2005, pp. 81-95 76

A. LATREILLE, Fasc. 1660: MESURES TECHNIQUES DE PROTECTION ET D'INFORMATION,

JurisClasseur Propriété littéraire et artistique, 19 avril 2011. 77

F. BENHAMOU et O. GUILLON, Modèles économiques d’un marché naissant: le livre numérique, Culture

prospective, 2010/2 n°2, p. 1-16

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53

pour le marketing, un partenaire actif78

.

Dans le cadre de l’économie numérique, avec le livre numérique, le rôle du consommateur est

appelé à changer. Pour cause, l’acheteur d’un livre numérique va jouer un rôle actif. Dans un

contexte classique, l’éditeur fabrique les exemplaires d’une œuvre, et le consommateur ira

acheter l’œuvre qu’il souhaite en librairie ou dans une grande surface, ce qui laisse donc

entendre que la seule action du client trouvera sa source dans le paiement du prix.

Dans la sphère de l’économie numérique, cela est différent. Contrairement à l’édition papier,

où il appartient à l’éditeur de faire fabriquer le livre par un imprimeur, puis de s’occuper de sa

distribution, avec le livre numérique, le professionnel de l’édition n’a pas à fabriquer un

exemplaire matériel de l’œuvre. Il doit juste inscrire les fichiers porteurs des œuvres fournis

par les auteurs dans un cadre numérique, permettant au consommateur de croire qu’il lit un

vrai livre. Par conséquent, avec l’économie numérique, l’éditeur assure la publication et la

diffusion des fichiers, mais ne construit aucun exemplaire matériel, tout est dématérialisé. Il

incombe donc au consommateur désireux d’acheter un livre numérique quelconque de créer

l’exemplaire matériel, en chargeant les fichiers sur sa tablette79

. Le consommateur devient

donc actif de par le procédé de fabrication, en fabriquant lui-même, par son action, l’œuvre

numérique.

Cela permet d’envisager les conséquences de ce changement pour l’éditeur.

2) Le véritable travail de l’éditeur

162.- L’avènement du rôle actif du consommateur dans le processus de fabrication de

l’œuvre numérique permet de se questionner sur les prestations fournies par l’éditeur.

163.- Comme cela fut souligné, dans l’exécution d’un contrat d’édition portant

uniquement sur une œuvre en version papier, l’éditeur sera tenu de fabriquer des œuvres

matérielles à ses frais, par l’intermédiaire d’un imprimeur. Or, avec les œuvres numériques,

comme cela fut précisé, il n’aura plus qu’à assumer ses obligations de publication et de

diffusion des fichiers, mais s’en est terminé de la fabrication des œuvres matérielles. Cela ne

remet pas en cause la qualification du contrat d’édition, l’article L 132-1 du Code de la

propriété intellectuelle permettant à l’éditeur de « faire fabriquer » les exemplaires par un tiers.

Mais avec les œuvres numériques, ce procédé va devenir une norme commune. Peut être

78

P. PELLEMANS, Recherche qualitative en marketing : perspective psychoscopique, De Boeck Supérieur,

1999. 79

Edition numérique : une actualité législative édifiante, RTD Com. 2012.557.

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même que le phénomène des purs playeurs va finir par dominer le secteur de l’édition, avec

des professionnels qui, désormais, ne travailleront plus que sur des œuvres contemporaines

qu’ils éditeront uniquement en version numérique et les vendront en ligne. Un exemple

concret est donné en France, via l’éditeur SKA, un nouvel arrivant dans le marché, qui se

revendique être un éditeur exclusivement numérique, et qui vend ses ebooks sur sa elibrairie.

Un autre exemple peut être donné en Grande Bretagne, où l’éditeur Pan Macmillan décida de

se lancer dans le commerce électronique en se lançant également dans l’édition exclusivement

numérique par l’intermédiaire de la création d’une marque nouvelle, Macmillan Compass.

164.- Même si l’édition numérique risque d’engendrer de nouveaux frais pour les

éditeurs comme le coût de la sécurisation des fichiers, il ne faut pas nier l’évidence car les

coûts d’impression, de diffusion et de stockage seront éradiqués, ce qui constituerait une

source certaine d’économies pour les éditeurs.

165.- Enfin, il convient de rappeler que le numérique peut également permettre aux

auteurs de se passer des éditeurs avec la voie de l’auto édition. Cela peut se faire grâce à des

sites spécialisés, tels que JePublie.com, qui propose aux auteurs de s’auto-publier, avec un

service de publication incluant la relecture, la mise en page, la création graphique, et la

diffusion sécurisée de l’œuvre sur internet en format ebook, contre une certaine rémunération.

Cela se rapproche, finalement, du contrat à compte d’auteur, mais en version numérique.

L’avantage de l’autoédition est qu’elle permet à l’auteur de conserver ses droits, même si il

devra faire attention à la fréquence à laquelle il s’adonne à cette pratique. Bien que

l’autoédition ne soit pas une activité réglementée, il ne faut pas oublier que l’édition est une

activité commerciale, ce qui laisse supposer que l’auteur pratiquant l’autoédition trop souvent

risquerait de subir une requalification en commerçant, avec les conséquences fiscales et

juridiques qui en découlent80

.

80

S. EYROLLES, Les 100 mots de l’édition, PUF, 2010

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Section II : La démonstration de l’insuffisance des règles en vigueur

166.- Les changements apparus avec les œuvres numériques (I) ont créés une certaine

insécurité juridique pour les auteurs (II).

I) Les changements découlant de l’œuvre numérique

167.- L’auteur risque de ne plus être maître de son œuvre (A) face à des contrats trop

souvent disproportionnés (B).

A) Le risque de perte de la maîtrise de l’œuvre

1) La nécessité de permettre à l’auteur d’accepter ou de refuser la version

numérique éventuellement modifiée

168.- Il est compréhensible qu’un auteur ait envie de garder un droit de regard sur ce

que l’éditeur va faire de son œuvre.

169.- Cela est d’ailleurs prévu par l’article L 132-11 du Code de la propriété

intellectuelle, qui dispose que l’éditeur ne peut, « sans autorisation écrite de l'auteur, apporter

à l'œuvre aucune modification. », ce qui est nécessaire pour permettre un respect du droit

moral de l’auteur. L’écrit en question prendra la forme d’un bon à tirer, plus souvent écrit BaT,

que l’imprimeur envoie à l’éditeur afin de s’assurer de la correspondance entre le fichier et

l’impression, et l’imprimeur ne lancera l’impression qu’une fois le BaT approuvé81

. Mais

pour l’édition numérique, étant donné que l’imprimeur n’apparait plus dans la chaîne en

raison de l’absence d’impression nécessaire, il convient de se demander comment l’éditeur

pourra procéder pour garantir le respect du droit moral de l’auteur. Cette interrogation n’est

pas vaine : beaucoup d’auteurs se sont inquiétés à ce sujet, en se demandant si l’adaptation au

numérique ne risquait pas d’entraîner un non respect du droit moral de l’auteur, avec,

notamment, les fonctionnalités nouvelles de l’édition numérique. Les plus inquiets sont les

auteurs de bandes dessinées et de mangas, attachés au langage de la page ou double page, ne

sachant pas si ces caractéristiques pourront être respectées sous format numérique82

.

Face à ses interrogations, une solution pourrait être d’imposer aux éditeurs de faire signer aux

81

http://www.infos-edition.com/monde_livre.php?page=4 82

Rapport sur le livre numérique, 30 juin 2008, remis par Bruno Patino à Christine Albanel

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édités un bon à diffuser avant toute éventuelle modification, ce qui inclut la mise en ligne de

l’œuvre83

. Cela vaudrait le bon à diffuser de l’édition papier en matière d’édition numérique.

2) L’œuvre numérique, parent pauvre de la protection des œuvres de l’esprit

170.- Cet intitulé est fondé sur un simple constat.

171.- Jusqu’à présent, en résumé, il fut soulevé que les éditeurs se basaient sur leurs

acquis. Cela se traduit par l’utilisation de la clause d’adaptation aux modes d’exploitation

inconnus lorsque celle-ci est incluse dans le contrat d’édition, ou par la création d’avenants

que l’édité doit signer s’il veut que son œuvre soit adaptée. Mais les stipulations du contrat de

base s’appliquent et on complémente cela avec les dispositions de l’article L 122-1 du Code

de la propriété intellectuelle sur la cession visant la téléreproduction.

Ce code semble dépassé face à l’évolution numérique. Par exemple, l’article L 122-7 fait

référence au droit de reproduction, alors que pour une œuvre numérique, il faudrait plutôt

faire mention du droit de mises en circulation ou de distribution, droit qui fut, par ailleurs,

consacré par le droit de l’Union européenne, encore appelé droit communautaire à l’époque,

par la directive n°2001/29 du 22 mai 2001 portant sur l’harmonisation de certains aspects du

droit d’auteur dans la société de l’information.

Face à la dimension mondiale du livre numérique, une solution pourrait être d’adopter des

principes communs à ce secteur au niveau européen, voir au niveau mondial via l’OMPI84

.

Cela démontre qu’il existe encore des failles dans ce domaine.

B) Un contrat souvent disproportionné

1) La durée controversée des cessions de droits

172.- La cession est généralement comprise dans le contrat d’édition.

173.- Seulement, dans la plupart d’entre eux, rien ne fut prévu sur la cession des

droits numérique. Par conséquent, il est nécessaire que l’éditeur et l’édité concluent un nouvel

écrit portant sur la cession des droits numériques, mais la difficulté ce cette pratique est

83

http://www.reynaud-avocat.com/livre-num%C3%A9rique-et-contrat-d-%C3%A9dition/ 84

A-R. BERTRAND, Droit d’auteur, Chapitre 112: Transmission, cession et contrats relatifs aux droits d’auteur,

Dalloz action, 2010

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qu’elle risque de se confronter au principe d’unité d’exploitation de l’œuvre. Face à cela, il

conviendrait d’inclure directement dans un contrat d’édition une clause relative aux droits

d’exploitation numériques, afin que tout soit clarifié dès le départ sur la cession des droits

numériques.

174.- Quant à la durée de cette cession, le droit commun pose la règle des soixante-

dix ans après la mort de l’auteur, mais rien n’est prévu pour la cession des droits numérique.

Cela signifie t-il que l’auteur cédant ses droits d’exploitation numériques les céderaient pour

une durée indéterminée si rien n’est prévu au contrat ? Devant ce vide législatif, un accord fut

passé. Sentant le danger, les auteurs se sont manifester et ont négociés avec les éditeurs sur ce

point, notamment, ce qui déboucha sur un accord cadre relatif au contrat d’édition à l’ère du

numérique entre le Conseil permanent des écrivains et le Syndicat national de l’édition, le 21

mars 2013. Cet accord résulta, sur ce détail, sur une limitation comprise entre deux et cinq ans

à compter de la signature de l’acte, et si la durée dépasse celles conseillées, alors l’éditeur

devra insérer une clause de rendez-vous ou de réexamen visant à renégocier les conditions de

rémunération de l’auteur pour l’exploitation numérique de sa création. Une première

remarque consistera dans le fait que rien ne prouve que les éditeurs accepteront de clairement

jouer le jeu. Ensuite, si un accord cadre est devenu nécessaire, la démonstration de

l’insuffisance des règles légales en vigueur est faite, et cet accord n’est sûrement qu’un

compromis entre le droit positif et le droit à venir.

2) L’œuvre électronique et la rémunération de l’auteur

175.- Il ne s’agit pas de revenir sur les règles de la rémunération des auteurs, mais

d’envisager leur application dans le cadre de la cession des droits numériques.

176.- Pour simple rappel, le principe en la matière est la rémunération proportionnelle

de l’auteur calculée en fonction du prix de vente au public85

, tandis que la rémunération

forfaitaire doit rester l’exception86

.

Selon le rapport de Bruno Patino, il n’y a aucune raison de changer ce principe, le

proportionnel doit rester la norme, et le forfaitaire, l’exception.

177.- Seulement, avec les œuvres électroniques, les conditions sont différentes car

85

Cass. 1re

civ., 09/10/1984, n° 83-13.850. 86

Cass. 1re

civ., 26/01/1994, n° 92-11.691

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selon ce même rapport, la pratique de la rémunération forfaitaire risque d’augmenter face aux

difficultés pour connaitre les bases exactes de calcul d’une rémunération proportionnelle, ce

qui justifierait l’intérêt de la création d’assiettes de droit autres que celle des prix payés

réellement par le public afin de pouvoir calculer de manière exacte le montant de la

rémunération proportionnelle des auteurs. Mais quel autre critère pourrait être viable pour

calculer le montant d’une rémunération proportionnelle ? Il semblerait que l’on se trouve dans

une impasse…

178.- Face à ce dilemme, la pratique a trouvé un moyen pour parvenir à perpétuer la

pratique de la rémunération proportionnelle. Les éditeurs ont arrêtés de prendre pour assiette

de calcul de la rémunération le prix de vente au détail au profit du chiffre d’affaires

intermédiaire de l’éditeur87

. Apparemment, tout semble résolu. En apparence, du moins.

Avec ce système, un inconvénient majeur risque de se faire ressentir. Avec cette nouvelle

assiette, la rémunération proportionnelle sera moins élevée pour l’auteur, car le chiffre

d’affaire intermédiaire de l’éditeur pourrait être moins élevé que la totalité des sommes

perçues lors de la vente à l’unité aux consommateurs. De plus, si l’œuvre électronique est en

vente sur un site où le lecteur paie juste un abonnement, la rémunération proportionnelle est

encore plus difficile à établir, et l’assiette retenue sera fonction d’un prix global basé sur les

abonnements vendus, et il faudra ensuite répartir la somme entre les différents auteurs ayant

leurs œuvres sur cette plateforme.

179.- Par conséquent, avec l’avènement des œuvres électroniques, les règles de

rémunération classique des auteurs connaissent certaines difficultés d’application pratiques.

Les professionnels de l’édition s’en étant rendu compte, ils trouvèrent d’autres assiettes pour

permettre le maintient de la rémunération proportionnelle, mais ces solutions sont loin d’être

satisfaisante. Les auteurs se font exploités en toute légalité au simple motif que les

connaissances techniques actuelles ne sont pas suffisantes pour permettre une rémunération

proportionnelle classique. La conséquence de cela risque d’être un retour en force de

l’exception du forfaitaire.

180.- La nécessité de trouver des assiettes légales de calcul des rémunérations

proportionnelles satisfaisante se fait donc ressentir de plus en plus fortement car le principe ne

doit pas devenir l’exception, ce qui serait une véritable régression en matière de propriété

87

http://www.reynaud-avocat.com/livre-num%C3%A9rique-et-contrat-d-%C3%A9dition/

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littéraire-artistique.

II) Une insécurité juridique pour les auteurs

181.- Cela se traduit par une supériorité de l’éditeur sur l’auteur (A) ainsi que par les

dangers d’une distribution en ligne (B).

A) De nouveaux éléments de domination

1) Le facteur de la dépendance

182.- L’économie numérique entourant le livre électronique permet de revenir sur ce

thème.

183.- Comme cela fut déjà évoqué, les auteurs ont souvent besoin des éditeurs, du

moins dans l’édition imprimée. Avec l’édition électronique, il aurait été souhaitable que la

majorité des auteurs se mettent à l’auto-publication, chose rendue possible par l’intermédiaire

d’internet. Néanmoins, la plupart des auteurs continuent à recourir à un éditeur car, une fois

de plus, être édité rime avec succès, du moins plus que par la voie de l’auto-publication. Le

rapport de dépendance édité-éditeur n’a, par conséquent, pas disparu, et désormais, avec

l’obscurité se dressant autour des règles de rémunération, cette dépendance devient de plus en

plus nuisible.

2) L’absence de règles légales

184.- Cela encourage la technique contractuelle.

185.- Seulement, tous les auteurs ne sont pas juristes, et face à un nouveau domaine

dépourvu de règlementation précise, les abus ne sont pas impossibles, surtout, comme ce fut

déjà évoqué, sur la durée de cession des droits.

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B) Une distribution grand public dangereuse

1) Les risques accentués de contrefaçon

186.- La contrefaçon en matière littéraire n’est pas un phénomène nouveau.

L’article L 122-5 du Code de la propriété intellectuelle encadre le droit de copie privée.

Depuis la loi du 17 juillet 2001, les règles correspondantes furent étendues aux œuvres

numériques. Mais la mise en ligne des œuvres constitue un facteur accru de risques de

piratage, comme pour l’industrie du film par exemple. Peut être que demain, après le fléau du

téléchargement illégal d’œuvres cinématographiques, se développera celui des œuvres

littéraires.

Enfin, les dangers de contrefaçon seront également accentués par rapport au seul secteur de

l’édition papier.

2) Le besoin d’une protection numérique

187.- Cette demande est légitime.

188.- La loi du 21 juin 2004 sur la confiance dans l’économie numérique (LCEN) a

prévu quelques moyens de lutte contre le piratage des œuvres numériques. Cette loi a permis

aux éditeurs de tenir pour responsable un hébergeur qui permettrait un accès non autorisé à un

contenu protégé. Plus exactement, cette procédure serait possible seulement si l’hébergeur n’a

pas agis pour bloquer la mise en ligne illicite alors qu’il aurait reçu une notification préalable.

189.- Quant à la contrefaçon, comme pour le piratage, l’idée d’une possibilité

d’action commune fut avancée88

, une sorte d’action de groupe ou « class action » propre au

droit de la propriété intellectuelle. En clair, il s’agirait d’allier les forces des auteurs et des

éditeurs, tous deux ayant des intérêts communs à protéger face à ce type de pratique, ceci dans

un objectif de défense du doit d’auteur. Des précédents litiges ont permis d’expérimenter ce

modèle, des éditeurs ayant menés ponctuellement des actions contre des contrefacteurs avec le

soutien de nombreux auteurs. Un cas assez illustratif peut être mentionné : un litige opposa le

SNE et la SGDL face à Google, la société Google Inc. ayant numérisé et rendu accessibles en

88

http://www.sne.fr/dossiers-et-enjeux/droit-d-auteur/evolutions-du-droit-d-auteur/lutte-contre-le-piratage.html

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ligne les couvertures et les extraits d’ouvrages protégés, sans l’autorisation préalable des

ayants droit. Google fut condamné pour contrefaçon et atteinte au droit moral de l’auteur89

.

89

TGI Paris, 18 déc. 2009, Juris-Data no 2009-016553

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Chapitre II : Les solutions éventuelles

190.- La logique conservatrice a montré ses limites, le progrès dépasse le champ

d’application du droit positif et les conséquences seront négatives.

191.- Il convient d’envisager les différentes solutions envisageables (Section I) ainsi

que les différents moyens d’encadrer le contrat d’édition numérique (Section II).

Section I: Les solutions envisageables

192.- La principale solution passe par la règlementation (I). De nombreuses

discussions ont eu cours sur ce sujet sensible (II).

I) La voie de la règlementation

193.- Le projet phare serait la création d’un nouveau contrat (A) plus protecteur (B).

A) La création d’un contrat spécial

1) Le contrat d’édition numérique

194.- Ce contrat est le serpent de mer du droit de la propriété intellectuelle.

195.- Cette idée est née à partir d’un constat opéré sur l’inadéquation des règles de

droit positif portant sur le contrat d’édition et ses nouveaux supports. Un nouvel objectif était

envisagé, adapter le contrat d’édition à l’ère numérique afin de sécuriser les droits

numériques90

.

Cela consiste donc en la création d’un nouveau type de contrat, distinct du contrat d’édition,

puisqu’il ne s’agit pas juste de rajouter certaines clauses au contrat d’édition original comme

cela avait pu être fait par les éditeurs.

90

Vers une modification du contrat d’édition, Réponse ministérielle n°113450, JOANQ 15/11/11, Dalloz

actualité, 29/11/11.

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2) Définition

196.- Ce contrat permettrait de mettre un terme aux lacunes actuelles.

197.- Cette volonté révèle le désir de ne pas laisser ce secteur à la seule et entière

volonté contractuelle des acteurs en place. Elle ne serait finalement que le résultat des

nombreux abus ayant pu être commis par les éditeurs avec la pratique des avenants

numériques ou de l’usage abusif des clauses d‘adaptation aux modes d’exploitations inconnus.

Concilier le contrat d’édition classique, qui est déjà un contrat complexe, avec les droits

numériques, est une invention issue de la pratique qui a fini par montrer ses limites, un simple

avenant numérique ne pouvant suffire à garantir la sécurité juridique à laquelle les auteurs ont

droit.

B) Un contrat plus protecteur

1) Les lacunes à combler

198.- Cette création permettrait de combler certaines failles.

199.- Les différentes questions épineuses furent déjà évoquées. Pour rappel, il s’agit,

premièrement, des interrogations portant sur les assiettes de rémunération de l’auteur dans le

cadre du système proportionnel. Il serait nécessaire de fixer une méthode de calcul fiable,

prenant une assiette permettant cela sans léser les édités, ceci afin de faire en sorte que la

rémunération forfaitaire reste l’exception.

Deuxièmement, il faudrait permettre à l’auteur de garder un meilleur contrôle sur son œuvre

suite à son adaptation électronique.

Troisièmement, la question de la durée de cession des droits mériterait aussi d’être clarifiée.

200.- Enfin, de manière accessoire, il faudrait aussi se préoccuper de la notion de

l’interopérabilité, du prix de l’œuvre numérique et de sa protection.

2) Les conséquences envisageables

201.- Deux angles sont à envisager.

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64

202.- Tout d’abord, la création d’un contrat spécial sur l’édition numérique serait

bénéfique pour les auteurs car les dérives cesseraient. Pour citer Lacordaire, il ne faut point

oublier qu’entre le faible et le fort, « c’est la liberté qui opprime et la loi qui libère ». Dans la

situation éditeurs-édités, cette citation trouve tout son sens.

203.- Néanmoins, cela risque de créer une entorse au principe d’unité d’exploitation

de l’œuvre car si une exploitation papier et numérique est envisagée, alors deux contrats

distincts devront être conclus, ce qui ne s’inclut pas totalement dans une logique de

simplification du droit. Un seul contrat contenant deux parties bien distinctes pourrait suffire,

mais cela aboutirait au même résultat quant à l’atteint au principe d’unité d’exploitation de

l’œuvre.

II) Les discussions en cours

204.- Des discussions entre auteurs et éditeurs (A) mettent en avant des intérêts

antagonistes (B).

A) Des discussions interprofessionnelles

1) Les protagonistes en scène

205.- Pour parvenir au résultat escompté, des négociations interprofessionnelles

furent mises en place.

206.- A l’instar des négociations interprofessionnelles en droit du travail, les deux

protagonistes de ces négociations furent des représentants des professionnels concernés.

La représentation des éditeurs fut assurée par le Syndicat national de l’édition, ou SNE. Il

s’agit d’une organisation professionnelle chargé de défendre les intérêts des professionnels de

ce secteur. Ils ont une mission de représentation de l’édition face aux acteurs de la chaîne du

livre et à l’échelle nationale, ainsi qu’un objectif de promotion de la lecture et de l’écrit91

.

Quant à la représentation des auteurs, elle fut assurée par le Conseil permanent des écrivains

ou CPE qui regroupe plusieurs organisations d’auteurs du livre englobant les écrivains, les

traducteurs, les illustrateurs, les photographes, ou encore les scénaristes. Il est le principal

interlocuteur des éditeurs et des pouvoirs publics92

.

91

http://www.sne.fr/sne/missions.html 92

http://www.conseilpermanentdesecrivains.org/cpe

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2) Résumé des négociations

207.- Comme cela l’avait été suggéré93

, les négociations interprofessionnelles ont eu

lieu.

208.- La ministre de la culture Aurélie Filippetti avait tout d’abord chargé le

professeur Sirinelli d’une mission portant sur l’adaptation du contrat d’édition au numérique94

.

Suite à ce travail, des premières négociations ont eu lieu au sein du Conseil supérieur de la

propriété littéraire et artistique, mais elles se sont soldées par un échec.

Les recherches du professeur Sirinelli ont alors continué, et de nouvelles négociations ont eu

lieu entre le SNE et le CPE. Elles finiront par aboutir fin février 2013 par un accord cadre

relatif au contrat d’édition à l’ère du numérique.

B) Des revendications différentes

1) Les revendications des auteurs

209.- Les auteurs avaient des revendications précises95

.

210.- Tout d’abords, ils voulaient limiter la cession des droits numériques à une durée

assez courte, de trois, cinq ou dix ans maximum.

Ensuite, au sujet de la rémunération proportionnelle, ils voulaient percevoir 50% des recettes

de l’éditeur réalisées par l’exploitation numérique de l’œuvre.

2) Les revendications des éditeurs

211.- Les éditeurs avaient d’autres attentes.

212.- Leur position était plus conservatrice en ce qu’ils voulaient maintenir les modes

de calcul de rémunération qu’ils avaient mis en place, et ils disaient ne pas comprendre

l’utilité de l’instauration d’une durée maximale de cession des droits numériques. Pour se

justifier, ils ont soulevé la faible part actuelle du marché des livres numériques en France,

93

Rapport sur le livre numérique, 30 juin 2008, remis par Bruno Patino à Christine Albanel 94

http://www.culturecommunication.gouv.fr/Espace-Presse/Communiques-de-presse/Mission-du-professeur-

Pierre-Sirinelli-sur-l-adaptation-du-contrat-d-edition-a-l-heure-du-numerique 95

http://www.paralipomenes.net/archives/3539#_ftn3

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ainsi que tous les frais qu’ils devaient supporter en tant qu’éditeur afin de s’y adapter96

.

Section II : L’encadrement du contrat d’édition numérique

213.- La décision d’un encadrement légal de ce contrat (I) a finalement suivi les

efforts d’autorégulation (II).

I) Un encadrement légal du contrat d’édition numérique

214.- Un contrat d’édition numérique sera créé (A) par la loi (B).

A) La création du contrat d’édition numérique

1) Une évolution du droit de la propriété intellectuelle

215.- Le serpent de mer ne sera plus.

216.- Contrairement à ce qui avait été proposé, à savoir, ne pas modifier le droit de la

propriété intellectuelle mais s’accommoder des règles existantes pour régir l’édition

numérique97

, les négociations ont aboutis sur un autre résultat. L’accord cadre de février 2013

préconise la création d’un contrat d’édition numérique, ce qui constituera certainement une

avancée en la matière.

2) Une création nécessaire

217.- Ce résultat n’est pas anodin.

218.- Il n’est que le fruit de l’ensemble des failles des règles entourant le contrat

d’édition face à la thématique du numérique. Pour s’en convaincre, il suffit de comparer

l’élaboration d’un contrat d’édition classique à celle d’un contrat d’édition électronique. Le

contrat d’édition est plus élaboré que le contrat d’édition électronique, qui se matérialise

souvent sous la forme d’un avenant au premier contrat98

. Cette évolution était nécessaire afin

96

A. BEUVE-MERY, Querelle financière entre auteurs et éditeurs, Le Monde, 17 décembre 2010 97

Rapport sur le livre numérique, 30 juin 2008, remis par Bruno Patino à Christine Albanel 98

Voir annexes 3 et 4

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67

de mieux prendre en considération les enjeux entourant la question et de pouvoir rééquilibrer

les forces en présence.

B) Une création légale

1) Une loi spéciale

219.- Cet accord précise deux choses.

220.- Tout d’abord, il préconise la création d’un Code des usages, ce qui est une idée

louable dans la mesure où les usages ont une place très importante dans le monde de

l’édition99

, et bien souvent, ils ont vocation à suppléer le droit positif. Codifier l’ensemble de

ces usages permettrait une plus grande transparence, pour les éditeurs comme pour les auteurs,

mais surtout pour les auteurs. Un auteur occasionnel ne connaîtra pas forcement aussi bien ces

usages qu’un professionnel de l’édition.

221.- Ensuite, et c’est cela le plus important, il s’avère que cet accord devra servir de

base à l’élaboration d’une future loi. Par conséquent, le contrat d’édition sera un contrat

spécial, avec un régime légal encadrant sa mise en œuvre. Un projet de loi devra être déposé.

2) La modification du Code de la propriété intellectuelle

222.- Le code sera modifié.

223.- Dans l’accord cadre, il est précisé que les règles portant sur le contrat d’édition

numérique ne resteront pas dans une loi spéciale, hors du code, mais qu’elles y seront

incorporées. Plus précisément, elles seront incorporées dans le Code de la propriété

intellectuelle ainsi que dans le Code des usages. Cela s’inscrit dans un mouvement de

codification.

99

P-Y. GAUTIER, Propriété littéraire et artistique, PUF, Collection Droit fondamental, 2010

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II) Le résultat des tentatives de régulation

224.- Les chances de réussite sont grandes (A). Sinon, à défaut de loi, il y aurait eu

l’émergence d’une soft law en la matière (B).

A) Des chances de succès

1) La conséquence de règles issues de négociations entre les parties concernées

225.- Le futur projet de loi aura toutes les chances de réussir.

226.- Cela s’explique par le fait qu’il se base sur des négociations entre

professionnels du secteur, ce qui laisse supposer qu’il n’y aura probablement pas d’oubli

majeur. Une comparaison peut être faite avec le droit social, où les conventions collectives

propres à chaque secteur sont aussi le fruit de négociations entre professionnels.

2) L’avantage de la pratique

227.- La pratique a des avantages que ne permet pas toujours la théorie.

228.- En l’espèce, le fait que ces négociations entre professionnels du secteur aient eu

lieu après une période de mise en pratique de règles de circonstances a permis d’en cerner

véritablement les enjeux d’une manière sûrement plus efficace que si une loi avait été déposée

avant toute mise en pratique réelle. Une telle initiative aurait pu se révéler être inefficace en

risquant de passer à côté des véritables enjeux, ce qui aurait aboutit à la création d’un texte

législatif supplémentaire à intérêt réduit.

B) L’émergence d’une soft law

1) Définition

229.- L’expression « soft law » vient du droit anglo-saxon.

230.- Elle signifie « droit mou ». Cela consiste en l’application de règles de droit non

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69

obligatoires, issues de la pratique100

. Il serait même possible de qualifier les règles de soft law

de coutumes en devenir, à condition qu’à l’avenir, elles soient appliquées d’une manière

continue envers un groupe de personnes et qu’elles conservent leur caractère obligatoire.

L’avantage de la soft law est son adaptabilité aux situations de fait, mais il lui est aussi

reproché d’être le vecteur d’une certaine insécurité juridique101

.

2) Application au cas d’espèce

231.- Le cas du contrat d’édition aurait pu présenter une alternative à cela.

232.- Si la ministre de la culture ne s’était pas engagée à déposer un projet de loi afin

de faire de l’accord cadre une norme impérative, alors les termes de cet accord se seraient

appliqués d’une manière moins contraignante. Quoi qu’il en soit, pour l’instant, le projet de

loi n’ayant pas encore été déposé, une véritable soft law s’applique en droit de la propriété

intellectuelle en matière de contrat d’édition électronique.

100

http://www.portail-ie.fr/lexiques/read/90 101

S. GAUDEMET, Le droit souple au pays de l’authenticité, Defrénois, 15 décembre 2013 n° 23, P. 1181

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Conclusion

233.- Au fil de cette première partie, le rôle clé de l’éditeur fut mis en avant. Son

intervention se révèle bien souvent nécessaire afin qu’un ouvrage puisse connaître le succès

tant espéré par son auteur auprès du public. Pour lui permettre de mener à bien sa mission,

l’auteur sera contraint de lui céder ses droits sur son œuvre, bien qu’il en conserve tout de

même certains qui sont inaliénables.

Fort de ce rapport de forces, l’éditeur aura une large marge de manœuvre par rapport à

l’auteur dépendant. Toutefois, l’auteur voulant éviter cette dépendance pourra utiliser d’autres

moyens pour publier ses œuvres, mais des engagements financiers plus importants ou des

chances de succès plus réduites sont des arguments dissuasifs.

234.- Face à tous ces éléments, il faut aussi retenir que l’évolution des techniques et

des supports n’a pas épargné le secteur de l’édition, et que de nombreuses questions se sont

posées quant à la validité des règles classiques de droit de la propriété littéraire-artistique

portant sur le contrat d’édition. Ces interrogations ne furent pas vaines, le Code de la

propriété intellectuelle montrant plusieurs lacunes sur ce point. Avec l’édition numérique, il

est apparu très clairement que des difficultés apparaitraient tant sur la problématique de

l’accessibilité à l’œuvre que sur la question de la perte de la maîtrise de l’œuvre par son auteur.

Enfin, le mode de support du numérique risque également de poser des problèmes quant à la

rémunération de l’auteur, ainsi qu’au sujet de la menace de perte de contrôle de l’œuvre au

profit de l’éditeur. Avec toutes ces constatations, le projet de création d’un contrat d’édition

numérique plus adapté fut envisagé afin de pallier les carences du droit positif.

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Partie II : La protection et le prix de

l’œuvre

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235.- Après s’être intéressé à la relation existant entre les édités et les éditeurs, il

convient désormais de se pencher sur deux thèmes en lien avec le contrat d’édition numérique.

236.- Le premier sera la thématique de la protection de l’œuvre. Bien que de

nombreuses règles existent en la matière, il ne faut pas nier que la pratique de l’édition

électronique va sûrement soulever de nouveaux problèmes, la mise des œuvres en ligne ne

pouvant que susciter de nouvelles difficultés plus prononcées qu’auparavant avec la seule

édition papier.

237.- En second lieu, l’autre question épineuse portera sur l’étude du prix du livre

numérique. De façon traditionnelle, le prix du livre est déjà encadré, mais indispensable sera

l’analyse qui permettra d’essayer de voir si les dispositions en la matière seront suffisantes

dans le cadre du prix des livres numériques ou s’il sera nécessaire de légiférer à nouveau.

238.- En d’autres termes, les problématiques touchant à la protection et au prix de

l’œuvre sont importantes.

239.- Ainsi, il conviendra d’analyser en premier lieu les dispositifs de protection des

œuvres (Titre I) ainsi que les règles encadrant le prix du livre (Titre II) en examinant les

influences que le numérique aura sur chacun d’eux.

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Titre I : La protection de l’œuvre

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74

240.- Protéger l’œuvre permet de préserver le droit moral et le droit patrimonial de

l’auteur.

241.- Il existe ou pourrait exister deux types de protection. La première dont

l’existence n’est plus à prouver est une protection normative (Chapitre I). La seconde dont

l’existence n’existe pas encore pourrait être une protection contractuelle (Chapitre II).

Chapitre I : La protection normative

242.- Le législateur s’est penché sur le thème de la protection des œuvres de l’esprit.

243.- La lutte contre le piratage (Section I) connait également des exceptions (Section

II).

Section I : Le danger du piratage

244.- La pratique du piratage (I) a engendré la création de moyens de défense (II).

I) Le piratage

245.- L’analyse de cette notion (A) permet d’entrevoir les risques pesant sur l’édition

numérique (B).

A) Notion

1) Définition

246.- D’un point de vue historique, lorsque le terme piratage est employé, la première

image venant à l’esprit est celle des brigands des mers qui parcouraient les flots et attaquaient

les navires de commerce.

247.- Aujourd’hui, ce terme désigne également d’autres pratiques moins violentes

sans toutefois quitter la sphère de l’illégalité. Selon le dictionnaire de l’Académie française,

en langage technologique, le sens premier du piratage consiste en une « intrusion illicite dans

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75

un système informatique, pour en piller les données ou pour en perturber le fonctionnement ».

Mais, toujours selon cette même source, le piratage peut aussi consister en la contrefaçon

d’une œuvre. Viennent alors à l’esprit tous les litiges en lien avec le téléchargement illégal de

films ou encore de musiques, en dépit du droit d’auteur. Cette dernière définition servira

d’angle pour envisager le sujet de l’édition électronique.

2) Les conséquences du piratage

248.- Le piratage a des conséquences néfastes.

249.- Tout d’abord, le piratage constitue ni plus ni moins qu’un vol. Pour schématiser,

le fait de télécharger un film illégalement chez soi, avec un ordinateur, est l’équivalent de se

rendre dans un magasin et de partir avec un DVD sans le payer. Cela aura donc deux

conséquences principales.

250.- La première conséquence sera un non respect de la loi, mais cela sera traité plus

tard.

La seconde conséquence résulte d’un constat financier. Cela semble logique étant donné qu’en

téléchargeant illégalement, on ne paie pas un prix. L’effet entraîné est une perte considérable

de chiffre d’affaire pour les industries musicales et cinématographiques102

, ce qui peut, à

terme, conduire à des suppressions d’emplois, sans compter le manque à gagner des titulaires

de droits d’auteur.

251.- Les dangers du téléchargement illégal sur certains secteurs sont donc réels, et

ces dangers consistent essentiellement en des pertes économiques.

B) Le piratage et l’édition numérique

1) Un secteur nouveau

252.- L’édition électronique constitue encore un secteur jeune.

253.- Bien que le livre électronique soit apparu dès 1998, suite à son premier échec

102

http://www.capital.fr/a-la-une/interviews/telecharger-illegalement-sur-internet-penalise-des-secteurs-entiers-

de-notre-economie-362478

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commercial, ce sujet fit peu de bruit, jusqu’à récemment ou son petit succès naissant a fait

naître de grandes espérances ainsi qu’émerger de nombreuses questions d’ordre juridique103

.

Il s’agit donc d’un secteur de l’économie relativement nouveau par rapport à l’industrie

cinématographique ou musicale. Or, justement, si les deux industries précitées, soit les

industries musicales et cinématographiques, ont connues des problèmes de téléchargement

illégal, c’est à cause de la mise en ligne de leurs œuvres, avec l’outil Internet.

254.- Le secteur de l’édition connaissait déjà des difficultés avec la pratique des

photocopies à outrance, technique nuisible à l’économie du livre. Désormais, il y a fort à

parier que si des œuvres numériques sont éditées en ligne, le phénomène du téléchargement

illégal ne concernera plus seulement les films et la musique, mais aussi les livres numériques.

Les éditeurs ont donc particulièrement intérêt à créer des plateformes sécurisées pour la vente

de ebooks, mais comme pour les autres secteurs, le téléchargement illégal de livres

numériques deviendra sûrement une pratique démocratisée. Pour s’en convaincre, il suffit

d’aller visiter certains sites de téléchargement illégal dont je ne mentionnerai pas le nom pour

se rendre compte qu’il est possible de se procurer gratuitement des livres électroniques qui ne

sont pas censés être gratuit comme des magasines tels que L’équipe, Auto Plus, Voici, Le

Parisien, ou encore Closer.

255.- D’ailleurs, si la France est encore relativement épargnée par ce phénomène, il

en est autrement dans d’autres Etats comme les Etats-Unis, l’Inde ou encore le Mexique ou de

nombreuses requêtes sont faites104

. Mais même en France, des études105

ont démontrées que

de nombreuses tentatives de téléchargement illégal de livre avaient déjà eu lieu, ce qui laisse

penser qu’avec l’ouverture sur le numérique, cela ne va pas s’améliorer. Pour finir, ces

prévisions alarmistes peuvent être confirmées par l’augmentation du téléchargement illégal de

livres électroniques depuis l’arrivée de l’Ipad106

. Le mouvement semble amorcer.

2) Les risques

256.- Cela pourrait entraîner plusieurs désagréments.

103

B. JUANALS, Le livre et le numérique : la tentation de la métaphore, Communication et langages, n°145, pp.

81-93, 3ème

trimestre 2005. 104

http://bloguniversdoc.blogspot.fr/2010/11/le-telechargement-illegal-de-livre.html 105

M. DAVAL, EbookZ : étude sur l’offre numérique illégale des livres, le MOTif, octobre 2009. 106

http://www.inaglobal.fr/edition/article/une-hausse-du-telechargement-illegal-de-livres-depuis-l-ipad

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257.- Les premiers touchés seraient les éditeurs. Si les actes de piratages se

multiplient, les éditeurs pourraient souffrir des gains manqués, et leur chiffre d’affaire sera

peut être trop mince pour couvrir les frais de conception des œuvres.

258.- Ensuite, les plus lésés seront les auteurs qui se verront violer dans leurs droits

patrimoniaux.

A terme, ce genre de pratique pourrait même mettre fin au secteur de l’édition numérique si

les sommes générées ne sont pas suffisantes. Ce secteur pourrait donc mourir jeune.

II) Les moyens de lutte

259.- Des réponses furent apportées au piratage des œuvres avec le délit de

contrefaçon (A) ainsi que par une prise en compte du rôle des hébergeurs (B).

A) La contrefaçon

1) Définition

260.- Le terme « contrefaçon » est issu du mot « contrefaire », au sens de « reproduire

de manière illicite »107

.

261.- Plus précisément, selon l’Insee, la contrefaçon se définit comme « la

reproduction, l'imitation ou l'utilisation totale ou partielle d'une marque, d'un dessin, d'un

brevet, d'un logiciel ou d'un droit d'auteur, sans l'autorisation de son titulaire, en affirmant ou

laissant présumer que la copie est authentique ».

262.- Plusieurs manifestations concrètes de cette pratique sont envisageables, tant en

matière de brevet ou de logiciel qu’en matière de marque ou de droits d’auteur. Selon l’article

L 335-2 du Code de la propriété intellectuelle, toute édition d’écrits en mépris des règles des

droits d’auteurs constitue un délit de contrefaçon.

Cela trouvera plusieurs applications en pratique. Par exemple, le fait de scanner les photos

d’un tiers sans son autorisation et de les mettre en ligne constitue un acte de contrefaçon108

.

Sera aussi considéré comme de la contrefaçon le fait de mettre en ligne des vidéos non visées

107

Dictionnaire de l’Académie française, V° « Contrefaçon » 108

CA Paris, CH.04B, 30 avril 2009, n°08/12047

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par le contrat d’édition passé entre l’auteur et l’éditeur, sans l’accord antérieur de l’auteur109

.

2) Les sanctions

263.- Comme cela fut précisé, la contrefaçon est un délit.

264.- En matière de droits d’auteur, toujours selon l’article L 335-2 du Code de la

propriété intellectuelle, la contrefaçon d’ouvrages publiés sera sanctionnée par trois ans

d’emprisonnement et de 300000 euros d’amendes. L’article dispose notamment que si ce délit

est commis en bande organisée, alors les peines encourues sont portées à cinq ans

d’emprisonnement et 500000 euros d’amende.

Ces sanctions sont assez sévères, ce qui est logique, l’objectif étant de dissuader les personnes

de passer à l’acte. Mais en pratique, ces peines sont rarement appliquées. Pour cause, des

sanctions plus spécifiques furent mêmes prévues avec la loi Hadopi 2110

, mais les résultats ne

furent pas fameux : peu d’internautes on été réellement sanctionnés, et la peine de suspension

d’abonnement à Internet fut même supprimée.

265.- Par conséquent, on pourrait se rassurer pour les livres numériques en comptant

sur la grande efficacité du Droit pour dissuader les opérateurs économiques de commettre

l’irréparable en téléchargeant illégalement les ebooks, mais il n’en est rien.

La solution reste donc dure à envisager. Peut être faudrait-il parvenir à rendre le

téléchargement légal plus attractif, mais cela n’est pas évident.

B) Le rôle des hébergeurs

1) Le sort réservé aux hébergeurs

266.- Les hébergeurs ne sont pas sortis indemne de la lutte contre le piratage.

267.- Pour s’en convaincre, il suffit d’examiner la jurisprudence.

La première affaire qui sera mentionnée111

fait état d’une société de production ayant réalisé

un documentaire dont la distribution par DVD et VOD fut confiée à une autre société.

109

CA Paris, Pôle 01 CH.04-26/03/10, n°09/12552 110

Loi n° 2009-669 du 12 juin 2009 favorisant la diffusion et la protection de la création sur internet 111

CA Paris, POLE 05 CH. 02, 9 avril 2010, n°08/09558

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Postérieurement, trois liens furent découverts sur Google, trois liens permettant d’accéder

gratuitement à l’œuvre en question. Le producteur et l’éditeur ont alors assigné Google Inc et

Google France, qui contestèrent leur responsabilité. La cour d’appel décida de rappeler que

les hébergeurs bénéficient d’une protection spéciale mais en l’espèce, leur responsabilité fut

engagée car ils avaient été avertis de l’existence de ces vidéos mais n’avaient rien fait pour les

retirer.

Cette position fut renouvelée un an plus tard112

.

2) Les conclusions à en tirer

268.- Ces décisions de justice ne sont pas anodines.

269.- Ces positions démontrent une volonté de vouloir lutter contre la passivité des

hébergeurs dans ce type d’opération, à condition toutefois que la procédure de notification de

contenus illicites soit respectée113

. Il s’agit d’un nouveau moyen de lutte contre la contrefaçon

des œuvres de l’esprit disponibles sur la toile.

Section II : L’exception légale

270.- Une alternative au piratage fut rendue possible avec l’exception de copie privée

(I) qui s’appliquera désormais aux livres numériques (II).

I) L’exception de copie privée

271.- Cette exception (A) peut s’appliquer à condition de respecter certaines règles

(B).

A) La notion d’exception de copie privée

1) Définition

272.- Ceci constitue une atténuation légale à la notion de contrefaçon.

112

CA Paris, POLE 05 CH.02, 14 janvier 2011, n°09/11729 113

M. PRUD’HOMME et V. BENSOUSSAN-BRULE, Responsabilité des hébergeurs : la procédure de

notification de contenus illicites strictement encadrée par le juge, Gazette du Palais, n°24, p.11, 24 janvier 2009

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80

273.- Selon l’article L 122-5, 2° du Code de la propriété intellectuelle, une fois que

l’œuvre a été divulguée, l’auteur ne peut interdire « les copies ou reproductions réalisées à

partir d'une source licite et strictement réservées à l'usage privé du copiste et non destinées à

une utilisation collective, à l'exception des copies des œuvres d'art destinées à être utilisées

pour des fins identiques à celles pour lesquelles l'œuvre originale a été créée et des copies d'un

logiciel autres que la copie de sauvegarde établie dans les conditions prévues au II de l'article

L 122-6-1 ainsi que des copies ou des reproductions d'une base de données électronique ».

Un consommateur peut donc réaliser des copies d’une œuvre en toute légalité à partir du

moment où son acquisition fut légale.

2) Une exception au monopole de l’auteur

274.- Pour rappel, la propriété littéraire et artistique confère un monopole

d’exploitation à l’auteur sur son œuvre.

275.- Avec cette exception de copie privée, une véritable exception au monopole de

l’auteur fut créée. La justification de ce propos n’est autre que cette exception permet à toute

personne ayant la qualité de copiste de reproduire une œuvre protégée par le droit d’auteur

sans avoir besoin de recueillir préalablement l’accord du titulaire des droits sur l’œuvre. Cela

résulte de la seule lecture de l’article L 122-5 du Code de la propriété intellectuelle. Le droit

de propriété de l’acquéreur final l’emporte donc sur le droit de propriété littéraire et artistique

de l’auteur.

B) Des conditions à respecter

1) La nécessité d’une contrepartie financière

276.- L’argent étant le nerf de la guerre, l’impératif du respect d’une telle condition

n’a rien de très surprenant.

277.- La contrepartie financière prendra la forme d’une redevance, la redevance pour

copie privée, qui pèse sur les fabricants et importateurs de supports vierges en France114

.

Ensuite, le montant de cette taxe sera répercuté sur les consommateurs. Son montant est

114

http://www.copieprivee.org/Dois-je-payer-la-remuneration-pour,122.html

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directement perçu auprès des commerçants par des sociétés de gestion collective.

278.- Donc, si cette exception de copie privée est autorisée pour diverses raisons

telles que l’absolutisme du droit de propriété ou encore le droit au respect de la vie privée, il

n’en demeure pas moins que les auteurs ont tout de même droit à une rémunération.

2) Une utilisation limitée à un cercle restreint

279.- Le copiste ne doit pas faire un usage collectif de sa copie privée.

280.- Le copiste se doit de réserver la copie qu’il veut effectuer au cercle de la famille.

Il s’agit, en réalité, d’une vision de la famille assez étendue car ce cercle est définit comme

étant un groupe restreint de personnes ayant entre elles des liens de famille ou même

d’amitié115

.

281.- Mais si la copie échappe à ce cercle au profit d’un cercle plus large, ou dans le

cadre d’un usage professionnel, alors la qualification de copie privée ne pourra être retenue116

.

282.- Enfin, si la copie a pour unique but d’être échangée, alors on ne pourra pas non

plus la qualifier de copie privée, le critère d’usage privé du copiste n’étant pas rempli117

.

283.- Par conséquent, le copiste ne pourra pas faire tout ce qu’il souhaite avec une

copie qu’il a réalisé en se fondant sur son droit à l’exception de copie privée.

II) L’influence du numérique

284.- Les ouvrages électroniques vont être concernés par cette règle (A), et une

articulation délicate avec les mesures techniques de protection risque d’avoir lieu (B).

115

CA Montpellier, 3ème

chambre correctionnelle, 10 mars 2005 116

Cass. 1re

civ., 20 janvier 1969 117

CA Nîmes, 30 novembre 2004

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A) Les livres numériques désormais concernés

1) L’exception de copie privée et les ouvrages électroniques

285.- Ceci est une conséquence de la numérisation des ouvrages.

286.- Avec la dématérialisation des œuvres littéraires, l’exception de copie privée

concernera également ce secteur. Auparavant, comme cela a pu être évoqué, l’exception de

copie privée concernait surtout les œuvres déjà présentes sous format numérique. Cette

pratique concernait donc surtout des créations de l’esprit telles que des œuvres

cinématographiques, par exemple, ou des œuvres musicales.

2) Une modernisation des techniques à la clé

287.- Les supports changent, les techniques de copie aussi.

288.- Avec les ouvrages imprimés, l’exception de copie privée se concrétisait par la

pratique des photocopies. Cela faisait déjà peur, d’ailleurs, aux auteurs et éditeurs, qui

voyaient dans ces pratiques le danger que pouvait constituer l’abus de photocopies, ce qui

générait la mention d’avertissements dans les livres sur le danger économique que représente

l’abus de la pratique des photocopies des ouvrages.

289.- Désormais, cela prendra d’autres formes. Avec les ebooks, en effet, nulle

question de photocopie. Face à l’évolution des supports et l’avènement du numérique,

l’exception de copie privée se manifestera de la même manière que pour les œuvres musicales

ou cinématographiques. Désormais, l’utilisateur final, autrement dit, le lecteur, ne

photocopiera plus des pages de son exemplaire, mais pourra réaliser des copies de l’ouvrage

avec son ordinateur, et ces copies pourront très bien être envoyées par mail ou transporter sur

une clé USB ou un disque dur externe. Il est vrai que cela est possible avec un ouvrage

imprimé, mais pour pouvoir atteindre un tel résultat, un travail de longue haleine aurait été

nécessaire de manière préalable pour pouvoir copier l’ensemble de l’œuvre puisqu’il aurait

fallu scanner l’ensemble des pages, ce qui est légèrement dissuadant.

290.- Par conséquent, si les supports évoluent, les techniques aussi.

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B) La difficile articulation avec les mesures techniques de protection

1) Définition

291.- On les appelle notamment les MTP.

292.- Les MTP sont des moyens techniques permettant aux titulaires des droits

d’auteur sur une œuvre d’en assurer la protection en empêchant ou en limitant les actions

qu’ils n’auraient pas autorisées. Cependant, ces mesures ne doivent pas être trop poussées au

point de ne pas rendre possible la mise en œuvre effective de l’interopérabilité. Le Code de la

propriété intellectuelle, à son article L 331-5, définit ainsi les mesures techniques de

protection.

293.- Sont considérées comme des MTP des dispositifs anti-copie. Mais tel ne sera

pas le cas pour un protocole, un format, ou encore une méthode de brouillage, de

transformation ou de cryptage118

.

2) La coexistence entre les MTP et l’exception de copie privée

294.- Théoriquement, la mise en place de mesures techniques de protection

n’empêche la mise en œuvre de l’exception de copie privée.

295.- La possibilité de cette coexistence est d’ailleurs affirmée par le Code de la

propriété intellectuelle, à son article L 331-6, qui dispose que le bénéfice de cette exception ne

disparaît pas pour autant.

Seulement, en pratique, des difficultés surgissent. Il arrive parfois que des MTP limitent

l’exception dont bénéficie normalement le consommateur. Cela se manifestera par

l’impossibilité de copier le contenu d’un DVD, par exemple. La conséquence de cela se

trouve en une parade légale, prévue par l’article L 331-10 du Code de la propriété

intellectuelle, qui dispose qu’il est nécessaire d’informer l’utilisateur en cas de MTP pouvant

empêcher ou limiter la mise en œuvre de son exception de copie privée.

296.- Par conséquent, la protection de l’œuvre de l’auteur aura tendance à être

118

D. FOREST, Droit d’auteur et droits voisins, Gualino, 2010

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privilégiée aux droits des consommateurs. La seule contrepartie prévue par le législateur à

cette perte de droit sera un renforcement du droit à l’information préalable à l’achat.

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Chapitre II : La protection contractuelle

297.- Il s’agit d’un mode de protection qui pourrait être envisagé.

298.- Ce concept aux intérêts divers (Section I) pourrait être mis en place par le

mécanisme des contrats d’adhésions (Section II).

Section I : Une recherche de protection par le contrat

299.- Cette idée qui mérite quelques explications (I) est encore assez peu développée

(II).

I) Quelques éclaircissements

300.- L’utilisation du contrat (A) contribuerait à un moyen de protection

supplémentaire pour les titulaires de droits de propriété littéraire et artistique (B).

A) L’utilisation de la méthode contractuelle

1) La notion de contrat

301.- Il est nécessaire de se souvenir qu’un contrat est un accord de volonté.

302.- Selon l’article 1101 du Code civil, un contrat est une convention par laquelle

une personne s’engage envers un contractant à donner, faire ou ne pas faire quelque chose.

Cet acte juridique sera créateur d’obligations entre les personnes.

2) L’utilité du contrat

303.- L’utilisation du contrat ne serait pas sans intérêt.

304.- L’article 1134 du Code civil précise que le contrat est la loi des parties. Un

contrat a donc une valeur équivalente à la loi inter partes, ce qui signifie que les parties auront

l’obligation de le respecter. En cas de non respect d’un contrat, la partie fautive sera

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susceptible d’engager sa responsabilité civile contractuelle, selon l’article 1147 du Code civil.

305.- L’autre intérêt du contrat réside, sur les fondements des articles 1134 et 1135 du

Code civil, dans l’obligation faite aux parties de l’exécuter de bonne foi, sous peine, là encore,

de voir leur responsabilité civile contractuelle engagée.

Les acheteurs seraient donc tenus d’exécuter leurs obligations à la lettre et de bonne foi. Cela

pourrait être utile, par exemple, pour délimiter clairement la limite à ne pas franchir dans

l’utilisation de l’exception de copie privée.

B) Un mécanisme de protection supplémentaire

1) Le contrat s’ajouterait à la loi

306.- Un nouvel outil viendrait s’ajouter aux règles existantes.

307.- En matière de propriété littéraire et artistique, comme cela fut déjà mentionné, il

existe une protection légale. Cela se traduit par l’usage du délit de contrefaçon, en vertu de

l’application de l’article L 335-2 du Code de la propriété intellectuelle en matière de propriété

intellectuelle. En ce qui concerne le téléchargement illégal, le délit de contrefaçon existe

également, et cet acte constitue une violation des droits d’auteur qui ne sont pas rémunérés.

Concrètement, la HADOPI se charge de la surveillance de ces actes sur le net, elle

commencera par envoyer des avertissements aux internautes pris en flagrant délit, et si le

coupable récidive après un deuxième avertissement, alors les sanctions pénales seront

envisageables. Tous ces procédés se sont révélés d’une prodigieuse inefficacité.

L’obligation fut aussi faite aux hébergeurs de ne pas rester inactif dans cette lutte, en

supprimant les contenus illégaux qui leur ont été signalés sous peine d’engager leur

responsabilité pénale.

Face à ces mesures peut être plus symboliques qu’autre chose, l’instauration d’un régime

contractuel de protection venant se superposer aux règles légales existantes pourrait être un

bon moyen de rappeler au consommateur ces obligations légales. En résumé, il conviendrait

de mettre en place un système de contrat présent à chaque vente pour remémorer l’ensemble

des dispositions légales à l’acheteur.

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2) Un moyen d’information plus opportun

308.- La nature plus forte de l’engagement se trouve sur le terrain du symbole.

309.- Le contrat symbolise la parole donnée, et le respect de la parole donnée est une

valeur morale très ancrée dans notre société. Malgré l’adage « Nul n’est censé ignorer la loi »,

bon nombre de justiciables n’ont pas la curiosité nécessaire pour aller se renseigner, ce qui

accentue l’idée de la mise en place d’un rappel des règles légales sous forme contractuelle.

L’avantage de ce système serait que les consommateurs ne pourraient soulever leur

méconnaissance de l’acte en question car ils l’auraient accepté. La seule hypothèse d’absence

de connaissance du contenu serait de ne pas lire le contrat avant de l’accepter ou alors d’être

de mauvaise foi en soulevant l’argument du caractère incompréhensible ou peu clair du

contrat.

II) Un concept peu pratiqué

310.- Cette protection encore peu développée (A) pourrait trouver une application

dans le cadre des œuvres numériques (B).

A) Une protection peu développée

1) Une absence générale de protection contractuelle

311.- Ce mode de protection est encore trop rare.

312.- La technique de protection contractuelle n’est pas utilisée par le monde de

l’édition. La seule protection dispensée aux auteurs d’œuvres de l’esprit ainsi qu’aux éditeurs

n’est autre que la protection légale. Lorsqu’il est fait mention d’une absence de protection

contractuelle, cela fait référence à une absence de protection envers les utilisateurs finaux que

sont les lecteurs ou consommateurs. Cela ne vise pas la relation édité-éditeur qui connait une

protection contractuelle de par les suites du contrat d’édition lui-même, une obligation de

non-concurrence pesant sur l’auteur, ce qui découle naturellement de l’article 1134 du Code

civil qui impose une exécution de bonne foi des contrats. Ainsi, un auteur ne pourrait pas

s’auto-publier s’il a cédé ses droits à un éditeur pour l’exploitation numérique de son œuvre

sinon, cela pourrait constituer une forme de concurrence déloyale.

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2) Le cas particulier des logiciels

313.- Le domaine des logiciels est actuellement le seul secteur proposant des modèles

de ce type de protection.

314.- Le seul exemple notable se trouve être les licences d’utilisations que l’on doit

accepter avant de pouvoir terminer l’installation d’un logiciel. L’intérêt que présentent ces

licences est notable car ce sont des contrats. Bien qu’ayant un effet inter partes, ces licences

d’utilisations stipulent ce qui est autorisé et ce qui ne l’est pas dans l’usage que l’utilisateur

souhaiterait faire du logiciel. Il conviendrait de s’en inspirer.

B) L’absence de contrat dans le cadre des œuvres numériques

1) Le possible modèle des licences d’utilisation

315.- Avant d’inventer de nouveaux procédés, s’inspirer de l’existant peut s’avérer

grandement utile.

316.- Etant donné que l’ère du numérique favorise la création des ebooks, il

conviendrait de s’inspirer du modèle des licences d’utilisations de logiciels. Ces licences sont

des contrats. Ces actes juridiques sont appliqués dans la sphère de l’immatériel. Si cette

technique était transposée au monde de l’édition numérique et qu’un contrat précisant les

modalités d’utilisation de l’œuvre achetée par le consommateur devrait être conclu avant de

concrétiser l’achat, peut être que cela permettrait de changer les choses. Et pour compléter le

dispositif, un rappel des dispositions légales en la matière devrait être inclus dans ce contrat,

contrat qui pourrait prendre la forme de conditions générales de vente par exemple.

2) Le passage de l’effet relatif à l’effet général des contrats

317.- Passer d’un effet inter partes à un effet erga omnes des conventions serait un

élément important.

318.- Ce passage permettrait de rendre l’acheteur débiteur de son obligation de ne pas

faire qui consiste principalement, pour rappel, en l’obligation de s’abstenir de réaliser des

actes de contrefaçon, envers un plus grand nombre de créanciers que le seul éditeur ou auteur

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dans le cadre d’une auto-publication qui lui a vendu le livre. Si le contrat a simplement un

effet inter partes, l’acheteur sera juste tenu envers l’éditeur ou l’acheteur auprès duquel le

contrat de vente fut réalisé, mais pas envers les autres. L’intérêt serait donc de faire conclure

ces contrats entre les acheteurs d’une part et des organismes représentatifs des auteurs et des

éditeurs d’autres parts, de manière à ce qu’un client se trouve engagé envers tous les auteurs

et les éditeurs en ne signant qu’un seul contrat à l’occasion de l’achat d’un livre ou d’une

revue électronique. Ainsi, le passage d’un effet relatif à un effet général des contrats serait

réalisé.

Quant à tous ceux qui n’achèteront jamais de ebooks, ils ne seront pas concernés par ces

accords, mais les dispositions légales s’appliqueront.

Section II : Une utilisation des contrats d’adhésions

319.- Le droit de la consommation pourrait servir de modèle à un tel projet (I) qui

aurait plusieurs avantages dans le secteur numérique (II).

I) Le modèle des contrats d’adhésion

320.- Ces contrats (A) rendraient réalisable cette idée (B).

A) La notion de contrat d’adhésion

1) Des évolutions quant à la dénomination de ces contrats

321.- Le contrat d’adhésion est un outil bien connu en droit français.

322.- La notion même de contrat d’adhésion est apparue en France en 1973119

. Cette

appellation peut tendre à refléter l’idée d’un contrat de dépendance entre les parties, ou plutôt

de domination. La partie dominée serait donc la partie qui adhère au contrat. Ces contrats

peuvent avoir lieu entre professionnels, bien que leur utilisation se fasse surtout entre des

professionnels et des consommateurs.

La volonté de changer l’appellation de ces actes juridiques s’est également fait ressentir, avec

119

G. BERLIOZ, Le contrat d’adhésion, Thèse Paris 1, LGDJ, 1973.

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certains auteurs ayant parlé de contrats de consommation120

. Ceci révèle une volonté de

marquer moins fortement la domination d’un contractant sur l’autre. Néanmoins, il est encore

d’usage de parler de contrat d’adhésion, l’appellation contrat de consommation étant plus

rarement employée.

2) L’intérêt de ces contrats

323.- L’utilisation de ces contrats comporte des avantages et des inconvénients.

324.- L’avantage ou l’inconvénient des contrats d’adhésion est qu’ils ne laissent

aucune marge de négociation. Le seul choix possible réside en la capacité d’accepter ou de

refuser le contrat. Ceci est donc un inconvénient du point de vue des consommateurs, mais cet

inconvénient se transforme en avantage certains pour les professionnels, qui sont libres

d’imposer l’ensemble de leurs conditions à qui les acceptent sans perdre de temps en

négociations diverses et variées.

325.- Donc, l’avantage des contrats d’adhésion pour le professionnel consiste

essentiellement dans le gain de temps qu’ils font gagner en évitant de passer par une phase de

négociations précontractuelles avant de pouvoir conclure un contrat.

B) Les conséquences d’une utilisation des contrats d’adhésion

1) Envers les consommateurs

326.- Les contrats d’adhésion seraient une bonne technique pour promouvoir la

protection contractuelle.

327.- La mise en place de contrats d’adhésion pourrait servir à la réalisation de la

protection contractuelle dont il fut mention. De la même façon que pour les contrats

d’utilisation des logiciels, instaurer des contrats de ce type rendrait possible un tel projet.

Ensuite, les consommateurs auraient le choix entre signer et accepter l’acte si ses dispositions

lui conviennent ou refuser l’acte et donc, a fortiori, l’achat de l’œuvre numérique, en cas de

désaccord.

120

G. RAYMOND, Fasc. 800 : CONTRATS DE CONSOMMATION, JurisClasseur Concurrence –

Consommation, 15 mai 2009

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2) Avec les hébergeurs

328.- L’hypothèse du contrat d’adhésion entre professionnel est ici visée.

329.- Les organismes professionnels chargés de représenter auteurs et éditeurs

devraient songer à passer de tels contrats avec les hébergeurs, dans le but de les contraindre à

effectuer un contrôle plus poussés des contenus auxquels ils donnent accès et de supprimer ou

de bloquer l’ensemble des sites connus pouvant rendre possible le téléchargement illégal de

ebooks.

Cependant, en l’espèce, la technique des contrats d’adhésion ne serait sans doute pas

appropriée, les hébergeurs n’ayant rien à attendre en retour du monde de l’édition.

Néanmoins, des contrats de coopération pourraient se révéler être plus efficace afin d’inciter

les hébergeurs dans leur tâche de contrôle.

II) Les objectifs poursuivis en matière numérique

330.- L’impact psychologique sur les consommateurs (A) pourrait permettre une

évolution (B).

A) L’impact psychologique de la pratique contractuelle

1) La recherche d’une responsabilisation des consommateurs

331.- La mise en place d’un tel système permet de rechercher une responsabilisation

des acteurs.

332.- Par le contrat, une personne s’engage de manière volontaire. Tout engagement

suppose d’être respecter, au risque de voir engager sa responsabilité. Justement, la recherche

de responsabilisation des consommateurs se traduit par la volonté de ne pas engager sa

responsabilité envers son contractant.

La responsabilisation des acheteurs peut donc passer par le contrat.

2) Un outil comminatoire

333.- Le contrat devient un outil menaçant.

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334.- Il constitue une menace supplémentaire planant au dessus de la tête des

consommateurs. En plus de leur responsabilité pénale, ils pourraient aussi voir leur

responsabilité civile contractuelle engagée envers les syndicats d’auteurs et d’éditeurs qui

pourraient agir de manière représentative de leurs membres qui auraient été lésés dans leurs

droits. Cette action au civile, si les organismes représentatifs se prêteraient vraiment au jeu,

pourrait être plus efficace que les actions au pénales, encore trop rare.

Cela permettrait donc de contrôler l’usage de l’exception de copie privée fait par les acheteurs

ainsi que d’engager leur responsabilité en cas d’actes de contrefaçons ultérieurs.

Toutefois, une faille demeure dans ce système : le nombre de personnes concernées par la

protection contractuelle car les personnes signataires de ces contrats seraient visées par un tel

dispositif, mais pas les autres.

B) Redonner confiance aux professionnels

1) Un but pédagogique

335.- L’objectif pédagogique concerne essentiellement les consommateurs.

336.- Néanmoins, si les consommateurs comprennent les dangers de la contrefaçon, à

terme, ce serait comme pour les atteintes à l’environnement. Une prise de conscience

généralisée pourrait mettre un terme à ces pratiques.

2) Un objectif économique

337.- Il conviendrait de donner confiance aux édités et éditeurs en l’économie

numérique.

338.- Si le facteur perte de rémunération à cause des téléchargements illégaux

diminue, il est certain que les détenteurs de droits sur l’œuvre auront moins peur de mettre

leurs œuvres en ligne, ce qui favoriserait l’essor de ce secteur encore balbutiant.

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Titre II : Le prix de l’œuvre

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339.- Le prix de l’œuvre est une question épineuse.

340.- Deux mécanismes de fixation du prix coexistent. Le premier est un mécanisme

traditionnel (Chapitre I) tandis que le second est propre à l’œuvre numérique (Chapitre II).

Chapitre I : Le mécanisme classique

341.- Il s’agit des normes de fixation du prix des œuvres imprimées.

342.- Ces techniques sont fixées par une loi (Section I) qui se veut d’une nature

protective (Section II).

Section I : Un corporatisme anticoncurrentiel

343.- La norme étudiée (I) connait plusieurs justifications (II).

I) Analyse de la loi Lang

344.- La mise en place d’un prix unique (A) vise divers types d’œuvres (B).

A) La politique du prix unique

1) Présentation de cette loi

345.- Le marché du livre imprimé est soumis à une politique de prix réglementé.

346.- La loi n° 81-766 du 10 août 1981 relative au prix du livre, aussi connue sous

l’appellation de loi Lang, entra en vigueur le 1er

janvier 1982.

Cette loi poursuit trois objectifs principaux121

:

Vendre le livre à un même prix sur le territoire national afin de rendre possible

l’égalité des citoyens devant le livre.

Permettre le maintient d’un réseau de distribution décentralisé assez dense, même dans

121

http://www.culturecommunication.gouv.fr/Disciplines-et-secteurs/Livre-et-lecture/Economie-du-livre/Prix-

du-livre

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95

les zones défavorisées.

Enfin, soutenir la création et l’édition pour les ouvrages « difficiles ».

La loi Lang a donc été promulguée dans l’espoir de rendre possible la réalisation de ces trois

objectifs.

2) La mise en œuvre de ce texte légal

347.- L’application de cette loi s’opère par le respect de certains critères.

348.- Tout d’abord, la loi Lang impose aux éditeurs ou aux importateurs de fixer un

prix de vente du livre au public. Ensuite, les détaillants, autrement dit, les libraires et grandes

surfaces, pourront vendre les livres à un prix compris entre 95% et 100% du prix initialement

fixé par l’importateur ou l’éditeur, ce qui laisse donc au détaillant une marge de manœuvre de

5%.

349.- Mais des exceptions sont prévues122

. Tout d’abord, l’article 10 de ladite loi

consacre des dispositions d’application particulières pour les départements d’Outre-Mer,

visant à permettre aux libraires de répercuter sur les prix des livres des coûts supérieurs à la

métropole, afin de tenir compte du fait des frais d’approches et du coût de la vie dans ces

lieux. Une autre exception porte sur les ventes de livres scolaires aux établissements scolaires

et aux associations de parents d’élèves, ainsi qu’aux ventes à certaines personnes morales et

collectivités, plafonnées à 9%. Enfin, la dernière exception concerne les ventes de livre édités

ou importés depuis plus de deux ans, et dont le dernier approvisionnement date d’une durée

supérieure à six mois.

350.- Quoi qu’il en soit, une critique peut être soulevée à son encontre : bien que les

objectifs poursuivis soit honorables, cette loi parait attentatoire au principe général du Droit

ou PGD qu’est la liberté du commerce et de l’industrie, ainsi qu’à l’ordonnance du 1er

décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence. La concurrence ne peut plus

être pratiquée entre les libraires. Pire, cette loi instaure une pratique de prix imposés, en totale

contradiction avec l’article L 442-5 du Code de commerce qui prohibe, pourtant, cette

pratique, qui constitue une restriction verticale de concurrence.

122

Ibid

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96

B) Les œuvres visées par le texte

1) La liste des œuvres

351.- Cette loi concerne seulement certains types d’œuvres de l’esprit.

352.- La particularité de la loi de 1981 est qu’elle ne donne pas une définition du livre.

Aucune définition du livre n’est délivrée. La définition retenue fut finalement celle donnée

par la Direction générale des impôts dans son instruction du 30 décembre 1971 (3C-14-71) :

« Un livre est un ensemble imprimé, illustré ou non, publié sous un titre ayant pour objet la

reproduction d'une œuvre de l'esprit d'un ou plusieurs auteurs en vue de l'enseignement, de la

diffusion de la pensée et de la culture.

Cet ensemble peut être présenté sous la forme d'éléments imprimés, assemblés ou réunis par

tout procédé, sous réserve que ces éléments aient le même objet et que leur réunion soit

nécessaire à l'unité de l'œuvre. Ils ne peuvent faire l'objet d'une vente séparée que s'ils sont

destinés à former un ensemble ou s'ils en constituent la mise à jour. Cet ensemble conserve la

nature de livre lorsque la surface cumulée des espaces consacrés à la publicité et des blancs

intégrés au texte en vue de l'utilisation par le lecteur est au plus égale au tiers de la surface

totale de l'ensemble, abstraction faite de la reliure ou de tout autre procédé équivalent. ». Suite

à cette définition, divers objets furent considérés comme étant des livres, tels que les

dictionnaires, les encyclopédies, les livres d’images, les ouvrages traitant de lettres, de science

ou d’art, ou encore les guides touristiques. Mais d’autres biens meubles tels que les almanachs,

les annuaires, les catalogues, les albums à colorier ou même les partitions musicales123

ne

furent pas reconnus comme étant des livres.

2) L’absence du livre numérique

353.- Ceci n’est que la conséquence du progrès.

354.- On ne pouvait, en effet, penser à englober le livre numérique dans la définition

du livre donnée par la Direction générale des impôts en 1971 ni dans la loi de 1981 si elle

avait tenté de définir le livre pour la simple et bonne raison que le livre électronique n’existait

pas encore à cette date. L’instruction ne faisant référence qu’aux livres imprimés, il apparait

123

B. BOULOC, Vente commerciale. Prix du livre. Partitions musicales (non), RTD com. 2010, p. 775

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97

impossible de rattacher le livre numérique à cette définition.

II) Les justifications de cette loi

355.- Cette loi permet de protéger les intérêts des auteurs (A) et des éditeurs (B).

A) La protection des auteurs

1) Le moyen d’assurer un revenu minimum aux auteurs

356.- Ceci est une conséquence de la loi du 10 août 1981.

357.- En dehors des exceptions prévues par le texte, le libraire n’aura qu’une marge

de 5% dans la fixation du prix de vente des livres. Ce procédé anti concurrentiel à quand

même des avantages. L’un de ces avantages concerne les édités. Si les édités sont rémunérés

de manière proportionnelle aux ventes de leurs œuvres, alors il est clair que si les libraires ne

peuvent vendre les livres en dessous d’un certain prix, une certaine sécurité financière sera

créée au profit du créateur de l’œuvre.

Par conséquent, une telle mesure présente une garantie financière pour l’auteur.

2) Le moyen de protéger l’image de la valeur de l’œuvre

358.- Les consommateurs ont souvent tendance à penser que le prix est gage de

qualité.

359.- Par cette loi, les libraires ne peuvent se livrer à une guerre des prix. L’autre

avantage de ce bridage de l’activité commerciale, en plus d’assurer un revenu minimum aux

auteurs rémunérés de manière proportionnelle, est d’empêcher la qualité d’une œuvre de se

dégrader dans l’esprit des acheteurs potentiels. Un livre valant 20 euros qui ne serait vendu

qu’à un prix nettement inférieur pourrait passer pour un mauvais ouvrage, à l’image des DVD

vendus à prix très bas alors que les films sont assez récents : la qualité espérée n’est pas haute.

Donc, cette technique permet à l’auteur de ne pas voir son image de marque dégradée avec

une valeur pouvant donner une piètre image de son travail.

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B) La protection des intérêts des éditeurs

1) L’assurance de contrôler leur politique de vente

360.- Avec la loi Lang, les éditeurs gardent le contrôle des ventes.

361.- En décidant du prix de vente de tel ou tel ouvrage, ils pourront contrôler le débit

d’écoulement de leurs stocks. L’éditeur à la faculté, en effet, de modifier les prix à tout

moment et les détaillants doivent respecter les décisions prises. Cela permet donc à un éditeur

désireux de relancer la vente d’un ouvrage de baisser son prix de vente afin de diminuer les

stocks.

2) Les libraires, simples auxiliaires des éditeurs

362.- Les détaillants se retrouvent comme de simples auxiliaires des éditeurs.

363.- Cette vision des choses se justifie par le peu de liberté laissé aux libraires dans

leur politique tarifaire. En poussant l’analyse plus loin, il serait même possible de comparer

les libraires à des commissionnaires au sens de l’article L 132-1 du Code de commerce dans le

sens ou le libraire vend le bien au prix fixé par l’éditeur.

Section II : Une loi de protection

364.- Cette loi de protection des libraires détaillants (I) révèle une volonté de

préserver le petit commerce (II).

I) La protection des libraires détaillants

365.- Les éditeurs sont tenus de respecter certaines obligations envers les détaillants

(A), les détaillants dont les intérêts pécuniaires n’ont pas été négligés (B).

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99

A) Les intérêts des libraires non négligés

1) Les éditeurs débiteurs d’obligations envers les détaillants

366.- Les éditeurs sont tenus par certaines obligations.

367.- En réalité, ce ne sont pas des obligations mais une obligation. Ils sont obligés

d’accorder au détaillant une remise prenant en compte ses efforts quant à la diffusion du livre.

Le montant de la remise devra dépasser celui des réductions liées à la différence des volumes

des commandes.

2) Une loi destinée à favoriser l’activité économique des détaillants

368.- Aussi surprenant que cela puisse paraître, il semble que ce soit également l’un

des objectifs poursuivi par la loi de 1981.

369.- La concurrence ne favorisant pas toujours les opérateurs économiques les plus

faibles, en supprimant la possibilité concurrentielle par les prix, la survie des détaillants fut

encouragée.

B) La prise en compte de l’élément comptable

1) Les avantages financiers de cette loi

370.- La loi de 1981 sur le prix du livre a notamment eu des conséquences financières

bénéfiques pour les détaillants.

371.- Des études postérieures ont révélé que ce dispositif légal a permis d’entraîner

un processus économique bénéfique pour les libraires. Il aurait ainsi permis une restauration

des marges des libraires124

.

124

E. ARCHAMBAULT et J. LALLEMENT, L’évolution des librairies et le prix du livre, Ministère de la culture,

département des études et de la prospective, La Documentation Française, Paris, 1987.

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2) Un intérêt partagé à l’échelle européenne

372.- La France n’est pas le seul Etat européen à avoir adopté ce type de disposition.

373.- La règle sur le prix fixe du livre existait depuis 1888 en Allemagne. Ce système

existe également en Grèce depuis 1977, ou encore au Portugal depuis une loi de 1996.

Néanmoins, d’autres Etats tels que l’Irlande, la Suède ou encore la Suisse ne le pratiquent

pas125

.

II) Une protection du petit commerce

374.- L’objectif de protection du petit commerce face aux grands distributeurs (A)

profite aussi aux consommateurs (B).

A) La protection des détaillants spécialisés face aux distributeurs généralistes

1) La loi de 1981 s’impose à tous

375.- La loi sur le prix du livre ne s’impose pas qu’aux détaillants spécialisés.

376.- En réalité, cette loi s’applique également pour les grands distributeurs, ou

autrement dit, les distributeurs généralistes. Ces enseignes de distribution sont donc

concernées au même titre que les détaillants, qui sont des distributeurs spécialisés. Le marché

du livre imprimé est donc un marché réglementé.

2) Une protection des détaillants face aux pratiques agressives des grands

distributeurs

377.- Cette loi instaure une assurance au profit des libraires spécialisés.

378.- Il s’agit d’une assurance survie. Si cette loi n’avait pas été votée, les prix

auraient été libres dans ce secteur, comme au sein des autres marchés, mais à terme, cela

aurait été nocif pour les libraires. Avec ces impératifs, la survie des libraires face aux grandes

125

http://www.culture.gouv.fr/culture/dll/prix-livre/prix-1.htm

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surfaces fut rendue possible dans le sens où les grands distributeurs n’ont pu pratiquer la

technique des prix prédateurs dans le seul objectif d’éliminer leurs concurrents libraires

spécialisés.

Par conséquent, cette loi a priori anti concurrentiel se révèle être pro concurrentiel car elle a

permis le maintient d’une concurrence entre les grands distributeurs et les détaillants

spécialisés.

B) Les consommateurs protégés

1) Le prix unique permet la valorisation de la culture

379.- Le premier objectif de cette loi est celui-ci.

380.- La culture s’en trouve valorisé dans le sens où le prix des livres restera

abordable, indistinctement du lieu où l’on se trouve. Donc, un consommateur parisien pourra

acheter un livre au même tarif qu’un lecteur de province. Il y a une uniformisation des prix du

livre.

2) Un objectif social

381.- Les livres sont une clé pour accéder à la culture.

382.- En permettant le maintient des détaillants spécialisés en plus des grands

distributeurs, les consommateurs pourront acheter des livres n’importe où sur le territoire, ce

qui est un symbole d’égalité dans l’accès à la culture. Or, l’égalité d’accès à la culture est un

moyen de lutte contre l’exclusion.

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Chapitre II : Les mécanismes encadrant le prix de l’œuvre numérique

383.- Le livre numérique n’est pas le livre imprimé.

384.- Face au vide législatif entourant le livre électronique, une nouvelle loi fut

adoptée (Section I) dont il convient d’étudier les effets (Section II).

Section I : L’évolution des dispositions légales

385.- Les nouvelles modalités de détermination du prix des œuvres numériques (I)

furent instaurées dans le cadre d’un contexte particulier (II).

I) La fixation du prix du livre numérique

386.- Cette loi au champ d’application précis (A) donne les modalités de fixation du

prix de l’œuvre numérique (B).

A) Le champ d’application de cette loi

1) Les livres numériques visés

387.- La loi n° 2011-590 du 26 mai 2011 relative au prix du livre numérique est

entrée en vigueur le 11 novembre 2011126

.

388.- Elle vise expressément les livres numériques à son article 1er

, qui dispose

que : « La présente loi s’applique au livre numérique lorsqu’il est une œuvre de l’esprit créée

par un ou plusieurs auteurs et qu’il est à la fois commercialisé sous sa forme numérique et

publié sous forme imprimée ou qu’il est, par son contenu et sa composition, susceptible d’être

imprimé, à l’exception des éléments accessoires propres à l’édition numérique ». La loi de

2011 s’applique donc à ce type de livres, et elle en donne une définition, ce que ne fait pas la

loi de 1981 avec les livres imprimés.

126

Voir annexe 2.

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103

2) Les livres numériques vendus sous forme de licences d’utilisation non

concernés

389.- La loi ne s’applique pas à toutes les formes de livres numériques.

390.- Une exception est posée par l’article 2 de cette loi qui dispose que les

dispositions ne s’appliquent pas aux livres numériques lorsque ceux-ci sont « intégrés dans

des offres proposées sous la forme de licences d’utilisation et associant à ces livres

numériques des contenus d’une autre nature et des fonctionnalités ». La suite de l’article

précise que ces œuvres doivent avoir été achetées dans un objectif autre que la revente. Cela

pourrait donc servir à permettre à des éditeurs de contenus spécialisés de proposer l’accès à

des contenus numériques à des institutions publiques ou privées sous la forme de licences

d’utilisation127

.

B) Les modalités de fixation du prix des œuvres numériques

1) L’éditeur garde le rôle principal

391.- Il n’y a pas de grand changement à ce niveau par rapport à la loi de 1981.

392.- A la lecture de l’article 2 de la loi du 26 mai 2011, qui dispose que « toute

personne établie en France qui édite un livre numérique dans le but de sa diffusion

commerciale en France est tenue de fixer un prix de vente au public pour tout type d’offre à

l’unité ou groupée », le rôle central de l’éditeur ressurgit. En réalité, il conviendrait plutôt de

dire que le rôle de l’éditeur demeure car il lui incombera encore de fixer le prix de vente au

public.

2) La prise en compte des modalités d’accès à l’œuvre

393.- Ce critère ne doit pas être sous-estimé.

394.- Ceci fait référence aux problèmes posés par les diverses offres d’œuvres

numériques. Comme cela fut mentionné, les ebooks peuvent être vendus de manière

127

M. DOURNES, Fasc. 1060 : CADRE ADMINISTRATIF ET JURIDIQUE. – Édition graphique, JurisClasseur

Civil Annexes, 13 avril 2012

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individuelle, mais il est également possible d’y avoir accès via une plateforme après la prise

d’un abonnement. Sur le modèle de Deezer avec la musique, des sociétés utilisent le concept

de l’abonnement mensuel pour un choix illimité de ebooks. Cela se voit avec la société

Américaine Scribd, ou un abonnement coûte 8 dollars par mois pour accéder à un catalogue

illimité de ebooks. Il y a aussi la plateforme Espagnole Nubico, pour 8,99 euros par mois, qui

donne droit à cinq titres mensuels. En France, la plateforme Youboox propose également ce

type de services.

Dans ce cas de figure, les éditeurs ne fixent pas le montant des abonnements. Cela peut même

dissuader certains éditeurs, craignant que le montant de l’offre ne dévalue leurs livres128

.

II) Le contexte d’instauration de la loi relative au prix du livre numérique

395.- Cette loi de circonstance (A) pourrait servir de base à l’élaboration d’un contrat

d’édition numérique (B).

A) Le comblement d’une carence

1) Le résultat de l’insuffisance de la loi du 10 août 1981

396.- La loi relative au prix du livre du 10 août 1981 a montré ses limites.

397.- En ne s’appliquant qu’aux livres imprimés, ses dispositions ne pouvaient être

étendues au livre électronique pourtant susceptible de poser les mêmes problématiques que le

livre imprimé. La loi sur le prix du livre numérique fut donc établie, pour pallier aux

éventuelles futures difficultés.

2) Une source d’inspiration pour le contrat d’édition numérique

398.- Se baser sur l’existant peut être une grande source d’inspiration.

399.- Le législateur a su s’adapter aux difficultés soulevées par le livre électronique

sur la question de la détermination de son prix. Cela devrait donc servir d’exemple dans la

recherche d’une adaptation du contrat d’édition au contrat d’édition numérique.

128

http://www.cnetfrance.fr/news/nubico-une-nouvelle-offre-d-ebooks-sur-abonnement-en-espagne-

39794984.htm

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B) Les principaux apports

1) Les différences entre la loi de 2011 et la loi de 1981

400.- Il y a peu de différences entre ces deux textes.

401.- En réalité, il n’y aurait même qu’une seule différence essentielle. La loi relative

au prix du livre évoque les vendeurs détaillants des ouvrages, mais la loi relative au prix du

livre numérique ne les mentionne pas. La loi du 26 mai 2011 a une visée plus large au sens où

elle s’applique envers tous revendeurs exerçant une activité de vente en ligne de ebooks à

destination d’acheteurs français, ce qui ne concerne pas que les libraires et les grands

distributeurs.

2) Les éléments notables

402.- Diverses avancées sont à relever.

403.- Tout d’abord, contrairement à la loi du 10 août 1981 qui ne précise rien à ce

sujet, la loi du 26 mai 2011 énonce, à son article 6, la nécessité de respecter certains principes

quant à la rémunération des auteurs rémunérés de façon proportionnelle dont les œuvres sont

vendues en ligne : « L’article L. 132-5 du Code de la propriété intellectuelle est complété par

un alinéa ainsi rédigé : « Le contrat d’édition garantit aux auteurs, lors de la

commercialisation ou de la diffusion d’un livre numérique, que la rémunération résultant de

l’exploitation de ce livre est juste et équitable. L’éditeur rend compte à l’auteur du calcul de

cette rémunération de façon explicite et transparente » », ce qui n’est pas anodin car cet article

de la loi est venu modifier l’article L 135-2 du Code de la propriété intellectuelle, montrant

une véritable prise en compte des intérêts des auteurs129

.

Un dernier élément assez curieux à relever dans cette loi est l’originalité de son article 10,

venant valider des permis de construire. Il semblerait que ce type de disposition soir un

cavalier législatif étant donné l’absence de lien avec le sujet de la loi.

129

F. POLLAUD-DULIAND, Loi n° 2011-590 du 26 mai 2011 relative au prix du livre numérique, RTD com.

2011, p. 556

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Section II : Les effets de la loi du 26 mai 2011

404.- Cette loi pose plusieurs obligations (I) et présente également diverses

particularités (II).

I) Les obligations générées par la loi

405.- L’éditeur se voit imposé certaines choses (A) et des obligations envers le

consommateur sont également créées (B).

A) Les obligations de l’éditeur

1) L’obligation de fixer le prix

406.- Ceci est la première obligation que cette loi impose à l’éditeur.

407.- Il lui appartiendra, de la même manière que pour les livres imprimés, de fixer le

prix de vente de l’œuvre au public. Cela est également le cas pour les offres groupées.

Cependant, dans le cas des abonnements permettant d’avoir accès à plusieurs ebooks au choix

ou à un nombre illimité de livres électroniques en contrepartie du paiement de l’abonnement,

des difficultés d’applications peuvent survenir. La solution serait de considérer que ces

plateformes proposent des ventes groupées, ce qui permettrait à l’éditeur de fixer les prix de

vente de ces ouvrages. Seulement, cela reviendrait à dire que ce sont les éditeurs qui

contrôlent les prix de vente, et donc, directement, le coût des abonnements. A moins que le

montant des abonnements soit librement fixé par la société gérant la plateforme, mais il serait

la contrepartie indirecte des prix imposés par les éditeurs.

2) Le développement d’une base de données descriptive

408.- La nécessité de cette réalisation ne fut pas imposer directement par la loi

relative au prix du livre numérique.

409.- Elle fut rendue obligatoire par son décret d’application du 10 novembre 2011.

Son article 3 impose à l’éditeur de créer une base de données proposant la description de ses

offres et de leurs prix aux personnes vendant ensuite les ebooks aux consommateurs. Pour

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107

rappel, une base de données est une sorte de conteneur informatique permettant le stockage

d’informations en lien avec une activité. Il s’agit donc d’un outil d’information destiné aux

revendeurs.

B) Les obligations envers le consommateur

1) La mention du prix du livre électronique

410.- Le prix du livre numérique est une information devant être délivrée.

411.- Ce marquage du prix de vente final aux consommateurs, fixé à l’unité ou sous la

forme d’un barème, incombe aux revendeurs. Il incombera de mentionner le prix décidé par

l’éditeur, et également le prix TTC de l’ouvrage130

.

2) Le devoir d’informer les acheteurs respecté

412.- Cette loi du 26 mai 2011 permet cela.

413.- Finalement, cette obligation d’informer les acheteurs finaux du prix des livres

n’est qu’un respect des règles, l’article L 113-3 du Code de la consommation imposant à tout

vendeur ou prestataire de services d’informer les clients des prix pratiqués. Cette obligation

s’inscrit dans le cadre du respect d’un devoir plus large englobant cette seule règle légale

d’affichage des prix, qu’est le devoir d’information, devoir s’imposant à tout professionnel

envers un consommateur en vertu de l’article L 111-1 du Code de la consommation.

II) Les particularités de la loi relative au prix du livre numérique

414.- Les acteurs économiques visés par la loi (A) prouvent la volonté de maintenir

une concurrence dans le secteur du livre (B)

130

http://www.sne.fr/dossiers-et-enjeux/prix-unique-du-livre.html

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A) Les acteurs visés par la loi sur le prix du livre numérique

1) Les revendeurs

415.- Tous les revendeurs sont concernés.

416.- Les revendeurs de livres numériques sont donc concernés par la loi du 26 mai

2011, comme l’étaient les détaillants dans la loi Lang.

2) Un objectif d’égalité

417.- L’égalité semble, encore une fois, être au cœur des préoccupations.

418.- Les revendeurs ne pouvant eux-mêmes fixer le prix de vente des livres

numériques, ils sont tous tenus d’appliquer les tarifs imposés par les éditeurs. L’atteinte à la

liberté du commerce et de l’industrie et à libre fixation des prix semble se renouveler au profit

d’une égalité entre les revendeurs, une égalité qui doit, finalement, profiter au public, le but

ultime étant l’atteinte d’une égalité entre les consommateurs dans l’accès à la culture.

B) Un objectif concurrentiel

1) La promotion de la concurrence

419.- De la même façon que la loi sur le prix du livre du 10 août 1981, la loi relative

au prix du livre numérique du 26 mai 2011 vise à promouvoir la concurrence.

420.- Au-delà des apparences d’une atteinte à la liberté du commerce et de l’industrie,

il convient d’analyser cette loi sous un angle concurrentiel. Avec cette technique de fixation

des prix par l’éditeur, aucun revendeur ne pourra se livrer à la pratique des prix prédateurs

dans le but d’éliminer ses concurrents et de se retrouver ensuite seul maître sur le marché. Le

but de cette loi est donc d’empêcher les situations de monopole ou d’oligopole sur le marché

du livre électronique. La concurrence sur ce marché est donc préservée.

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2) Une visée sociale

421.- Le consommateur est au centre de l’attention.

422.- Avec la loi Lang, l’objectif consiste à maintenir un nombre suffisant de

détaillants sur le territoire afin que l’égalité d’accès à la culture entre citoyens soit préservée

et que les détaillants spécialisés, représentant du petit commerce, soient protégés face aux

grands distributeurs généralistes.

423.- Désormais, la loi du 26 mai 2011 est venue perpétuer cette recherche de

l’égalité d’accès à la culture aux consommateurs en leur permettant d’avoir le choix entre

divers revendeurs au lieu d’avoir un choix limité à une ou quelques sociétés qui pourraient

profiter de leur hégémonie pour augmenter les prix, ce qui écarterait, de fait, de nombreux

consommateurs de la possibilité d’accéder à ces produits.

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Conclusion

424.- Au fil de cette seconde partie, l’accent fut placé sur les différents modes de

protection des œuvres. Auparavant, le secteur du livre était relativement épargné par le

piratage, même si des difficultés pouvaient avoir lieux avec le photocopillage de masse.

Désormais, avec le passage au numérique, les livres deviennent aussi exposés que les films ou

les titres musicaux. Mais des protections légales ont été mises en place, avec le délit de

contrefaçon. Puis, les hébergeurs furent également visés dans le cadre de cette volonté

protectionniste. Enfin, des MTP furent également créées afin de nuire davantage aux

contrefacteurs.

Néanmoins, à côté de ces dispositifs de protection, des exceptions au droit d’auteur subsistent,

telle que l’exception de copie privée, valable dans le respect de certaines conditions.

Pour parfaire cette protection légaliste, une protection contractuelle pourrait mériter des

tentatives de développement.

425.- Concernant la thématique du prix du livre, deux mécanismes subsistent. Le

premier est un mécanisme classique, portant sur les livres imprimés et cherchant à protéger

les libraires détaillants ainsi qu’à permettre l’égalité d’accès à la culture entre les

consommateurs. Le livre numérique n’entrant pas dans le champ d’application de cette loi,

une autre loi fut créée afin de mettre en place des règles quant à la fixation du prix du livre

numérique. Cette nouvelle loi reste, sur le fond, semblable à celle de 1981 tout en prenant en

compte les spécificités de l’œuvre numérique.

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Conclusion générale

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112

426.- L’objectif de ce travail fut de démontrer que ce thème nouveau qu’est le contrat

d’édition numérique est sujet à susciter de nombreuses interrogations. L’apparition des livres

numériques a fait émerger de nouvelles questions portant sur le prix de l’œuvre, avec les

enjeux concurrentiels et sociaux qui y sont attachés. La protection de l’œuvre est aussi

ramenée sur le devant de la scène avec la thématique du numérique, susceptible de générer

des nouvelles méthodes de contrefaçon du livre.

427.- Les enjeux des négociations portant sur l’élaboration d’un futur contrat

d’édition numérique destiné à pallier les lacunes du contrat d’édition actuel, inadapté pour

l’exploitation des œuvres numériques sur de nombreux points, ont donné lieu à un véritable

bras de fer. L’ensemble de ces négociations ne fut que le reflet d’un rapport de forces entre les

auteurs et les éditeurs, résultat de siècles de domination et d’abus des professionnels de

l’édition sur les édités. L’exploitation des moyens existant dans le domaine de la propriété

littéraire-artistique ne permettant pas de protéger dignement les droits des auteurs sur

plusieurs points, une intervention légale se révèle nécessaire.

428.- La loi interviendra donc pour modifier le Code de la propriété intellectuelle en y

intégrant une partie sur le contrat d’édition numérique, afin d’éviter que les dérives

engendrées par la pratique ces dernières années ne ressurgissent. Un nouveau contrat spécial

sera créé dans un objectif de protection, et il sera mis en place par une loi à caractère social, le

but étant de défendre les intérêts des faibles face aux forts.

429.- Ce contrat sera créé en tenant compte des nombreuses négociations ayant eu

cours auparavant sur ce sujet, ce qui peut être considéré comme un exemple de démocratie

participative, les principaux acteurs visés par ce futur contrat ayant pu apporter leurs idées

quant à son élaboration.

430.- Une fois de plus, le rôle de la loi est mis en avant : la loi créatrice, la loi

protectrice, la loi vue comme un outil de régulation sociale. Mais une fois encore, le

législateur intervient tard.

431.- Une analyse des dispositions légales en la matière sera nécessaire après leur

élaboration afin de vérifier si le législateur a respecté l’ensemble des préparatifs portant sur

cette loi.

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Annexes

Annexe n°1 : schéma sur le rôle de l’éditeur

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Annexe n°2 : loi relative au prix du livre numérique

JORF n°0124 du 28 mai 2011 page 9234 texte n° 2

LOI

LOI n° 2011-590 du 26 mai 2011 relative au prix du livre numérique (1)

NOR: MCCX1027694L

L'Assemblée nationale et le Sénat ont adopté,

Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :

Article 1 En savoir plus sur cet article...

La présente loi s'applique au livre numérique lorsqu'il est une œuvre de l'esprit créée par un

ou plusieurs auteurs et qu'il est à la fois commercialisé sous sa forme numérique et publié

sous forme imprimée ou qu'il est, par son contenu et sa composition, susceptible d'être

imprimé, à l'exception des éléments accessoires propres à l'édition numérique.

Un décret précise les caractéristiques des livres entrant dans le champ d'application de la

présente loi.

Article 2 En savoir plus sur cet article...

Toute personne établie en France qui édite un livre numérique dans le but de sa diffusion

commerciale en France est tenue de fixer un prix de vente au public pour tout type d'offre à

l'unité ou groupée. Ce prix est porté à la connaissance du public.

Ce prix peut différer en fonction du contenu de l'offre et de ses modalités d'accès ou d'usage.

Le premier alinéa ne s'applique pas aux livres numériques, tels que définis à l'article 1er,

lorsque ceux-ci sont intégrés dans des offres proposées sous la forme de licences d'utilisation

et associant à ces livres numériques des contenus d'une autre nature et des fonctionnalités. Ces

licences bénéficiant de l'exception définie au présent alinéa doivent être destinées à un usage

collectif et proposées dans un but professionnel, de recherche ou d'enseignement supérieur

dans le strict cadre des institutions publiques ou privées qui en font l'acquisition pour leurs

besoins propres, excluant la revente.

Un décret fixe les conditions et modalités d'application du présent article.

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115

Article 3 En savoir plus sur cet article...

Le prix de vente, fixé dans les conditions déterminées à l'article 2, s'impose aux personnes

proposant des offres de livres numériques aux acheteurs situés en France.

Article 4 En savoir plus sur cet article...

Les ventes à primes de livres numériques ne sont autorisées, sous réserve des dispositions de

l'article L. 121-35 du code de la consommation, que si elles sont proposées par l'éditeur, tel

que défini à l'article 2, simultanément et dans les mêmes conditions à l'ensemble des

personnes mentionnées à l'article 3.

Article 5 En savoir plus sur cet article...

Pour définir la remise commerciale sur les prix publics qu'il accorde aux personnes proposant

des offres de livres numériques aux acheteurs situés en France, l'éditeur, tel que défini à

l'article 2, tient compte, dans ses conditions de vente, de l'importance des services qualitatifs

rendus par ces derniers en faveur de la promotion et de la diffusion du livre numérique par des

actions d'animation, de médiation et de conseil auprès du public.

Article 6 En savoir plus sur cet article...

L'article L. 132-5 du code de la propriété intellectuelle est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le contrat d'édition garantit aux auteurs, lors de la commercialisation ou de la diffusion d'un

livre numérique, que la rémunération résultant de l'exploitation de ce livre est juste et

équitable. L'éditeur rend compte à l'auteur du calcul de cette rémunération de façon explicite

et transparente. »

Article 7 En savoir plus sur cet article...

Un décret en Conseil d'Etat détermine les peines d'amende contraventionnelle applicables en

cas d'infraction aux dispositions de la présente loi.

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116

Article 8 En savoir plus sur cet article...

Un comité de suivi composé de deux députés et deux sénateurs, désignés par les commissions

chargées des affaires culturelles auxquelles ils appartiennent, est chargé de suivre la mise en

œuvre de la présente loi. Après consultation du comité de suivi et avant le 31 juillet de chaque

année, le Gouvernement présente au Parlement un rapport annuel sur l'application de la

présente loi au vu de l'évolution du marché du livre numérique comportant une étude d'impact

sur l'ensemble de la filière.

Ce rapport vérifie notamment si l'application d'un prix fixe au commerce du livre numérique

profite au lecteur en suscitant le développement d'une offre légale abondante, diversifiée et

attractive, et favorise une rémunération juste et équitable de la création et des auteurs,

permettant d'atteindre l'objectif de diversité culturelle poursuivi par la présente loi.

Article 9 En savoir plus sur cet article...

La présente loi est applicable en Nouvelle-Calédonie.

Article 10 En savoir plus sur cet article...

Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, sont validés, à la date

de leur délivrance, les permis de construire accordés à Paris en tant que leur légalité a été ou

serait contestée pour un motif tiré du non-respect des articles ND 6 et ND 7 du règlement du

plan d'occupation des sols remis en vigueur à la suite de l'annulation par le Conseil d'Etat des

articles N 6 et N 7 du règlement du plan local d'urbanisme approuvé par délibération des 12 et

13 juin 2006 du Conseil de Paris.

La présente loi sera exécutée comme loi de l'Etat.

Fait à Paris, le 26 mai 2011.

Par le Président de la République, Nicolas Sarkozy ; Le Premier ministre, François Fillon ; La

ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, Christine Lagarde ; Le ministre de la

culture et de la communication, Frédéric Mitterrand

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Annexe 3 : contrat d’édition

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Annexe 4 : contrat d’édition numérique sous forme d’avenant au contrat d’édition

précédent

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Annexe 5 : contrat de cession de droits d’adaptation audiovisuelle

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124

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125

Bibliographie

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édition Fayard, 1991

B. EDELMAN, La propriété littéraire et artistique, PUF, 2010

S. EYROLLES, Les 100 mots de l’édition, PUF, 2010

P-Y. GAUTIER, Propriété littéraire et artistique, PUF, Collection Droit fondamental,

2010

F. LABARTHE, Le contrat d’entreprise, LGDJ, 2008

P. PELLEMANS, Recherche qualitative en marketing : perspective psychoscopique,

De Boeck Supérieur, 1999

Ouvrages spéciaux, thèses et monographies

A) Ouvrages spéciaux

A-R. BERTRAND, Droit d’auteur, Dalloz action, 2010

D. FOREST, Droit d’auteur et droits voisins, Gualino, 2010

B. LARONZE, L’usufruit des droits de propriété intellectuelle, Presses Universitaires

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M. VIVANT et J-M BRUGUIERE, Droit d’auteur, Dalloz, Précis, 2009

M. VIVANT et J-M. BRUGUIERE, Droit d’auteur et droits voisins, Dalloz, Précis,

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B) Thèses et monographies

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cherche Juridique de la Sorbonne-André Tunc, Thèse Paris I, parution 04/2010

M.-G. SCHILLING-RANCAZ, Les éditions à compte d'auteur, Thèse Paris 2, 1985

Articles, repertoires et chroniques

E. ARCHAMBAULT et J. LALLEMENT, L’évolution des librairies et le prix du livre,

Ministère de la culture, département des études et de la prospective, La

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S. DURRANDE, Fasc. 1342 : Droit d’auteur. Exploitation des droits.-Dispositions

particulières à certains contrats. Contrats de commande (CPI, art. L 131-1 à L 131-9),

JurisClasseur Civil Annexes, 02 janvier 2012

B. EDELMAN, Entre Copyright et droit d'auteur : l'intégrité de l'oeuvre de l'esprit, D.

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D'INFORMATION, JurisClasseur Propriété littéraire et artistique, 19 avril 2011

B. MONTELS, Fasc. 6085 : CONTRATS DE PRODUCTION ET D'EXPLOITATION

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F. POLLAUD-DULIAND, Loi n° 2011-590 du 26 mai 2011 relative au prix du livre

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M. PRUD’HOMME et V. BENSOUSSAN-BRULE, Responsabilité des hébergeurs :

la procédure de notification de contenus illicites strictement encadrée par le juge, Ga-

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G. RAYMOND, Fasc. 800 : CONTRATS DE CONSOMMATION, JurisClasseur Con-

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C. SIFFREIN-BLANC, Fasc. 20 : USUFRUIT . – Prérogatives de l'usufruitier . –

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L. THOUMYRE, Les notions d’éditeur et d’hébergeur dans l’économie numérique, D.

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Vers une modification du contrat d’édition, Réponse ministérielle n°113450, JOANQ

15/11/11, Dalloz actualité, 29/11/11

Législation

A) Codes

Code civil : articles 544, 578, 1101, 1134, 1135, 1147, 1787, 1871

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127

Code de commerce : articles L 132-1, L 420-2, L 442-5, L 442-6, I, 2°

Code de la consommation : articles L 111-1, L 113-3

Code de la propriété intellectuelle : articles L 112-2, L 113-10, L 121-1, L 121-4,

L 122-1, L 122-5, L 122-7, L 123-1, L 123-6, L 131-1, L 131-2, L 131-3, L 131-4,

L 131-5, L 131-6, L 132-1, L 132-2, L 132-3, L 132-5, L 132-11, L 132-12, L 132-16,

L 132-23, L 132-24, L 135-2, L 331-5, L 331-6, L 331-10, L 335-2, L 611-2

B) Lois

Loi n° 81-766 du 10 août 1981 relative au prix du livre

Loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique

Loi 2009-258 du 5 mars 2009, relative à la communication audiovisuelle et au

nouveau service public de la télévision

Loi n° 2009-669 du 12 juin 2009 favorisant la diffusion et la protection de la création

sur internet

Loi n° 2011-590 du 26 mai 2011 relative au prix du livre numérique

C) Règlements

Décret n° 2011-1499 du 10 novembre 2011 pris en application de la loi no 2011-590

du 26 mai 2011 relative au prix du livre numérique

Instruction de la Direction générale des impôts du 30 décembre 1971 (3C-14-71).

Rapports

Le livre numérique, Rapport de la commission Cordier, mai 1999

Rapport sur le livre numérique, 30 juin 2008, remis par Bruno Patino à Christine Al-

banel

M. DAVAL, EbookZ : étude sur l’offre numérique illégale des livres, le MOTif, oc-

tobre 2009

Jurisprudences

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Cass. 1re civ., 09/10/1984, n° 83-13.850

CA Paris, 10 juin 1986 : RIDA 3/1987, p. 193

TGI Paris, aff. Huston, 23 nov. 1988 :JDI 1989, 67, obs. B. Edelman

CA Paris, 5e ch., 16 nov. 1989 : Juris-Data n° 1989-026342

Cass. 1re civ., 14 mai 1991 : JCP G 1991, II, 21760, note Pollaud-Dulian

Cass. 1re civ., 26/01/1994, n° 92-11.691

CA Paris, 4e ch. A, 14 févr. 1996 : Juris-Data n° 1996-021478

CA Nîmes, 30 novembre 2004

CA Montpellier, 3ème chambre correctionnelle, 10 mars 2005

CA Paris, CH.04B, 30 avril 2009, n°08/12047

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128

TGI Paris, 18 déc. 2009, Juris-Data no 2009-016553

CA Paris_Pôle 01 CH.04_26/03/10_n° 09/12552

CA Paris_Pôle 05 CH.02_09/04/2010_n° 08/09558

CA Paris_Pôle 05 CH.02_ 14/01/2011_n° 09/11729

CA Paris, 6 juin 2012, n° 09/20877

CA Paris P. 5 ch. 1, 23 janv. 2013, SARL 15-30 Publishing c/ MM. Jean-Philippe

Goude et François Moity et SARL Another Way

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Sites internet

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http://www.alliance-editeurs.org

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http://www.capital.fr

http://www.cnetfrance.fr

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http://www.copieprivee.org

http://www.culture.gouv.fr

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http://www.droit-technologie.org

http://www.du9.org

http://www.fitoussi-avocat.com

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http://portaildulivre.com

http://www.portail-ie.fr

http://www.reynaud-avocat.com

http://www.snac.fr

http://www.sne.fr

http://syndicatbd.blogspot.fr

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129

Index

A

Auteur : 4, 19, 22, 24, 26,27, 32, 37, 41, 42,

49, 51, 52, 58, 62, 63,71, 74, 75, 80, 95,

101, 110, 127, 143, 150, 169

Avenant : 143, 146, 147

Avenant numérique : 151, 197

B

Base de données descriptive : 273, 409

Bon à tirer : 169

C

Cession : 25, 45, 48,51, 62, 67

Clause d’adaptation aux modes

d’exploitation inconnus : 147, 171

Consommateur : 42, 155, 159, 160, 161,

162, 178, 273, 277, 295, 296, 307, 309,

312, 316, 322, 324, 327, 332, 334, 335,

358, 382, 409, 413, 423

Contrat :

d’adhésion : 43, 322, 328

de l’audiovisuel : 118

de compte à demi : 92

d’édition : 4, 13, 16, 26, 33, 37, 40,

47, 49, 56, 62, 67, 75, 77, 81, 84,

89, 92, 93, 120, 122, 125

d’édition à compte d’auteur : 89

d’édition numérique : 216, 223,

234, 235, 399, 426, 427, 428

d’entreprise : 37, 51, 89, 93

Contrefaçon : 71, 122, 186, 189, 247, 260,

261, 264, 269, 334, 424

D

Détaillant : 348, 361, 367, 369, 376, 378,

382, 401, 416, 422, 425

Droit de divulgation : 51

Droit moral : 19, 50, 53, 54, 57, 58, 62, 64,

67, 169, 189, 240

Droit à la paternité : 51

Droit pécuniaire : 57, 58

Droit de représentation : 57

Droit de reproduction : 57, 62, 171

Droit de retrait : 52

Droit de suite : 57

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130

E

Ebook : 18, 163, 165, 254, 265, 289, 316,

318, 329, 394, 401, 407, 409

Editeur : 4, 5, 12, 22, 32, 42, 45, 75, 106

Exception de copie privée : 275

H

Hébergeur : 188, 266, 267, 269, 307

L

Licences d’utilisation : 314, 316

Logiciel : 261, 262, 273, 314, 316, 327

M

MTP : 291, 292, 293, 295, 424

O

Œuvres orphelines : 68, 69, 70, 71

P

Piratage : 10, 186,189, 246, 247, 249, 257,

424

Prix : 19, 57, 79, 81, 83, 161, 176, 177,

178, 200, 237, 250,340, 346, 348, 349, 357,

359, 363,392, 397,401, 407, 413, 426

Protection contractuelle : 326, 327, 334,

424

R

Rémunération forfaitaire : 83

Rémunération proportionnelle : 79, 80

S

Soft law : 229, 230, 232

U

Usufruit : 65, 66, 67

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131

Table des matières

Sommaire 6

Liste des abréviations 7

Introduction 8

Partie I : La relation auteur-éditeur 14

Titre I : Etat des lieux sur le contrat d’édition 16

Chapitre I : Un contrat de collaboration 17

Section I : le rôle classique de l’éditeur 17

I) La promotion de l’œuvre 18

A) La promotion de l’œuvre, principale mission de l’éditeur 18

1) L’éditeur, un lien entre l’auteur et le public 18

2) Le détenteur des moyens nécessaires à cette diffusion 18

B) La passation d’un nécessaire contrat d’édition 19

1) La nature du contrat d’édition 19

2) La nécessité économique de ce contrat 20

II) Les techniques mises en œuvre dans le contrat d’édition 21

A) Les droits cédés par l’auteur à l’éditeur 21

1) L’ensemble des droits cédés 21

2) Les difficultés découlant de la qualification de ce contrat en

cession 21

B) Les droits conservés par l’auteur 22

1) Le droit moral 22

2) La particularité des droits pécuniaires 23

Section II : Les conséquences de ce rapport contractuel 25

I) La toute puissance de l’éditeur 25

A) La détention des droits sur l’œuvre par l’éditeur 25

1) Les conséquences d’un transfert de propriété 25

2) Une opération comparable à un usufruit 26

B) Un renforcement des pouvoirs de l’éditeur avec la thématique des œuvres

orphelines 27

1) Les œuvres orphelines 27

2) Les enjeux des œuvres orphelines 28

II) Une exploitation des auteurs 28

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132

A) Des auteurs dépossédés 29

1) Une cession de droits forcée 29

2) Une cession de droits pour le meilleur et pour le pire 30

B) Les modes de rémunération des auteurs 30

1) Le principe de la rémunération proportionnelle 30

2) L’exception du système de rémunération forfaitaire 31

Chapitre II : Les autres formules contractuelles proches du contrat d’édition 33

Section I : Des contrats particuliers 33

I) Des modes alternatifs d’édition des œuvres 33

A) Les différents contrats en question 33

1) Le contrat d’édition à compte d’auteur 33

2) Le contrat de compte à demi 34

B) Les conséquences de ces contrats 35

1) Une place plus gratifiante pour l’auteur dans le processus

d’édition 35

2) Des risques plus élevés 36

II) Une variété de contrats s’expliquant par le rapport de forces en

vigueur 37

A) L’équivalent d’une relation fournisseur-distributeur 37

1) L’auteur dépendant 37

2) L’éditeur, un souverain tout puissant 37

B) Des contrats à visée sociale 38

1) Une possible recherche de la satisfaction du désir d’indépendance des

auteurs 38

2) Des chances de succès plus réduites 38

Section II : Des possibilités de confusion 39

I) Les contrats de l’audiovisuel 39

A) Des contrats spécifiques 39

1) Définition 39

2) Champ d’application 40

B) Une confusion possible 40

1) Du contrat de production audiovisuelle au contrat d’édition 40

2) Les définitions ambigües données par la jurisprudence 41

II) Le domaine large des contrats d’édition 42

A) Le secteur des livres 42

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133

1) Les livres classiques 42

2) Les livres d’un genre plus récent 42

B) Les autres types d’œuvres visées 43

1) Les journaux et magasines 43

2) Le secteur musical 43

Titre II : Les nouveaux enjeux du contrat d’édition numérique 45

Chapitre I : L’adéquation entre les règles actuelles et le contrat d’édition

numérique 46

Section I : Les règles actuelles 46

I) Les règles en vigueur 47

A) Les clauses d’adaptation aux modes d’exploitation inconnus 47

1) Le danger de ces clauses 47

2) L’utilisation faite de ces clauses en pratique 47

B) La multiplication des avenants au contrat 49

1) Une preuve d’un droit non adapté 49

2) La dangerosité des avenants numériques 49

II) La démonstration d’un droit non adapté à l’évolution numérique 50

A) De nouvelles problématiques soulevées par le numérique 50

1) La thématique de la chaîne du numérique 50

2) Les conditions d’accès à l’œuvre 51

B) Le changement de rôle du consommateur 52

1) Le consommateur devient actif 52

2) Le véritable travail de l’éditeur 53

Section II : La démonstration de l’insuffisance des règles en vigueur 55

I) Les changements découlant de l’œuvre numérique 55

A) Le risque de perte de la maîtrise de l’œuvre 55

1) La nécessité de permettre à l’auteur d’accepter ou de refuser

la version numérique éventuellement modifiée 55

2) L’œuvre numérique, parent pauvre de la protection des œuvres de

l’esprit 56

B) Un contrat souvent disproportionné 56

1) La durée controversée des cessions de droit 56

2) L’œuvre électronique et la rémunération de l’auteur 57

II) Une insécurité juridique pour les auteurs 59

A) De nouveaux éléments de domination 59

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1) Le facteur de la dépendance 59

2) L’absence de règles légales 59

B) Une distribution grand public dangereuse 60

1) Les risques accentués de contrefaçon 60

2) Le besoin d’une protection numérique 60

Chapitre II : Les solutions éventuelles 62

Section I : Les solutions envisageables 62

I) La voie de la règlementation 62

A) La création d’un contrat spécial 62

1) Le contrat d’édition numérique 62

2) Définition 63

B) Un contrat plus protecteur 63

1) Les lacunes à combler 63

2) Les conséquences envisageables 63

II) Les discussions en cours 64

A) Des discussions interprofessionnelles 64

1) Les protagonistes en scène 64

2) Résumé des négociations 65

B) Des revendications différentes 65

1) Les revendications des auteurs 65

2) Les revendications des éditeurs 65

Section II : L’encadrement du contrat d’édition numérique 66

I) Un encadrement légal du contrat d’édition numérique 66

A) La création du contrat d’édition numérique 66

1) Une évolution du droit de la propriété intellectuelle 66

2) Une création nécessaire 66

B) Une création légale 67

1) Une loi spéciale 67

2) La modification du Code de la propriété intellectuelle 67

II) Le résultat des tentatives de régulation 68

A) Des chances de succès 68

1) La conséquence de règles issues de négociations entre les parties

concernées 68

2) L’avantage de la pratique 68

B) L’émergence d’une soft law 68

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1) Définition 68

2) Application au cas d’espèce 69

Conclusion 70

Partie II : La protection et le prix de l’œuvre 71

Titre I : La protection de l’œuvre 73

Chapitre I : La protection normative 74

Section I : Le danger du piratage 74

I) Le piratage 74

A) Notion 74

1) Définition 74

2) Les conséquences du piratage 75

B) Le piratage et l’édition numérique 75

1) Un secteur nouveau 75

2) Les risques 76

II) Les moyens de lutte 77

A) La contrefaçon 77

1) Définition 77

2) Les sanctions 78

B) Le rôle des hébergeurs 78

1) Le sort réservé aux hébergeurs 78

2) Les conclusions à en tirer 79

Section II : L’exception légale 79

I) L’exception de copie privée 79

A) La notion d’exception de copie privée 79

1) Définition 79

2) Une exception au monopole de l’auteur 80

B) Des conditions à respecter 80

1) La nécessité d’une contrepartie financière 80

2) Une utilisation limitée à un cercle restreint 81

II) L’influence du numérique 81

A) Les livres numériques désormais concernés 82

1) L’exception de copie privée et les ouvrages électroniques 82

2) Une modernisation des techniques à la clé 82

B) La difficile articulation avec les mesures techniques de protection 83

1) Définition 83

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2) La coexistence entre les MTP et l’exception de copie privée 83

Chapitre II : La protection contractuelle 85

Section I : Une recherche de protection par le contrat 85

I) Quelques éclaircissements 85

A) L’utilisation de la méthode contractuelle 85

1) La notion de contrat 85

2) L’utilité du contrat 85

B) Un mécanisme de protection supplémentaire 86

1) Le contrat s’ajouterait à la loi 86

2) Un moyen d’information plus opportun 87

II) Un concept peu pratiqué 87

A) Une protection peu développée 87

1) Une absence générale de protection contractuelle 87

2) Le cas particulier des logiciels 88

B) L’absence de contrat dans le cadre des œuvres numériques 88

1) Le possible modèle des licences d’utilisation 88

2) Le passage de l’effet relatif à l’effet général des contrats 88

Section II : Une utilisation des contrats d’adhésion 89

I) Le modèle des contrats d’adhésion 89

A) La notion de contrat d’adhésion 89

1) Des évolutions quant à la dénomination de ces contrats 89

2) L’intérêt de ces contrats 90

B) Les conséquences d’une utilisation des contrats d’adhésion 90

1) Envers les consommateurs 90

2) Avec les hébergeurs 91

II) Les objectifs poursuivis en matière numérique 91

A) L’impact psychologique de la pratique contractuelle 91

1) La recherche d’une responsabilisation des consommateurs 91

2) Un outil comminatoire 91

B) Redonner confiance aux professionnels 92

1) Un but pédagogique 92

2) Un objectif économique 92

Titre II : Le prix de l’œuvre 93

Chapitre I : Le mécanisme classique 94

Section I : Un corporatisme anticoncurrentiel 94

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I) Analyse de la loi Lang 94

A) La politique du prix unique 94

1) Présentation de cette loi 94

2) La mise en œuvre de ce texte légal 95

B) Les œuvres visées par le texte 96

1) La liste des œuvres 96

2) L’absence du livre numérique 96

II) Les justifications de cette loi 97

A) La protection des auteurs 97

1) Le moyen d’assurer un revenu minimum aux auteurs 97

2) Le moyen de protéger l’image de la valeur de l’œuvre 97

B) La protection des intérêts des éditeurs 98

1) L’assurance de contrôler leur politique de vente 98

2) Les libraires, simples auxiliaires des éditeurs 98

Section II : Une loi de protection 98

I) La protection des libraires détaillants 98

A) Les intérêts des libraires non négligés 99

1) Les éditeurs débiteurs d’obligations envers les détaillants 99

2) Une loi destinée à favoriser l’activité économique des

détaillants 99

B) La prise en compte de l’élément comptable 99

1) Les avantages financiers de cette loi 99

2) Un intérêt partagé à l’échelle européenne 100

II) Une protection du petit commerce 100

A) La protection des détaillants spécialisés face aux distributeurs

généralistes 100

1) La loi de 1981 s’impose à tous 100

2) Une protection des détaillants face aux pratiques agressives des grands

distributeurs 100

B) Les consommateurs protégés 101

1) Le prix unique permet la valorisation de la culture 101

2) Un objectif social 101

Chapitre II : Les mécanismes encadrant le prix de l’œuvre numérique 102

Section I : L’évolution des dispositions légales 102

I) La fixation du prix du livre numérique 102

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A) Le champ d’application de cette loi 102

1) Les livres numériques visés 102

2) Les livres numériques vendus sous forme de licences d’utilisation non

concernés 103

B) Les modalités de fixation du prix des œuvres numériques 103

1) L’éditeur garde le rôle principal 103

2) La prise en compte des modalités d’accès à l’œuvre 103

II) Le contexte d’instauration de la loi relative au prix du livre

numérique 104

A) Le comblement d’une carence 104

1) Le résultat de l’insuffisance de la loi du 10 août 1981 104

2) Une source d’inspiration pour le contrat d’édition numérique 104

B) Les principaux apports 105

1) Les différences entre la loi de 2011 et la loi de 1981 105

2) Les éléments notables 105

Section II : Les effets de la loi du 26 mai 2011 106

I) Les obligations générées par la loi 106

A) Les obligations de l’éditeur 106

1) L’obligation de fixer le prix 106

2) Le développement d’une base de données descriptive 106

B) Les obligations envers le consommateur 107

1) La mention du prix du livre électronique 107

2) Le devoir d’informer les acheteurs respecté 107

II) Les particularités de la loi relative au prix du livre numérique 107

A) Les acteurs visés par la loi sur le prix du livre numérique 108

1) Les revendeurs 108

2) Un objectif d’égalité 108

B) Un objectif concurrentiel 108

1) La promotion de la concurrence 108

2) Une visée sociale 109

Conclusion 110

Conclusion générale 111

Annexes 113

Bibliographie 125

Index 129

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Table des matières 131