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Actes confirmatifs et vidimus dans le Nord de la France jusqu’à la fin du XIII e siècle Benoît-Michel Tock On pourrait, en un sens, définir la diplomatique comme l’art de la répétition. Dès le début du Moyen Âge en effet, certains actes reprennent en grande partie des textes anté- rieurs. On en prendra un exemple, choisi parmi des milliers d’autres parce qu’il est pré- coce: un diplôme du roi Chilpéric II pour l’abbaye de Saint-Bertin, donné entre le 5 sep- tembre 717 et le 26 septembre 718, reprend de très larges passages du diplôme donné à la même abbaye en mai 692 par le roi Clovis III, qu’il confirme d’ailleurs 1 . Cette répétition repose en bonne partie sur l’utilisation de formulaires, ou plus largement sur la reprise de formules 2 dans des actes antérieurs. Mais la répétition ne concerne pas que le texte: les actions juridiques elles aussi sont, parfois, répétées pour être confirmées. Si les textes des diplômes de Clovis III et de Chil- péric II cités ci-dessus sont si proches, c’est parce que l’abbaye de Saint-Bertin a eu be- soin, en 717/718, d’une confirmation de l’immunité que lui avaient déjà accordée ou confirmée plusieurs souverains, dont Clovis III. Certains formulaires francs d’ailleurs reprennent des formules de confirmation. Marculf, par exemple, donne une formule de confirmatio de emunitatem, mais aussi une confirmatio regis ad sancto loco, une confirmatio ad saecularibus viris, une confirmatio regis de omni corpore facultatis et une confirmatio de omni corpore facultatis monasterii qui toutes renvoient à des actes royaux antérieurs 3 . Le but de cette étude est de retracer l’histoire de la confirmation des actes antérieurs, jusqu’au développement des vidimus. Le sujet a déjà été abordé, mais jamais de manière systématique 4 . Il doit donc être clair dès le départ que cette étude ne portera pas sur la confirmation des actions juridiques: ne seront pris en compte que les cas où un acte confirme explicitement un autre acte. Sont donc exclus les actes dans lesquels un acte antérieur est simplement mentionné, sans être explicitement confirmé 5 . Le cadre retenu 1 MGH DD. Mer. 1, ed. eo Kölzer (Hannover 2001) 134, 178. 2 Sur les formulaires du Haut Moyen Âge, voir Alice Rio, Legal Practice and the Written Word in the Early Middle Ages. Frankish Formulae, c. 500–1000 (Cambridge 2009). 3 Alf Uddholm, Formulae Marculfi. Études sur le style et la langue (Uppsala 1953): Formules I 4, 16, 17, 31, 35. Sur Marculf voir désormais Rio, Legal Practice (cit. n. 2) 81–101. 4 Voir les quelques lignes d’Arthur Giry, Manuel de Diplomatique (Paris 1894) 16s. 5 Par exemple, dans un acte non daté qu’il donna entre 1118 et 1119 en faveur de la collégiale Saint-Pierre- de-Lille, le comte de Flandre Baudouin VII reconnaissait avoir péché et mal agi (me peccasse et multum male egisse per Dei gratiam recognosco) en soustrayant au chapitre un alleu que son prédécesseur le comte Baudouin V lui avait donné (allodium … quod … contulit et privilegio suo firmavit). L’objet de la charte de Baudouin VII n’est cependant pas de confirmer la charte de son prédécesseur, mais de reconnaître sa faute. Actes des comtes Brought to you by | National Dong Hwa University Authenticated | 134.208.103.160 Download Date | 3/29/14 10:26 AM

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Actes confirmatifs et vidimus dans le Nord de la France jusqu’à la fin du XIIIe siècle

Benoît-Michel Tock

On pourrait, en un sens, définir la diplomatique comme l’art de la répétition. Dès le début du Moyen Âge en effet, certains actes reprennent en grande partie des textes anté-rieurs. On en prendra un exemple, choisi parmi des milliers d’autres parce qu’il est pré-coce: un diplôme du roi Chilpéric II pour l’abbaye de Saint-Bertin, donné entre le 5 sep-tembre 717 et le 26 septembre 718, reprend de très larges passages du diplôme donné à la même abbaye en mai 692 par le roi Clovis III, qu’il confirme d’ailleurs1. Cette répétition repose en bonne partie sur l’utilisation de formulaires, ou plus largement sur la reprise de formules2 dans des actes antérieurs.

Mais la répétition ne concerne pas que le texte: les actions juridiques elles aussi sont, parfois, répétées pour être confirmées. Si les textes des diplômes de Clovis III et de Chil-péric II cités ci-dessus sont si proches, c’est parce que l’abbaye de Saint-Bertin a eu be-soin, en 717/718, d’une confirmation de l’immunité que lui avaient déjà accordée ou confirmée plusieurs souverains, dont Clovis III. Certains formulaires francs d’ailleurs reprennent des formules de confirmation. Marculf, par exemple, donne une formule de confirmatio de emunitatem, mais aussi une confirmatio regis ad sancto loco, une confirmatio ad saecularibus viris, une confirmatio regis de omni corpore facultatis et une confirmatio de omni corpore facultatis monasterii qui toutes renvoient à des actes royaux antérieurs3.

Le but de cette étude est de retracer l’histoire de la confirmation des actes antérieurs, jusqu’au développement des vidimus. Le sujet a déjà été abordé, mais jamais de manière systématique4. Il doit donc être clair dès le départ que cette étude ne portera pas sur la confirmation des actions juridiques: ne seront pris en compte que les cas où un acte confirme explicitement un autre acte. Sont donc exclus les actes dans lesquels un acte antérieur est simplement mentionné, sans être explicitement confirmé5. Le cadre retenu

1 MGH DD. Mer. 1, ed. Theo Kölzer (Hannover 2001) 134, 178.2 Sur les formulaires du Haut Moyen Âge, voir Alice Rio, Legal Practice and the Written Word in the

Early Middle Ages. Frankish Formulae, c. 500–1000 (Cambridge 2009).3 Alf Uddholm, Formulae Marculfi. Études sur le style et la langue (Uppsala 1953): Formules I 4, 16, 17,

31, 35. Sur Marculf voir désormais Rio, Legal Practice (cit. n. 2) 81–101.4 Voir les quelques lignes d’Arthur Giry, Manuel de Diplomatique (Paris 1894) 16s.5 Par exemple, dans un acte non daté qu’il donna entre 1118 et 1119 en faveur de la collégiale Saint-Pierre-

de-Lille, le comte de Flandre Baudouin VII reconnaissait avoir péché et mal agi (me peccasse et multum male egisse per Dei gratiam recognosco) en soustrayant au chapitre un alleu que son prédécesseur le comte Baudouin V lui avait donné (allodium … quod … contulit et privilegio suo firmavit). L’objet de la charte de Baudouin VII n’est cependant pas de confirmer la charte de son prédécesseur, mais de reconnaître sa faute. Actes des comtes

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sera celui du Nord de la France jusqu’au XIIIe siècle. La démarche heuristique suivie a cependant été très empirique. Il n’existe en effet pas, pour cette région, de répertoire, et moins encore d’édition, systématique des actes conservés6. On a donc mené des dépouil-lements forcément non systématiques, parmi un ensemble de recueils d’actes édités, ainsi que dans les quelques bases de données déjà existantes. Dès lors, tous les actes n’ont pas été vus; en sens inverse, au hasard des dépouillements, des actes de régions voisines ont parfois été pris en compte aussi.

1. La confirmation des actes antérieurs

Durant le Haut Moyen Âge la reprise d’actes antérieurs ne concerne que les actes royaux. Le deuxième livre de Marculf, qui porte sur les actes privés, ne reprend d’ailleurs aucune confirmation. C’est assez normal, puisque la confirmation d’actes antérieurs sup-pose une certaine autorité, celle qui permet, précisément, de confirmer quelque chose; cette autorité, au Haut Moyen Âge, ne peut être que l’autorité royale ou pontificale. C’est à partir du XIe siècle que la position des évêques, puis des princes territoriaux, comme autorité „d’auteurs“ d’actes apparaît de manière de plus en plus claire.

Cette distinction entre actes royaux et autres actes, c’est-à-dire la confirmation expli-cite des actes royaux et pas des autres actes, se trouve encore plus tard. En 1120 encore une charte du comte de Flandre Charles le Bon, confirmant les biens et possessions de l’abbaye Saint-Pierre de Gand, plaçait le comte dans la continuité de ses prédécesseurs, qui avaient offert des biens au monastère, et des rois de France, qui par des diplômes avaient confirmé les dons comtaux: ad imitationem predecessorum meorum qui predicte ecclesie de proprietate sui juris plurima contulerunt, ad imitationem quoque regum Francorum qui a predecessoribus meis ecclesie collata anulo sui palacii ad confirmamentum insigniri fece-runt …7. Ce sont donc bien les donations comtales et les actes royaux qui sont confirmés.

Mais cet acte de 1120 est une exception. Depuis longtemps déjà, des autorités non royales confirmaient les actes de leurs prédécesseurs, et cela bien entendu en imitation de diplômes royaux. Retrouver de tels actes n’est pas facile, dans la mesure où les formules de confirmation sont parfois très discrètes8. Sous réserve de nouvelles découvertes, les plus anciens actes qui confirment des actes de prédécesseurs sont les suivants.

de Flandre 1071–1128, ed. Fernand Vercauteren (Recueil des actes des princes belges [2], Bruxelles 1938) 208s. no. 92.

6 Benoît-Michel Tock, L’édition des chartes et des cartulaires dans le Nord de la France. Tabularia Études 9 (2009) 61–70 (http://www.unicaen.fr/mrsh/craham/revue/tabularia/dossier9/textes/03tock.pdf ); idem, Die Edition von Urkunden und Chartularen im Norden Frankreichs, in: Regionale Urkundenbücher. Die Vorträge der 12. Tagung der Commission Internationale de Diplomatique, ed. Theo Kölzer–Willibald Rosner–Roman Zehetmayer (NÖLA 14, Sankt Pölten 2010) 195–204.

7 Actes des comtes de Flandre (cit. n. 5) 217–223 no. 97.8 Un exemple: en 1142 l’évêque de Münster Werner notifiait à l’abbaye Saint-Nicaise de Reims une dona-

tion effectuée par un de ses prêtres. Cette donation fit l’objet dix ans plus tard d’une confirmation donnée par le successeur de Werner, Frédéric. La charte de Frédéric répète celle de Werner, indiquant que la donation avait été faite temporibus nostri predecessoris nostri Wernheri felicis memorie. Ce n’est que dans l’annonce du sceau qu’une mention est faite de la charte de Wernher: sigilli nostri impressione hanc nostram cartulam sicut et predecessor noster super eadem re conscriptam … . Ces deux chartes sont éditées dans: Cartulaire de Saint-Nicaise de Reims (XIIIe siècle), ed. Jeannine Cossé-Durlin (Documents, Études et Répertoires de l’Institut de Recherche sur l’Histoire des Textes, Paris 1991) 229–232 no. 54 et 55.

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Dès 1031 l’évêque de Cambrai Gérard Ier confirmait à l’abbaye Saint-Vaast d’Arras l’immunité que lui avait concédée son lointain prédécesseur Vindicien (667/675–683/718). Le texte de la charte de Gérard reprend très largement celui de la charte de Vindicien9. Le fait que l’acte de Vindicien soit un faux, peut-être des alentours de l’an mil, n’entre pas en ligne de compte ici puisque Gérard l’ignorait10. Quelques années plus tôt déjà, en 1022, un peu plus à l’est, l’évêque de Liège Durand confirmait (scriptura praesentis chartulae renovavimus) la charte par laquelle son prédécesseur Notger avait en 1002 notifié que l’abbaye de Saint-Riquier avait mis en gage auprès de l’église de Liège des biens situés dans ce dernier diocèse: en l’occurrence, la charte de Notger comme celle de Durand sont conservées dans la chronique d’Hariulphe de Saint-Riquier11.

On peut citer un autre exemple à Cambrai: une charte par laquelle l’évêque Gérard II (1076–1092), peut-être vers 1080, confirmait une autre charte par laquelle son prédé-cesseur l’évêque Rothard (975–995) fixait les obligations des serfs de l’église cathédrale en matière de chevage, de formariage et de mainmorte. La charte de Rothard est perdue, mais celle de Gérard mentionne explicitement une loi écrite (legem scriptam) que l’évêque fait renouveler (feci renovare)12. À Arras (mais il est vrai que le diocèse ne gagna, ou ne reconquit, son indépendance qu’en 1092/1094), la plus ancienne mention explicite d’une charte donnée par un prédécesseur ne date que de 114613. À Thérouanne une charte don-née en 1102 par l’évêque Jean de Warneton à la prévôté de Voormezele mentionne de manière implicite la charte donnée en 1069 par son prédécesseur Drogon: l’évêque Jean confirme la liberté tant des religieux que de leurs biens, qui sont protégés par l’autorité de son prédécesseur Drogon et par une bulle du pape Pascal II14. Une charte non datée

9 Le texte de Gérard est, avec un dense commentaire, édité dans: Les Chartes de Gérard Ier, Liébert et Gérard II, évêques de Cambrai et d’Arras, comtes du Cambrésis (1012–1092/93). Introduction, édition, anno-tation, ed. Erik Van Mingroot (Mediaevalia Lovaniensia I/35, Louvain 2005) 51–58 no. 1.01.

10 Un autre point cependant doit être soulevé. La charte de Gérard explique que fut présenté à l’évêque un libellum quod a beato Vindiciano, ejusdem sedis episcopo, de emunitione ipsius loci erat compositum. Ce libellum est-il la charte elle-même, ou un texte narratif? Il s’agit sans doute bien de la charte: d’autres textes utilisent le mot libellus au sens de charte (cf. Novum glossarium mediae latinitatis ab anno DCCC usque ad annum MCC, vol. 1 [Hafniae 1957] 115), et de toute façon la charte de Gérard reprend à la charte attribuée à Vindicien des formules de l’eschatolocole, ce qui montre que c’est bien un texte diplomatique, et non un texte narratif, que le rédacteur avait sous les yeux.

11 Édition de ces actes: Hariulphe, Chronique de l’abbaye de Saint Riquier, ed. Ferdinand Lot (Collection de textes pour servir à l’étude et à l’enseignement de l’histoire, Paris 1894) 170s. (lib. III, c. 30) et 184 (lib. IV, c. 3). Sur la charte de Notger, voir Jean-Louis Kupper, Liège et l’Église impériale, XIe–XIIe siècles (Bibliothèque de la Faculté de Philosophie et Lettres de l’Université de Liège 228, Paris 1981) 103 n. 152. Sur la conservation des ar-chives de Saint-Riquier, voir Laurent Morelle, The Metamorphosis of Three Monastic Charter Collections in the Eleventh Century (Saint-Amand, Saint-Riquier, Montier-en-Der), in: Charters and the Use of the Written Word in medieval Society, ed. Karl Heidecker (Utrecht Studies in Medieval Literacy 5, Turnhout 2000) 171–204.

12 Chartes de Gérard Ier, Liébert (cit. n. 9) 179–184 no. 3.06.13 Les chartes des évêques d’Arras (1093–1203), ed. Benoît-Michel Tock (Collection de documents in-

édits sur l’histoire de France, section d’histoire médiévale et de philologie, série in-8° 20, Paris 1991) 102s. no. 88: l’évêque Alvise confirme la donation de deux autels faite à l’abbaye de Marchiennes par son prédécesseur l’évêque Robert (en 1122: cf. ibid. 48s. no. 33). Alvise rappelle d’abord qu’il était à l’époque abbé d’Anchin, et que c’est lui qui avait obtenu cette donation de la part de l’évêque.

14 … tam eos quam sua omnia prędecessoris nostri Drogonis auctoritate munita, quę etiam domnus papa Paschalis sui privilegii tuicione corroborat meę consequenter auctoritatis assensu eadem libertate perpetuo vigere concedo: Chronicon Vormeselense, ed. Ferdinand Van de Putte–Charles Louis Carton (Bruges 1847) 31s. no. 9. La charte de Drogon est éditée dans: Diplomata belgica ante annum millesimum centesimum scripta 1, ed. Maurits Gysseling–Anton Carl F. Koch (Bruxelles 1950) 282 no. 164. Pascal II a donné deux bulles à la prévôté de Voormezele, le 19 novembre 1100 et le 8 avril 1105; elles sont éditées dans: Chronicon Vormeselense 26 no. 2 et 25 no. 1 (JL 5848 et 6022).

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donnée par l’évêque Didier (1169–1191) à propos d’un litige entre l’abbaye d’Andres à un seigneur laïc signale que lors du procès on recourut aussi bien à des témoins vivants qu’à une charte de son prédécesseur l’évêque Milon, mais cette charte cependant ne semble pas avoir joué un grand rôle dans la décision finale15. C’est seulement en 1200 qu’une charte de l’évêque Lambert confirme explicitement une autre charte, celle qu’avait donnée l’évêque Didier à l’abbaye d’Andres: Notum facimus tam presentibus quam futuris quod deci-mam totam de Landertun quam Ingelrannus quondam miles de Fielnes ecclesie Andernensi in ele-mosinam contulit et concessit et quam predecessor noster dominus Desiderius quondam Morinensis episcopus scripto suo auctentico confirmavit16.

À Tournai on peut citer la charte de 1101 par laquelle l’évêque Baudry confirmait celle de son prédécesseur Radbod pour le chapitre Notre-Dame de Bruges17, et celle de 1125 par laquelle l’évêque Simon confirmait à l’abbaye de Saint-Bertin la possession de quelques églises qui lui avaient été données par son prédécesseur l’évêque Lambert: Quam obrem, ecclesias illas, Lissuege, Snelgerkerke, Bovenkerke, Emingehem, quas bone memo-rie predecessor noster Lambertus episcopus ecclesie Beati Bertini in perpetua libertate possiden-das contradidit, viso ipsius privilegio … roboramus18.

Chez les princes séculiers, la pratique est plus tardive. En Flandre, le plus ancien exemple se situe en 1119, quand le comte Baudouin VII confirma explicitement la charte de son prédécesseur Baudouin V, datée de 1043, destinée à l’abbaye de Saint-Bertin: omnibus notum esse cupimus me ad petitionem Lamberti, abbatis aecclesie Sancti Bertini, concessisse ut cartam quam proavus meus Balduinus Insulanus de immunitate ville Arkas et decimatione Brodburgensis castellarie eidem loco firmaverat, ego quoque his temporibus reno-varem. Cujus postulationi clementer annuentes, omnia que in eadem carta continentur nos modis omnibus renovando confirmamus. Encore faut-il ajouter que cette confirmation ne constitue que la première partie de la charte de Baudouin VII, puisque le comte y ajoutait la donation, nouvelle, de plusieurs droits19. Trois ans plus tard, le comte Charles le Bon, pour trancher un conflit entre l’abbaye Saint-Bavon de Gand et son avoué, s’appuyait, à la demande d’ailleurs de l’abbé, sur un acte de son prédécesseur le comte Robert le Frison: praedictus abbas privilegium ab avo meo Rotberto pie memorie viro confirmatum et sigillatum demonstraverit et me ejusdem privilegii contrascriptum habere innotuerit et juxta tenorem utriusque privilegii libertatem ecclesie contra praedictum advocatum … me defensare … . Une deuxième fois, l’abbé demande au comte de secundum praedictum avi mei privilegium libertatem ecclesie defensare et conservare. L’acte cite ensuite explicitement la charte de Ro-bert: Predicti igitur privilegii tenor talis est … . La citation de la charte de Robert est suivie par une formule de confirmation: Hanc igitur ecclesie libertatem ab avo meo Rotberto sicut hic recitatum est confirmatam, ego quoque Karolus comes Flandrie confirmavi 20.

15 Luc d’Achery, Veterum aliquot scriptorum spicilegium 2 (Paris ²1723) 816. Il s’agit sans doute de la charte donnée en 1132 par l’évêque Milon Ier (ed. ibid. 804).

16 Ibid. 829. La charte, non datée, de l’évêque Didier est éditée ibid. 820.17 Aubertus Miraeus–Joannes Franciscus Foppens, Opera diplomatica 1–4 (Bruxelles 1723–1748) 2

955–957.18 Recueil des chartes du prieuré de Saint-Bertin à Poperinghe et de ses dépendances à Bas-Warneton et à

Couckelaere déposées aux archives de l’État à Gand, ed. Felix-Henry d’Hoop (Recueil des chroniques, chartes et autres documents concernant l’histoire et les antiquités de la Flandre-Occidentale 36, Bruges 1870) 12s. no. 10 et 10s. no. 8.

19 Actes des comtes de Flandre (cit. n. 5) 195–197 no. 87.20 Ibid. 243–247 no. 107. Pour d’autres exemples ultérieurs parmi les chartes des comtes de Flandre, voir

p. ex. De oorkonden der graven van Vlaanderen (Juli 1128–September 1191) II: Uitgave 1–3, ed. Thérèse de

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On notera cependant qu’en ce début de XIIe siècle, bien des mentions d’actes des prédécesseurs sont encore implicites ou à peine explicites, comme quand le comte Charles le Bon confirme en 1121 les biens de la prévôté de Bergues donnés par son prédécesseur Baudouin V (illam libertatem quam Balduinus comes quondam eidem ecclesie donavit). En réalité, l’acte de Charles reprend fréquemment des passages entiers de celui de Baudouin, mais il n’y a pas d’autre indication en ce sens que, de manière assez vague, secundum tenorem donationis prefati Balduini comitis ou quod vero memoratus comes Balduinus insti-tuit, scilicet …, ego quoque iterato confirmo21. À partir de là la pratique se répétera fréquem-ment, comme en 1125 pour l’abbaye de Marchiennes22.

Chez les comtes de Ponthieu le plus ancien exemple connu se trouve dans un acte donné en 1195 par le comte Guillaume avec le comte de Boulogne Renaud. Cet acte est en fait un procès-verbal d’ouverture de la châsse contenant les reliques de saint Josse, et atteste qu’un authentique de reliques scellée par l’évêque d’Amiens Gui et par les comtes Gui de Pontieu et Étienne de Boulogne y avait été trouvée: feretrum quod reliquias conti-nebat aperuisset, invenimus in uno involucro caput cum ossibus et alio ejus pulverem clausum, necnon et litteras Garini, quondam Ambianensis episcopi, et predecessorum nostrorum Gui-donis, Pontivi, et Stephani, Bolonie comitum, et Roberti, eorum tempore abbatis hujus ceno-bii, sigillis firmatas deprehendimus, contestantes quod anno ab incarnatione Domini Mº Cº XXXIIIIº simili modo fuerant revelata eadem caput et ossa, ut pulvis qui inventus fuerat in pariete hujus ecclesie in eodem vase cum ossibus locaretur23.

Pour les comtes de Vermandois ou ceux de Boulogne, il n’existe pas de recueil sys-tématique des actes qu’ils ont pu donner. On se bornera ici à signaler un acte donné en 1145 par le comte de Boulogne Étienne (également comte de Mortain et roi d’Angle-terre), confirmant les biens de l’abbaye de Samer ad exemplar excellentissimorum prede-cessorum nostrorum, Eustacii junioris, Eustacii senioris, Ernulfi, comitum Bolonie, quorum scripta autentiqua vidimus et approbavimus24, et un autre daté de 1165, par lequel le comte de Vermandois Philippe (également comte de Flandre) confirmait au prieuré de Crépy-en-Valois la donation d’un tonlieu que lui avait faite le comte de Vermandois Raoul (quemad-modum bone memorie Radulfus comes eidem ecclesie post obitum suum concessit scriptoque suo firmavit habendum, favente etiam domino Ludewico Francorum rege)25. Chez les comtes de Saint-Pol il faut, semble-t-il, attendre février 1207 pour que le comte Gaucher de Châ-tillon confirme explicitement la charte donnée en 1196 par son prédécesseur Hugues IV à l’abbaye de Saint-Bertin26.

Un autre type de confirmation se produit lorsqu’un auteur confirme un acte donné, non par un de ses prédécesseurs, mais par un autre auteur. Parmi les actes des comtes de Flandre le plus ancien exemple se situe entre 1119 et 1127 (peut-être en 1120?), dans un

Hemptinne–Adriaan Verhulst (Recueil des actes des princes belges / Verzameling van de acten der belgische vorsten 6/II/1–3, Bruxelles/Brussel 1988–2009) 1 101s. no. 59 (pour l’abbaye de Saint-Bertin, datable de 1128/1142).

21 Actes des comtes de Flandre (cit. n. 5) 236–240 no. 105.22 Ibid. 269–271 no. 118.23 Recueil des actes des comtes de Pontieu, ed. Clovis Brunel (Paris 1930) 210s. no. 140.24 Daniel Haigneré, Quelques chartes de l’abbaye de Samer. Mémoires de la société académique de l’arron-

dissement de Boulogne-sur-Mer 12 (1880) 89–252, cit. 120–123 no. 5.25 De oorkonden der graven van Vlaanderen (Juli 1128–September 1191) (cit. n. 20) 1 388s. no. 244. La

charte donnée, apparemment après sa mort (?), par le comte Raoul semble perdue.26 Les chartes des comtes de Saint-Pol (XIe–XIIIe siècles), ed. Jean-François Nieus (ARTEM 11, Turnhout

2008) 231 no. 153 et 175s. no. 92.

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acte par lequel le comte Charles le Bon confirmait à l’abbaye d’Auchy les biens que lui avait cédés Enguerran d’Hesdin. Le comte ne mentionne pas explicitement, au début de sa charte, l’acte d’Enguerran (libertates et cetera dona que … Ingelrannus Hisdinensis contu-lit), même si l’indication d’une lecture (placuit recitari) le sous-entend. C’est surtout à la fin de l’acte qu’on trouve une mention explicite (Hec omnia, ut prediximus, in hac karta assignata videntur). Encore cette mention n’est-elle alors pas explicitement liée à la confir-mation comtale, mais à celle (apparemment purement orale) faite par le comte d’Hesdin à la mort d’Enguerran27.

Chez les comtes de Saint-Pol le cas le plus ancien date de 1187: le comte Hugues IV confirme à l’abbaye de Saint-André-au-Bois la possession de tous les biens qu’elle a acquis de Guillaume, châtelain de Saint-Omer, dans le fief de Beaurain28. La pratique est plus ancienne chez les évêques de Thérouanne, mais elle va à rebours de la manière habituelle puisque l’évêque Gérard, dans la charte qu’il donne en 1097 à l’abbaye de Saint-Bertin, renvoie à une bulle pontificale, c’est-à-dire à un document issu d’une autorité supérieure. Toute la charte en fait est construite autour de cette bulle: le préambule parle de l’impor-tance de l’écrit; l’exposé mentionne l’obtention d’une bulle par l’abbé de Saint-Bertin lors du concile de Clermont en 109529; le dispositif confirme les dispositions contenues dans cette bulle30. Il s’agit là cependant d’une mention exceptionnelle: en dehors de ce cas, il faut attendre 1142 pour que l’évêque Milon Ier confirme à l’abbaye d’Arrouaise la possession de la dîme de Marck qui lui avait été donnée par Mathilde, reine d’Angleterre et comtesse de Boulogne, et mentionne explicitement la charte que celle-ci avant donnée à ce sujet31.

Dans le courant du XIIe siècle le principe de la confirmation des actes donnés par d’autres auteurs se généralise. Quelques exemples le montreront. En 1182 Pierre de Pic-quigny faisait une donation à l’abbaye d’Anchin et émettait une charte à ce sujet. L’évêque d’Amiens Thibaud, confirmant cette donation, mentionnait explicitement la charte de Pierre: … isdem fratribus perpetuo habendam in elemosinam concesserit et scripto suo confir-maverit et a nobis confirmari postulavit, videlicet duas terre carrucatas quas, sicut in scripto ipsius autentico continebatur … . Hec igitur ad petitionem jam dicti Petri, sicut in scripto ipsius contineri vidimus, fratribus et monasterio Aquicinct[ensi] confirmamus32.

27 Actes des comtes de Flandre (cit. n. 5) 286–290 no. 124.28 Les chartes des comtes de Saint-Pol (cit. n. 26) 154 no. 69: et sicut in cyrographo super predictis possessio-

nibus ab eodem composito et ejusdem Willelmi sigillo confirmato continetur.29 La bulle d’Urbain II, donnée en réalité à Sauxillanges le 3 décembre 1095, est éditée dans: Papsturkun-

den in Frankreich 3: Artois, ed. Johannes Ramackers (Abhandlungen der Gesellschaft der Wissenschaften zu Göttingen, phil.-hist. Kl. III/23, Göttingen 1940) 36–38 no. 4 (JL 5600a).

30 Et quoniam constat hoc presens seculum in suis partibus esse caducum et labile, dignum duxi, non solum testibus, verum etiam scripto, ut ratum maneat, confirmare. Eo igitur tempore quo domnus apostolicus Urbanus apud urbem Avernie concilium celebravit, domnus Lambertus, tunc monasterii Beati Bertini abbas, apud ipsius miseri-cordiam impetravit, ut de ecclesie, cui preerat, possessionibus, ei privilegium fecisset, et factum auctoritatis sue signo confirmasset … . Quam postulationem, quia satis erat idonea et honestati obnoxia, coram sancta synodo, impresso nostre auctoritatis sigillo, benigne confirmamus, ita videlicet, sicut in privilegio apostolico supramemorato continetur. Cartulaire de l’abbaye de Saint-Bertin, ed. Benjamin Guérard (Paris 1841) 242–244, avec les compléments de: Les chartes de Saint-Bertin, ed. Daniel Haigneré (Saint-Omer 1886) 1 39 no. 98.

31 Monumenta Arroasiensia, ed. Benoît-Michel Tock–Ludo Milis (CCCM 175, Turnhout 2000) 91–93 no. 34: scriptoque firmavit et sicut in ipsius munimento continetur, hoc ipsum vobis auctoritate ecclesiastica confir-mari devote petiit. La charte de Mathilde, datée du 23 juin de la même année 1142, est éditée ibid. 90s. no. 33.

32 Les chartes de l’abbaye d’Anchin (1079–1201), ed. Jean-Pierre Gerzaguet (ARTEM 6, Turnhout 2005) 312 no. 223.

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Actes confirmatifs et vidimus dans la Nord de la France jusqu’à la fin du XIIIe siècle 233

En 1198 Guillaume, archevêque de Reims, confirmait l’acte par lequel Jean, seigneur d’Oisy et de Montmirail, avait concédé, la même année, un bois à l’abbaye de Vaucelles: Noverit universitas vestra quod vidimus et audivimus litteras sigillis Johannis de Oisiaco et de Montemirabili et uxoris sue Heylvidis sigillatas, in quibus continebatur quod … . Conces-sit etiam eisdem fratribus alia quedam que in litteris continentur … . Nos igitur, elemosi-nam a predictis Johanne et Helvide uxore ejus memorate ecclesie de Vaccellis factam sicut in eorum scripto autentico vidimus plenius contineri, ratam habemus et approbamus33. De la même manière, Étienne, évêque de Noyon, confirmant en 1199 une donation faite par le chapitre Saint-Fursy de Péronne au chapitre cathédral d’Arras, mentionnait en fait la confirmation de la charte, et pas seulement celle de l’action juridique: Nos igitur conven-tionem illam, sicut in Peronensis ecclesie autentico scripto vidimus contineri, laudantes et approbantes34.

En général, la mention explicite d’une autre charte est liée à la confirmation de celle-ci, ou du moins des dispositions qui y sont contenues. Cependant, le développement de l’usage de l’écrit en matière judiciaire dans le courant du XIIe siècle permit de mul-tiplier les citations d’actes. Le pape par exemple pouvait renvoyer à un autre acte pour indiquer quelle était la source de son intervention. C’est ce qu’on voit dans une bulle d’Alexandre III pour le Val-Saint-Pierre: Vidimus scriptum autenticum bone memorie Hen-rici quondam Remensis archiepiscopi, ex cujus nobis tenore innotuit, quod … . Nos itaque paci vestre paterna volentes sollicitudine providere eandem possessionem, sicut per sententiam vestre cesserunt ecclesie et in autentico scripto, quod super hoc factum est, continetur, vobis et eidem ecclesie auctoritate apostolica confirmamus35. Parfois cependant on voit moins clairement la nécessité de ce renvoi. Un cas un peu curieux est celui de la charte d’exemption de péage concédée en janvier 1199 par le comte de Flandre Baudouin IX à l’abbaye de Signy36. Car cette charte flamande fait référence à une charte de même contenu concédée par le comte de Namur Henri en 118237: ego libertatem et immunitatem quam dicti fratres habent ab il-lustri viro bonae memoriae Henrico quondam comite Namurcensi eundi et redeundi libere … sicut in litteris ipsius Henrici plenius continetur, ipsis fratribus in perpetuum confirmavi. Pourquoi mentionner l’acte d’Henri de Namur? L’acte de Baudouin de Flandre est très clair et explicite, et n’avait en rien besoin de celui d’Henri de Namur. On peut supposer que la charte d’Henri de Namur a servi de base à la rédaction, peut-être par les moines de Signy, de celle de Baudouin38.

33 Les chartes de l’abbaye cistercienne de Vaucelles au XIIe siècle, ed. Benoît-Michel Tock (ARTEM 12, Turnhout 2010) 230s. no. 162. La charte de Jean d’Oisy se trouve ibid. 229 no. 160.

34 Le cartulaire du chapitre d’Arras, ed. Auguste de Loisne (Paris 1896) 64 no. 92. Pour la charte du chapitre de Péronne, voir ibid. 64 no. 91 et Charters of St-Fursy of Péronne, ed. William M. Newman (The Mediaeval Academy of America Publication 85, Cambridge [Mass.] 1977) 74 no. 68.

35 Papsturkunden in Frankreich 4: Picardie, ed. Johannes Ramackers (Abhandlungen der Akademie der Wissenschaften in Göttingen, phil.-hist. Kl. III/27, Göttingen 1942) 399 no. 246 (JL 14.341).

36 De oorkonden der graven van Vlaanderen (1191–aanvang 1206) II: Uitgave, ed. Walter Prevenier (Recueil des actes des princes belges / Verzameling van de acten der belgische vorsten 5/II, Bruxelles/Brussel 1964) 214s. no. 98.

37 Pour la charte d’Henri, comte de Namur, de 1182: Actes des comtes de Namur de la première race (946–1196), ed. Félix Rousseau (Recueil des actes des princes belges [1], Bruxelles 1936) 54s. no. 24.

38 Cependant on notera que pour son éditeur, la charte de Baudouin a été produite par la chancelle-rie comtale flamande (Walter Prevenier, De oorkonden der graven van Vlaanderen [1191–aanvang 1206] I: Diplomatische inleiding [Recueil des actes des princes belges / Verzameling van de acten der belgische vorsten 5/I, Bruxelles/Brussel 1966] 124). Peut-être faudrait-il reprendre la question en prenant en compte de possibles réseaux cisterciens.

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La confirmation peut résulter d’une circonstance curieuse. Vers 1136/1138, l’arche-vêque de Reims Renaud II réussit à apaiser une querelle entre l’abbaye Saint-Thierry de Reims et Gérard de Roucy, et il promulgua une charte à ce sujet39. Mais Gérard relevait du diocèse de Laon, et c’est l’évêque de Laon, Barthélemy, qui l’avait excommunié. Ce pourquoi il y eut aussi une charte donnée par l’évêque Barthélemy. Ce dernier, relatant l’affaire, insistait sur le fait que sa source était la charte archiépiscopale: … sicut presens archiepiscopi docet ac testatur relatio. … Ipse nobis archiepiscopus mittere curavit que, sicut sua corroborata vidimus auctoritate, sic et nostra premuniri rogavit. Quod certe ita factum est, ut absque omni mutatione quicquid in ejus cartula de pacis tenore scriptum repperimus, hic quoque scriptum possit inveniri … . On est donc bien ici dans le cas d’une confirmation d’une charte contemporaine, mais donnée par une autorité supérieure à celle du confir-mant. Le rédacteur de la charte était d’ailleurs conscient que cela pouvait poser problème, puisqu’il indique que l’évêque confirme l’accord quoniam ille [sc. Gerardus] parrochianus noster est, in his que de ipso ad nos pertinere videntur collaudamus et confirmamus … et cherche à désamorcer les critiques: Si quis vero hujus assensus nostri privilegium, eo quod compositioni presentes non fuimus, minus firmum ac minus sufficienter appellare presumpse-rit, patienter audiat que secuntur, ubi qua usi ratione, qua sufulti simus auctoritate, liquido poterit advertere40.

2. Les vidimus et autres actes insérés

La confirmation change d’échelle lorsque l’acte confirmé n’est pas simplement men-tionné, mais est intégralement retranscrit. Il s’agit alors de ce qu’on appelle le vidimus, „acte par lequel une autorité atteste sous son sceau avoir vu un acte antérieur ayant tous les caractères de l’authenticité, en décrit éventuellement les caractères externes (et notam-ment le sceau et ses attaches) et en reproduit intégralement le texte sans en rien modi-fier afin de donner authenticité au document ainsi transcrit“41. Il s’agit d’actes composés de deux formules comme Guido, comes Sancti Pauli, universis presentes litteras inspecturis, salutem in Domino. Noveritis nos litteras Balduini, domini de Rollaincourt, militis, hominis nostri, vidisse in hec verba et Et nos predictus comes Sancti Pauli, propter Deum et ratione divini cultus augmentandi, omnia suprascripta tanquam dominus superior laudamus et ap-probamus, et dictum terragium ad opus capituli, ecclesie et capellanie predictorum extra feo-dum et dominium nostrum ponimus, et ea ab omni iurisdictione, servitio, onere et redebentia eximimus et totaliter amortimus sub testimonio presentium litterarum. Datum anno Domini M° CC° LXX° VIII°, mense martio, séparées par le texte de l’acte vidimé42. C’est une invention relativement tardive de la diplomatique, puisque les plus anciens exemples remontent au début du XIIe siècle43. C’est aussi un genre d’acte qui a connu un grand

39 Archives administratives de la ville de Reims. Collection de pièces inédites pouvant servir à l’histoire des institutions dans l’intérieur de la cité, ed. Pierre Varin (Collection de documents inédits sur l’histoire de France, première série: histoire politique, Paris 1839) 1 293–295 no. 64.

40 Actes des évêques de Laon des origines à 1151, ed. Annie Dufour-Malbezin (Documents, études et répertoires publiés par l’Institut de Recherche et d’Histoire des Textes 65, Paris 2001) 279s. no. 180.

41 Vocabulaire international de la Diplomatique, ed. Maria Milagros Cárcel Ortí (Col·lecció oberta 28, València 1997) 34 § 67.

42 Les chartes des comtes de Saint-Pol (cit. n. 26) 423–426 no. 344.43 Giry, Manuel de Diplomatique (cit. n. 4) 18s.

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Actes confirmatifs et vidimus dans la Nord de la France jusqu’à la fin du XIIIe siècle 235

succès, mais qui a jusqu’à présent suscité peu d’études. Les grands manuels lui consacrent quelques passages44, mais il n’existe que quelques rares études spécifiques45.

Les vidimus de ce genre ont cependant été précédés par d’autres tentatives. On peut en effet considérer que certaines pancartes de confirmation, parce qu’il s’agit d’actes dans lesquels sont recopiés et confirmés des actes antérieurs, constituent une première forme de vidimus. Il s’agit en particulier de chartes normandes du XIe siècle, du genre appelé par Michel Parisse „charte récapitulative“46 et par David Bates „charte de confirmation“47. On retrouvera le même principe dans les pancartes cisterciennes, notamment bourgui-gnonnes, du XIIe siècle, qui reproduisent, sous une confirmation généralement épiscopale, le texte d’actes plus ou moins informels mais qui sont parfois de vraies notices48.

Dans le Nord de la France actuelle, la plus ancienne confirmation d’acte inséré que j’aie pu trouver porte sur un acte que nous avons déjà rencontré: la charte par laquelle l’évêque de Cambrai Gérard II confirmait la „loi“ de son prédécesseur l’évêque Rothard en matière de redevances serviles. Car si Gérard évoquait, mais sans la reproduire, la lex scripta de Rothard, en 1119 l’évêque Burchard confirmait l’ensemble. Sa charte com-mençait par une reproduction intégrale du texte de la charte de Gérard, qu’il confirmait ensuite (hanc eandem constitutionem confirmo)49.

L’invention du vidimus s’est faite, de toute façon, de manière très progressive, comme le montre le cas des actes des comtes de Flandre. Tous les actes de ces princes pour la période allant de 1071 à 1206 ayant été édités, il est possible d’analyser de manière ex-haustive leur pratique du vidimus. Elle est rare: on ne connaît que trois cas au total, pour un ensemble de 1267 actes; encore s’agit-il, pour les plus anciens, d’actes qui évoluent vers le vidimus plus que de vidimus déjà constitués. Le plus ancien date de 1140. C’est une charte par laquelle le comte de Flandre Thierry d’Alsace confirmait les donations faites à l’abbaye d’Eename par ses prédécesseurs les comtes Baudouin [VII] et Charles et ajoutait sa propre donation. L’acte commence par une reproduction d’un texte qui se présente comme une charte du comte Baudouin (In nomine sancte et individue Trinitatis. Balduinus, Dei gratia Flandrie comes, omnibus tam ecclesiasticis quam secularibus …). Après le dispositif de cette charte, le scribe est passé sans transition ni avertissement à la charte du comte Thierry (Hanc liberam habitationem monachorum atque cohabitatorum suorum a duobus comitibus predecessoribus meis, Balduino atque Karolo, Eihamensis ecclesie monachis esse concessam ego Theodericus comes, considerans atque collaudans …). On notera qu’il n’y a pas d’indication explicite de l’existence d’une charte du comte Baudouin (et moins encore du comte Charles). Il y a donc ici insertion d’une charte, mais certainement pas de vidi-

44 Ibid. 19–26.45 Nicholas Vincent, The Charters of King Henry II: the Introduction of the royal Inspeximus revisited,

in: Dating Undated Medieval Charters, ed. Michael Gervers (Woodbridge 2000) 97–120; Jacobus Leonardus van der Gouw, Le vidimus aux Pays-Bas septentrionaux, in: Varia Codicologica. Essays presented to G. I. Lieftinck (Amsterdam 1972) 1 99–109.

46 Michel Parisse, Les pancartes. Étude d’un type d’acte diplomatique, in: Pancartes monastiques des XIe et XIIe siècles. Table ronde organisée par l’ARTEM, 6–7 juillet 1994, Nancy, ed. Michel Parisse–Pierre Pegeot–Benoît-Michel Tock (ARTEM 3, Turnhout 1998) 11–62.

47 David Bates, Les chartes de confirmation et les pancartes normandes du règne de Guillaume le Conquérant, in: ibid. 95–109.

48 Voir notamment Hubert Flammarion, Remarques sur quelques pancartes épiscopales du diocèse de Langres au XIIe siècle, in: ibid. 111–130.

49 Chartes de coutume en Picardie, XIe–XIIIe siècle, ed. Robert Fossier (Collection de documents inédits sur l’histoire de France. Section de philologie et d’histoire jusqu’à 1610, série in-8° 10, Paris 1974) 133s. no. 4.

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mus en tant que tel. La confirmation que donne le comte Thierry porte d’ailleurs plus sur la donation de ses prédécesseurs que sur leur charte50.

En 1176 le comte de Flandre Philippe confirmait les biens et la liberté de l’abbaye de Ninove tout en confirmant qu’il en était l’avoué; il intervenait aussi pour confirmer une charte par laquelle Gérard de Grimbergen et son épouse Mathilde avaient eux-mêmes confirmé à l’abbaye les biens que celle-ci avait reçus de leur part. La charte comtale com-mence, après le protocole et un préambule, par un dispositif dans lequel le comte explique que Gérard et Mathilde ont confirmé les biens monastiques et lui ont demandé de le faire aussi, ce qu’il fait (recognosco, do et confirmo). C’est ensuite seulement qu’il annonce l’existence d’une charte de Gérard, et qu’il cite explicitement le dispositif de cette charte: Ut autem immobiliter pactum ipsum in perpetuum perseveret, placuit tenorem ejusdem pacti et privilegium prefati domini Gerardi suis verbis, suis continentiis et testimoniis ea auctoritate, meo obligare privilegio. Est autem hujuscemodi: Gerardus de Grinbergis et uxor ejus Magtildis et filii eorum Gerardus et Arnulfus, tam futuris quam presentibus in perpetuum … . S. Walteri de Impes. Hactenus dominus Gerardus. Suivent ensuite une dernière formule de confirma-tion, une clause comminatoire, l’annonce du sceau et des témoins, la liste de ceux-ci et la date. On a donc ici une charte insérée à l’intérieur d’une autre et clairement annoncée comme telle51. La copie cependant n’est pas parfaite: l’invocation et la date (1167) ont été omises (mais le préambule et la liste des témoins ont bien été repris intégralement), quelques mots été changés (quia/quoniam, usque ad/usque quo).

En 1187 le comte de Flandre Philippe donnait aux lépreux d’Ypres une charte qui commençait par une copie de la charte qu’il leur avait donnée en 1176, y compris l’invo-cation et la datation, et se poursuivait par le récit d’une donation supplémentaire, une nouvelle date (1187) et une nouvelle liste des témoins, sans confirmation ni même men-tion explicite qu’il s’agissait bien d’un acte antérieur52.

Le 22 juillet 1201 enfin, on dispose d’un vidimus entièrement constitué. Le comte Baudouin IX confirmait un accord intervenu entre le chapitre cathédral de Tournai et les paroissiens de Knesselare. La charte comtale commence par une approbation de l’accord selon les termes de la charte donnée à ce sujet par Guillaume de Zomergem, dont le texte suit: Ego Balduinus … conventiones … ratas et firmas habeo sicut continentur in scripto nobi-lis viri Willelmi de Zomerghem exinde confecto quod diligenter fecit michi explanari, cujus tenor his est: Novercari solent rerum … . L’acte se termine par la promesse du comte d’être garant de l’accord, l’annonce du sceau et de la liste des témoins, cette liste elle-même, la date et une souscription de chancellerie53.

C’est en effet surtout dans les dernières décennies du XIIe  siècle, et surtout au XIIIe siècle que l’usage du vidimus se répand54. Dans le Nord de la France, un cas parti-

50 De oorkonden der graven van Vlaanderen (Juli 1128–September 1191) (cit. n. 20) 1 94s. no. 54.51 Ibid. 435–438 no. 276. La charte de Gérard est dans: Miraeus–Foppens, Opera diplomatica (cit. n.

17) 1 541s., et dans le Thesaurus Diplomaticus 1.0 (CDRom, Bruxelles 1997) no. 5473.52 De oorkonden der graven van Vlaanderen (Juli 1128–September 1191) (cit. n. 20) 3 285s. no. 723, et,

pour l’acte antérieur, 3 12 no. 398bis.53 De oorkonden der graven van Vlaanderen (1191–aanvang 1206) (cit. n. 36) 350–352 no. 161. Cepen-

dant, il faut noter que cet acte n’est connu que par une copie, qui abrège la copie de l’acte de Guillaume de Zomergem en n’en reproduisant que les deux premiers mots suivis de etc. Walter Prevenier suppose, sans doute à juste titre, que l’acte original de Baudouin contenait l’ensemble de l’acte de Guillaume.

54 À la chancellerie royale française il faut attendre les dernières années du règne de Philippe Auguste (1180–1223) pour trouver des vidimus: Michel Nortier, Les actes faussement attribués à la chancellerie de Philippe Auguste. Académie des Inscriptions et Belles Lettres. Comptes rendus des séances 125/4 (1981) 657–683,

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Actes confirmatifs et vidimus dans la Nord de la France jusqu’à la fin du XIIIe siècle 237

culièrement précoce semble être celui de l’évêque d’Arras Pierre Ier (1184–1203): sur les 121 chartes données par cet évêque, 16 sont des vidimus. On peut relever: une sentence rendue par l’évêque Pierre, le doyen du chapitre cathédral Jean et le chanoine d’Arras Pierre de Corbie, juges délégués par le pape, au sujet d’un conflit entre les abbayes de Ber-teaucourt et de Fly, dans laquelle sont reproduits les actes par lesquels chacune des deux abbayes nommait son procureur auprès des juges (17 août 1186)55; deux confirmations en avril 1188 de deux chartes de donation du comte de Hainaut Baudouin V pour l’abbaye de Cysoing, dont l’une du moins est datée elle aussi d’avril 118856; confirmation d’une charte de son prédécesseur André entre 1163 et 1171 pour l’abbaye du Mont-Saint-Éloi57; notification en avril 1194, par l’évêque Pierre et l’archidiacre Raoul, juges délégués par le pape, d’un accord intervenu entre les abbayes Saint-Martin de Laon et Saint-Prix de Saint-Quentin, avec insertion d’un acte de l’abbé de Laon et d’un autre acte de l’abbé de Saint-Quentin, chacun notifiant l’accord passé avec l’autre partie58; notification le 30 juillet 1194 d’une donation faite par Robert de Hinges aux lépreux de Béthune, avec insertion d’une lettre envoyée à l’évêque par l’abbé de Warneton pour attester de cette donation59; notification en juillet 1194 et insertion d’une charte par laquelle Guillaume, seigneur de Béthune, concédait durant la même année à l’abbaye de Braine un cens an-nuel60; confirmation en janvier 1195 d’une donation faite par Jean de Hamelaincourt à l’abbaye d’Eaucourt61; confirmation en juin 1195 par l’évêque Pierre et l’archidiacre Raoul d’une charte de donation de Guillaume, comte de Ponthieu, pour les hospitaliers de Fieffes datée de 119562; confirmation le 21 août 1196 de la charte donnée la veille par Hugues, prévôt du chapitre Saint-Pierre de Douai, affectant les revenus d’une prébende à l’entretien d’un prêtre paroissial63; confirmation le 11 mars 1197 (n. st.) de la charte non datée (mais donnée en même temps ou très peu de temps auparavant) par laquelle l’abbé d’Arrouaise notifiait avoir vendu une terre à l’abbaye de Cantimpré64; jugement rendu le 25 juin 1197 par l’évêque Pierre, l’abbé de Saint-Vaast d’Arras Henri et l’abbé d’Hénin-Liétard Baudouin, juges délégués par le pape, dans une querelle entre l’abbaye

cit. 670.55 Les chartes des évêques d’Arras (cit. n. 9) 224–225 no. 199.56 Ibid. 232–233 no. 209 et 233–234 no. 210. Une des deux chartes de Baudouin est éditée dans: Cartu-

laire de l’abbaye de Cysoing et de ses dépendances, ed. Ignace de Coussemaker (Lille 1886) 64 no. 48. L’autre charte n’est pas conservée ailleurs que dans le vidimus de l’évêque Pierre (où elle n’est pas datée).

57 Les chartes des évêques d’Arras (cit. n. 9) 263 no. 239. La charte d’André est éditée ibid. 185s. no. 165.58 Ibid. 266s. no. 241. 59 Ibid. 269s. no. 244.60 Ibid. 270s. no. 245. La charte de Pierre est aussi éditée dans: Le chartrier de l’abbaye prémontrée de

Saint-Yved-de-Braine, ed. Olivier Guyotjeannin (Mémoires et documents de l’École des chartes 49, Paris 2000) 223s. no. 79. La charte de Guillaume se trouve ibid. 219s. no. 75. Il s’agit du seul vidimus du fonds de Saint-Yved, si on excepte un vidimus de 1379 d’une bulle d’Innocent II (298s. no. A2).

61 Les chartes des évêques d’Arras (cit. n. 9) 272s. no. 247.62 Ibid. 275s. no. 249. La charte de Pierre et Raoul est aussi éditée dans: Papsturkunden in Frankreich,

Neue Folge 7: Nördliche Ile-de-France und Vermandois, ed. Dietrich Lohrmann (Abhandlungen der Akade-mie der Wissenschaften in Göttingen, phil.-hist. Kl. III/95, Göttingen 1976) 310–312 no. 103. La charte de Guillaume est aussi dans: Recueil des actes des comtes de Pontieu (cit. n. 23) 208s. no. 138.

63 Les chartes des évêques d’Arras (cit. n. 9) 284 no. 259.64 Ibid. 286s. no. 262. La charte de Robert est aussi éditée dans: Benoît-Michel Tock, Les difficultés

financières de l’abbaye d’Arrouaise à la fin du XIIe siècle. Sacris Erudiri. Jaarboek voor Godsdienstwetenschappen 33 (1992–1993) 307–342, cit. 338s. no. 16; la charte de Pierre est indiquée ibid. 338 no. 15. Il y a cependant ici un problème de date dans la mesure où l’acte vidimé porte la date du 15 mars 1197 (n. st.), l’acte vidimant celle du 11 mars de la même année!

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238 Benoît-Michel Tock

Saint-Vincent et le chapitre Saint-Frambaud de Senlis, avec insertion d’une lettre non datée par laquelle maître Guillaume, chantre du chapitre cathédral Notre-Dame de Senlis et trésorier de Saint-Frambaud, reconnaissait le bon droit de l’abbaye Saint-Vincent65; confirmation en juillet 1198 de la fondation de l’abbaye de La Brayelle d’Annay, avec insertion de la charte par laquelle Hugues, abbé de Saint-Pierre de Gand, qui détenait différents droits sur ce lieu, avait dès 1196 autorisé cette fondation66; notification en août 1198 d’un accord passé entre Helvin de Sailly et le chapitre cathédral d’Amiens, avec insertion d’une lettre non datée adressée à l’évêque Pierre par Richard, doyen du chapitre cathédral d’Amiens, pour l’informer de cet accord67; notification en février 1201 (n. st.) de la donation faite en faveur du chapitre cathédral d’Arras par Eubert de Carency, avec insertion de la charte donnée en décembre 1200 par Eubert68; notification en février 1201 (n. st.) des donations faites en faveur de l’abbaye Saint-Aubert de Cambrai par Jean de Wancourt, avec insertion de la charte donnée en 1197 par Jean69; notification en 1200 des donations faites en faveur de l’abbaye de Vicoigne par Adam de Mastaing avec insertion de la charte donnée à ce sujet la même année par Baudouin VI, comte de Hainaut (et également comte de Flandre)70.

Mais si l’évêque d’Arras Pierre (et pas ses prédécesseurs) donne de nombreux vidimus à partir de la fin du XIIe siècle, il n’en va pas de même dans le diocèse voisin de Thé-rouanne, où jusqu’en 1207 on ne connaît qu’un vidimus. Encore est-il donné non par l’évêque seul, mais par Guillaume, archevêque de Reims, Lambert, évêque de Thérouanne, Thibaud, évêque d’Amiens et Pierre, évêque d’Arras, qui y notifient avoir été présents à Hesdin quand le roi Philippe y fit exhiber la charte d’hommage à lui rendu par Renaud, comte de Boulogne, dont ils reproduisent le texte71. À la même époque à Reims, pour autant qu’on puisse en juger en l’absence d’édition critique de ses actes, l’archevêque Guillaume aux Blanches-Mains (1175–1202) ne semble pas avoir été très partisan des vidimus. Pourtant, il lui arrive souvent de confirmer un autre acte, mais en ce cas il le fait en analysant l’acte, pas en le recopiant. On peut citer comme exemple la charte qu’il a donnée en 1193 à l’abbaye du Mont-Saint-Martin: Willelmus … Noverint igitur tam futuri quam presentes quod nos, inspecto tenore litterarum sigillo tam dilectorum filiorum nostrorum abbatis et capituli de Monte Sancti Martini quam sigillo canonicorum Sancti Quintini signatarum … nichilo-minus attendentes alias conventiones in eisdem notatas litteris … omnes illas conventiones ... approbantes et ratas habentes et firmas, omnia sicut in scripto continentur autentico presentis scripti pagina communimus et sigilli nostri karactere confirmamus …72.

Au XIIIe siècle l’usage du vidimus se répand de manière très large. C’est ce que montrent, entre autres, les actes des comtes de Ponthieu, édités jusqu’à l’année 1279. Le

65 Les chartes des évêques d’Arras (cit. n. 9) 289 no. 266.66 Ibid. 301s. no. 280. La charte de l’abbé Hugues est éditée dans: Cartulaire et abbesses de La Brayelle

d’Annai de 1196 à 1504, ed. Albert Demarquette (Lille 1885) 257s. no. 1.67 Les chartes des évêques d’Arras (cit. n. 9) 302s. no. 281.68 Ibid. 309s. no. 291.69 Ibid. 311s. no. 292.70 Ibid. 316–318 no. 298. Dans le vidimus la charte comtale n’est pas datée, mais elle date elle aussi de

1200: Actes et documents anciens concernant la Belgique. Nouvelle série, ed. Charles Duvivier (Bruxelles 1903) 279–281 no. 146.

71 Henri Malo, Un grand feudataire. Renaud de Dammartin et la coalition de Bouvines. Contribution à l’étude du règne de Philippe Auguste (Paris 1898) 256s. Je prépare l’édition des chartes des évêques de Thé-rouanne jusqu’en 1207.

72 Acte inédit; copie au cartulaire de l’abbaye du Mont-Saint-Martin, Paris, BN, lat. 5478, fol. 60v.

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Actes confirmatifs et vidimus dans la Nord de la France jusqu’à la fin du XIIIe siècle 239

plus ancien de leurs vidimus date de 1203: donné par l’abbé de Saint-Josse-sur-Mer Flo-rent et par le comte Guillaume, il vidimait un acte attribué au comte Gui Ier (1053–1100) et confirmait ensuite diverses libertés de l’abbaye73; en 1208 le même comte Guillaume vidimait un acte donné en 1177 par son prédécesseur le comte Jean en faveur de l’ab-baye de Saint-Riquier, et remettait à cette abbaye un droit d’avouerie74; en 1210 le comte Guillaume vidimait une charte donnée en 1100 par le comte Gui Ier à l’abbaye Saint-Sauve de Montreuil75; le cas suivant est assez particulier puisqu’il s’agit d’une charte du comte Guillaume pour l’abbaye de Willencourt composée de deux parties, la première (datée de 1216) étant une confirmation comtale de diverses donations faites par des tiers, la seconde (datée de 1218) étant un vidimus d’une charte donation promulguée en 1217 par Robert Fretel 76; en 1231 (n. st.) le comte Simon confirmait l’accord intervenu en 1225 entre son épouse la comtesse Marie et le roi Louis VIII et commençait sa charte par un vidimus de la charte donnée à cette occasion par la comtesse77; en 1235 le comte Simon et la comtesse Marie vidimaient la charte de commune concédée en 1199 par le comte Guillaume aux bourgeois d’Abbeville78; en septembre 1242 le comte Mathieu et la comtesse Marie vidimaient une charte donnée le même mois par Jean Rabot et par laquelle celui-ci vendait à un bourgeois du Crotoy un revenu qu’il tenait d’eux79; en 1247 le comte Mathieu vidimait un acte donné par son épouse la comtesse Marie et confirmait une donation faite par son père le comte Guillaume au chapitre Saint-Vulfran d’Abbe-ville80; le 27 janvier 1258 (n. st.) la comtesse Jeanne vidimait la charte donnée la veille par Guillaume Tirel en reconnaissance de dette envers Mathieu de Trie81; toujours en janvier 1258, la même comtesse vidimait un acte donné en faveur de l’église de Forest-Montiers par son prédécesseur le comte Guillaume en 121082; en février 1263 (n. st.) le comte Jean et la comtesse Jeanne vidimaient une charte donnée en décembre 1262 par Henri d’Airaines et consignant une vente à l’abbaye de Selincourt, et une charte de confirmation donnée en décembre aussi par Philippa, comtesse de Gueldre83; les mêmes vidimaient en juillet 1268 une charte de vente donnée en janvier de la même année par Jourdain de Beaunay à l’abbaye de Selincourt84; en janvier 1270 les mêmes vidimaient une charte de vente donnée au cours du même mois à l’abbaye d’Epagne par Jean, seigneur de Mau-tort85; en janvier 1272 (n. st.) la comtesse Marie vidimait une charte donnée en mai 1239 à l’abbaye de Riéval par ses parents, le comte Simon et la comtesse Marie86; le 17 juin 1272 le comte Jean et la comtesse Marie vidimaient une charte de donation du chevalier

73 Recueil des actes des comtes de Pontieu (cit. n. 23) 249–253 no. 163 (l’acte de Gui Ier est ibid. 651s. no. 1).

74 Ibid. 284–287 no. 186.75 Ibid. 316s. no. 207.76 Ibid. 379–383 no. 260.77 Ibid. 419–421 no. 287.78 Ibid. 433–435 no. 298.79 Ibid. 486s. no. 347.80 Ibid. 511s. no. 364.81 Ibid. 558s. no. 406.82 Ibid. 559–562 no. 407.83 Ibid. 580–584 no. 423.84 Ibid. 596–598 no. 435.85 Ibid. 600s. no. 439.86 Ibid. 613 no. 448; la charte de Simon et Marie se trouve ibid. 458 no. 315.

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240 Benoît-Michel Tock

Gérard d’Abbeville à l’abbaye Saint-Acheul d’Amiens datée de juin 123987.On peut y ajouter un cas un peu curieux, qui malheureusement n’est connu que par

une copie dans un cartulaire, donc sans garantie absolue de fidélité à l’original. En 1219 le comte Guillaume confirmait un acte de son prédécesseur Jean. Le vocabulaire utilisé laisse penser qu’il s’agit d’un vidimus: Ego approbo et proprio sigillo confirmo ea que inveni scripta et sigillata sigillo patris mei Johannis in hec verba. Suit une phrase qui ne peut être qu’un préambule de la charte de Jean: Quoniam multa prius cognita, tempore labente, oblivioni traduntur, ut posteris innotescat, scripto commendavimus … . Mais ensuite on a un texte à la troisième personne, qui est plutôt une analyse détaillée de la charte de Jean, comme le montre la dernière phrase: Et eandem conventionem data fide comes et frater suus promi-serunt firmiter tenere et ubique guarandire. Si on comprend bien, il s’agit donc ici, sous l’apparence d’un vidimus, d’une simple analyse88. Un autre cas similaire se trouve en 1234 (n. st.) dans une charte du comte Simon et de la comtesse Marie analysant une charte de commune délivrée aux bourgeois d’Airaines par Henri d’Airaines et Aleaume de Fontaine, malgré une formulation secundum tenorem et formam cartule quam ipsi habent de domino H. de Arenis et de domino Alermo de Fontanis, que talis est …89.

En ce qui concerne les comtes de Saint-Pol, on dispose d’une édition récente et ex-haustive des actes donnés jusqu’à la fin du XIIIe siècle. Le plus ancien vidimus date de septembre 1226: la comtesse Élisabeth vidimait un acte de donation donné en 1184 par son père le comte Hugues IV à l’abbaye de Berteaucourt90; en mars 1242 (ou 1243, n. st.) le comte Hugues V vidimait un acte de Jean, abbé de Cercamp, non daté mais forcément récent puisque Jean n’était abbé que depuis 124091; en février 1254 (n. st.), deux actes donnés par le comte de Saint-Pol et le seigneur d’Aubigny vidimaient deux actes du même mois par lequel Mahaut, comtesse de Boulogne et également paire du comté d’Artois, donnait le comté de Boulogne, sous réserve d’usufruit, à sa cousine Mahaut, comtesse d’Artois92; en juin 1263 le comte Guy III vidimait un acte donné le même mois par Henri Rabos notifiant une vente au chapitre cathédral d’Amiens93; en novembre 1268 le même comte vidimait un acte donné le même mois par Drogon, seigneur de Bucquoy, consi-gnant une vente faite à un chapelain94; en septembre 1269 le même comte vidimait un acte donné le même mois par Florent Havet, seigneur de Forceville, et son épouse Éléo-nore, consignant la fondation d’une chapellenie95; en janvier 1273 (n. st.) le même comte vidimait un acte donné le même mois et consignant une vente faite par son vassal Jean de Bailleulmont au chapitre cathédral d’Arras96; en mars 1278 (ou 1279, n. st.) le même comte vidimait un acte donné le même mois par Baudouin, seigneur de Rollancourt, lui-même vidimant un acte donné le même mois par Jean Pessars et consignant une vente

87 Ibid. 614s. no. 450.88 Ibid. 395s. no. 269.89 Ibid. 425–427 no. 292.90 Les chartes des comtes de Saint-Pol (cit. n. 26) 287s. no. 221; la charte d’Hugues se trouve ibid. 147s.

no. 60.91 Ibid. 326s. no. 269. Sur Jean voir Adolphe de Cardevacque, Histoire de l’abbaye de Cercamp, ordre

de Cîteaux, au diocèse d’Amiens (Arras 1876) 99–101.92 Les chartes des comtes de Saint-Pol (cit. n. 26) 344–346 no. 289 et 346s. no. 290.93 Ibid. 359s. no. 304.94 Ibid. 377s. no. 314.95 Ibid. 382–385 no. 319.96 Ibid. 394–397 no. 328.

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Actes confirmatifs et vidimus dans la Nord de la France jusqu’à la fin du XIIIe siècle 241

faite au chapitre cathédral d’Arras97; en février 1284 (n. st.) le même comte vidimait un acte donné le même mois par Pierre Groignars consignant une vente faite en faveur d’un chapelain du chapitre cathédral d’Arras98; en février 1291 (n. st.) le comte Hugues VI vidimait un acte donné le même mois par Robert de Bailleul vidimant un acte donné le même mois par Gilles de Berlette et consignant une vente au chapitre cathédral d’Arras99; en février 1293 (n. st.) le successeur de Guy III, le comte Hugues VI, vidimait un autre acte donné le même mois par Robert de Bailleul et vidimant un acte donné le même mois par Gilles de Berlette, toujours à propos d’une vente au chapitre cathédral d’Arras100; en décembre 1299 le comte Guy IV vidimait un acte donné en août 1298 par Jean l’Oiseau de Frévent, consignant une vente à l’abbaye de Cercamp101.

À cette belle série on peut ajouter un cas beaucoup plus particulier. Car en mars 1251 (ou 1252, n. st.), en un acte dont l’original est perdu mais dont il reste une copie que l’on peut considérer comme fiable, le comte Guy III confirmait un ensemble de douze actes reçus par l’abbaye de Saint-Bertin, depuis un acte donné le 25 mars 1209 (n. st.) par Baudouin, doyen du chapitre cathédral de Thérouanne, jusqu’à un acte donné en février 1249 (n. st.) par Baudouin, seigneur de Heuchin102. La particularité ici est que les actes confirmés ne sont pas reproduits intégralement, mais résumés, avec copie de l’incipit et de la date: Ego Guido de Castellione, comes Sancti Pauli, notum facio omnibus tam presentibus quam futuris quod ego omnia et singula que secuntur ecclesie Sancti Bertini quantum in me est et tanquam dominus concedo, rata habeo et confirmo, videlicet cartam quam habet ipsa ecclesia a domino Balduino de Anving et Iohanne, filio eius, qui testantur per eandem cartam venditionem medietatis terragii totius parochie de Eskieres eidem ecclesie a Balduino de Briast esse legitime factam; que carta sic incipit: „Universis presens scriptum inspecturis, Balduinus de Anving et Iohannes, filius ejus primogenitus et heres, milites, in Domino salutem“ et cetera, et „data fuit anno Domini M° CC° XXX V°, mense julio“. Item confirmo et ratam habeo cartam Guidonis de Castellione … .

Rares sont les seigneurs pour lesquels existe une édition systématique. Les seigneurs de Nesle constituent une heureuse exception. C’est le 7 avril 1231 (n. st.) que le seigneur Jean II vidimait un acte donné en mars 1231 par Jean de Béthencourt à la Franche-Ab-baye près de Beaulieu103; en mai 1238 le même seigneur vidimait un acte de vente donné à l’abbaye de Fervaques par Rainier du Verguier en janvier 1238 (n. st.)104; en août 1259 Simon de Clermont, seigneur de Nesle, vidimait un acte donné en juillet de la même année par Gautier de Roye à la Franche-Abbaye105; en juillet 1267 le même seigneur vidi-mait un acte donné en avril 1266 (ou 1267, n. st.) à la Franche-Abbaye106; le 18 juillet

97 Ibid. 423–426 no. 344.98 Ibid. 434–437 no. 353.99 Ibid. 452–454 no. 366.100 Ibid. 464–466 no. 373.101 Ibid. 480–483 no. 383.102 Ibid. 338–340 no. 283.103 William M. Newman, Les seigneurs de Nesle en Picardie (XIIe–XIIIe siècles). Leurs chartes et leur

histoire (Bibliothèque de la société d’histoire du droit des pays flamands, picards et wallons 27, Paris 1971) 2 257–259 no. 158; Le chartrier de l’Abbaye-aux-Bois (1202–1341). Étude et édition, ed. Brigitte Pipon (Mémoires et documents de l’École des chartes 46, Paris 1996) 171s. no. 100 et 170s. no. 99.

104 Newman, Les seigneurs de Nesle en Picardie (cit. n. 103) 281–283 no. 178.105 Ibid. 314s. no. 203; Le chartrier de l’Abbaye-aux-Bois (cit. n. 103) 269s. no. 219 et 268s. no. 218.106 Newman, Les seigneurs de Nesle en Picardie (cit. n. 103) 319–321 no. 207; Le chartrier de l’Abbaye-

aux-Bois (cit. n. 103) 284 no. 237 et 283s. no. 236.

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242 Benoît-Michel Tock

1270 le même vidimait un acte donné au mois de mai par Gerard de Béthencourt, coûtre du chapitre de Péronne, à la Franche-Abbaye107; en mai 1273 le même vidimait un acte non daté de Jean d’Allaines vidimant un acte du 27 mars 1272 (n. st.) de Simon de Bail-leul pour la Franche-Abbaye108. Beaucoup d’actes, on le voit, pour la Franche-Abbaye, également appelée l’Abbaye-aux-Bois. Il est vrai que les seigneurs de Nesle étaient les fon-dateurs de cette abbaye, à laquelle ils accordaient donc un soin particulier. Mais dans le fonds d’archives de l’abbaye on trouve d’autres vidimus que ceux donnés par les seigneurs de Nesle109.

Au total, on compte 17 vidimus sur 489 actes donnés par les comtes de Ponthieu, 12 sur 383 chez les comtes de Saint-Pol, six sur 219 chez les seigneurs de Nesle. Il existe quelques vidimus dans la première moitié du XIIIe siècle, mais la plupart datent de la seconde moitié de ce siècle. Les vidimus sont un peu plus précoces chez les comtes de Ponthieu, ce qui permet, chez ceux-ci, de distinguer assez nettement une première phase, de vidimation d’actes donnés par des prédécesseurs, et une seconde phase, de vidimation d’actes donnés par des vassaux.

Si on regarde les choses du point de vue des bénéficiaires, on trouve le même déve-loppement lent au XIIe, rapide au XIIIe siècle. Prenons par exemple les actes de l’abbaye d’Arrouaise, dans le diocèse d’Arras110, dont les archives nous sont conservées de manière sans doute à peu près exhaustive jusqu’en 1182, voire 1190; de manière plus partielle ensuite111. Le plus ancien vidimus de ce fonds date du 15 mars 1159 (n. st.). C’est une bulle du pape Adrien IV, confirmant et vidimant la sentence rendue entre 1145 et 1149 par les évêques de Beauvais et d’Amiens, juges délégués par son prédécesseur Eugène III, dans une querelle opposant l’abbaye d’Arrouaise à celle Cercamp112; le vidimus suivant date de 1202: l’abbé d’Arrouaise Robert et le couvent du monastère, notifiant un accord intervenu entre l’abbé Gautier et Alard de Brouchy et reconnu par une charte datée de 1182, rappellent cette charte avant de mentionner d’autres accords intervenus plus récem-ment113; en 1215 Odon IV, seigneur de Ham, vidimait un acte de son père Odon III à la fin d’un acte par lequel il procédait à un échange avec l’abbaye114; en février 1232 (n. st.) l’évêque de Cambrai Godefroid vidimait une charte de donation émise le 7 décembre pré-cédent par Baudouin d’Aubencheul, et ajoutait qu’il avait vérifié que l’épouse de celui-ci avait bien marqué son accord à la donation115; en décembre 1255 le roi Louis IX vidimait une charte de vente issue en avril 1239 (ou 1240, n. st.) par Pierre Gosse de Bapaume116;

107 Newman, Les seigneurs de Nesle en Picardie 322s. no. 209; Le chartrier de l’Abbaye-aux-Bois 298 no. 255 et 297s. no. 254.

108 Newman, Les seigneurs de Nesle en Picardie 324–326 no. 211; Le chartrier de l’Abbaye-aux-Bois 305s. no. 264 et 302s. no. 260.

109 Ibid. 215s. no. 152, 216 no. 153, 216 no. 154, 256 no. 203 … .110 Sur l’abbaye d’Arrouaise voir Ludo Milis, L’ordre des chanoines réguliers d’Arrouaise. Son histoire

et son organisation, de la fondation de l’abbaye-mère (vers 1090) à la fin des chapitres réguliers (1471) 1–2 (Rijksuniversiteit te Gent. Werken uitgegeven door de faculteit van de letteren en wijsbegeerte 147–148, Bruges 1969).

111 Monumenta Arroasiensia (cit. n. 31) XXXVII–XXXIX pour la réalisation du cartulaire A en 1181/1182 et sa continuation jusque vers 1190.

112 Ibid. 184s. no. 84 (JL –); la charte des évêques de Beauvais et Amiens se trouve ibid. 119–121 no. 51.113 Ibid. 298–300 no. 167 et 416s. no. 249.114 Ibid. 309s. no. 174 et 442s. no. 271.115 Ibid. 466–469 no. 293 et 294.116 Ibid. 475s. no. 299 et 514 no. 232.

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Actes confirmatifs et vidimus dans la Nord de la France jusqu’à la fin du XIIIe siècle 243

le 27 juin 1257 le pape Alexandre IV approuvait et vidimait le règlement par lequel Eudes, évêque de Tusculum, et les cardinaux Jean et Hugues avaient imposé à l’ordre d’Ar-rouaise la consommation de viande trois fois par semaine117; le même pape Alexandre IV ayant cassé le 26 juillet 1257 la décision prise par l’archevêque de Reims et ses suffragants d’imposer à l’ordre d’Arrouaise le remplacement des religieuses défuntes par des chanoines réguliers, la bulle en question fut vidimée le 31 juillet par le cardinal Hugues, tandis que le 4 novembre, dans une bulle adressée à l’évêque de Paris, le pape lui-même vidimait l’acte du cardinal Hugues, et que le 5 novembre 1258 l’évêque de Paris, tranchant défini-tivement en faveur de l’ordre d’Arrouaise, vidimait d’abord la bulle du 4 novembre 1257, ensuite celle du 26 juillet118; le 7 décembre 1270 l’official d’Arras vidimait les actes donnés en 1141 par la reine d’Angleterre et comtesse de Boulogne Mathilde, le comte de Flandre Thierry, l’évêque de Thérouanne Milon119; le 19 septembre 1273 l’official de Cambrai vidimait une charte donnée en mars 1218 (n. st.) par l’évêque de Cambrai120; en juillet 1276 le commandeur du Temple dans le Laonnois vidimait un acte donné le même mois par Pierre de Manancourt121, tandis qu’en juin 1279 l’évêque de Noyon vidimait succes-sivement l’acte de Pierre, puis celui du commandeur; enfin le 4 novembre 1284 l’abbé d’Arrouaise et treize autres abbés de l’ordre arrivaient à un accord sur la visite des abbayes, y compris sur la visite de l’abbaye-mère d’Arrouaise, et dans la charte qu’ils donnaient à cette occasion ils vidimaient une bulle donnée par le pape Clément IV le 2 décembre 1266 (mais c’est pour contredire cette bulle, dont il est bien précisé qu’elle est mise en sommeil jusqu’à ce que le chapitre général la réveille ou la révoque), et une charte donnée le 1er juin 1252 par le cardinal-légat Hugues122.

Mis à part quelques très rares cas isolés, le vidimus se développe donc surtout, dans le Nord de la France, à partir du dernier quart du XIIe siècle. Ce développement est pro-gressif, jusqu’au milieu du XIIIe siècle: à ce moment le vidimus occupe une place relative-ment importante dans la production diplomatique. Comme souvent, ce sont d’abord les évêques et les princes (et les rois) qui ont eu recours à cette idée nouvelle. Un élément n’a guère été évoqué ici jusqu’à présent: le rôle des officiaux, pourtant très important123. On

117 Ibid. 517–519 no. 335 et 519–521 no. 336. On notera que le même pape a donné le 1er août 1257 une autre bulle sur le même sujet, mais cette fois sans vidimus de l’acte de l’évêque et des cardinaux (524–526 no. 339).

118 Ibid. 521–523 no. 337, 523s. no. 338, 526–528 no. 340, 532–535 no. 343. Le cardinal Hugues, après avoir vidimé la bulle du 26 juillet, donnait trois mois à l’archevêque de Reims pour prouver que l’ordre d’Arrouaise avait approuvé le remplacement des religieuses par des chanoines, et c’est cette disposition qu’Alexandre IV confirmait en novembre en demandant à l’évêque de Paris de vérifier ce qu’il en était.

119 Ibid. 83–88 no. 28–30 et 566s. no. 370. Nous avions déjà rencontré le vidimus donné en novembre 1268 par le comte de Saint-Pol d’un acte de Drogon de Bucquoy (ibid. 562 no. 367).

120 Ibid. 447s. no. 275 et 567 no. 371.121 Ibid. 577–579 no. 379, 580s. no. 381, 581s. no. 383.122 Ibid. 499s. no. 316, 556–558 no. 363, 594–596 no. 393. Le texte de 1284 dit bien: Insuper, littera

domini Clementis pape predicta dormiat quousque per generale capitulum fuerit suscitata seu etiam revocata.123 Pour Tournai voir Monique Vleeschouwers-Van Melkebeek, De officialiteit van Doornik. Oor-

sprong en vroege ontwikkeling (1192–1300) (Verhandelingen van de Koninklijke Academie voor Wetenschap-pen, Letteren en Schone Kunsten van België, Klasse der Letteren, Jaargang 47, 117, Bruxelles 1985), qui cite des exemples à partir de 1219, mais ne développe pas cet aspect de l’activité des officiaux. L’ouvrage classique sur les officialités, celui de Paul Fournier, Les officialités au Moyen Âge. Étude sur l’organisation, la compétence et la procédure des tribunaux ecclésiastiques ordinaires en France de 1180 à 1328 (Paris 1880), ne porte, comme son titre l’indique, que sur la compétence judiciaire de l’officialité et ne mentionne que très rapidement et incom-plètement la question du vidimus, ibid. 196. La belle étude d’Olivier Guyotjeannin, Juridiction gracieuse

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citera à titre d’exemple le vidimus donné le 18 février 1261 (n. st.) par maître Pierre de Saint-Martin, official de Soissons, d’un acte donné en janvier 1240 (n. st.) par les exécu-teurs testamentaires du seigneur Jean de Nesle124.

Reste la question de la raison d’être du vidimus. Pourquoi celui-ci a-t-il été inventé et s’est-il développé? Une première raison est liée à la conservation des actes: le vidimus peut être dû à une volonté de préserver un acte fragile. Quand le comte de Flandre Bau-douin IX confirme en 1201 à l’abbaye de Corbie un don fait par son lointain prédécesseur le comte Robert II en 1096, sa charte reproduit l’ensemble de l’acte donné en 1096 par l’abbé de Corbie Nicolas (Est autem hec forma et continentia scripti illius), et précise ensuite que le sceau (comtal) de l’acte de 1096 est en mauvais état: Verum, quia illud sigillum comitis Roberti, quod appendebat scripto illi, pre nimia vetustate, sicut propriis oculis vidi et notavi, fere confractum fuit, ne in posterum predicta ecclesia possessionum suarum aliquod dampnum posset incurrere, eidem ecclesie omnia jura sua, sicut in scripto illo continetur, ple-narie recognovi125. Cependant, de telles indications sont rares et ce n’est certainement pas là qu’il faut chercher la principale raison d’être des vidimus.

Il ne faut jamais oublier, en ce qui concerne la diplomatique médiévale, la pratique de l’élaboration des actes par les destinataires. En ce qui nous concerne, cela signifie que c’est aussi ce dernier qui, en rédigeant la charte ou tout au moins la petitio qui allait être prise pour modèle, pouvait souhaiter mentionner ou inclure un acte antérieur, à la fois pour valider celui-ci et justifier l’acte demandé. On en prendra pour exemple une bulle du pape Lucius III, datée de 1183, pour l’abbaye de Saint-Trond. Le pape confirme à l’abbaye son locus et l’église d’Oudenburg, telle que l’avait donnée par une charte l’évêque d’Utrecht Baudouin, dont il reproduit ensuite la charte: ecclesiam de Alburg quam vestro monasterio venerabilis frater noster Balduwinus Trajectensis episcopus pia vobisque largitione concessit sicut in ipsius scripto autentico continetur et vos eam canonice possidetis, cujus rescriptum de verbo ad verbum duximus annotandum: In nomine sancte et individue …126. La rareté même de ce cas suggère clairement que l’acte de Baudouin était inséré dans la petitio que l’abbaye avait soumise à la chancellerie pontificale.

Une autre raison, beaucoup plus importante, est liée au développement de la place de l’écrit dans la procédure ecclésiastique aux XIIe–XIIIe siècles. Cela se produit fréquem-ment dans le cas de la justice déléguée127. Il arrive que des juges délégués par le pape, non contents de signaler qu’ils interviennent dans un procès en vertu de la délégation apos-tolique, tiennent à reproduire la lettre pontificale leur confiant la mission en question. C’est ce que font l’archidiacre de Reims Philippe et les chanoines Foulques et Gui, chargés de trancher entre Saint-Nicaise de Reims et Saint-Vincent de Laon, instrumentant en

ecclésiastique et naissance de l’officialité à Beauvais (1175–1220), in: À propos des actes d’évêques. Hommage à Lucie Fossier, ed. Michel Parisse (Nancy 1991) 295–310, n’aborde pas non plus la question des vidimus.

124 Newman, Les seigneurs de Nesle en Picardie (cit. n. 103) 285s. no. 181.125 De oorkonden der graven van Vlaanderen (1191–aanvang 1206) (cit. n. 36) 357–361 no. 165.126 JL 14932; Oorkondenboek van het Sticht Utrecht tot 1301, vol. 1: 695–1197, ed. Samuel Muller–

Arie Cornelis Bouman (Utrecht–La Haye 1920) 456 no. 513 (JL 14.893). L’acte de Baudouin est ed. ibid. 451 no. 505 et Cartulaire de l’abbaye de Saint-Trond, ed. Charles Piot (Bruxelles 1870) 142s. no. 104.

127 Sur l’impact de la justice déléguée par le pape sur le droit du XIIe siècle voir Charles Duggan, Papal Judges Delegate and the Making of the „New Law“ in the Twelfth Century, in: Cultures of Power. Lordship, Status and Process in Twelfth Century Europe, ed. Thomas N. Bisson (Philadelphia 1995) 172–199. Pour le Nord de la France: Wacław Uruszczak, Les juges délégués du pape et la procédure romano-canonique à Reims dans la seconde moitié du XIIe siècle. Tijdschrift voor Rechtsgeschiedenis 53 (1985) 27–41, en particulier 35.

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Actes confirmatifs et vidimus dans la Nord de la France jusqu’à la fin du XIIIe siècle 245

1196 (c’est-à-dire au plus tard le 24 mars 1197 n. st.) suite à une lettre à eux adressée par Célestin III le 8 juin 1196 (mandatum domini pape recepimus in hunc modum)128. Il arrive aussi que le pape confirme la sentence rendue par ses juges délégués. On peut renvoyer à la confirmation, déjà citée, par le pape Adrien IV d’une sentence de ses juges délégués, les évêques Eudes de Beauvais et Thierry d’Amiens129.

Mais d’une manière générale, on l’a déjà mentionné, le développement de l’utilisation de l’écrit à la fin du XIIe siècle amena une multiplication du nombre des actes relatifs à une seule et même affaire. Il devenait alors tentant de reprendre textuellement, dans un acte, le texte d’un autre acte. C’est par exemple ce qui se produit quand le pape Céles-tin III confia à Maurice, évêque de Paris, à l’abbé de Saint-Victor et au chancelier de Paris, le soin de trancher un conflit entre le chapitre cathédral de Troyes et l’abbaye de Montié-ramey. Les deux parties aboutirent à un accord, que le doyen et le chapitre cathédral de Troyes notifièrent par une charte. Les juges délégués à leur tour donnèrent une charte, dans laquelle ils reprenaient le texte de la charte troyenne130. C’est dans une perspective semblable que Baudouin d’Aubigny, renonçant en 1193 à la querelle qu’il avait élevée contre l’abbaye du Mont-Saint-Éloi à propos du prieuré d’Aubigny, introduisait dans sa charte un vidimus de la charte donnée entre 1163 et 1171 par l’évêque d’Arras André et confirmant le rattachement du prieuré à l’abbaye131.

C’est toujours dans le même contexte de recours à l’écrit que des pièces de procédure sont parfois insérées dans des chartes. Le 30 mars 1234 (n. st.), maître Hugues, chanoine et official de Noyon, tranchant une querelle entre la Franche-Abbaye et Henri, curé de Catigny, insère dans sa charte le libelle introduit par ce dernier: cum Henricus … abbatissam et conven-tum … auctoritate ordinaria traheret in causam coram nobis, talem libellum edidit contra eos: Dicit Henricus, presbiter de Cateni …132. On trouve un autre exemple dans le fonds de l’ab-baye d’Arrouaise: l’official de Noyon, dans un acte donné en février 1253 (n. st.), notifiait que deux frères, Jean et Raoul, avaient renoncé à une querelle qu’ils élevaient contre l’abbaye d’Arrouaise; dans sa sentence, l’official reproduisait la requête de l’abbé: peticionem suam Philippus procurator ipsorum abbatis et conventus contra ipsos fratres edidit in hunc modum: Proponit in jure coram vobis, domine officialis, Philippus procurator …133.

Au fur et à mesure qu’on avance dans le XIIIe siècle les actes se complexifient sans cesse. On peut citer une série de trois actes donnés en janvier 1273 (n. st.) par les cheva-liers Étienne du Péage et Jean de Fricourt, qui avaient été chargés d’arbitrer entre le comte

128 La sentence des juges délégués, y compris la lettre de Célestin III (JL –) est éditée dans Cartulaire de Saint-Nicaise (cit. n. 8) 342 no. 198. Pour la date de la sentence, corriger la datation donnée par l’éditrice en tenant compte de l’usage du style de l’Annonciation à Reims à la fin du XIIe siècle, Olivier Guyotjeannin–Benoît-Michel Tock, „Mos presentis patrie“. Les styles de changement du millésime dans les actes français (XIe–XVIe siècle). BEC 157 (1999) 41–109, cit. 79.

129 Voir n. 112.130 Cartulaire de l’abbaye de Montiéramey, ed. abbé Lalore–L. Pigeotte (Collection des principaux

cartulaires du diocèse de Troyes 7, Troyes 1890) 137s. no. 108.131 La charte de Baudouin est inédite; une copie de celle-ci se trouve dans le cartulaire du prieuré d’Aubi-

gny (Arras, Archives départementales du Pas-de-Calais, série H, cartul. d’Aubigny, fol. 20v–21r). Pour la charte de l’évêque André: Les chartes des évêques d’Arras (cit. n. 9) 185s. no. 165.

132 Le chartrier de l’Abbaye-aux-Bois (cit. n. 103) 195s. no. 130. Un cas semblable se trouve dans une sentence rendue en juillet 1255 par Richard de Fournival, chancelier d’Amiens, en faveur de la même Franche-Abbaye contre un certain Pierre de Magny. Cependant c’est ici le libelle de l’abbaye qui est reproduit: ibid. 249s. no. 195.

133 Monumenta Arroasiensia (cit. n. 31) 502–504 no. 318.

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d’Artois et le comte de Saint-Pol. La querelle étant complexe, il faut trois actes à ces deux seigneurs pour en décider tous les aspects; chacun de ces trois actes commence par le vidi-mus de l’acte par lequel le comte d’Artois Robert II leur avait confié cette tâche134.

Apparaissent aussi progressivement les vidimus de vidimus. Dans les archives de la Franche-Abbaye se trouve la bulle donnée le 18 décembre 1224 par le pape Honorius III à l’ordre cistercien; mais cette bulle se trouve dans un vidimus donné en janvier 1232 par les évêques de Senlis et de Meaux et les abbés de Saint-Faron et de Notre-Dame de Meaux; ce vidimus est lui-même conservé dans un vidimus donné en 1238 par l’évêque de Noyon135. De tels vidimus ne sont évidemment pas dus au hasard. En l’occurrence la bulle pontificale protégeait les monastères cisterciens contre les abus que pourraient com-mettre les évêques à leurs dépens: le vidimus de l’évêque de Noyon, qui était l’ordinaire de la Franche-Abbaye, était de la part de l’évêque une manière de reconnaître et d’accepter la bulle. En revanche, cela montre que la Franche-Abbaye n’avait pas eu accès à une expé-dition originale de la bulle du 18 décembre 1224, mais seulement au vidimus de 1232. Cet exemple permet d’ailleurs de rappeler que les privilèges généraux des ordres religieux comme celui de Cîteaux, parce que chaque abbaye n’en possédait pas une expédition ori-ginale, ont souvent fait l’objet de vidimus.

Concluons. On passe donc de la confirmation des actes royaux à la confirmation d’actes antérieurs (vers 1100), puis (le premier exemple recensé en 1119, mais le système ne se généralise que vers 1220–1230136), au système du vidimus. Si des raisons pratiques (le remplacement d’actes détériorés) peuvent être invoquées, c’est surtout le développe-ment de la procédure romano-canonique qui, en imposant un recours croissant au docu-ment écrit, a ouvert la voie à la diffusion du vidimus. Et plus largement le développement d’une mentalité écrite, où la forme et le texte exact des actes prennent de plus en plus d’importance. On notera aussi que quand le vidimus confirme un acte récent, c’est géné-ralement soit dans le cadre d’une procédure judiciaire, soit pour revêtir l’acte vidimé d’une autorité supérieure en l’intégrant dans un acte donné par une autorité supérieure (évêque, seigneur féodal …).

134 Les chartes des comtes de Saint-Pol (cit. n. 26) 397–411 no. 329–331.135 Le chartrier de l’Abbaye-aux-Bois (cit. n. 103) 401–403 no. 148.136 Y compris dans les chancelleries royales française et anglaise: Nortier, Les actes faussement attribués

(cit. n. 54), et Vincent, The charters of King Henry II (cit. n. 45).

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