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Vanessa Serret ([email protected] ) Université Bretagne-Sud Faculté de Droit, des Sciences Économiques et de Gestion EA 4251, IREA Campus Tohannic – BP 573 56017 Vannes Cedex FRANCE Tél. : +33(0)0497012600 Fax : +33(0)0297012610 Sylvie Berthelot, Ph.D., FCPA, FCMA, CGA Professeure titulaire ([email protected] ) Université de Sherbrooke 2500, boulevard de l'Université Sherbrooke (Québec) J1K 2R1 CANADA Tél. : 819-821-8000, poste 62003 Téléc. : 819-821-7934 Michel Coulmont, Ph.D., FCPA, CGA Professeure titulaire ([email protected] ) Université de Sherbrooke 2500, boulevard de l'Université Sherbrooke (Québec) J1K 2R1 CANADA Tél. : 819-821-8000, poste 65263 Téléc. : 819-821-7934

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Vanessa Serret ([email protected])

Université Bretagne-Sud

Faculté de Droit, des Sciences Économiques et de Gestion

EA 4251, IREA

Campus Tohannic – BP 573

56017 Vannes Cedex

FRANCE

Tél. : +33(0)0497012600

Fax : +33(0)0297012610

Sylvie Berthelot, Ph.D., FCPA, FCMA, CGA

Professeure titulaire ([email protected])

Université de Sherbrooke

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Sherbrooke (Québec)

J1K 2R1 CANADA

Tél. : 819-821-8000, poste 62003

Téléc. : 819-821-7934

Michel Coulmont, Ph.D., FCPA, CGA

Professeure titulaire ([email protected])

Université de Sherbrooke

2500, boulevard de l'Université

Sherbrooke (Québec)

J1K 2R1 CANADA

Tél. : 819-821-8000, poste 65263

Téléc. : 819-821-7934

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Le Say on Pay au Canada – les déterminants de sa mise en place et sa création de valeur

pour les actionnaires

Résumé: le Say on Pay (SOP) autorise le vote des actionnaires sur la rémunération des

dirigeants. Apparu au Canada sous la pression actionnariale en 2009, environ 30% des

entreprises de la Bourse de Toronto le pratiquent aujourd’hui. Contrairement à de nombreux

pays (Royaume-Uni…), le SOP n’est pas réglementé au Canada. Nous analysons les facteurs

contribuant à l’adoption du vote consultatif volontairement. La taille de l’entreprise, la double

cotation, l’indépendance des administrateurs, la structure de propriété et le ciblage par

activisme influencent ce choix, contrairement à la performance financière et au niveau de

rémunération du dirigeant. La création de valeur actionnariale apparait faible.

Mots-clefs : gouvernance des entreprises, théorie de l’agence, rémunération des dirigeants,

Say on Pay, vote consultatif. (101 mots)

Say on Pay in Canada - determinants and value creation for shareholders

Abstract: Say on pay (SOP) allows shareholders to vote on executive compensation. In

Canada, SOP appeared in 2009 in response to pressure from Toronto Stock Exchange

shareholders. By 2012, over 30% of listed companies were practicing SOP. Unlike in some

other countries (United Kingdom…), SOP is not prescribed by regulation in Canada. This

article examines the factors underlying the voluntary adoption of the advisory vote. This

decision is influenced by firm size, dual listing, directors’ independence, ownership structure

and targeting by activists, but not by a firm’s financial performance and the level of

remuneration of executives. Finally, value creation for shareholders is weak. (102 mots)

Key-words: corporate governance, agency theory, CEO compensation, Say on Pay, advisory

vote.

Classification Journal of Economic Literature : G3, G340, J3

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Le Say on Pay au Canada – les déterminants de sa mise en place et sa création de valeur

pour les actionnaires

Jalonnée de scandales financiers, la décennie 2000 s’est achevée par une crise économique

comparable à la dépression de 1929. Parmi les causes évoquées, ce sont notamment, les

systèmes de rémunération des dirigeants des grandes entreprises, qui ont été jugés inadaptés à

l’évolution de la situation économique globale. Du point de vue de la création de valeur, le

système de rémunération des dirigeants joue un rôle crucial dans la mesure où il permet

d’aligner les intérêts des dirigeants et des actionnaires dans le cadre d’une relation d’agence

les opposant. Dans la recherche d’un système de rémunération du dirigeant favorisant

l’enrichissement des actionnaires, le conseil d’administration (CA) a la primauté des

décisions. La présence d’un comité spécialisé portant sur les rémunérations, au sein même de

ce CA, devrait renforcer sa légitimité en matière d’organe de contrôle des décisions

managériales. Pour autant, durant la dernière décennie, les actionnaires ont souhaité exprimer

leur point de vue, ce qui s’est traduit par la mise en place dans la plupart des pays de l’OCDE

du Say on Pay (SOP, dans la suite). Le SOP est une manière formelle pour les actionnaires

d’approuver ou de désapprouver, la rémunération du dirigeant qui est proposé par le CA

durant l’assemblée générale annuelle (AGA). L’article s’intéresse à l’ensemble du processus

qui conduit à mettre en place le vote consultatif sur une base volontaire dans les entreprises

canadiennes. Il répond alors à deux questions. Quels sont les déterminants du SOP dans le

contexte canadien ? Le SOP crée-t-il de la valeur pour les actionnaires ? Dans une première

partie, nous dressons un état des lieux du SOP dans le monde afin de mieux cerner les

spécificités du contexte canadien. Nous développons, ensuite, les fondements théoriques dans

lesquels s’inscrit notre problématique. Enfin, l’étude empirique analyse les déterminants de

l’adoption du SOP dans les entreprises canadiennes et sa valorisation par le marché.

1. SINGULARITES DE LA MISE EN PLACE DU SAY ON PAY A U CANADA PAR

RAPPORT AU CONTEXTE INTERNATIONAL

Le SOP, outil de gouvernance, s’est généralisé (Deane, 2007), avec des modalités diverses

selon les pays (1.1). Le Canada se singularise (1.2.) par son absence de réglementation.

1.1. ÉMERGENCE INTERNATIONALE DU SAY ON PAY DANS LES ANNEES 2000

Au Royaume-Uni, le Companies Act (1948) évoque, la notion de vote des actionnaires au

sujet de la rémunération du dirigeant; il est alors considéré utile, ponctuellement (Gilshan,

2009). Le rapport Cadbury (1992) souligne l’intérêt d’un vote sur la rémunération pour

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renforcer le dialogue entre le CA et les actionnaires. Finalement, le Directors’ Remuneration

Report Regulations (DRRR, 1er août 2002) oblige toutes les sociétés cotées à mettre en œuvre

le SOP à compter du 31 décembre 2002. Concrètement, les entreprises doivent publier un

rapport précisant et justifiant la rémunération du dirigeant. Le rôle du CA et celui du comité

spécialisé de rémunération doit être également défini. En dernier lieu, le rapport est soumis

obligatoirement à un vote lors de l’AGA. Ce vote à caractère consultatif, est symbolique. Il se

veut incitatif en interpellant l’entreprise sur la scène publique (Brownstein et Kirman, 2004).

Plusieurs études mesurent les effets de l’expérience britannique et pionnière. Ainsi, les cas de

dissidence d’actionnaires (désapprobation du plan de rémunération par les actionnaires) sont

faibles. Entre 2002 et 2007, moins de 10 % des actionnaires s’abstiennent ou vote contre la

proposition du CA (Conyon et Sadler, 2010). De plus, la dissidence s’affaiblit avec le temps

(Conyon et Sadler, 2010 ; Ferri et Maber, 2013). Ce résultat serait attribuable à une

amélioration du dialogue entre le CA et les investisseurs institutionnels précédant le vote

(Ferri et Maber, 2013). Finalement, l’impact sur le niveau des rémunérations des dirigeants

est peu important et difficile à mesurer année après année (d’autres mécanismes de

gouvernance pouvant intervenir). Toutefois, une baisse des rémunérations est observable pour

les entreprises dont la performance est la plus faible, et la rémunération des dirigeants la plus

élevée par rapport à la moyenne. Les études britanniques considèrent que le SOP prévient la

destruction de valeur (Ferri et Maber, 2013 ; Conyon et Sadler, 2010). En 2012, le

gouvernement a souhaité renforcer ce dispositif, en termes de divulgation d’information et

d’un vote contraignant tous les trois ans.

Aux États-Unis, la revendication actionnariale du vote consultatif était dominante parmi les

résolutions d’actionnaires en 2009 (Gilsham, 2009) ce qui a notamment conduit les

parlementaires américains à légiférer (Tchotourian, 2009). Le Dodd-Frank Act (2010) oblige

désormais les entreprises cotées à soumettre un rapport sur la rémunération des dirigeants au

vote des actionnaires. La périodicité de cette consultation (tous les ans, tous les deux ans…)

est elle-même soumise à la volonté des actionnaires lors de l’AGA. De plus, le législateur

américain a instauré un vote consultatif s’agissant des indemnités de départ des dirigeants

(say on pay golden parachute, Tchotourian, 2010). Comme au Royaume-Uni, un vote

désapprouvant le rapport ne contraint pas le CA à modifier sa position. A l’annonce du Dodd-

Frank Act, Cai et Walking (2011) observent une réaction positive du marché boursier

américain.

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Il n’existe pas de système universel de GE, de sorte que le SOP, outil de gouvernance, se

décline selon des modalités différentes qui dépendent du système institutionnel dans lequel il

est préconisé. En premier lieu, le SOP peut être mis en place par l’entreprise à la demande des

actionnaires lors de l’AGA (proposition de résolution des actionnaires acceptée par le

management de l’entreprise ciblée). La pratique du SOP est alors le fait d’une entreprise en

particulier. Celle-ci entraine fréquemment un effet de contamination, soit en incitant les

actionnaires d’autres entreprises cotées à avoir les mêmes exigences, soit en poussant les

dirigeants à l’adopter volontairement (effet d’imitation). Ces revendications actionnariales

(auxquelles se sont ajoutées des pressions d’ordre politique) ont amené plusieurs pays à

légiférer de sorte que le SOP devienne obligatoire pour toutes les entreprises (Royaume-Uni,

États-Unis …). L’autre source importante de variation dans la pratique du SOP concerne les

caractéristiques du vote. Il peut être simplement consultatif de l’opinion des actionnaires

(Royaume-Uni, Australie, États-Unis, Canada…) ou bien contraignant les dirigeants à tenir

compte du point de vue actionnarial (Pays-Bas, Norvège, Danemark, Suisse…) et ce, en

fonction du degré de protection juridique1 (pays du « common law » versus pays de tradition

civiliste, La Porta et al., 2000) des investisseurs. En dernier lieu, le vote peut porter sur le

niveau de la rémunération et/ou sur les caractéristiques de la rémunération (vote général

versus vote spécifique).

A ce jour, il y aurait une vingtaine de pays concerné par le SOP. Cette pratique est dans

certains cas, le résultat d’une réglementation plus ou moins stricte mais applicable à toutes les

entreprises cotées (hard law SOP). Dans d’autres cas, le SOP est pratiqué en vertu de

l’application des codes de gouvernance pour certaines entreprises seulement, et sous la

pression actionnariale (soft law SOP). La Commission européenne a lancé une réflexion pour

uniformiser les pratiques « SOP » (Pagnattaro et Greene, 2011). Actuellement, les pays

scandinaves (Pays-Bas, Norvège, Danemark, Suède) appliquent des réglementations plus

contraignantes. Dans plusieurs pays, des discussions sont en cours quant à l’opportunité d’une

loi (Finlande, Irlande ou France notamment…). Au Canada, il n’existe aucune réglementation

mais, la pression des actionnaires sur les entreprises est forte.

1 Si l’on se réfère au courant dominant Law and Finance.

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1.2. ÉMERGENCE DU SAY ON PAY AU CANADA ENTRE 2009 ET 2012

L’émergence du SOP au Canada a été influencée par plusieurs facteurs. Les scandales

financiers (Fogarty et al., 2009) au Canada ont suscité des revendications actionnariales, se

focalisant notamment, sur les questions de rémunération (Yang et al., 2012). En 2012, le

dirigeant le mieux payé au Canada est celui de Canada Pacifique, Hunter Harrison qui aurait

gagné 49,1 millions $ (salaire, bonus et option), suivi de James Smith pour Thomson Reuters

(18,8 millions $) et de John Manzoni pour Talisman Energy (18,67 millions $)2. De plus,

entre 1998 et 2012, le salaire des dirigeants des entreprises inscrites à la Bourse de Toronto a

progressé de 73 %, contre 6 % pour le salaire moyen des canadiens sur la même période

(Mackensie, 2012).

En 2007, la Shareholder Association for Research and Education (SHARE)3 demande à six

entreprises de l’industrie des services financiers de mettre en place le vote consultatif. En

2009, la coalition canadienne pour la bonne gouvernance (représentative des investisseurs

institutionnels) encourage officiellement le vote à titre consultatif pour les sociétés de la

Bourse de Toronto. L’agence de conseil de vote (proxy advisor), Hugessen Consulting

préconise également cette pratique pour améliorer la gouvernance (Hugessen Consulting,

2008). Toutefois, la pratique du vote consultatif au Canada s’est principalement diffusée avec

les résolutions soumises auprès des entreprises par des actionnaires-activistes à partir de 2008.

La littérature sur l’activisme actionnarial au Canada (Yang et al., 2012) souligne le rôle du

Mouvement d’Éducation et de Défense des Actionnaires minoritaires (MÉDAC) dans

l’amélioration du GE, ainsi que la pression simultanée des investisseurs institutionnels. Cette

tendance se confirme dans le cas du vote consultatif. Au total, 49 résolutions demandant la

mise en place d’un vote consultatif ont été déposées par les actionnaires des entreprises de la

Bourse de Toronto entre 2008 et 2012 auprès de 35 entreprises différentes (certaines ciblées

plusieurs fois). L’année 2009 donne lieu au plus grand nombre de dépôts, mais c’est en 2010

que la revendication des actionnaires pour le vote consultatif représente la part (26,53 %) la

plus importante dans l’ensemble des résolutions soumises (tableau 1).

2 Ces trois entreprises ont mis en place le vote consultatif à partir de 2010. 3 SHARE est un organisme à but non lucratif de création récente (2000) ayant pour objectif de fournir des services aux investisseurs institutionnels afin de promouvoir l'intégration des aspects environnementaux, sociaux et portant sur la gouvernance dans leurs pratiques d'investissement.

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ANNEE 2008 2009 2010 2011 2012

2,80 %

N =5

20,79 %

N = 21

26,53 %

N = 13

8,33 %

N = 6

5,06 %

N = 4

Tableau 1 : Résolutions sur le vote consultatif relativement au total des résolutions dans

les entreprises de la Bourse de Toronto

Le MÉDAC et les investisseurs institutionnels4 (des fonds d’investissement) se différencient

par leur stratégie. L’activisme du MÉDAC représente 30,61 % des résolutions. De plus, cet

organisme s’est positionné de manière radicale face aux entreprises qu’il cible. Concrètement,

il médiatise le conflit, ce qui se traduit par un vote quasi-systématique des propositions :

86,66 % des résolutions sont votées. A l’inverse, les investisseurs institutionnels sont réputés

préférer la discussion à la confrontation, leur stratégie est de proposer une résolution pour

dialoguer avec l’entreprise. Si au cours des négociations, l’entreprise fait des concessions, la

proposition est retirée (Logson et Van Buren, 2009). La littérature n’a cessé de souligner, la

présence croissante des investisseurs institutionnels en matière d’activisme (Ertimur et al.,

2011) quelles que soient les places financières. Les entreprises entretiennent de meilleures

relations avec les investisseurs institutionnels plutôt qu’avec les organisations de défense des

actionnaires individuels. Au Canada, plus de deux tiers des résolutions (69,93 %) sur le vote

consultatif sont soumises par les investisseurs institutionnels. Conformément à d’autres études

sur l’activisme institutionnel, la plupart des résolutions qu’ils déposent sont retirées avant

l’AGA, après négociation (61,76 %).

Par ailleurs, les interpellations des différents activistes ne sont pas cloisonnées. En 2008, le

fonds Meritas a ciblé quatre banques (Banque Nova Scotia, Banque de Montréal, Banque

Canadienne Impériale de Commerce et Banque Royale du Canada). En 2009, ce fonds

d’investissement n’ayant pas obtenu l’adoption du vote consultatif auprès de ces banques, il

soumet de nouveau ces résolutions en parallèle avec le MEDAC. En 2009, plusieurs

institutions bancaires cotées à la Bourse de Toronto adoptent finalement le vote consultatif

Toronto (Champoux-Paillé, 2010). À l’annonce de cette mise en place, les marchés réagissent

positivement (Trottier, 2012); les actionnaires canadiens percevraient le vote consultatif

comme une source d’enrichissement.

4 Les résolutions qui n’ont pas été soumises par le MEDAC sont soumises par Meritas Fund à l’exception d’une seule en 2012 soumise par un autre investisseur institutionnel : Montrusco Bolton Investments.

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Les résultats obtenus sous la pression actionnariale sont de deux sortes. Premièrement, il faut

considérer les résultats directs, obtenus par la soumission des résolutions. Deuxièmement,

nous avons observé sur la période d’étude, que certaines entreprises non menacées par des

résolutions actionnariales, adoptaient « spontanément » le vote consultatif (résultat indirect).

L’adoption volontaire par de nombreuses sociétés explique probablement la diminution du

nombre de résolutions après 2010 (tableau 1). En 2012, plus de 30 % des entreprises de

l’indice composé S&PTSX (voir annexe 1) était concerné par le vote consultatif.

2. CADRE CONCEPTUEL DU SAY ON PAY ET FORMULATION DE S

HYPOTHESES DE LA RECHERCHE

Nous revenons sur l’importance de la rémunération des dirigeants dans la théorie de l’agence

(2.1.), afin de discuter de la pertinence du SOP en tant que mécanisme de gouvernance (2.2.)

et élaborer les hypothèses de la recherche (2.3.).

2.1. LA QUESTION DE LA REMUNERATION DES DIRIGEANTS

La problématique de la rémunération des dirigeants est un problème central de la théorie de

l’agence (Jensen et Meckling, 1976). Elle repose sur la séparation des fonctions de propriété

et de direction, qui rendrait les sociétés de capitaux moins performantes, en raison de

l’absence de motivation patrimoniale des dirigeants non-propriétaires (Berle et Means, 1932).

Compte tenu de la délégation du pouvoir des actionnaires aux dirigeants, rien n’assure que ces

dirigeants satisfassent les intérêts des actionnaires. Le rôle de la gouvernance d’entreprise sera

alors de mettre en œuvre des mécanismes assurant l’alignement des intérêts de chacun. Le

niveau et la structure de la rémunération des dirigeants participent à ces mécanismes. Dans la

littérature, l’intérêt pour la rémunération des dirigeants a engendré un très grand nombre de

recherches (Gomez-Mejia et Wiseman, 1997). Nombre d’entre elles s’intéressent au lien

controversé entre le niveau de la performance et de la rémunération (Core et al., 2003 ;

Bebchuk et Fried, 2005 ; Jeppson et al., 2009, Magnan et al., 2010).

De plus, la question du niveau de rémunération des dirigeants a une dimension sociale liée à

la notion d’équité. Au début du XXème siècle, Henry Ford considérait qu’un patron devait

gagner trente fois le salaire moyen de ses ouvriers, ce qui était l’objet d’un consensus. Par la

suite, des dérives salariales ont été observées. Cependant, Gabaix et Landier (2008) justifient,

une multiplication par six du salaire des dirigeants aux États-Unis (en moyenne entre 1980 et

2003) provoquée par la mondialisation, l’accroissement des risques et de la taille des

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entreprises. La forte progression de ces rémunérations à un niveau mondial n’ont fait

qu’alimenter les débats politico-économiques concernant les salaires des dirigeants.

2.2. LA PERTINENCE DU SOP COMME MECANISME DE GOUVERNANCE

Dans le contexte décrit, le SOP est envisagé comme une solution aux « dérives salariales des

hauts dirigeants » à partir des années 2000. Il autorise aux AGA, un droit de vote sur le niveau

et les caractéristiques de la rémunération des dirigeants selon les cas. Ce droit d’appréciation

est traditionnellement dédié au CA. Cependant, en raison des liens existant entre les membres

du CA et le dirigeant, les investisseurs expriment plus souvent leur souhait d’être consultés.

La mise en place du SOP dans les entreprises n’est pas d’évidence (Mangen et Magnan,

2012). Parmi ses détracteurs, Fama (1980) affirme que le marché du travail des dirigeants est

efficient. En conséquence, celui-ci agit au meilleur de l’intérêt de ses actionnaires. Il est

sélectionné par les membres du CA qui détiennent une information de qualité sur les

candidats d’une part, et les compétences nécessaires à la croissance de l’entreprise, d’autre

part. Les administrateurs sont également incités à agir dans l’intérêt de leurs actionnaires par

le contrat qui les lie à l’entreprise, par des effets de réputation, et en dernier lieu par le marché

des prises de contrôle (Cheng et Indjejikian, 2009). Dans cette perspective, le SOP est un outil

de gouvernance supplémentaire, inutile, et dont la pratique s’avère coûteuse (Kaplan, 2008;

Bainbridge, 2009; Larcker et al., 2012). La justification extrême d’un plan de rémunération

conduit les administrateurs et le dirigeant à s’éloigner de leurs missions (respectivement

mission de contrôle et mission opérationnelle). Ce point de vue n’est pas consensuel.

Plusieurs auteurs (Bebchuk et Fried, 2003, 2006; Walsh, 2009) observent la passivité d’un

trop grand nombre d’administrateurs face à leur dirigeant. Le SOP contraint le CA à sortir de

cette passivité et à améliorer sa communication (Ferri et Maber, 2013). Il instaure un dialogue

entre actionnaires et administrateurs et restaure la légitimité du CA dans sa mission de

contrôle.

2.3. LES HYPOTHESES DE LA RECHERCHE

Dans la spécificité canadienne (absence de réglementation), nous nous interrogeons sur les

raisons de l’adoption volontaire du vote consultatif par certaines entreprises. Plusieurs

variables sont susceptibles d’influencer ce choix. Une dernière hypothèse est formulée

concernant la prise en compte par le marché du SOP.

La première hypothèse découle du phénomène d’activisme décrit. Compte tenu du processus

de mise en place du vote consultatif dans les entreprises canadiennes, nous postulons que les

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entreprises ayant fait l’objet de dépôt de résolution sur le vote consultatif sont davantage

susceptibles de l’adopter.

H1 : Le vote consultatif a une plus forte probabilité d’être adopté lorsque l’entreprise a fait

l’objet d’un dépôt de résolution revendiquant le SOP.

La taille de l’entreprise est reconnue comme une mesure de visibilité, les entreprises de

grande taille étant suivies par la presse financière internationale. De plus, la littérature sur

l’activisme montre que ces entreprises sont prioritairement ciblées.

H2 : Il existe une relation positive entre l’adoption du vote consultatif et la taille de

l’entreprise.

Comme nous l’avons vu, le SOP est obligatoire aux États-Unis depuis 2010 (mise en place

effective en 2011). Certaines sociétés de la Bourse de Toronto sont l’objet d’une cotation en

parallèle sur le marché américain (annexe 1). La double cotation favorise l’adoption du SOP.

H3 : Il existe une relation positive entre l’adoption du vote consultatif et la double cotation

sur le marché américain.

La littérature sur l’activisme montre que les entreprises à faible performance ont plus de

chances d’être ciblées. Si elles font l’objet d’un ciblage, elles adopteront le SOP afin de

légitimer la rémunération accordée à leur dirigeant en l’absence de lien éventuel entre cette

rémunération et la performance de l’entreprise.

H4 : Il existe une relation négative entre l’adoption du vote consultatif et le niveau de

performance financière de la firme.

On suppose, par ailleurs, que l’adoption du SOP est susceptible de varier en fonction du

secteur d’activité dans lequel l’entreprise opère.

H5 : L’adoption du vote consultatif varie en fonction du secteur d’activité de l’entreprise.

La littérature souligne que la protection des actionnaires est plus élevée dans les entreprises à

actionnariat concentré (versus actionnariat diffus).

H6 : Il existe une relation négative entre l’adoption du vote consultatif et la concentration de

l’actionnariat.

Plus le CA est indépendant plus il est en mesure d’exercer sa fonction de contrôle. Le vote

consultatif, forme de contestation du CA, est alors moins revendiqué par les actionnaires.

H7 : Il existe une relation négative entre l’adoption du vote consultatif et le niveau

d’indépendance du CA.

Le contrat de rémunération des membres du CA est un moyen d’inciter les administrateurs à

agir pour le compte des actionnaires. Si ce niveau de rémunération est élevé alors les

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administrateurs ont la confiance des actionnaires ce qui ne devrait pas favoriser l’adoption du

vote consultatif.

H8: il existe une relation négative entre l’adoption du vote consultatif et le niveau de

rémunération des administrateurs.

La littérature montre que les entreprises dont le dirigeant a une rémunération au-dessus de la

moyenne sont plus ciblées, alors elles seraient incitées à adopter le vote consultatif. Ainsi, les

trois dirigeants canadiens les mieux payés en 2012 (voir 1.2) ont adopté le vote consultatif.

H9 : Le vote consultatif a une plus forte probabilité d’être adopté lorsque le dirigeant de

l’entreprise a une rémunération élevée.

Comme souligné, la pertinence du SOP n’est pas un objet de consensus. Cependant, compte

tenu du mouvement international de mise en place du SOP, nous postulons que la mise en

place du vote consultatif a un impact positif sur la valorisation de la firme. De plus, la seule

étude empirique sur le marché canadien conclue a un effet positif (Trottier, 2012).

H10 : L’adoption du vote consultatif est prise en compte positivement par le marché.

3. ANALYSES EMPIRIQUES DU SAY ON PAY AU CANADA

Les hypothèses sur les déterminants du SOP sont testées puis nous mesurons la prise en

compte du SOP par le marché (3.2.).

3.1. LES DETERMINANTS DE LA MISE EN PLACE DU SAY ON PAY AU CANADA

3.1.1. Échantillon et méthodologie

L’échantillon d’observations résulte de la fusion de la liste des 250 entreprises composant

l’indice composé S&P/TSX de la Bourse de Toronto et de la liste des 97 entreprises

canadiennes recensées comme ayant adopté le vote consultatif sur la rémunération de leur

dirigeant sur le site internet de SHARE. Soixante-treize entreprises se retrouvaient dans les

deux listes. De la liste des 250 entreprises composant l’indice S&P/TSX, 16 entreprises

représentant des fiducies de revenus ont été retirées ainsi que 16 entreprises dont le siège

social ne se situait pas au Canada et 13 entreprises sans résultat financier (sociétés

d’exploration minières et/ou pétrolières). Comme les premières observations portant sur des

entreprises ayant adoptées le vote consultatif dataient de 2009, les données ont été recueillies

de 2009 à 2012 inclusivement. Les données sur la gouvernance ont été recueillies à partir des

circulaires de direction déposées auprès du site officiel qui fournit un accès aux documents

publics portant sur les sociétés cotées en vertu de la législation entourant les autorités

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provinciales et territoriales canadiennes en valeurs mobilières. Les données comptables

proviennent de la base de données Research Insight. L’échantillon final est composé de 846

observations représentant 228 entreprises canadiennes. La répartition de l’échantillon par

secteur d’activité est décrite dans le tableau 2.

Mines et métaux 21,3 %

Pétrolier 17,5 %

Manufacturier 17,3 %

Transport 3,9 %

Communications 4,1 %

Électricité, gaz et autres services sanitaires 5,4 %

Distribution en gros 9,5 %

Finance, assurance et immobilier 15,6 %

Services 5,0 %

Construction 0,5 %

Tableau 2 : Répartition par secteur d’activité

Les entreprises du secteur de l’énergie sont les plus représentées si l’on totalise le secteur

pétrolier et celui de l’électricité, gaz et autres services sanitaires (22,9 %).

Afin d’apprécier les déterminants de l’adoption du vote consultatif, un modèle logistique est

testé. Le modèle est le suivant :

SOPi,t = β0 + ß1ACTIVISM i,t + β2LnACTIFi,t + β3BUSi,t + β4ROAi,t+ β5 MINESi,t +

β6MANUF i,t + β7PETi + β8AN10i,t + ß9 AN11i,t+ β10AN12i,t+ β11INDINV i,t,t + β12FOINVi,t +

β13SACi,t + β14PADMIND i,t + β15PAICRi,t + β16HUISi,t + β17LnREMTCAi,t +

β18LnREMPDGi,t + εi,t

Dans lequel,

SOPi,t représente une variable dichotomique prenant la valeur de 1 si l’entreprise i a adopté le

vote consultatif l’année t et de 0 autrement;

ACTIVISM i,t : variable dichotomique prenant la valeur de 1 si l’entreprise i a fait l’objet

d’activisme actionnarial l’année t concernant le vote consultatif et prenant la valeur de 0

autrement;

LnACTIFi,t : logarithme naturel des actifs totaux de l’entreprise i l’année t;

BUSi,t : variable dichotomique prenant la valeur de 1 si l’entreprise i est inscrite sur une

bourse américaine l’année t et prenant la valeur de 0 autrement;

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ROAi,t : rendement des actifs de l’entreprise i l’année t;

MINESi,t : variable dichotomique prenant la valeur de 1 si l’entreprise i opère dans le secteurs

des mines et métaux et prenant la valeur de 0 autrement;

MANUF i,t : variable dichotomique prenant la valeur de 1 si l’entreprise i opère dans le secteur

des produits manufacturiers et prenant la valeur de 0 autrement;

PETi,t : variable dichotomique prenant la valeur de 1 si l’entreprise i opère dans le secteur des

produits pétroliers et prenant la valeur de 0 autrement;

AN10i,t (AN11i,t, AN12i,t): variable dichotomique prenant la valeur de 1 si l’exercice financier

de l’entreprise i l’année t est 2010 (2011, 2012) et prenant la valeur de 0 autrement.

INDINV i,t : variable dichotomique prenant la valeur de 1 si l’un des investisseurs possédant

plus de 10 % des droits de votes de l’entreprise i l’année t est un individu ou une famille et la

valeur de 0 autrement;

INVINS i,t : variable dichotomique prenant la valeur de 1 si l’un des investisseurs possédant

plus de 10 % des droits de votes de l’entreprise i l’année t est un fonds d’investissement et la

valeur de 0 autrement;

SACi,t : variable dichotomique prenant la valeur de 1 si l’entreprise i a au moins un

actionnaire possédant 10 % des votes l’année t (c.-à-d., structure d’actionnariat concentrée) t

et prenant la valeur de 0 autrement (c.-à-d., structure d’actionnariat diffuse),

PADMIND i,t : pourcentage d’administrateurs indépendants siégeant sur le conseil

d’administration de l’entreprise i l’année t;

PAICRi,t : pourcentage d’administrateurs indépendants siégeant sur le comité de rémunération

de l’entreprise i l’année t;

HUISi,t : variable dichotomique prenant la valeur de 1 si les administrateurs de l’entreprise i

ont la possibilité de se réunir sans les dirigeants l’année t et prenant la valeur de 0 autrement;

LnREMTCAi,t : logarithme naturel de la rémunération totale de l’ensemble des

administrateurs siégeant sur le conseil d’administration de l’entreprise i l’année t;

LnREMPDGi,t : logarithme naturel de la rémunération du président directeur général de

l’entreprise i l’année t ;

εi,t : le terme d’erreur.

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Les tableaux 3 et 4 décrivent les statistiques des principales variables explicatives.

Adoption du vote consultatif 31,6 %

Inscrites à une bourse américaines 43,5 %

Ayant un individu ou une famille possédant plus de 10 % des droits de votes 14,4 %

Ayant un fonds d’investissement possédant plus de 10 % des droits de votes 20,4 %

Administrateurs ayant la possibilité de se réunir à huis clos 94,4 %

Structure d’actionnariat concentrée 54,3 %

Objet d’activisme actionnarial 11,2 %

Tableau 3 : Fréquences des variables discrètes (N=846)

Au final, 31,6 % des entreprises ont adopté le vote consultatif, alors qu’un pourcentage

supérieur d’entreprises (43,5 %) fait l’objet d’une cotation sur le marché américain. La double

cotation n’implique pas nécessairement l’adoption du vote consultatif. Par ailleurs,

l’actionnariat canadien est plus concentré (54,3 %) que l’actionnariat américain. La part

d’investisseurs institutionnels détenant plus de 10 % des droits de vote s’élève à 20,4 %. La

proportion d’entreprises dont le capital est détenu par un individu ou une famille est faible

(inférieur à 14,4 %).

Variablesa Moyenne Écart-type Médiane Min. Max.

ACTIFi,t 26 391 000 95 733 000 2 738 000 53 000 825 100 000

ROAi,t (en %) 2,97 8,42 3,20 -72,28 57,56

PADMIND i,t 78,32 14,04 80,00 33,33 100,00

PAICRi,t 82,05 34,54 100,00 0,00 100,00

REMPDGi,t 4 053 2 741 2 741 0 49 151

REMTCAi,t 1 507 1 031 1 272 27 9 071

a Les variables financières sont en milliers de dollars canadiens.

Tableau 4 : Statistiques descriptives (N=846)

L’étendue de la variation de la performance des entreprises est très forte sur la période de

crise étudiée. Notons, par ailleurs, la forte indépendance des administrateurs siégeant dans les

CA canadiens.

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3.1.2. Résultats des régressions logistiques

Les analyses sur l’ensemble des observations pour 2009-2012 se trouvent dans le tableau 5.

*** p ≤ 0,01 ; ** p ≤ 0,05 ; * p ≤ 0,1 (test unidirectionnel lorsque le signe est prévu)

*** p ≤ 0,01 ; ** p ≤ 0,05 ; * p ≤ 0,1 (test bidirectionnel lorsque le signe n’est pas prévu)

Tableau 5 : Résultats du modèle logistique global (2009-2012)

Variable dépendante : Say on Pay (SOPi,t)

2009-2012 (n=846)

Variables explicatives Signe prévu Coefficient

ODDS (Exp. Β)

P-value

ACTIVISM i,t H1 (+) 3,356*** 28,675 0,000

LnACTIFi,t H2 (+) 0,457*** 1,579 0,000

BUSi,t H3 (+) 1,057*** 2,877 0,000

ROAi,t H4 (-) -0,12 0,988 0,191

MINESi,t H5 (?) -0,324 0,723 0,155

MANUF i,t H5 (?) 0,562** 1,755 0,029

PETi,t H5 (?) -1,477*** 0,228 0,000

AN10i,t (?) 1,878*** 6,541 0,000

AN11i,t (?) 2,073*** 7,945 0,000

AN12i,t (?) 2,453*** 11,628 0,000

INDINV i,t H6 (-) -0,965** 0,381 0,014

INVINS i,t H6 (-) 0,650** 1,916 0,012

SACi,t H6 (-) -2,111*** 0,121 0,000

PADMIND i,t H7 (-) 3,831*** 46,115 0,000

PAICRi,t H7(-) 0,460* 1,584 0,101

HUISi,t H7 (-) 0,887* 2,429 0,062

LnREMTCAi,t H8 (-) -0,452** 0,636 0,029

LnREMPDGi,t H9 (+) 0,047 1,048 0,377

Constante (?) -4,666** 0,009 0,091

Tableau de classement Prévisions

Say on Pay

Say on Pay Non Oui

Pourcentage correct

Non 535 48 92,4

Oui 81 178 69,7

Total 85,2

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La variable activisme (ACTIVISMi,t) est significative (validation H1), ce qui montre que les

revendications des actionnaires sont prises en compte. La taille (ACTIFi,t) et la double

cotation (BUSi,t) ont un impact positif significatif sur l’adoption du vote consultatif

(validation H2 et H3). Bien que l’impact de la performance financière (ROAi,t) soit négatif

(attendu), cette relation n’est pas significative (H4). Appartenir au secteur manufacturier

(MANUF i,t) semble accroître la probabilité d’adoption, et inversement lorsque l’entreprise

appartient au secteur pétrolier (PETi,t). L’impact du secteur des mines et métaux (MINESi,t)

n’est pas significatif. L’impact de la structure d’actionnariat (SACi,t) est négative et

significative (validation H6). De plus, lorsqu’un individu ou une famille possède plus de 10 %

des droits de vote (INDINVi,t), l’entreprise est significativement moins susceptible d’adopter

le SOP. En revanche, lorsque c’est un investisseur institutionnel qui possède plus de 10 % des

votes (INVINSi,t), elle est davantage susceptible d’adopter le SOP. Ces variables nuancent

notre hypothèse sur la structure de la propriété et nous ramène à un résultat documenté dans la

littérature concernant le rôle prépondérant des investisseurs institutionnels pour améliorer la

gouvernance. Les variables mesurant l’indépendance des administrateurs (PADMINDi,t et

PAICRi,t) sont significatives (H7) mais le sens de la relation est positif (attendu négatif). Si le

niveau d’indépendance des administrateurs est élevé, celui-ci devrait céder plus facilement

aux souhaits des actionnaires. Ainsi, le vote consultatif n’est pas perçu par le CA comme une

remise en question mais comme une légitimation ce qui expliquerait nos résultats : l’adoption

du vote consultatif est favorisée par l’indépendance des administrateurs à l’inverse de ce qui

avait été postulé. S’agissant de la rémunération du CA (REMTCAi,t), la relation observée est

significativement négative (validation H8). Enfin, la relation entre le niveau de rémunération

du dirigeant est positive (comme attendu) mais non significative (REMPDGi,t). H9 n’est donc

pas validée. Finalement, le modèle logistique classe 85,2 % des observations, ce qui est

supérieur au modèle constant qui a un taux de réussite de 68,4 %. Le R-deux de Nagelkerke

du modèle est de 0,608.

Le modèle a été également testé pour chaque année (2010, 2011 et 2012). Il n’a pas été testé

pour l’année 2009 en raison d’un nombre trop faible d’observations. En 2009, seulement 26

observations sur un total de 187 représentaient des entreprises qui avaient adopté le SOP. De

plus, en 2011, 100 % des entreprises ayant fait l’objet d’activisme actionnarial à propos du

SOP ont adopté celui-ci. Cette occurrence parfaite des deux phénomènes biaise les résultats.

Pour éliminer ce biais la variable ACTIVISMi,t a été retirée des analyses.

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Le tableau 6 synthétise ces analyses logistiques.

2010 (N = 220) 2011 (N = 225)

2012 (N = 214)

Variables

explicativesa

Signe

prévu

Coefficient

ODDS

(Exp. Β)

P-value

Coefficient

ODDS

(Exp. Β)

P-value

Coefficient

ODDS

(Exp. Β)

P-value

ACTIVISM i,t (+) 3,202** 24,575 0,002 - - - 2 609** 13, 580 0,005

LnACTIFi,t (+) 0,387** 1,473 0,026 0,579** 1,784 0,003 0,472** 1,603 0,015

BUSi,t (+) 1,074** 2,927 0,010 0,864** 2,372 0,018 1 559*** 4,753 0,000

ROAi,t (+) -0,025 0,975 0,181 0,019 1,020 0,250 -0,003 0,997 0,441

MINESi,t (?) -0,647 0,524 0,150 -0,256 0,774 0,333 -0,619 0,539 0,167

MANUFi,t (?) 0,477 1,611 0,202 0,859* 2,361 0,058 1 120** 3,065 0,028

PETi,t (?) -1,361** 0,256 0,024 -1,739** 0,176 0,006 -1 604** 0,201 0,009

INDINV i,t (-) -1,030 0,357 0,111 -0,976 0,377 0,107 -0,322 0,724 0,331

FOINVi,t (-) 0,781* 2,184 0,085 1,088** 2,969 0,015 0,823* 2,278 0,081

ACTi,t (-) -2,167*** 0,115 0,000 -2,256*** 0,105 0,000 -2 922*** 0,054 0,000

PADMINDi,t (-) 4,217** 67,805 0,021 6,375*** 586,706 0,000 4 171** 64,781 0,006

PAICRi,t (-) 1,270** 3,560 0,043 0,446 1,562 0,246 -0,390 0,677 0,268

HUISi,t (-) 1,164 3,202 0,179 1,361 3,900 0,134 0,332 1,393 0,365

LnREMTCAi,t (+) -0,368 0,692 0,193 -0,689* 0,502 0,079 -0,452 0,636 0,183

LnREMPDGi,t (+) -0,004 0,996 0,493 0,503* 1,654 0,069 0,005 1,005 0,494

Constante (?) -3,782 0,023 0,433 -9,554 0,000 0,109 -0,713 0,490 0,905

Tableau de classement

Tableau de classement Réel

Prévu

Pourcentage

correct Réel

Prévu

Pourcentage

correct Réel

Prévu

Pourcentage

correct

Non 137 14 90,7 135 11 92,5 101 20 83,5

Oui 18 51 73,9 22 57 72,2 24 69 74,2

Total 85,5 83,3 79,4

*** p ≤ 0,01; ** p ≤ 0,05; * p ≤ 0,1 (test unidirectionnel lorsque le signe est prévu)

*** p ≤ 0,01; ** p ≤ 0,05; * p ≤ 0,1 (test bidirectionnel lorsque le signe n’est pas prévu)

Tableau 6 : Régressions logistiques par année (2011, 2012, 2013)

Dans l’ensemble, les résultats des régressions logistiques annuelles sont très proches de ceux

de la régression globale à quelques exceptions près. Les coefficients des variables ACTIFi,t,

INVINS i,t, PADMINDi,t, SACi,t, ACTIVISM i,t et BUSi,t vont dans le même sens que dans le

modèle global et sont significatifs pour les trois années couvertes par les analyses. Par contre,

le coefficient de la variable INDINVi,t n’est significatif dans aucune des années et celui de la

variable représentant le pourcentage d’administrateurs indépendants sur le comité de

rémunération (PAICR i,t) n’est significatif que pour l’année 2010. Le coefficient de la

rémunération des administrateurs (REMTCAi,t) n’est significatif que pour l’année 2011 et

celui de la rémunération du plus haut dirigeant (REMPDGi,t) est marginalement significatif

pour l’année 2011. Enfin, le coefficient de la variable MANUFi,t n’est pas significatif pour

l’année 2010, mais il l’est pour les années 2011 et 2013.

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Les tableaux de classement démontrent que le modèle de régression logistique classe bien

85,5 % des observations en 2010 comparativement à un taux de 68,6 % pour le modèle

contant (R-deux de Nagelkerke de 0,585), 85,3 % en 2011 comparativement à 64,9 % pour le

modèle constant (R-deux de Nagelkerke de 0,569) et 79,4 % en 2012 comparativement à

56,5 % pour le modèle constant (R-deux de Nagelkerke de 0,617).

3.2. LA PRISE EN COMPTE DE L ’ADOPTION DU SOP PAR LE MARCHE

Le modèle de valorisation boursière est présenté puis les résultats obtenus.

3.2.1. Méthodologie

Afin de mesurer la prise en compte de l’adoption du SOP par le marché, nous utilisons un

modèle différent5 des études antérieures, qui associe la valeur boursière des actions ordinaires

d’une entreprise à la valeur comptable de ses capitaux propres et à son bénéfice courant ainsi

qu’aux faits que l’entreprise a adopté le SOP et qu’elle a fait l’objet d’activisme actionnarial

concernant le SOP durant cette période. Pour contrôler l’incidence des secteurs d’activités, nous

avons également inclus dans le modèle de régression trois variables dichotomiques représentant

les secteurs d’activités des mines, des produits manufacturiers et des produits pétroliers. Le

modèle est décrit ci-dessous :

VM i,t = α0 + α1VCi,t + α2BENi,t + α3SOPi,t + α4ACTIVISM i,t + α5MINESi,t + α6MANUF i,t +

α7PETi,t + εi,t

Dans lequel,

VM i,t : la valeur boursière des actions ordinaires de l’entreprise i quatre mois après la date de

clôture des états financiers de l’exercice t ;

VCi,t : la valeur comptable des capitaux propres de l'entreprise i à la fin de l'exercice t ;

BENi,t : le bénéfice de l'exercice t disponible aux actionnaires ordinaires de l'entreprise i ;

SOPi,t représente une variable dichotomique prenant la valeur de 1 si l’entreprise i a adopté le

vote consultatif l’année t et de 0 autrement;

ACTIVISM i,t : variable dichotomique prenant la valeur de 1 si l’entreprise i a fait l’objet

d’activisme actionnarial l’année t concernant le vote consultatif et prenant la valeur de 0

autrement;

MINESi,t : variable dichotomique prenant la valeur de 1 si l’entreprise i opère dans le secteurs

des mines et métaux et prenant la valeur de 0 autrement;

5 Les études mesurant la création de valeur pour l’actionnaire sont traditionnellement des études d’événement réputées bruitées (Cai et Walking, 2011, Trottier, 2012….).

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MANUF i,t : variable dichotomique prenant la valeur de 1 si l’entreprise i opère dans le secteur

des produits manufacturiers et prenant la valeur de 0 autrement;

PETi,t : variable dichotomique prenant la valeur de 1 si l’entreprise i opère dans le secteur des

produits pétroliers et prenant la valeur de 0 autrement;

εi,t : le terme d’erreur.

Si l’adoption du SOP est un élément pertinent pour les investisseurs, alors le coefficient α3 est

significativement positif. Le SOP devrait limiter les salaires des dirigeants et entrainerait un

effet positif sur les flux futurs de trésorerie. De même, si les investisseurs tiennent compte du

fait que l’entreprise a été l’objet d’une résolution pour adopter le SOP, le coefficient α4 devrait

être significativement positif, en supposant que les investisseurs interprètent cet activisme

comme une étape préliminaire conduisant au SOP. Le tableau 7 présente les statistiques

descriptives des variables des modèles testés.

Variablesa Moyenne Écart-type Médiane Minimum Maximum

VM i,t 7 352 12 456 2 280 35 92 565

VCi,t 3 772 6 478 1 286 15 44 128

BENi,t 396 920 103 - 4 471 7 442 a Les données financières sont présentées en millions de dollars canadiens.

Tableau 7 : Statistiques descriptives (n=8326)

La moyenne de la capitalisation boursière des entreprises de l’échantillon est d’un peu plus de

7 milliards de dollars canadiens (médiane = 2,280 milliards), tandis que la moyenne des

valeurs des capitaux propres est de 3,772 milliards (médiane = 1,286 milliards). La moyenne

des bénéfices disponibles aux actionnaires ordinaires est quant à elle, de 396 millions

(médiane = 103 millions).

3.2.2. Résultats de l’analyse de valorisation par le marché

Les modèles avec l’ensemble des variables (2009-2012) ont été ajustés à l’aide de la méthode

du maximum de vraisemblance et tiennent compte de la dépendance entre les observations

pour une même entreprise (Clarkson et al., 2004). Pour atténuer l'incidence dans notre

échantillon de très grandes sociétés, nous avons pondérés les observations par l'inverse du

carré de la valeur boursière des actions ordinaires (Xu et al., 2007). Les modèles annuels ont

6 En raison de données manquantes concernant 8 observations et de valeur comptables des capitaux propres pour 6 observations, l’échantillon servant pour les fins des analyses est passé de 846 observations à 832 observations représentant 224 entreprises.

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20

aussi été estimés avec la méthode de maximum de vraisemblance mais sans tenir compte de

l’autocorrélation des résidus.

Les modèles avec et sans la variable SOPi,t pour la période 2009-2012 (tableau 8) sont

significatifs avec des seuils d’explication de la variance (R2) de la capitalisation boursière des

entreprises de 0,867 et 0,868. Les coefficients associés à la valeur comptable des capitaux

propres (VCi,t) et aux bénéfices de l’exercice (BENi,t) sont comme prévus positifs et significatifs

à un seuil d’erreur de moins 0,001. Le coefficient de la variable SOPi,t est, marginalement

significatif à un seuil d’erreur de 0,10 dans le second modèle. Le coefficient de la variable

MINESi,t est significatif dans les deux modèles ; le secteur minier est moins bien perçu par les

investisseurs. Par ailleurs, l’ajout de la variable SOPi,t dans le deuxième modèle par rapport au

premier modèle de régression améliore faiblement les résultats. Les R2 sont passés de 0,867 à

0,868 et les critères de sélection d'Akaike (1974)7, évaluant la qualité de l'ajustement, sont

minimisés dans le second modèle, passant de 14 863,1 à 14 848,7. Le dernier modèle reflète

mieux la nature des relations observées.

2009-2012 Régressions annuelles Variables

explicativesa

Signe

prévu Sans SOP Avec SOP 2010 2011 2012

VCi,t (+) 1,2*** 1,2*** 1,2*** 1,2*** 1,1***

BENi,t (+) 1,0*** 1,1*** 6,2*** 3,7*** 4,1***

SOPi,t (+) - 265,8* 328,7 276,8 257,7

ACTIVISM i,t (+) 213,8 249,3 -73,3 - 267,8

MINESi,t (+) -1 095,5** -1075,3** 673,3* -448,7 -869,8**

MANUFi,t (-) -464,7 -473,0 339,5 -212,5 -393,1

PETi,t (-) -746,9 -690,0 895,6** -279,1 -402,8

Constante (?) 113 547 172 606 -77,0 441,1* 584,3

R 2 ajusté 0,867 0,868 0,929 0,907 0,884

critère de sélection

d’Akaike 14 863,1 14 848,7 3 870,5

3981,9 3886,3

Nb d’observations 832 832 216 221 212

*** p ≤ 0,01 ; ** p ≤ 0,05 ; * p ≤ 0,1 (test unidirectionnel lorsque le signe est prévu)

*** p ≤ 0,01 ; ** p ≤ 0,05 ; * p ≤ 0,1 (test bidirectionnel lorsque le signe n’est pas prévu)

Tableau 8 : Résultats des modèles de valorisation boursière

7 Le critère de sélection d'Akaike (1970) ne repose pas sur des tests statistiques. En fait, ce critère de sélection est constitué de deux parties, l'une mesure la capacité du modèle à expliquer la variable dépendante (c-à-d., la somme des résidus au carré), l'autre étant une fonction de pénalité dont la valeur dépend du nombre de paramètres estimés (Davidson et MacKinnon 2004).

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Pour apprécier la constance des résultats dans le temps, nous avons ré-estimé les modèles de

régression par année (toujours tableau 8). En raison du nombre peu élevé d’observations

représentant des entreprises ayant adopté le SOP en 2009, les analyses n’ont pas été

effectuées pour cette période. Les seuils d’explication de la variance de la capitalisation

boursière des entreprises (R2) dans ces modèles sont élevés allant de 0,929 en 2010 à 0,884 en

2012. Comme attendu, les coefficients des variables représentant la valeur comptable des

capitaux propres (VCi,t) et les bénéfices de l’exercice (BENi,t) sont très significativement

positifs (p<0,001) pour les trois années. En revanche, les coefficients de la variable SOPi,t ne

sont pas significatifs. L’hypothèse H10 n’est finalement pas validée. Les résultats de Trottier

(2012) ne sont pas confirmés ce qui peut s’expliquer par la différence de méthodologie, et la

petite taille de leur échantillon. Globalement, ces résultats amènent donc à conclure que

l’adoption de SOP par les entreprises ne semble pas être interprétée par les investisseurs comme

un mécanisme de contrôle des dirigeants suffisamment contraignant de manière à se refléter

dans les flux de trésorerie futurs des entreprises et à créer de la valeur actionnariale.

Cette contribution a analysé les déterminants du SOP et sa valorisation actionnariale sur le

marché canadien. Le SOP au Canada a été revendiqué à partir de 2008 par une coalition

d’actionnaires individuels (le MÉDAC) et des investisseurs institutionnels sous forme de

résolutions soumises au vote de l’AGA. L’année suivante, certaines entreprises cotées à la

Bourse de Toronto (le secteur bancaire) ont alors adopté le SOP à la suite d’une résolution ou

volontairement par effet d’imitation. L’activisme des actionnaires canadiens a été un

déterminant important de la mise en place du SOP. Certaines caractéristiques de l’entreprise y

ont également contribué, ce sont la taille, la double cotation et l’appartenance au secteur

manufacturier. En revanche, contrairement aux études sur le marché américain, la mauvaise

performance ne facilite pas la mise en place du vote consultatif. Par ailleurs, la structure de

propriété influence positivement l’adoption du vote lorsque l’actionnariat est dispersé.

L’indépendance du CA contribue favorablement au vote consultatif mais le niveau des

rémunérations des administrateurs a un impact négatif. Finalement, le niveau de rémunération

du dirigeant n’a aucune influence. En dernier lieu, il semble que la création de valeur pour les

actionnaires soit faible. Ce résultat est de nature à alimenter le débat récent sur la pertinence

d’une réglementation au Canada et à inciter à la prudence. Des travaux complémentaires sont

nécessaires avant de trancher. Ainsi, quel est l’impact du SOP sur la rémunération des

dirigeants canadiens ? Par ailleurs, compte tenu de la récente application du SOP au Canada,

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il est difficile d’appréhender le sens du vote actionnarial. La dissidence est-elle forte ?

Comment évolue-t-elle dans le temps ? Ces questions feront l’objet de travaux ultérieurs.

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Annexe 1 : Entreprises canadiennes qui ont adopté le vote consultatif (2009-2012) et

Bourse(s) de cotation (Toronto ; New York (NYSE , AMEX ; Nasdaq) ; Londres)

Noms des entreprises Cotation(s)

Agnico-Eagle Mines Limited TSX, NYSE

Agrium Inc. TSX, NYSE

Aimia Inc. TSX

Air Canada TSX

Algonquin Power & Utilities Corp. TSX

Altius Minerals Corporation TSX

ARC Resources Ltd. TSX

Atlantic Power Corporation TSX, NYSE

Ballard Power Systems Inc. TSX, Nasdaq

Bank of Montreal TSX, NYSE

Bank of Nova Scotia TSX, NYSE

Barrick Gold Corporation TSX, NYSE

Baytex Energy Corp. TSX, NYSE

BCE TSX, NYSE, Autre

Bell Aliant Inc. TSX

Bombardier Inc. TSX

Brookfield Asset Management Inc. TSX, NYSE

Brookfield Office Properties Inc. TSX, NYSE

Cameco Corporation TSX, NYSE

Canadian Imperial Bank of Commerce TSX, NYSE

Canadian National Railway Company TSX, NYSE

Canadian Natural Resources Limited TSX, NYSE

Canadian Oil Sands Limited TSX

Canadian Pacific Railway Limited TSX, NYSE

Canadian Western Bank TSX

Capital Power Corporation TSX

Celestica Inc. TSX, NYSE

Cenovus Energy Inc. TSX, NYSE

CI Investments Inc. S/O

Cott Corporation TSX, NYSE

Davis + Henderson Corporation TSX

Empire Company Limited TSX

Enbridge Inc. TSX, NYSE

EnCana Corporation TSX, NYSE

Extendicare Real Estate Investment Trust S/O

Finning International Inc. TSX

First Quantum Minerals TSX, Londres, Autre

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Fortis Inc. TSX

Franco-Nevada Corporation TSX, NYSE

Gildan Activewear Inc. TSX, NYSE

Goldcorp Inc. TSX, NYSE

Golden Star Resources Ltd. TSX, AMEX, Autre

IAMGOLD Corporation TSX, NYSE

IMAX Corporation TSX, NYSE

Industrial Alliance Capital Trust S/O

Industrial Alliance Insurance and Financial Services Inc. TSX

Inmet Mining Corporation TSX

Intact Financial Corporation TSX

International Forest Products Limited TSX

Just Energy Group Inc. TSX

Kingsway Financial Services Inc. TSX, NYSE

Kinross Gold Corporation TSX, NYSE

Laurentian Bank TSX

MacDonald, Dettwiler and Associates Ltd. TSX

Magna International Inc. TSX, NYSE

Major Drilling Group International Inc. TSX

Manitoba Telecom Services Inc. TSX

Manulife Financial S/O

Maple Leaf Foods Inc. TSX

MDC Partners Inc. TSX, Nasdaq

Methanex Corporation TSX, Nasdaq

Midway Gold Corp. TSX Crois., AMEX

National Bank of Canada TSX

Nexen Inc. TSX, NYSE

North West Company Inc. (The) TSX

Pan American Silver Corp. TSX, Nasdaq

Parkland Fuel Corporation TSX

Patheon Inc. TSX

Penn West Petroleum Ltd. TSX, NYSE

Potash Corporation TSX, NYSE

Precision Drilling Corporation TSX, NYSE

Premium Brands Holdings Corporation TSX

Progress Energy Resources Corp. S/O

QLT Inc. TSX, Nasdaq

Research in Motion Limited TSX, Nasdaq

Revett Minerals Inc. TSX, AMEX

Royal Bank of Canada TSX, NYSE, Autre

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Russel Metals Inc. TSX

Shoppers Drug Mart Corporation TSX

SNC-Lavalin Group Inc. TSX

Stantec Inc. TSX, NYSE

Sun Life Financial TSX, NYSE, Autre

Suncor Energy Inc. TSX, NYSE

SunOpta Inc. TSX, Nasdaq

SXC Health Solutions Corp. TSX, Nasdaq

Talisman Energy Inc. TSX, NYSE

TD Bank TSX, NYSE

Teck Resources Limited TSX, NYSE

TELUS Corporation TSX, NYSE

Thompson Creek Metals Company Inc. TSX, NYSE

Thomson Reuters TSX, NYSE

TMX Group S/O

TransAlta Corporation TSX, NYSE

Transat A.T. Inc. TSX

TransCanada Corporation TSX, NYSE

Valeant Pharmaceuticals International, Inc. TSX, NYSE

Vista Gold Corp. TSX, AMEX

Vitran Corporation Inc. TSX, Nasdaq

Yamana Gold Inc. TSX, NYSE, Londres