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S ans remonter au char FT 17 de la Première Guerre mondiale, dont l’architecture est pourtant toujours en vigueur aujourd’hui, la France s’est régulièrement trouvée à la pointe des technologies dans la conception et la fabri- cation des véhicules blindés. C’est ainsi, par exemple, qu’au moment de la création de la Bundeswehr dans les années 1950, la République fédérale allemande s’est tournée vers l’industrie française pour s’é- quiper de chenillettes de reconnaissance et lancer son premier programme national de char de bataille qui débouchera, finale- ment, sur le Leopard. Les débuts des VCI Au début des années 1950, l’armée de terre française, dans le cadre du program- me AMX 13, est l’une des premières armées au monde à adopter un véhicule de combat d’infanterie entièrement chenillé, l’AMX 13 VTT. Auparavant, en particulier pendant la Seconde Guerre mondiale, Allemands et Américains avaient en effet retenu la solu- tion du véhicule semi-chenillé pour trans- porter l’infanterie des divisions blindées. Vingt années plus tard, dans les années 1970, l’AMX 10 P succède à l’AMX 13 VTT. Lui aussi chenillé, l’AMX 10 P se distingue de son prédécesseur par son blindage en alliage d’aluminium (au lieu de l’acier) et la puissance de son armement, un canon de 20 mm ayant remplacé la simple mitrailleu- se initiale. À la même époque, confiante dans l’intérêt de la roue, l’armée de terre française adopte l’AMX 10 RC, engin 6x6 armé d’un canon de 105 mm, pour équiper ses unités de reconnaissance, et du VAB pour son infanterie de deuxième échelon. Ce dernier programme est sans doute l’un des grands succès des dernières décen- nies avec la mise en service de quelque 5 000 véhicules – dont un millier à l’expor- tation – appartenant à plusieurs dizaines de versions différentes. La préférence va à la roue Amenée aujourd’hui à trouver un succes- seur à l’AMX 10 P, la France vient de choisir le VBCI 8x8. C’est ainsi un véritable véhi- cule de combat d’infanterie à roues, modu- laire, dont la protection peut être adaptée à la menace, qui va être produit et diffusé en grande série. Rendue possible par les progrès accomplis par le mode de propul- sion sur roues, cette solution apparaît par- ticulièrement intéressante dans le contexte actuel, caractérisé par la multiplication des missions d’intervention lointaine. Plus mobiles et confortables dans les dé- placements à grandes distances, ils sont moins coûteux à l’acquisition, consomment VBCI PROGRAMME MAJEUR DE L’ARMÉE FRANÇAISE LE PROGRAMME VBCI DE L’ARMÉE DE TERRE FRANÇAISE A MAINTENANT ATTEINT UN STADE ACTIF D’ÉVOLUTION AVEC L’ANNONCE, EN NOVEMBRE DERNIER PAR LE MINISTÈRE DE LA DÉFENSE, DE L’ATTRIBUTION DU MARCHÉ À GIAT INDUSTRIES ET RENAULT VI. AVEC LE VBCI, C’EST LE CONCEPT DES VÉHICULES BLINDÉS À ROUES DANS SON ENSEMBLE QUI FRANCHIT UNE NOUVELLE ÉTAPE MAJEURE. L E D O S S I E R 9

VBCI : Programme majeur de l'armée françaisecyberyana.free.fr/army2000/france/VBCI/fr_esp_vbci_01.pdf · atteignant 750 km. L’adoption de compo-sants dérivés des gammes commerciales

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Page 1: VBCI : Programme majeur de l'armée françaisecyberyana.free.fr/army2000/france/VBCI/fr_esp_vbci_01.pdf · atteignant 750 km. L’adoption de compo-sants dérivés des gammes commerciales

S ans remonter au char FT 17 de laPremière Guerre mondiale, dontl’architecture est pourtant toujoursen vigueur aujourd’hui, la France

s’est régulièrement trouvée à la pointe destechnologies dans la conception et la fabri-cation des véhicules blindés. C’est ainsi,par exemple, qu’au moment de la créationde la Bundeswehr dans les années 1950,la République fédérale allemande s’esttournée vers l’industrie française pour s’é-quiper de chenillettes de reconnaissanceet lancer son premier programme nationalde char de bataille qui débouchera, finale-ment, sur le Leopard.

Les débuts des VCIAu début des années 1950, l’armée deterre française, dans le cadre du program-me AMX 13, est l’une des premières arméesau monde à adopter un véhicule de combat

d’infanterie entièrement chenillé, l’AMX 13VTT. Auparavant, en particulier pendant laSeconde Guerre mondiale, Allemands etAméricains avaient en effet retenu la solu-tion du véhicule semi-chenillé pour trans-porter l’infanterie des divisions blindées.Vingt années plus tard, dans les années1970, l’AMX 10 P succède à l’AMX 13 VTT.Lui aussi chenillé, l’AMX 10 P se distinguede son prédécesseur par son blindage enalliage d’aluminium (au lieu de l’acier) et lapuissance de son armement, un canon de20 mm ayant remplacé la simple mitrailleu-se initiale. À la même époque, confiantedans l’intérêt de la roue, l’armée de terrefrançaise adopte l’AMX 10 RC, engin 6x6armé d’un canon de 105 mm, pour équiperses unités de reconnaissance, et du VABpour son infanterie de deuxième échelon.Ce dernier programme est sans doute l’undes grands succès des dernières décen-

nies avec la mise en service de quelque 5 000 véhicules – dont un millier à l’expor-tation – appartenant à plusieurs dizaines deversions différentes.

La préférence va à la roueAmenée aujourd’hui à trouver un succes-seur à l’AMX 10 P, la France vient de choisirle VBCI 8x8. C’est ainsi un véritable véhi-cule de combat d’infanterie à roues, modu-laire, dont la protection peut être adaptéeà la menace, qui va être produit et diffuséen grande série. Rendue possible par lesprogrès accomplis par le mode de propul-sion sur roues, cette solution apparaît par-ticulièrement intéressante dans le contexteactuel, caractérisé par la multiplication desmissions d’intervention lointaine.Plus mobiles et confortables dans les dé-placements à grandes distances, ils sontmoins coûteux à l’acquisition, consomment

VBCIPROGRAMME MAJEUR DEL’ARMÉE FRANÇAISE

LE PROGRAMME VBCI DE L’ARMÉE DE TERRE FRANÇAISE A MAINTENANT ATTEINT UN STADE ACTIF D’ÉVOLUTION AVEC L’ANNONCE, EN NOVEMBRE DERNIER PAR LE MINISTÈRE DE LA DÉFENSE, DE L’ATTRIBUTION DU MARCHÉ À GIAT INDUSTRIES ET RENAULT VI. AVEC LE VBCI, C’EST LE CONCEPT DES VÉHICULES BLINDÉS À ROUES DANS SON ENSEMBLE QUI FRANCHIT UNE NOUVELLE ÉTAPE MAJEURE.

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moins de carburant, et se révèlent plusfaciles à entretenir et à dépanner. Leur faiblesse passée en matière de mobi-lité en terrain très accidenté s’est, elleaussi, considérablement atténuée avecl’adoption d’une propulsion à huit rouesmotrices. Par ailleurs, ils peuvent recevoiraujourd’hui les mêmes protection et arme-ment qu’un engin chenillé.

Du VBM au VBCILe VBCI (véhicule blindé de combat d’infan-terie) tire son origine du programme de véhi-cules blindés modulaires (VBM) lancé audébut des années 1990, d’abord dans un cadre purement national, avant de sepoursuivre sur une base binationale (avec l’Allemagne : programme VBM/GTK), puis trinationale (France/Allemagne/Grande-Bre-tagne : programme VBM/GTK/MRAV), en vain.En mars et novembre 1999, la délégationgénérale pour l’armement a alors lancé

deux consultations en vue de commander,d’une part 450 véhicules de combat d’in-fanterie nécessaires à l’armée de terrefrançaise, d’autre part des véhicules pos-tes de commandement. Pour ces derniers,l’objectif initial était de les commanderdans le cadre du projet trinational, mais lesaccords industriels qui auraient permis laparticipation de la France n’ont pas pu êtreobtenus. Pour cette raison, la DGA a lancé,en mars 2000, une nouvelle consultationregroupant un plus grand nombre de véhi-cules de combat d’infanterie et les véhi-cules postes de commandement. C’estcette consultation qui vient de connaîtreson aboutissement.

Un programme de 700 VBCILe marché notifié à Giat Industries etRenault VI le 6 novembre dernier porte,pour sa tranche ferme, sur les études, ledéveloppement et l’industrialisation des

VBCI

Sur le plan industriel, le programme VBCI a généré uneétroite collaboration entre Giat Industries et Renault VI.Ces deux groupes se sont rapprochés pour créer la société commune Satory Military Vehicles, implantéesur le site de Versailles-Satory et se partager laconstruction des véhicules :● Satory Military Vehicles agit comme maître d’œuvreindustriel du programme VBCI et assurera la commer-cialisation des blindés à roues ;● Renault VI fournira les organes de mobilité (moteur,boîte de vitesses, suspensions et train de roulement), lecircuit électrique et le poste de conduite ;● Giat Industries sera responsable de la caisse blindée,de la protection, de l’aménagement intérieur, desmoyens de vision et de transmissions, ainsi que de lafonction “feu”, cette dernière comprenant, en particu-lier, la tourelle Dragar avec l’armement de 25 mm desVCI. Le groupe se chargera aussi du montage et del’intégration finale des véhicules.

COOPÉRATION INDUSTRIELLE

Engin chenillé,l’AMX 10 P est entré enservice dans les années

1970. Il transporte 11 hommes, dispose

d’un blindage en aluminium et son

armement est basé surun canon de 20 mm.

Son successeur, le VBCI,est un véhicule à 8 roues

motrices, conçu pourles projections loin-

taines et dont la protec-tion est modulaire.

Au total, 700 VBCI dansles versions combat

d’infanterie et poste de commandementdevraient être com-

mandés par la France.

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atteignant 750 km. L’adoption de compo-sants dérivés des gammes commerciales va contribuer à réduire les coûts du maté-riel et à en faciliter la logistique et la main-tenance. D’une manière plus générale, une démarche de recherche de sous-en-sembles et de composants (optronique,tourelleau du VCI...) déjà développés enEurope et dans le monde sera favorisée. Lacaisse du VBCI est formée d’une structureen alliage d’aluminium, sur laquelle vien-nent se fixer des modules de blindage dontla nature correspond au niveau de protec-tion que l’on cherche à atteindre. Sa masseautorise son emport par le futur avion detransport militaire européen ATF-FLA, dontles spécifications imposent que l’objettransporté pèse moins de 32 tonnes. Parailleurs, ses dimensions respectent lesnormes en vigueur en matière de gabaritferroviaire ou routier. Une attention particu-

lière est portée pour améliorer la sécuritédes personnels transportés face aux mineset à la projection d’éclats à l’intérieur del’habitacle, ainsi que pour réduire la signa-ture (infrarouge, électromagnétique...) duvéhicule. Les études et le développementdu programme VBCI doivent s’étendre de2000 à 2005 avec, en 2004, la réalisationdes prototypes. Lancée à la fin 2004 ou audébut 2005, la production en série de lapremière tranche de 65 matériels s’achè-vera au cours du second semestre 2006.En attendant, un plateau technique a étécréé à Satory pour réunir les industrielsconcernés par le programme, ainsi que lesreprésentants de l’état-major de l’arméede terre et de la délégation généralepour l’armement.

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véhicules, ainsi que sur la production et lesoutien des 65 premiers VBCI de série. Le marché comprend, en outre, plusieurstranches conditionnelles qui portent à 700le nombre total des véhicules livrés àl’armée de terre française dans les deuxversions de base suivantes : 550 véhicules

de combat d’infanterie (VBCI/VCI) et 150véhicules postes de commandement(VBCI/VPC).D’une masse en ordre de combat de 25,5 tonnes, les VCI équiperont les sec-tions d’infanterie mécanisée et les pelotonsd’appui direct des unités de chars Leclerc.Dans leur version de base, ils embarque-ront un groupe de 9 combattants, en plusdu tireur et du conducteur. Leur armementreposera sur une tourelle Dragar dotéed’un canon de 25 mm et d’une mitrailleusede 7,62 mm, avec conduite de tir intégrantun télémètre laser et une caméra thermi-que. Les VCI recevront le système d’infor-mation terminal (SIT) de Giat Industries,récemment adopté par la France.Les VPC, pour leur part, seront destinés,après équipement en système d’infor-mation régimentaire (VBCI/VPC/SIR), àl’accueil, au transport et à la protection des

moyens de commandement des mêmesunités. Ils transporteront 7 personnes etdisposeront, pour leur autodéfense, d’untourelleau armé d’une mitrailleuse de 12,7mm. Le VBCI pourra aussi servir de baseau développement d’autres versions spé-cialisées.

Simplicité de conception et hautesperformancesLe VBCI, tel qu’il a été imaginé à sa base,se présente comme une plate-forme à 8 roues motrices à suspension oléopneu-matique, propulsée par un moteur dieselde 550 ch couplé à une boîte de vitessesautomatiques. Cet ensemble propulse levéhicule sur route à des vitesses supé-rieures à 100 km/h, sur des distances

VBCI

Équipage 11 hommes (VCI) 9 hommes (VPC)

Masse à vide 17,7 t

Masse en ordre de combat 25,6 t (VCI) 23,3 t (VPC)

Longueur de la caisse 7,60 m

Largeur de la caisse 2,98 m

Hauteur au toit de la caisse 2,20 m

Hauteur hors tout 3,06 m (VCI)2,93 m (VPC)

Vitesse maximale > 100 km/h

Autonomie sur route > 750 km

Moteur Diesel de 550 ch

Boîte de vitesses Automatique

Suspension Oléopneumatique

Train de roulement 8x8

Protection Modulaire

Les véhicules chenillésde la célèbre familleAMX 13 ont étéproduits à plus de 7 700 exemplaires.L’AMX-VTT peut êtreconsidéré comme l’undes précurseurs desvéhicules blindés decombat d’infanterie.

Avec près de 5 000véhicules vendus, leVAB est l’un des blindésà roues les plus répandus au monde.Giat Industries etRenault VI coopèrentdéjà dans la fabricationdes nombreusesversion de ce véhiculepolyvalent.

CARACTÉRISTIQUES TECHNIQUES DU VBCI

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