8
Bulletin N°1 Janvier 2012 Vies & Envies de l’ Pourquoi u ne Académie de l’Éthique ? L’Éthique est une préoccupation ancienne et constante de l’homme, mais depuis peu elle traverse l’actualité quotidienne de façon de plus en plus pressante. C’est que, face aux angoisses présentes, dues souvent à des pratiques individuelles ou collectives contestables, le monde est en recherche de sens à partager. S’agit-il d’un phénomène de mode ? Une simple attention portée aux attentes des personnes, montre qu’il y a là au contraire une tendance lourde qui sans doute structurera durablement les sociétés futures : les exigences de l’Éthique s’accroissent continument au fur et à mesure des décennies et s’imposent toujours plus comme règles communes. Pourtant, s’entend-on bien sur l’Éthique ? Fait-elle l’objet d’un langage unique ? Est- elle partagée de la même façon entre les cultures, les idéologies et les modèles économiques ? Éthique politique, éthique de la gouvernance et de l’action publique, éthique des sciences, éthique individuelle ou citoyenne, éthique des affaires et des professions, éthique des relations inter- nationales, bioéthique, éthique sociale … autant de questionnements qui souvent ne se comprennent pas, et parfois s’opposent. Philosophes, historiens, juristes, sociologues, politologues, scientifiques, citoyens, hommes d’affaires et managers, salariés, consommateurs, militants des droits de l’homme ou de l’environnement, acteurs de nos vieux pays ou de pays émergents ... autant de discours et de postures sur les concepts, les attentes et les comportements. Ces différents regards ont en réalité peu d’occasions de se rencontrer, de dialoguer et de se concerter. C’est justement pour permettre cette rencontre que s’est mise en place l’Academie de l’Éthique, « Think tank » créé pour favoriser l’échange, la production et le partage d’idées entre personnes issues de disciplines et de cultures différentes, mais ensemble persuadées que les principes de l’Éthique auront un rôle structurant pour l’avenir. Si les approches parcellaires sont certes nécessaires et ne manquent pas d’intérêt, l’Academie de l’Éthique a le désir d’« élever le débat » : non seulement être un carrefour d’idées, mais aussi proposer aux acteurs du monde moderne une réflexion nouvelle sur les valeurs, une interrogation qui puisse fonder les comportements d’avenir, dégager les grandes lignes d’une « éthique pour le futur », mettre en évidence des repères, qui semblent c’est une banalité de le rappeler - tellement manquer dans nos sociétés. Hervé Lainé Président de l’Académie de l’Éthique VIES L’équipe p.2 Comité scientifique p.2 Conférence inaugurale p.6 La revue [im]Pertinences p.6 Agenda p.8 ENVIES Fulminations éthiques p.3 Parler d’intelligence éthique ? p.4 Un mot à la loupe : Médiation p.5 Appel aux étudiants p.6 Le Fou du Roy : Internet p.7

V&E JANVIER 2012

Embed Size (px)

DESCRIPTION

L’Éthique est une préoccupation ancienne et constante de l’homme, mais depuis peu elle traverse l’actualité quotidienne de façon de plus en plus pressante. C’est que, face aux angoisses présentes, dues souvent à des pratiques individuelles ou collectives contestables, le monde est en recherche de sens à partager. S’agit-il d’un phénomène de mode ?...

Citation preview

Page 1: V&E JANVIER 2012

Bulletin N°1 – Janvier 2012

Vies & Envies de l’

P o u r q u o i u n e A c a d é m i e d e l ’ É t h i q u e ? L’Éthique est une préoccupation ancienne et constante de l’homme, mais depuis peu elle traverse l’actualité quotidienne de façon de plus en plus pressante. C’est que, face aux angoisses présentes, dues souvent à des pratiques individuelles ou collectives contestables, le monde est en recherche de sens à partager.

S’agit-il d’un phénomène de mode ? Une simple attention portée aux attentes des personnes, montre qu’il y a là au contraire une tendance lourde qui sans doute structurera durablement les sociétés futures : les exigences de l’Éthique s’accroissent continument au fur et à mesure des décennies et s’imposent toujours plus comme règles communes.

Pourtant, s’entend-on bien sur l’Éthique ? Fait-elle l’objet d’un langage unique ? Est-elle partagée de la même façon entre les cultures, les idéologies et les modèles économiques ?

Éthique politique, éthique de la gouvernance et de l’action publique, éthique des sciences, éthique individuelle ou citoyenne, éthique des affaires et des professions, éthique des relations inter-nationales, bioéthique, éthique sociale … autant de questionnements qui souvent ne se comprennent pas, et parfois s’opposent.

Philosophes, historiens, juristes, sociologues, politologues, scientifiques, citoyens, hommes d’affaires et managers, salariés, consommateurs, militants des droits de l’homme ou de l’environnement, acteurs de nos vieux pays ou de pays émergents ... autant de discours et de postures sur les concepts, les attentes et les comportements.

Ces différents regards ont en réalité peu

d’occasions de se rencontrer, de dialoguer et de se concerter.

C’est justement pour permettre cette rencontre que s’est mise en place l’Academie de l’Éthique, « Think tank » créé pour favoriser l’échange, la production et le partage d’idées entre personnes issues de disciplines et de cultures différentes, mais ensemble persuadées que les principes de l’Éthique auront un rôle structurant pour l’avenir.

Si les approches parcellaires sont certes nécessaires et ne manquent pas d’intérêt, l’Academie de l’Éthique a le désir d’« élever le débat » : non seulement être un carrefour d’idées, mais aussi proposer aux acteurs du monde moderne une réflexion nouvelle sur les valeurs, une interrogation qui puisse fonder les comportements d’avenir, dégager les grandes lignes d’une « éthique pour le futur », mettre en évidence des repères, qui semblent – c’est une banalité de le rappeler - tellement manquer dans nos sociétés. Hervé Lainé Président de l’Académie de l’Éthique

VIES L’équipe p.2 Comité scientifique p.2 Conférence inaugurale p.6 La revue [im]Pertinences p.6 Agenda p.8

ENVIES Fulminations éthiques p.3 Parler d’intelligence éthique ? p.4 Un mot à la loupe : Médiation p.5 Appel aux étudiants p.6 Le Fou du Roy : Internet p.7

Page 2: V&E JANVIER 2012

Vies & Envies n°1 – Janvier 2012 – Page 2

Les personnes

L’équipe de l’Académie de l’Éthique L’Académie de l’Éthique a été fondée à l’initiative de :

Françoise de Bry, Docteure hdr es Sciences sociales Vice-présidente de l’Académie de l’Éthique Michèle Guillaume-Hofnung, Professeure des facultés de droit Vice-présidente de l’Académie de l’Éthique Michel Jonquières, Vice-président de l'Institut de l'Audit Social (IAS) Secrétaire et trésorier de l’Académie de l’Éthique Michel Joras, Enseignant-chercheur hdr, ESCE Vice-président de l’Académie de l’Éthique Hervé Lainé, Ingénieur général des ponts, des eaux et des forêts Président de l’Académie de l’Éthique

Des étudiants lui apportent une collaboration dynamique et enthousiaste :

Ines Ben Rehouma, Doctorante en Droit Public, Université Paris Sud Jean Séry, Étudiant, Master Éthique et Organisation, Université Paris-Descartes

L’Académie de l’Éthique au Liban est présidée par :

Dr Fadi Comair, Directeur Général des ressources hydrauliques et électriques Professeur à la NDU, Notre Dame University, Beyrouth

Le Comité Scientifique Jean Audouard, École Supérieure de Commerce Extérieur, ESCE, Paris Nehme Azoury Université Saint-Esprit de Kaslik, Liban Jérôme Ballet, Institut de Recherche pour le développement, UMI Résiliences Laurent Bibard, ESSEC Françoise de Bry Vice-présidente de l‘Institut de l’Audit Social (IAS) Isabelle Cadet, ESDES, Lyon Richard Delaye, PROPEDIA (Groupe IGS) Michel Dion, Université de Sherbrooke, Canada Mohamed Ennaceur Association Tunisienne de Droit Social Jean-Marie Fessler, Standford Program, Paris Michèle Guillaume-Hofnung, Université Paris-Sud Christian Hervé, Université Paris-Descartes

Jacques Igalens École de Management Toulouse Michel Joras, École Supérieure de Commerce Extérieur, ESCE, Paris Naïm Ouaini Université Saint-Esprit de Kaslik, Liban Jean-Marie Peretti, ESSEC, France Anne Sachet-Milliat, ISC Paris Monique Sassier, Médiateur de l’Éducation nationale et de l’Enseignement supérieur Aline Scouarnec IAE, Université de Caen Basse Normandie François Silva, ESCEM, France Houria Tazi Sadeq, Université de Casablanca Pierre-Frédéric Ténière-Buchot Conseil Mondial de l’Eau David Vogel University of California, Berkeley, USA Catherine Voynet-Fourboul CIFFOP, Université Panthéon Assas, Paris

Dans l’esprit de l’Académie de l’Éthique, ce premier Comité Scientifique reste ouvert et sera abondé

afin de diversifier plus encore les sensibilités représentées par ses membres.

Page 3: V&E JANVIER 2012

Vies & Envies n°1 – Janvier 2012 – Page 3

Pertinences

Fulminations éthiques Pierre-Frédéric Ténière-Buchot

Consultant, CANDIZ sarl L’éthique : un mot-valise à la mode qui contient beaucoup des turpitudes du siècle. Aux illusions collectives de l’Ethique, préférons les bienfaits réels du rire et d’une morale individuelle agissante.

Quoi qu’en disent, ferons Devise de la Société CANDIZ

L’Ethique est-elle la science de la morale ou la mise en pratique de celle-ci ? Est-elle un principe qui génère des attitudes ou un code de conduites vertueuses qui donneraient un sens concret à la Morale ? En ce début calamiteux du 21ème siècle, l’éthique est à la mode tandis que la morale est bafouée tous les jours. L’éthique est à la mode dans la mesure où c’est un concept flou qui anesthésie la réflexion en lui substituant les apprêts d’une bigoterie sociale. Les exemples de cette tartuferie mondiale foisonnent. Il suffit d’apposer l’adjectif éthique pour ajouter le vernis nécessaire qui va calmer les inquiétudes, voire les indignations. Ainsi, depuis 2008, les banques et leurs comptes ambigus sinon fantaisistes se réfugient derrière le masque de l’éthique financière. Plus les grandes entreprises accélèrent les délocalisations et créent le chômage et la misère, plus elles se blottissent auprès de la respectabilité que leur confère la Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE). Une responsabilité garantie par une loi : il suffit pour cela de l’écrire sur le papier couché d’un rapport annuel d’activité et l’on est responsable. Et si jamais cela n’était pas vrai ? Qui s’en plaindrait ? Il n’y aurait aucune sanction à la supercherie. Un autre exemple – pont aux ânes – est la proclamation dans beaucoup de pays développés de l’éthique gouvernementale. A l’instar des promesses électorales, elle n’engage que ceux qui ont la faiblesse d’y croire. L’éthique est souvent le vocable apprécié des professionnels de l’hypocrisie, de l’usurpation et de l’imposture : les politiques. Mais il n’y a pas qu’eux. La société qualifiée de

civile, c’est-à-dire un peu tout le monde qui travaille, consomme et vote, éprouve un irrépressible besoin de croire et, plus encore, d’avoir confiance. La dégradation de l’environnement inquiète-t-elle ? On la dilue dans du social et de l’économique pour en faire du développement durable, auquel un culte est parfois rendu pendant quelques mois, rue de Grenelle, à Paris. La nouvelle divinité déçoit-elle ? On ajoute à ses attributs trinitaires des mondes public, privé et associatif l’Ethique qui est censée leur donner enfin un sens. Tout cela est-il inéluctable ? Y a-t-il des échappatoires à cet univers d’horreur et de désolation ? Deux possibilités peuvent être proposées, et dans cet ordre : d’abord le rire dévastateur, ensuite la morale individuelle. Ridiculiser grâce à l’irrespect, l’impertinence et l’insolence est la meilleure arme pour abattre les travers de l’éthique dont certains viennent d’être évoqués et dénoncés. Il ne s’agit donc pas d’un rire compensateur, pour surmonter sa peine et son dégoût, mais d’un rire iconoclaste orienté vers un seul but : se débarrasser des cagots de l’Ethique. Et de convoquer ainsi Rabelais, Molière et Nietzsche et –quitte à choquer par cette association – les Guignols de l’info. Grâce au rire de Rabelais, l’humanisme a réussi à percer. Molière est (presque) parvenu à éradiquer les précieuses marquises et les fats de toutes espèces. Je ne crois pas personnellement que Nietzsche ait mené à son terme la mort de Dieu mais son rire dionysiaque a bien contribué à fissurer les églises de ceux dont le métier est de feindre de Le servir. C’est un résultat appréciable. Enfin, comment à notre époque peut-on oser se présenter aux suffrages de ses concitoyens, faisant fi du mépris pour les politiques, instillé par les Guignols ? Faut-il avoir perdu tout respect de soi-même ? Détruire l’éthique d’apparat, l’éthique officielle et institutionnelle, celle qui fait appel au langage politiquement correct, aux arnaques commerciales et financières les plus viles, au cynisme sadique des nations les plus riches aux dépens de celles qui sont les plus pauvres, tout cela est un devoir. Le rire paraît être le moyen corrosif le plus approprié.

Page 4: V&E JANVIER 2012

Vies & Envies n°1 – Janvier 2012 – Page 4 Au-delà de la destruction salvatrice, il faut toutefois reconstruire en évitant que ce soit à l’identique. C’est ici que la morale individuelle intervient. D’abord craindre sans cesse de devenir une crapule. Il convient pour cela de ne jamais s’engager à la hâte, c’est-à-dire d’attendre le bon moment pour agir et surtout ne pas se précipiter à croire tout ce que les autres disent. Prendre le temps signifie le plus souvent renoncer à des projets initiaux dont l’opportunité aura disparu. Ne pas les regretter : ces projets-là sont aliénants. Chercher des compromis avec sa conscience est sagesse. Les transformer en compromissions est se mentir à soi-même, ce qui devient très vite une situation irrécupérable, toute référence de bon sens ayant disparu. Il convient aussi de faire confiance à son inspiration chaque fois que l’on se tourne vers autrui avec l’intention louable de l’aider. La

morale individuelle consiste à s’efforcer de réaliser seul ce que, manifestement, la collectivité ne réussit pas à faire. Orgueil et mégalomanie ? Pas du tout : patience dans l’effort, opiniâtreté, pugnacité. Cela étant, il n’y a pas de profil moral idéal. A chacun de construire le sien, non pas dans l’isolement mais dans la rencontre avec les autres. Mais ne jamais faire l’âne (asinus asinum fricat). Contrairement à l’Ethique de parade, la morale individuelle est une esthétique. Bien vécue, elle procure une joie d’être. Se sentir libre de bien faire est plus gratifiant que de recevoir des brevets éthiques de pacotille. En fait, il ne s’agit pas de parler à tort et à travers de l’Ethique, même et surtout avec les meilleures intentions du monde, mais de l’incarner. Ceci, à moins d’être un grand bavard, ne passe par aucun discours démonstratif mais par l’exemplarité. Etre et non pas dire.

Est-il pertinent de parler d’intelligence éthique ?

Michel Joras Enseignant-Chercheur hdr, ESCE

Vice-président de l’Académie de l’Éthique

La juste méthode de la philosophie, pour Ludwig Wittgenstein, serait de « ne rien dire sinon ce qui peut se dire » ; aussi parler d’intelligence éthique, pour « éviter de parler pour ne rien dire », nous oblige à clarifier notre pensée, à proposer une définition réaliste de l’intelligence et, en la croisant avec une approche minimaliste de l’éthique, dans cet espoir de possible métissage, à dégager un « mème » utile pour rénover les sciences sociales et du management : l’intelligence éthique. De quoi l’intelligence est-elle le nom ? Selon l’usage classique, l’intelligence serait la faculté de comprendre, connaître, concevoir, réfléchir ; pour les sciences du vivant elle serait cette aptitude à s’adapter à une situation, à sélectionner des moyens d’action en fonction des circonstances, et déceler risques et opportunités. Mais selon une première approche d’Alain Berthoz sur la décision, l’intelligence est cette faculté qui précède et alimente toute prise de décision « en calculant le pour et le contre »,

en gardant la tête froide pour évaluer ses chances ou ses risques d’échec … En faisant taire ses passions ? Ne doit-on pas à l’inverse, comme le propose lui-même Berthoz en se contredisant, se poser des questions impertinentes : Et si la décision n’était rien de tout cela ? Si la décision n’était pas raison, mais action ? Et si ce que nous appelons aujourd’hui « les décideurs » étaient avant tout des « hommes d’action » ? … Le cerveau est parieur, joueur ; la décision est sélection. L’intelligence, quand elle est qualifiée d’économique, a la finalité d’une part de détecter menaces et opportunités pour maitriser l’environnement, d’autre part de préserver les patrimoines, … tout en évitant toute déviance in-éthique. Quand l’intelligence est dite sociale elle exprime la capacité à comprendre les attitudes et les attentes des parties prenantes envers soi et son organisation… et à viser (Hessel-Morin) une harmonie sociale dans l’harmonie cosmique, mais en écartant toute « démocratie d’émotions » telle que vilipendée par Jean-Paul Delevoye. Quelle éthique croiser avec l’intelligence ? En reprenant l’idée que l’intelligence alimente et précède la décision et qu’une éthique minimaliste consiste « à ne pas nuire », on suggérera que l’intelligence éthique, quand se

Page 5: V&E JANVIER 2012

Vies & Envies n°1 – Janvier 2012 – Page 5 pose la question : « comment vivre une situation, un événement, une crise ? », est celle qui permet de faire face à un dilemme, de choisir entre le bon et le mauvais, le juste et l’injuste, le légal et l’illégal, le beau et le laid, … pour atteindre ses objectifs avec efficience, sans nuire et en créant le plus de bien et le moins de mal possible, et ce en respectant les valeurs et les exigences d’ordre public et privé, selon une obligation de précaution permanente. L’intelligence éthique, outil de gouvernance et de management ? En s’appuyant sur les moyens offerts par l’intelligence tant économique que sociale, l’intelligence éthique permet aux responsables d’exprimer leur volonté d’intégrer le maximum

de « contenu éthique » dans leurs compétences et dans leurs comportements ; elle leur permet de répondre aux questionnements et dilemmes éthiques, et naturellement de contribuer a la responsabilité sociétale de leurs organisations (norme ISO 26000), d’en rendre compte, sinon de s’expliquer. Conclusion, très pertinente ? Nouvelle discipline de gouvernance, l’intelligence éthique permet de décider en toute connaissance de cause éthique, « de lier le présent au passé et au futur, et d’ordonner » (Berthoz) … Elle peut et doit ouvrir des « espaces éthiques », lieux de débats et de partage, au sein de notre nouvelle Academie de l’Éthique.

*

Un mot à la loupe : Médiation

La médiation, un processus de communication éthique.

La médiation se définit comme « un processus de communication éthique reposant sur la responsabilité et l’autonomie des participants, dans lequel un tiers impartial, indépendant, sans pouvoir décisionnel ou consultatif, avec la seule autorité que lui reconnaissent les médieurs, favorise, par des entretiens confidentiels, l’établissement ou le rétablissement du lien social, la prévention ou le règlement de la situation en cause. » (Guillaume-Hofnung).

A la différence des autres modes de résolution des conflits, qui s’intéressent ou se construisent par rapport au conflit, la médiation va au-delà. Elle vise à rapprocher les partenaires, dans le cadre d’un processus ternaire proche de la maïeutique qui va permettre de construire la meilleure décision possible. Elle invite au dépassement des clivages, des dualités, pour construire une relation durable ; en ce sens, la médiation innove, donne du sens, construit et génère une plus-value. C’est qu’en effet la médiation assume trois autres fonctions : elle crée ou recrée du lien social et elle prévient le conflit.

La médiation fonde sa raison d’être, dans les valeurs humaines et dans une éthique. Elle renvoie à un questionnement personnel et relationnel qui implique tous les partenaires à la médiation et qui les incite, à restituer : altérité, écoute, civisme, l’estime de l’autre et de soi même.

L’éthique de communication nécessite deux éléments : l’autonomie et la responsabilisation. Aussi, dans le système de la médiation, la référence à l’éthique met-elle en évidence le double principe de la responsabilité et de l’autodétermination (liberté) que chaque médié/partenaire est appelé à offrir à l’autre médié/partenaire ; autrement dit, être responsable, c’est être dans l’interaction, c’est s’engager à parler et à écouter afin de surmonter les impasses conflictuelles.

Grâce à sa forme ternaire, la médiation est une source d’enrichissement du simple dialogue où s’expriment les libertés. En ce sens, la médiation permet l’exercice normal des Libertés publiques car nous pouvons envisager la pratique médiatrice comme un pomerium c’est-dire comme un enclos sacré au sein duquel la liberté de chacun est retrouvée. Il appartiendra par la suite au médiateur d’édifier des ponts pour que les médieurs puissent retrouver leurs facultés relationnelles.

Tout choix de médiation constitue un progrès dans la perspective d’une société solidaire. Cela nous conduit à affirmer que par nature l’acte de médiation est un acte éthique qui comme la maïeutique restitue à chacun la capacité de retrouver en soi sa pleine capacité à être au monde.

Ines Ben Rehouma et Michèle Guillaume-Hofnung

Page 6: V&E JANVIER 2012

Vies & Envies n°1 – Janvier 2012 – Page 6

Informations

CONFÉRENCE INAUGURALE Paris - 31 janvier 2012

La conférence inaugurale de l’Académie de l’Éthique se tiendra sous forme de conférence-atelier, le 31 janvier à Paris, au siège de l’UNESCO : « Une Académie de l’Éthique … quelle [im]Pertinence ! ».

Jean-Paul Delevoye, Président du Conseil Économique, Social et Environnemental interviendra, ainsi que les personnalités suivantes : Jean Staune, Philosophe, Thierry Beaudet, Président de la Mutuelle Générale de l’Éducation Nationale, Christian Hervé, Directeur du laboratoire d’éthique médicale, Université Paris-Descartes, Jean Audouard, Directeur de l’École Supérieure du Commerce Extérieur, Fadi Comair, Nehme Azoury, Naïm Ouaini, Fondateurs de l’Académie de l’Éthique, Liban, et John Crowley, Responsable de l’Éthique des sciences à l’UNESCO.

APPEL AUX ÉTUDIANTS Jean Séry

Étudiants et doctorants en toutes disciplines, … si les questionnements éthiques vous interpellent, si vous êtes persuadés qu'aucune « case » ne peut contenir l'entièreté de ces questionnements ... l'Académie de l’Éthique a besoin de vous !

Vous pouvez « faire bouger les lignes » de plusieurs manières : Vous avez envie d'écrire ? De participer aux débats ? L'actualité scientifique, artistique, économique, sociale ou politique suscite en vous des interrogations ? Vous êtes intéressés par les concepts de l'éthique d'un point vue philosophique ? Pour accueillir vos envies, l'Académie de l'Ethique vous propose différents modes d’implication. Venez discuter et débattre des questions d'éthique ! Jamais comme aujourd'hui, la prise en main du débat sur l'éthique n'a été aussi importante ... Accompagnez nous en vous abonnant gratuitement sur notre site,

www.academie-ethique.org et recevez notre bulletin d'information ! Ouvrez-vous un réseau de discussion en adhérant à l'Académie de l'Ethique, et contribuez ainsi à porter le débat toujours plus loin ! Contribuez aux débats sur l'éthique en participant aux événements, en apportant vos contributions à notre bulletin, en proposant des sujets que vous souhaiteriez traiter ou voir traiter par l'Académie de l'Ethique … Notre projet vous intéresse ? Nos débats vous attirent ?

CONTACTEZ-NOUS : [email protected]

[im]Pertinences est le titre de la revue de l’Académie de l’Éthique ; il en reflète l’état d’esprit: « pour être éthique, il est pertinent d’être impertinent ».

Revue libre, d’esprit à la fois académique et pragmatique, elle est ouverte aux universitaires et aux praticiens, experts, scientifiques et philosophes, économistes, responsables de la vie publique ou du monde des affaires, juristes et médecins, etc. qui souhaiteront faire connaître et partager des idées, des réflexions, des analyses et des propositions novatrices ou anticipatrices … et qui n’hésiteront pas à tenir des propos critiques ou dérangeants, voire à pratiquer cette impertinence mesurée que nous prônons, pour bousculer les habitudes, les idées reçues et les pratiques ou discours convenus, souvent porteurs de risques in-éthiques.

Le Numéro zéro d’[im]Pertinences, sous titré Pertinence et Impertinence de l’Éthique paraîtra fin février 2012. Le numéro 1 sera consacré l’éthique de la communication et des medias dans leurs rapports au Développement durable ; il paraitra à l’été 2012.

[im]Pertinences sera heureuse de recevoir, en dehors des sentiers de la pensée unique, toute proposition d’article de haut niveau scientifique.

Page 7: V&E JANVIER 2012

Vies & Envies n°1 – Janvier 2012 – Page 7

Impertinences

Internet

Vous n’en avez pas assez, vous, parfois d’internet ?

Bien sûr les services rendus sont fantastiques, et vous avez le monde entier à portée de doigt et de voix.

Mais vous êtes vous-même, aussi, à la portée de tout un chacun dans le monde entier. Á portée du moindre de ces serveurs qui vous saturent l’esprit, à portée d’innombrables importuns et importunes qui vous assaillent et vous proposent gadgets idiots, ou bien voyance, fortune, réussite et amour. Vous y croyez ?

Et le temps lui-même, votre temps, qui explose ? Tout doit être immédiat, « en temps réel » … l’information qui vous arrive, mais aussi votre réaction, et votre réponse quand on vous sollicite. Où est la réflexion dans tout ça ?, le temps nécessaire à l’approfondissement, à l’enrichissement des idées ? Vous arrive-t-il encore de passer deux jours – deux heures ? - sans « vous connecter », sans tapoter sur votre clavier, votre smartphone ou, maintenant, votre tablette ?

Sans compter le temps passé, perdu, quand il faut « télécharger » les dernières « applications », les nouvelles « mises à jour », quand il faut « consulter l’aide en ligne », quand on doit gérer, organiser, nettoyer son « disque dur » et autres « clés USB » … et quand tout ça cafouille : un « bug » ! (Pourquoi une telle indulgence pour les « SS-deux-I » - les appellent-on encore ainsi ? – qui mettent sur le marché des produits immatures et défectueux ! Imagine-t-on la même indulgence pour un fabricant d’automobiles, un laboratoire

pharmaceutique, ou une entreprise de génie civil ?)

Et puis, quelle éthique dans le cyberespace ? Intrusions multiples dans les vies privées ou dans les bases de données des entreprises et des services publics – y compris au détriment de la sécurité-, atteintes aux libertés, hacking, vols informatiques à grande échelle, pillages des droits élémentaires, de la propriété artistique ou intellectuelle, piratages, détournements de comptes en banque et autres turpitudes. Cybercriminalité, trafics en tous genres, fortunes construites frauduleusement en profitant des failles béantes d’un système dépourvu de tout processus fiable de contrôle. On en vient à ressentir du soulagement quand éclate une affaire aux relents plus ou moins délétères : Wikileaks, ou tout récemment Megaupload …

Vous ne rêvez jamais que tout cela s’arrête ? Ou à tout le moins qu’une pause soit ménagée dans cette haletante course en avant ? Ne serait-ce qu’au nom du fameux principe de précaution ? Principe qu’on n’hésite guère à mettre en avant à tout propos, … souvent même mal à propos. Faut-il instaurer chaque année une semaine mondiale des NTIC … pendant laquelle serait décrétée la mise en veille globale de « la toile » ?

Non bien sûr, mais il serait temps que vous vous interrogiez sur la façon de trier dans tout cela, pour garder les bienfaits d’internet tout en s’efforçant, autant que faire se peut, d’en éliminer les méfaits.

On en est loin, hélas. Et là comme ailleurs, la durabilité n’est pas garantie !

Le Fou du Roy

Page 8: V&E JANVIER 2012

Vies & Envies n°1 – Janvier 2012 – Page 8

Agenda

FORUM FRANCOPHONE DES AFFAIRES - Beyrouth, 29-30 novembre 2011

L’Académie de l’Éthique a participé au Forum Francophone des Affaires de Beyrouth, les 29 et 30 novembre 2011, en présentant une communication sur le thème « Ressources essentielles et éthique pour le futur » et en animant un atelier consacré à « l’empreinte écologique en Méditerranée ».

CONFÉRENCE INAUGURALE DE L’ACADÉMIE DE L’ÉTHIQUE - Paris, 31 janvier 2012). . Voir l’annonce détaillée en page 6 de ce bulletin.

CONFÉRENCE INTERNATIONALE SITEAU Casablanca - 2 au 5 février 2012

Le Salon International des technologies de l’eau et de l’assainissement aura cette

année pour thème général « L’entreprise durable ».

Nous y ferons deux communications : « Éthique et développement durable » (Hervé Lainé) et « Les spécificités de la médiation au sein des Marc » (Michèle Guillaume-Hofnung).

LES 1ers ENTRETIENS DE LA CONFIANCE - Paris, 20 février 2012

Les 1ers entretiens de la Confiance, organisés par l’Institut Confiances, « think thank » dont l’Académie de l’Éthique est partenaire, se tiendront le 20 février, à Paris, au Sénat. L’Académie de l’Éthique a pris en charge un groupe de réflexion « Confiance en l’avenir, confiance en la science », dont les travaux se dérouleront sur les années 2012 et 2013.

Voir le site : www .institut-confiances.org

A D H É S I O N Á L ’ A C A D É M I E D E L ’ É T H I Q U E

Adhésion Personne physique (Membre titulaire). Montant de la cotisation : 25€00

M., Mme, Melle (Nom et prénom) : Fonction : Organisme : Adresse : Tél. : Portable : Mél :

Adhésion Personne morale (Membre associé). Montant de cotisation libre, avec un minimum de 900 €

Raison sociale (Entreprise, Société, Organisme, etc.). : Nom : Adresse : Représenté(e) par M., Mme, Melle (Nom et prénom) : Fonction : Tél. : Portable : Mél :

Bulletin d’adhésion à retourner à l’Académie de l’Éthique, 4 rue de l’Université 75007 Paris, accompagné de la cotisation, par chèque à l’ordre de l’Académie de l’Éthique.

Les adhésions sont définitives après validation par le Bureau de l’Académie de l’Éthique.

www.academie-ethique.org – 4 rue de l’Université 75007 PARIS – [email protected]