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SPÉCIAL ECONOMIE I Le Quotidien de www.quotidieneconomie.com Le Quotidien de l’Economie @Quotidieneco Vendredi 27 octobre 2017 400 FCFA 6 ème année Theli RP Tel : (237) 242 00 17 31 / 243 42 88 32 Email : [email protected] Directeur de la publication : Thierry EKOUTI COP23 l’ Éditorial S i l’on ne peut que se réjouir de l’augmentation rapide de la classe moyenne dans le monde, notamment dans les économies émer- gentes, la croissance de la consommation qui l’accompagne accroît cependant la tension sur les matières premières et souligne les limites de notre modèle économique linéaire : prendre, faire, jeter. Selon le think tankGlobal Footprint Network, il faut désormais 18 mois à la terre pour régénérer les ressources naturelles que nous prélevons en un an. Cela n’est mathématiquement pas durable. Cependant, des avancées prometteuses se font jour. A travers le monde, des pionniers jettent les bases d’une économie circulaire qui émerge à tous niveaux, donnant naissance à de nouveaux modèles économiques et à de nouvelles opportunités d’affaires. Aujourd’hui, en tant que membre de Solutions&Co, un réseau de 20 grands titres de la presse économique mondiale, Le Quotidien de l’éco- nomie relaie jusqu’à vous les initiatives des entreprises les plus inno- vantes et les projets qui nous font évoluer plus vite vers une économie circulaire. Certaines entreprises pensent dès la phase de design l’ensemble du cycle de vie de leurs produits, jusqu’au recyclage. Des villes mettent en place des parcs industriels où les déchets d’une entreprise deviennent la ma- tière première d’une autre. Des gouvernements bannissent les sacs plas- tiques et expérimentent une fiscalité récompensant la réparation. Des consommateurs louent leurs jeans au lieu de les acheter. Et des fermiers urbains font jaillir la verdure de bouteilles en plastique, au Cameroun. L’économie circulaire s’attaque aux problèmes à la racine en réduisant notre dépendance aux produits finis. Elle oriente nos économies vers des cercles vertueux en concevant des produits qui excluent tout déchet tout en restaurant notre capital industriel, humain, social, naturel et financier. Cette nouvelle économie représente aussi une magnifique opportunité de protéger l’environnement tout en créant des emplois et de la richesse – rien qu’en Europe, potentiellement 1,8 billion d’euros d’ici à 2030. Bien que l‘économie circulaire s’empare de problèmes complexes, la so- lution n’est ni simple, ni standard. Il s’agit plutôt d’un effort collaboratif et chacun – citoyen, entreprise, ville, pays – a un rôle à jouer. Pour cette troisième édition de Solutions&Co, dont l’entreprise à voca- tion sociale Sparknews est le fer de lance, nos lecteurs en Chine, au Bré- sil, en Afrique du Sud, en Inde, en France, en Allemagne, au Royaume-Uni et ailleurs découvriront une variété d’initiatives qui accélèrent la transi- tion mondiale vers l’économie circulaire. En partageant ces récits, notre réseau de médias fait connaître des solutions innovantes aux problèmes climatiques, proches et lointaines. Les entreprises mises en lumière dans nos éditions précédentes ont bé- néficié en retour de nouvelles opportunités. Certaines ont noué des par- tenariats avec de grandes organisations ou entreprises. Des projets ont également inspiré Total, partenaire fondateur de Solutions&Co, à re- chercher de solutions circulaires pour une transition énergétique durable. Pour aller plus loin, nous avons créé un e-book rassemblant les points de vue de figures de proue de l’économie circulaire tels que William McDo- nough, Claire Pinet et Jean-Marc Boursier. Téléchargez-le sur www.so- lutionsandco.org ouwww.quotidieneconomie.com et découvrez des dizaines d’entreprises innovantes, ainsi que les perspectives d’experts et de dirigeants travaillant déjà selon les principes de l’économie solidaire. de Christian de Boisredon L’agriculture urbaine germe sur les bouteilles plastiques usées Cameroun

Vendredi 27 octobre 2017 6 ème année 400 FCFA IE Le ......IE Le QuotC idien de ONOMIE SPÉCIAL L eQu ot id nl’Ec m @Quotidieneco Vendredi 27 octobre 2017 6 ème année 400 FCFATheli

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SPÉCIALECONOMIEILe Quotidien de

www.quotidieneconomie.com Le Quotidien de l’Economie

@Quotidieneco

Vendredi 27 octobre 2017 400 FCFA6 ème année

Theli RP Tel : (237) 242 00 17 31 / 243 42 88 32 Email : [email protected] Directeur de la publication : Thierry EKOUTICOP23

l ’ É d it or ial

Si l’on ne peut que se réjouir de l’augmentation rapide de la classe

moyenne dans le monde, notamment dans les économies émer-

gentes, la croissance de la consommation qui l’accompagne accroît

cependant la tension sur les matières premières et souligne les limites de

notre modèle économique linéaire : prendre, faire, jeter. Selon le think

tankGlobal Footprint Network, il faut désormais 18 mois à la terre pour

régénérer les ressources naturelles que nous prélevons en un an. Cela

n’est mathématiquement pas durable.

Cependant, des avancées prometteuses se font jour. A travers le monde,

des pionniers jettent les bases d’une économie circulaire qui émerge à

tous niveaux, donnant naissance à de nouveaux modèles économiques

et à de nouvelles opportunités d’affaires.

Aujourd’hui, en tant que membre de Solutions&Co, un réseau de 20

grands titres de la presse économique mondiale, Le Quotidien de l’éco-

nomie relaie jusqu’à vous les initiatives des entreprises les plus inno-

vantes et les projets qui nous font évoluer plus vite vers une économie

circulaire.

Certaines entreprises pensent dès la phase de design l’ensemble du cycle

de vie de leurs produits, jusqu’au recyclage. Des villes mettent en place

des parcs industriels où les déchets d’une entreprise deviennent la ma-

tière première d’une autre. Des gouvernements bannissent les sacs plas-

tiques et expérimentent une fiscalité récompensant la réparation. Des

consommateurs louent leurs jeans au lieu de les acheter. Et des fermiers

urbains font jaillir la verdure de bouteilles en plastique, au Cameroun.

L’économie circulaire s’attaque aux problèmes à la racine en réduisant

notre dépendance aux produits finis. Elle oriente nos économies vers des

cercles vertueux en concevant des produits qui excluent tout déchet tout

en restaurant notre capital industriel, humain, social, naturel et financier.

Cette nouvelle économie représente aussi une magnifique opportunité de

protéger l’environnement tout en créant des emplois et de la richesse –

rien qu’en Europe, potentiellement 1,8 billion d’euros d’ici à 2030.

Bien que l‘économie circulaire s’empare de problèmes complexes, la so-

lution n’est ni simple, ni standard. Il s’agit plutôt d’un effort collaboratif

et chacun – citoyen, entreprise, ville, pays – a un rôle à jouer.

Pour cette troisième édition de Solutions&Co, dont l’entreprise à voca-

tion sociale Sparknews est le fer de lance, nos lecteurs en Chine, au Bré-

sil, en Afrique du Sud, en Inde, en France, en Allemagne, au Royaume-Uni

et ailleurs découvriront une variété d’initiatives qui accélèrent la transi-

tion mondiale vers l’économie circulaire. En partageant ces récits, notre

réseau de médias fait connaître des solutions innovantes aux problèmes

climatiques, proches et lointaines.

Les entreprises mises en lumière dans nos éditions précédentes ont bé-

néficié en retour de nouvelles opportunités. Certaines ont noué des par-

tenariats avec de grandes organisations ou entreprises. Des projets ont

également inspiré Total, partenaire fondateur de Solutions&Co, à re-

chercher de solutions circulaires pour une transition énergétique durable.

Pour aller plus loin, nous avons créé un e-book rassemblant les points de

vue de figures de proue de l’économie circulaire tels que William McDo-

nough, Claire Pinet et Jean-Marc Boursier. Téléchargez-le sur www.so-

lutionsandco.org ouwww.quotidieneconomie.com et découvrez des

dizaines d’entreprises innovantes, ainsi que les perspectives d’experts et

de dirigeants travaillant déjà selon les principes de l’économie solidaire.

de Christian de Boisredon

L’agriculture urbainegerme sur les bouteillesplastiques usées

Cameroun

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spÉc ial cop232le Quotidien de l’economie spÉcial

vendredi 27 octobre 2017

Yaoundé : un projet d’agriculture urbaine germe surles bouteilles plastiques uséesCameroun// Portée par l’association Jeunesse et développement durable pour l’Afrique (J2D_Afrique), la promotion d’une agriculture bio en milieu urbain est une réponse à la rareté des terres dans plusieurs villes du pays.

Pierre Nka, Le Quotidien de l’économie

ÀYaoundé, la capi-tale politique duCameroun, à cha-cune des averses,

des bouteilles plastiquesflottent sur les eaux duMfoundi, la rivière qui ser-pente cette ville adminis-trative. La situation esttelle que, de ville rivière àl’origine, Yaoundé avec ses3 millions d’habitants s’ap-parente désormais en sai-son de pluie à une villepoubelle. Un cliché quel’association J2D_Afriqueentend effacer à traversson projet de promotionde l’agriculture urbaine.Jean François Kondzou, lecoordonnateur national decette association a choiside donner une seconde vieaux bouteilles plastiquesusées. « Ce que l’hommeordinaire appelle déchetest désormais perçucomme le point de départd’une nouvelle richesse »lance Jean-François Kond-zou au cours d’une forma-tion pratique organisée le8 septembre 2017 au quar-tier Biyem-Assi dans le sep-tième arrondissement deYaoundé.Parmi les participants, setrouve Adrienne Tchapmi,médecin généraliste. Ellerêve déjà d’un potager àdomicile. « De mère agro-nome, je compte produiremes légumes et mes fruitsbio et participer à la sécu-rité alimentaire et à la pro-tection de l’environnement», souffle ce médecin fraî-chement sortie de la fa-culté de médecine del’université de Yaoundé I.Devant la vingtaine de par-ticipants, AdrienneTchapmi pousse une nou-velle source de motivation« l’agriculture urbaine estune forme de décorationnaturelle de notre cadre devie ». C’est aussi là, l’undes objectifs recherchéspar le promoteur deJ2D_Afrique.

L’agriculture urbaine améliore les rendements

Face à la rareté des terresen milieu urbain, l’agricul-ture urbaine à partir debouteilles plastiques usées

se présente comme une al-ternative à Yaoundé, uneville sous pression démo-graphique. « C’est en villeque les jeunes sont à la re-cherche du travail. Il de-vient urgent de construireet la pression est telle quele milieu périurbain finitpar disparaître » expliqueJean – François Kondzou.Et son hypothèse est claire: « lorsqu’on parle d’urba-nisation, on parle de mai-sons. Qui dit maisons, ditbéton et qui dit béton nerime pas avec agriculture». Et naturellement, avecle bétonnage des surfacesjadis cultivables, les be-soins alimentaires demeu-

rent. À J2D_Afrique, la so-lution repose donc sur laproduction de légumesdans des kits de bouteillesplastiques et de sacs de rizusés. Pour produire lesubstrat nécessaire à cetteagriculture urbaine, laterre est achetée dans lapériphérie de Yaoundé àraison de 1 000 FCFA,l’équivalent de 1,54 europour un sac de 50 Kg.Sous forme d’échelle, les bouteilles plastiquessont reliées par des cordeset accrochées au mur deshabitations. Quant auxsacs potagers d’environ 50Kg, ils sont déposés dansun coin externe du domi-

cile. Ce dernier équipe-ment de culture présenteun avantage compétitif.Alors que sur une surfacehorizontale un plant degrande morelle occupe 1m², 24 plants peuvent êtredisposés aux abords d’unsac potager de 80 à 90 cméquivalents à 1 m².

Sécurité alimentaire et respect de

l’environnement

Au-delà de ces rendementsélevés, c’est davantagevers la lutte contre leschangements climatiquesque converge la promotionde l’agriculture urbaine au

sein des ménages. Il s’agitdes derniers utilisateursdes bouteilles sorties desentreprises brassicoles ouprovenant des produits im-portés. Face à l’incapacitéde l’Etat du Cameroun àfaire respecter l’arrêtéconjoint du Ministère del’Environnement et decelui du Commerce de2012, et entrée en vigueuren 2014, interdisant lacommercialisation ou l’im-portation des bouteillesplastiques à faible densité,J2D_Afrique compte sur lesménages pour assainirl’environnement.«Le développement dura-ble ce n’est pas seulementune affaire de machine etd’équipements. C’est uneaffaire d’homme » ex-plique Jean François Kond-zou. Dans sa stratégieitinérante de promotion del’agriculture urbaine dansles orphelinats et plusieurscentres d’accueil de jeunesen souffrance, J2D_Afriqueprêche « l’agriculture ur-baine pour la satisfactiondes besoins physiologiquescar, en produisant ses pro-pres légumes dans desbouteilles plastiquesusées, les ménages et lesjeunes garantissent leursécurité alimentaire etprotègent l’environnement».La présence de Serge Bit-jah ingénieur agronomeparmi les participants à laformation en agricultureurbaine n’est donc pas sur-prenante. Recruté au pro-jet d’appui à la lutteantifongique dans la filièrecacao café du ministère del’Agriculture, il y voit dés-ormais une possible recon-version. Après avoir étéflatté par le côté esthé-tique de l’agriculture ur-baine, et la limitation del’utilisation des pesticides,Serge Bitjah soutient «qu’il est possible d’envisa-ger une agriculture urbainerelativement extensivepour la commercialisation,tout en assurant laconsommation du ménageet sous le regard des en-fants, principaux bénéfi-ciaires des techniques dedéveloppement durable ».

Des jeunes s'initient a l'agriculture urbaine a partirdes bouteilles plastiques usees

plants peuvent

être disposés

aux abords d’un

sac potager de

80 à 90 cm

équivalents

à 1 m².

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3spÉc ial cop23le Quotidien de l’economie spÉcial

vendredi 27 octobre 2017

Zenata, une des premières éco-cités africainesMaroc//D’une superficie de 1.830 hectares, l’éco-cité est conçue selon une philosophie ambitieuse: faire des contraintes de son terri-toire des opportunités. Elle intègre d'une manière durable trois piliers fondamentaux: l’environnemental, le social et l’économique.

Aziza El Effas, L'Economiste

L’année 2018 seracelle des réalisationsconcrètes pour l’Eco-cité de Zenata à Casa-

blanca, capitaleéconomique du Maroc. Leprojet commence à sortirde terre après une décen-nie de gestation. A ce jour,3 milliards de DH (environ280 millions d'euros) sontdéjà injectés dans les infra-structures (voiries, gira-toires, échangeur…). Aprèslibération du foncier, untravail de fond sur ces in-frastructures est en coursafin de désenclaver le site.Un processus qui prendrabientôt fin. Prochaineétape : la livraison du 1erquartier résidentiel auxpromoteurs immobiliers fin2017. «Ce qui est impor-tant dans un pôle urbain,ce ne sont pas les construc-tions, mais le travail sur lesinfrastructures», déclareAbdellatif Zaghnoun, DG dugroupe CDG qui porte ceprojet, via sa filiale Sociétéd’Aménagement de Zenata(SAZ). Aujourd'hui, Zenataest considérée comme unedes premières éco-citésafricaines. Elle est aussil’une des dernières ré-serves stratégiques d’am-pleur pouvant résorber lesdéséquilibres socio-écono-miques entre l’Est et

l’Ouest de la région duGrand Casablanca. Si leprocessus d’expropriationet de recasement des habi-tants de la zone a pris desannées (depuis 2006, datede la déclaration du sited’utilité publique), les tra-vaux semblent enfin pren-dre leur rythme decroisière.

Eviter le scénario de « cité dortoir »

La longue phase d’assainis-sement du territoire a étémise à profit pour peaufi-ner le concept. Une planifi-cation minutieuses’imposait avant de passerà la phase d’exécutiond’une ville dynamique pouréviter le scénario de «citédortoir». D’autant plus quele taux d’échec des villesnouvelles est de 75% dansle monde.Mais la tâche n’est pas desplus aisée. Il s’agit deconstruire une ville intelli-gente en termes de mobi-lité, d’accès aux soins,d’équité sociale, d’exploi-tation de l’espace public,de sécurité, de gestion desréseaux et de traitementdes déchets.D’une superficie de 1.830hectares, l’Eco-cité bénéfi-cie d’une situation géogra-

phique exceptionnelle, àmi-chemin entre Rabat etCasablanca, les capitalesadministrative et écono-mique du Maroc. En plusd’être au croisement desprincipales infrastructuresdu pays - routières, ferro-viaires, logistiques, aé-riennes- ce qui lui garantitune interconnectivité terri-toriale optimale, le sitepossède une double expo-sition, à la fois sur la côteet l’intérieur des terres: ils’étire sur 5,3 km le long dela façade Atlantique et 3,5km de la mer à l’autorouteCasablanca-Rabat.

Mixité sociale et spatiale

L’Eco-Cité Zenata a étéconçue sur la base des 3 pi-liers fondamentaux de dé-veloppement durable:l’environnemental, le so-cial et l’économique (voiraussi encadré). A traversune mixité sociale et spa-tiale, le projet a pour ambi-tion de créer une nouvellecentralité urbaine en me-sure de répondre aux en-jeux liés à l’émergence dela classe moyenne, notam-ment via le développementde services à forte valeur

ajoutée. Le développementde Zenata comprendratrois activités de services,constituées en pôles deproductivité. Le premierest celui de l’éducation. Lepôle santé comprendra,quant à lui, une unité desoins privée avec un bou-quet de spécialités à fortpotentiel. Le 3e pôle, com-mercial, se positionnecomme une véritable desti-nation de commerce et deloisir familial. La 1èrephase de ce projet a étéouverte au public en mars2016 comprenant le maga-sin Ikea.

■ Gestion des élémentsnaturels (air et eau)Le sens des vents est étudiépour permettre la ventila-tion naturelle de la ville. Cequi permettra une réduc-tion de la température de 2à 3 degrés en été et une ré-gulation de l’humidité enhiver. Les eaux de pluies,collectées et acheminéesvers des bassins de réten-tion, serviront pour l’irri-gation des espaces verts.

■ AltermobilitéDeux types de mobilitésont prévus: collective et

douce. Ainsi, une gare mul-timodale offrira l’accès àdifférents modes de trans-port (RER, tram, bus). Demême, des parcours cycla-bles de 12 km sont prévus(pour cyclistes et piétons),avec les principaux équipe-ments de proximité acces-sibles à 10 mn en vélo.

■ Ville verte et ouverteZenata sera la seule villemarocaine qui dépassera leratio d’espaces verts parhabitant préconisé parl’OMS (soit 10 m2/habi-tant). En effet, avec ses 470

hectares d’espaces verts (letiers de la superficie glo-bale), ce ratio pourrait dé-passer les 15 m2/habitant.Un corridor écologique (ouaxe métropolitain) formeraune sorte de «colonne ver-tébrale» de la ville, autourde laquelle se structure la1re zone de développe-ment (40 hectares). Cet axesera animé par des équipe-ments culturels, sportifs,de loisirs, un parc (150 hec-tares) qui débouchera surle littoral, avec une prome-nade de 5 km (hôtels, res-taurants…).

Aménagement urbain novateur

L’Eco-Cité Zenata

a été conçue

sur la base des

3 piliers

fondamentaux

de développe-

ment durable:

l’environnemen-

tal, le social et

l’économique

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spÉc ial cop234le Quotidien de l’economie spÉcial

vendredi 27 octobre 2017

miser sur le Blue Crude

Par Franz Hubik, Dresde

Pour donner davan-tage de poids à sesarguments, NilsAldag, 31 ans, se

plaît à utiliser des mar-queurs de couleur. Unaprès-midi récent, le jeunechef d’entreprise s’est ap-proché d’un tableau blancpour y dessiner un dia-gramme aux barres noires,rouges et vertes. Chacunereprésentait une sourced’énergie. Sous la pluslongue barre, il a inscrit lemot « pétrole » en lettresmajuscules, puis le mot «gaz », sous la seconde, etenfin, « électricité », sous laplus courte. « Le mondedans lequel nous vivonstourne grâce aux combusti-bles fossiles », explique-t-ilalors. « L’intégralité denotre infrastructure dé-pend du pétrole et du gaz.»Aujourd’hui, en Allemagne,les énergies solaire, éo-lienne et hydraulique four-nissent plus d’un tiers detoute l’électricité. Mais lesénergies renouvelablescomptent pour moins de 14% de l’énergie utilisée parles secteurs du chauffage,de la chimie et des trans-ports. « Tous les produitsconçus à partir de ces car-burants ne peuvent pasêtre fabriqués avec del’énergie verte », poursuitle trentenaire. « Certainsarticles de la vie de tous lesjours – des chaussures desport aux produits debeauté n’existeraient passans pétrole brut. ». Résul-tat : le pétrole et le gaz re-présentent toujours plus de60 % de la consommationd’énergie.Nils Aldag possède une so-lution : Blue Crude, un car-burant de substitutionneutre pour le climat. Ce «fluide miraculeux » artificielpermet de fabriquer desmilliers de produits d’habi-tude conçus à base de pé-trole. Dans l’usine deSunfire, au sud de Dresde,cette alchimie aux accentsfuturistes sonne déjàcomme une réalité. Crééeen 2010 par Nils Aldag etses associés − Carl Bernin-ghausen et Christian vonOlshausen −, l’entrepriseréunit près de cent collabo-rateurs et se spécialise dansl’électrolyse et la technolo-gie des piles à combustible.

À ce jour, Sunfire a produittrois tonnes de Blue Crude.Son processus brevetéconsiste à tirer le meilleurparti de l’énergie vertepour fabriquer des molé-cules d’hydrocarbone.Comment ? L’énergie éo-lienne ou solaire alimentedes électrolyseurs qui utili-sent les hautes pressionspour séparer l’hydrogène etl’oxygène contenus dans lavapeur d’eau. Puis onajoute du dioxyde de car-bone à l’hydrogène vert,que l’on réduit en mo-noxyde de carbone. À la findu processus, on obtient duBlue Crude. Les raffineriespourront l’utiliser pourcréer des cires, des lubri-fiants ou du carburant au-tomobile ou aéronautique.Les carburants de synthèsese distinguent de leurséquivalents naturels parleur couleur « cristalline aulieu de noir de jais », décritNils Aldag. Ils ne contien-nent ni soufre, ni autres im-puretés ; lorsqu’ils sontbrûlés, ils dégagent del’oxyde d’azote, « simple àéliminer par filtrage »,selon le chef d’entreprise.

Le principal atout de cesubstitut du pétrole est sacapacité à s’intégrer parfai-tement aux infrastructuresexistantes – des raffineriesaux dépôts d’essence enpassant par les moteurs àcombustion.Blue Crude a reçu un ac-cueil favorable de la part dusecteur industriel. Leconstructeur automobilebavarois Audi et le principalconstructeur aéronautiqueau monde, Boeing, sontpartenaires du projet. Lacompagnie pétrolière Total,l’entreprise du secteur del’énergie tchèque ČEZ et lefonds d’investissementElectranova Capital figurentparmi les investisseurs depoids ; le géant de l’assu-rance Allianz et le construc-teur automobile PSAsoutiennent égalementSunfire.Or, le modèle économiquede l’entreprise pose un pro-blème de taille : le pétroleet le gaz sont si bon marchéque le Blue Crude ne pré-sente actuellement aucunintérêt au plan financier. «Dans le cas des combusti-bles fossiles, la nature a

œuvré seule durant desmilliers d’années. Recréerce processus de manière ar-tificielle a un coût », dé-clare Michael Starner,spécialiste des sources etdes réseaux d’énergie àl’université technique deRatisbonne. « Le pétrole etle gaz resteront plus abor-dables que le Blue Crudejusqu’à ce que le prix dudioxyde de carbone dé-passe largement 100 eurospar tonne. » À ce jour, lesindustries européennesdoivent reverser moins de 7euros pour chaque tonnede dioxyde de carboneémise.Nils Aldag a demandé auxpouvoirs publics d’interve-nir. S’ils décident de décar-boner l’ensemble del’économie, les secteurs del’industrie chimique et destransports à usage indus-triel auront besoin de car-burant synthétique, làmême où l’énergie verte etles piles se heurtent sou-vent à leurs limites phy-siques.D’autres problématiques decoût entrent également enjeu. À l’instar des panneaux

photovoltaïques il y a 20ans, le prix des électroly-seurs devra baisser drasti-quement pour assurer lacompétitivité du BlueCrude. De plus, à l’heure ac-tuelle, Sunfire n’automatiseaucune des étapes de soncycle de production ; toutest réalisé à la main. « Avecune production industrielle,nous pourrions réaliserd’énormes économiesd’échelle », plaide NilsAldag. C’est la directionqu’envisage de prendreSunfire avec ses partenairesnorvégiens : d’ici 2020, l’en-treprise entend produire 8000 tonnes de Blue Crudechaque année au sein d’unéquipement de grande am-pleur.Avec ses projets expéri-mentaux, Sunfire réalise au-jourd’hui un chiffred’affaires de plus de 10 mil-lions d’euros chaque année.À long terme, Nils Aldag es-père amasser des milliards.Son objectif ? « Faire deSunfire le Linde ou l’Air Li-quide de demain », affirme-t-il. « Mais tributaire desénergies renouvelables. »http://www.sunfire.de/en/

Allemagne//En Allemagne, les ingénieurs de Sunfire ont créé un carburant neutre pour le climat,substitut au pétrole brut. Prochain défi : la rentabilité.

Date à laquelle

l’entreprise

entend produire

8 000 tonnes de

Blue Crude

chaque année

au sein d’un

équipement de

grande ampleur.

2020

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5spÉc ial cop23le Quotidien de l’economie spÉcial

vendredi 27 octobre 2017

Lutte contre le gaspillage et les déchets : la vente envrac se démocratise

Agathe Mercante, Les Echos

Exit rayons surchar-gés de produits auxemballages colorés,aux tailles et aux

contenus délimités quis’étendent à l’infini dansles grandes-surfaces.Moins de déchets, moinsde gaspillage, (un peu)moins cher… L’achat envrac, qui régnait en maîtrejusque dans les années1960 et l’apparition despremiers supermarchés,amorce son grand retour.Ce système de distribu-tion, qui consiste à vendredes produits exemptsd’emballages et que leclient peut acheter aupoids connait ces der-nières années un regaind’intérêt en France. « Au-jourd’hui, le vrac repré-sente 1,5% des achats,mais en 2027, il pourraitprendre une part plus im-portante, de l’ordre de 6 à7% », estime Célia Ren-nesson, directrice de l’as-s o c i a t i o ninterprofessionnelle Ré-seau Vrac.Les consommateurs se

soucient désormais del’impact écologique desemballages et surtout dugaspillage. Selon uneétude du Commissariatgénéral au développe-ment durable, publiée enmars 2017, 47% des Fran-çais sont vigilants sur laquantité de déchets in-duite par leur mode deconsommation. Et ils sont97% à éviter de gaspiller.« Le vrac s’adresse àtoutes les catégoriessoc io -profess ionne l lessans limite d’âge. Il peutautant plaire aux CSP+ quisouhaitent manger mieuxqu’aux étudiants qui ontdes besoins alimentaireset un budget restreints »,détaille Célia Rennesson.Lancée en 2016, l’associa-tion compte 250 adhé-rents et représente tousles acteurs - porteurs deprojet, commerçants,fournisseurs - de la filièrede la vente en vrac enFrance et dans le monde.Pour l’heure, l’essentieldes adhérents à RéseauVrac se situe en France, en

Belgique, au Luxembourg,en Suisse et en Espagne.Initialement réservée auxporteurs de projets d’épi-ceries 100% vrac, propo-sant des produits frais(légumes, fruits, fro-mages, viandes) et secs(pâtes, riz, céréales), l’as-sociation s’est récemmentouverte aux commerçantsqui aménagent des es-paces de vente en vracaux côtés des produitsconditionnés. Elle dis-pense des formations auxporteurs de projets, de lacréation d’une épicerievrac à sa gestion, en pas-sant par une sensibilisa-tion aux normes d’hygièneen vigueur pour ce type deproduits.Mais si l’achat en vrac ré-duit considérablement lesdéchets et évite le gaspil-lage – les consommateursne choisissent-ils pasexactement la quantitéqu’il leur faut ? – il n’estpas pour autant synonymed’importantes d’écono-mies financières. Un kilode riz, acheté en vrac ou

conditionné coûtera à peuprès le même prix. Cer-tains produits peuventnéanmoins être jusqu’à40% moins chers lorsqu’ilssont achetés en vrac,comme les épices parexemple.La tendance du vrac s’ins-crit dans un mouvementplus vaste : celui du vivre-mieux. « Les consomma-teurs veulent manger localet de saison. Ils sont éga-lement plus attentifs à laqualité des aliments »,note la directrice de Ré-seau Vrac. Mais le modèleconnaît ses limites, à com-mencer par sa taille. «Pour l’instant, ce type decommerce est circonscrità de petits volumes, lesépiceries vrac excèdentrarement plus de 60m² »,estime-t-elle.Autre barrière – et detaille : tous les produits nesont pas accessibles à lavente en vrac. Il est au-jourd’hui impossible devendre des produits d’ap-pellation d’origine contrô-lée (AOC) ou d’origine

protégée (AOP). Un com-ble pour ces spécialitésculinaires françaises, es-tampillées locales, quitrouveraient facilementleur public auprès desacheteurs en vrac. Parcrainte du trafic decontrebande, l’huiled’olive n’est pas non pluséligible à ce type de vente.Les associations ne désar-ment pas pour autant. Ré-seau Vrac a récemmentdemandé à être reçue parle ministre de l’Agricul-ture, Stéphane Travert etparticipe activement auxétats généraux de l’ali-mentation, qui ont débutéen juillet 2017. Via uneconsultation publique parInternet et une séried’ateliers thématiquesjusqu'en novembre, ilspermettront une "mise àplat" générale des pra-tiques pour favoriser lamise en place d'unechaîne de production, dedistribution et de consom-mation qu’ils espèrentplus durable et plus équi-table.

France//La vente en vrac représente 1,5% des achats en France. L’associationRéseau Vrac accompagne et forme les entrepreneurs tentés par l’expérience.

Lancée en 2016,

l’association

compte 250

adhérents et

représente tous

les acteurs -

porteurs de

projet,

commerçants,

fournisseurs - de

la filière de la

vente en vrac

en France et

dans le monde.

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spÉc ial cop236le Quotidien de l’economie spÉcial

vendredi 27 octobre 2017

Que fait le PNUE pourpromouvoir la transitionvers une économie circu-laire ?Elisa Tonda : Nous avonstout d’abord des initia-tives, comme le Panel in-ternational desressources et la Life CycleInitiative, visant à déve-lopper les connaissancesscientifiques et à infor-mer sur l’économie circu-laire. Cela nous aide àcomprendre les opportu-nités, tendances et statis-tiques mondiales afin dediriger nos interventionsvers les problématiquesles plus pertinentes etsusceptibles de réussir.La consommation et laproduction durables sontl’un des objectifs de dé-veloppement durable[des Nations unies].Notre travail dans ce sensfournit une base solidepour accompagner latransition vers l’utilisa-tion efficace des res-sources et la circularité –un concept que nous ai-dons les gouvernementsintéressés à intégrer dansleur cadre réglementaire.Nous avons égalementune approche pragma-tique avec les entre-prises. Nous nousconcentrons sur les PMEdes pays émergents etdéveloppés qui souhai-tent participer à la transi-tion mondiale versl’économie circulaire etont besoin de conseils etde recommandationspour le faire.Nous continuons égale-ment notre action auprèsdu secteur financier, viala UN Environment Fi-nance Initiative (UNEP) etles acteurs – banques, so-

ciétés de gestion d’actifs,compagnies d’assurance– qu’elle regroupe, afind’introduire la circularitédans les instruments fi-nanciers.Enfin, nous promouvonsdes styles de vie plus du-rables auprès desconsommateurs. Gérer lecycle complet de la ma-tière implique que tout lemonde soit aligné et queles efforts portent sur lemême objectif, depuisnous, en tant qu’indivi-dus, jusqu’aux grandsconsommateurs que sontles gouvernements.

L’efficacité de l’écono-mie circulaire dépend-elle du contexte, ou lastratégie est-elle lamême partout ?ET : Les solutions pourinitier l’économie circu-laire varient selon lecontexte. Il serait difficiled’envisager des solutionsstandards qui s’adapte-raient à chaque situation.Certaines approches peu-vent inspirer tout un cha-cun : celles faisantévoluer la réflexion duproduit au service, ou àl’extension de la durée devie des produits. Maisdes solutions plus spéci-fiques doivent aussi êtreimaginées pour prendreen compte les points par-ticuliers d’une chaîne devaleur donnée, de lacomposition des produitsaux processus de fabrica-tion, en passant par lesinfrastructures existanteset les options de recy-clage.

Quels sont les exemplesde législations natio-nales particulièrement

réussies ?ET : Beaucoup de travailreste à faire en matièrede réglementation. Il estaujourd’hui difficiled’identifier le bon équili-bre entre les instrumentslégislatifs à mettre enplace pour une transitioncomplète vers l’économiecirculaire. En travaillantavec un certain nombrede pays, nous avons ce-pendant vu que certainesmesures permettent derenforcer un environne-ment favorable à l’intro-duction de la circularitédans le cadre réglemen-taire. Par exemple en ma-tière de gestion desdéchets ou de politiquesd’innovation.Une autre approche réus-sie est de collaborer avecles gouvernements entant qu’acheteurs, vialeurs politiques d’appro-visionnement. Pour vousdonner une idée de l’im-pact de cette approche,je citerais l’Afrique duSud, dont les achats re-présentent jusqu’à 29 %du PNB.

Les législateurs progres-sent-ils dans la bonne di-rection, et suffisammentvite ?ET : Pas encore. Lesbonnes initiatives sontnombreuses, mais il fauten effet accélérer. Notresystème et nos infra-structures sont construitsselon une logique li-néaire. C’est au niveaudes villes et des autoritéslocales que je vois leschoses avancer à unrythme plus soutenu. Desexemples intéressantsd’expériences ont étépartagés lors du World

Circular Economy Forum,qui s’est tenu à Helsinkien juin 2017. Plusieursvilles ont expliqué com-ment elles progressentvers plus de circularitédans la mobilité, laconstruction ou les infra-structures de gestion desdéchets.

Quels conseils donne-riez-vous aux cadres diri-geants ?ET : Le tout premierconseil serait d’être ou-vert à la collaboration etd’unir ses efforts avecd’autres entreprises, desclients et des régulateurs.Il est extrêmement diffi-cile d’arriver à circulari-ser l’économie si lesdifférentes parties pre-nantes ne sont pas ali-gnées et concentréesvers un même objectif.Je les invite également àprendre en compte toutela vie d’un produit, ettout le système qui se dé-ploie derrière. Parfois, lasolution au problème neréside pas à proximitéimmédiate, mais néces-site d’explorer au-delà,en travaillant avec lesfournisseurs et/ou lesclients, afin de concevoir

de nouvelles solutions.Enfin, ils devraient cher-cher les opportunités la-tentes dans les villes oùun environnement trèsdynamique se prête déjàà la circularité.

Comment faire en sorteque tout le monde sesente concerné ?ET : Le niveau individuelest très important. L’im-plication des individus vasouvent de pair avec uneévolution de l’état d’es-prit : la pratique «d’ache-ter vite, jeter vite » cèdele pas à une manière plusefficace d’utiliser les res-sources à notre disposi-tion. Des études surl’industrie de la mode etdu textile montrent àquelle vitesse nous aban-donnons ce que nousavons porté, et combiennotre habillement sous-utilise les ressources. Ils’agit donc de changer lesmentalités afin den’acheter que ce dontnous avons besoin et denous assurer, une foisque le produit ne peutplus être réparé, qued’autres feront bon usagede la matière qui le com-pose.

Monde//Elisa Tonda est responsable du Service production et consom-mation du Programme des Nations unies pour l'environnement(PNUE). Dans cet entretien, elle évoque les actions du programme enfaveur de l’économie circulaire et les défis qu’il reste à relever.

Pour réussir, l’économiecirculaire nécessite unobjectif commun

Elisa Tonda est responsable du Service production etconsommation du Programmedes Nations unies pour l'environnement (PNUE)

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7spÉc ial cop23le Quotidien de l’economie spÉcial

vendredi 27 octobre 2017

Yoko : une ancienne ville coloniale incarne l’ambition reDD+ du Cameroun

Pierre Nka, Le Quotidien de l’économie

Sans même couper lebois de sa forêt com-munale, la mairie deYoko est assurée de

recevoir des milliards deFCFA (des millions d’Euros)grâce à l’adoption d’un plande protection de 29 500hectares de forêt. La pra-tique peut surprendre dansun contexte où la coupe lé-gale et surtout illégale dubois prospère au Came-roun. Alors que les gru-miers se relaient sur laroute en mauvais état, lamairie de Yoko a décidé depréserver la forêt inscritedans son patrimoine depuisle 14 janvier 2011, suite àun décret du Premier minis-tre et conformément à l’ar-ticle 20 de la loi forestièrede 1994.En obtenant sa forêt com-munale, l’exécutif munici-pal de Yoko pensait d’abordpouvoir résoudre de ma-nière ponctuelle les difficul-tés financières pour ledéveloppement de la muni-cipalité. Mais l’’inventairemené par le cabinet d’ex-pertise Le Serbie se révéladécevant. Après diagnostic,« cette forêt qui était pour-tant sollicitée en vue del’exploitation du bois d’œu-vre était très pauvre en es-sences exploitables devaleur ». Comme un coupe-ret, cette conclusion venaitainsi mettre fin aux espoirsde développement fondéssur l’exploitation forestière.« C’était sans compter avecle contexte international dechangement climatique »explique Dieudonné Annir,le maire de la commune deYoko. En effet, c’est sousson orchestration que lapauvreté en essences ex-ploitables de la forêt com-munale aller devenir sourcede richesse. Car l’étude car-tographique montre que laforêt communale et sa péri-phérie sont en pleine re-constitution. Du pain bénipour le chef de l’exécutifcommunal informé sur lesproblématiques liées auchangement climatique, etau courant du fonctionne-ment du REDD+, conçupour aider les pays en voiede développement à dimi-

nuer leurs émissions liées àla déforestation à traversun système de compensa-tion.C’est ainsi, qu’au lieu d’uneexploitation sauvage, lamairie de Yoko opta pour laprotection de son couvertforestier. Soit 29 500 hec-tares avec une extensionsur un rayon de 10 km au-tour de la forêt communale,portant du même coup lasuperficie à protéger à 135000 hectares. Pour la pro-tection, l’exécutif commu-nal de Yoko a mis en placeun projet de conservationde la forêt communale.L’idée de projet sera par lasuite présentée au Pro-gramme nationale de déve-loppement participatif(PNDP). Et à la suite d’unconcours national ouvertpour l’implémentation duREDD+ au niveau commu-nal, l’idée du projet de Yokoa retenu l’attention dans lazone agro écologique desforêts denses à pluviomé-

trie bimodale qui couvrentles régions du Centre, duSud et de l’Est du Came-roun.

2 milliards à investir pour 5milliards FCFA de créditcarbone

En s’engageant à protégersa forêt communale par lamise en place de zonesd’activités agro-sylvo-pas-torales durables, l’initiativeentraînera des bénéficescarbones, des bénéfices di-rects non-carbones et d’au-tres externalitéssocio-environnementales,selon le maire de Yoko. Lesprojections des bénéficescarbones montrent notam-ment que la protection dela forêt communale per-mettra la séquestrationd’environ 1 400 000 tonnesde gaz carbone. Et, selon lesdonnées de référence deEcosystem Marketplace en2014, le prix moyen des Vo-luntary Carbon Unit (VCU)

issus des projets REDD+varie sur le marché de cré-dit carbone entre 3 et 7 dol-lars US la tonne. En negardant que le bas de lafourchette, soit 3 dollarsUS la tonne, pour prendreen compte la baisse du prixdu crédit carbone sur lemarché, la commune deYoko devrait tirer près de 4000 000 US$ (3,400, 000 €)au cours des 30 prochainesannées.Pour assurer la protectionde sa forêt communaleentre 2017 et 2047, la com-mune de Yoko a besoind’un investissement de 2000 000 000 FCFA (3 mil-lions €)soit 220 300 000FCFA (335,000€) pour lapremière année, informeDieudonné Annir, le mairede Yoko. Avec cet investis-sement, la protection de laforêt communale produira7 500 000 000 FCFA (11 mil-lion €), soit un résultat netde 5 600 000 000 FCFA (8,5millions €) sur 30 ans. Le

projet a déjà bénéficiéd’une garantie d’investisse-ment de l’Agence françaisede développement de 200000 000 FCFA (300,000€)tirés des fonds du Contratdésendettement dévelop-pement signé entre le Ca-meroun et la France en2006 dans le cadre de l’an-nulation de la dette bilaté-rale entre les deux pays.Avec cette garantie finan-cière, la commune de Yokoentend se positionner da-vantage comme une com-mune verte au Cameroun.Un projet de création d’uneforêt urbaine dans le nou-veau quartier administratifcommence d’ailleurs à sor-tir de terre. Il en est demême des éco quartierspour porter l’écodévelop-pement via le Projet REDD+.Comme Yoko, 12 autrescommunes camerounaisesse préparent à rentrer dansle marché carbone à traversdes projets de protectionsde leur forêt.

Cameroun// Zone tampon entre la partie méridionale verdoyante et la partie septentrionale sahélienne du pays, la commune de Yoko tient unprojet de protection d’une forêt estimée à 135 000 hectares. Sans abattre d’arbres, la commune pourra tirer des revenus stables sur le marché ducarbone à l’échelle internationale.

Le projet a

déjà bénéficié

d’une garantie

d’investissement

de l’Agence

française de

développement

de 200 000 000

FCFA (300,000€)

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spÉc ial cop238le Quotidien de l’economie spÉcial

vendredi 27 octobre 2017

Le recyclage des panneaux solaires, une opportunitééconomique sous-estimée ?Belgique//Gaëtan Masson est Directeur de l’Institut Becquerel, un centre de recherche et une société de consultants spécialisés dans le développe-ment du photovoltaïque. Il travaille également pour le programme Photovoltaic Power Systems de l’Agence Internationale de l’Energie (IEA -PVPS). Dans cette interview, il explique comment la filière du photovoltaïque s’inscrit dans une logique d’économie résolument circulaire grâce àla volonté des producteurs et à une régulation favorable.

Par Sparknews

Quelle est la quantité depanneaux solaires installésaujourd’hui dans le mondeet quelles sont les projec-tions pour les années àvenir ?Gaëtan Masson : Le marchédu photovoltaïque a ex-plosé au cours des dix der-nières années. Il a étémultiplié par un facteurcent et devrait continuer àse déployer. Au début desannées 2000, le photovol-taïque n’était qu’une petitecuriosité que l’Allemagne,les Pays-Bas, le Japon et lesEtats-Unis commençaient àexpérimenter. C’est au-jourd’hui l’énergie qui sedéveloppe le plus en Eu-rope après l’éolien. En2016, on comptait 76 GWde panneaux photovol-taïques installés dans lemonde, et on vise près de400 GW d’ici fin 2017.Comme la durée de vie despanneaux est de 20 à 25ans, nous commenceronsd’ici 10 ans à voir arriversur le marché des déchetsles premiers panneaux ins-tallés à partir de 2005. Quefaire de ces panneaux à lafin de leur durée de vie ?C’est une question quipréoccupe peu les autresproducteurs d’électricité,nucléaire en tête, maisc’est une véritable volontéde la part de l’industriephotovoltaïque. Depuisplus de dix ans, nous pré-parons le décommissionne-ment et le recyclage desinstallations photovol-taïques pour ne pas répéterles erreurs commises par lepassé et être, comme on ledit dans la filière, double-ment vert : vert au niveaude la production et au ni-veau de la gestion en fin devie, afin de ne pas laisseraux générations futuresdes centaines de milliers detonnes de panneaux so-laires non réutilisables etnon recyclables.

Ces déchets sont-ilstoxiques ?GM : 90% de la productionne pose pas de problèmesmajeurs en termes de toxi-

cité car la technologie ma-joritaire au niveau du pho-tovoltaïque est le siliciumcristallin. Un panneau clas-sique est donc composé deverre, d’aluminium, de sili-cium, de cuivre et de plas-tique. Pour les 10% restant,la moitié de la productionest faite à partir des com-posants plus toxiques,comme le tellurure de cad-mium, pour lesquels uneligne de recyclage spéci-fique sera nécessaire, maiscelle-ci a déjà été prévuepar les fabricants.

Quelles solutions émer-gent en amont et en avaldu cycle de vie ?GM : Au niveau européen,l’Union Européenne a dé-fini des règles extrême-ment strictes en termes degestion des déchets élec-troniques, y compris pourles panneaux photovol-taïques, avec des obliga-tions de reprise en fin de

vie, et de recyclage. L’asso-ciation PV Cycle a notam-ment préparé un systèmede recyclage prêt à accueil-lir les futurs panneaux enfin de vie. Les volumes sontencore trop faibles pourque l'industrie du recyclageprenne réellement sonenvol, mais tout est prévu.Le recyclage est un enjeuextrêmement importantcar il permet également derécupérer les matières pre-mières existantes. Prenezl’exemple de la technologiedite de couche mince CIGS :elle utilise du cuivre, del’indium, du gallium et dusélénium. L’indium est unematière extrêmement rareutilisée dans les écransplats et dans certainestechnologies de panneauxsolaires. Il sera crucial depouvoir recycler les vieuxpanneaux le plus rapide-ment possible pour récupé-rer cette ressource quipermettra de continuer à

en produire. Le recyclage adonc un but économiquemais également un objectifindustriel pour limiter l’uti-lisation des ressources pri-maires.

Dans le rapport IRENA -IEA PVPS[1], vous estimezque la valorisation despanneaux solaires en finde vie représentera 450millions de dollars d'ici à2030 et 15 milliards de dol-lars d'ici à 2050. Commentavez-vous obtenu ces chif-fres ?GM : Ces chiffres dépen-dent du développement dumarché en 2030 et en2050, mais les scénariosutilisés sont relativementconservateurs, j’aurais ten-dance à considérer que les15 milliards sont plutôtdans la fourchette basse.

Quelles recommandationsauriez-vous pour les entre-prises et les décideurs po-

litiques ?GM : Premièrement, la ré-glementation actuelle del’Union Européenne mesemble quasiment parfaite,ne la rendons pas plus com-pliquée. Il faudra certesfaire extrêmement atten-tion à ce que les législa-tions nationales assurentque les montants thésauri-sés pendant la durée de viede panneaux soient bienmobilisés pour le décom-missionnement et le recy-clage, mais il ne faut pastuer le développement dumarché aujourd'hui avecun excès de prudence quipourrait avoir un impactnégatif sur le coût des pan-neaux photovoltaïques.Deuxièmement, préparonsdes plans stratégiques quiprennent en considérationle fait que le véritable dé-veloppement des panneauxphotovoltaïques devraitavoir lieu au début des an-nées 2020.

Depuis plus de

dix ans, nous

préparons le

décommission-

nement et le

recyclage des

installations

photovoltaïques

pour ne pas

répéter les

erreurs

commises par le

passé et être,

comme on le dit

dans la filière,

doublement

vert : vert au

niveau de la

production et

au niveau de la

gestion en fin

de vie.

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9spÉc ial cop23le Quotidien de l’economie spÉcial

vendredi 27 octobre 2017

anguille sous roche dans un potager berlinoisAllemagne//Au cœur de Berlin, une startup élève des poissons et utilise leurs déchets pour fertiliser ses légumes. Dans les supermarchés du futur,les légumes et les poissons pourraient même provenir directement du lieu de vente.

Par Katrin Terpitz (Handelsblatt), Berlin

Une odeur de basilicfrais parcourt lesrues de Berlin. Sui-vez-la, et vous arri-

verez à ce qui est peut-êtrela plus grande ferme pota-gère et piscicole d’Europe.La vaste serre, construite surle site d’une ancienne mal-terie, abrite des milliers depots de basilic et 13 bassinsremplis de perches. Une foisqu’ils ont atteint la taille né-cessaire, au bout de septmois, les poissons sont ven-dus aux supermarchés lo-caux. « Il n’y a pas de basilicou de poisson plus frais àBerlin », déclare NicolasLeschke, cofondateur d’Eco-friendly Farmsystems (ECF).Ouvert en 2014, ECF se basesur la méthode de l'aquapo-nie pour cultiver des végé-taux de pair avec l'élevagede poissons. La ferme, quis’étend sur 1 800 m², utilisel’eau de pluie collectée surses toits. L’eau s’écoule dansles bassins et les déchets so-lides filtrés sont récupérés.L’urine de poisson se com-pose principalement d’am-moniaque, que desmicroorganismes convertis-sent en nitrates. « Commec’est un fertilisant efficacepour les plantes, nous utili-sons l’eau des bassins dansnos serres », explique Nico-las Leschke. « Cela nous per-met d’économiser € 20 000par an sur la facture d’eau,et le basilic n’a pas besoind’autre engrais ». Ces agri-culteurs citadins se passentpar ailleurs de pesticides,comptant sur des insectesutiles pour protéger leursplantes contre les parasites.Cultiver des plantes en sym-biose avec l’élevage despoissons en milieu urbaindate au moins du temps desAztèques. Au 14e siècle, cesderniers cultivaient du maïs,des tomates et des haricotssur des îlots, ou chinampas,construits sur la rivière tra-versant la mégapole mexi-caine de Tenochtitlan.Aujourd’hui, les océans sontbien souvent victimes de lasurpêche et pollués, et la po-pulation mondiale s’accroîtde manière spectaculaire.Des experts comme CarstenSchulz, professeur d’aqua-culture maritime à l’Univer-sité de Kiel, sont convaincusque répondre à la demandecroissante de poissons né-

cessitera de recourir davan-tage à des techniquesd’aquaculture.L’aquaculture n’est pasexempte de critiques, maisCarsten Schulz et d’autrespartisans de la méthodepensent que ces objectionssont sans fondement, souli-gnant que les poissons éle-vés ainsi sont moins soumisau stress que ceux élevésdans la nature. « Nos pois-sons sont en bonne santé etn’ont pas besoin d’antibio-tiques », ajoute NicolasLeschke.Sa ferme berlinoise peutproduire jusqu’à 30 tonnesde perches par an, soit suffi-samment pour fournir enpoisson 2 000 citadins sur unan. Outre le basilic, ECF a ex-périmenté la culture d’au-tres légumes : concombres,aubergines, poivrons, choux,melons et tomates.Nicolas Leschke et son par-tenaire Christian Echter-nacht sont autodidactesdans ce domaine. Ils tien-nent leur expertise de scien-tifiques et de leurs septemployés. Christian Echter-nacht est un entrepreneur

du web, tandis que NicolasLeschke a étudié la gestioninternationale des affaires àLondres avant de lancer desstartups en Italie et en Inde.Avec ses fermes aquapo-niques écologiques, le duoespère contribuer à faire dela terre un meilleur endroit.Les consommateurs voientvite les avantages. « La cul-ture locale élimine les coûtsde transport et la chaîne dufroid », dit un représentantde Rewe. Cette chaîne de su-permarchés offre du « basi-lic de ville » dans 340magasins berlinois depuismars 2017. Les ventes sesont envolées. Son prix de €1,99 est à peine supérieur àcelui des autres pots, pluspetits, et sa tenue est pluslongue. Et comme il esttransporté sur de trèscourtes distances, il n’y a pasbesoin de plateaux d’irriga-tion en plastique.Dans la foulée de ce piloteréussi à Berlin, ECF prévoitd’ouvrir ailleurs de nouvellesfermes urbaines. L’entre-prise prévoit notamment deconstruire ce qui sera la plusgrande ferme aquaponique

d’Europe – 2 000 m²] - sur lesite historique d’Abattoir àBruxelles, en partenariatavec l’agence européenned’architectureNatural Late-ral Thinking Factory. « Les lé-gumes seront cultivés et lespoissons élevés sur le toit etvendus juste au-dessous,dans le marché couvert. Onne peut pas faire plus frais !», se réjouit Nicolas Leschke.L’architecte Steven Beckers,connu pour son design fidèleaux principes de l’économiecirculaire, est impliqué dansle projet.En attendant, ECF a construitune ferme en Suisse pour ungrossiste maraîcher. Laferme est chauffée par lachaleur qui s’échappe dusystème de climatisation. « Ilest particulièrement judi-cieux d’implanter desfermes aquaponiques àproximité d’usines ou desites industriels, qui déga-gent énormément d’énergie», souligne Nicolas Leschke.Christian Echternacht et luisont également en pleinenégociation sur des projetsen Albanie, au Kazakhstan etau Luxembourg.

Depuis sa création, ECF estsoutenue financièrementpar Investitionsbank BerlinBrandenburg (IBB) et un in-vestisseur privé. « Les cir-cuits courts et écologiquesoccupent une place de plusen plus importante dans laproduction alimentaire »,déclare Marco Zeller, IBB.Avec les autres co-investis-seurs, il est convaincu quel’aquaponie est passéed’une situation de niche àune vraie tendance, au po-tentiel considérable. ECFn’est en effet pas seul sur lemarché de l’aquaponie.Urban Farmers conçoit dessites similaires en Suisse, etEdenworks vient d’ouvrir àBrooklyn une ferme qui pro-duit à la fois des poissons etdes herbes aromatiques.ECF compte devenir renta-ble en 2017, avec un chiffred’affaires de € 2 millions.Selon Nicolas Leschke, cen’est que le début. « Bientôt,nous aurons des fermes ma-raîchères et piscicoles dansdes villes à travers toute l’Al-lemagne ».http://www.ecf-farmsys-

tems.com/

ECF compte

devenir rentable

en 2017, avec un

chiffre d’affaires

de € 2 millions.

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spÉc ial cop2310le Quotidien de l’economie spÉcial

vendredi 27 octobre 2017

La consommation chi-noise de ressources na-turelles semble a prioricatastrophique. Seconde

économie mondiale, souventconsidérée comme l’usine dumonde, la Chine accumule undéficit de ressources gigan-tesque et sa croissance rapidedepuis la fin du siècle dernier aété en grande partie propulséepar l’utilisation de charbon saleet de très mauvaise qualité. En2014, le pays a produit 3,2 mil-liards de tonnes de déchets in-dustriels solides. Seules 2milliards de tonnes ont été re-cyclées, compostées, inciné-rées ou revalorisées.Ces statistiques certes peu ré-jouissantes ont le mérited’avoir sonné comme un élec-trochoc pour la Chine. Ces dixdernières années, à l’échellemondiale, le pays a ouvert lavoie à l’élaboration de poli-tiques visant à limiter laconsommation de ressourceset à réduire la pollution atmo-sphérique. Il a ainsi jeté les fon-dations de circuits industrielscomplets et a converti les re-jets de certaines productionsen ressources pour d’autres,créant ainsi une « économiecirculaire ».Le 13e plan quinquennal de laChine s’inscrit également dans

cette démarche volontariste.Dans un discours prononcé àl’Assemblée nationale popu-laire le 5 mars 2016, le premierministre chinois Li Keqiang a af-firmé que le nouveau planfournirait un cadre pour lamise en œuvre d’un « dévelop-pement vert » compatible avecla croissance économique.Selon lui, « Réaliser la crois-sance verte signifie utilisermoins d’énergie et de res-sources, et découpler les prin-cipales émissions de polluantsde la croissance économiqueet de l’urbanisation ».En tant que signataire de l’Ac-cord de Paris sur le change-ment climatique, la Chine s’estengagée à ce que son plus hautniveau d’émissions de CO2 soitatteint au plus tard en 2030(pour ensuite baisser). Les me-sures actuelles s’avèrent pro-metteuses et le pays est envoie de dépasser ses objectifsclimatiques. Mais la Chine saitqu’elle ne doit pas s’arrêter là.En effet, elle a besoin d’unchangement radical de modèlede développement industrielalliant économies d’énergie etfaible niveau d’émissions decarbone. Les parcs éco-indus-triels qui fleurissent aux quatrecoins du territoire chinois sontconçus pour répondre à ce

défi.Ces zones industrielles rédui-sent la pollution de l’environ-nement et économisent lesressources en utilisant lessous-produits des autres en-treprises résidenteset en par-tageant les ressources. Lecélèbre parc éco-industriel deKalundborg au Danemark a étéle tout premier créé. Inauguréen 1959, il réunit neuf entre-prises privées et publiques.Pionnier de la « symbiose in-dustrielle » en 1972, il a cristal-lisé l’intérêt du monde entier.Pour les Chinois, l’évolution dece modèle représentait un réelpotentiel, dans un pays où leszones et les parcs industrielsréalisent 50 % de la productionindustrielle. Les opportunitésde collaboration et les réflexesde consommation circulaire ausein de ces parcs ont déjà en-traîné une baisse de l’utilisa-tion de ressources naturelles −la consommation chinoise decharbon a reculé de 6 % cetteannée.Le tentaculaire parc industrielde Suzhou, emblème d’un pro-jet bilatéral entre Singapour etla Chine constitue le fleuron deces parcs éco-industriels. Situéà 100 km au nord-ouest deShanghai, il a été créé en 1994,couvre 8 000 hectares (aux-

quels s’ajoutent 20 000 hapour de futurs agrandisse-ments) et abrite plus de 25 000entreprises.Comme les Danois un demi-siècle plus tôt, les entreprisesdu parc ont mis au point desméthodes innovantes pour uti-liser déchets et sous-produitsde certaines entreprisescomme matières premières,alimentant à moindres fraisune économie circulaire ultra-performante. Le modèle de Ka-lundborg fait pâle figure face àl’ampleur de ces dispositifs.À Suzhou, les exemples d’en-treprises qui revalorisent lesdéchets d’autres productionssont légion. On peut égale-ment citer le projet d’usine detraitement des boues du parcindustriel, inauguré en 2015. Ilmutualise une installationd’épuration des boues et deseaux usées et une centrale decogénération (adossées l’une àl’autre). Fort d’un investisse-ment de 216 millions de yuans(27 millions d’euros), le projetdoit durer cinq ans. Avec unequantité de déchets annuelleestimée à 108 000 tonnes deboues humides, il devrait ré-duire les émissions de CO2 de31 000 tonnes chaque année.

L’utilisation des résiduscomme source de carburantréduira la consommation to-tale de charbon de 17 000tonnes. L’incorporation des ré-sidus de cendres aux maté-riaux de construction prometd’éliminer 10 000 tonnes dedéchets solides produits par leparc.En dehors de ce gigantesqueprojet et de nombreux autres,le parc a connu son lot de défis.Au premier rang desquelsl’évolution des structures in-dustrielles, car les secteurs peuperformants, gourmands enmain-d’œuvre − comme celuide la fabrication de produitsélectriques − sont poussés horsdu parc par les secteurs deshautes technologies et des ser-vices, axés sur l’international –notamment les nanotechnolo-gies et les activités de servicesfinanciers. Les analystes affir-ment toutefois que le parc à lacapacité d’accueillir à la foisdes petites et des grandes en-treprises. S’il y échouait, lazone deviendrait inaccessibleaux entreprises locales et lecoût de la vie augmenterait demanière exponentielle.Malgré cela, le parc de Suzhouoffre un aperçu du futur au-quel la Chine aspire : un futurdans lequel le développementvert et l’économie circulaire fa-voriseront l’investissement,apportant aux produits chinoisun avantage concurrentiel surle marché international et unsérieux coup de main à laChine dans l’adoption d’uncomportement plus respec-tueux de l’environnement.

Une montagne defeuilles et de tiges decanne à sucre s’en-tasse derrière la su-

crerie Muhoroni au sud-ouestdu Kenya. En général, ces sous-produits de l’agriculture atter-rissent – avec ceux du café –,dans les sites d’enfouissementou servent d’engrais. Situédans le quartier de Westlandsà Nairobi, Lean Energy Solu-tions, fournisseur d’énergiesalternatives et société deconseil, a trouvé un nouvelusage aux déchets agricolesgénérés par la culture du sucreet du café. Elle les valorise sousla forme de briquettes com-bustibles baptisées « LeanBriqs », une alternative pluspropre et écologique aux

sources d’énergie riches encarbone, comme le gaz et legazole. La culture du sucre etdu café pèse dans l’économiekényane. L’an dernier, le paysa produit 620 000 tonnes desucre et 50 000 tonnes de café.Selon Dinesh Tembhekar, qui acréé l’entreprise en 2006, lesbûches sont également relati-vement bon marché. Elles fontbaisser les factures d’électri-cité des clients de jusqu’à 25 %.Le dirigeant souligne que l’en-treprise réalise la totalité de saproduction sur son site de Nai-robi. Elle supprime ainsi lescoûts de transport et la pollu-tion et fournit des emplois auxhabitants des environs. « Laproduction d’une tonne debûches engendre douze joursde travail pour un Kényan etréduit les émissions de CO2d’une tonne », explique-t-il.Pour fabriquer ses briquettescombustibles, Lean Energy So-

lutions associe déchets desucre de canne et de café àcertains sous-produits agri-coles – sciure de bois, cendresde houille et eau. Encore hu-mide, cette mixture organiquetraverse un immense séchoiréquipé d’un compresseur inté-gré. Le mélange final est en-suite tassé sous la forme debriques extrêmement com-pactes. Brûlées dans un fourou une chaudière, elles servi-ront à produire de l’électricité.Chaque jour, la société reçoit

80 tonnes de débris et fabriquequelque 40 tonnes de bri-quettes pour 14 entreprises,au Kenya et en Tanzanie – no-tamment Unilever, Coca-Cola,Pepsi et le fabricant de textilesSpinners & Spinners. La sociétéréalise également des auditsénergétiques pour le compted’autres entreprises, afin de lesaider à réduire les coûts et àadopter des combustibles

verts. Particulièrement actifsdans le secteur industriel, Di-nesh Tembhekar et son équipeont déjà mené de nombreuxprojets visant à accompagnerdes usines dans leur transitiond’une production à base decombustibles fossiles auxbri-quettes en résidus recyclés etégalement installé des sys-tèmes écologiques de chauf-fage pour piscine.Lean Energy Solutions compteaujourd’hui 15 collaborateurs,uniquement au Kenya, en ma-jorité des femmes. Cette petiteéquipe sert une cause bienplus vaste. Elle ne le sait pro-bablement pas, mais sa répu-tation a déjà fait le tour del’Afrique de l’Est. Lean EnergySolutions appartient à Lean So-lutions Group, aux côtés deLean Solutions Tanzania et deLean Solutions Nairobi. DineshTembhekar se trouve égale-ment à la tête de ce groupe de

conseil aux entreprisesconnusur tout le continent africain.La réussite de Lean Energy So-lutions n’est pas passée ina-perçue : la société anotamment ramené au Kenyale prix africain des « Bonnespratiques en matière de pré-servation du climat » et le prixKPMG des 100 meilleures pe-tites et moyennes entrepriseskényanes en 2013 et 2014 . Ellereste l’une des quelques raressociétés africaines en dehorsde l’Afrique du Sud à avoiradopté un modèle d’économiecirculaire ; qui consiste à recy-cler les ressources, pour maxi-miser leur durée de vie, en vuede générer un minium de dé-chet, voire de les éliminer to-talement.L’expérience des « Lean Briqs »révèle les vastes opportunitésde l’économie circulaire enAfrique. À l’échelle du conti-nent, une stratégie favorisant

une hausse du recyclage pour-rait doper la croissance écono-mique, tout en réduisant auminimum les déchets indus-triels et la pollution. Mettre enœuvre ce type de stratégieexige toutefois une initiativeconcertée et ambitieuse de lapart des dirigeants africains.Tournée vers l’avenir, LeanEnergy Solutions s’est récem-ment engagée dans le secteurde l’énergie solaire. Au milieude l’année 2017, l’entreprise amis sur le marché un kit solairepour particuliers et un systèmed’éclairage public photovol-taïque pour les communautéset les foyers kényans actuelle-ment privés d’électricité. Cettenouvelle gamme de produitsrencontrera-t-elle le mêmesuccès que les briquettes enrésidus recyclés de LeanEnergy Solutions ? Il est encoretrop tôt pour l’affirmer. Unechose est sûre, en revanche :cette entreprise kényane illus-tre avec brio les vastes oppor-tunités de l’économiecirculaire et des sourcesd’énergie renouvelables enAfrique.http://leansolutions.co.ke/

Par African Business

Solutions propresAfrican Pan//Une société africaine recycle les déchets issus des récoltes de canne à sucre et de café pour fabriquer ducombustible – esquissant les contours de l’économie circulaire si elle se diffusait sur ce vaste continent.

Par Dou Shicong

Chine//La Chine a misé sur la symbiose industrielle entre les entreprisesde ses parcs d’activité pour créer un futur plus propre.

L’union fait la force

En tant que

signataire de

l’Accord de

Paris sur le

changement

climatique, la

Chine s’est

engagée à ce

que son plus

haut niveau

d’émissions de

CO2 soit atteint

au plus tard

en 2030

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11spÉc ial cop23le Quotidien de l’economie spÉcial

vendredi 27 octobre 2017

D’excellents jus frais aux arômes de déchetsCanada//Le gaspillage alimentaire est un véritable fléau. Un désastre moral, bien sûr, et une calamité pour les entreprises agroalimentaires quiperdent de précieuses ressources, ne serait-ce que par le rejet d’aliments trop moches pour être vendus en commerce. Pourtant, certains déchetsdeviennent les ressources des autres, et deux entreprises québécoises ont flairé la bonne affaire. Même si elle dégage une drôle d’odeur.

Matthieu Charest, Les Affaires

Un tiers de la produc-tion alimentairemondiale est perdueou gaspillée chaque

année, selon l’Organisationdes Nations Unies pour l’ali-mentation et l’agriculture.Une part qui représentejusqu’à 1,3 milliard de tonnespar an. « Des pertes sontconstatées tout au long de lachaîne alimentaire et génè-rent un gaspillage des res-sources », explique l’agenceonusienne.Puisque les ressources sont li-mitées, et se raréfient dansplusieurs cas, il faut passerd’une économie « linéaire » àune économie « circulaire »,estiment les tenants de cenouveau paradigme. Bref, enlieu et place du simple calcul« produire, acheter, jeter, ré-péter », il faut passer à uneéquation où « l’utilisation desressources sont optimisées àtoutes les étapes du cycle devie d’un bien ou service ».C’est la définition, simplifiée,proposée par l’Institut de l’en-vironnement, du développe-ment durable et del’économie circulaire (EDDEC),situé à Montréal.Il ne s’agit pas de recyclage,

du moins pas seulement. Ils’agit de valoriser chaque res-source et de l’utiliser à sonplein potentiel. De fait, il yexiste dix stratégies qui com-posent l’économie circulaire,dont le réemploi. « Une mé-thode de production qui peutêtre très rentable, notam-ment dans le secteur agroali-mentaire », soutient LuceBeaulieu, coordonnatrice del’EDDEC.Et ça, deux entreprises quiproduisent des jus pressés àfroid l’ont compris. C’estsanté, c’est écologique, etsurtout, c’est un secteur pro-fitable qui connaît une crois-sance soutenue.

Des jus en missionFondée il y a un an, la start-upmontréalaise jus LOOP est dis-tribuée dans quelque 400points de vente au Québec.Leurs boissons sont offertesen six saveurs et se détaillent3,99 $CAD pièce. Chaque se-maine, quelque 6 000 bou-teilles sont vendues, estimel’entreprise, qui vient de rece-voir une subvention de 400000 $CAD du gouvernementquébécois.« Notre première mission

c’est de sauver les fruits et leslégumes, et de réduire le gas-pillage alimentaire, affirmeDavid Côté, le cofondateur.Nous voulons aussi démocra-tiser la santé. C’est bien sim-ple, nous faisons del’économie circulaire, ça nouscoûte moins cher à produire,et les consommateurs nousadoptent parce que nous ven-dons à bon prix ».C’est l’entreprise CourchesneLarose, un important distribu-teur de fruits et légumes, quiles fournit en aliments qui se-raient normalement enfouis,moyennant des frais, parcequ’invendus ou invendables.Le distributeur, partenaire à50 % dans la jeune pousse, n’apas intérêt à gonfler les prix.« Une caisse de pommes peutnous coûter 5 $CAD au lieu de45 $CAD », explique M. Côté.Enfin, les déchets de LOOP (lapulpe) sont offerts à uneautre start-up, Wilder & Har-rier, qui œuvre dans les gâte-ries pour chiens pour qu’elleles intègre dans ses recettes.Afin de maximiser leur pro-duction, une usine de 4 000pi2 (ce qui équivaut à 370 m2environ) sera ouverte juste àcôté de l’entrepôt de Cour-

chesne Larose, dès octobre2017, explique Julie Poitras-Saulnier, cofondatrice. Uneinitiative qui leur permettrade réduire le transport, doncles émissions de GES, de met-tre la main sur toutes les res-sources en voie d’êtrerejetées, et de propulser leurproduction, qui pourrait at-teindre près de 200 000 bou-teilles par semaines.« Il y a de l’art dans les dé-chets », conclut le cofonda-teur, David Côté. Avec unmillion de chiffre d’affairespour la première année, il yaussi des emplois et des pro-fits.

Au-delà du réemploiÀ la différence de LOOP, quiaxe sa mise en marché sur leréemploi, les jus DOSE misentsur le caractère « bio » deleurs produits. Fondée il y aquatre ans, l’entreprise es-time vendre quelque 10 000bouteilles par semaine à 5,99$CAD l’unité. La start-up metaussi en pratique plusieursstratégies de l’économie cir-culaire. « Des produits de“grade B”, du “moche”, çaexiste depuis toujours dansl’industrie alimentaire, ra-

conte Geneviève BrousseauProvencher, la cofondatrice.L’industrie de la transforma-tion ou de la restauration uti-lise déjà ces catégories-là.C’est ce que nous prenonsaussi, tant que le goût est à lahauteur ».Avec le coût des fruits et lé-gumes, « ce serait absurde deperdre quoi que ce soit,pense-t-elle. Par ailleurs,DOSE, comme LOOP, utiliseaussi un procédé fort intéres-sant, la pascalisation, afind’allonger la durée de vie deleurs produits. C’est un peucomme la pasteurisation,mais à froid. Au lieu de ne sur-vivre que pendant quelquesjours, les jus pressés à froid nepérissent pas avant deux moisenviron.Enfin, avec les restants de lapulpe des fruits et légumespressés, DOSE est en voie depréparer une recette de cra-quelins santé. Au final, « c’estle consommateur qui a un im-pact. S’il encourage les pro-duits locaux, il crée desemplois ici, réduit les émis-sions polluantes et le gaspil-lage alimentaire », conclutGeneviève Brousseau Proven-cher.

Fondée il y a

quatre ans,

l’entreprise

estime vendre

quelque 10 000

bouteilles par

semaine à

5,99 $CAD

l’unité.

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De l’avis général, leconsommateur maro-cain s’est fait à la pra-tique et dans les

campagnes, il suffit d’ouvrir lesyeux pour voir que le sac plas-tique ne contamine plus le pay-sage comme avant. Tout ytrouve son avantage. L’environ-nement bien sûr et même lescommerçants. « Avant l’inter-diction, témoigne un épicier,nous devions débourser entre1.000 et 1.500 DH (environ 140euros) par mois pour acheterdes sacs plastiques que nous nefaisions pas payer aux clients.Maintenant, avec les sachetsnouvelle génération, nousl’achetons à 50 centimesl’unité, revendu 1 DH. Donc enplus de l’intérêt pour l’environ-nement, financièrement c’estpour nous une bien meilleureaffaire ». Pourtant, certainss’obstinent à préférer le plas-tique et optent pour les filièresparallèles qui viennent les dé-marcher. « Je ne comprendspas certains confrères, expliqueHicham qui tient une épicerie àAgadir. Ces vendeurs de contre-

bande nous proposent des sacs2 fois plus chers aujourd’huiqu’avant la loi. Les habitudessont tenaces ». Alors si au dé-part, la campagne « zéro Mika» (nom en arabe désignant leplastique) a fait sourire, forceest de constater qu’elle résiste.La coalition entre les différentsministères ayant participé à laréussite d’une stratégie, qu’ilfaut tout de même surveillercomme le lait sur le feu.

« L'enjeu mérite notre volontécollective »Un peu plus d’un an aujourd’huique le « zéro Mika » sévit. Audépart, le sac biodégradable aété une première tentative…avortée. Puis moults réflexionsmenées par le gouvernementpour contenir cette pollution.Alors pour finir, le Maroc a tran-ché: son interdiction pure etsimple. Elle porte le doux nomde n°77-15 et est entrée en vi-gueur le 1er juillet 2016. Une loiqui, rappelons-le, vient inter-dire la fabrication, l’importa-tion, l’exportation, lacommercialisation et l’utilisa-

tion des sacs en plastique. Maispas tous les sacs, ceux decaisse. Les sacs industriel, agri-cole, de congélation ou surgéla-tion, isotherme, et ceux pour lacollecte des déchets étant ex-clus de cette mesure. Du côtédu ministère de l’Industrie, sil’intérêt de cette décision estadmise, voire comprise par descitoyens de plus en plus sensi-bilisés à l’environnement, la ré-pression a permis de maintenirla pression pour atteindre lesobjectifs. En effet, depuis l’ap-plication de la loi, plus de 450tonnes de sacs et une centainede machines de fabrication ontété saisies, et des dizaines depersonnes interpellées. Résul-tat: la production formelle esttotalement éradiquée,confirme le ministre de l'Indus-trie Moulay Hafid Elalamy.Selon lui, «c’est un projet natio-nal qui nous mobilise tous etdont l’enjeu mérite notre vo-lonté collective ».

Emergence de nouvelles activitésL'entrée en vigueur de la loi afavorisé l’émergence de nou-velles activités appelées à ré-pondre aux besoins croissants

du marché en solution alterna-tives. Les capacités de produc-tion annuelles de produits desubstitution sont estimées à 4,6milliards de sacs en papier, à100 millions de sacs tissés et120 millions de sacs non tissés.En matière d’accompagnementdes opérateurs impactés par laloi, le Département de l’Indus-trie a mis en place un fonds de200 millions de Dirhams (envi-ron 18 millions d'euros), dédiéau financement et à l'accompa-gnement à la reconversion. A cejour, 72 entreprises ont ré-pondu à l’appel à manifestationd’intérêt lancé en mai 2016 etsont éligibles pour bénéficier del’appui du fonds. 16 d’entreelles seulement ont déposéleurs dossiers d’investissementet bénéficient du soutien de

l’Etat. Ces entreprises em-ploient 475 personnes et crée-ront 509 nouveaux postes.Outre l’appui du fonds, l’ac-compagnement à la reconver-sion se fait aussi à travers unapport d’expertise pour établirdes programmes d’investisse-ment, la sensibilisation desbanques afin qu’elles accordentdes conditions préférentiellesen matière de taux et de garan-tie aux opérateurs et la sensibi-lisation de la CNSS (CaisseNationale de Sécurité Sociale)pour activer le processus d’in-demnisation chômage.

80.000 km nettoyésSur le terrain, le gros du travailde l’opération « zéro Mika » aaussi été de ramasser les sacsaccrochés aux arbres, et épar-

pillés dans la nature. Le minis-tère de l’Intérieur a mené uneopération de nettoyage sur plusde 80.000 km. Plus de 180.000hectares ont été nettoyés, deszones considérées comme despoints noirs où l’on ne voyaitplus le sol tant le plastique ré-gnait en maître. Plus de 7.000tonnes de déchets plastiquesont ainsi été ramassées, dont laquasi-totalité a été incinéréepar les cimenteries. Cette déci-sion nationale, encadrée et pi-lotée, donne donc de vraisrésultats. L’administrations’avouant déterminée à réussir.Et puis rappelons-le, le Marocétait l’un des pays les plusconsommateurs au monde desacs plastiques. Une place depodium perdue grâce à une vo-lonté partagée.

spÉc ial cop2312le Quotidien de l’economie spÉcial

vendredi 27 octobre 2017

Le maroc déterminé à y arriver, malgré toutMaroc//Un an après son lancement, l’opération « zéro Mika » (nom en arabe désignant le plastique) est considérée comme une réussite. Pour yarriver, sensibilisation, accompagnement des industriels, contrôles, amendes, fermetures...L’interdiction des sacs en plastique a ainsi introduit denouvelles habitudes de consommation. Cependant, si la production formelle est éradiquée, l’informel sévit toujours.

Stéphanie JACOB, L'Economiste

« Zéro mika »