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N° 33.099 Arrêts Nos 33.098 à 33.103 Page 2 Considérant que la demande de suspension ne satisfait pas à la condition susmentionnée et n'est pas recevable, ne fût-ce que pour ce seul motif; que la question de savoir si une demande de suspension de l'exécution de l'acte attaqué peut encore être jointe aux recours en annulation introduits avant l'entrée en vigueur de la loi du 16 juin 1989, est sans intérêt en l'espèce et ne doit dès lors pas être examinée, (Rejet de la demande de suspension de l'exécution de l'arrêté royal du 17 décembre 1981). 8 33.100 à 33.103 ARRETS du 3 octobre 1989 (VIe Chambre) 33.100 - DEMEULEMEESTER = 32.949, III + dépens à charge de la partie adverse. 33.101 - DE MOT: désistement. 33.102 - VANCALBERGH = 33.100. 33.103 - CLOETENS et REKOMS = 33.100 +désistement. RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

(VIe - KU Leuven · 33.103 - CLOETENS et REKOMS = n° 33.100 +désistement. RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989 . Arrêt N° 33.107 Page 1 N° 33.107 ARRET du 3octobre1989

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N° 33.099

Arrêts Nos 33.098 à 33.103

Page 2

Considérant que la demande de suspension ne satisfait pas à la condition susmentionnée et n'est pas recevable, ne fût-ce que pour ce seul motif; que la question de savoir si une demande de suspension de l'exécution de l'acte attaqué peut encore être jointe aux recours en annulation introduits avant l'entrée en vigueur de la loi du 16 juin 1989, est sans intérêt en l'espèce et ne doit dès lors pas être examinée,

(Rejet de la demande de suspension de l'exécution de l'arrêté royal du 17 décembre 1981).

N°8 33.100 à 33.103

ARRETS du 3 octobre 1989 (VIe Chambre)

33.100 - DEMEULEMEESTER = n° 32.949, III + dépens à charge de la partie adverse.

33.101 - DE MOT: désistement.

33.102 - VANCALBERGH = n° 33.100.

33.103 - CLOETENS et REKOMS = n° 33.100 +désistement.

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêt N° 33.107 Page 1

N° 33.107

ARRET du 3octobre1989 (IVe Chambre)

N° 33.107

MM. Baeteman, président de chambre, rapporteur, Borret et De Brabandere, conseillers, et De Wolf, auditeur.

S.A. ALGEMENE ONDERNEMINGEN E.G. VERSTRAETE EN V ANHECKE (Me Lecoutre) c/ Régie des bâtiments (~s Zanardi et Goovaerts) - Partie interve­nante: S.A. Gebroeders Vandekerck:hove

MARCHES DE TRA V AUX, DE FOURNITURES ET DE SERVICES - 1° Règles applicables à tous les modes de passation des marchés - Détermination et contrôle des prix - Concurrence; - 2° Marchés de gré à gré

Il résulte de l'article 17, § rr, de la loi du 14 juillet 1976 et de l'article 49, § 2, de l'arrêté royal du 22 avril 1977 qu'en cas d'adjudication de gré à gré du marché, l'autorité est obligée de faire appel à la concurrence.

Il ne peut être dérogé à cette règle que lorsqu'il n'est pas possible de consulter plu­sieurs entrepreneurs ou plusieurs fournisseurs. L'autorité doit en ce cas, lorsqu'il s'agit de marchés d'une valeur dépassant 1OO.000 frs, indiquer les raison de cette impossibilité, et ces raisons doivent être fournies au plus tard au moment de l'attribution du marché.

Il n 'est pas satisfait à cette obligation si ces raisons, telles qu'elles sont fournies, ne montrent pas que la partie défenderesse se trouvait dans l'impossibilité de consulter plusieurs entrepreneurs.

S'il était établi en l'espèce que les travaux devaient être effectués d'urgence, cette circonstance n'était pas de nature à empêcher de consulter également la requérante, dès lors que l'autorité savait que la partie intervenante et la requérante étaient les seuls entrepreneurs en Belgique qui possédaient l 'agréation requise et lorsqu'il ressort du dossier administratif que quatre mois avant de soumettre l'affaire au Conseil des ministres, le ministre des Travaux publics et la Régie des Bâtiments s'étaient occupés de l'attribution des travaux.

Vu la requête introduite le 8 février 1983, par laquelle l'Avocat Rudi Lecoutre, agissant au nom de la s.a. Algemene Ondememingen E.G. Verstraete et Vanhecke, demande l'annulation de la décision de date inconnue de la Régie des Bâtiments, attribuant de gré à gré les travaux de restauration de la cathédrale Saint-Michel à Bruxelles à las.a. Gebroeders Vandekerckhove;

Vu la requête en intervention du 16 mai 1984;

Vu l'ordonnance du 22 août 1984 admettant l'intervention de la S.A. Gebroeders Vandekerckhove;

1. Les éléments de la cause.

Considérant que l'on peut résumer comme suit les éléments de la cause:

1.1. Le 20 août 1982 le Ministre des Travaux publics informe le directeur-général de la Régie des bâtiments qu'il a décidé de confier, par convention de gré à gré, les travaux de restauration à la cathédrale Saint-Michel à Bruxelles à las.a. Gebroeders V andekerckhove. Il demande à la Régie de constituer un dossier et de la présenter pour approbation au plus tard le 15 septembre 1982.

1.2. Dans une note du 27 août 1982 adressée au Ministre des Travaux publics, l'inspecteur des finances écrit que la décision de confier à la s.a. Gebroeders Vandekerckhove les travaux de restauration, est entachée d'une violation de l'article 49, § 2, de l'arrêté royal du 22 avril 1977, et équivaut à avantager illégitimement un seul entrepreneur. Compte tenu également de l'importance des travaux (évalués dans leur ensemble à 2 milliards; la première phrase à 270 millions frs), on insiste pour que plusieurs entrepreneurs soient consultés.

1.3. Par lettres des 24 septembre, 28 octobre, 21 et 29 décembre 1982, la partie requérante demande au Ministre des Travaux publics d'être consultée et de pouvoir établir un prix pour les travaux de restauration. Elle signale à ce propos qu'elle est spécialisée dans de semblables travaux et qu'elle remplit toutes les conditions pour pouvoir mener à bonne fin ce marché.

1.4. Le 16 décembre 1982 le Ministre des Travaux publics a approuvé le cahier des charges n° 600/1. Dans ce cahier des charges sont reprises un certain nombre de dispositions administratives et techniques concernant la restauration de la cathédrale Saint-Michel à Bruxelles. On prévoit notamment que les travaux sont effectués pour compte de la Régie des Bâtiments.

1.5. Le 21 décembre 1982 l'Inspection des Finances émet un avis défavorable concernant la conclusion d'une convention de gré à gré avec la partie intervenante. Elle énonce qu'il n'est pas justifié de s'écarter des procédures

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêt N° 33.107

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légales habituelles, et qu'en vue des travaux de restauration prévus une adjudication restreinte ou un appel d'offre restreint constitue les procédures indiquées. Si la conclusion d'une convention de gré à gré est néanmoins décidée, il convient de signaler qu'en tout cas il y a lieu de se conformer à l'article 49, § 2, de l'arrêté royal du 22 avril 1977 et qu'il faut donc s'adresser à plusieurs entrepreneurs.

1.6. Dans une note du 28 décembre 1982 adressée au conseil des Ministres, le Ministre des Travaux publics propose de confier par acte de gré à gré à la partie intervenante les travaux de restauration à la cathédrale Saint­Michel.

La proposition de conclure une convention de gré à gré est justifiée au moyen d'une référence aux points suivants de la loi du 14 juillet 1976, article 17, § 2: «3") travaux et fournitures qui ne peuvent être confiés qu'à un entrepreneur unique; 4") travaux artistiques dont l'exécution ne peut être confiée qu'à des techniciens éprouvés; 5") travaux qui ne sont accomplis que comme recherche, étude, mise au point de développement; 6") l'urgence est inconciliable avec les délais prévus par d'autres procédures; 14") les prix sont soustraits au jeu normal de la concurrence».

Il est exposé par la suite que la s.a. Gebroeders Vandekerck:hove est, pour les raisons suivantes, le seul entrepreneur qui a été consulté: «1) étant donné l'urgence de restaurer la cathédrale; il y a lieu de noter à cette occasion que la cathédrale est pour l'instant fermée. Des manifestations nationales telles que le Te Deum ne peuvent plus y avoir lieu. Il existe un risque d'effondrement! Si rien n'est fait, les conséquences (en) sont irrémédiables (Voir articles de journaux + questions parlementaires). 2) las.a. Vandekerckhove est la seule possédant au département des travaux publics les références requises pour des travaux d'une telle importance. A fortiori est elle également la seule pouvant également présenter des prix de référence pour de tels chantiers. 3) las.a. Vandekerckhove possède la meilleure connaissance de l'état de la cathédrale, étant donné qu'elle a déjà réalisé les deux premières tranches. 4) las.a. Vandekerckhove garantit que les fournitures et les travaux sont belges à concurrence de 100 %. Elle est également la seule qui possède un atelier de tailleurs de pierre pour des travaux de cette importance. Elle est en outre la seule possédant sa propre école de tailleurs de pierre: elle est dès lors en mesure d'assurer la continuité du métier. 5) las.a. Vandekerckhove possède des possibilités d'exportation: elle a déjà été contactée par un État arabe en vue de travaux de restauration, et travaille présentement à l'étranger. 6) las.a. Vandekerckhove est seule en mesure d'appliquer au présent travail de restauration la technologie de pointe>>.

1.7. Le 4 janvier 1983 le Ministre des Travaux publics écrit à la Régie des Bâtiments que le conseil des Ministres, lors de sa réunion du 28 décembre 1982, a approuvé l'attribution par acte sous seing privé des travaux de restauration à la cathédrale Saint-Michel à la s.a. Gebroeders V andekerckhove pour un montant de 269 .491.805 frs. Il signale qu'il a informé personnellement l'entrepreneur de l'approbation de sa soumission.

Par lettre du 6 janvier 1983 le Ministre des Travaux publics avise la requérante que le marché a été attribué à las.a. Gebroeders Vandekerckhove.

2. La procédure.

2.1. Considérant que le mémoire en réponse est introduit onze mois après l'expiration du délai porté à nonante jours; qu'il est dès lors écarté des débats; qu'il n'est pris en considération que dans la mesure où des informations de fait y figurent;

3. Le bien-fondé du recours en annulation.

3.1.1. Considérant que la requérante invoque entre autres que la décision attaquée a été prise en violation de l'article 17, § 1, de la loi du 14 juillet 1976 ainsi que de l'article 49, § 2, de l'arrêté royal du 22 avril 1977 relatifaux marchés publics de travaux, de fournitures et de services, en ce que la partie défenderesse a décidé d'attribuer les travaux de restauration à la partie intervenante par convention de gré à gré, sans avoir consulté préalablement la partie requérante; qu'elle signale à ce propos qu'elle est, avec la partie intervenante, le seul entrepreneur ayant obtenu, dans la catégorie D 24 (restauration de monuments) une reconnaissance dans la classe 8, et qu'elle a demandé au Ministre des Travaux publics d'être consultée; que la partie défenderesse n'a pas fourni les raisons pour lesquelles elle se trouvait dans l'impossibilité de la consulter;

3.1.2. Considérant que dans son mémoire en réplique la partie requérante énonce qu'il n'est pas justifié en droit de <'fournir après l'adjudication de fait seulement une justification de l'impossibilité de consulter plusieurs entrepreneurs»; qu'à propos des raisons fournies par la partie défenderesse elle fait observer que: «l. Le délai compris entre le 24septembre1982 (lettre de la requérante) et le 28 décembre 1982 (note au Conseil des ministres) était largement suffisant pour donner suite à la demande formelle de la requérante d'être consultée; 2. deux entrepreneurs seulement, dont la requérante, possèdent depuis la période la plus étendue la reconnaissance requise dans la catégorie D24, classe 8, en raison de quoi ils entreraient en considération pour les travaux en cause. L'argument selon lequel les travaux de la cathédrale Saint-Michel seraient confiés «à l'entrepreneur offrant à cette fin les meilleures garanties» est parfaitement faux, étant donné que la requérante n'a même pas été mise en mesure de faire aucune offre de prix, et si elle l'avait été, elle eût pu produire des références à la présente affaire concernant sa gestion, son personnel, ses techniques ... 3. la comparaison du dossier Vandekerckhove avec celui (présenté) par la ville de Bruxelles, n'est pas valable, alors qu'une pareille comparaison devait être possible entre le dossier Vande­kerckhove et celui de la requérante. 4. L'adjudication se rapporte à une première phase, s'élevant à 270.000.000 frs. L'ensemble des travaux de restauration pourraient toutefois, à ce qu'on dit, atteindre environ 2 milliards»;

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêt N" 33.107 Page 3 N° 33.107

3.1.3. Considérant que l'article 17, § 1, de la loi du 14 juillet 1976 est libellé en ces termes: <<Le marché est dit «de gré à gré» lorsque l'autorité compétente, si possible après consultation de plusieurs entrepreneurs ou fournisseurs, engage librement les discussions qui lui paraissent utiles et attribue librement le marché à l'entre­preneur ou fournisseur qu'elle a choisi»; que l'article 49, § 2, de l'arrêté royal du 22 avril 1977, tel qu'il a été modifié par les articles 1et2 de l'arrêté royal du 4 février 1980, dispose: «l'administration consulte plusieurs entrepreneurs ou fournisseurs avant de procéder à l'attribution d'un marché de gré à gré. En cas d'impossibilité de le faire et pour autant que le marché dépasse 100.000 frs, elle en indique les raisons dès la passation du marché»;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'en cas d'adjudication de gré à gré du marché l'autorité est obligée de faire appel à la concurrence; que dès lors il n'est formulé aucune recommandation, mais qu'une obligation est imposée; qu'il ne peut être dérogé à cette règle que lorsqu'il n'est pas possible de consulter plusieurs entre­preneurs ou plusieurs fournisseurs; que l'autorité doit en ce cas, lorsqu'il s'agit de marchés d'une valeur dépassant 100.000 frs, indiquer les raison de cette impossibilité, et ces raisons doivent être fournies au plus tard au moment de l'attribution du marché; que dès lors une obligation formelle de motivation est imposée, à laquelle il y a lieu de se conformer lors de l'attribution du marché au plus tard;

3 .1.4. Considérant que dans une note du 28 décembre 1982 la partie défenderesse - dès avant l'adjudication définitive du marché - a fourni les raisons pour lesquelles un seul entrepreneur seulement, à savoir la partie intervenante, a été consulté; que ces raisons telles qu'elles sont fournies ne montrent pas que la partie défenderesse se trouvait dans l'impossibilité de consulter plusieurs entrepreneurs, comme l'exige l'article 49, § 2, de l'arrêté royal du 22 avril 1977; que s'il était établi que les travaux de restauration à la cathédrale Saint-Michel devaient être effectués d'urgence, cette circonstance n'était toutefois pas de nature à empêcher la partie défenderesse de consulter également la requérante; que l'autorité savait que la partie intervenante et la requérante étaient les seuls entrepreneurs en Belgique qui possédaient la reconnaissance requise dans la catégorie D24, classe 8; que la requérante a rappelé ceci à la partie défenderesse par lettre du 24 septembre 1982; qu'il ressort du dossier administratif que déjà en août 1982 le Ministre des Travaux publics et la Régie des Bâtiments s'étaient occupés de l'attribution des travaux de restauration, alors que l'affaire n'a été présentée au Conseil des Ministres que le 28 décembre 1982; que la partie défenderesse a disposé du temps suffisant pour faire appel à la concurrence en consultant non seulement la partie intervenante mais également la requérante;

Considérant que les affirmations selon lesquelles la partie requérante était le seul entrepreneur possédant les références requises, le seul pouvant présenter des prix de référence et pouvant appliquer une technologie de pointe, ne peuvent pas davantage être admises comme raisons; que la partie requérante possédait elle aussi la reconnaissance requise pour des travaux de restauration de cette importance; que dans ses lettres adressées au Ministre des Travaux publics la requérante avait signalé qu'elle était en mesure d'effectuer des travaux de restauration de cette importance, qu'elle fait usage d'une technologie de pointe et qu'elle peut produire des références (entre autres la cathédrale d'Anvers); que sans prendre contact avec la requérante la partie défenderesse a décidé de consulter uniquement la partie intervenante; que, étant donné les circonstances, les raisons considérées ne peuvent pas constituer un fondement à l'affirmation selon laquelle il aurait été impossible de consulter d'autres entrepreneurs; que les autres raisons fournies, à savoir que la partie intervenante connaît le mieux la cathédrale, garantit des fournitures qui sont belges à 100 %, est la seule possédant un atelier et une école de tailleurs de pierre, et bénéficie de possibilités d'exportation, pouvaient certes expliquer la préférence donnée à la partie intervenante par la partie défenderesse, mais ne prouvent ou n'expliquent pas qu'il eût été impossible de faire appel à la concurrence en consultant également d'autres entrepreneurs, soit la partie requérante; qu'il résulte de ce qui précède que les raisons fournies par la partie défenderesse ou bien ne trouvent aucun fondement dans les faits existant réellement et qui sont établis, ou bien étaient irrelevants; que le premier moyen est dès lors fondé;

Considérant que l'autre moyen invoqué ne peut pas mener à une annulation plus étendue et ne doit dès lors pas être examiné,

(Annulation de la décision du ministre des Travaux publics portant adjudication des travaux de restauration de la cathédrale Saint-Michel à Bruxelles à la s.a. Gebroeders Vandekerckhove dépens du recours à la charge de la Régie des Bâtiments - dépens de l'intervention à la charge de la partie intervenante)

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.109 à 33.125 Page 1 N° 33.109

N° 33.109

ARRET du 4 octobre 1989 (Ine Chambre) MM. Van Aelst, président de chambre, François, rapporteur, et Mme Thomas, conseillers, et M. Hoeffier, premier auditeur.

BAUDUIN et consorts (Me Casters) c/ Ville de Namur (Me Bouillard) et Région wallonne (Mes Gillet et Lambert) - Partie intervenante: S.A. Immobilière Bajart (Me Reger)

1. PROCEDURE - Règles spéciales à la demande de suspension - Acte distinct

L'acte distinct doit être joint à la requête en annulation. La demande de suspension n'est pas recevable lorsqu'elle est introduite après la requête en annulation.

II. PROCEDURE - Règles spéciales à la requête en suspension - Moyen invoqué

La requête en suspension n'est pas recevable bien qu'invoquant la violation de l'article 6 de la Constitution lorsque, postérieure à la requête en annulation, elle invoque pour la première fois ce moyen.

Vu la requête introduite le 11 août 1989 par Serge Bauduin, Marie-Louise Frodure, Marie-Louise Puissant et Georges Henrard qui poursuivent l'annulation du permis de bâtir délivré le 21 juin 1989 par le collège des bourgmestre et échevins de Namur à la société anonyme Immobilière Bajart pour construire un immeuble à appartements à Jambes, quai de Meuse, 44;

Vu la requête, introduite le 18 août 1989, par laquelle les requérants demandent la suspension de l'exécution de l'acte attaqué;

Vu les requêtes introduites le 30 août 1989, par lesquelles la société anonyme Immobilière Bajart demande à être reçue en qualité de partie intervenante;

Vu l'ordonnance du 31 août 1989 accueillant ces interventions;

Considérant qu'il y a lieu d'examiner sans délai la demande de suspension de l'exécution de l'acte attaqué;

Considérant que les parties adverses estiment la requête en suspension irrecevable en raison, d'une part, de ce qu'elle n'est pas introduite par un acte distinct joint à la requête en annulation et, d'autre part, de ce que la violation des articles 6, 6bis ou 17 de la Constitution n'est pas alléguée dans le recours;

Considérant que les lois coordonnées sur le Conseil d'Etat disposent aux paragraphes 2 et 3 de leur article 17, rétabli par l'article 15 de la loi du 16 juin 1989 portant diverses réformes institutionnelles, que «la suspension del' exécution ne peut être décidée que si des moyens sérieux fondés sur la violation des articles (6, 6bis et 17) de la Constitution sont invoqués ... » et que «La demande de suspension de l'exécution est introduite par un acte distinct qui est joint à la requête en annulation»; qu'aucune portée juridique ne serait reconnue à ces termes figurant parmi une série de conditions par lesquelles la loi circonscrit le champ de l'exception qu'elle apporte au principe de l'exécution d'office, si une demande de suspension était reçue alors qu'elle a été introduite après la requête en annulation; que, par ailleurs, il n'est soutenu que dans la requête en suspension qu'une des dispositions précitées de la Constitution ait été violée; que la requête en suspension est irrecevable en raison tant du moment de son introduction que de l'objet des dispositions invoquées dans la requête en annulation,

(Rejet de la demande de suspension du permis de bâtir délivré le 21 juin 1989 par le collège des bourgmestre et échevins de la ville de Namur à la société anonyme Immobilière Bajart).

N° 33.110

ARRET du 4 octobre 1989 (file Chambre) MM. Van Aelst, président de chambre, rapporteur, François et Mme Thomas, conseillers, et M. Salmon, premier auditeur.

JACOBS (Me Cambier) c/ Etat belge représenté par le Ministre de la Défense nationale (M. Offermans)

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.110

Arrêts Nos 33.109 à 33.125

Page 2

I. MUSEE ROYAL DE L'ARMEE ET D'HISTOIRE MILITAIRE - Généralités (1 et 2)

II. INTERET (POUR AGIR DEVANT LE CONSEIL D'ETAT) - Classement selon la qualité du requérant - Intérêt fonctionnel - Directeur d'un service (1)

1. La décision du ministre de la Défense nationale, de confier la gestion du Musée royal de l'armée et d'histoire militaire au chef du centre de documentation historique des forces armées, affecte de manière essentielle l'organisation et la gestion du musée ainsi que les attributions du conservateur en chef; elle peut s'interpréter comme étant davantage qu'une mesure d'ordre intérieur. Le conservateur en chef du musée est recevable à en poursuivre l'annulation.

2. Il ressort de l'article 6 de l'arrêté royal du 20 avril 1965 et de l'article 2, alinéa 5, de l'arrêté royal du 11juin1976 que c'est bien au conservateur en chef du Musée royal del' armée et d'histoire militaire qu'il revient de coordonner les missions de ce musée. En réduisant, par une note, des prérogatives consacrées par arrêté royal, le ministre de la Défense nationale excède ses pouvoirs.

Vu la requête introduite le 20 janvier 1987 par Edouard Aimé J acobs qui demande l'annulation de la décision du Ministre de la Défense nationale du 19 novembre 1986 relative au rattachement du Musée royal de l'armée et d'histoire militaire et plus spécialement du point 4 de cette décision;

Considérant que, par une circulaire du 19 novembre 1986, le Ministre de la Défense nationale a créé le Centre historique de la Défense nationale composé du Centre de documentation historique des forces armées et du Musée royal de l'armée et d'histoire militaire; que, selon le point 3 de cette circulaire, le Musée royal de l'armée restera un établissement scientifique à part entière, rien n'étant changé en ce qui concerne les attributions scientifiques et le statut du personnel; que, toutefois, la gestion du musée est dorénavant confiée au chef du centre de documentation historique des forces armées aux termes du point 4 de la note qui dispose comme suit:

«Sans préjudice des attributions scientifiques du MRA, le chef actuel CDH est chargé de la gestion du centre, dont notamment la garde, l'entretien et la sécurité. Le personnel, à l'exception du personnel propre au MRA (personnel scientifique et logistique), sera administré par lui, en collaboration avec AGCICAP en ce qui concerne le personnel civil.

»Il est également chargé de l'organisation des manifestations, en étroite collaboration avec le conservateur en chef du MRA, qui est responsable de l'aspect scientifique de celles-ci.

»En outre, il assurera la coordination de /'ensemble des activités avec les dirigeants des différentes a.s.b.l. s'intéressant au MRA.»;

Considérant qu'en vain la partie adverse conteste la recevabilité du recours; qu'en effet l'acte attaqué, qui affecte de manière essentielle l'organisation et la gestion du musée ainsi que les attributions de conservateur en chef du requérant, peut s'interpréter comme étant davantage qu'une mesure d'ordre intérieur, qu'en ce qui concerne la recevabilité ratione temporis, rien dans le dossier ne contredit l'affirmation du requérant selon laquelle il n'aurait eu connaissance de la décision que le 24 novembre 1986;

Considérant que le requérant soutient, en un premier moyen, que le Ministre de la Défense nationale a supprimé une partie de ses compétences et l'a placé hiérarchiquement sous l'autorité d'un militaire et, qu'en ce faisant, il «déroge par une décision ministérielle à un arrêté royal ce qui est en contradiction flagrante avec le principe patere legem»;

Considérant que la partie adverse répond qu'aucune compétence propre au conservateur en chef n'est supprimée et qu'en ce qui concerne sa dépendance hiérarchique, celle-ci n'est pas affectée par la note du ministre qui reste son seul supérieur hiérarchique;

Considérant que, si selon le point 3 de la note du 19 novembre 1986, les attributions scientifiques ne sont pas changées au sein du Musée royal de l'armée, il reste que, aux termes du point 4, le chef du Centre historique de la Défense nationale est chargé de la gestion du nouveau centre, et donc de celle du Musée royal de l'armée qui en fait partie, notamment quant à la garde, l'entretien et la sécurité du musée, ainsi que de l'organisation matérielle des manifestations et de la coordination de l'ensemble des activités avec les dirigeants des associations sans but lucratif s'intéressant au musée, alors qu'il ressort de l'article 6 de l'arrêté royal du 20 avril 1965 relatif au statut organique des établissements scientifiques de l'Etat que «le chef d'établissement assume, sous /'autorité du ministre compétent, la direction scientifique et administrative de /'établissement»; que l'article 2, cinquième alinéa, de l'arrêté royal du 11 juin 1976 <<fixant le niveau de /'établissement scientifique de l'Etat: Musée royal de l'armée et d'histoire militaire, relevant du ministère de la Défense nationale, et en définissant la mission», prévoit que celui-ci «organise et participe à des expositions et à des journées d'études nationales et internationales»;

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.109 à 33.125 Page 3 N° 33.111

Considérant qu'il ressort de la combinaison de ces dispositions que c'est bien au conservateur en chef du musée qu'il revient de coordonner les missions du Musée royal de l'armée, qu'en réduisant, par une note, des prérogatives consacrées par arrêté royal, le ministre a excédé ses pouvoirs; que le moyen est fondé,

(Annulation du point 4 de la décision du Ministre de la Défense nationale du 19 novembre 1986 relative au rattachement du Musée royal de l'armée et d'histoire militaire - publication de l'arrêt par extrait dans les mêmes formes que la décision partiellement annulée - dépens à charge de la partie adverse).

N° 33.111 ARRET du 4 octobre 1989 (IIIe Chambre)

MM. Van Aelst, président de chambre, François, rapporteur, et Mme Thomas, conseillers, et M. Hoeffier, premier auditeur.

DEHAN c/ Région wallonne (Mes Gillet et Lambert) et Commune de Walcourt

I. BATISSE ET LOTISSEMENT - Recours au Conseil d'Etat - Intérêt - Voisin

Toute construction intéresse en principe. les voisins.

II. BATISSE ET LOTISSEMENT - Permis de bâtir - Permis de régularisation

III. PROCEDURE NON CONTENTIEUSE - Motivation formelle des actes - Obligation de motiver en la forme - Dérogation

Si aucune disposition légale n'impose qu'un permis de bâtir soit motivé en la forme, l'exigence du caractère préalable du permis exprimée à l'article 41, § lei", du code wallon ne serait pas pleinement respectée si tout permis délivré après les travaux n'était pas au moins regardé comme suspect d'être le fruit d'une appréciation infléchie par le poids du fait accompli.

Il s'ensuit qu'une motivation en la forme est nécessaire pour que le Conseil d'Etat puisse vérifier qu'il n'en a pas été ainsi, sauf les cas exceptionnels où ce fait ressort à l'évidence du dossier.

Vu la requête introduite le 25 juin 1987 par Claudine Dehan qui poursuit l'annulation du permis de bâtir délivré le 7 janvier 1987 par le fonctionnaire délégué de l'urbanisme pour des constructions annexes à un terrain de football;

Considérant que derrière des villas bordant la route de Philippeville, l'administration communale de Tarcienne a créé un terrain de football et construit des vestiaires; que la requérante et le collège des bourgmestre et échevins de la commune de Walcourt déclarent que ces travaux ont fait l'objet d'un permis de régularisation délivré le 19 janvier 1981 et que de nouveaux travaux furent exécutés sans permis en 1982; que ces nouveaux travaux ont été l'élargissement, par une annexe, de la buvette qui se trouvait à l'une des extrémités du rectangle formé par le bâtiment régularisé en 1981, ainsi que la construction d'une clôture; qu'à la suite de réclamations et de démarches faites notamment par la requérante, la commune de Walcourt obtint du fonctionnaire délégué de l'administration de l'urbanisme, le 7 janvier 1987, le permis de bâtir attaqué, décrivant son objet en ces termes:

«1) la constrùction d'annexe, buvette, clôture (régularisation)

»2) la construction d'une réserve, vestiaires et plantations»;

que la construction qui vient d'être mentionnée en second lieu est logée dans l'angle que l'annexe objet de la régularisation, construite pour agrandir la buvette, forme avec le reste du bâtiment initial et communique avec celui-ci; qu'il ressort du procès-verbal d'une réunion tenue le 22 avril 1986 à l'administration de l'urbanisme que les plantations étaient destinées à constituer un écran entre les villas, notamment celle de la requérante, et le terrain ainsi que les installations; qu'il ressort du dossier que la clôture régularisée, qui se dresse à moins d'un mètre derrière les parcelles voisines de celle de la requérante, est formée de treillis soutenu par des piquets et a 5,70 mètres de hauteur;

Considérant qu'il y a lieu d'examiner ensemble le quatrième et le cinquième des moyens du recours, lesquels sont pris de la violation des articles 41, 42, 67, § 3, et 184 du Code wallon de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme en ce que, notamment, l'autorité est tenue d'exercer son pouvoir d'appréciation dans l'intérêt du bon aménagement lorsqu'elle délivre un permis de régularisation;

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.111

Arrêts Nos 33.109 à 33.125

Page 4

Considérant que la commune de Walcourt conteste l'intérêt de la requérante à l'annulation de l'acte attaqué en ce que celui-ci a trait à une clôture distante de vingt mètres de sa propriété;

Considérant que toute construction intéresse en principe les voisins;

Considérant que si, comme le rappelle la commune, aucune .disposition légale n'impose qu'un permis .de bâtir soit motivé en la forme, l'exigence du caractère préalable du permis exprimée à l'article 41, § 1er, du code wallon ne serait pas pleinement respectée si tout permis délivré après les travaux n'était pas au moins regardé comme suspect d'être le fruit d'une appréciation infléchie par le poids du fait accompli; qu'il s'ensuit qu'une motivation en la forme est nécessaire pour que le Conseil d'Etat puisse vérifier qu'il n'en a pas été ainsi, sauf les cas exceptionnels où ce fait ressort à l'évidence du dossier; que le permis attaqué n'est pas motivé en la forme; que le dossier ne contient aucun élément indiquant que l'on a veillé pour la clôture s'élevant à 5,70 mètres dans un quartier de villas comme pour l'annexe, à ce que la justification du permis soit indépendante du fait accompli; que s'il est vrai, comme le rappelle la Région wallonne en son dernier mémoire, que le terrain de football avait fait l'objet d'un autre permis et que vestiaires et buvette sont le complément indispensable d'une telle installation, il n'en va peut-être pas de même des agrandissements autorisés par l'acte attaqué; que la commune allègue vainement dans son dernier mémoire que puisque l'auteur du permis a autorisé des travaux dont certains n'étaient pas accomplis, il doit avoir, <<par extension», statué «en toute indépendance envers la régularisation contestée»; qu'en effet, la question n'est pas de savoir si le respect du fait accompli a été le seul motif de l'octroi du permis; qu'au surplus, pour les raisons indiquées dans l'exposé des faits les nouveaux travaux autorisés par l'acte attaqué ne sont pas dissociables de ceux qui font l'objet de la régularisation; que les moyens sont fondés;

Considérant qu'il est sans intérêt d'examiner les autres moyens, faute qu'ils puissent conduire à une annulation plus étendue du permis du 7 janvier 1987,

(Annulation du permis de bâtir délivré le 7 janvier 1987 par le fonctionnaire délégué de l'urbanisme pour

«l) la construction d'annexe, buvette, clôture (régularisation)

»2) la construction d'une réserve, vestiaires et plantations»; - dépens à charge des parties adverses).

N° 33.112

ARRET du 4 octobre 1989 (IIIe Chambre)

YILDIRIM: recours sans moyen de droit.

N° 33.113

ARRET du 4 octobre 1989 (IIIe Chambre) MM. François, président, Mme Thomas, rapporteur, et M. Hanotiau, conseillers, et M. Mendiaux, 'premier auditeur. ·

CORMAN (Mes Detry et Geairain) c/ Etat belge représenté par le Vice-Premier Ministre et Ministre des ·Affaires économiques (Me Cambier)

1. AGENTS ET FONCTIONNAIRES PUBLICS - Signalement - Contentieux (1.et 2) II. COMPETENCE DES AUTORITES ADMINISTRATIVES - Caractère d'ordre public (1 et 2) III. INTERET (POUR AGIR DEVANT LE CONSEIL D'ETAT) - Moyens - Généralités (2)

1. La circonstance que l'agent n'a pas attaqué la décision du fonctionnaire qui lui a infligé une sanction disciplinaire ne fait pas obstacle à ce qu'il soutienne que ce fonctionnaire n'était pas compétent pour établir la proposition de signalement qui a suivi la sanction disciplinaire .

.i. Lorsqu'une autorité prend à l'égard d'un agent une décision qui relève de son pouvoir d'appréciation et qui fait grief à cet agent, tel le passage du signalement «très bon» a11- signalement «mauvais», l'agent a intérêt à invoquer l'incompétence del' auteur de cette. décision, dès lors qu'il n'est pas certain qu'une. autre autorité n'aurait pas porté une appréciation plus favorable.

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.109 à 33.125 Page 5 N° 33.113

IV. AGENTS DE L'ETAT-Signalement- Bulletin de signalement - Etablissement- Compétence

Les propositions de signalement ne peuvent être établies que par des fonction­naires appartenant organiquement au même service que l'agent. Cette règle, inspirée par la considération que des fonctionnaires sont, mieux que des personnes étrangères à l'administration, en mesure d'apprécier la valeur, les aptitudes, le rendement et le mérite de l'agent au regard de ses antécédents et des exigences del' activité administrative, fait partie des garanties accordées à l'agent et est substantielle.

V. AGENTS DE L'ETAT - Départements ministériels - Ministère des Affaires économiques -Administration du commerce

VI. AGENTS ET FONCTIONNAIRES PUBLICS - Qualité d'agent ou de fonctionnaire public -Collaborateurs de l'administration

VII. PRIX - Commission pour la régulation des prix - Président

Il ressort de l'arrêté royal du 3 juin 1969 que le président de la Commission pour la régulation des prix n'est pas un fonctionnaire. Il n'est pas compétent pour établir la proposition de signalement d'un agent de l'Etat désigné pour exercer ses fonctions auprès de cette commission.

Les circonstances que le supérieur hiérarchique compétent pouvait, conformément à l'article 5 del' arrêté royal du 7 août 1939, s'informer auprès du président de la commission et que le directeur général de l'administration du commerce a signé la proposition de signa­lement à la suite du président ne sauraient couvrir la violation d'une formalité substantielle.

Vu la requête introduite le 7 décembre 1987 par Nelly Connan qui demande l'annulation de la décision du 18 septembre 1987 du Ministre des Affaires économiques confirmant le signalement «mauvais» qui lui a été attribué par le président de la commission des prix et le conseil de direction;

Considérant que, par un arrêté ministériel du 7 septembre 1977, Nelly Connan, rédacteur à l'administration du commerce du ministère des affaires économiques, a été désignée comme secrétaire d'administration faisant fonction auprès de la commission pour la régulation des prix; que jusqu'en 1987 la requérante a obtenu la mention de signalement «Trés bon»; que, le 21 octobre 1986, le président de la commission lui a infligé, en raison de son refus de se soumettre à l'obligation de pointage, la peine disciplinaire du blâme et a inscrit cette peine sur sa fiche individuelle; que, le 3 mars 1987, le président de la commission a proposé la mention de signalement «Mauvais» pour la requérante; que cette proposition a été contresignée, le 4 mars 1987, par le directeur général de l'administration du commerce; que, le 7 avril 1987, le conseil de direction a attribué le signalement «Mauvais» à la requérante qui s'est pourvue en appel de cette décision devant la chambre de recours; qu'en raison de l'avis favorable de la chambre de recours, le ministre a statué sur le signalement par une décision qui constitue l'acte attaqué et qui a été notifiée en ces termes à la requérante par le directeur général des services généraux le 6 octobre 1987:

«En contresignant le formulaire rempli par Monsieur Defossez, président de la commission de régulation des prix, Monsieur Raux, directeur général de l'administration du commerce, a fait application de l'article 5 de l'arrêté royal du 7 août 1939 organisant le signalement et la carrière des agents de l'Etat.

»Cette signature a eu pour effet de valider les observations portées sur ce formulaire ainsi que la proposition qui en découle.

»Par conséquent, la mention «mauvais» a été valablement soumise au conseil de direction.»;

Considérant que la requérante prend un moyen de la violation de l'article 59, premier alinéa, de l'arrêté royal du 2 octobre 1937 portant le statut des agents de l'Etat, de l'article 3, § 4, deuxième et troisième alinéas de larrêté royal du 7 août 1939 organisant le signalement et la carrière des agents de l'Etat et de 1' arrêté ministériel du 22 décembre 1976 désignant les supérieurs hiérarchiques habilités à noter les faits sur la fiche individuelle et à faire des propositions de signalement, en ce que le président de la commission pour la régulation des prix, n'ayant pas la qualité d'agent de l'Etat, n'était pas compétent pour établir la proposition de signalement la concernant;

Considérant que la partie adverse soutient que le moyen est irrecevable au motif que la requérante allègue l'incompétence d'une autorité qui lui a infligé une sanction disciplinaire qu'elle n'a pas attaquée; qu'elle prétend également que l'incompétence de l'auteur de la proposition, à la supposer établie, n'a pu causer aucun grief à la requérante;

Considérant que la circonstance que la requérante n'a pas attaqué la décision du 21 octobre 1986 du président de la commission lui infligeant une sanction disciplinaire ne fait pas obstacle à ce qu'elle soutienne à l'appui de son recours qu'il n'était pas compétent pour établir la proposition de signalement qui a suivi la sanction disciplinaire; que lorsqu'une autorité prend à l'égard d'un agent une décision qui relève de son pouvoir d'appréciation et qui fait

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.113

Arrêts Nos 33.109 à 33.125

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grief à cet agent - tel le passage du signalement «Très bon» au signalement «Mauvais» - celui-ci a un intérêt à invoquer l'incompétence de l'auteur de cette décision; qu'en effet, il n'est pas certain qu'une autre autorité n'aurait pas porté une appréciation plus favorable; que l'exception ne peut être retenue;

Considérant que la partie adverse répond, sur le fond, que le président de la commission pour la régulation des prix était le supérieur hiérarchique immédiat de la requérante; que la nature hiérarchique des rapports entre le président de la commission et les membres du personnel de son secrétariat résulte de l'économie de l'arrêté royal du 3 juin 1969 instituant une commission pour la régulation des prix; qu'elle rappelle que la requérante était détachée à la commission depuis 1977; qu'elle allègue que, conformément à l'article 5 de l'arrêté royal du 7 août 1939, le supérieur hiérarchique de la requérante au sein de l'administration du commerce pouvait recueillir auprès des services de la commission les renseignements utiles pour établir la proposition de signalement; que la proposition critiquée a été cos ignée par le directeur général qui a ainsi fait application de l'article 5 de !'arrêté royal du 7 août 1939; que la proposition de signalement revêtue de la signature du directeur général ne peut être rendue irrégulière par le fait qu'elle est également signée par le président de la commission;

Considérant qu'en son article 3, § 4, deuxième alinéa, l'arrêté royal du 7 août 1939 dispose que chaque ministre détermine les supérieurs hiérarchiques compétents pour établir les propositions de signalement; que le troisième alinéa du paragraphe 4 de la disposition précitée prévoit que: «le supérieur hiérarchique compétent propose le signalement qu'il estime devoir être attribué à chaque agent»; que, par un arrêté du 22 décembre 1976, le Ministre des Affaires économiques a désigné les supérieurs hiérarchiques habilités à faire les propositions de signalement; qu'il résulte de ces règlements que les propositions de signalement ne peuvent être établies que par des fonctionnaires appartenant organiquement au même service que l'agent; que cette règle, inspirée par la considération que des fonctionnaires sont, mieux que des personnes étrangères à l'administration, en mesure d'apprécier la valeur, les aptitudes, le rendement et le mérite de l'agent au regard de ses antécédents et des exigences de l'activité administrative, fait partie des garanties accordées à l'agent et est substantielle;

Considérant qu'il ressort de l'arrêté royal du 3 juin 1969 que le président de la commission des prix n'est pas un fonctionnaire; qu'il n'était pas compétent pour établir la proposition de signalement attaquée; que les circonstances que le supérieur hiérarchique compétent pouvait, conformément à l'article 5 de l'arrêté royal du 7 août 1939, s'informer auprès du président de la commission et que le directeur général de l'administration du commerce a signé la proposition de signalement à la suite du président ne sauraient couvrir la violation d'une formalité substantielle; que le moyen est fondé;

Considérant qu'il n'y a pas lieu d'examiner les autres moyens de la requête faute qu'ils puissent conduire à une annulation plus étendue,

(Annulation de la décision du 18 septembre 1987 du Ministre des Affaires économiques confirmant le signalement «Mauvais» qui a été attribué à Nelly Connan par le président de la commission des priX et par le conseil de direction de l'administration du commerce - dépens à charge de la partie adverse).

N° 33.114

ARRET du 4 octobre 1989 (IIIe Chambre) MM. François, président, Mme Thomas, rapporteur, et M. Hanotiau, conseillers, et M. Dumont, auditeur général adjoint.

MADANT c/ Communauté française (Me Giet) et C.P.A.S. Saint-Hubert (Me Rous­seau)

I. AGENTS DES CENTRES PUBLICS D'AIDE SOCIALE - Discipline - Recours au ConseH d'Etat - Compétence du Conseil d'Etat

II. COMPETENCE DU CONSEIL D'ETAT - Contentieux de l'annulation - Actes des autorités administratives

La délibération du conseil de l'aide sociale qui révoque un agent et l'arrêté de l' Exécutif qui approuve cette délibération sont des actes d'autorités administratives au sens de l'article 14 des lois coordonnées du 12 janvier 1973. Aucune disposition légale n'écarte la compétence du Conseil d'Etat à l'égard de ces actes.

III. AGENTS DES CENTRES PUBLICS D'AIDE SOCIALE - Discipline - Tutelle - Roi ou Exécutif - Arrêté: motivation

IV. AGENTS ET FONCTIONNAIRES PUBLICS - Discipline - Qualification - Manquements aux devoirs du service - Généralités ·

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D"ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.109 à 33.125 Page 7 N° 33.114

Lorsque l' Exécutif approuve la révocation d'un agent de centre public d'aide sociale pour le motif que les deux faits qu'il retient participent d'une attitude de blocage volontaire, son arrêté doit être annulé s'il appert qu'un des faits ne pouvait être ainsi qualifié.

L'annulation de la décision de l' Exécutif entraîne l'obligation pour celui-ci de statuer à nouveau sur le recours contre la décision du conseil de l'aide sociale. Le Conseil d'Etat se substituerait à l'autorité de tutelle en se prononçant sur le recours dirigé contre cette décision.

Vu la requête, introduite le 8 février 1988 par laquelle Mireille Madant demande l'annulation:

1° de la délibération du conseil d'aide sociale de Saint-Hubert du 23 décembre 1986 qui la révoque de ses fonctions d'infirmière brevetée et de chef de service au home Herman;

2° de l'arrêté de !'Exécutif de la Communauté française du 18 décembre 1987 qui rejette le recours formé par elle contre l'approbation tacite donnée par la députation permanente du conseil provincial du Luxembourg à la délibération précitée;

Considérant que la requérante était infirmière brevetée et chef de service au home Herman à Saint-Hubert, établissement dépendant du centre public d'aide sociale de cette ville; que, le 30 septembre 1986, le conseil de l'aide sociale a suspendu la requérante de ses fonctions, sans traitement, pour une durée de trois mois sur la base des motifs suivants:

«Considérant:

»J 0 qu'une condamnation pour coups à un pensionnaire existe (même si elle est tempérée par une suspension du prononcé de la condamnation), avec la circonstance aggravante, pour les membres du conseil, que Mme Madant est infirmière brevetée et chef de service;

»2° que les faits démontrent à suffisance que Madame Madant, eu égard à sa qualité de chef de service, est responsable de l'absence totale d'organisation du service soignant;

»3° qu'un préjudice certain est porté aux pensionnaires du home et qu'il existe aucun respect de la dignité de ceux-ci (des toilettes ayant été effectuées durant un certain temps en commun et excessivement rapidement);

»4° que la relation indispensable de confiance qui doit exister entre le conseil de l'aide sociale et un membre du personnel chargé de responsabilités peut légitiment être remise en question;

»5° que le conseil de l'aide sociale se doit d'être certain que l'intérêt des pensionnaires est préservé à tout moment;»;

que la requérante n'a pas introduit de .recours au Conseil d'Etat contre cette décision ni contre l'arrêté de !'Exécutif de la Communauté française rejetant le recours qu'elle avait formé contre elle;

Considérant que, le 14 novembre 1986, le président du centre public d'aide sociale a adressé la lettre suivante à la requérante: ,

«Le conseil de l'aide sociale, réuni en séance ce 13 novembre J986, a été amené à évoquer le fait que, pour les mois d'août et de septembre 86, vous n'ayez rentré au secrétariat aucune attestation de soins donnés aux pensionnaires.

»Dès lors, les membres vous demandent de répondre, par écrit, aux questions suivantes(. . .).'

»J 0 Pour quelle(s) raison(s) n'avez-vous pas rentré lesdits documents en temps voulu au bureau?

»2° Quel est votre avis personnel quant à la manière dont les toilettes non attestées par vous-même pendant les deux mois concernés ont été effectuées?

»3° Quelle fut votre activité au home les matinées des J2 et 131Jl/86?

»Les membres, en outre, souhaiteraient obtenir un rapport écrit et explicite quant à vos activités en tant que chef de service depuis le OJI07186.»;

que le 21 novembre 1986, la requérante a adressé le rapport demandé au président du centre public d'aide sociale, qu'à propos des attestations de soins, elle a précisé qu'elle ne les avait pas encore rédigées. parce qu'elle n'avait travaillé que deux fois quatre heures et un week-end en octobre et a ajouté: «Lors de la réunion du 30.9.J986 on me dit que les toilettes sont «mal effectuées», puis-je discuter avec vous de ce fait»;

Considérant que la requérante a été «suspendue du remboursement des soins infirmiers» par la commission d'appel instituée auprès du service de contrôle médical de l'Institut national d'assurance maladie-invalidité, pour une durée de quatre mois ·prenant cours le 12 décembre 1986, notamment pour avoir signé des attestations de soins relatives aux toilettes ·en méconnaissance de la nomenclature;

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.114

Arrêts Nos 33.109 à 33.125

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Considérant que, le 12 décembre 1986, la réquérante a été convoquée à la séance du conseil d'aide sociale du 23 décembre 1986 pour y être entendue sur les faits suivants:

«-suspension de remboursement des soins infirmiers à dater du 12112186 pour une durée de 4 mois (décisions INAM/);

>>---existence d'un dossier (en votre possession) concernant un (ou plusieurs) membre(s) du personnel de CPAS;

>>--- remise au secrétariat, ce 10112186, d'attestations de soins infirmiers non signées relatives aux mois d'août et de septembre 1986.»;

Considérant que, le 23 décembre 1986, le conseil de l'aide sociale a révoqué la requérante de ses fonctions par la première décision, libellée notamment en ces termes:

«Attendu:

>>---que Madame Madant a été suspendue du remboursement des soins infirmiers par l'JNAMJ pour une période de quatre mois prenant cours le 12 décembre 1986;

>>--- qu'elle a commis une négligence grave en ne signalant pas à son employeur que pareille sanction lui avait été infligée;

>>--- ( ... )

>>---attendu que la suspension de remboursement de soins infirmiers apporte un préjudice financier certain au CPAS;

>>---attendu que Mme Madant (vraisemblablement suite à la connaissance qu'elle a eue de cette suspension INAM/) a donné l'impression à ses collègues de travail qu'elle refusait, d'initiative, d'exercer les responsabilités inhérentes à son grade d'irifirmière brevetée, se complaisant dans une certaine inactivité;

»(. . .)

>>---attendue que, si le deuxième point évoqué à l'ordre du jour del' audition ne comporte aucune pièce écrite dans le dossier soumis à l'examen du conseil et à la consultation de Mme Madant et de ses défendeurs, son examen résulte néanmoins d'un dialogue entre Mme Madant et M. Eric Bodson, membre du conseil;

>>---attendu que cette discussion est intervenue le 16109186 dans le home, lors d'une réunion du conseil, et que M. Bodson en a rapporté la teneur dès son retour en salle du conseil, aux membres présents;

- attendue que, selon M. Bodson, membre du conseil présent à la présente séance, Mme Madant affirmait être en possession d'un dossier «à charge» de Gerard Yvette, chômeuse mise au travail en fonction en qualité d'animatrice au home Herman depuis le 16109186, dossier retraçant les antécédents professionnels de Mme Gerard;

>>---attendu qu'il est rappelé en séance du conseil que M. Bodson est membre du conseil et a prêté serment en tant que tel;

>>---attendu que Mme Madant a catégoriquement démenti les affirmations de M. Bodson (. . .);

>>--- attendu que le conseil estime, de manière unanime, qu'il se doit de faire confiance à la parole d'un de ses membres, lequel a ajouté que ses propos avec Mme Madant avaient été évoqués aussi exactement que possible;

>>---attendu, dès lors, que les membres jugent particulièrement grave l'attitude de Mme Madant à ce sujet, et estiment que cette attitude est de nature à rompre définitivement les relations de corifiance indispensables entre employeur et employée chef de service;

>>---attendu que Mme Madant a remis au secrétariat des attestations de soins infirmiers non signées (en ce qui concerne les toilettes) relatives aux mois d'août et de septembre 1986 (et ce en date du 10112186);

>>--- attendu qu'elle n'a pas signalé ce fait à l'administration;

>>---estimant qu'ils' agit là d'un refus de travail de la part de Mme Madant;

>>--- (. . .);));

que, le 17 février 1987, le collège des bourgmestre et échevins, jugeant que la sanction était trop sévère, a donné un avis défavorable à propos de cette décision, que l'approbation de la députation permanente a été acquise par expiration du délai prévu à l'article 110, deuxième alinéa, de la loi du 8 juillet 1976; que, le 15 mai 1987, la requérante a adressé à !'Exécutif de la Communauté française le recours au Roi institué par l'article 54 de la loi précitée contre la décision d'approbation de la députation permanente; que, par le deuxième acte attaqué du 18 décembre 1987, l'Exécûhf à rejeté le recours de la requérante; que l'endroit critiqué de la décision est le suivant:

«Considérant qu'il convient ( ... ) d'analyser les faits à base de la révocation ( ... );

»Considerant qu'en ce qui concerne les attestations des soins infirmiers des mois d'août et septembre 1986 que Madame Madant n'a pas signées, s'il est vrai que cette attitude peut s'expliquer par k·souci (. . .) de ne pas ·s'exposer à une sanction JNAMJ étant donné que, par la peine de suspension préalablement infligée par le centre public d'aide sociale à l'intéressée, les soins auraient été reconnus comme mal dispensés, Madame Madant

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.109 à 33.125 Page 9 · N° 33.114

avait toutefois le devoir d'informer immédiatement ses supérieurs hiérarchiques de sa prise de position quant à ce problème afin de ne pas leur donner l'impression d'un refus de travail et pour leur permettre de prendre toutes les mesures utiles afin d'éviter, si possible, au centre public d'aide sociale un quelconque préjudice;

»Considérant que les mêmes raisons eussent commandé que Madame Madant signale au centre public d'aide sociale la sanction INAM! de suspension de remboursement de soins infirmiers qu'elle encourait pour 4 mois à dater du I 2 décembre I 986, d'autant plus qu'il avait été reconnu au niveau judiciaire que les faits sanctionnés par l' INAM! avaient été commis sous la pression de l'ex-président du centre public d'aide sociale et à l'avantage de ce dernier, Madame Madant n'ayant donc pas à craindre du centre public d'aide sociale une sanction du chef de ces faits;

»Considérant qu'il ressort du dossier disciplinaire que·c' est l'attitude de blocage volontairement adoptée par Madame Madant qui se trouve actuellement sanctionnée et non les faits précédemment invoquées par le centre public d'aide sociale de Saint-Hubert pour fonder la peine de suspension de 3 mois qu'il lui a infligée le 30 septembre I986; que cette attitude, constituant la violation du devoir élémentaire imposé à tout agent d'un service public d'accomplir sa mission avec zèle et exactitude, justifie la sanction prononcée;»;

Considérant que le centre public d'aide sociale de Saint-Hubert décline la compétence du Conseil d'Etat au motif qu'aucune disposition de la loi du 8 juillet 1976 n'organise un recours au Conseil d'Etat contre les actes attaqués et que «le cas de la requérante ne s'inscrit dans aucune des hypothèses visées par les articles 11 à I 6» des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées le 12 janvier 1973;

Considérant que les actes attaqués sont des actes d'autorités administratives au sens de l'article 14 des lois coordonnées précitées; qu'aucune disposition légale n'écarte la compétence du Conseil d'Etat à l'égard de ces actes; que l'exception ne peut ,._être retenue;

Considérant que la requérante prend un moyen qu'elle intitule «défaut de proportionnalité entre la faute et la peine»; qu'elle expose que «1' argumentation de l' Exécutif de la Communauté française s'écarte de la vérité» aux motifs non seulement qu'elle avait informé le secrétaire du centre public des raisons pour lesquelles elle estimait ne pas pouvoir signer les attestations de soins pour les mois d'août et de septembre 1986 mais aussi qu'elle l'avait informé verbalement du fait qu'elle avait fait l'objet d'une sanction de la part de l'Institut national d'assurance maladie-invalidité; qu'elle soutient que la lettre qu'elle a adressée le 21 novembre 1986 au président du centre public et celle qu'elle a adressée le 26 décembre 1986 au gouverneur démentent les intentions de «blocage» qui lui ont été prêtées par !'Exécutif de la Communauté française; que, dans le mémoire en réplique, elle ajoute que les faits mis à sa charge ont été déformés et amplifiés;

Considérant que !'Exécutif de la Communauté française invoque la jurisprudence qui reconnaît à l'autorité disciplinaire un pouvoir d'appréciation très large en ce qui concerne la nature et la gravité des faits; qu'il tire argument de la suspension de trois mois précédemment infligée à la requérante et qui «aurait dû inciter (celle-ci) à être particulièrement attentive à ses obligations professionnelles et à sa conduite»; qu'il ajoute que «la requérante reconnaît actuellement:

»---d'une part qu'elle a été suspendue du remboursement des soins infirmiers par l' IN AMI pour une période de 4 mois prenant cours le I 21I2186 et qu'elle n'a pas signalé à son employeur que pareille sanction lui avait été infligée ce qui constitue incontestablement une négligence grave,

>>---d'autre part qu'elle a remis des attestations de soins infirmiers non signées relatives aux mois d'août et septembre I 986 (et ce en date du I Ol I 2186) et qu'elle n'a pas signalé ce fait à l'administration, empêchant celle-ci de prendre les mesures nécessaires;»;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de la motivation de l'arrêté de !'Exécutif de la Communauté française que celui-ci n'a retenu que deux faits parmi ceux qui avaient été relevés par le conseil de l'aide sociale pour jusitifier la révocation, à savoir que, le 10 décembre 1986, la requérante a remis au secrétariat du centre public d'aide sociale des attestations de soins non signées pour les mois d'août et de septembre 1986 et qu'elle a négligé de signaler au centre public qu'elle avait été l'objet d'une sanction de l'Institut national d'assurance maladie-invalidité la suspendant du remboursement des soins infirmiers pour une durée de quatre mois à dater du 12 décembre 1986; que !'Exécutif a choisi d'interpréter les faits comme révélateurs d'une volonté de «blocage»;

Considérant que la délibération du 30 septembre 1986, par laquelle le conseil de l'aide sociale a infligé à la requérante une suspension de trois mois, se fonde, notamment, sur le fait que les toilettes des pensionnaires étaient mal effectuées; que, dans une lettre du 21 novembre 1986, la requérante, qui se savait menacée d'une sanction de la part de l'Institut national d'assurance maladie-invalidité pour le motif, notamment, qu'elle avait signé des attestations de soins pour des toilettes effectuées en méconnaissance de la nomenclature, a demandé au président du centre public d'aide sociale à pouvoir discuter de cette question; que le centre n'a réservé aucune suite à cette lettre; que la requérante a alors remis le IO décembre 1986 au secrétariat du centre public d'aide sociale des attestations de soins non signées pour les mois .d'août et septembre 1986; que.dans sa décision !'Exécutif de la Communauté française admet que l'attitude de la requérante <<peut s'expliquer par le souci . . . de ne pas s'exposer à une sanction INAM! étant donné que, par la peine de suspension préalablement infligée par le centre public d'aide sociale à l'intéressée, les soins auraient été reconnus mal dispensés ... »; que les circonstances de la cause portées à la connaissance du Conseil d'Etat ne suffisent pas pour établir que l'abstention de la requérante de signer les attestations de soins participant d'une «attitude de blocage volontaire»; que cette abstention étant un

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT -- 1989

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N° 33.114

Arrêts Nos 33.109 à 33.125

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de deux seuls faits retenus par !'Exécutif pour justifier l'acte attaqué, les motifs de celui-ci ne suffisent pas pour fonder son dispositif; que le moyen est fondé;

Considérant que l'annulation de la décision de !'Exécutif entraîne l'obligation pour celui-ci de statuer à nouveau sur le recours introduit contre la décision du conseil de l'aide sociale; que le Conseil d'Etat se substituerait à l'autorité de tutelle en se prononçant sur le recours dirigé contre cette décision,

(Annulation de l'arrêté de !'Exécutif de la Communauté française du 18 décembre 1987 rejetant le recours formé par Mireille Madant contre l'approbation tacite donnée par la députation permanente du conseil provincial du Luxembourg à la délibération du 23 décembre 1986 du conseil de l'aide sociale de Saint-Hubert révoquant la requérante de ses fonctions d'infirmière brevetée et de chef de service au home Herman - rejet de la requête pour le surplus - dépens à charge de la Communauté française).

N°s 33.115 et 33.116 ARRETS du 4 octobre 1989 (IIIe Chambre)

A.S.B.L. SOCIETE BELGE DES PHARMACIENS SPECIALISTES EN BIOLOGIE CLINIQUE et consort et MAGERUS: désistement.

N° 33.117 ARRET du 4 octobre 1989 (VIe Chambre)

MM. Tapie, Président du Conseil d'Etat, rapporteur, Martens et Hanotiau, conseillers, et Mendiaux, premier auditeur.

RICHARD . (Mes Detry et Geairain) c/ Communauté française

AGENTS ET FONCTIONNAIRES PUBLICS - Statut syndical - Questions qui doivent être soumises à la concertation - Généralités

Une circulaire qui n'introduit aucune règle nouvelle n'est pas soumise à la concertation. Tel est le cas lorsqu'elle se borne à rappeler les règles applicables ou des principfs de simple bon sens, ou à préciser une terminologie dans un but de clarté.

Vu la requête introduite le 26 avril 1988 par Jean-Louis Richard qui, en sa qualité de secrétaire national du secteur <<Ministères» de la Centrale générale des services publics (C.G.S.P.) et de membre du comité supérieur de concertation, secteur IX, «Ministère de /'Education nationale», demande l'annulation de la circulaire du 26 février 1988 du Secrétaire général du Ministère de !'Education nationale aux chefs des établissements d'enseignement primaire, secondaire, supérieur, artistique, spécial et de promotion sociale de l'Etat, aux chefs des centres P.M.S. de l'Etat et aux fonctionnaires de l'administration centrale;

Considérant qu'à la suite d'un accident mortel dont avait été victime une ouvrière d'entretien contractuelle au service de l'Institut d'enseignement supérieur de l'Etat à Bruxelles, eut lieu, le 11 février 1988, une réunion du comité supérieur, de.concertation, secteur IX, «Ministère de /'Education nationale»; qu'au cours de la discussion, les délégués de la C.G.S.P. soulignèrent qu'il n'existait pas de normes en matière de nettoyage des plafonds et des vitres, l'arrêté royal du 23 mai 1967 fixant les règles de calcul de la durée des prestations à prendre en considération pour les travaux de cuisine, de restaurant et d'entretien dans les établissements de l'Etat ne prévoyant rien en cette matière; que le requérant, en particulier, constata «qu'aucune circulaire n'a jamais traité de ce problème de nettoyage des vitres et des plafonds»; qu'il suggèra qu'un projet de réglementation soit «soumis à l'avis du comité de négociation du secteur IX via la commission paritaire qui (devait) se réunir prochainement»; qu'il demanda «que les autorités administratives prennent l'initiative d'adresser à tous les établissements d'enseignement de l'Etat une circulaire par laquelle interdiction serait faite d' encore distribuer aux membres du personnel d'entretien des tâches de nettoyage des vitres et des plafonds et ce, jusqu'à nouvel ordre»; qu'après discussion, le comité de concertation adopta l' «avis motivé» suivant: ·

.. «Le comité supérieur de concertation émet un avis positif quant au point ayant fait l'objet de la discussion, pour autant qu'une circulaire rappelant la réglementation générale pour la protection du travail soit adressée aux

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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chefs d'établissement, circulaire dont le contenu serait porté à la connaissance des membres du personnel concernés. Serait également insérée dans cette circulaire une mention par laquelle les mêmes chefs d'établissements se verraient dans l'obligation de postposer l'exécution des travaux à caractère dangereux, pour le cas où le matériel ad hoc leur ferait défaut et ce, jusqu'à acquisition dudit matériel.

»Une organisation syndicale, en l'occurrence la C.G.S.P., réserve son avis pour le motif qu'elle juge le contenu de cette circulaire insuffisant par rapport aux priorités de l'heure, des contingences budgétaires strictes limitant pour de nombreux établissements les possibilités d'achat d'un matériel adéquat»;

Considérant que, par la circulaire attaquée, le secrétaire général a entendu mettre en oèuvre l'avis précité;

Considérant que le requérant prend un premier moyen «de la violation de l'article 11, § 2, de la loi du 19 décembre 1974 organisant les relations entre les autorités publiques et les syndicats des agents relevant de ces autorités et del' article 39 del' arrêté royal du 28 septembre 1984 portant exécution de la loi, en ce que la circulaire qui fait l'objet de l'acte attaqué qui a trait à la sécurité, l'hygiène et l'embellissement des lieux de travail ... n'a pas été soumise au comité supérieur de concertation du secteur IX»;

Considérant que la loi du 19 décembre 1974 dispose comme suit en son article 11, § 2, modifié par la loi du 19 juillet 1983:

«Le Roi charge les comités de concertation qu' Il désigne, des attributions qui, dans les entreprises privées, sont confiées aux comités de sécurité, d'hygiène et d'embellissement des lieux de travail»;

que le Roi a exécuté cette disposition par l'article 39 de l'arrêté royal du 28 septembre 1984;

Considérant qu'aux termes de l'article 837, B, 1; du règlement général pour la protection du travail, le comité de sécurité, d'hygiène et d'embellissement des lieux de travail est chargé d'émettre un avis préalable: «sur tous les projets, mesures et moyens à mettre en oeuvre qui, directement ou indirectement, immédiatement ou à terme, peuvent avoir des conséquences sur la sécurité, l'hygiène ou la santé, en ce compris le choix ou le remplacement d'organismes, d'agents-visiteurs, de laboratoires, d'institutions, d'experts, de firmes, de services médicaux du travail, agréés en application des dispositions du présent règlement»;

Considérant que, dans son dernier mémoire, tout en convenant que «le contenu de la circulaire s'inspire des prescriptions du règlement général pour la protection du travail», le requérant cite quatre passages qui prouveraient que la circulaire «contient effectivement des directives qui s'adressent aux chefs d'établissement et aux membres du personnel intéressé» et qui dépassent la simple «iriformation destinée à rappeler aux différentes autorités à qui elle est adressée certaines dispositions du règlement général pour la protection du travail», notamment en ce qu'elle «consacre le fait que les chefs d'établissement soient les employeurs, alors que le véritable employeur est l'Etat»;

Considérant que les passages retenus par le requérant à l'appui de sa thèse sont les suivant:

«Théoriquement, les membres du personnel ouvrier d'entretien ne sont exposés à aucun risque particulier dans le cadre de leur activité normale.

»Le membre du personnel concerné exécute, sous l'autorité du chef d'établissement, les tâches qui lui incombent de par sa fonction et selon l'horaire qui lui est attribué.

»Le travailleur effectue donc ses prestations au lieu déterminé par le chef d'établissement et dans la limite de l'horaire.

» ...

»Outre les prescriptions du règlement général pour la protection du travail, il convient de prendre toutes les mesures de précautions utiles ou que le bon sens commande pour que les conditions du sécurité soient réunies au maximum, notamment, lorsqu'un membre du personnel effectue des travaux de nettoyage, d'entretien ou de réparation à l'extérieur des bâtiments (nettoyage des surfaces vitrées, par exemple).

» ...

»Au vu des textes réglementaires relatifs à la sécurité et à la santé du travailleur, on retiendra essentiellement les deux principes généraux suivants: ·

»a. l'employeur a l'obligation de veiller en bon père de famille à ce que le travail s'accomplisse dans des conditions convenables au point de vue de la sécurité et de la santé du travailleur.

»b. le travailleur al' obligation de s'abstenir de tout ce qui pourrait nuire à sa propre sécurité, soit à celle de ses collègues de travail, de l'employeur ou de tiers»;

Considérant qu'aucun des passages cités n'introduit une règle nouvelle; que les uns rappellent des règles applicables, les autres des principes de simple bon sens; que la désignation du chef d'établissement comme «employeur» ne paraît destinée qu'à utiliser, dans un but de clarté, la terminologie de la réglementation en matière de santé et de sécurité des travailleurs du secteur privé et nullement à modifier le statut d'organe de l'Etat du chef d'établissement; que si l'on peut comprendre que le requérant regrette que n'ait pas été suivie la double suggestion qu'il avait faite au comité supérieur de concertation du secteur IX de soumettre au comité de négociation du secteur IX un projet de réglementation destiné à combler une lacune de l'arrêté royal du 23 mai 1967 et d'adresser, en attendant, une circulaire interdisant jusqu'à nouvel ordre de faire effectuer par les membres du personnel d'entretien

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.117

Arrêts Nos 33.109 à 33.125

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des tâches de nettoyage des vitres et des plafonds, il ne résulterait pas, bien au contraire, de cette insuffisance de la circulaire attaquée qu'elle aurait, même partiellement, une portée réglementaire positive; que le moyen manque en fait;

Considérant que le requérant prend un second moyen «de la violation des articles 45 à 50 de l'arrêté royal du 28 septembre 1984 portant exécution de la loi et fixant les dispositions communes aux comités de concertation (procédure), en ce qu'aucune des modalités de procédure fixées par les dispositions susvantées et aucune des formalités qu'elles prescrivent n'a été respectée»;

Considérant que, faute de développement de ce moyen dans les écrits de procédure du requérant, il faut conclure qu'il se confond avec le premier,

(Rejet - dépens à charge du requérant).

N° 33.118 ARRET du 4 octobre 1989 (VIe Chambre)

CHARTIER: recours tardif.

N° 33.119

ARRET du 4 octobre 1989 (VIe Chambre) MM. Tapie, Président du Conseil d'Etat, rapporteur, Martens et Hanotiau, conseillers, et Charlier, premier auditeur.

DELFORGE (Me Roland) c/ Société coopérative Intercommunale d'Oeuvres sociales pour la région de Charleroi (Me Demine)

I. AGENTS ET FONCTIONNAIRES PUBLICS - Affectations et mutations - Contentieux

II. COMPETENCE DU CONSEIL D'ETAT - Contentieux de l'annulation - Droits subjectifs -Agents et fonctionnaires publics - Affectations

Le Conseil d'Etat est compétent pour connaître du recours en annulation de l'acte administratif par lequel il est mis fin à l'affectation d'un agent .

. . . Alors spécialement qu'aucun avantage barémique n'était attaché à cette fonction.

III. ASSOCIATIONS INTERCOMMUNALES - Tutelle - Annulation

IV. COMPETENCE DU CONSEIL D'ETAT - Contentieux de l'annulation - Recours préalable -Recours à l'autorité de tutelle - Généralités

L'article 20, § 2, de la loi du 22 décembre 1986 confère à l'autorité désignée par le règlement en la matière un pouvoir de tutelle générale et facultative. Il n'organise aucun recours à l'exercice préalable duquel serait subordonnée la recevabilité d'une requête en annulation fondée sur l'article 14 des lois coordonnées du 12 janvier 197 3. ·

V. AGENTS ET FONCTIONNAIRES PUBLICS - Entrée en service - Stage - Licenciement -Droits de la défense

VI. PROCEDURE NON CONTENTIEUSE - Droits de la défense - Cas où il faut les observer -Licenciement d'un stagiaire

L'invocation de raisons professionnelles motivant la décision de mettre fin prématurément à une période d'essai paraît exclure que cet acte soit une simple mesure d'ordre dictée seulement par l'intérêt du service et étrangère au comportement personnel de l'agent. Celui-ci aurait dû être préalablement entendu en raison du préjudice, en l'espèce au moins moral, que cette mesure ne pouvait manquer de lui causer.

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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FACUL îf DE DROIT BIBLIOTHÈQUE

N° 33.119

Vu la requête introduite le 19 août 1988 par Fernande Delforge qui demande l'annulation de la décision, qui lui a été notifiée le 21 juin 1988 par la société coopérative Intercommunale d'oeuvres sociales pour la région de Charleroi, de mettre fin à ses fonctions de responsable du nursing;

Considérant que la requérante a été nommée le 2 juillet 1979 en qualité d'infirmière, à titre définitif, dans les services de l 'Intercommunale d' oeuvres sociales pour la région de Charleroi où elle était entrée le 16 avril 1970; qu'avec son accord, elle a été affectée à dater du 1°' août 1986 à la division «Heureux Séjour», en qualité d'infirmière A2, avec le bénéfice du barème - inférieur - attaché à cette fonction; que, le 30 septembre 1987, elle a été informée que, dans la même division, elle était désignée en qualité de responsable du nursing pour une période d'essai de douze mois; que l'acte attaqué est relaté dans une lettre du 21 juin 1988 libellée en ces termes:

«Par notre lettre du 30 septembre 1987, nous avions décidé de vous désigner en qualité de responsable du nursing.

»A ce jour, nous nous voyons contraints, pour des raisons professionnelles, de mettre fin à cette susdite qualité.

»Vous continuerez donc à assumer vos fonctions d'infirmière d'unité A2 au sein de notre institution»;

Considérant que la partie adverse oppose à la demande un déclinatoire de juridiction; qu'elle «estime que, tout en postulant une annulation, la requête a pour objet véritable une contestation relative à un droit subjectif: l'acte attaqué consiste en une décision par laquelle l'autorité administrative refuse de reconnaître ou d'exécuter l'obligation corrélative au droit subjectif allégué, et qu'en outre, la requérante invoque comme moyen qu'en agissant comme elle l'a fait, la partie adverse a violé la règle de droit qui la soumet à cette obligation»;

Considérant que l'objet véritable du recours est l'annulation de l'acte administratif par lequel il a été mis fin à la désignation de la requérante comme responsable du nursing à la division «Heureux Séjour» et non l'exécution d'une obligation corrélative à un droit subjectif; qu'il n'est d'ailleurs pas contesté qu'aucun avantage barémique n'était attaché à la fonction de responsable du nursing; que le déclinatoire ne peut être retenu;

Considérant que la partie adverse soulève encore une «exceptio omissio medio» déduite de l'article 20 de la loi du 22 décembre 1986 relative aux intercommunales et des articles 2, § 2, et 5 de l'arrêté royal du 6 juillet 1979 (IX) délimitant les matières concernant l'organisation des pouvoirs subordonnés où une politique régionale différenciée se justifie;

Considérant qu'aux termes de l'article 20, § 2, de la loi du 22 décembre 1986: «Tout acte des organes de l'intercommunale qui viole la loi ou les statuts ou blesse l'intérêt général peut être suspendu ou annulé par l'autorité de tutelle»; que cette disposition confère à l'autorité désignée par le règlement en la matière un pouvoir de tutelle générale et facultative; qu'elle n'organise aucun recours à l'exercice préalable duquel serait subordonnée la recevabilité d'une requête en annulation fondée sur l'article 14 des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat; que l'exception ne peut être retenue;

Considérant que la partie adverse, sous le titre «Remarques préliminaires», soutient enfin que «seul le conseil d'administration ... a le pouvoir de nomination» et que «la décision de Monsieur Larose (c'est-à-dire l'acte attaqué) doit ... être considérée comme une mesure temporaire d'ordre intérieur qui ne constitue pas un acte administratif annulable»; qu'à l'appui de cette fin de non-recevoir elle fait valoir notamment que «la lettre du 30septembre1987, signée par le directeur des établissements non hospitaliers ... , ne constitue pas un acte administratif de nomination conforme au statut» et qu'«en outre, cette démarche implique une confusion entre la loi sur les contrats de travail et la notion de statut en ce qu'elle a introduit la notion «d'essai dans une fonction statutaire»», alors que «le statut des agents de l'Etat ne connaît que la notion de «stage»»;

Considérant que l'énoncé de cette argumentation ne permet pas de déterminer si la partie adverse entend présenter l'acte attaqué comme une simple mesure d'ordre ou comme le retrait d'un acte de désignation irrégulier; que, de toutes façons, l'exception est liée au fond et, en particulier, au premier moyen de la requête qui invoque un défaut de motif;

Considérant que la requérante prend un premier moyen «de l'erreur manifeste et de la violation du principe général de droit administratif «et audi alteram partem», et selon. lequel tout acte doit reposer sur des motifs objectifs, pertinents et légalement admissibles, en ce que l'acte attaqué est motivé uniquement par des «raisons professionnelles» non autrement précisées, puis plus tard par un rapport inconnu et à l'existence incertaine, enfin par une réorganisation, sans audition de la requérante, alors que les motifs défavorables à la requérante ne peuvent exister, et qu'elle eût dû pouvoir faire connaître son point de vue à leur propos»;

Considérant que la partie adverse répond, outre l'argumentation de ses «remarques préliminaires» relatées ci­dessus, que «la décision querellée ne constituepas une sanction disciplinaire» et que «les «raisons professionnelles» invoquées pour justifier la décision querellée peuvent tout aussi bien se rapporter aux nécessités d'une organisation interne qu'à l'absence, dans le chef de la requérante, des qualités requises pour assumer une fonction supérieure»;

Considérant qu'il ressort des termes mêmes du mémoire en réponse que la partie adverse ne peut ou ne veut exposer sans ambiguïté les «raisons professionnelles» qui l'ont conduite à mettre fin prématurément à la période d'essai dont elle avait elle-même fixé la durée à un an; que l'invocation de raisons professionnelles paraît

I

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.119

Arrêts Nos 33.109 à 33.125

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toutefois exclure qu'il ne soit agi d'une simple mesure d'ordre dictée seulement par l'intérêt du service et étrangère au comportement personnel de la requérante; que celle-ci aurait donc dQ être préalablement entendue en raison du préjudice, au moins moral, que cette mesure ne pouvait manquer de lui causer; que le premier moyen est fondé; que l'examen des autres moyens, à supposer qu'il soit possible à défaut de précision sur les motifs de l'acte attaqué, serait superflu,

(Annulation de la décision, notifiée le 21 juin 1988, par laquelle la société coopérative Intercommunale d' oeuvres sociales pour la région de Charleroi met fin aux fonctions de Fernande Delforge en tant que responsable du nursing - dépens à charge de la partie adverse).

N°s 33.120 et 33.121

ARRETS du 4 octobre 1989 (VIe Chambre)

MOUSSET et FAUTRE: désistement.

N° 33.122 ARRET du 4 octobre 1989 (VIe Chambre)

MM. Tapie, Président du Conseil d'Etat, rapporteur, Martens et Hanotiau, conseillers, et Mme Dagnelie, auditeur.

VAN HEMELEN c/ Régie des postes - Partie intervenante: Lepage (Me Gehlen)

AGENTS DE L'ETAT - Carrière - Promotion (réforme du 16 mars 1964) - Promotion en niveau 1: avis motivé du conseil de direction - Généralités

Entre deux candidats ayant le signalement «très bon», la promotion a lieu au choix. Le ministre n'est pas tenu de suivre l'avis et les propositions du conseil de direction.

Si, en l'espèce, le conseil de direction a arrêté à l'unanimité un classement final où le requérant figure immédiatement avant le candidat choisi par le ministre, il ne s'ensuit pas une preuve ni même un indice que la promotion soit entachée d'arbitraire.

Aucun élément propre au dossier ne permet de penser qu'un motif d'ordre politique ait déterminé le choix du ministre.

Vu la requête introduite le 6 octobre 1988 par Alfred Van Hemelen qui demande l'annulation de l'arrêté ministériel du 9 août 1988 nommant Roland Lepage au grade de conseiller dans les services centraux de la Régie des Postes;

Vu le rapport de Mme Dagnélie, auditeur au Conseil d'Etat;

Vu l'ordonnance du 20 mars 1989 ordonnant le dépôt au greffe du dossier et du rapport;

Considérant que les faits de la cause P.euvent être résumés comme suit:

1. La vacance d'un emploi qui correspond au grade de conseiller à la direction 2.3.1. est portée à la connaissance du personnel par la liste 3.2.2.2./20 du 1er juin 1988.

2. Le requérant pose sa candidature.

3. Le conseil de direction examine les candidatures lors de sa réunion du 16 juin 1988. Des propositions de nominations, dont l'une est établie en faveur du requérant, sont publlées par la liste 3.2.2.2./63 du 20 juin 1988. Une réclamation introduite contre ces propositions est examinée et rejetée par le conseil de direction le 11 juillet 1988.

4. Par arrêté ministériel du 9 août 1988, Roland Lepage est nommé au grade de conseiller. Par décision ministérielle du même jour, il est affecté à la direction 2.3.1.

5. Ces nomination et affectation sont publiées par la liste 3.2.2.2./87 du 12 août 1988;

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.109 à 33.125 Page 15 N°s 33.123 et 33.124

Considérant que, dans un moyen unique, le requérant fait valoir que la nomination attaquée viole l'article 72, § 3, de l'arrêté royal du 2 octobre 1937 portant le statut des agents de l'Etat et l'article 6 de la Constitution en ce que l'agent nommé n'a ni un grade, ni une ancienneté, ni des titres comparables aux siens; que, développant ce moyen, il écrit ce qui suit:

«1. M. Lepage R. n'a ni le grade ni l'ancienneté du réclamant. Celui-ci est en effet inspecteur principal, chef de service depuis le 1.8.81 (rang 12) et son ancienneté de niveau date du 1.5.70 alors que le fonctionnaire nommé n'est que du rang 11 et son ancienneté de niveau commence le 1.1.78.

»2. Le requérant a exercé les fonctions de conseiller à la direction 2.3.1. du 17.12.84 au 31.8.88, d'une façon ininterrompue et à la pmfaite satisfaction de tous en remplacement du fonctionnaire désigné (M. Grymomprez), malade pendant toute cette période.

»M. Lepage R. ne peut pas faire état d'un tel titre.

»3. Le conseil de direction a par deux fois choisie le requérant comme candidat à l'emploi vacant (voir annexes 3 et 5) en cas de nomination d'un candidat unilingue français, comme ce fut le cas.

»Quand on sait que le conseil de direction est composé de personnalité venant d'horizons politiques différents et possédant des connaissances techniques diverses, il faut bien reconnaître que faire l'unanimité sur un nom n'est pas tâche facile et qu'il faut maintenant des capacités techniques hors du commun pour être désigné comme candidat retenu.

»Dans le cas présent, la candidature de M. Lepage R. n'est même pas évoquée alors que celle du requérant est retenue les deux fois. Rien que ce fait prouve à suffisance la supériorité du réclamant sur celle du fonctionnaire finalement nommé»;

Considérant que l'intervenant avait présenté sa candidature «dans la forme et le délai ... fixés par le Ministre», au voeu de l'article 72, § 3, de l'arrêté royal du 2 octobre 1937; qu'en tant qu'il invoque la violation de cette disposition, le moyen manque en fait;

Considérant qu'il se déduit des développements que le requérant a consacré au moyen dans sa requête et dans son dernier mémoire qu'en invoquant la violation de l'article 6 de la Constitution, il reproche essentiellement à l'acte attaqué d'avoir méconnu le principe d'égalité en sous-estimant de façon arbitraire ses titres et mérites et en surestimant de même ceux de l'intervenant;

Considérant que le requérant et l'intervenant avaient tous deux le signalement «très bon»; que la promotion avait dès lors lieu au choix; que le ministre n'était nullement tenu de suivre l'avis et les propositions du conseil de direction; que s'il est vrai que celui-ci a, au cours de sa réunion du 16 juin 1988, arrêté à l'unanimité un classement final des candidats où le requérant figure en n° 2 et l'intervenant en n° 3, il ne s'ensuit pas une preuve ni même un indice que la promotion de ce dernier soit entachée d'arbitraire alors que si, sur les sept membres du conseil, trois (MM. Vanbergen, Becco et Vankeirsbilck) avaient classé le requérant avant l'intervenant, quatre (MM. Herdewijn, Debraekeleer, Pirson et Gillet) avaient en revanche fait le choix inverse; qu'aucun élément propre au dossier ne permet de penser qu'un motif d'ordre politique ait déterminé le chois du ministre; qu'en tant qu'il invoque la violation de l'article 6 de la Constimtion, le moyen manque en fait,

(Rejet - dépens à charge du requérant et de l'intervenant).

N°8 33.123 et 33.124

ARRETS du 4 octobre 1989 (VIe Chambre) MM. Tapie, Président du Conseil d'Etat, rapporteur, Martens et Hanotiau, conseillers, et Mme Dagnelie, auditeur.

n° 33.123 - BASTIEN n° 33.124 - RIGA

c/ Régie des postes

RETRAIT DES ACTES DES AUTORITES ADMINISTRATIVES - Conditions du retrait - Délai

En disposant à !'article 19 des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat que les recours sont soumis à la section d'administration dans les délais déterminés par le Roi, le législateur a imposé au Roi !'obligation de fixer de tels délais, dans le but de mettre un terme au droit que la loi confère aux administrés d'engager, devant le Conseil d'Etat, des procédures susceptibles d'entraver le fonctionnement des services publics. En permettant le recours auprès du Conseil d'Etat dans ce délai, le législateur a nécessairement, pendant ce même

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N°s 33.123 et 33.124

Arrêts Nos 33.109 à 33.125

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délai, permis à l'autorité administrative de réexaminer sa décision et, par conséquent, de rapporter la décision qui, irrégulière, serait annulable.

Si le Conseil d'Etat ne peut annuler un acte administratif entaché d'excès de pouvoir lorsque cet acte est déféré à sa censure après l'expiration du délai fixé, il n'appartient pas, a fortiori, à l'autorité administrative de retirer, même pour cause d'excès de pouvoir, un acte administratif générateur de droits, une fois qu'est venu à expiration le délai fixé pour l'introduction d'un recours devant le Conseil d'Etat, sauf si l'acte est entaché d'une irrégularité telle qu'il y a lieu de le tenir pour inexistant, s'il a été pris à la suite de manoeuvres frauduleuses ou si une disposition légale expresse autorise ce retrait.

N° 33.123 Vu la requête introduite le 17 novembre 1988 par Cécile Bastien, percepteur des postes A, qui demande

l'annulation de l'arrêté ministériel du 29 juillet 1988 rapportant l'arrêté ministériel du 29 juillet 1987 qui fixe au 1er mars 1986 la date de sa prise de rang pour l'avancement de grade et de traitement;

Considérant que les faits de la cause peuvent être résumés comme suit:

1. Le 7 février 1986, l'Administrateur général de la Régie des Postes expose au ministre que les deux emplois correspondant au grade de percepteur des postes A (moniteur), vacants à la direction générale 6, doivent être occupés de toute urgence car une session de formation professionnelle va commencer prochainement. Il propose d'y affecter provisoirement les chefs de section André Riga et Cécile Bastien.

Cette proposition est approuvée par le ministre le 14 février 1986 et entérinée par le conseil de direction lors de sa séance du 10 mars 1986.

2. Au cours de la même réunion, le conseil de direction examine les candidatures aux emplois correspondant au grade de percepteur des postes A (moniteur, rang 25). Des propositions de nominations, établies notamment en faveur d'André Riga et de Cécile Bastien, sont publiées par la liste 3.2.2.2./31 du 9 avril 1986.

3. Par arrêté ministériel du 26 juin 1986, Cécile Bastien est promue au grade de percepteur des postes A, avec ancienneté de grade au 1er août 1986. Par décision ministérielle du même jour, elle est affectée à la direction générale 6 (formation professionnelle).

4. A la suite de la publication de la note de service 3.2.2.2./1-3 du 31 décembre 1986 portant sur l'application de l'article 10 de l'arrêté royal du 8 août 1983 relatif à l'exercice d'une fonction supérieure dans les administrations de l'Etat, la requérante introduit, le 7 janvier 1987, une demande de révision de son ancienneté dans le grade de percepteur des postes A.

5. Par arrêté ministériel du 29 juillet 1987, la prise de rang de l'intéressée pour l'avancement de grade et de traitement dans le grade considéré est fixée au 1er mars 1986. Cet acte est notifié à la requérante le 10 septembre 1987 au plus tard.

6. Le 29 juillet 1988, l'arrêté pris un an plus tôt est rapporté pour le motif suivant:

«Considérant que Mme Bastien C.M.G., épouse Lannoy, ne réunissait pas toutes les conditions requises au moment de sa nomination au grade de percepteur des postes A pour pouvoir bénéficier d'une rétroactivité, conformément aux dispositions de l'article 10 de l'arrêté royal du 8 août 1983 précité».

7. Cette décision, qui constitue l'acte attaqué, est notifiée à la requérante le 3 octobre 1988. Les motifs du retrait y sont énoncés en ces termes: « ... suite à un récent échange de notes avec la Fonction publique, il appert que «sans désignation pour l'exercice d'une fonction supérieure conformément au chapitre 1°' de l'arrêté royal du 8 août 1983, il ne peut être question d'application de l'article 10»».

«Etant donné que Monsieur Riga André et Madame Bastien Cécile n'ont pas fait l'objet d'une installation officielle par lettre de désignation, en l'occurrence la fiche Z63, les arrêtés ministériels du 29 juillet 1987 par lesquels les prénommés ont bénéficié des dispositions de l'article JO, ont été rapportés par arrêtés ministériels du 29 juillet 1988»;

Considérant que la requérante prend un moyen unique de l'illégalité du retrait de l'arrêté ministériel du 29 juillet 1987, opéré alors que cet acte était devenu définitif;

Considérant que la partie adverse répond que faute d'avoir fait «/'objet d'une désignation officielle en fonctions supérieures par le biais d'une fiche Z63», la requérante ne peut être considérée comme ayant exercé de telles fonctions dans des conditions permettant de la faire bénéficier de l'article 10 de l'arrêté royal du 8 août 1983 relatif à l'exercice d'une fonction supérieure dans les administrations de l'Etat, que l'arrêté rapporté n'était pas créateur de droit mais purement récognitif et qu'il pouvait donc être retiré au-delà du délai de 60 jours;

Considérant que l'arrêté royal du 8 août 1983 dispose comme suit en son article 10:

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.109 à 33.125 Page 17 N° 33.125

<<L'exercice d'une fonction supérieure ne confère aucun titre à une nomination définitive au grade de cette fonction.

»Cependant, si l'agent est promu au grade correspondant à l'emploi qu'il a occupé sans interruption et s'il est affecté à cet emploi, il obtient une prise de rang pour!' avancement de traitement et l'avancement de grade à la date depuis laquelle il occupe continûment ledit emploi, sans que cette date puisse remonter au-delà ni de la date à laquelle l'intéressé a rempli toutes les conditions requises par le statut des agents de l'Etat pour être promu au grade de l'emploi auquel il est affecté, ni de la date à laquelle cet emploi s'est trouvé vacant»;

Considérant qu'en disposant à l'article 19 des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées par arrêté royal du 12 janvier 1973, que les recours sont soumis à la section d'administration «dans les délais déterminés par le Roi», le législateur a imposé au Roi l'obligation de fixer de tels délais, dans le but de mettre un terme au droit que la loi confère aux administrés d'engager, devant le Conseil d'Etat, des procédures susceptibles d'entraver le fonctionnement des services publics (Rapport au Régent précédant l'arrêté du Régent du 23 août 1948 déterminant la procédure devant la section d'administration du Conseil d'Etat); que l'article 4 de l'arrêté du Régent du 23 août 1948 dispose que les recours visés à l'article 9 de la loi (article 14 des lois coordonnées) sont prescrits soixante jours après, selon le cas, la publication, la notification ou la connaissance de l'acte; qu'en permettant le recours auprès du Conseil d'Etat contre les actes individuels dans ce délai, le législateur a nécessairement, pendant ce même délai, permis à l'autorité administrative de réexaminer sa décision et, par conséquent, de rapporter la décision qui, irrégulière, serait annuable; que si le Conseil d'Etat ne peut annuler un acte administratif entaché d'excès de pouvoir lorsque cet acte est déféré à sa censure après l'expiration du délai fixé, il n'appartient pas, a fortiori, à l'autorité administrative de retirer, même pour cause d'excès de pouvoir, un acte administratif générateur de droits, une fois qu'est venu à expiration le délai fixé pour l'introduction d'un recours devant le Conseil d'Etat, sauf si l'acte est entaché d'une irrégularité telle qu'il y a lieu de le tenir pour inexistant, s'il a été pris à la suite de manoeuvres frauduleuses ou si une disposition légale expresse autorise ce retrait;

Considérant que l'arrêté ministériel du 29 juillet 1987, en fixant au 1er mars 1986 la prise de rang de la requérante pour l'avancement de traitement et l'avancement de grade, a modifié la situation juridique de l'intéressée et créé un droit à son profit; que cet arrêté n'était entaché d'aucune fraude; qu'il ne l'était pas davantage d'une irrégularité telle qu'il dût être tenu pour inexistant; que la fiche Z63, dont l'absence en l'espèce exclurait, selon la partie adverse, l'application de l'article 10 de l'arrêté royal du 8 août 1983, apparaît, non comme le seul mode de preuve de la désignation d'un agent pour l'exercice de fonctions supérieures, mais comme un document destiné à faciliter cette preuve en ce qu'il acte les éléments essentiels de la désignation; que, le 14 février 1986, le Secrétaire d'Etat aux Postes, Télégraphes et Téléphones a approuvé une proposition de l'administrateur général tendant à ce que la requérante et André Riga «soient utilisés provisoirement (à la direction générale 6) en attendant de recueillir une nomination au grade de percepteur des postes A (moniteur)» dans deux emplois, alors vacants, de ce grade; que la désignation des deux intéressés dans des emplois parfaitement identifiés pour lesquels ils pouvaient prétendre à une nomination qui leur a d'ailleurs été accordée n'a nul besoin d'être plus amplement prouvée; qu'en retirant son arrêté du 29 juillet 1987, le ministre a excédé ses pouvoirs; que le moyen unique est fondé;

(Annulation de l'arrêté ministériel du 29 juillet 1988 rapportant l'arrêté ministériel du 29 juillet 1987 qui fixe au 1er mars 1986 la date de la prise de rang de Cécile Bastien pour l'avancement de grade et de traitement - publication de l'arrêt par extrait dans les mêmes formes que l'arrêté ministériel annulé - dépens à charge de la Régie des Postes).

* * * L'arrêt n° 33.124 est identique au n° 33.123.

N° 33.125 ARRET du 4 octobre 1989 (VIe Chambre)

PIERRE: recours sans objet à la suite du retrait de l'acte attaqué.

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.136 à 33.138 Page 1

N° 33.136

ARRET du 5 octobre 1989 (Vue Chambre)

N° 33.136

c(

M. Tacq, président de chambre, rapporteur, Mmes Vrints et Tulkens, conseillers, et M. Hubregtsen, premier auditeur.

VAN MARCKE (Mes Verschuere et Leysen) c/ Députation permanente du conseil provincial de Flandre orientale (M. De Baets)

PROCEDURE - Règles spéciales à la demande de suspension - Requête n'invoquant pas la violation des articles 6, 6bis et 17 de la Constitution

Il résulte des termes mêmes de l'article 17 des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat, qu'une demande de suspension de l'exécution d'un acte administratif n'est pas recevable si la violation des articles 6, 6bis ou 17 de la Constitution n'est pas invoquée dans le recours en annulation de cet acte. Par le «recours» visé au paragraphe 1a et, implicitement au paragraphe 2, de cette disposition, il ne faut pas entendre le recours en suspension, mais bien le recours en annulation prévu à l'article 14 des mêmes lois coordonnées. Ils' ensuit que la demande de suspension n'est pas recevable lorsque la violation des articles 6, 6bis ou 17 de la Constitution est invoquée dans la requête en suspension, mais non dans la requête en annulation.

Vu la requête introduite le 1er février 1989 par Karel Van Marcke tendant à l'annulation de l'arrêté royal du 17 mars 1988 par lequel la députation permanente du conseil provincial de Flandre orientale autorise las.a. Amsto et la s.a. Vinesco à procéder au lotissement, en 38 parcelles, de fonds sis à Kruishoutem, entre la Kasteeldreef, la Wandeldreef et la Tjollevelddreef;

Vu la requête introduite le 1er septembre 1989 par laquelle Karel Van Marcke demande la suspension de l'exécution du susdit arrêté de la députation permanente du conseil provincial de Flandre orientale;

Considérant qu'il y a lieu au préalable de statuer sur la demande de suspension;

Considérant qu'à l'appui de sa demande de suspension, le requérant invoque la violation des articles 6 et 6bis de la Constitution; qu'il allègue que l'exécution immédiate de l'arrêté du 17 mars 1988 de la députation permanente du conseil provincial de Flandre orientale constitue une violation <lesdits articles de la Constitution et que cet arrêté lui-même est fondé sur une telle violation; que le requérant ne conteste pas qu'aucun des moyens invoqués à l'appui du recours en annulation contre cet arrêté ne concerne la violation des articles 6, 6bis ou 17 de la Constitution; qu'il allègue qu'il suffit que cette violation soit invoquée à l'appui de la demande de suspension, que cela appert du libellé des paragraphes 1er et 2 de l'article 17 des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat;

Considérant que l'article 17, rétabli dans les lois coordonnées sur le Conseil d'Etat par l'article 15 de la loi du 16 juin 1989 portant diverses réformes institutionnelles, s'énonce comme suit:

«§ r·. A la demande de la partie requérante, la Chambre compétente pour trancher l'affaire au fond, peut ordonner à l'unanimité, par un arrêt motivé, la suspension de l'exécution de l'acte ou du règlement attaqué si le recours invoque la violation des articles 6, 6bis et 17 de la Constitution.

»§ 2. La suspension de l'exécution ne peut être décidée que si des moyens sérieux fondés sur la violation des articles précités de la Constitution sont invoqués et à condition que l'exécution immédiate de l'acte ou du règlement attaqué risque de causer un préjudice grave difficilement réparable.

»§ 3. La demande de suspension de l'exécution est introduite par un acte distinct qui est joint à la requête en annulation. La demande contient un exposé des faits de nature à établir que l'exécution immédiate de l'acte ou du règlement attaqué risque de causer un préjudice grave difficilement réparable»;

Considérant que la disposition légale précitée prévoit la faèulté, pour le requérant qui poursuit l'annulation d'un acte administratif pour violation des articles 6, 6bis et 17 de la Constitution, de demander la suspension dudit acte; qu'il résulte des termes mêmes de l'article de la loi qu'une demande de suspension de l'exécution d'un acte administratif n'est pas recevable si la violation des articles 6, 6bis ou 17 de la Constitution n'a pas été invoquée dans le recours en annulation de cet acte; que par le «recours» visé au paragraphe 1er et, implicitement au paragraphe 2 de l'article 17 des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat, il ne faut pas entendre «le recours en suspension», ainsi que le prétend le requérant, mais bien le recours en annulation prévu à l'article 14 des mêmes lois coordonnées;

Considérant que la demande de suspension ne satisfait pas à la condition susmentionnée et n'est pas recevable, ne fût-ce que pour ce seul motif; que la question de savoir si une demande de suspension de l'exécution

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.136

Arrêts Nos 33.136 à 33.138

Page 2

de l'acte attaqué peut encore être jointe aux recours en annulation introduits avant l'entrée en vigueur de la loi du 16 juin 1989, est sans intérêt en l'espèce et ne doit dès lors pas être examinée,

(Rejet de la demande de suspension de l'exécution de l'arrêté du 17 mars 1988 de la députation permanente du conseil provincial de Flandre orientale).

N° 33.137

ARRET du 6 octobre 1989 (IIIe Chambre) MM. Van Aelst, président de chambre, François, rapporteur, et Mme Thomas, conseillers, et M. Hoeffler, premier auditeur.

COLLARD et consorts (Me Lebrun) c/ Commune d'Esneux (Me Laguesse) et Région wallonne (Mes Gillet et Lambert)

j I. BATISSE ET LOTISSEMENT - Recours au 'conseil d'Etat - Délai - Tiers - Point de départ

1. Le délai de recours en annulation d'un permis de bâtir ne commence pas à courir ,1 au moment où le requérant en a connaissance par une lettre del' administration communale,

11 lorsque cette lettre l'a induit en erreur sur l'ampleur du projet. 2. Des travaux de remblai n'impliquent pas qu'un projet de construction soit mis à

exécution.

II. BATISSE ET LOTIS,SEMENT. - Recours au Conseil d'Etat - Intérêt~ Tiers en général

Faute d'être un voisin immédiat, celui qui habite 'Sur la rive d'un cours d'eau opposée à celle qui fait l'objet d'un permis de bâtir a intérêt à poursuivre t annulation de ce permis si de sa demeure il voit les lieux litigieux.

III. BATISSE ET LOTISSEMENT - Procédure administrative d'octroi des permis - Publicité -Règles spéciales à la Région wallonne - Permis de bâtir (1 et 2)

IV. AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - Effets des plans - Effets dans le temps (2)

.1. L'exception à l'obligation de pub/icité prévue par l'article 247, 7°, .du code wallon lorsque les ateliers sont situés en zone industrielle ou artisanale se réfère à une affectation arrêtée par des normes juridiques et non à une situation de fait, à une ·appellation sans portée, à· un projet de plan de secteur devenu caduc, aux intentions de l'administration en matière d'aménagement ou à une libre appréciation de la commune même à laquelle des obligations sont faites. '

2. Si le défaùt de publicité qui affecte le permis de bâtir, pris avant l'entrée en vigueur du plan de secteur, n'affecterait plus des décisions identiques que l'administration pourrait vouloir prendre (lprès cette entrée en vigueûr si le recours en annulation du permis de bâtir aboutit à une annulation, une telle circonstance ne suffit pas pour entraîner la perte de l'intérêt à un recours dès lors qu'il n'est pas démontré que l'administration, soucieuse du seul bon aff!énagement et, par conséquent, exèmpte de toute tentation de maintenir un état de fait accompli pour cela seul qu'elle en a été l'auteur et bien qu'il ait été accompli en violation de la loi, en outre mieux avertie des inconvénients des travaux par les protestations et les procédures auxquelles ils ont donné lieu à défaut de l'être, comme il se devait, par la voie d'une enquête publique, reproduirait intégralement, sur le vu des dispositions relatives aux zones industrielles dont elle n'a pas eu à tenir compte, la. décision attaquée.

v: PROCEDURE - Réouvertur.e des débats

Vu la requête introduite le 6 mai 1987, complétée le 11 mai 1987, par Hubert Collard qui demande l'annulation de «l'arrêté du collège des bourgmestre et échevins de la commune d'Esneux (prqvince et arrondis­sement de Liège) du 26.11.1986 accordant à la S.A. Soreti le droit de réaliser un talutage à Méry ( cad. Son A 878n, 878t18, 878a2, Son C 9g3).»;

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.136 à 33.138 Page 3 N° 33.137

Vu la requête introduite le 22 juin 1987 par Hubert Collard qui demande l'annulation de «l'arrêté du collège des bourgmestre et échevins de la commune d'Esneux délivrant à la Sprl Elstner, un permis de bâtir en vue de la modification du relief du sol et de la construction de bâtiments industriels et d' entrep6ts sis à Méry au Parc Artisanal du Monceau, et pris le 5 mars 1987»;

Vu la requête introduite le 22 juin 1987 par Emile Lamy et l'association sans but lucratif Comité des quartiers de Méry qui demandent l'annulation de «1' arrêté du collège des bourgmestre et échevins de la commune d'Esneux du 14 mai 1987, délivrant à la S.A. Soreti un permis de bâtir en vue de la construction d' entrep6ts et de bureaux d'entreprise sis à Méry, au lieu dit du Parc Artisanal du Monceau.»;

Vu l'ordonnance du 16 décembre 1988 joignant les causes et chargeant le membre de l'auditorat désigné par M. l'auditeur général de mesures d'instruction;

Considérant qu'en un lieu dit parc artisanal du Monceau, à Méry, la commune d'Esneux délivra, le 18 septembre 1984, un permis de bâtir à la société anonyme Soreti pour construire des entrepôts et bureaux d'entreprise; que, ce permis ayant été annulé par l'arrêt du Conseil d'Etat n° 27.128 du 14 novembre 1986, la société demanda un nouveau permis qui fut accordé le 12 mai 1987; que cet acte est attaqué par E. Lamy et l'association sans but lucratif Comité des quartiers de Méry (A. 36.314); que la société anonyme Soreti avait obtenu, le 26 novembre 1986, un permis de bâtir pour réaliser un «talutage» au parc du Monceau; que ce permis fut attaqué par H. Collard les 6 et 11 mai 1987 (A. 36.041); que, le 5 mars 1987, la société de personnes à responsabilité limitée Elstner obtint un permis de bâtir pour construire dans le même parc et pour y faire les aménagements nécessaires à l'établissement d'un entrepôt de charbon, de gaz et de matériaux de construction; que les travaux de modification du relief du sol qui sont plusieurs fois mentionnés dans ces actes sont à mettre en relation avec la circonstance que les lieux litigieux, situés au bord de l'Ourthe et exposés aux inondations, ne peuvent être mis à l'abri qu'à l'aide de terrassements dont les requérants craignent qu'ils ne réduisent la surface d'expansion des eaux en cas de crue;

Considérant que les parties adverses déduisent une fin de non-recevoir de la tardiveté des recours A. 36.041 et A. 36.315;

Considérant, sur le recours A. 36.041, que dans une lettre du conseil du requérant du 7 janvier 1987, la commune mentionne les «demandes de la S.A. Soreti tendant à obtenir le permis de bâtir pour un remblaiement de terrain et un projet de talutage dans le parc artisanal du Monceau» et ajoute qu'«En ce qui concerne les demandes de permis de bâtir ( ... ) le projet de talutage a été octroyé par le collège échevinal» le 26 novembre 1986; que si l'expression est impropre, elle n'en est pas moins claire; que toutefois, sur la fiche de renseignements qui accompagnait cette lettre, les travaux annoncés occupaient une aire de 123 mètres sur 14, dimensions largement dépassées d'après les plans; qu'ainsi l'allégation exprimée par le requérant dans son dernier mémoire selon laquelle il a été trompé sur l'ampleur du projet et a pu ne pas attaquer un permis créant un risque d'inondation moindre que le risque réel n'est pas dénuée de fondement; que la circonstance, invoquée par la partie adverse dans son dernier mémoire, qu'au cours d'une réunion du 19 février 1987 le requérant aurait vu l'acte attaqué, ne suffit pas pour garantir que la commune aurait à cette occasion attiré son attention sur l'erreur en laquelle elle l'avait elle-même induit; que le recours est recevable; qu'il y a lieu de rouvrir les débats afin de poursuivre l'instruction de l'affaire;

Considérant, sur le recours A. 36.315, que la partie adverse soutient que le requérant a constaté au début du mois d'avril 1987 que les travaux étaient entrepris et n'a pas fait diligence pour prendre aussitôt connaissance du permis; que ces travaux ne consistaient toutefois qu'à exécuter des «remblais»; que même si le requérant avait des raisons de s'attendre à l'ouverture d'un chantier de construction, la modification du relief du sol n'était pas de nature à la lui révéler; que son conseil signale d'ailleurs sans être contredit, dans une lettre du 5 mai 1987 adressée à la commune, qu'il a interrogé celle-ci sur un éventuel permis le 23 février 1987 sans obtenir de réponse, qu'il s'est alors présenté en ses bureaux et que le dossier n'a pu être retrouvé; que si les travaux de remblai exécutés ont été, comme l'indique le dernier mémoire de la partie adverse, plus importants que ceux couverts par un permis antérieur, à savoir le permis précité du 26 novembre 1986, de tels travaux n'impliquent pas qu'un projet de construction soit mis à exécution; que la partie adverse soutient, encore vainement dans son dernier mémoire que le délai de recours n'a pas commencé à courir en l'espèce au moment où le requérant a pu connaître les plans, parce que ceux-ci n'étaient pas nécessaires pour l'informer des travaux de remblai qui seuls pouvaient le gêner en raison du risque d'inondation qu'ils créaient, et que ces plans n'étaient donc de nature à le renseigner qu'au sujet d'une construction à laquelle, faute d'être un voisin immédiat, il n'avait pas d'intérêt à s'opposer; qu'en effet, si le requérant habite sur la rive opposée, il n'en voit pas moins de sa demeure les lieux litigieux;· que le recours est recevable;

Considérant que les requérants Lamy et Comité des quartiers de Méry font grief au permis du 14 mai 1987, et le requérant Collard au permis du 5 mars 1987, d'avoir été délivrés sans qu'ait été organisée la publicité prescrite par les articles 246 et 247, 7° du Code wallon de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme;

Considérant que les parties adverses invoquent dans les derniers mémoires le fait nouveau que le plan de secteur de Liège, approuvé par l'arrêté de !'Exécutif de la Région wallonne du 26 novembre 1987, classe les lieux litigieux en zone industrielle, alors que les dispositions invoquées au moyen ne prescrivent pas dans une telle zone

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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les mesures de publicité auxquelles elles ont trait; qu'elles exposent que l'administration avait à régler sa conduite d'après cette affectation nouvelle bien que le plan de secteur ne ft1t pas encore publié;

Considérant que si les mesures de publicité prescrites par les dispositions invoquées au moyen ne doivent pas être prises lorsque des travaux tels que ceux qui font !'objet de l'acte attaqué sont situés dans une zone industrielle, l'approbation du plan de secteur n'a pu déterminer ou justifier l'adoption des actes attaqués puisqu'elle leur est postérieure; qu'il y a lieu toutefois d'examiner d'office l'incidence de ce plan sur la recevabilité des recours; que cette question de recevabilité est liée au fond;

Considérant que les mesures de publicité prévues aux articles 249, 250 et 251 du Code wallon sont prescrites, aux termes de l'article 247, 7°, pour «la construction ou la reconstruction d'ateliers ayant une swface de plus de 400 m2 et la transformation d'ateliers ayant pour effet d'en porter la swface à plus de 400 m2 pour autant que ces ateliers ne soient pas situés dans une zone industrielle ou,artisanale»; qu'il n'est pas contesté que ces dimensions étaient atteintes, ni que ces mesures de publicité n'ont pas été prises; que l'exception prévue par le Code lorsque les ateliers sont situés en zone industrielle ou artisanale se réfère à une affectation arrêtée par des normes juridiques et non à une situation de fait, à une appellation sans portée, à un projet de plan de secteur devenu caduc, aux intentions de l'administration en matière d'aménagement ou à une libre appréciation de la commune même à laquelle des obligations sont faites; que si le dernier mémoire de la deuxième partie adverse fait justement valoir que le défaut de publicité qui affecte les actes attaqués, pris avant l'entrée en vigueur du plan de secteur, n'affecterait plus des décisions identiques que !'administration pourrait vouloir prendre après cette entrée en vigueur si les recours aboutissaient à une annulation, une telle circonstance ne suffit pas pour entraîner la perte de l'intérêt à un recours car il n'est pas démontré que l'administration, soucieuse du seul bon aménagement et, par conséquent, exempte de toute tentation de maintenir un fait accompli pour cela seul qu'elle en a été l'auteur et bien qu'il ait été accompli en violation de la loi, en outre mieux avertie des inconvénients des travaux par les protestations et les procédures auxquelles ils ont donné lieu à défaut de l'être, comme il se devait, par la voie d'une enquête publique, reproduirait intégralement, sur le vu des dispositions relatives aux zones industrielles dont elle n'a pa eu à tenir compte, les décisions attaquées; que le moyen est recevable et fondé;

Considérant qu'il n'y a pas lieu d'examiner les autres moyens, faute qu'ils puissent conduire à une annulation plus étendue,

(Réouverture des débats en ce qui concerne la requête A. 36.041/III-9922 introduite par Hubert Collard -annulation de l'arrêté du collège des bourgmestre et échevins de la commune d'Esneux du 5 mars 1987 délivrant à la société de personnes à responsabilité limitée Elstner un permis de bâtir en vue de la modification du relief du sol et de la construction de bâtiments industriels et d'entrepôts à Méry au Parc Artisanal du Monceau, et de l'arrêté du collège des bourgmestre et échevins de la commune d'Esneux du 14 mai 1987 délivrant à la société anonyme Soreti un permis de bâtir en vue de la construction d'entrepôts et de bureaux d'entreprise à Méry, au Parc Artisanal du Monceau - dépens afférents aux requêtes introduites, par Hubert Collard, Emile Lamy et l'A.S.B.L. Comité des quartiers de Méry à charge des parties adverses).

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ARRET du 6 octobre 1989 (IIIe Chambre) MM. Van Aelst, président de chambre, François, rapporteur, et Mme Thomas, conseillers, et M. Hoeffler, premier auditeur.

GOENEN et consorts (Mes de Briey et Rigaux) c/ Commune de Waterloo (Mes Neuray et Antoine) et Région wallonne (Mes Gillet et Lambert)

1. BATISSE ET LOTISSEMENT - Recours au Conseil d'Etat - Intérêt - Tiers en général

Toute personne justifie en principe d'un intérêt à l'aménagement de son quartier.

II. BATISSE ET LOTISSEMENT - Permis de bâtir - Permis de régularisation

L'article 44, § 4, de la loi du 29 mars 1962, qui permet de ne pas tenir compte de l'affectation prévue, n'a trait qu'à des constructions provisoires. Il ne permet pas de régulariser, fût-ce pour une durée limitée, une construction dont les plans 'de bâtisse indiquent qu'elle n'est en rien provisoire.

III. AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - Revision des plans - Procédure de revision

IV. LOIS, DECRETS ET ARRETES - Effets pour l'avenir - Situations non contractuelles en cours - Loi de compétence ou de procédure

RECUEIL DES 'ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.136 à 33.138 Page 5 N° 33.138

1. Aucune disposition ne rend caducs les actes de la procédure aboutissant à l'arrêté ministériel approuvant la revision d'un plan particulier d'aménagement, qui ont été accom­plis conformément aux conditions de validité qui régissaient leur adoption avant l'entrée en vigueur de la loi spéciale de réformes institutionnelles du 8 août 1980 ou du décret du Conseil régional wallon du 6 mars 1985 modifiant l'article 40 du code wallon.

2. Si l'article 42, § 2, du code wallon modifié par le décret du 6 mars 1985 dispose que la décision de reviser est prise par l' Exécutif, après avis de la commission consultative communale d'aménagement du territoire, cette règle n'a trait qu'aux décisions à prendre et n'affecte pas la validité de celles qui ont été prises.

V. AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - Plans communaux - Procédure d'adoption par la commune - Enquête

Il ressort de l'article 18, dernier alinéa, du code wallon que lorsque le conseil com­munal, après avoir pris connaissance des résultats de l'enquête, décide de modifier le plan, il doit être procédé à une nouvelle enquête.

Peu importe que les modifications soient mineures.

VI. AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - Plans communaux - 1° Adoption par le conseil com­munal - Généralités; - 2° Approbation par le Roi ou par !'Exécutif - Compétence

L'arrêté ministériel qui approuve la modification d'un plan particulier doit être annulé lorsque la portée de la modification est entachée d'incertitude au point que le conseil communal et l'autorité de tutelle n'ont pas été en mesure de statuer en connaissance de cause.

VII. AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - Plans communaux - Recours au Conseil d'Etat -Effets de l'annulation des plans

L'annulation de l'arrêté ministériel qui approuve la modification d'un plan particulier entraîne l'annulation du permis de bâtir qui le prend pour fondement.

Vu la requête introduite le 27 septembre 1985 par E. Goenen, B. Deffense, R. Cluyse et R.A. Stokkink qui poursuivent l'annulation du permis de bâtir délivré par le collège des bourgmestre et échevins de Waterloo à la société anonyme Passage Wellington pour l'extension d'une galerie commerciale chaussée de Bruxelles;

Vu l'arrêt n° 28.568 du 13 octobre 1987 rouvrant les débats et chargeant le membre de l'auditorat désigné par M. l'auditeur général de poursuivre l'instruction;

Vu la requête introduite le 11 décembre 1987 par J. Goddart, J. Van Hest, J. Laval, veuve Eskanazi et G. Dufay qui poursuivent l'annulation de l'arrêté ministériel de la Région wallonne du 20 juillet 1987 approuvant la modification du plan particulier d'aménagement n° 13A de la commune de Waterloo;

Vu la requête introduite le 15 janvier 1988 par E. Goenen, J. Goddart, R. Cluyse et R.A. Stokkink qui poursuivent l'annulation du permis de bâtir délivré le 14 septembre 1987 par le collège des bourgmestre et échevins de Waterloo à la société anonyme Passage Wellington pour le bien sis à Waterloo, 165, chaussée de Bruxelles;

Considérant qu'il y a lieu de joindre les causes en raison de leur connexité;

Considérant que les permis attaqués sont relatifs à un bâtiment d'un niveau sur le toit d'un parking souterrain, qui constitue l'extension arrière de la galerie commerciale existante <<passage Wellington» dont les entrées se trouvent à la chaussée de Bruxelles; qu'il ressort du dossier que les travaux avaient commencé avant la délivrance du premier permis attaqué; que selon le plan particulier d'aménagement n° 13, partie A «Plateau de /'Ange», approuvé par arrêté royal du 6 février 1957, dans l'état en vigueur au moment où le premier acte attaqué fut pris, c'est-à-dire avant la modification approuvée par un arrêté ministériel du 20 juillet 1987, la galerie existante se situe dans une zone de construction d'habitations fermée que l'article 3 des prescriptions littérales du plan particulier réserve à l'habitation, au commerce et à l'artisanat cependant que l'extension litigieuse se trouve dans une zone de construction d'habitations ouverte réservée à la seule résidence aux termes de l'article 2 de ces prescriptions; qu'après que la demande qui allait être accueillie par le premier permis eut fait l'objet, en raison de cette affectation restrictive, d'une demande de dérogation à laquelle le fonctionnaire délégué ne donna pas suite, le collège délivra le permis le 29 juillet 1985; que celui-ci, motivé notamment par le fait «qu'une extension provisoire peut être admise», vise d'ailleurs l'article 44, § 3, de la loi du 29 mars 1962 organique de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme relatif aux cas où le permis peut être délivré pour une durée limitée et précise que les travaux «ne peuvent être maintenus au-delà du 29 juillet 1988 (3. ans)»; que le plan modificatif précité du 20 juillet 1987 érige

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.136 à 33.138

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en «zone d'annexe - hauteur 6 à 10 m» l'aire occupée par l'extension litigieuse; que le troisième acte attaqué, relatif à une extension de la galerie commerciale occupant toute cette zone d'annexe, vise le plan modificatif;

Sur le permis du 29 juillet 1985:

Considérant que la commune de Waterloo déduit une fin de non-recevoir de l'absence d'intérêt des requérants au recours A. 33.548/lll-9357, au motif que, compte tenu de la configuration du quartier et de la nature des activités qui s'y déroulent, les travaux projetés n'entraîneraient pas de nuisances supplémentaires pour eux;

Considérant que toute personne justifie en principe d'un intérêt à l'aménagement de son quartier; que le recours est recevable;

Considérant qu'il y a lieu d'interpréter le premier moyen et une branche du deuxième comme n'en formant qu'un, pris de ce que le permis attaqué, délivré afin de régulariser des travaux accomplis, ne remplit pas les conditions légales d'une telle régularisation, et notamment requérait l'avis conforme du fonctionnaire délégué, l'article 194, qu'il vise, du Code wallon de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme ayant été invoqué à tort;

Considérant qu'au moment où l'acte attaqué fut pris, l'article 194 du Code wallon, visé par cet acte, disposait en son secundo qui n'était pas encore abrogé par l'effet du décret du 16 janvier 1985 que l'avis conforme du fonctionnaire délégué n'était pas requis pour certains permis demandés pour une durée limitée; que le caractère provisoire du permis attaqué est à mettre en relation avec les circonstances que l'endroit litigieux n'avait pas de destination commerciale, que la dérogation nécessaire pour y étendre une galerie commerciale n'avait pas été accordée et que l'article 44, § 4, de la loi organique de ! 'urbanisme, visé par le permis, prévoit des autorisations d'une durée limitée «lorsqu'ils' agit d'édifier des constructions ou d'exécuter des travaux soumis à permis, pendant la période précédant la réalisation de l'affectation définitive prévue par une disposition légale ou réglementaire»; qu'une telle disposition, qui permet de ne pas tenir, compte de l'affectation prévue, n'a trait qu'à des constructions provisoires, comme le confirme d'ailleurs l'acte attaqué lui-même qui prévoit que les travaux qu'il autorise ne peuvent être maintenus au-delà de trois ans; que le collège n'était donc pas habilité à régulariser, fût-ce pour une durée limitée, une construction dont les plans de bâtisse indiquent qu'elle n'est en rien provisoire; que le moyen est fondé; qu'il est sans intérêt d'examiner les autres moyens du premier recours, faute qu'ils puissent conduire à une annulation plus étendue;

Sur l'arrêté ministériel du 20 juillet 1987:

Considérant qu'il y a lieu d'examiner ensemble les deux premiers moyens du recours, pris de ce que la procédure de révision partielle du plan particulier n° 13 A a été poursuivie en exécution de l'arrêté royal du 24 novembre 1978 «nonobstant la péremption ou la caducité de celui-ci» et en violation de l'article 40 du Code wallon de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme; que les requérants précisent, dans le mémoire en réplique et le dernier mémoire, qu'ils ne contestent pas que les règles et les actes valablement pris et relatifs à des matières qui allaient être régionalisées ou communautarisées restent en vigueur aussi longtemps que les communautés ou les régions ne les modifient pas, mais qu'ils appuient leur critique sur la modification que le Code wallon aurait apportée aux dispositions réglementaires antérieures;

Considérant que la révision du plan particulier n° 13 A dit «Plateau de !'Ange», décidée par le Roi le 24 novembre 1978 conformément à l'article 43 de la loi du 29 mars 1962 organique de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme, a fait l'objet de plusieurs délibérations du conseil communal dont la première fut prise le 9 avril 1985; que les requérants n'indiquent aucune disposition qui rendrait caducs les actes de la procédure aboutissant à l'acte attaqué qui ont été accomplis conformément aux conditions de validité qui régissaient leur adoption avant l'entrée en vigueur de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, du Code wallon ou du décret du Conseil régional wallon du 6 mars 1985 modifiant l'article 40 de ce code; que si l'article 42, § 2, du Code wallon modifié par ledit décret dispose que la décision de réviser est prise par !'Exécutif, après avis de la commission consultative communale d'aménagement du territoire, cette règle n'a trait qu'aux décisions à prendre et n'affecte pas la validité de celles qui ont été prises; que les moyens manquent en droit;

Considérant que les requérants prennent un troisième moyen de la violation de l'article 18 du Code wallon en ce que le plan adopté, quoique non conforme à celui sur lequel a porté l'enquête publique, n'a J?aS fait l'objet d'une nouvelle enquête; qu'ils observent que la commune a entrepris la réalisation d'une nouvelle voirie;

Considérant qu'aux termes de l'article 18 du Code wallon, il y a lieu de procéder à une nouvelle enquête en cas de modification du plan par le conseil communal; que la délibération du conseil communal de Waterloo du 27 octobre 1986 reconnaît en ces termes l'existence d'une modification:

«Prenant en considération les réclamations des habitants de l'avenue de l' Ange, portant sur l'aspect «circulation» et «sécurité» de la route à créer à l'Est des parkings nouveaux;

»Considérant que l'aspect «Sécurité» doit être impérativement envisagé; que de triste~ expériences ont démontré qu'un~ sortie aisée d'un parking, Delhaize notamment, est de nature à favoriser le banditisme;

»Considérant, dès lors, qu'il y a lieu de supprimer la sortie «Est» du parking Delhaize et de limiter la nouvelle voirie à l'entrée et à la sortie du parking «Passage ,Wellington»;

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Arrêts Nos 33.136 à 33.138 Page 7 N° 33.138

»Considérant que ces dispositions sont de nature, actuellement, à rencontrer les souhaits des habitants de l'avenue de /'Ange;»;

que la Région, en son dernier mémoire, allègue que les modifications étaient en l'occurrence mineures, mais n'en conteste pas l'existence; que le moyen est fondé;

Considérant qu'en un quatrième moyen, les requérants reprochent à un rapport établi par l'auteur du projet de plan particulier le 30 mai 1986 d'être «extrêmement sommaire» et d'affirmer à tort que, «contrairement aux plaintes émises, la révision du plan particulier d'aménagement n'implique aucun agrandissement commercial»; qu'il y a lieu d'interpréter le moyen·comme critiquant la procédure suivie en ce qu'elle n'a pas permis au conseil communal et à l'autorité de tutelle qui a approuvé le plan de statuer en connaissance de cause, soit qu'il leur ait été dissimulé que le plan permettait l'extension commerciale litigieuse, soit que le plan contienne une ambiguïté à cet égard;

Considérant qu'une des préoccupations des habitants du quartier révélées par les deux enquêtes publiques auxquelles fut soumis, en 1985 et en 1986, le projet qui a abouti à la modification du 20 juillet 1987, fut de ne pas voir dénaturer à des fins commerciales un endroit affecté à la résidence; que le dossier contient deux notes du 30 mai 1986 signées par l'urbaniste communal auteur du projet, où l'on peut lire qu'«aucun agrandissement commercial n'est projeté», qu' «aucun agrandissement commercial n'est prévu au plan de révision» et que «dans le présent projet, il n'y a pas d'extension de la surface commerciale»; qu'à supposer que, comme le soutient la commune dans un dernier mémoire, de telles déclarations n'aient eu pour but que de répondre à certaines lettres de protestation et que, dans l'intention de leur auteur, elles n'aient trait qu'à des aspects du projet autres que l'extension litigieuse, elles n'en demeurent pas moins libellées sans aucune restriction et relatives à un plan qui n'en mettait aucune en évidence; qu'en effet, d'après la légende du plan modificatif, l'endroit litigieux n'est pas situé dans une zone de commerce ou d'habitation et de commerce, mais dans une «zone d'annexe - hauteur 6 à JO m»; que, comme l'obsel'Ve d'ailleurs la Région, l'interprétation donnée au plan par le collège lorsqu'il défend devant le Conseil d'Etat le permis de bâtir relatif à l'extension de la galerie commerciale, interprétation selon laquelle l'intention de la commune au cours de la procédure de modification du plan particulier aurait été constamment de régulariser la construction de ces galeries et, par conséquent, d'affecter cette zone au commerce, et non pas seulement à l'habitation, ne renseigne pas sur ce qu'était l'intention, non du collège, mais du conseil communal au moment où celui-ci a adopté le plan modificatif; qu'aucune disposition de ce plan ne permet de déterminer avec certitude si la nouvelle «zone d'annexe - hauteur 6 à 10 m» fait encore partie de la zone de construction d'habitations ouverte dont le périmètre tel qu'il était fixé avant la modification la contient, si elle constitue plutôt une extension de la zone de construction d'habitations fermée à laquelle elle est adjacente et qui contient la galerie existante, ou si enfin elle est entièrement distincte des zones limitrophes, hypothèse que les indications du plan modificatif n'excluent pas; que, contrairement à ce qu'allègue la commune dans les mémoires relatifs au recours introduit contre le second permis de bâtir, la circonstance que la hauteur de 6 à 10 mètres indiquée pour la zone d'annexe litigieuse correspond au gabarit prescrit par le plan particulier pour les constructions occupant la partie contiguë à cette zone de la zone de construction d'habitations fermée où des commerces peuvent être implantés ne suffit pas pour démontrer que la zone d'annexe ne serait qu'une extension de cette zone voisine et que le régime juridique prévu pour celle-ci y serait applicable; qu'en effet, les prescriptions littérales du plan particulier, qui n'ont pas été modifiées, ne mentionnent la possibilité d'édifier des «annexes» que dans la zone de construction d'habitations ouverte, possibilité subordonnée d'ailleurs à des conditions qui ne permettraient pas d'autoriser la construction litigieuse; que, certes, la note précitée du 30 mai 1986 contenant le «rapport de l'auteur de projet» signale que «la zone d'annexe - hauteur 6 à 10 m - est reprise au plan sous teinte rose et correspond à ce qu'il résulte d'une autorisation de bâtir donnée par dérogation et une deuxième donnée à titre précaire»; que s'il est vrai que cette déclaration a trait au permis provisoire, premier acte attaqué, qui a bien pour objet l'extension d'une galerie commerciale, il ne suffisait pas d'une allusion en termes si voilés pour que l'attention du conseil communal et de l'autorité de tutelle soit dûment appelée sur une extension de la surface affectée au commerce qui n'apparaît pas non plus de manière indiscutable du plan modificatif et est même démentie, ainsi qu'il a été exposé, dans un autre document établi par le même «auteur de projet»; que rien n'empêchait d'indiquer clairement dans les prescriptions littérales ou dans les prescriptions graphiques et notamment dans la légende du plan l'affectation des lieux litigieux et notamment de préciser sans ambiguïté, comme c'est le cas pour d'autres zones définies par le même plan, si des bâtiments à usage commercial pouvaient ou non y être construits; que la portée de l'acte attaqué est entachée d'incertitude au point que le conseil communal et l'autorité de tutelle n'ont pas été en mesure de statuer en pleine connaissance de cause; que le moyen est fondé;

Sur le permis du 14 septembre 1987:

Considérant que le premier moyen du troisième recours est pris de l'illégalité de l'arrêté ministériel du 20 juillet 1987 approuvant la modification du plan particulier d'aménagement n° 13 A, sur lequel l'acte attaqué se fonde; que le troisième moyen est pris de ce que ce permis «ne respecte même pas le plan particulier» modifié, «à supposer celui-ci régulier»; que les développements du troisième moyen tendent à démontrer que le permis attaqué viole le plan particulier n° 13 A, que celui-ci soit ou non valablement modifié par l'arrêté ministériel du 20 juillet 1987;

Considérant que l'extension litigieuse se situe selon le plan particulier n° 13A considéré dans l'état antérieur à la modification de 1987 en «zone de construction d'habitations ouverte», correspondant à la «zone de construction en ordre ouvert» dont traite l'article 2 des prescriptions littérales de ce plan particulier; qu'aux termes de cet article

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.136 à 33.138

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2, que l'arrêté ministériel du 20 juillet 1987 n'a pas modifié, les constructions à usage d'habitation sont seules autorisées à cet endroit; qu' ainsi l'annulation du plan modificatif de 1987, non seulement justifie l'annulation par entraînement du permis attaqué qui le prend pour fondement, mais commande aussi l'annulation de cet acte pour violation des prescriptions urbanistiques inchangées du plan particulier; que les moyens sont fondés;

Considérant qu'il n'y a pas lieu d'examiner les autres moyens du recours, faute qu'ils puissent conduire à une annulation plus étendue,

(Jonction - annulation du permis de bâtir délivré le 29 juillet 1985 par le collège des bourgmestre et échevins de Waterloo à la société anonyme Passage Wellington pour l'extension d'une galerie commerciale chaussée de Bruxelles, de l'arrêté ministériel de la Région wallonne du 20 juillet 1987 approuvant la modification du plan particulier d'aménagement n° 13 A de la commune de Waterloo et du permis de bâtir délivré le 14 septembre 1987 par le collège des bourgmestre et échevins de Waterloo à la société anonyme Passage Wellington pour le bien sis à Waterloo, 165, chaussée de Bruxelles - dépens à charge de la commune de Waterloo et de la Région wallonne).

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêt N° 33.141 Page 1

N° 33.141 ARRET du 10octobre1989 (Ne Chambre)

N° 33.141

MM. Baeteman, président de chambre, Borret et De Brabandere, rapporteur, conseillers, et De Buel, auditeur.

AMBROES et consorts (Me Van Helshoecht) c/ Province de Brabant (Mes Straelen et Putzeys)

I. à ID. (Voir n° 23.472, III à V)

Vu la requête introduite le 26 octobre 1986, par laquelle Yvan Ambroes, Jaak: De Smedt, François Goossens, Freddy Hiel, Marnix Hofman, Luc Swartebrouckx, Pierre Van Keer, Marcel Vanderusten et Lodewijk Weynants demandent l'annulation de l'arrêté adopté par la députation permanente du Conseil provincial du Brabant le 9 août 1984, ayant pour objet:

«-à partir du 1.9.1984, de supprimer toutes les indemnités versées au personnel chargé d'effectuer des prestations en dehors des heures de service pour! 'Etablissement de Prévoyance du Brabant, et de faire exécuter ces prestations durant les heures de service par des fonctionnaires et agents du service 32;

>'1-<ie verser à Monsieur C.A. Smeyers, secrétaire-trésorier, à partir de la même date, 230 heures, à em­prunter au contingent de 4.500 fixé par le conseil provincial, selon le tarif horaire en vigueur;

>>- de demander au chef de service 32 de présenter à la Députation permanente un dossier relatif à la création d'un emploi de secrétaire d'administration chargé des activités considérées, dont le traitement sera imputé sur les crédits de !'Etablissement de prévoyance du Brabant».

Les éléments de la cause.

Considérant que les faits suivants se trouvent à la base du litige:

1.1. Par un règlement du 14 juillet 1922, plusieurs fois modifié et qui fut coordonné le 7 octobre 1953, le conseil provincial du Brabant a établi les règles des pensions de retraite et de survie à l'usage des fonctionnaires, des employés et des autres agents de la province. Ceux-ci sont obligés de s'affilier à !'Etablissement de Prévoyance du Brabant, fonctionnant sous la garantie de la province et placé sous l'autorité de la députation permanente. Le comité de direction de l'établissement est constitué de représentants de la députation permanente, des administrations affiliées et des membres affiliés. Il est assisté par un secrétaire-trésorier, désigné par la députation permanente.

1.2. Le 8 octobre 1935, le conseil provincial décide que le comité de direction sera encore assisté par un secrétaire-adjoint, désigné par la députation permanente. Les traitements et les frais généraux suscités par les deux secrétaires devaient être supportés par l'établissement.

1.3. Le 1er août 1963 le conseil provincial ajoute au règlement un article 5bis, prévoyant que le comité de direction est assisté par un secrétaire-trésorier et par un ou plusieurs secrétaires-adjoints, désignés par la députation permanente selon les besoins du service. Ces personnes, qui sont des agents de la province ou de l'Etat au sein de l'administration provinciale, accomplissent leurs fonctions à l'établissement en dehors des heures de service habituelles et sont rémunérées par heure. Le nombre d'heures de service qu'elles accomplissent est fixé par la députation permanente. Leurs traitements, dont l'échelle serait fixée par un arrêté du 26 mars 1964 de la Députation permanente, varient selon les règles qui s'appliquent pour les rémunérations des agents de la province.

On précise que les traitements des agents chargés du secrétariat et de la comptabilité de l'établissement, ne peut pas dépasser le maximum du traitement fixé pour un chef de bureau à l'administration centrale.

1.4. Par arrêté du conseil provincial du 13 décembre 1979, approuvé par arrêté royal du 26 mars 1980, l'article 5bis est remplacé par un nouveau texte. Selon le troisième alinéa de l'article 5bis ainsi modifié, le nombre d'heures à prester par le secrétaire-trésorier, ainsi que par les secrétaires-adjoints est fixé par la députation permanente. Le maximum des prestations à accomplir par l'ensemble du personnel de !'Etablissement de prévoyance est fixé à 4.500 heures par an.

1.5. A partir de 1982, une correspondance a lieu entre la province et la Cour des Comptes, laquelle conteste que l'établissement puisse être considéré comme un établissement autonome, et met en doute que les services prestés en exécution de l'article 5bis du règlement de l'établissement diffèrent des missions que la députation permanente confie aux agents de la province en exécution de l'article 65 de la loi provinciale. La Cour s'interroge au sujet de la régularité des rémunérations complémentaires versées au personnel de l'établissement. C'est visiblement à la suite de ces observations que, le 9 août 1984, la députation permanente a adopté l'arrêté attaqué par le présent recours.

La compétence du Conseil d'Etat.

2.1. Considérant que la partie défenderesse oppose une exception d'incompétence, en faisant valoir que l'objet réel du recours serait de faire reconnaître le droit subjectif des requérants au paiement d'une rémunération complémentaire, et que seuls les tribunaux de l'ordre judiciaire sont compétents à cette fin;

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2.2. Considérant que les requérants sollicitent l'annulation d'un acte administratif du 9 août 1984, leur enlevant la qualité de secrétaire adjoint ainsi que la possibilité, outre la carrière d'agent de la province, de mener encore une autre carrière; que le Conseil d'Etat a le pouvoir de connaître d'une telle action; qu'il n'est pas porté atteinte à cette compétence par la circonstance que l'acte attaqué refuse également, conséquemment, aux requérants la rémunération attachée à l'emploi qui leur est enlevé; que l'exception d'incompétence ne peut pas être admise.

L 'intérêt des requérants.

Considérant que les requérants ne possèdent pas d'intérêt à l'annulation du deuxième et du troisième objet de l'arrêté attaqué; que l'un de ceux-ci concerne exclusivement le secrétaire-trésorier, alors que l'autre ne contient aucune décision causant par elle-même, et dès à présent, un préjudice à l'un des requérants;

Le bien-fondé du recours.

4.1. Considérant que les requérants déduisent au premier moyen de «la violation du règlement du 14 juillet 1922 du Conseil provincial du Brabant, fixant le régime de pension des fonctionnaires, employés et agents provin­ciaux, coordonné par arrêté du 7 octobre 1953, et modifié à plusieurs reprises depuis lors, en particulier l'arti­cle 5bis, des règles et des principes généraux du droit administratif, spécialement le principe de ! 'intangibilité des droits acquis, ainsi que de l'excès de pouvoir;

»en ce que les intéressés, qui ont tous été nommés par la Députation permanente du Conseil provincial du Brabant aux emplois vacants de secrétaire-adjoint à ! 'Etablissement de Prévoyance du Brabant avec attribution d'un nombre d'heures de services bien déterminé, ont été privés du bénéfice de leur désignation par l'arrêté attaqué;

»alors que la Députation permanente, qui a été autorisée par le Conseil provincial à procéder, selon les besoins de service, à la nomination d'un secrétaire-trésorier et d'un ou de plusieurs secrétaires adjoints dans les limites d'un nombre global d'heures de service, épuise la compétence au.fur et à mesure qu'elle procède à ces nominations, avec cette conséquence qu'elle ne peut plus retirer par la suite aux titulaires de ces emplois le bénéfice de la nomination régulièrement obtenue;

»que de même la Députation permanente peut il est vrai, dans des limites du nombre d'heures de service attribué à chacun d'eux, augmenter ce nombre mais non pas le diminuer et certainement pas le supprimen>;

4.2. Considérant qu'il ressort du règlement coordonné le 7 octobre 1953, et en particulier de l'article 5bis que ! 'Etablissement de prévoyance du Brabant, un service de la province, ne possède pas de cadre organique propre, que la députation permanente, compétente selon l'article 5bis pour désigner les secrétaires adjoints, avait également le pouvoir de mettre fin à leur désignation; que les requérants ne peuvent pas soutenir qu'ils avaient obtenu le droit de conserver une fonction à laquelle ils avaient seulement été désignés; qu'il a été mis fin à leur fonction à l'occasion d'une réorganisation des services, dictée par des considérations budgétaires, que la députation permanente pouvait décider en vertu de l'article 3 du règlement sur les pensions, aux termes duquel ! 'Etablissement de Prévoyance est placé sous l'autorité de la députation permanente du Conseil provincial, laquelle statue sur toutes les questions qui peuvent surgir; qu'en mettant fm aux fonctions des agents qu'elles avaient désignés, la députations permanente n'a pas porté atteinte à de prétendus droits acquis; que le moyen manque en droit;

5 .1. Considérant que les requérants déduisent un deuxième moyen de «la violation du règlement du 13 oc­tobre 1964 du Conseil provincial du Brabant concernant la mise en disponibilité des agents non enseignants, par­ticulièrement les articles 13 et 16, des formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité, ainsi que de l'excès de pouvoir;

»en ce que! 'arrêté attaqué supprime tout simplement les emplois de secrétaire-adjoint à l'établissement de prévoyance du Brabant, sans placer les intéressés en position de réaffectation, ni les mettre en disponibilité par suppression d'emploi dans l'intérêt du service;

»alors que d'une part si la Députation permanente avait l'intention de supprimer les emplois de secrétaire­adjoint, elle était tenue de placer les intéressés en position de réaffectation;

»et alors que par ailleurs si elle avait /'intention de relever les intéressés de leur fonction dans ! 'intérêt du service, elle ne pouvait le faire que par une décision motivée, subordonnée à la ratification du Conseil provincial après avoir informe de son projet les intéressés et après les avoir entendus;»

5.2.l. Considérant que l'arrêté du 13 octobre 1964 du Conseil provincial réglant la mise en disponibilité des agents non enseignants de la province s'applique, aux termes de son article 1, aux agents du cadre administratif, technique, scientifique et de recherche, ainsi qu'aux agents de maîtrise, de métier et de service des établissements et services de la province du Brabant, nommés à titre définitif;

5.2.2. Considérant que les requérants sont nommés à titre définitif en leur qualité d'agents de la province à horaire complet, et que leur fonction ne leur a pas été enlevée par 1 'acte attaqué; que les services qu'ils fournissaient pour compte de l'établissement de prévoyance, leur ont toutefois été attribués par voie de «désignations» confor­mément à l'article 5bis, premier alinéa; qu'il ressort du rapport au conseil provincial déposé lors de la réunion du 19 septembre 1963 que ces fonctions <<sont exercées par des agents de ! 'administration provinciale, cumulativement avec leur fonction principale», que ces agents <<sont mis à la disposition de !'Etablissement de Prévoyance ... » et que leur indemnité «est fuée compte tenu des services effectivement prestés»;

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5.2.3. Considérant que les désignations des requérants ne peuvent pas être assimilées à des nominations à titre définitif; qu'il ne peuvent dès lors pas soutenir que, lorsqu'en raison d'une réorganisation du service, la partie défenderesse a mis fin à leur désignation, elle devait leur appliquer les dispositions du règlement concernant la mise en disponibilité des agents de la province; que le moyen manque en droit,

(Rejet- dépens à la charge des requérants)

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ARRET du 10 octobre 1989 (IVe Chambre) MM. Baeteman, président de chambre, Borret, rapporteur, et De Brabandere, conseillers, et Verhulst, premier auditeur (avis contraire)*.

A.S.B.L. OTO - ORGANISATIE TRADITIONEEL ONDERWIJS et consorts (Me Leroy) c/ Communauté flamande (Mes Monard, Van Orshoven et Lindemans)

1. PROCEDURE - Règles spéciales à la demande de suspension - 1° Recevabilité du recours principal (1); - 2° Compétence du Conseil d'Etat (2); - 3° Intérêt (3); - 4° Moyen sérieux (4 et 5); - 5° Risque de causer un préjudice grave difficilement réparable (6 à 9)

II. ENSEIGNEMENT ET SCIENCES - Enseignement secondaire - Généralités (4, 6 et 8)

1. En cas de requête collective, la circonstance que la taxe n'a pas été acquittée autant de fois qu'il y a de requérants, n'entraîne pas !'irrecevabilité de la demande de suspension dès lors que le non-respect des articles 70 et 71 du règlement de procédure n'entraîne pas ipso facto !'irrecevabilité de la requête en annulation.

2. Ne peut être accueillie, !'exception de chose jugée déduite de ce que !'arrêté dont la suspension est demandée a déjà été suspendu par une ordonnance de référé, dès lors qu'il n'appert ni du texte de l'article 17 des lois coordonnées du 12 janvier 1973, ni des travaux parlementaires qui s'y rapportent, que le législateur aurait rendu !'exercice de la compétence accordée au Conseil d'Etat tributaire de !'absence de toute suspension préexistante prononcée par le pouvoir judiciaire.

3. Un requérant a intérêt à demander la suspension de !'exécution d'une décision même si celle-ci a déjà été suspendue par une ordonnance de référé rendue en première instance; il en va d'autant plus ainsi lorsque la partie adverse ne respecte pas cette décision judiciaire.

4. Peut être qualifié de sérieux, le moyen pris de la violation de !'article 17 de la Constitution, en ce que!' arrêté de!' Exécutif flamand du 5 avril 1989 impose aux écoles sub­ventionnées de demander désormais !'approbation de !'Exécutif pour continuer à dispenser un enseignement secondaire traditionnel, alors qu'en vertu de cette disposition constitution­nelle, !'organisation, la reconnaissance ou le subventionnement de !'enseignement par la Communauté sont réglés par la loi ou le décret, dès lors qu'il n'est pas de la première évidence que l'article 24, § 2, 1°, de la loi du 29 mai 1959 procure le fondement légal indispensable à !'arrêté attaqué.

5. Pour obtenir la suspension, il suffit, si les autres conditions sont remplies, qu'un seul des moyens fondés sur les articles 6, 6bis ou 17 de la Constitution, soit sérieux, de sorte que le Conseil d'Etat ne doit pas vérifier si un second moyen fondé sur ces dispositions constitutionnelles !'est également.

6. L'arrêté imposant désormais aux écoles subventionnées de demander !'approbation de !'Exécutif pour continuer à dispenser un enseignement secondaire traditionnel cause un préjudice aux élèves désirant suivre cet enseignement, dès lors qu'il ne saurait être contesté que si !'arrêté n'avait pas été pris, ces écoles auraient continué à dispenser un enseignement traditionnel qui, au surplus, ne peut s'inscrire dans la structure uniforme prévue par!' arrêté attaqué.

On ne peut opposer aux requérants que la cause du préjudice réside dans le fait qu'aucune école n'a demandé !'approbation d'une structure traditionnelle, alors que les intéressés contestent précisément que!' article 24, § 2, 1°, de la loi du 29mai1959, en vertu duquel cette approbation devrait être demandée, procure le fondement légal requis à !'arrêté attaqué, et que, sans cet arrêté, !'enseignement traditionnel aurait continué à être dispensé et cela sans avoir recours à !'article 24, § 2, 1°.

Le préjudice est grave et difficilement réparable pour les enfants qui entreprennent actuellement des études secondaires puisque, à moins qu'une suspension ne permette la con-

*Selon l'avis. l'introduction de la «structure uniforme» dans l'enseignement secondaire n'a pas causé aux requérants un préjudice grave difficilement réparable, en raison de la possibilité de soumettre à l'approbation du ministre une structure dérogatoire. L'avis ajoutait que la demande de suspension n'avait pas d'objet tant que l'exécution de l'acte attaqué était suspendue par une ordonnance de référé rendue en première instance. Les requérants ne justifient pas de l'intérêt personnel légalement requis à poursuivre une suspension décidée erga omnes par le Conseil d'Etat, dans la mesure où cette suspension est plus étendue que la suspension accordée inter partes par le juge civil.

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tinuation de l'enseignement traditionnel, ces enfants seront obligés de suivre un enseignement conforme à la structure prévue par l'arrêté attaqué, de telle sorte que, lorsqu'ils pourront à nouveau suivre un enseignement traditionnel après l'annulation de cet arrêté, ils ne pourront le faire sans qu'il y ait eu une interruption de leur formation selon ce type d'enseignement.

7. Pour que la demande de suspension puisse être reconnue bien fondée, il n'est pas requis que tous les requérants subissent un préjudice grave difficilement réparable.

8. Les inconvénients que risque d'entraîner la suspension, dans sa totalité, de l'arrêté attaqué, de nature réglementaire, pour le service public de l'enseignement, ne font pas obstacle à la demande, lorsqu'il peut être fait droit à l'intérêt que les requérants cherchent à sauvegarder, au moyen d'une suspension partielle.

9. La loi ne subordonne pas l'accueil de la demande de suspension à la condition que l'exécution de l'arrêté attaqué n'ait pas commencé.

Vu la demande de suspension de l'exécution de l'arrêté de l'Exécutif flamand du 5 avril 1989, relatif à l'organisation de l'enseignement secondaire, demande introduite le 5 avril 1989 par les parties requérantes susmentionnées;

Considérant que la demande de suspension est jointe à une requête en annulation de l'arrêté dont la suspension est demandée;

1. De la recevabilité.

1.1. Considérant que la partie défenderesse soulève l'irrecevabilité de la demande;

1.2. Considérant qu'elle déduit cette irrecevabilité, tout d'abord de l'irrecevabilité du recours en annulation de l'arrêté dont. la suspension est demandée; qu'elle soutient que, dès lors, qu'aux termes de l'article 17 des lois coordonnées sur le Çonseil d'Etat, une demande de suspension ne peut être introduite que conjointement avec une requête en annulation, cette demande est subsidiaire à la requête en annulation de sorte que la recevabilité du recours en annulation doit, ell'conséquence, être évoquée dès l'instruction de la demande de suspension;

Considérant toutefois qu'elle ne fait valoir qu'un seul grief qui met en cause la recevabilité du recours èn annulation, à savoir le «défaut d'acquittement du droit de timbre»; qu'elle soutient qu'il y a 47 parties au procès alors que le droit de timbre n'a été payé que 18 fois;

Considérant que les parties requérantes répliquent à juste titre que le non-respe~t des dispositions des articles 70 et 71 du règlement de procédure n'entraîne pas ipso facto l'irrecevabilité de la requête;

1.3. Considérant que la partie défenderesse soulève que la première partie requérante, l'a.s.b.l. OTO, n'établit pas qu'un conseil d'administration régulièrement convoqué ait pris en temps utile la décision d'introduire la demande de suspension;

Considérant que le dossier déposé par les parties requérantes contient un extrait du procès-verbal de l'assemblée générale de l'a.s.b.l. OTO, du 8 août 1989, dont il ressort que l'assemblée précitée a décidé à cette date d'introduire la présente demande de suspension; que la partie défenderesse ne conteste pas la régularité de cette. décision; que l'exception est rejetée;

1.4. Considérant que la partie défenderesse soulève une «exception de chose jugée»; qu'elle souligne que l'arrêté dont la suspension est demandée à déjà été suspendu par ordonnance du 31 juillet 1989 du président du tribunal de première instance de Bruxelles; que selon elle, l'autorité de la chose jugée de cette ordonnance fait obstacle, conformément à l'article 25 du Code judiciaire, à la réitération de la demande;

Considérant qu'à l'article 17 des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat, article rétabli dans ces lois par l'article 15 dè la loi du 16 juin 1989 portant diverses réformes institutionnelles, le législateur a attribué au Conseil d'Etat la compétence pour connaître de demandes de suspension telles que la présente; que sans doute, il faut déduire de cette attribution de compétence que le pouvoir judiciaire n'est pas ou n'est plus compétent pour suspendre ce que le Conseil d'Etat peut suspendre, ou pour le même motif; que quoi qu'il puisse en être, il n'appert ni du texte de l'article 17, précité, ni des travaux parlementaires qui s'y rapportent, que le législateur ait rendu tributaire l'exercice de la compétence accordée au Conseil d'Etat de l'absence de toute suspension préexistante prononcée par le pouvoir judiciaire; que l'exception est rejetée;

1.5. Considérant que la partie défenderesse soulève «l'absence d'intérêt»;

1.5.1. Considérant qu'elle déduit en premier lieu cette absence d'intérêt du fait que l'arrêté concerné est déjà suspendu en vertu de l'ordonnance citée sous le point 1.4.;

Considérant que cet argument doit être rejeté; que l'effet de la suspension prononcée par l'ordonnance précitée est précaire, puisqu'il peut toujours être rendu inopérant sur appel; que les parties requérantes déclarent

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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que la partie défenderesse nationale (N) a même déclaré en public qu'il n'en ferait rien; que la partie défenderesse ne contredit pas cette déclaration; qu'elle n'a pas été en mesure d'expliquer au Conseil comment un justiciable ne pourrait justifier de son intérêt à mettre en oeuvre une voie de recours mise à sa disposition par la loi, pour le seul motif qu'une éventuelle autre voie de recours dont il disposerait lui aurait procuré un résultat que la partie adverse ne reconnaît pas; que la partie défenderesse n'a pas davantage été à même de démontrer au Conseil quel intérêt moral elle pourrait faire valoir en se prévalant d'une décision judiciaire qu'elle ne respecte pas;

1.5.2. Considérant que pour démontrer l'absence d'intérêt des parties requérantes, la partie défenderesse soutient également que l'arrêté attaqué n'a pas la portée que ces parties lui attribuent; qu'elle déclare qu'elle démontrera l'exactitude de cet argument lors de l'examen au fond de la demande de suspension; qu'elle établit ainsi elle-même un lien avec le fond de la cause; que dans la mesure où l'exception d'irrecevabilité est fondée sur l'argument précité, sa pertinence devra apparaître, dès lors, de l'examen du fond;

2. Du bienfondé.

2.1. Considérant que pour faire reconnaître le bien-fondé de leur demande, les parties requérantes soutiennent que dans leur requête en annulation, elles invoquent deux moyens pris de la violation de l'article 17 de la Constitution, que ces moyens sont sérieux et que l'exécution immédiate de l'arrêté attaqué risque de leur causer un préjudice grave difficilement réparable;

2.2. Considérant que la partie défenderesse soulève, d'abord, que les moyens fondés sur l'article 17 de la Constitution ne sont pas sérieux, ensuite, que l'arrêté attaqué ne cause aucun préjudice grave aux parties requérantes, enfin, que, même s'il en était ainsi, ce préjudice ne serait ni grave, ni difficilement réparable;

2.3. Considérant que dans leur premier moyen, fondé sur l'article 17 de la Constitution, les parties requérantes font valoir que le § 5 de l'article précité dispose que l'organisation, la reconnaissance ou le sub­ventionnement de l'enseignement par la Communauté sont réglés par la loi ou le décret et que, dès lors, !'Exécutif flamand était incompétent pour prendre l'arrêté attaqué;

2.3.1. Considérant que, pour étayer sa thèse que ce moyen manque de sérieux, la partie défenderesse fait l'exposé suivant: !'Exécutif flamand tient sa compétence pour prendre l'arrêté attaqué de l'article 24 de la loi du 29 mai 1959 modifiant certaines dispositions de la législation sur l'enseignement, la loi dite du pacte scolaire, notamment du § 2, 1°, de l'article précité, aux termes duquel une école est subventionnée si elle adopte une structure existant dans l'enseignement de l'Etat, ou qui est approuvée par le Ministre de !'Education nationale, texte remplacé par l'article 8 du décret du 5 juillet 1989 de la Communauté flamande relatif à l'enseignement, de sorte qu'il convient de lire actuellement «enseignement communautaire» au lieu d'«enseignement de l'Etat» et «Exécutif flamand» au lieu de «Ministre del' Education nationale»; s'il peut être question, dès lors, d'une violation de l'article 17, § 5, de la Constitution, il doit s'agir, non pas de l'arrêté attaqué de !'Exécutif flamand, mais de la loi du 29 mai 1959 ou du décret du 5 juillet 1989; toutefois, le Conseil d'Etat ne peut exercer son pouvoir de suspension sur la base d'une violation de l'espèce;

2.3.2. Considérant que les parties requérantes répliquent qu'en vertu de l'article 17, § 5, de la Constitution, invoqué par eux, l' «organisation» de l'enseignement doit être réglée par la loi ou par le décret, de sorte que, depuis le 1er janvier 1989, date de l'entrée en vigueur de cette disposition, la modification de la structure même de l'enseignement secondaire est de la compétence du Conseil flamand; qu'elles rejettent une interprétation de l'article 24, § 2, 1°, de la loi du pacte scolaire dont il découlerait que le pouvoir exécutif puisse réorganiser l'enseignement secondaire d'une manière aussi fondamentale que le fait l'arrêté attaqué, réorganisation que la partie défenderesse a qualifié elle-même d'«étape décisive de l'histoire de notre enseignement secondaire»; qu'à leurs yeux, une compétence réglementaire ne peut être déduite de l'article 24, § 2, 1°, précité, dès lors que la disposition concernée accorde au Ministre de ! 'Education nationale le pouvoir d'approuver une structure divergente, et que l'approbation constitue une décision individuelle; qu'elles soutiennent enfin que le décret du 5 juillet 1989 peut difficilement compenser l'incompétence dénoncée; qu'elles concluent <<Le moyen est dès lors fondé prima facie, et partant sérieux»;

2.3.3. Considérant que les arguments des parties requérantes, exposés sous le point 2.3.2., sont suffisamment valables pour que, malgré la référence faite par la partie défenderesse à l'article 24, § 2, 1°, de la loi du pacte scolaire et au décret du 5 juillet 1989, modifiant cette disposition, le moyen sous examen puisse être considéré comme un moyen sérieux; qu'il n'est pas de première évidence, en effet, que nonobstant le texte de l'article 17, § 5, de la Constitution, texte qui est clair et qui exige que l'organisation, la reconnaissance ou le subventionnement de l'enseignement soient réglés par la loi ou le décret, l'article 24, § 2, 1° de la loi du pacte scolaire doive être lu en ce sens qu'il procure le fondement légal indispensable à l'arrêté attaqué; qu'il peut être rappelé également à cet égard que dans son arrêt n° 18.939, Marco et Vandendoren, du 27 avril 1978 - arrêt auquel les parties requérantes se réfèrent d'ailleurs expressément dans leur requête en annulation -, le Conseil cite des passages des travaux préparatoires de la loi du 19 juillet 1971 relative à la structure générale et à l'organisation de l'enseignement secondaire - loi ayant instauré l'enseignement dit secondaire rénové (E.S.R.) -, dans lesquels le gouvernement déclare que l'instauration de l'E.S.R. n'implique pas que les écoles subventionnées, organisées selon la structure «traditionnelle», devraient obtenir l'approbation du Ministre, visée à l'article 24, § 2, l", de la loi du pacte scolaire du 29 mai 1959, pour pouvoir continuer cet enseignement traditionnel; que si cette déclaration s'inscrit dans le droit fil de l'objectif poursuivi par l'article 24, § 2, 1° de la loi du pacte scolaire du 29 mai 21959, force est de conclure

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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à l'incompatibilité avec cette constatation de la thèse selon laquelle cet article 24, § 2, 1°, procurerait à !'Exécutif flamand un fondement légal pour prendre un arrêté imposant aux écoles subventionnées de demander désormais l'approbation de !'Exécutif, qui s'est substitué au Ministre, pour pouvoir continuer à dispenser un enseignement traditionnel; que même si on examine la loi du 29 mai 1959, non pas à la lumière de la loi du 19 juillet 1971, mais dans son propre contexte, il n'apparaît d'ailleurs pas clairement qu'en son article 24, § 2, 1°, elle ait permis au Ministre de décider si l'enseignement traditionnel peut être poursuivi; qu'en effet, en 1959 le législateur ne se trouvait pas encore confronté avec un problème aussi important en matière d'enseignement que l'est le choix entre enseignement traditionnel et enseignement non-traditionnel, ce qui explique peut-être que dans les travaux préparatoires de la loi du 29 mai 1959, l'article 24, § 2, 1°, n'ait pas été présenté comme l'une des dispositions fondamentales du pacte scolaire, ratifié par cette loi;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en l'état actuel de la cause, le premier moyen d'annulation des parties requérantes peut être qualifié de moyen sérieux;

2.4. Considérant qu'un unique moyen d'annulation sérieux, déduit des articles 6, 6bis ou 17 de la Constitution, suffit, si les autres conditions également sont remplies, pour obtenir la suspension; que le Conseil ne doit pas vérifier, dès lors, si l'autre moyen également, qui est fondé sur l'article 17 de la Constitution, est un moyen sérieux;

2.5. Considérant que les parties requérantes font valoir que l'exécution immédiate de l'arrêté attaqué «risque de (leur) causer un préjudice grave difficilement réparable», au sens de l'article 17, § 2, des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat; qu'elles soutiennent que la structure prévue par l'arrêté attaqué a été instaurée à partir du 1er septembre 1989, «de sorte que des milliers d'élèves en Flandre (dont les enfants des requérants sub Il) seront privés d'enseignement traditionnel ... », ce qui aura pour effet «qu'il y aurait une rupture quasi irréparable dans leur formation dans l'enseignement secondaire jusqu'au moment où l'enseignement traditionnel pourra de nouveau être dispensé»;

2.5.1. Considérant que la partie défenderesse objecte que l'arrêté attaqué ne cause aucun préjudice et, subsidiairement, que le préjudice causé n'est ni grave ni difficilement réparable;

2.5.1.1. Considérant que pour affirmer que l'arrêté attaqué ne cause aucun préjudice, la partie défenderese soutient que l'absence d'enseignement traditionnel est causée, non par l'arrêté attaqué, mais par la circonstance qu'aucune école, - alors que, selon la partie défenderesse, ce serait chose réalisable, - n'a «complété» la structure prévue par l'arrêté attaqué par des cours de l'enseignement traditionnel, ou alors, si cela s'avérait néanmoins irréalisable, n'a demandé, en application de l'article 24, § 2, 1°, de la loi du pacte scolaire, l'approbation de l'Exécutif flamand pour pouvoir dispenser un enseignement traditionnel;

Considérant que cette défense manque de pertinence; qu'il ne saurait être contesté en raison que, si l'arrêté attaqué n'était pas intervenu, les écoles auraient continué, conformément à l'arrêté royal du 29 juin 1984 relatif à l'organisation de l'enseignement secondaire, à dispenser un enseignement secondaire de type II, dénomination donnée par cet arrêté à l'enseignement «traditionnel»; que le simple fait que ce type II était fondé sur une répartition en deux cycles comportant chacun trois années - répartition en enseignement secondaire inférieur et supérieur-, alors que dans l'arrêté attaqué la «structure uniforme» - terme utilisé dans la note aux membres de l'Exécutif flamand, précédant l'arrêté attaqué - est répartie en trois degrés comportant chacun deux années scolaires - répartition qui, selop. la même note, «remplace la répartition en cycle supérieur et cycle inférieur» -, rend impossible de supposer que l'enseignement traditionnel puisse s'inscrire dans cette structure uniforme; qu'enfin, il ne saurait être invoqué contre les parties requérantes que la cause du préjudice réside dans le fait qu'aucune école n'a demandé l'approbation d'une structure «traditionnelle», alors que les intéressés contestent précisément que l'article 24, § 2, 1°, de la loi du pacte scolaire, en application duquel cette approbation devrait être demandée, procure le fondement légal requis à l'arrêté attaqué; qu'au surplus, il y a lieu de répéter ici qu'il n'est pas douteux, en raison, que, si l'arrêté attaqué n'avait pas été pris, l'enseignement traditionnel aurait continué à être dispensé et cela sans avoir recours à l'article 24, § 2, 1°;

2.5.1.2. Considérant que, pour affirmer que, si l'arrêté attaqué cause un préjudice, il n'appert pas que ce préjudice soit grave et difficilement réparable, la partie défenderesse soutient en premier lieu que les parties requérantes ne démontrent rien en alléguant qu'il se produirait une rupture quasi irréparable dans la formation jusqu'à ce qu'un enseignement traditionnel puisse de nouveau être dispensé;

Considérant qu'aux yeux du Conseil, la signification et le sens de cette allégation sont parfaitement clairs; qu'elle signifie qu'à moins qu'une suspension ne permette la continuation de l'enseignement traditionnel, les enfants seront obligés de suivre un enseignement conforme à la structure prévue par l'arrêté attaqué, de telle sorte que, lorsqu'ils pourront à nouveau suivre un enseignement traditionnel après annulation de cet arrêté, ils ne pourront le faire sans qu'il y ait eu une interruption dans leur formation selon ce type d'enseignement; que cela doit effectivement être qualifié de préjudice grave et difficilement réparable; que, par contre, il n'en est ainsi qu'en ce qui concerne les enfants qui entreprennent des études secondaires au cours de l'année secondaires au cours de l'année scolaire 1989-1990; que pour ceux qui n'entreprendront ces études que par la suite, le préjudice susvisé n'existe pas encore; que pour les enfants qui suivent déjà l'enseignement secondaire, ce préjudice n'existe pas du tout, compte tenu des dispositions transitoires de l'arrêté attaqué, qui leur permettent de continuer à suivre l'enseignement traditionnel; que, toutefois, parmi les enfants pour lesquels agissent les parties requérantes, certains doivent entreprendre des études secondaires pendant l'année scolaire 1989-1990, à savoir Koenraad Hardeman,

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.144 à 33.148 Page 5 N° 33.145

Eike Buggenhout, Kirsten Van den Troost et Dagmar Uythethofken; qu'en ce qui concerne ces enfants, la «rupture» visée par les parties requérantes correspond, dès lors, à une réalité qui cause un préjudice grave et difficilement réparable; que pour que la demande de suspension puisse être reconnue fondée, il n'est pas requis que toutes les parties requérantes subissent pareil préjudice;

2.5.1.3. Considérant que la partie défenderesse objecte qu'en admettant que l'arrêté attaqué cause un préjudice et qu'il soit démontré que ce préjudice est grave et difficilement réparable, il n'en demeure pas moins que le Conseil doit mettre en balance les intérêts en présence; qu'elle estime que la suspension d'un arrêté réglementaire - adjectif qu'elle souligne - «serait cause dans l'enseignement d'un désordre et d'une corifusion indescriptibles, tant chez les pouvoirs organisateurs qu' auprès des enseignants et des élèves», inconvénient contre lequel ne peut prévaloir l'inconvénient que les enfants soient privés d'un enseignement traditionnel;

Considérant que cet argument ne serait convaincant que si !'arrêté attaqué devait être suspendu dans sa totalité; qu'il peut cependant être fait droit à l'intérêt que les parties requérantes cherchent à sauvegarder, en suspendant l'arrêté attaqué dans la mesure où il dénie purement et simplement aux écoles le droit de continuer à dispenser un enseignement traditionnel, conformément au Titre III «Enseignement secondaire de type il» de l'arrêté royal du 29 juin 1984 relatif à !'organisation de !'enseignement secondaire; que les parties requérantes ne paraissent pas en demander plus;

2.5.1.4. Considérant que la partie défenderesse argumente, en outre, que l'arrêté attaqué ne peut en aucun cas être cause d'un préjudice pour les parties requérantes, puisqu'il est déjà suspendu en ce qui les concerne; que pour rejeter cet argument, le Conseil se réfère à la considération énoncée au point 1.5.1.;

2.5.1.5. Considérant qu'enfin, la partie défenderesse invoque l'argument que, sauf en ce qui concerne les parties requérantes, les écoles ont mis en oeuvre l'arrêté attaqué depuis le 1er septembre 1989, puisqu'elles ont adopté la structure qui y est prévue; qu'elle en déduit que, dès lors, le prétendu préjudice est déjà en grande partie réalisé et qu'une suspension ne peut, par conséquent, produire l'effet préventif voulu;

Considérant que cet argument manque de sérieux; qu'une demande de suspension sera nécessairement introduite, bien souvent, alors que l'exécution de l'arrêté dont la suspension est demandée à déjà été entreprise; que la loi n'a pas subordonné l'accueil de la demande à la condition que l'exécution de l'arrêté concerné n'ait pas encore été entreprise;

2.6. Considérant qu'il ressort de ce qui précède que les conditions sont remplies pour ordonner, dans les limites prévues sous le point 2.5.1.3., la suspension demandée,

(Suspension de l'exécution de l'arrêté du 5 avril 1989 de !'Exécutif flamand, relatif à l'organisation de l'enseignement secondaire, dans la mesure où cet arrêté rend impossible de continuer à dispenser un enseignement secondaire de type II, conformément à l'arrêté royal du 29 juin 1984 relatif à l'organisation de l'enseignement secondaire - publication de l'arrêt par extrait au Mo_niteur belge, dans les mêmes formes que l'arrêté suspendu).

N° 33.145

ARRET du 11 octobre 1989 (IIIe Chambre) MM. Van Aelst, président de chambre, François, rapporteur, et Mme Thomas, conseillers, et M. Hoeffler, premier auditeur.

GOOSSENS et NIHARD (Me Cambier) c/ Ville de Namur (Me Bouillard) - Parties intervenantes: Abel et consorts (Mes Lagasse et Jakhian)

1. BATISSE ET LOTISSEMENT- Permis de bâtir - Recours au Conseil d'Etat - Délai -Tiers

Lorsqu'un permis de bâtir est suspendu par le fonctionnaire délégué, le délai de recours en annulation de ce permis commence à courir le jour où la levée de la suspension est notifiée au requérant.

II. BATISSE ET LOTISSEMENT - Procédure administrative d'octroi des permis - Introduction des demandes - Plan d'implantation

Le permis de bâtir doit être annulé en tant qu'il n'indique pas les arbres à maintenir ou à abattre, lorsque le plan n'indiquait pas les arbres.

La circonstance que les arbres étaient visibles sur des photos accompagnant la demande ne garantit pas que leur emplacement pût être déterminé avec précision.

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.145

Arrêts Nos 33.144 à 33.148

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Peu importe que les arbres eussent été plantés en infraction aux dispositions d'un plan particulier.

III. BATISSE ET LOTISSEMENT - Permis de bâtir - Existence d'un plan particulier d'aménagement - Généralités

1. En l'espèce, la partie supérieure de la façade, prise dans la hauteur du toit entre deux bandes inclinées couvertes d'ardoises, reste un ouvrage dépendant du comble car elle peut être qualifiée de lucarne bien qu'elle soit large et qu'elle ne soit pas séparée du reste de cette façade.

2. Le nombre des étages sous corniche et la hauteur sous corniche doivent être appréciés en tenant compte de la corniche inférieure et non de celle de la lucarne.

3. La circonstance que le plancher des combles est situé plus haut que la corniche n'affecte pas ce qu'il est d'usage de considérer comme le nombre des étages sous corniche.

4. Le permis de bâtir qui prévoit de simples emplacements de parcage n'équivaut pas à un permis de bâtir délivré pour couvrir ces emplacements d'un revêtement dur. Il est compatible avec le plan particulier en ce que celui-ci affecte la zone à des espaces libres.

IV. BATISSE ET LOTISSEMENT - Permis de bâtir - Existence d'un plan particulier d'aménagement - Plan en cours de revision

L'intention du conseil communal de modifier un plan particulier ne produit pas d'effets juridiques avant que la modification soit accomplie.

Vu la requête introduite le . 21 décembre 1987 par Jean Goossens et son épouse Gabrielle Nihard qui poursuivent l'annulation du permis de bâtir délivré le 2 septembre 1987 par la ville de Namur pour la construction d'un immeuble boulevard de la Meuse 31 à Jambes;

Vu la requête introduite le 8 septembre 1988, par laquelle Paul Abel et son épouse Colette Walbrecq ainsi que la société de personnes à responsabilité limitée «Fiduciaire Sud Belge» demandent à être reçus en qualité de parties intervenantes;

Vu l'ordonnance du 16 septembre 1988 accueillant ces interventions;

Considérant que les intervenants se virent refuser un permis de bâtir par le collège des bourgmestre et échevins de Namur, le 24 juin 1987, au motif que leur projet prévoyait quatre étages au lieu des trois imposés par les prescriptions urbanistiques; qu'ils firent une nouvelle demande dont il leur fut accusé réception le 10 juillet 1987 et, afin de répondre à certaines objections, modifièrent, le 24 août 1987, cette même demande; que le collège prit, le 2 septembre 1987, la délibération suivante:

«Vu le projet de construction d'un immeuble à usage de bureaux et d'appartements, boulevard de la Meuse, 31, à Jambes, pour le compte de M. et Mme Abel-Walbrecq et de la sprl Fiduciaire Sud Belge;

»Attendu que le projet, prévoyant 4 étages avec une hauteur de 14,10 m sous corniche, déroge, en ce qui concerne le nombre d'étages, aux prescriptions du P.P.A. n° 5 de Jambes (A.R. du 28.12.1948), qui en impose 3 avec une hauteur maximum de 14,25 m;

»Que dès lors le projet a été soumis à l'enquête publique prévue par l'article 247, 8°, de l'arrêté de l' Exécutif régional wallon du 14 mai 1984; ·

»Vu les 3 pétitions (13, 67 et 134 signatures) et les 7 réclamations individuelles parvenues lors de cette enquête;

»Vu le rapport détaillé du service technique urbanisme;

»Attendu que M. Abel a présenté un projet modifié, le ramenant à 3 étages avec une hauteur de 12,25 m sous corniche, ce qui est tout à fait conforme auxdites prescriptions urbanistiques;

»Vu le nouveau rapport favorable du service technique;

»Vu l'article 48 de l'arrêté précité,

»Décide:

»l. de considérer comme sans objet la demande de dérogation sollicitée par les intéressés, pour la construction d'un immeuble à 4 étages avec une hauteur de 14,10 m sous corniche;

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»2. d'accorder à M. et Mme Abel-Walbrecq et à la Fiduciaire Sud Belge le permis de construire un immeuble de 3 étages avec une hauteur de 12,25 m sous corniche, boulevard de la Meuse, 31, à Jambes, conformément aux nouveaux plans présentés.»;

qu'à la suite d'une suspension du permis par le fonctionnaire délégué, qui ne fut d'ailleurs pas suivie d'annulation, le collège décida, le 30 septembre 1987, «de maintenir sa décision du 2 septembre 1987, sauf en ce qui concerne les garages qui devront être réduits à de simples emplacements de parcage»;

Considérant que la ville déduit une fin de non-recevoir de ce que le recours a été introduit plus de soixante jours après la prise de connaissance de l'acte attaqué;

Considérant que la décision attaquée a été suspendue par le fonctionnaire délégué; que la levée de la suspension a été notifiée aux requérants par une lettre de la partie adverse du 17 novembre 1987; que le recours est recevable;

' Considérant que les requérants prennent un premier moyen de la violation des articles 203 à 206 du Code

wallon de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme,

«en ce que le dossier joint à la demande de permis de bâtir ne comprenait pas:

»1° - un plan d'implantation figurant l'emplacement des arbres à haute tige à maintenir ou à abattre;

»2° - les plans concernant l'aménagement du jardin;

»3° - trois photos numérotées, représentant la parcelle et les bâtiments contigus avant l'exécution des travaux;

»4° - un plan d'implantation des bâtiments à maintenir ou à démolir existant sur la parcelle;

»5° - les renseignements et la localisation du système de chauffage de la cheminée et des voies d'évacuation ainsi que, le cas échéant, l'emplacement des citernes;»;

qu'ils précisent dans le mémoire en réplique que deux cèdres de douze mètres de hauteur étaient dans la parcelle litigieuse, que les plans annexés à la demande de juillet 1989 n'indiquaient pas le gabarit des garages et que d'ailleurs rien ne prouve que le collège ait eu connaissance des documents annexés à cette demande puisqu'il n'a accueilli que celle du 24 août 1987, laquelle n'était accompagnée que de quelques esquisses;

Considérant qu'en raison de la décision du 30 septembre 1987 du collège, le grief relatif aux garages est sans objet; que plusieurs griefs manquent en fait car la demande du 24 août, n'étant qu'une modification apportée à celle de juillet, se réfère, sous réserve de ce qui est modifié, aux documents qui l'accompagnaient, et le dossier contient des plans tenant compte de cette modification et portant un cachet de la ville indiquant qu'ils sont ceux sur le vu desquels le permis a été délivré; que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, rien ne prouve que le collège n'ait pas examiné ces plans ou ait été induit en erreur; que le seul grief fondé est relatif aux arbres à maintenir ou à abattre, cèdres selon les requérants, cyprès selon la partie adverse; que les plans n'indiquent pas ces arbres, contrairement à ce que prescrit la disposition invoquée au moyen; que la circonstance qu'ils étaient visibles sur des photos accompagnant la demande ne garantit pas que leur emplacement pût être situé avec précision, et ne permet donc pas d'affirmer, comme le fait la partie adverse, qu'ils devaient être abattus tous les deux pour aménager des endroits de parcage ou pour en permettre l'accès; que la circonstance, invoquée dans le dernier mémoire de la partie adverse, que ces arbres auraient été plantés en infraction aux dispositions d'un plan partic,ulier n'est pas pertinente; que le moyen est fondé en tant qu'il a trait aux arbres situés sur la parcelle litigieuse;

Considérant que les requérants prennent un deuxième moyen de la violation du plan particulier d'aménagement n° 5, approuvé par le Roi le 28 décembre 1948, modifié par un arrêté royal du 25 mars 1952, en ce que, première branche, la façade du bâtiment aurait au moins un étage de plus qu'il n'est permis, deuxième branche, la hauteur sous corniche de la construction autorisée serait de 15 mètres au lieu de 14 mètres 25, troisième branche, la profondeur du bâtiment serait de 13 mètres plus celle des balcons et loggias, au lieu de 12 mètres, quatrième branche, la hauteur sous corniche excéderait de plus de 4 mètres celle de l'immeuble voisin des requérants alors qu'une délibération du conseil communal du 8 octobre 1951 fixe un maximum de 2 mètres, cinquième branche, les balcons et loggias, autorisés dans les seules zones de recul et si leur profondeur n'excède pas un maximum d'ailleurs dépassé en l'espèce, ont été prévus alors que le bâtiment litigieux ne se trouve pas dans une telle zone, sixième branche, des bureaux sont prévus là où le plan particulier ne permet de construire que des «immeubles à usage d'habitation», septième branche, des garages séparés sont autorisés alors que les garages doivent être compris dans l'immeuble à construire, huitième branche, ces mêmes garages atteignent un volume total de 162 mètres cubes alors que dans la zone de cours et jardins où ils sont prévus, seule est permise la construction de «poulaillers, chenils, petits refugiums, dont l'ensemble ne dépasserait pas 25 mètres cubes»; que les requérants ajoutent notamment dans le mémoire en réplique et le dernier mémoire, à propos de la troisième branche, que, même si l'on distingue une corniche de lucarne et une corniche principale, il reste que celle-ci est placée plus haut que le plancher du quatrième étage, de sorte que le bâtiment a, sinon quatre, du moins plus de trois étages sous la corniche, alors que le plan particulier en indique trois;

Considérant, sur les première, deuxième et quatrième branches, que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, la partie supérieure de la façade, prise dans la hauteur du toit entre deux bandes inclinées couvertes d'ardoises, reste un ouvrage dépendant du comble car elle peut être qualifiée de lucarne bien qu'elle soit large et

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qu'elle ne soit pas séparée du reste de cette façade; que le nombre des étages sous corniche et la hauteur sous corniche, appréciés en tenant compte de la corniche inférieure et non de celle de la lucarne, sont conformes aux prescriptions invoquées; que la circonstance, rappelée dans le mémoire en réplique, que le plancher des combles est situé plus haut que la corniche, n'affecte pas ce qu'il est d'usage de considérer comme le nombre des étages sous corniche; que, avant d'être modifié, le plan particulier disposait que «pour les immeubles mentionnés à 3 étages», mention qui figure sur la partie graphique du plan pour l'immeuble litigieux, la hauteur va «du minimum 12,25 m au maximum 14,25 m»; que la modification approuvée par l'arrêté royal du 25 mars 1952 est libellée en ces termes, en ses dispositions a et b:

«a) - Dans les différentes zones de constructions, le nombre d'étages à réaliser pourra être réduit d'une unité, pour autant qu'il s'agisse d'immeubles adossés ou à adosser à des bâtiments existants, en bon état, non susceptibles d'expropriation, et dont le nombre d'étages est inférieur à ce qui est prévu au plan.

>>--De toutes façons, la différence des hauteurs sous corniches de deux bâtiments voisins ne pourra jamais excéder deux mètres.

>>---Lorsque le bâtiment à construire ou à modifier n'est pas accolé à une bâtisse, ou qu'il en existe une mais que celle-ci est à exproprier ou en mauvais état, il pourra être fait usage de la dérogation ci-dessus, pour autant que la différence des hauteurs sous corniches dudit bâtiment à construire ou à modifier et de l'immeuble le plus voisin, non susceptible d'expropriation et en bon état, ne soit pas supérieure à deux mètres.

»b) Les cotes minima de hauteurs sous corniches sont supprimées. Subsistent seules les cotes maxima.»;

que ces dispositions ne limitent la différence des hauteurs sous corniche entre deux bâtiments voisins que pour l'hypothèse où il est fait usage de la dérogation qu'elles prévoient au nombre d'étages indiqué au plan particulier;

Considérant, sur les troisième et cinquième branches, que les excroissances situées à l'arrière peuvent être admises en tant que le plan particulier prévoit une zone d'annexes, celles-ci n'étant pas limitées, comme le soutiennent les requérants, à un seul niveau; que les requérants ne critiquent pas celles qui sont prévues à l'avant du bâtiment en tant qu'elles dépassent l'alignement et surplombent le domaine public, mais en tant qu'elles excèdent la profondeur maximum assignée par le plan particulier aux bâtiments érigés dans la «zone de constructions fermées», alors que la partie du bâtiment projeté qui est implantée dans cette zone n'excède pas cette profondeur;

Considérant, sur les sixième, septième et huitième branches, que les bureaux prévus sont accessoires; que, dans la zone de .cours et jardins, l'acte attaqué prévoit non pas des garages, ce qui ne se pourrait, mais «de simples emplacements de parcage», ce qui n'équivaut pas à un permis de bâtir délivré pour couvrir ces emplacements d'un revêtement dur, et est compatible avec le plan particulier en ce que celui-ci affecte ladite zone notamment à des «espaces libres»;

Considérant que le deuxième moyen ne peut être retenu;

Considérant que les requérants prennent un troisième moyen de ce que le collège n'a pas tenu compte des intentions manifestées par le conseil communal qui avait, dans une délibération du 20 mai 1987, sollicité l'autorisation de réviser les plans particuliers d'aménagement des bords de la Meuse afin de réduire les hauteurs des immeubles qui pouvaient être autorisées;

Considérant que l'intention du conseil communal de modifier un plan particulier d'aménagement ne produit pas d'effets juridiques liant le collège avant que la modification soit accomplie; que le moyen ne peut être retenu;

Considérant que les requérants prennent dans leur réplique un quatrième moyen de ce que l'acte attaqué n'aurait pas accueilli une demande véritable mais une simple lettre où la modification d'une demande antérieure était envisagée, lettre contenant pour seule annexe des esquisses;

Considérant que l'acte attaqué se réfère non seulement à une correspondance dans laquelle les auteurs du projet s'efforcent de tenir compte des objections de l'administration mais aussi de la demande dont il fut accusé réception le 10 juillet 1987 et que cette correspondance ne tendait qu'à modifier; que le moyen manque en fait,

(Annulation du permis de bâtir délivré le 2 septembre 1987 par le collège des bourgmestre et échevins de la ville de Namur à M. et Mme Abel-Walbrecq et à la société de personnes à responsabilité limitée Fiduciaire Sud Belge pour la construction d'un immeuble à usage de bureaux et d'appartements, boulevard de la Meuse 31 à Jambes en tant qu'il n'indique pas quels sont, dans le jardin, les arbres à maintenir ou à abattre - rejet de la requête pour le surplus - dépens à charge des requérants à concurrence de 2.000 francs, de la partie adverse à concurrence de 4.000 francs et des parties intervenantes à concurrence de 3.0.00 francs).

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N°s 33.146 à 33.148 ARRETS du 11 octobre 1989 (IIIe Chambre)

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N°8 33.146 à 33.148

33.146 - BEN MOUSSA: recours sans objet à la suite de la revision de l'acte attaqué.

33.147 - DOUNBIA = n° 31.922, II à V.

33.148 - TBER = n° 33.112.

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.149 à 33.168 Page 1 N° 33.149

,..N° 33.149 IJ Y ARRET du 11 octobre 1989 (Ille Chambre)

~;,~\, MM .. Van Ad~lst, président de chambre, rapporteur, François et Mme Thomas, conseillers, et M. Falmagne, (,• , premier au tteur.

' '~~~\ 1,\-~ KILARCIYAN (Me Mahmourian) c/ Etat belge représenté par le Vice-Premier ministre

et ministre de la Justice et des Classes moyennes (Me Scarcez)

ETRANGERS - Police des étrangers - Etrangers à statut spécial - Réfugiés - Demande urgente de réexamen

1. Le fait que le ministre a adopté /'avis du Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides n'implique pas qu'il n'ait pas examiné lui-même la situation de /'étranger.

2. Le ministre n'a pas à répondre à tous les arguments de /'étranger dès lors que sa décision est fondée sur des motifs de nature à la justifier.

Vu la requête introduite Je 6 octobre 1988 par Avak Kilarciyan, de nationalité turque, qui demande l'annulation de «la décision de rejet d'une demande urgente de réexamen avec ordre de quirrer le territoire dans les cinq jours, prise le 12 juillet 1988 ... »;

Considérant que les faits sont les suivants:

- Le requérant est entré en Belgique, par avion, Je 28 mars 1986 et s'est déclaré réfugié au fonctionnaire du service de l'inspection des frontières du ministère de la Justice qui lui a délivré Je document intitulé annexe 25;

- Le même jour, il s'est rendu en Hollande afin d'y rejoindre des membres de sa famille. Il a introduit dans ce pays une demande de reconnaissance de la qualité de réfugié qui a été rejetée par une décision du 1 cr avril 1987.

- Le 15 mai 1988, le requérant est revenu en Belgique et y a introduit une demande de reconnaissance de la qualité de réfugié qui a été rejetée le 3 juin 1988.

- A la suite d'une demande urgente de réexamen, une décision de rejet - J'acte attaqué - a été prise le 12 juillet J 988 et a été notifiée Je 9 août 1988. Elle est motivée comme suit:

«Considérant que/' intéressé a déclaré qu'après les faits /'ayant amené à quirrer son pays, le 28 mars 1986, il a séjourné pendant deux ans aux Pays-Bas.

»li a demandé à être reconnu réfugié mais cerre qualité lui a été refusée.

»li a donc quirré ce pays en l'absence de craintes au sens de /'article 1, /"A (2) de la Convention de Genève du 28 juillet 195 J.

»Considérant qu'aucun élément nouveau n'est intervenu depuis lors.

»Considérant que dès lors, /'article 52, par. 1er, al. 2, 3", de la loi du 15 décembre 1980 s'applique en raison du fait qu'après avoir quirré son pays ou après les faits /'ayant amené à en demeurer éloigné /'étranger a résidé plus de trois mois dans un pays tiers et a quirré celui-ci en /'absence de craintes au sens de /'article 1cr A (2), de la Convention internationale relative au statut des réfugiés signée à Genève le 28 juillet 1951 .»;

Considérant que le requérant prend un moyen unique de la violation des articles 1er, 5, 26, 31, 32 et 33 de la convention relative au statut des réfugiés et des articles 63/2 et 63/3 de la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, Je séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers, en ce que:

«- la partie adverse devait procéder elle-même à un réexamen effectif de la décision de refus du 3 juin 1988, et ce même si l'avis du commissariat général était défavorable au requérant;

»- /'acre attaqué est une décision administrative prise dans le cadre d'un recours organisé par la loi en sorte que sa motivation doit être suffisante en fait et en droit;

»-- la partie adverse devait répondre ou, à tout le moins, tenir compte des arguments développés par le requérant;

>>--/'acte attaqué n'est pas, ou mal, motivé, dès lorsqu'il se fonde sur des circonstances de fait et de droit inexactes;»;

Considérant qu'il ressort du dossier que la partie adverse a procédé à un nouvel examen du cas de l'intéressé, notamment en s'éclairant de l'avis du Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides; que le fait qu'elle a adopté cet avis n'implique pas qu'elle n'a pas examiné elle-même la situation du requérant; que Je requérant ne conteste pas les éléments sur lesquels s'appuie la motivation de la décision; que la partie adverse n'avait pas à

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.149

Arrêts Nos 33.149 à 33.168

Page 2

répondre à tous les arguments du requérant dès lors que sa décision était fondée sur des motifs de nature à la justifier; que Je moyen n'est pas fondé,

(Rejet - dépens à charge du requérant).

N° 33.150

ARRET du 11 octobre 1989 (IIIe Chambre)

SINGH: acte attaqué purement confirmatif.

ARRET du 11 octobre 1989 (IIIe Chambre) t N° 33.151

°"""'·· MM. Van Aelst, président de chambre, rapporteur, François et Mme Thomas, conseillers, et M. Falmagne, premier auditeur.

GALLINA (Me Schils) c/ Etat belge représenté par le Vice-Premier ministre et ministre de la Justice et des Classes moyennes (Me Scarcez)

1. ETRANGERS - Police des étrangers - Renvoi et expulsion - Procédure d'expulsion - Avis de la Commission consultative des étrangers

Le Roi n'est pas tenu de suivre l'avis de la Commission consultative des étrangers.

II. ETRANGERS - Police des étrangers - Renvoi et expulsion - Motifs d'expulsion - Etranger portant atteinte à l'ordre public

Le Roi peut valablement estimer que, alors qu'un premier arrêté d'expulsion a été pris à l'égard de l'étranger et tenu en suspens, celui-ci, en persistant dans la délinquance, ne respecte pas la condition à laquelle la suspension était subordonnée, à savoir se conduire d'une manière irréprochable.

Vu la requête introduite le 14 octobre 1988 par Salvatore Gallina, de nationalité italienne, qui demande l'annulation de l'arrêté royal du 14 juillet 1988, notifié le 17 août 1988;

Vu J' arrêt n° 31.655 du 21 décembre 1988 rejetant la demande de sursis à exécution;

Considérant que le requérant est né en Belgique en 1956; que la commission consultative des étrangers a émis l'avis, le 7 octobre 1987, que son expulsion n'était pas justifiée; qu'elle écrivait:

«Les délits qui ont été réprimés par l'arrêt de la cour d'appel de Liège du J310811986 ne sont pas d'une gravité telle qu'ils justifieraient l' explusion de Salvatore Gallina, compte tenu des considérations qui ont été retenues dans un avis antérieur, du 2510211985, donné à l'occasion d'une première proposition d'expulsion et auxquelles la commission se réfère.»;

que le Roi a pris l'arrêté attaqué le 14 juillet 1988; que celui-ci est motivé comme suit:

«Considérant qu'entre 1975 et 1980, ils' est rendu coupable de vols qualifiés, tentative de vol qualifié, vols simples, faux et usage, escroquerie, recel, défaut de permis de conduire, faits établis pour lesquels il a d'ailleurs été condamné cinq fois entre le J7 juillet J975 et le J2 septembre J980 à des peines devenues définitives allant de 3 mois avec sursis de 5 ans pour la durée de l'emprisonnement qui excède la détention préventive déjà subie. à 6 mois d'emprisonnement avec sursis de 5 ans;

»Considérant qu'entre le J9 septembre J982 et le 24 août J983, il s'est rendu coupable de vols qualifiés, tentatives de vols qualifiés- JO faits dont un avec violences ou menaces, armes ou objets y ressemblant ayant été employés ou montrés - de port public de faux nom et vols simples, faits établis pour lesquels il a d'ailleurs été condamné le JO avril J984 à une peine devenue définitive de 2 ans d'emprisonnement et 50 Frs d'amende;

»Considérant qu'il lui a été notifié le 27 janvier 1978 qu'il serait éloigné du Royaume si son comportement laissait encore à désirer;

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.149 à 33.168 Page 3 N° 33.151

»Considérant que manifestement, il n'a pas tenu compte de cet ave/'fissement vu la récidh•e à plusieurs reprises;

»Vu l'avis de la commission consultative des étrangers du 6 février 1985, qui a estimé quel' expulsion était justifiée, mais serait inopportune, vu le degré d'intégration de l'intéressé dans la société belge;

»Considérant qu'il a été assujetti, le JI avril 1985 à un arrêté royal d'expulsion, dont l'exécution a été suspendue durant un délai d'épreuve de trois ans, à pa/'fir de la date de libération de l'intéressé, c'est-à-dire le 16 juillet 1985, délai d'épreuve pendant lequel l'intéressé devait être de rnnduire irréprochable, et se soumeure strictement à la tutelle lui imposée;

»Considérant qu'il a été libéré conditionnellement le 16 juillet 1985;

»Considérant que, de la fin 1985 au début de 1986, ils' est rendu coupable de plusieurs vols qualifiés, ainsi que d'un ce/ frauduleux de bijoux et de port d'arme prohibée, en l'occurrence un coup de poing américain; faits établis pour lesquels il ad' ailleurs été condamné, le 13 août 1986, à une peine devenue définitive de JO mois + I mois d'emprisonnement;

»Vu l'avis de la rnmmission consultative des étrangers du 7 octobre 1987, selon lequel les délits commis par Gallina Salvatore ne sont pas d'une gravité telle qu'ils justifieraient l'expulsion;

»Considérant, toutefois, que l'intéressé fair l'objet d'un arrêté d'expulsion dûment notifié, dont l'exécution a été suspendue durant une période d'épreuve de trois ans;

»Considérant que l' a/'ficle 2 dudit arrêté précise qu'il devra être de conduite irréprochable, et se soumeure à la tutelle lui imposée;

»Considérant que les nouveaux délits ont été commis pendant la période d'épreuve, et démontrent que {'intéressé ne s'est pas reclassé, et n'a donc pas respecté les conditions énoncées dans l'arrêté royal d'expulsion;

»Considérant, par conséquent qu'il n'y a pas lieu de suivre{' avis de la commission;

»Considérant qu'il résulte clairement des faits précités, de leur répétition, et de leur gravité que, par son comportement personnel, il a porté une aueinte grave à {'ordre public et que sa présence dans le pays, constitue une menace grave, réelle et actuelle, affectant un intérêt fondamental de la société belge;»;

Considérant que le requérant fait valoir qu'il a toujours vécu en Belgique, qu'il a l'intention d'épouser une Belge, que les faits qu'il a commis après le premier arrêté royal d'expulsion ne sont pas graves au point de justifier son expulsion;

Considérant que le Roi n'est pas tenu de suivre l'avis de la commission consultative des étrangers; qu'il a valablement pu estimer que, alors qu'un premier arrêté d'expulsion avait été pris à l'égard du requérant et tenu en suspens, celui-ci, en persistant dans la délinquance ne respectait pas la condition à laquelle la suspension de l'arrêté était subordonnée, à savoir se conduire d'une manière irréprochable; que le moyen n'est pas fondé,

(Rejet - dépens à charge du requérant).

N° 33.152

RET du 11 octobre 1989 (Ille Chambre) MM., Van A~lst, président de chambre, rapporteur, François et Mme Thomas, conseillers, et M. Falmagne,

, premier auditeur.

BEN DRISS (Mes Flobets et Beauthier) c/ Etat belge représenté par le Vice-Premier ministre et ministre de la Justice et des Classes moyennes (Me Scarcez)

1. ETRANGERS - Police des étrangers - Renvoi et expulsion - Motifs d'expulsion - Etranger portant atteinte à l'ordre public

1. Le Roi, en retenant des faits répétés de vols divers et de violation de la législation sur les stupéfiants qui ont valu à /'étranger des condamnations importantes, n'excède pas ses pouvoirs en estimant que celui-ci, par son comportement personnel, a gravement porté atteinte à /'ordre public.

2. En /'espèce, le Roi s'est conformé à /'avis de la Commission consultative des étrangers qui estimait que les faits étaient d'une gravité telle que /'expulsion de /'étranger était nécessaire nonobstant sa situation familiale, /'étranger étant divorcé sans enfant.

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.152

II. (voir n° 33.056, IV)

Arrêts Nos 33.149 à 33.168

Page 4

Yu la requête introduite le 7 octobre 1988 par lamai Eddine Ben Driss, de nationalité marocaine, qui demande l'annulation de «l'arrêté royal d'expulsion daté du 26.7.1988, (de) l'acte de notification daté du 12.8.1988, (de) /'arrêté ministériel de mise à la disposition du Gouvernement pris en date du 26.7.1988 et (de)/' acte de notification effectué en date du 12.8.1988»;

Yu l'arrêt n° 31.625 du 16 décembre 1988 rejetant la demande de sursis à exécution;

Considérant que le requérant, né en 1962, est entré en Belgique en 1966; qu'il a commis plusieurs faits délictueux; que la commission consultative des étrangers a émis 1 'avis, le 4 mai 1988, que son expulsion était justifiée; qu'elle écrivait:

«Le comportement de Ben Driss lamai Eddine justifie, par la gravité des atteintes portées par lui à l'ordre public, la proposition d'expulsion.

»Ces atteintes sont:

»I. le 4 mai 1985, il a participé à /'a/laque à main armée sur la voie publique d'un transporteur de fonds. Le butin se monta à 240.000 F. Sa participation a consisté à donner ou à faire donner à /'exécutant, un mineur d'âge, tous les renseignements utiles quant aux déplacements du transporteur au service de qui il se trouvait.

»2. Entre le 1a septembre et le 8 octobre 1985, il a détenu de /'héroïne et du haschisch. L'exposé des faits relate qu'il se faisait une piqûre d'héroïne par jour.

»3. Dans la nuit du 6 au 711011985, avec un coauteur, il a pénétré par effraction dans un magasin et y a dérobé du matériel de bureau pour une valeur de 215.000 F. Ce matériel fut retrouvé dans sa voiture automobile utilisée pour le transport du butin.

»4. Le 2 avril 1986, il fut appréhendé à /'arrivée d'un train venant d'Amsterdam. Il portait des traces récentes de piqûres aux bras. Il fut établi que, depuis le 2210811984, il usait en groupe de cannabis et d'héroïne.

»Des peines d'emprisonnement ont été prononcées de ces chefs à sa charge. »1. Le 3111211985, 1 an avec sursis probatoire partiel (2 et 3) »2. Le 6/0411987, 4 ans(/ et 4)

»L'intéressé est né au Maroc en 1962. li est venu en Belgique en 1966 avec ses parents. Ceux-ci y résident ainsi que plusieurs autres de leurs enfants.

»li a épousé une femme de nationalité marocaine le 27/0711983, mais, étant à Tanger, il/' a répudiée dès le 1810711984. li n'a pas d'enfant. Il possède un permis de travail. li a eu un emploi chez un imprimeur. Il a ensuite bénéficié d'allocations de chômage jusqu'en mai 1985. Depuis lors ses parents auraient assuré sa subsistance, dans la mesure des besoins qu'il ne pouvait satisfaire par ses agissements (pièce 6).

»Aucune circonstance ne permet de considérer que serait écartée la grave menace que fait craindre son comportement.

»Si /'éloignement d'un étranger doit être tenu pour une ingérence dans /'exercice de son droit au respect de sa vie privée et familiale au sens de /'article 8 de la Convention européenne des droits de /'homme et des libertés fondamentales, cette ingérence serait ici légitime, étant prévue par /a loi et constituant, dans le cas de /'intéressé et vu la gravité de la menace qui présenterait sa présence en Belgique, une messure nécessaire à la sûreté publique, à la défense de /'ordre et à la prévention des infractions pénales.»;

que, le 26 juillet 1988, le Roi a pris l'acte attaqué, motivé comme suit:

«Considérant qu'ils' est rendu coupable de vols qualifiés et détention de stupéfiants.faits établis pour lesquels il a d'ailleurs été condamné le 31 décembre 1985 à une peine devenue définitive d'un an d'emprisonnement et de 1000 frs d'amende avec sursis probatoire de trois ans pour la partie de /'emprisonnement principal qui dépasse la détention préventive et pour 900 frs de /'amende;

»Considérant qu'ils' est rendu coupable de vol à /'aide de violences ou menaces, en bande, avec armes; usage de stupéfiants en groupe; détenu, vendu ou offert en vente des stupéfiants; en récidive spécifique et légale, faits établis pour lesquels il a d'ailleurs été condamné le 6 avril 1987 à une peine devenue définitive de quatre ans d'emprisonnement et de I 000 frs d'amende;

»Considérant qu'il résulte des faits précités que, par son comportement personne/, il a porté une atteinte grave à /'ordre public;

»Vu /'avis de la commission consultative des étrangers»;

que, le 26 juillet 1988 a également été pris un arrêté ministériel de mise à la disposition du Gouvernement en vue de sa remise à la frontière;

Considérant que le requérant fait valoir qu'il n'a pas gravement porté atteinte à l'ordre public, invoque la violation de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.149 à 33.168 Page 5 N° 33.152

fondamentales en ce qu'il n'a pas été tenu compte de sa situation familiale, met en doute les circonstances exceptionnellement graves invoquées pour sa mise à la disposition du Gouvernement en vue de sa remise à la frontière et soutient que cet arrêté ministériel empêche sa mise en liberté et ne pouvait être délivré qu'à la fin de la détention;

Considérant que le Roi, en retenant des faits répétés de vols divers et de violation de la législation sur les stupéfiants qui ont valu au requérant des condamnations importantes, n'a pas excédé Ses pouvoirs en estimant que celui-ci, par son comportement personnel, avait gravement porté atteinte à l'ordre public; que le Roi S'est conformé à l'avis de la commission consultative des étrangers qui estimait que les faits commis par le requérant étaient d'une gravité telle que son expulsion était nécessaire nonobstant sa situation familiale, le requérant étant divorcé sans enfant; que les deux autres arguments sont dirigés contre l'arrêté ministériel de mise à la disposition du Gouvernement qui n'est qu'une mesure d'exécution de l'arrêté royal d'expulsion et dont le vice éventuel ne pourrait affecter la légalité de ce dernier;

Considérant que le recours n'est pas fondé,

(Rejet - dépens à charge du requérant).

N° 33.153

RET du 11 octobre 1989 (Ille Chambre) MM. Van Aelst, président de chambre, rapporteur, François et Mme Thomas, conseillers, et M. Falmagne,

» premier auditeur.

BAKIR (Mes Demolin et Brulard) c/ Etat belge représenté par le Vice-Premier ministre et ministre de la Justice et des Classes moyennes (Me Scarcez)

ETRANGERS - Police des étrangers - Renvoi et expulsion - Motifs d'expulsion - Etranger portant atteinte à l'ordre public

Le Roi n'excède pas son pouvoir d'appréciation en déduisant des faits de viol commis par l'étranger que celui-ci, par son comportement personnel, a porté une atteinte grave à l'ordre public et que ces faits constituent une menace telle que ses intérêts familiaux ne peuvent prévaloir sur la sauvegarde de l'ordre public .

... Alors spécialement que la commission consultative a relevé que l'intéressé était divorcé, avait un enfant confié à la garde de la mère et que, de toute sa famille, seul un frère réside en Belgique.

Vu la requête introduite le 18 octobre 1988 par Mustafa Bakir, de nationalité turque, qui demande l'annulation de l'arrêté royal d'expulsion du 13 juillet 1988, notifié le 20 août 1988;

Vu l'arrêt n° 31.626 du 16 décembre 1988 rejetant la demande de sursis à exécution;

Considérant que le requérant, né en 1959, est entré en Belgique la même année; qu'il a épousé, en 1978, une Belge dont il a divorcé en 1986; que, le 13 juillet 1988, le Roi a pris l'arrêté attaqué, motivé comme suit:

«Considérant qu'il s'est rendue.a. coupable de viol à l'aide de violences sur une mineure âgée de plus de 16 ans accomplis, faits établis pour lesquels il a d'ailleurs été condamné, le 30 juin 1987, à une peine, devenue définitive, de 3 ans d'emprisonnement, 5 francs d'amende et interdiction pendant 5 ans des droits énoncés à/' article 31 du Code pénal, alinéas/, 3, 4 et 5;

»Considérant qu'il résulte des faits précités que, par son comportement personnel, il a porté une atteinte grave à /'ordre public;

»Considérant que la menace très grave, résultant pour /'ordre public du comportement de /'intéressé est telle que ses intérêts familiaux et personnels, et ceux des siens, ne peuvent, en /'espèce, prévaloir sur la sauvegarde de /'ordre;

»Vu /'avis de la commission consultative des étrangers concluant à /'expulsion;»;

que, le 13 juillet 1988 également, a été pris un arrêté ministériel de mise à la disposition du Gouvernement en vue de sa remise à la frontière, déclarant l'existence de circonstances exceptionnellement graves à savoir le viol et le fait que le requérant «a menacé sa première femme de vengeance avec l'intention de lui enlever son enfant»;

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.153

Arrêts Nos33.149 à 33.168

Page 6

Considérant que le requérant conteste, en un premier moyen, la gravité de l'atteinte qu'il aurait portée ou porterait encore à l'ordre public et invoque, en un deuxième moyen, la violation de l'article 8, deuxième alinéa, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en ce que le Roi n'aurait pas tenu compte de sa situation familiale; qu'à l'audience du 14 décembre 1988, le requérant a renoncé à son troisième moyen;

Considérant que le Roi n'a pas excédé Son pouvoir d'appréciation en déduisant des faits de viol commis par le requérant que celui-ci, par son comportement personnel, avait porté une atteinte grave à l'ordre public et que ces faits constituaient une menace telle que ses intérêts familiaux ne pouvaient prévaloir sur la sauvegarde de l'ordre public, la commission consultative des étrangers relevant d'ailleurs que le requérant est divorcé, a un enfant confié à la garde de la mère et que, de toute sa famille, seul un frère réside en Belgique; que les moyens ne sont pas fondés,

(Rejet - dépens à charge du requérant).

l N° 33.154

'i ARRET du 11 octobre 1989 (Ille Chambre) . MM. Van Aelst, président de chambre, rapporteur, François et Mme Thomas, conseillers, et M. Falmagne,

\ premier auditeur.

EL AMRI c/ Etat belge représenté par le Vice-Premier ministre et ministre de la Justice et des Classes moyennes (Me Scarcez)

1. ETRANGERS - Police des étrangers - Renvoi et expulsion - Motifs d'expulsion - Etrangers portant atteinte à l'ordre public

En l'espèce, le Roi a pu estimer avec la commission consultative que /'étranger, par son comportement personnel, avait porté à l'ordre public une atteinte telle que la nécessité de l'éloigner primait ses intérêts familiaux.

II. (voir n° 33.028, 1)

Vu la requête introduite le 4 novembre 1988 par Mohamed El Amri, de nationalité marocaine, qui demande l'annulation de l'arrêté royal d'expulsion qui lui a été notifié le 20 octobre 1988;

Considérant que le requérant, né en Belgique en 1966, a fait l'objet d'un arrêté royal d'expulsion du 26 septembre 1988 motivé comme suit:

«Considérant qu'entre le 31janvier1985 et le 3 novembre 1986, ils' est rendu coupable de tentative de vol, de vols, de vols avec effraction, violences, usage (d' )armes et (de) véhicule volé, faits établis pour lesquels il a d'ailleurs été condamné le 25 mai 1987 à une peine devenue définitive de 4 ans d'emprisonnement;

»Considérant qu'il résulte des faits précités que, par son comportement personnel, il a porté une atteinte grave à /'ordre public;

»Vu /'avis de la commission consultative des étrangers qui estime que /'expulsion est justifiée;»;

Considérant que le requérant allègue que ses parents vivent en Belgique depuis 1950, que lui-même et ses frères et soeurs y sont nés et y ont fait des études, qu'il n'est jamais allé au Maroc sinon en vacances scolaires et qu'il n'y a aucune famille;

Considérant que la requête, qui ne contient aucun moyen contestant la légalité de l'acte attaqué, n'est pas recevable; qu'à supposer que le requérant ait implicitement invoqué la violation de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le recours ne serait pas fondé, le Roi ayant valablement pu déduire avec la commission consultative des étrangers que le requérant, par son comportement personnel, avait porté à l'ordre public une atteinte telle que la nécessité de l'éloigner primait ses intérêts familiaux,

(Rejet - dépens à charge du requérant).

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

Page 48: (VIe - KU Leuven · 33.103 - CLOETENS et REKOMS = n° 33.100 +désistement. RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989 . Arrêt N° 33.107 Page 1 N° 33.107 ARRET du 3octobre1989

Arrêts Nos 33.149 à 33.168 Page 7

N°5 33.155 à 33.168

ARRETS du 11 octobre 1989 (Ille Chambre)

33.155 et 33.156 - EL KADAOVI et GUARINO: recours tardifs.

33.157 - OTOMBIO = n° 31.922, II à IV.

33.158 - MALIK: requête sans moyen de droit.

33.159 - YAZIDI = n° 31.922, I + n° 33.158.

33.160 - MAHDI: recours tardif.

N° 33.155

33.161 - AYDIN: recours sans objet contre un ordre de quitter le territoire exécuté volontairement.

33.162 à 33.164 - VLIETINCK ET MISSON et autres: situation de l'étranger régularisée.

33.165 à 33.168 - BONSIGNORE et autres: désistement.

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D"ETAT - 1989

Page 49: (VIe - KU Leuven · 33.103 - CLOETENS et REKOMS = n° 33.100 +désistement. RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989 . Arrêt N° 33.107 Page 1 N° 33.107 ARRET du 3octobre1989

Arrêts Nos 33.169 à 33.189 Page 1

N° 33.169 ARRET du 11 octobre 1989 (me Chambre)

N° 33.169

MM. François, président, Mme Thomas, rapporteur, et M. Hanotiau, conseillers, et Mme Haubert, auditeur.

BOSMANS (Me Van den Dorpe) c/ Etat belge représenté par le Ministre des Affaires sociales (Me Slusny)

HOPITAUX - Etablissements psychiatriques

Il résulte de l'article 3, 4°, de la loi du 18 juin 1850 et des articles le'', 2 et 3 de l'arrêté royal du 4 juin 1920 que le montant des retenues et versements à effectuer pour les établissements psychiatriques pour alimenter le fonds spécial en vue d'assurer le paiement des traitements des médecins est déterminé par le Roi. Le Roi n'a pas délégué ses pouvoirs au ministre.

Vu la requête introduite le 5 septembre 1988 par Michel Bosmans, médecin aliéniste à l'institut «Centre psychiatrique Saint-Bernard» à Manage, qui demande l'annulation de l'arrêté du Ministre des Affaires sociales du 6 mai 1988, publié au Moniteur belge du 7 juillet 1988, modifiant à titre transitoire le mode de calcul du traitement des médecins psychiatres dans les services fermés;

Considérant que l'article 3, 4°, de la loi du 18 juin 1850 sur le régime des aliénés dispose que le gouvernement fixe le traitement des médecins des établissements destinés aux aliénés, à la charge de ces établissements, et en règle le mode de paiement; que l'arrêté royal du 4 juin 1920 institue «un fonds spécial destiné à assurer le paiement des traitements des médecins d'asiles d'aliénés et des frais accessoires du service médical» (article 1er), fonds «alimenté par des retenues ou versements opérés sur le montant du prix de la journée d'entretien pour les asiles qui reçoivent des aliénés indigents et par des versements trimestriels pour les asiles qui reçoivent des pensionnaires» (article 2); que l'article 3 dispose que le montant de ces retenues et de ces versements est déterminé par le Roi; qu'un arrêté ministériel du 20 septembre 1976, non publié au Moniteur, a modifié «à titre transitoire le mode de calcul du traitement des médecins visés par l'article 3, 4° de la loi du 18 juin 1850 sur le régime des aliénés»; qu'en son article 1er, § 1er, 1°, deuxième alinéa, cet arrêté ministériel dispose qu'à partir du 1er janvier 1976, les établissements accueillant des aliénés et qui ont conclu une convention prévue par la loi du 9 août 19_63 instituant et organisant un régime d'assurance obligatoire contre la maladie et l'invalidité versent au fonds spécial, par journée d'entretien et suivant le nombre de malades séjournant dans l'établissement, un montant «de trente et un francs, vingt et un francs, quinze francs ou huit francs selon que la somme forfaitaire journalière allouée aux établissements est de cinquante-sept francs, quarante-sept francs, quarante et un francs ou vingt-huit francs»; qu'un arrêté ministériel du 4 août 1986 a augmenté ces montants pour les années 1983, 1984, 1985 et 1986; que l'arrêté ministériel attaqué du 6 mai 1988 dispose en un article unique:

<<A partir du l',. janvier 1988 les montants prévus à l'article 1, par. 1, 1°, alinéa 2, destinés à assurer le paiement des traitements des médecins sont adaptés comme suit: vingt-cinq francs lié à l'indice pivot 132.65 de l'indice des prix à la consommation.»;

Considérant qu'aux termes d'un moyen unique, le requérant invoque la violation de l'article 3, 4°, de la loi du 18 juin 1850; qu'il expose notamment qu'il appartenait au Roi et non au ministre de prendre l'acte attaqué;

Considérant que la partie adverse répond que l'arrêté ministériel du 6 mai 1988 n'est pas contraire à la loi du 18 juin 1850 «puisqu'il détermine la manière dont le fonds est alimenté, lequel fonds a été créé par le Roi»; qu'elle soutient que l'acte attaqué exécute ainsi l'arrêté royal du 4 juin 1920 et ajoute que «depuis l'arrêté dit «De Saegen> du 20 septembre 1976, tous les arrêtés dans cette matière sont pris selon cette procédure»;

Considérant qu'il résulte de l'article 3, 4°, de la loi du 18 juin 1850 et des articles 1er, 2 et 3 de l'arrêté royal du 4 juin 1920 que le montant des retenues et versements à effectuer par les établissements psychiatriques pour alimenter le fonds spécial en vue d'assurer le paiement des traitements des médecins est déterminé par le Roi; qu'Il n'a pas délégué ses pouvoirs au ministre; que le moyen est fondé,

(Annulation de l'arrêté ministériel du 6 mai 1988 modifiant à titre transitoire le mode de calcul du traitement des médecins psychiatres dans les services fermés - publication de l'arrêt au Moniteur belge dans les mêmes formes que l'arrêté ministériel annulé - dépens à charge de l'Etat).

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.170

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ARRET du 11 octobre 1989 (Ille Chambre)*

Arrêts Nos 33.169 à 33.189

Page 2

M. François, président, Mme Thomas, rapporteur, et M. Hanotiau, conseillers, et Mme Haubert, auditeur.

A.S.B.L. FEDERATION BELGE DES CHAMBRES SYNDICALES DE MEDECINS et BOSMANS (Me Van den Dorpe) c/ Institut national d'assurance maladie­invalidité (M. Ghilain) et Etat belge représenté par le Ministre des Affaires sociales (M. Mathieu)

I. ASSURANCE MALADIE-INVALIDITE - Prestations de santé - Rapports avec les dispensateurs de soins - Conventions - Généralités (1 à 4)

II. COMPETENCE DU CONSEIL D'ETAT - Contentieux de l'annulation - Actes des autorités administratives (1) '

III. PROCEDURE - Requête - Désignation de la partie adverse - Recours contre des actes non juridictionnel - Auteur de l'acte attaqué (1 et 2)

IV. HOPITAUX - Etablissements psychiatriques (4)

1. Bien qu'elles soient qualifiées de conventions par la loi et issues de négociations, les conventions prévues par l'article 27 de la loi du 9 août 1963 ne sont pas des conventions légalement formées au sens de l'article 1134 du code civil mais produisent, lorsque les formalités requises par la loi ont été accomplies, les effets juridiques des règlements à l'égard de catégories de personnes dont certaines n'ont ni consenti ni participé à leur élaboration. Elles sont des actes annulables au sens de l'article 14 des lois coordonnées du 12 janvier 1973**.

2. Il résulte des termes mêmes de l'article 27 de la loi du 9 août 1963 que les commissions permanentes ont pour mission de négocier et de conclure les conventions au sein du service des soins de santé, lui-même institué au sein de l' I.N.A.M.I. et chargé de l'administration de l'assurance soins de santé. Elles sont, dans l'exercice de cette mission, des organes de l'Institut, lequel est partie adverse en cas de recours en annulation d'une convention.

3. Il résulte de l'article 31, § 3, de la loi du 9 août 1963 que les conventions ne peuvent produire d'effets si elles n'ont pas été approuvées par le ministre. Le recours en annulation de la convention comprend dans son objet l'arrêté ministériel qui l'a approuvée. Le ministre est partie adverse au recours.

4. Il résulte de l'article 3, 4°, de la loi du 18 juin 1850 et des articles 1.,., 2 et 3 de l'arrêté royal du 4 juin 1920 que c'est au Roi qu'il appartient de déterminer le montant de la contribution à verser par les établissements psychiatriques au fonds spécial créé en vue d'assurer le traitement des médecins psychiatres. Une convention nationale conclue entre les établissements psl.chiatriques et les organismes assureurs méconnaît les pouvoirs du Roi en réglant cet objet* *.

Vu la requête introduite le 18 février 1988 par l'association sans but lucratif Fédération belge des chambres syndicales de médecins et Michel Bosmans, médecin aliéniste, qui demandent l'annulation «del' article 4, § 6, de la Convention nationale conclue entre les établissements psychiatriques et les organismes assureurs» le 9 décembre 1987;

Considérant qu'une «Convention nationale entre les établissements psychiatriques et les organismes assu­reurs» a été conclue le 9 décembre 1987 sur la base des articles 26, 27 et 31 de la loi du 9 août 1963 instituant et organisant un régime d'assurance obligatoire contre la maladie et l'invalidité par la commission permanente compétente du service des soins de santé de l'Institut national d'assurance maladie-invalidité; que le comité de gestion du service des soins de santé a donné un avis favorable sur cette convention le 27 décembre 1987; que, le 30 décembre 1987, la convention a été approuvée par le ministre; qu'elle est entrée en vigueur le 1er janvier 1988; que la convention comprend un article 4, § 6, objet du recours, dont le premier alinéa est rédigé ainsi qu'il suit:

* Le texte ci-dessous tient compte de l'arrêt rectificatif n° 33.305, du 27 octobre 1989.

** Comparer: arrêt A.S.B.L. Fédération nationale des unions de classes moyennes, n° 32.348, du 12 avril 1989.

*** Comparer: arrêt Bosmans, n° 33.169, du 11 octobre 1989.

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.169 à 33.189 Page 3 N° 33.170

«Pour le bénéficiaire hospitalisé en service 40 (F), il est alloué une somme forfaitaire de 25 F qui couvre les honoraires pour la surveillance effectuée par un médecin et qui constitue la contribution à verser par les établissements au Fonds spécial créé par l'arrêté royal du 4 juin 1920.»;

Considérant que l'Institut national d'assurance maladie-invalidité, première partie adverse, soutient que le recours est irrecevable au motif que l'acte attaqué est un accord de volonté qui n'est pas un acte annulable au sens de !'article 14 des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat; qu'il ajoute que !'avis du comité de gestion du service des soins de santé n'est pas non plus un acte annulable; qu'il conclut que l'Institut national d'assurance maladie­invalidité ne peut être considéré comme ayant «pris en tant qu'autorité administrative un acte ou un règlement»;

Considérant qu'aux termes de l'article 27 de la loi du 9 août 1963 les «conventions» relatives à l'assurance soins de santé de la catégorie à laquelle appartient l'acte attaqué sont «négociées et conclues par» des commissions permanentes composées en nombre égal de représentants des organismes assureurs et des dispensateurs de soins, selon les règles fixées par le Roi; qu'ainsi le Roi a pu, à l'article 43 de l'arrêté royal du 4 novembre 1963 portant exécution de la loi du 9 août 1963 instituant et organisant un régime d'assurance obligatoire contre la maladie et l'invalidité, ne pas prévoir comme condition de validité de ces «conventions», l'assentiment unanime des entités composant ces commissions, que !'article 26 de la loi dispose que les conventions précitées règlent les rapports financiers et administratifs entre les bénéficiaires de l'assurance soins de santé et les organismes assureurs d'une part et, d'autre part, les dispensateurs de soins qu'il énumère; qu'en vertu de l'article 31 de la loi, les conventions sont soumises à l'approbation du ministre; que bien qu'elles soient qualifiées de «conventions» par la loi et issues de négociations, elles ne sont pas des conventions légalement formées au sens de l'article 1134 du code civil mais produisent, lorsque l.es formalités requises par la loi ont été accomplies, les effects juridiques des règlements à l'égard de catégories de personnes dont certaines n'ont ni consenti ni participé à leur élaboration; qu'elles sont des actes annulables au sens de !'article 14 des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat;

Considérant qu'il résulte des termes mêmes de l'article 27 de la loi du 9 août 1963 que les commissions permanentes ont pour mission de négocier et de conclure les conventions «au sein du service des soins de santé», lui-même institué par l'article 10 de la loi au sein de l'Institut national d'assurance par l'article 10 de la loi au sein de l'Institut national d'assurance maladie-invalidité et chargé de l'administration de l'assurance soins de santé; que les commissions permanentes sont, dans l'exercice de cette mission, des organes de l'Institut national d'assurance maladie-invalidité; que celui-ci doit être maintenu à la cause;

Considérant que le Ministre des Affaires sociales, deuxième partie adverse, demande à être mis hors de cause, estimant que l'Institut national d'assurance maladie-invalidité «est seul concerné»;

Considérant qu'il résulte de l'article 31, § 3, de la loi du 9 août 1963 que les conventions ne peuvent produire d'effets si elles n'ont pas été approuvées par le ministre; que le ministre a approuvé la convention du 9 décembre 1987; que, bien que les requérants ne demandent expressément que l'annulation de l'article 4, § 6, de la convention précitée, il y a lieu de comprendre dans l'objet du recours l'arrêté ministériel du 30 décembre 1987 en tant qu'il approuve la disposition attaquée; que l'Etat belge doit être maintenu à la cause en la personne du Ministre des Affaires sociales;

Considérant que les requérants prennent un moyen de la violation de l'article 3, 4°, de la loi du 18 juin 1850 sur le régime des aliénés; qu'ils exposent qu'il résulte de cette disposition que c'est au gouvernement qu'il appartient de fixer le traitement des médecins aliénistes à charge des établissements psychiatriques, qu'en exécution de cette disposition l'arrêté royal du 4 juin 1920 a institué un fonds spécial destiné à assurer le paiement des traitements des médecins et prévu que ce fonds est alimenté par des retenues et des versements effectués par les établissements et dont les montants sont déterminés par le Roi; que les requérants concluent qu'en fixant la contribution à verser par les établissements au fonds spécial, la convention a violé !'article 3, 4 °, de la loi du 18 juin 1850 en ce que le traitement des médecins n'est plus fixé par le Roi mais par les établissements, parties à la convention;

Considérant que la première partie adverse répond que les pouvoirs attribués au Roi par l'article 3, 4°, de la loi du 18 juin 1850 «n'empêchent aucunement (. . .) que la convention nationale entre les établissements psychiatriques et les organismes assureurs, approuvée par le Ministre des Affaires sociales, puisse envisager non pas la fixation des honoraires médicaux mais la contribution à verser par les établissements psychiatriques au fonds spécial créé par l'arrêté royal du 4 juin 1920 précité»; qu'elle ajoute que «le montant y envisagé pourra également correspondre à celui qui sera fixé par arrêté royal pour l'année 1988»;

Considérant que l'article 3, 4°, de la loi du 18 juin 1850 dispose que le gouvernement fixe le traitement des médecins des établissements destinés aux aliénés, à la charge de ces établissements, et en règle le mode de paiement; que l'arrêté royal du 4 juin 1920 a institué un fonds spécial «destiné à assurer le paiement des traitements des médecins d'asiles d'aliénés et des frais accessoires du service médical» (article 1er), fonds «alimenté par des retenues ou versements opérés sur le montant du prix de la journée d'entretien pour les asiles qui reçoivent des aliénés indigents et par des versements trimestriels pour les asiles qui reçoivent des pensionnaires» (article 2); que l'article 3 dispose que le montant de ces retenues et de ces versements est déterminé par le Roi; qu'en prévoyant en son article 4, § 6, premier alinéa, que «Pour le bénéficiaire hospitalisé en service 40 (F), il est alloué une somme fo1faitaire de 25 F qui couvre les honoraires pour la surveillance effectuée par un médecin et qui constitue la contribution à verser par les établissements au Fonds spécial créé par l'arrêté royal du 4 juin 1920», la convention du 9 décembre 1987 a méconnu les pouvoirs que le Roi tient de l'article 3, 4°, de la loi du 18 juin 1850; que le moyen est fondé;

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.170

Arrêts Nos 33.169 à 33.189

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Considérant que les deuxième, troisième et quatrième alinéas du paragraphe 6 de l'article 4 de la convention sont indissociables du premier alinéa;

Considérant qu'il n'y a pas lieu d'examiner les autres moyens du recours, faute qu'ils puissent conduire à une annulation plus étendue,

(Annulation de l'article 4, § 6, de la Convention nationale conclue entre les établissements psychiatriques et les organismes assureurs le 9 décembre 1987 et de l'arrêté ministériel du 30 décembre 1987 en tant qu'il approuve cette disposition - publication de l'arrêt dans les mêmes formes que l'arrêté ministériel partiellement annulé -dépens à charge des parties adverses).

N° 33.171

ARRET du 11 octobre 1989 (lle Chambre) MM. François, président, Mme Thomas, rapporteur, et M. Hanotiau, conseillers, et Mme Haubert, auditeur.

A.S.B.L. FEDERATION BELGE DES CHAMBRES SYNDICALES DE MEDECINS (Me Thiry) c/ Etat belge représenté par le Ministre des Affaires sociales (Mes Daniels et Vandenberghe)

1. HOPITAUX - Dispositions spécifiques relatives à la gestion des hôpitaux et au statut des médecins hospitaliers (1 et 2)

II. INTERET (POUR AGIR DEVANT LE CONSEIL D'ETAT) - Classement selon la qualité du requérant - Associations professionnelles et syndicats - Association groupant des membres de professions indépendantes - Recours contre des règlements (1)

III. COMPETENCE DES AUTORITES ADMINISTRATIVES - Nécessité d'une habilitation (2)

1. Toute méconnaissance par l'autorité des compétences du conseil médical porte atteinte aux intérêts des médecins attachés aux hôpitaux.

Les matières énumérées aux articles 125 et 130 de la loi coordonnée sur les hôpitaux concernent l'activité des médecins à l'hôpital et leurs rapports juridiques avec celui-ci. L'association des médecins hospitaliers aux décisions prises par le gestionnaire en ces matières est directement liée à l'exercice de leur profession.

Le but assigné à la Fédération des chambres syndicales de médecins par ses statuts l'habilite à défendre les intérêts que les médecins hospitaliers tiennent des articles 121, 125 et 130 de la loi.

2. Les pouvoirs donnés au Roi par les articles 13 à 17 de la loi coordonnée sur les hôpitaux lui permettent de déterminer les tâches incombant au médecin-chef et de fixer les règles relatives à l'organisation et à l'intégration de l'activité médicale dans l'hôpital. Le Roi ne saurait trouver dans ces dispositions l'habilitation à régler le statut du médecin-chef

Il ressort de l'article 130 de la loi que la réglementation générale régissant les rapports juridiques entre l'hôpital et les médecins, qui doit traiter des conditions d'admission, d'engagement et de nomination, est l' oeuvre du gestionnaire de l'hôpital. Le statut du médecin-chef n'est pas excepté du champ d'application de l'article 130, qui ne contient par ailleurs aucune disposition habilitant le Roi à régler la nomination de ce médecin.

Vu la requête introduite le 18 février 1988 par l'association sans but lucratif Fédération belge des chambres syndicales de médecins qui demande l'annulation de l'article 9 de l'arrêté royal du 15 décembre 1987 portant exécution des articles 13 à 17 inclus de la loi sur. l<'.s hôpitaux, coordonnée par l'arrêté royal du 7 août 1987, publié au Moniteur belge du 25 décembre 1987;.

Considérant que la disposition attaquée, à savoir l'article 9 de l'arrêté royal du 15 décembre 1987 portant exécution des articles 13 à 17 inclus de la loi sur les hôpitaux, coordonnée par l'arrêté royal du 7 août 1987, est rédigée ainsi qu'il suit:

«§ la. Le médecin-chef est nommé ou désigné pour une durée indéterminée, sauf disposition contraire prévue dans le règlement médical.

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'E1AT - 1989

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Arrêts Nos 33.169 à 33.189 Page 5 N° 33.171

»§ 2. Cependant, les médecins, qui à la publication du présent arrêté exercent les activités de médecin-chef, resteront à titre de mesure transitoire, nommés ou désignés pour une durée indéterminée sauf disposition contraire prévue dans leur acte de nomination ou dans leur convention avec l'hôpital.»;

Considérant que la partie adverse allègue que la fédération requérante ne justifie pas de l'intérêt requis à l'annulation de l'acte attaqué, au motif qu'elle ne prouve pas qu'il existe un lien direct entre cet acte et le préjudice subi; qu'elle souligne que la requérante a pour but «la défense professionnelle des médecins» et soutient que l'acte attaqué étant étranger «aux droits professionnels des médecins» est étranger également «aux intérêts de la requérante»;

Considérant que, selon l'article 2.3. de ses statuts, la requérante a pour but «d'assurer la représentation, la protection et la défense des intérêts de ses membres, de coordonner toute action consacrée à la défense professionnelle des médecins»; qu'aux termes de l'article 121 de la loi sur les hôpitaux coordonnée le 7 août 1987: «Le conseil médical est l'organe représentant les médecins hospitaliers par lequel ceux-ci sont associés à la prise de décisions à l'hôpital»; que l'article 125 de la loi dispose que le conseil médical donne au gestionnaire un avis, notamment, sur: «1° la réglementation générale régissant les rapports juridiques entre l'hôpital et les médecins hospitaliers visée à l'article 130»; que l'article 130 prévoit en son paragraphe 1er que <<Dans chaque hôpital est élaborée une réglementation générale régissant les rapports juridiques entre l'hôpital et les médecins, les conditions d'organisation et les conditions de travail, y compris les conditions financières de travail», en son paragraphe 2 que «cette réglementation générale est élaborée à l'initiative du gestionnaire» et en son paragraphe 3 que «La réglementation générale doit au moins traiter des matières suivantes: 1° les conditions d'admission, d'engagement, de nomination et de promotion;»;

Considérant que toute méconnaissance par l'autorité des compétences du conseil médical porte atteinte aux intérêts des médecins attachés ·aux hôpitaux; que les matières énumérées aux articles 125 et 130 de la loi concernent l'activité des médecins à l'hôpital et leurs rapports juridiques avec celui-ci; que l'association des médecins hospitaliers aux décisions prises par le gestionnaire en ces matières est directement liée à l'exercice de leur profession; que le but assigné à l'association requérante par l'article 2.3. de ses statuts l'habilite à défendre les intérêts que les médecins hospitaliers tiennent des articles 121, 125 et 130 de la loi;

Considérant que la requérante soutient que par la disposition attaquée, qui fixe des règles relatives à la nomination des médecins-chefs, le Roi a empêché le conseil médical, et par conséquent les médecins hospitaliers, d'exercer une prérogative que la loi leur confère au motif que le Roi ne trouvait pas dans la loi l'habilitation à prendre cette disposition; qu'elle expose que l'article 13 de la loi sur les hôpitaux «donne mission au Roi de déterminer le minimum de tâches à confier au médecin-chef» mais «ne Lui a nullement donné le pouvoir de fixer son statut» et qu' «en prévoyant que le médecin-chef est nommé ou désigné pour une durée indéterminée et en prévoyant qu'à titre transitoire, les médecins nommés ou désignés avant la publication del' arrêté litigieux restent en fonction», la disposition attaquée <iftxe le statut du médecin-chef et permet en tous les cas à des médecins-chefs de rester en fonction sans qu'une telle disposition n'ait de rapport direct ou indirect avec les tâches censées être confiées au médecin-chef»; que la requérante conclut que la disposition litigieuse «excède les limites de la compétence décrite à l'article 13 de la loi coordonnée»;

Considérant que la partie adverse répond qu'il est inexact de prétendre que les articles 13 à 17 de la loi sur les hôpitaux ont uniquement habilité le Roi à déterminer les tâches confiées au médecin-chef; que l'article 13, troisième alinéa, et l'article 17 de la loi confèrent au Roi le pouvoir de régler la structure hospitalière et l'organisation médicale dans son ensemble;

Considérant que la disposition attaquée fixe des règles qui concernent la durée des fonctions de médecin­chef, c'est-à-dire un élément de son statut; que l'arrêté royal du 15 décembre 1987, dont la disposition attaquée fait partie, se donne pour fondement légal les articles 13 à 17 de la loi sur les hôpitaux; qu'en son troisième alinéa l'article 13 dispose comme suit:

«Le Roi détermine le minimum de tâches à confier au médecin-chef et aux médecins-chefs de service; ces tâches concernent l'organisation et la coordination de l'activité médicale à l'hôpital.»;

qu'en son article 17 l'arrêté précité prévoit que:

«Le Roi peut déterminer les conditions générales minimales pour répondre aux exigences imposées par les articles 13 à 16.»;

que les pouvoirs donnés au Roi par ces dispositions Lui permettent de déterminer les tâches incombant au médecin-chef et de fixer les règles relatives à l'organisation et à l'intégration de l'activité médicale dans l'hôpital; que le Roi ne saurait trouver dans ces dispositions l'habilitation à régler le statut du médecin-chef; que le statut des m!!decins hospitaliers fait l'objet du titre IV de la loi sur les hôpitaux et singulièrement du chapitre II de ce titre qui traite «Des rapports juridiques entre l'hôpital et les médecins hospitaliers»; qu'il ressort de l'article 130 de la loi que la «réglementation générale régissant les rapports juridiques entre l'hôpital et les médecins» qui doit, selon le paragraphe 3 de cette disposition, traiter des «conditions d'admission, d'engagement (et) de nomination», est !'oeuvre du gestionnaire de l'hôpital; que le statut de médecin-chef n'est pas excepté du champ d'application de l'article 130 de la loi qui ne contient par ailleurs aucune disposition habilitant le Roi à régler la nomination de ce médecin; qu'en prenant la disposition attaquée, le Roi a excédé ses pouvoîrs; que le moyen est fondé;

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

Page 54: (VIe - KU Leuven · 33.103 - CLOETENS et REKOMS = n° 33.100 +désistement. RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989 . Arrêt N° 33.107 Page 1 N° 33.107 ARRET du 3octobre1989

N° 33.171

Arrêts Nos 33.169 à 33.189

Page 6

Considérant qu'il n'y a pas lieu d'examiner les autres moyens de la requête faute qu'ils puissent conduire à une annulation plus étendue,

(Annulation de l'article 9 de l'arrêté royal du 15 décembre 1987 portant exécution des articles 13 à 17 inclus de la loi sur les hôpitaux, coordonnée par l'arrêté royal du 7 août 1987 - publication de l'arrêt par extrait au Moniteur belge dans les mêmes formes que l'arrêté royal partiellement annulé - dépens à charge de la partie adverse).

N°s 33.172 et 33.173

ARRETS du 11 octobre 1989 (VIe Chambre) MM. Tapie, Président du Conseil d'Etat, rapporteur, Martens et Hanotiau, conseillers, et Dumont, auditeur général adjoint.

n° 33.172 - Société coopérative ASSOCIATION INTERCOMMUNALE D'ETUDE ET D'EXPLOITATION D'ELECTRICITE ET DE GAZ (A.I.E.G.) (Mes Gillet et Lambert) c/ Commune de Jemeppe-sur-Sambre (Mes Gonthier et Van Omme­slaghe) - Partie intervenante: Société coopérative I.D.E.G. (id.)

n° 33.173 - Société coopérative ASSOCIATION INTERCOMMUNALE POUR L'ENERGIE ET L'EAU (A.LE.) (Mes Roland et Lorent) c/ Commune d'Eghezée (Mes Gonthier et Van Ommeslaghe)

1. PROCEDURE - Requête - Délai - Prorogation et interruption - Circonstances qui peuvent interrompre le délai - Réclamation à l'autorité de tutelle

Le délai de recours en annulation d'un acte de l'autorité communale est interrompu par une réclamation adressée à l'autorité de tutelle. Il recommence à courir à l'échéance du délai dans lequel l'autorité de tutelle peut annuler cet acte (n° 33.172).

II. ASSOCIATIONS INTERCOMMUNALES - Tutelle

m. COMPETENCE DES AUTORITES ADMINISTRATIVES - Caractère d'ordre public

L'article 20 de la loi du 22 décembre 1986 ne soumet plus à l'approbation de l'autorité de tutelle que deux sortes d'actes: d'une part, la constitution del' intercommunale, ses statuts et leurs modifications éventuelles et, d'autre part, les modifications apportées ultérieurement aux statuts.

La délibération par laquelle le conseil communal décide de se retirer d'une intercom­munale pour s'affilier à une autre ne relève d'aucune de ces deux catégories. Le ministre est sans compétence pour l'approuver. Cette incompétence doit être relevée d'office et entraîner, dans un but de sécurité juridique, l'annulation de l'arrêté ministériel bien que celui-ci soit sans effet sur la validité de la délibération approuvée (n° 33.172).

IV. NOTION D'ACTE (SUSCEPTIBLE DE RECOURS) - Actes, décisions, mesures - Décision confirmative - Généralités

L'acte fondé sur une loi nouvelle n'est pas purement confirmatif de l'acte fondé sur la loi ancienne abrogée (n° 33.172).

V. ASSOCIATIONS INTERCOMMUNALES - Retrait d'une commune

VI. PROCEDURE - Questions préjudicielles

Il y a lieu de soumettre à la Cour d'arbitrage une question préjudicielle relative à la compétence du législateur national pour adopter les alinéas 2 et 3 de l'article 8 de la loi du 22 décembre 1986(n°s 33.172 et 33:173). ·

N° 33.172 Vu la requête introduite le 12 février 1988 par la société coopérative «Association intercommunale d' Etude

et d'Exploitation d'Electricité et qe Gaz (A./E.G.)» qui demande l'annulation:

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.169 à 33.189 Page 7 N° 33.172

1. d'une délibération du Conseil communal de Jemeppe-sur-Sambre du 24 septembre 1987 qui décide notamment «de confirmer la décision du conseil communal du 5 décembre 1986 concernant le retrait de l'A.I.E.G. et l'unification dans le cadre d' I.D.E.G. de la distribution d'électricité sur l'ensemble du territoire communal, sous la condition suspensive que ce retrait puisse se faire aux mêmes conditions que celles antérieurement proposées par I.D.E.G. sans charges financières supplémentaires pour la commune»;

2. d'un arrêté du Ministre de la Région wallonne pour le Logement et la Tutelle du 22 décembre 1987 qui autorise l'affiliation de la Commune de Jemeppe-sur-Sambre à l'intercommunale I.D.E.G. pour la distribution d'énergie électrique sur le territoire de l'ancienne Commune de Spy;

Vu la requête introduite le 7 avril 1989, par laquelle la société coopérative «l.D.E.G.» demande à être reçue en qualité de partie intervenante;

Vu !'ordonnance du 14 avril 1989 accueillant cette intervention;

Considérant qu'à la suite des fusions opérées par l'arrêté royal du 17 septembre 1975 ratifié par la loi du 30 décembre 1975, la nouvelle Commune de Jemeppe-sur-Sambre s'est trouvée desservie, pour la distribution d'électricité, par deux associations intercommunales: la requérante (section de Spy) et l'I.D.E.G. (autres sections); que l'A.I.E.G. avait été fondée en 1956 pour un terme de trente ans qui venait à échéance le 31décembre1986; qu'une assemblée générale extraordinaire, tenue le 3 mai 1985, en a décidé la prorogation à l'unanimité; qu'une autre assemblée générale extraordinaire, tenue le 20 juin 1986, en a, également à l'unanimité, adapté les statuts aux lois des 5 décembre 1984 et 21 février 1985, ainsi qu'à la décision du 3 mai 1985; que, par une délibération du 5 décembre 1986, le Conseil communal de Jemeppe-sur-Sambre a décidé:

«- de se retirer d' A.I.E.G. au terme des engagements pris par l'ancienne Commune de Spy, dans les conditions convenues par cette dernière lors de son affiliation à l'intercommunale;

»--d'unifier le service de la distribution d'électricité sur l'ensemble de son territoire et d'étendre à cet effet l'objet de son affiliation à l'intercommunale I.D.E.G.; de faire à celle-ci les apports corrélatifs statutairement prévus;

>>---d'introduire en vue de la réalisation des décisions ci-dessus un recours auprès des autorités régionales contre la décision de prorogation de l'intercommunale A.l.E.G. de manière à faire reconnaître que cette dernière est dissoute de plein droit à l'arrivée de son terme»;

Considérant qu'en vue notamment de permettre de rationaliser la distribution d'énergie dans des situations semblables à celle où se trouvait la Commune de Jemeppe-sur-Sambre, la loi du 22 décembre 1986 relative aux intercommunales dispose comme suit en son article 8, alinéas 2 et 3:

«Si un même objet d'intérêt communal au sens del' article 1er est confié dans une même commune à plusieurs intercommunales ou régies, la commune peut décider de le confier pour l'ensemble de son territoire à une seule d'entre elles moyennant l'accord de toutes les parties intéressées ou, à défaut d'un tel accord, unilatéralement.

»Dans les hypothèses visées à l'alinéa précédent, les conditions prévues à l'alinéa 1.,., à l'exclusion de celle relative à la réparation d'un dommage éventuel, ne sont pas applicables aux retraits qui s'ensuivent, lesquels s'effectuent nonobstant toute disposition statutaire»;

Considérant que, par la délibération attaquée en premier lieu, le conseil communal, après avoir visé la loi du 22 décembre 1986 qui avait été publiée au Moniteur belge du 26 juin 1987 et était entrée en vigueur le 6 juillet 1987, a décidé:

«-de confirmer la décision du conseil communal du 5 décembre 1986 concernant le retrait de l' A.I.E.G. et l'unification dans le cadre d'I.D.E.G. de la distribution d'électricité sur l'ensemble du territoire communal, sous la condition suspensive que ce retrait puisse se faire aux mêmes conditions que celles antérieurement proposées par I.D.E.G. sans charges financières supplémentaires pour la commune;

>>---d'adresser à I.D.E.G. la lettre ci-annexée en vue d'obtenir confirmation des propositions passées;

>>--- de charger le collège des bourgmestre et échevins de constater la réalisation de la condition susvisée et d'exécuter la présente délibération»;

que le 12 novembre 1987, sur le vu d'une lettre du 2 octobre 1987 de l'I.D.E.G., le collège des bourgmestre et échevins a décidé:

«-de constater la réalisation de la condition suspensive visée par la délibération du 24 septembre 1987;

>>--de procéder à l'exécution de la décision du conseil communal et de notifier celle-ci aux parties intéressées;

>>--de charger l'intercommunale I.D.E.G. de négocier les modalités du retrait de l'A.I.E.G.»;

Considérant qu'aux termes de l'arrêté ministériel attaqué en second lieu, «l'affiliation de la Commune de Jemeppe-sur-Sambre à l'intercommunale l.D.E.G. est, pour la distribution d'énergie électrique, autorisée pour le territoire de l'ancienne Commune de Spy»;

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.172

Arrêts Nos 33.169 à 33.189

Page 8

Considérant que le délai pour l'introduction du présent recours a été interrompu par la réclamation que la requérante a adressée au gouverneur le 24 novembre 1987; que la délibération attaquée était entrée au gouvernement provincial le 17 novembre 1987 de sorte que le délai de trente jours ouvrables prévu par l'article 87bis, 3°, de la loi communale est venu à échéance le 29 décembre 1987; qu'introduit le 12 février 1988, le recours l'a été dans les soixante jours de cette échéance; qu'il est recevable de ce point de vue;

Considérant que la délibération du 24 septembre 1987 ne se borne pas à confirmer celle du 5 décembre 1986 puisqu'à la différence de celle-ci, elle se donne pour fondement la loi du 22 décembre 1986; qu'elle est donc bien un acte susceptible d'annulation au sens de l'article 14 des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat;

Considérant, quant à l'arrêté ministériel du 22 décembre 1987, attaqué en second lieu, que, par son article 30.4, la loi du 22 décembre 1986 a abrogé la loi du 1er mars 1922 relative à l'association de communes dans un but d'utilité publique; que, par son article 20, elle ne soumet plus à l'approbation de l'autorité.de tutelle que deux sortes d'actes: d'une part, la constitution de l'intercommunale, ses statuts et leurs annexes éventuelles et, d'autre part, les modifications apportées ultérieurement aux statuts; que l'acte attaqué en premier lieu ne relevait d'aucune de ces deux catégories; que le ministre était sans compétence pour l'approuver lorsque, le 22 décembre 1987, il a pris l'arrêté attaqué en second lieu; que cette incompétence doit être relevée d'office et entraîner, dans un but de sécurité juridique, l'annulation de l'arrêté ministériel du 22 décembre 1987, bien que celui-ci soit sans effet sur la validité de la délibération du 24 septembre 1987;

Considérant que la requérante énonce en ces termes les moyens d'annulation qu'elle invoque contre la délibération attaquée en premier lieu:

«Un premier moyen est pris de la violation de l'article 107quater de la Constitution, ainsi que de la loi spéciale de réformes institutionnelles du 8 août 1980, spécialement de son article 6, § r·, V111, 1°,

»En ce que la première partie adverse a pris la décision de se retirer de l'intercommunale requérante et la deuxième partie adverse a autorisé ce retrait, visant la loi du 22 décembre 1986 relative aux intercommunales, et notamment l'article 8,

»Alors quel' alinéa 2 del' article 8 dispose que «si un même objet d'intérêt communal au sens de l'article 1er est confié, dans une même commune, à plusieurs intercommunales ou régies, la commune peut décider de le confier pour l'ensemble de son territoire à une seule d'entre elles moyennant l'accord de toutes les parties intéressées ou, à défaut d'un tel accord, unilatéralement»,

»Alors que cette disposition viole l'article 6, § 1er, V111, 1°, de la loi spéciale,

»Alors que cette disposition attribue en effet au conseil régional une· compétence normative en ce qui concerne la fixation du ressort des associations de communes dans le but notamment de rationaliser le secteur de la distribution,

»Alors que l'alinéa 2 de l'article 8 de la loi du 22 décembre 1986, visé au moyen, a clairement pour objectif de permettre la rationalisation des services confiés par les communes aux intercommunales,

»Alors que, en vertu des dispositions visées au moyen, le législateur national était incompétent pour adopter ce type de dispositions,

»En sorte que les actes attaqués étant fondés sur une disposition législative violant la Constitution et les règles prises en vertu de celle-ci pour déterminer les compétences respectives de l'Etat, des Communautés et des Régions, ces· actes manquent de fondement légal et doivent être annulés»;

«Un deuxième moyen est pris de la violation de la loi du 22 décembre 1986 relative aux intercommunales, et notamment de son article 8, alinéa 2,

»En ce que la première partie adverse a décidé de se retirer de l'intercommunale requérante et que la deuxième partie adverse a autorisé ce retrait,

»Alors que l'article 8, alinéa 2, de la loi du 22 décembre 1986, visée au moyen, dispose que la commune ne peut décider de confier un objet d'intérêt communal à une seule des intercommunales parmi celles chargées jusqu'alors de ces objets, que moyennant l'accord de toutes les parties intéressées,

»Alors que ce n'est qu'à défaut d'un tel accord que la décision de retrait peut être prise unilatéralement,

»Alors que, en l'occurrence, la première partie adverse n'a pas recherché l'accord des parties intéressées préalablement à sa décision de se retirer,

»Alors que les demandes de retrait faites par la première partie adverse avant l'entrée en vigueur de la loi du 22 décembre 1986 ne peuvent être admises comme valant l'accomplissement de la formalité imposée par l'article 8, alinéa 2, de cette loi,

»Alors que, en effet, la situation de la requérante était fondamentalement différente avant l'entrée en vigueur de la loi du 22 décembre 1986,par rapport à ce qu'elle est depuis lors; qu'en effet, l'intercommunale étant prorogée et, par conséquent, la démission étant rendue impossible pendant une période de dix années suivant la date du 20 juin 1986 en vertu del' article 18, alinéa 4, des statuts de l'intercommunale, il n'y .avait pas lieu à négociation,

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT ~ 1989

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Arrêts Nos 33.169 à 33.189 Page 9 N° 33.173

»Qu'il n'y avait même pas lieu, contrairement à ce que pourrait prétendre la première partie adverse, qu'une demande de démission soit soumise au conseil d'administration et à l'assemblée générale, compte tenu de l'interdiction absolue formulée par les statuts,

»Qu' ainsi, la requérante devant déterminer son attitude face à une demande de retrait ou de démission, en fonction des lois en vigueur, la procédure devait être recommencée intégralement par la première partie adverse après l'entrée en vigueur de la nouvelle loi»;

Considérant qu'en réponse au premier moyen, la partie adverse expose les motifs pour lesquels, d'après elle, les dispositions litigieuses relevaient de la compétence du législateur national;

Considérant, sur le premier moyen, qu'il n'est pas douteux que la Commune de Jemeppe-sur-Sambre a fait application, dans la délibération attaquée, de l'article 8, alinéas 2 et 3, de la loi du 22 décembre 1986, qui seul lui permettait de déroger aux statuts de l'association requérante, dès lors qu'elle ne soutenait plus que celle-ci avait été dissoute de plein droit; qu'il s'ensuit que le Conseil d'Etat ne pourra statuer sur le premier moyen qu'après qu'aura été vidée la contestation relative à la compétence du législateur national pour adopter les dispositions indiquées; qu'en vertu de l'article 26, § 2, de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, il s'impose de soumettre à cette haute juridiction la question préjudicielle formulée dans le dispositif ci-après, le second moyen étant manifestement subsidiaire,

(Annulation de l'arrêté du 22 décembre 1987 du Ministre de la Région wallonne pour le Logement et la Tutelle, qui autorise l'affiliation de la Commune de Jemeppe-sur-Sambre à l'intercommunale I.D.E.G. pour la distribution d'énergie électrique sur le territoire de l'ancienne Commune de Spy - la question préjudicielle suivante est posée à la Cour d'arbitrage:

<<L'article 8, alinéas 2 et 3, de la loi du 22 décembre 1986 relative aux intercommunales viole-t-il les règles qui sont établies par la Constitution ou en vertu de celle-ci pour déterminer les compétences respectives de l'Etat, des Communautés et des Régions ?» ).

* * * N° 33.173

Vu la requête introduite le 17 juin 1988 par la société coopérative «Association intercommunale pour l' Energie et l' Eau, en abrégé A.l.E. », qui demande l'annulation d'une délibération du Conseil communal d 'Eghezée du 11mai1988 décidant notamment «d'étendre à l'ensemble du territoire de la commune son affiliation à l'l.D.E.G.; de confier à cette intercommunale la distribution d'électricité sur l'ensemble du territoire communal ... et de se retirer ... de l'intercommunale A.l.E.»;

Considérant qu'à la suite des fusions opérées par l'arrêté royal du 17 septembre 1975 ratifié par la loi du 30 décembre 1975, la nouvelle Commune d'Eghezée s'est trouvée desservie, pour la distribution d'électricité, par deux associations intercommunales: la requérante (section d'Eghezée centre) et l'I.D.E.G. (autres sections); qu'en vue notamment de permettre de rationaliser la distribution d'énergie dans des situations semblables, la loi du 22 décembre 1986 relative aux intercommunales dispose comme suit en son article 8, alinéas 2 et 3:

«Si un même objet d'intérêt communal au sens del' article lei" est confié dans une même commune à plusieurs intercommunales ou régies, la commune peut décider de le confier pour l'ensemble de son territoire à une seule d'entre elles moyennant l'accord de toutes les parties intéressées ou, à défaut d'un tel accord, unilatéralement.

»Dans les hypothèses visées à l'alinéa précédent, les conditions prévues à l'alinéa 1er, à l'exclusion de celle relative à la réparation d'un dommage éventuel, ne sont pas applicables aux retraits qui s'ensuivent, lesquels s'effectuent nonobstant toute disposition statutaire»;

Considérant que, fondée notamment sur l'article cité, la décision attaquée porte le dispositif suivant:

«DECIDE, à l'unanimité des membres présents:

»1. D'étendre à l'ensemble du territoire de la commune son affiliation à l'intercommunale 1.D.E.G.; de confier à cette intercommunale la distribution d'électricité sur l'ensemble du territoire communal et de faire à celle­ci les apports prévus dans ses statuts; de se retirer de l'intercommunale A.l.E.; de charger les deux intercommunales précitées de s'accorder pour mettre en oeuvre dans le meilleur délai la présente décision.

»2. Dès aujourd'hui, en cas de désaccord entre les parties, de confier unilatéralement l'activité de distribution d'électricité sur tout le territoire de la commune à l'intercommunale 1.D.E.G. et de se retirer unilatéralement de l'intercommunale A.I.E.

»3. D'envoyer copie de la présente délibération aux intercommunales précitées.

»4. De charger le collège des bourgmestre et échevins de mettre en oeuvre la présente délibération»;

Considérant que la requérante prend un moyen unique «de la violation del' article 1134 du Code civil, des lois coordonnées sur les sociétés commerciales, spécialement articles 145, 2°, et 151, de la loi du 22 décembre 1986

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N° 33.173

Arrêts Nos 33.169 à 33.189

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relative aux intercommunales, spécialement articles 4, 10°, 8 et 23, ainsi que des statuts précités de la requérante (spécialement article 82) et de l'arrêté royal précité qui les approuve .. .,

»en ce que, première branche, la démission de la partie adverse est décidée moins de vingt ans après son admission,

»alors qu'en ce cas la démission est interdite par l'article 82 des statuts, toujours en vigueur au moment de la décision attaquée,

»et en ce que, deuxième branche, la décision attaquée confie unilatéralement «dès aujourd'hui» la distribution d'électricité sur tout son territoire à l'intercommunale I.D.E.G.,

»alors que selon l'article 23 de la loi du 22 décembre 1986, «la reprïse de l'activité ... ne prend cours qu'à partir du moment où tous les montants dus à l'intercommunale ont été effectivement payés à cette dernière» ce qui n'est pas le cas,

»et que le principe de l'exécution de bonne foi des contrats interdit la résiliation faite à contretemps et sans préavis convenable, comme en l'espèce où il en résulterait, sans période d'adaptation, un brutal excédent de main-d'oeuvre et de matériel, nuisible aux résultats de la société et préjudiciable à tous les membres et à l'intérêt général des communes associées,

»et en ce que, troisième branche, la décision attaquée a été adressée par lettre à la requérante,

»alors que l'article 151 des lois coordonnées sur les sociétés coopératives impose la forme du dépôt au greffe de la justice de paix du siège social,

»et enfin en ce que, quatrième branche, la décision attaquée est prise dans l'ignorance du montant, même approximatif, de l'obligation qui en résultera pour la partie adverse en vertu de l'article 8, premier alinéa, in fine, de la loi du 22 décembre 1986,

»alors qu'une décision ne pouvait être sérieusement prise que compte tenu de cette donnée fondamentale, même en ayant égard à la «garantie» d'une société tierce, à la validité juridique au demeurant douteuse»;

Considérant, sur la première branche, que la partie adverse soutient qu'«en cette branche, le moyen doit être rejeté sans examen de son bien ou de son mal fondé, soit parce qu'il invoque la violation d'une disposition des statuts sociaux de la requérante et qu'une telle violation n'est pas constitutive d'une violation de la loi (entendue dans le sens large de l'expression) ni, partant, d'un excès de pouvoir, soit parce qu'il soumet au Conseil d'Etat une contestation - celle de la conformité du retrait de la commune aux statuts de la société dont elle était membre - qui relève de la compétence exclusive des tribunaux de l'ordre judiciaire»; qu'elle met néanmoins en doute le bien-fondé de la branche en tirant argument des alinéas 2 et 3 de l'article 8 de la loi du 22 décembre 1986 qui <<S'imposent nonobstant toute disposition statutaire»;

Considérant qu'en réplique, la requérante conteste la conformité des alinéas 2 et 3 de l'article 8 à l'article 107quater de la Constitution et à l'article 6, § 1°', VIII, 1°, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles; que, pour elle, l'objet de ces alinéas, dans la mesure où ils doivent s'appliquer à des associations intercommunales dont le ressort ne dépasse pas le territoire d'une région, relevait de la compétence du législateur régional et non du législateur national parce qu'il tient à la fixation du ressort de ces associations;

Considérant qu'il n'est pas douteux que la Commune d'Eghezée a fait application, dans la délibération attaquée, de l'article 8, alinéas 2 et 3, de la loi du 22 décembre 1986, qui seul lui permettait de déroger aux statuts de l'association requérante; qu'il s'ensuit que le Conseil d'Etat ne pourra statuer sur sa compétence et sur le bien-fondé de la première branche du premier moyen qu'après qu'aura été vidée la contestation relative à la compétence du législateur national pour adopter les dispositions indiquées; qu'en vertu de l'article 26, § 2, de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, il s'impose de soumettre à cette haute juridiction la question préjudicielle formulée dans le dispositif ci-après, les autres branches du moyen étant manifestement subsidiaires,

(La question préjudicielle suivante est posée à la Cour d'arbitrage:

«L'article 8, alinéas 2 et 3, de la loi du 22 décembre 1986 relative aux intercommunales viole-t-il les règles qui sont établies par la Constitution ou en vertu de celle-ci pour déterminer les compétences respectives de l'Etat, des Communautés et des Régions ?» ).

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Page 59: (VIe - KU Leuven · 33.103 - CLOETENS et REKOMS = n° 33.100 +désistement. RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989 . Arrêt N° 33.107 Page 1 N° 33.107 ARRET du 3octobre1989

Arrêts Nos 33.169 à 33.189 Page 11

N° 33.174 rfo2> / fJ') ARRET du 11 octobre 1989* (VIe Chambre)

N° 33.174

MM. Tapie, Président du Conseil d'Etat, rapporteur, Martens et Hanotiau, conseillers, et Dumont, auditeur général adjoint.

DE MULDER (Me Lagasse) c/ Gouverneur de la province de Brabant - Partie intervenante: Commune de Chastre (Me Gillet)

1. COMMUNES - Tutelle - Règles spéciales à la Région wallonne - Dispositions transitoires du décret du 20 juillet 1989

II. PROCEDURE - Réouverture des débats

Il y a lieu de rouvrir les débats pour permettre aux parties de s'expliquer sur l'incidence de l'article 42 du décret du 20 juillet 1989 sur le recours en annulation de l'arrêté du gouverneur qui a statué sur le recours d'un garde champêtre contre la délibération du conseil communal lui infligeant une sanction.

Vu la requête introduite le 18 octobre 1988 par Raoul De Mulder, garde champêtre de la Commune de Chastre, qui demande l'annulation de l'arrêté du Gouverneur de la Province de Brabant du Il août 1988:

1. acceuillant le recours formé par lui le 6 mai 1988 contre la délibération du Conseil communal de Chastre du 2 mai 1988 lui infligeant une peine disciplinaire de deux mois de suspension avec privation de traitement;

2. lui infligeant une suspension disciplinaire de quinze jours avec privation de traitement;

Vu la requête introduite le 31 mars 1989, par laquelle la Commune de Chastre demande à être reçue en qualité de partie intervenante;

Vu l'ordonnance du 3 avril 1989 accueillant cette intervention;

Considérant que la décision attaquée a été prise sur la base de l'article 188 de la loi communale, modifié par la loi du Il février 1986, lequel disposait en ces termes avant son annulation partielle par !'arrêt de la Cour d'arbitrage n° 73 du 22 décembre 1988:

<<Le conseil communal peut suspendre pour six mois au plus ou révoquer les autres membres de la police rurale qui manquent à leurs devoirs professionnels ou qui compromettent la dignité de leur fonction.

»Le bourgmestre peut également pour les mêmes motifs suspendre les gardes champêtres pendant un terme n'excédant pas un mois.

»Les intéressées peuvent prendre leurs recours auprès du gouverneur contre la décision du conseil communal ou du bourgmestre dans les quinze jours de la notification qui leur en est faite»;

Considérant que, par son arrêt précité, la Cour d'arbitrage a annulé, dans l'alinéa 3 de l'article 188, en ce qui concerne la Région wallonne et la Région flamande, exception faite des communes énumérées aux articles 7 et 8 des lois relatives à l'emploi des langues en matière administrative, coordonnées le 18 juillet 1966, les mots «du gouverneur» et «dans les quinze jours de la notification qui leur en est faite» (point 2, 5°, du dispositif de l'arrêt); qu'elle n'a pas fait usage de la faculté que lui confère l'article 6, alinéa 2, de la loi du 28 juin 1983 portant l'organisation, la compétence et le fonctionnement de la Cour d'arbitrage d'indiquer «ceux des effets de l'acte annulé qui doivent être considérés comme définitifs ou maintenus provisoirement pour le délai qu'elle détermine»; que, le 6 mai 1988, lorsque le requérant a introduit auprès du gouverneur le recours prévu par l'article 188, alinéa 3, précité, la Région wallonne n'avait pas mis en œuvre la compétence que lui attribue l'article 7 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles d'organiser les procédures de tutelle ordinaire et notamment de désigner les autorités qui exercent cette tutelle; qu'à cette même date du 6 mai 1988, il n'y avait donc pas d'autorité de tutelle compétente pour statuer sur le recours du requérant; qu'il n'y en avait pas davantage le 11 août 1988 lorsque la décision attaquée a été prise par le gouverneur ni le 18 octobre 1988 lorsque Raoul De Mulder a introduit sa demande d'annulation de cette décision; qu'il s'ensuit que le gouverneur était sans compétence pour prendre la décision attaquée, ce que le Conseil d'Etat doit constater d'office;

Considérant que le décret du Conseil régional wallon du 20 juillet 1989 organisant la tutelle sur les communes, les provinces et les intercommunales de la Région wallonne est entré en vigueur le 1°r octobre 1989, selon son article 43; qu'il dispose comme suit en son article 42:

«Les délibérations, résolutions, décisions et actes pris par les communes, provinces et intercommunales visées à l'article Ier avant l'entrée en vigueur du présent décret restent soumis, en ce qui concerne l'exercice de

' Le texte publié tient compte de l'arrêt rectificatif n° 36.167 du 7 janvier 1991.

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.174

Arrêts Nos 33.169 à 33.189

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la tutelle générale ainsi que les avis, autorisations et approbations à donner par l'autorité de tutelle et les recours ouverts contre ces décisions, aux dispositions légales qui étaient en vigueur en la matière avant l'entrée en vigueur du présent décret.

»Les recours introduits sur la base des articles 178, § 1a, 178, § 2, alinéa 3, 180, alinéa 3, 187, § 4 et 188, alinéa 3, de la loi communale du 30 mars 1836, qui n'ont pas encore fait l'objet d'une décision administrative ou juridictionnelle définitive, sont portés devant la députation permanente du conseil provincial»;

Considérant que les parties n'ont pas eu l'occasion de s'expliquer sur l'incidence de ces dispositions en la présente cause; qu'il s'impose de la leur donner,

(Réouverture des débats).

N° 33.175

ARRET du 11 octobre 1989 (VIe Chambre) MM. Tapie, Président du Conseil d'Etat, Martens, rapporteur, et Hanotiau, conseillers, et Falmagne, premier auditeur (avis contraire)*.

MATTEUCCI c/ Commissariat général aux relations internationales de la Communauté française (Mes Tassin et Delvaux)

I. COMMISSARIAT GENERAL AUX RELATIONS INTERNATIONALES DE LA COMMUNAUTE FRANCAISE - Bourses d'études octroyées par les gouvernements étrangers

II. DROIT EUROPEEN - Principes

Lorsqu'une personne, après avoir fait des études qui ne lui donnaient aucune qualifi­cation professionnelle, a eu, dès l'âge de seize ans, une activité salariée, a souhaité acquérir une formation spécialisée pour accéder à une profession fondée sur la qualification ainsi acquise tout en exerçant déjà une activité, fût-ce extrêmement réduite mais annonçant celle qu'elle pourra exercer lorsqu'elle aura parachevé sa formation, il y a lieu, en tenant compte des principes d'interprétation indiqués par la Cour de justice des Communautés européennes et des fins du Traité C.E.E., spécialement en ce qui concerne le principe de l'égalité de traitement qui doit assurer une intégration des travailleurs migrants dans la vie sociale du pays d'accueil conformément aux objectifs de la libre circulation des travailleurs, de lui reconnaître la qualité de travailleur au sens de la jurisprudence de la Cour relative à l'interprétation du règlement 1612168.

Le Commissariat général aux relations internationales de la Communauté française excède ses pouvoirs en refusant de transmettre aux autorités allemandes la demande de bourse d'études de cette personne au seul motif qu'elle a la nationalité italienne.

Vu la requête introduite le 4 février 1985 par Annunziata Matteucci qui demande l'annulation de la décision, notifiée le 14.décembre 1984, par laquelle le Commissariat général aux Relations internationales de la. Communauté française rejette la demande de bourse d'études qu'elle avait introduite afin de suivre des cours de spécialisation de chant à la Hochschule der Künste de Berlin;

Vu l'arrêt n° 31.750 du 13 janvier 1989 mettant hors de cause la Communauté française, rouvrant les débats et chargeant le membre de l'auditorat désigné par M. l'auditeur général de poursuivre l'instruction;

Considérant que, par son arrêt du 27 septembre 1988, la Cour de Justice des Communautés européennes a laissé au Conseil d'Etat le soin de procéder aux vérifications de fait nécessaires aux fins d'établir si la requérante peut être considérée comme travailleur au sens de jurisprudence de la Cour, en particulier de son arrêt Levin du 23 mars 1982, et si, par conséquent, les dispositions relatives aux travailleurs communautaires lui sont applicables;

Considérant qu'il ressort des documents déposés par la requérante que, née à Ixelles le 20 juillet 1960, elle a obtenu en 1975 le certificat de l'enseignement secondaire inférieur à !'Athénée royal qe Woluwé-Saint-Lambert; ql!e, de 1976 à 1979, elle a travaillé : 12 jours comme ouvrière en 1976, 34 jours comme employée en 1978 et 173 jours comme employée en 1979; qu'à partir de 1979, elle a étudié la rythmique à l'Institut de rythmique

7 Jacques-Dalcroze à Bruxelles; qu'elle a réussi quatre années d'études et qu'elle poursuivait sa formation dans le ~

* Selon l'avis, la qualité de travailleur régulier en 1979 de la requérante, n'avait pas été maintenue par la suite avec une régularité suffisante, de sorte que la partie adverse n'avait pas excédé son pouvoir discrétionnaire d'appréciation en rejetant la demande de la requérante.

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.169 à 33.189 Page 13 N° 33.175

même institut lorsqu'elle a introduit sa demande de bourse le 23 novembre 1984; que, parallèlement à ses études, elle a enseigné la rythmique à la Maison de la culture de Namur; que, selon les bons de cotisation à l'assurance maladie-invalidité établis par l'administration provinciale, elle a exercé son enseignement, en qualité d'employée, à temps partiel, pendant 3 jours (dernier trimestre) en 1982, pendant 18 jours en 1983 et pendant 2 jours (premier trimestre) en 1984; que la partie adverse déduit de ces éléments qu'après 1979, les activités professionnelles de la requérante ont été à ce point marginales et accessoires que celle-ci ne peut prétendre qu'elle aurait eu, en 1984, la qualité de travailleur migrant au sens du règlement 1612/68 et de la jurisprudence de la Cour; qu'elle en conclut que le recours doit être rejeté;

Considérant que, ainsi que la Cour l.'a souligné à plusieurs reprises, la notion de travailleur, au sens de l'article 7 du règlement 1612/68, a une portée communautaire distincte du sens qu'elle peut avoir dans les législations nationales (arrêts Unger du 19 mars 1964 et Levin précité); qu'il s'agit d'une notion définissant le champ d'application d'une des libertés fondamentales garanties par le Traité C.E.E. et qui, à c.e titre, ne peut être interprétée restrictivement (arrêts Levin et Kempf du 3 juin 1986); que l'octroi des avantages sociaux prévus par l'article 7, § 2, du règlement ne pourrait être unilatéralement subordonné par un Etat membre à une certaine période d'activité professionnelle (arrêts Frascogna du 6 juin 1985 et Brown du 21 juin 1988); que l'effet utile du droit communautaire serait compromis et la réalisation des fins du traité mise en cause si la jouissance de droits conférés au titre de la libre circulation des travailleurs était réservée aux seuls personnes exerçant un travail à plein temps et gagnant de ce fait un salaire au moins égal au salaire minimum garanti dans le secteur en cause (arrêt Levin); que peut être considérée comme travailleur une personne qui accomplit un stage d'un an pendant environ 11 heures par semaine (arrêt Lawrie-Blum du 3 juillet 1985); qu'aucune distinction ne peut être établie entre les personnes qui souhaitent se contenter des revenus tirés d'une telle activité et celles qui les complètent par d'autres revenus, qu'ils proviennent de biens ou du travail d'un membre de leur famille qui les accompagne (arrêt Levin) ou d'une aide financière prélevée sur les fonds publics de l'Etat d'accueil (arrêt Kempf); qu'il est permis d'inférer de ces indications fournies par la Cour qu'a fortiori la qualité de travailleur ne pourrait être déniée à une personne qui, après avoir pratiqué une profession sans qualification, exerce ensuite, dans la mesure compatible avec ses études, une activité certes restreinte mais dont le caractère réduit s'explique, non par le dessein qu'elle aurait de n'accorder désormais aux activités professionnelles qu'une importance marginale, mais au contraire par celui de consacrer l'essentiel de son temps à l'acquisition de connaissances qui lui permettront d'exercer l'activité professionnelle qualifiée dans laquelle elle pourra le plus utilement épanouir un talent jusque-là inexploité; que si la liberté garantie par l'article 48 du traité n'implique pas la libre circulation d'une personne qui, par exemple, a accepté un travail réduit «à titre de façade afin de bénéficier des droits accordés aux travailleurs», en revanche, sa protection ne peut être refusée à celle qui manifeste l'intention «véritable et sérieuse» d'exercer une activité économique (arguments tirés des conclusions de l'avocat général Sir Gordon Slynn précédant l'arrêt Levin); que les règles contenues dans le traité garantissent la l.ibre circulation de personnes «exerçant ou souhaitant exercer une activité économique» (arrêt Levin, point 17); que, de même, les droits garantis à un travailleur migrant peuvent subsister même s'il n'est plus engagé dans un rapport de travail, pour autant qu'il y ait une continuité entre l'activité professionnelle précédemment exercée et les études qu'il poursuit, cette conception de la libre circulation des travailleurs migrants correspondant d'ailleurs à une évolution de carrières professionnelles, fréquemment interrompues par des périodes de formation, de conversion ou de recyclage (arrêt Lair du 21 juin 1988, points 36, 37 et 38);

Considérant qu'en l'espèce, dans les documents ·que la partie adverse l'a invitée à compléter à l'appui de sa demande de bourse d'études, la requérante a indiqué qu'à son retour en Belgique, elle se destinait à la profession suivante: «Professeur de rythmique et d'expression corporelle»; que, dans le <<plan de travail succinct» qui figure dans les mêmes documents, elle explique qu'elle a choisi de parfaire sa formation à la «Hochschule der Künste» de Berlin, parce que, dit-elle, «d'après ma propre expérience et comme élève et comme professeur, je trouve qu'il manque un élément fondamental à cette formation: le travail du chant et de la voix» et que «mon but est de répondre, à un niveau professionnel, à ce besoin des enfants et des adultes de s'exprimer tout autant par la voix que par le corps»; qu'elle précise encore qu'elle a «remarqué qu'au cours de (ses) leçons de rythmique, les enfants utilisent spontanément l'expression vocale» et que, grâce à ses études à Berlin, elle pense pouvoir acquérir «l'élément complémentaire à l'enseignement de la rythmique, ... »;

Considérant qu'il se déduit 'de ces éléments qu'après avoir fait des études qui ne lui donnaient aucune qualification professionnelle, la requérante qui, dès l'âge de seize ans, avait une activité salariée, a souhaité acquérir une formation spécialisée pour accéder à une profession fondée sur la qualification ainsi acquise tout en exerçant déjà une activité, extrêmement réduite sans doute, mais qui annonce celle qu'elle pourra exercer lorsqu'elle aura parachevé sa formation;

Considérant que, en tenant compte des principes d'interprétation indiqués par la Cour et des fins du traité, spécialement en ce qui concerne le principe de l'égalité de traitement qui doit assurer une intégration des travailleurs migrants dans la vie sociale du pays d'accueil conformément aux objectifs de la libre circulation des travailleurs (arrêt Echternach du 15 mars 1989), il convient de reconnaître à la requérante la qualité de travailleur au sens de la jurisprudence de la Cour relative à l'interprétation du règlement 1612/68;

Considérant qu'à la question posée par l'arrêt n° 28.420 du 16 juillet 1987, la Cour a donné la réponse suivante:

«L'article 7 du règlement n° 1612168, relatif à la libre circulation des travailleurs à l'intérieur de la Communauté, doit être interprété en ce sens qu'il ne permet pas aux autorités d'un Etat membre de refuser le

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.175

Arrêts Nos 33.169 à 33.189

Page 14

bénéfice d'une bourse, pour suivre des études dans un autre Etat membre, à un travailleur résidant et exerçant une activité salariée sur le territoire du premier Etat membre, mais qui a la nationalité d'un troisième Etat membre, au motif que ce travailleur n'a pas la nationalité de l'Etat membre de résidence. Un accord bilatéral qui réserve le bénéfice des bourses en question aux seuls nationaux des deux Etats membres, parties à l'accord, ne peut pas faire obstacle à l'application de la règle d'égalité de traitement entre les travailleurs nationaux et communautaires établis sur le territoire d'un de ces deux Etats membres»;

qu'il s'ensuit qu'en refusant de transmettre aux autorités allemandês la demande de bourse d'études de la requérante au seul motif qu'elle avait la nationalité italienne, la partie adverse a excédé ses pouvoirs,

(Annulation de la décision, notifiée le 14 décembre 1984, par laquelle le Commissariat général aux Relations internationales de la Communauté française rejette la demande de bourse d'études introduite par Annunziata Matteucci afin de suivre des cours de spécialisation de chant à la Hochschule der Künste de Berlin - dépens à charge de la partie adverse).

N°s 33.176 et 33.177

ARRETS du 11 octobre 1989 (VIe Chambre)

CLEREMBAUX: réouverture des débats.

N° 33.178

ARRET du 11 octobre 1989 (VIe Chambre) MM. Tapie, Président du Conseil d'Etat, Martens, rapporteur, et Hanotiau, conseillers, et Mendiaux, premier auditeur.

RIGA (Mes Detry et Geairain) c/ Société nationale des chemins de fer belges (Me Gérard)

I et JI. (voir n° 31.941, 1 et II, n°' 1 et 2). III. AGENTS DE LA SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER BELGES - Pension

Les articles 63 et 64.de la loi du 5 août 1978 ne sont pas applicables aux agents de la S.N.C.B.

Vu la requête introduite le 15 mars 1988 par Joseph Riga qui demande l'annulation:

«1) de la décision (mesure) de caractère réglementaire arrêtée (instaurée) en sa séance du 24 novembre 1987 par le Conseil d'administration de la S.N.C.B., sortant ses effets jusqu'au 31décembre1988 et susceptible de prorogation par ledit conseil, portant mise à la retraite d'office des agents statutaires âgés de 60 ans ou plus et comptant au moins 30 ans de services effectifs, et en ce qui concerne ceux d'entre eux qui, comme le requérant, seront âgés de 62 ans et plus avant le 1er août 1988, leur mise d'office à la retraite à cette date. La mesure précitée fait l'objet del' avis 58 P du 22 décembre 1987 ( .. .) et plus précisément de son premier alinéa et de son point II -Dispositions réglementaires, relatifs à la mise à la retraite d'office;

»2) de la décision implicite qu'entraîne le premier acte attaqué et particulièrement les dispositions réglementaires qui en font l'objet et qui sont reprises au point Il, littera A, 1 et 2, de l'avis 58 P, de mettre le requérant à la retraite d'office au 1er août 1988;

»3) de la décision qui fait l'objet de la note du 3 mars 1988, réf 2.15.58P!871GN/DF des Services généraux, Personnel et Affaires sociales, Bureau 05.231, Section 53, ( .. .) mettant le requérant à la retraite d'office le]<,. août 1988 en application des deux premiers actes attaqués»;

Considérant que, afin de réaliser les mesures de restructuration dont les principes avaient été définis dans l'arrêté royal n° 451 du 29 août 1986 relatif à l'assainissement des finances de la S.N.C.B. et dans l'arrêté royal n° 452 de même date modifiant la loi du 23 juillet 1926 créant la S.N.C.B., le comité restreint décida, le 20 novembre 1987 de réduire le nombre des agents en activité en faisant application de l'article 7 du chapitre XVI du statut du personnel, qui dispose comme suit:

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.278 à 33.280 Page 1 N° 33.278

N°8 33.278 et 33.279 ARRETS du 20 octobre 1989 (Ille Chambre)

MM. Van Aelst, président de chambre, rapporteur, François et Mme Thomas, conseillers, et M. Falmagne, premier auditeur.

n° 33.278 - VALENTIN! Francesco (Me Legat) n° 33.279 - VALENTIN! Americo (id.)

c/ Etat belge représenté par le Vice-Premier ministre et ministre de la Justice et des Classes moyennes (M. Deknop)

ETRANGERS - Police des étrangers - Renvoi et expulsion - Motifs d'expulsion - Etranger portant atteinte à l'ordre public

En /'espèce, le Roi ne semble pas avoir excédé ses pouvoirs en déduisant des faits qui ont entraîné des condamnations très importantes que l'étranger, par son comportement personnel, a porté à l'ordre public une atteinte telle qu'elle constitue une très grave menace.

Il a pris en compte la situation familiale de l'intéressé, mais a pu valablement estimer que cette menace était si grave qu'en l'espèce, ses intérêts familiaux et personnels et ceux des siens ne pouvaient prévaloir sur la sauvegarde del' ordre public.

N° 33.278 Vu la demande de sursis à exécution introduite par Francesco Valentini;

Considérant que par requête introduite le 27 juillet 1989, Francesco Valentini, de nationalité italienne, demande l'annulation de l'arrêté royal d'expulsion du 10 mai 1989, notifié le 22 juin 1989; que, dans le même acte, il demande qu'il soit sursis à l'exécution de cet arrêté;

Considérant qu'il y a lieu d'examiner sans délai la demande de sursis à exécution;

Considérant que le requérant a fait l'objet, le IO mai 1989, d'un arrêté royal d'expulsion motivé comme suit:

«Considérant qu'il est étah/i dans le Royaume;

»Considérant qu'ils' est rendu coupah/e de trafic de stupéfiants en association à /'égard de mineurs de plus de 16 ans; d'avoir facilité à autrui /'usage de stupéfiants à /'égard de mineurs de plus de 16 ans, de coups qualifiés avec préméditation, de détention et port d'armes de défense, de recels.faits étah/is pour lesquels il a d'ailleurs été condamné le 19 mai 1987 à des peines devenues définitives de 6 ans d'emprisonnement+ 4.000 Frs + 6 mois d'emprisonnement + l mois d'emprisonnement + 6 mois d'emprisonnement;

»Considérant qu'il s'est rendu coupahle de faux en écritures et usage, hanqueroute simple et frauduleuse, faits étahlis pour lesquels il a d'ailleurs été condamné le 11 mars 1987 à une peine devenue définitive de 7 mois d'emprisonnement avec sursis de 5 ans + 2 mois ... et puhlication;

»Considérant qu'il s'est rendu coupah/e d' outrage à agents de police, coups, infraction de roulage, faits étah/is pour lesquels il ad' ailleurs été condamné le 3 novemhre 1987 à des peines devenues définitives de 8 jours d'emprisonnement + l mois + 15 jours + 15 jours + JO jours ... ;

»Considérant qu'il résulte des faits précités qu'il a, par son comportement personne/, porté une atteinte grave à l'ordre puhlic et que sa présence dans le pays constitue une menace grave, réelle et actuelle, affectant un intérêt fondamental de la société he/ge;

»Considérant que la menace très grave résultant pour/' ordre puhlic du comportement de /'intéressé est telle que ses intérêts familiaux et personnels et ceux des siens ne peuvent en /'espèce prévaloir sur la sauvegarde de /'ordre puhlic;

»Vu /'avis de la commission consultative des étrangers qui estime que /'expulsion est justifiée;»;

Considérant que le requérant reconnaît les faits qui lui sont reprochés mais en conteste la gravité; qu'il fait valoir qu'il s'est établi en Belgique, a contracté mariage et a eu un enfant qui fait actuellement des études en Belgique;

Considérant que le Roi ne semble pas avoir excédé Ses pouvoirs en déduisant des faits qu'il cite et qui ont entraîné des condamnations très importantes et répétées que le requérant, par son comportement personnel, a porté à l'ordre public une atteinte telle qu'il constitue une «très grave» menace; qu'il a pris en compte la situation familiale de l'intéressé, mais a pu valablement estimer que cette menace était si grave qu'en l'espèce ses intérêts familiaux et personnels et ceux des siens ne pouvaient prévaloir sur la sauvegarde de lordre public;

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D"ETAT - 1989

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N° 33.278

Arrêts Nos 33.278 à 33.280

Page 2

Considérant que le moyen ne paraît donc pas, dans les circonstances de la cause, sérieux et de nature à entraîner l'annulation de l'acte attaqué; que le recours ne satisfait donc pas à une des deux conditions qui doivent être réunies pour que le sursis à l'exécution de la décision de renvoi soit accordé,

(Rejet de la demande de sursis à exécution).

* * * L'arrêt n° 33.279 est en substance identique au n° 33.278.

N° 33.280

ARRET du 20 octobre 1989 (Ille Chambre)

MBULI: pas de sursis à exécution pour un ordre de quitter le territoire.

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.169 à 33.189 Page 15 N° 33.178

<<Article 7. La société peut pensionner d'office tout agent se trouvant dans les conditions prévues à l'article

que l'article 5 est ainsi rédigé:

<<Article 5. Tout agent affilié au fonds des pensions peut faire valoir ses titres à une pension de retraite à partir de 60 ans, s'il a accompli au moins 20 années de services effectifs.

»Toutefois, cet âge est abaissé à:

>>--55 ans, s'il a accompli au moins 30 années de services effectifs roulants;

>>--un âge fixé entre 55 et 60 ans, au prorata de ses services effectifs roulants et sédentaires totalisant au moins 30 ans.

»Comptent comme services effectifs, ceux rendus au chemin de fer et rémunérés par celui-ci, de même que les prestations et interruptions de service prévues au règlement»;

Considérant que, le 24 novembre 1987, le conseil d'administration marqua son accord sur le principe de la mise à la retraite d'office des agents de 60 ans et plus comptant au moins 30 années de services; qu'il donna mandat à la direction de négocier, avec les organisations représentatives du personnel, les modalités concrètes d'application de cette mesure;

Considérant qu'après qu'un groupe de travail paritaire eut marqué son accord, le 4 décembre 1987, sur le principe de la mesure envisagée, le comité restreint décida, le 11 décembre 1987, de soumettre au conseil d'administration un document de travail comprenant un projet de réglementation; que, le 15 décembre 1987, le conseil d'administration approuva les dispositions statutaires et réglementaires contenues dans ce document; que, le 22 décembre 1987, le directeur général de la S.N.C.B. porta à la connaissance du personnel, par un avis 58 P dont le texte avait été approuvé le même jour par la commission paritaire nationale, la décision d'appliquer l'article 7 du chapitre XVI du statut et les règles applicables à la mise à la retraite d'office;

Considérant que le requérant, qui est inspecteur principal, a été mis à la pension d'office le 1er août 1988; que son recours est recevable en ce qu'il est dirigé contre les deux premiers actes qu'il attaque, non contre le troisième qui n'est qu'une note d'information;

Considérant que la partie adverse soutient que la requête est irrecevable dans les deux objets qu'elle se donne; que, selon elle, la «décision» du 24 novembre 1987 ne constitue pas un acte qui modifie l'ordonnancement juridique préexistant, le conseil d'administration s'étant borné à marquer un accord de principe sur une proposition du comité restreint et à «donner le feu vert à la poursuite de l'instruction de la mesure proposée ... »; qu'elle estime qu'il s'agit d'un acte préparatoire de la véritable décision - qui n'est pas entreprise en annulation -:­que le conseil d'administration n'a prise définitivement que le 15 décembre 1987, après un réexamen complet du dossier instruit conjointement par la direction, le comité restreint et le groupe de travail paritaire, et en adoptant les dispositions réglementaires relatives à la mise à la retraite d'office; qu'elle ajoute que, en portant cette décision à la connaissance du personnel par l'avis 58 P, le directeur général a pris une mesure d'exécution qui n'est pas un acte administratif susceptible d'annulation et que, à supposer que la requête puisse être interprétée comme attaquant la décision exprimée dans cet avis, le recours ne serait pas davantage dirigé contre un acte annulable; qu'en effet, conclut-elle, avant cette «décision» la S.N.C.B. puisait déjà dans l'article 7 du statut le droit de pensionner d'office tout agent se trouvant dans les conditions prévues à l'article 5, de telle sorte qu'il s'agit non d'une décision mais d'une mesure d'exécution de l'article 7 ou encore d'une information donnée au personnel sur la manière dont l'article 7 serait appliqué dans le cadre de la restructuration de la société;

Considérant qu'il se déduit de la requête que l'acte administratif attaqué par le requérant est la décision prise par la S.N.C.B. de mettre d'office à la retraite tous les agents ayant plus de 60 ans d'âge et plus de 30 ans d'ancienneté; que cette décision, qui s'est exprimée dans les délibérations du conseil d'administration des 24 novembre et 15 décembre 1987, a modifié l'ordonnancement juridique préexistant puisque la S.N.C.B. a manifesté son intention de faire de la mesure portée par l'article 7 une règle générale applicable dans tous les cas; qu'à supposer que la première de ces décisions ne soit qu'un acte préparatoire de la seconde et qu'elle ne soit pas, comme telle, susceptible d'annulation, elle forme une procédure complexe avec la décision du 15 décembre 1987 et connaîtra le même sort que celle-ci au cas où elle serait annulée; qu'il en est de même du deuxième acte attaqué, qui n'est qu'une mesure d'exécution de la décision entreprise;

Considérant que la fin de non-recevoir ne peut être accueillie;

Considérant que, par son premier moyen, le requérant soutient que, en décidant de mettre d'office à la retraite les membres du personnel âgés de plus de 60 ans et ayant plus de 30 ans de services effectifs, la S.N.C.B. a violé l'article 115 de la loi d'expansion économique, de progrès social et de redressement financier du 14 février 1961, selon lequel le droit à la pension de retraite ne peut naître avant l'âge de 65 ans, excepté dans les cas énumérés dans cet article; qu'il ajoute que, si l'article 116, § 2, dispose que les personnes qui étaient en service avant le 1er janvier 1961 peuvent demander l'application des règles qui constituaient leur régime de pension avant l'entrée en vigueur de la loi du 14 février 1961, ce texte qui doit être interprété de manière restrictive, a conféré au seul travailleur le droit de demander, s'il le souhaite, à partir à la retraite avant 60 ans si un règlement antérieur le prévoyait; qu'en revanche, selon le requérant, si ce règlement permettait à l'autorité de pensionner un agent avant qu'il n'ait 65 ans, cette faculté lui a été retirée par les dispositions impératives de l'article 115;

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.178

Arrêts Nos 33.169 à 33.189

Page 16

Considérant que l'article 115, 1er alinéa, de la loi du 14 février 1961 dispose comme suit:

«Sauf exceptions établies ci-après, le droit à une pension de retraite ne peut naître avant le premier du mois qui suit celui où les personnes mentionnées à l'article 113 atteignent l'âge de 65 ans»;

'que parmi les pèrsonnes mentionnées à l'article 113 figurent les agents dont la pension est à charge d'un des organismes d'intérêt public visés par la loi du 16 mars 1954 relative au contrôle de certains organismes d'intérêt public; que l'article 115 est applicable aux agents de la S.N.C.B. puisque celle-ci fait partie des organismes de la catégorie B énumérés à l'article 1er de cette loi; que seules les personnes qui appartiennent au personnel roulant de la S.N.C.B. figurent parmi les exceptions mentionnées à l'article 115; que, n'appartenant pas à cette catégorie, le requérant ne peut voir naître son droit à la pension avant d'avoir atteint l'âge de 65 ans;

Considérant cependant que l'article 115 ne concerne que le droit des agents à la pension; qu'en effet, les dispositions légales, réglementaires ou contractuelles existantes auxquelles, en vertu du même article 113, la loi unique a dérogé, sont celles qui permettaient aux agents de solliciter leur mise à la pension avant 65 ans;

Considérant, il est vrai, que l'article 116, § 1er, précise que l'article· 115 n'est applicable «d'office qu'aux personnes .dont les services conférant des droits à l'application d'un' des régimes de pension visés à l'article 113 ont débuté après le 31 décembre 1960» et que, selon le paragraphe 2 du même article, «les personnes qui étaient en service à cette date peuvent demander l'application des règles qui constituaient leur régime de pension avant l'entrée en vigueur des. présentes dispositions»; que cette dernière disposition n'a toutefois pour effet que de conserver aux ip.téressés ce qui efit .été un droit dans leur chef si la législation n'avait pas été modifiée; qu'en ce qui concerne les agents de la S.N.C.B., ce droit est inscrit à l'article 5 du statut; qu'en revanche, les articles 115 et 116 n'ont pas implicitement abrogé l'article 7 du statut du personnel; que cette disposition ne confère aucun droit aux agents mais accorde à la S.N.C.B., dans l'intérêt du service ·dont elle a la charge, la faculté de pensionner d'office certains . agents qui n'ont pas atteint l'âge de 65 ans;

Considérant qu'il s'ensuit què l'article 115 de la loi vise une hypothèse étrangère à celle de l'article 7, que ces deux dispositions ne sont pas inconciliables et qu'en appliquant la seconde, la partie adverse n'a pas violé la première; que le moyen manque en droit;

Considérant que, par son second moyen, le requérant soutient que la S.N.C.B. a méconnu les 'articles 63 et 64 de la loi du 5 août 1978 de réformes économiques et budgétaires, et ce que, si l'article 63 prévoit la possibilité d'être mis à la pension à 60 ans, après vingt ans de services, l'article 64 précise que cette mesure ne peut être prise qu'à la demande des intéressés;

Considérant que les articles 63 et 64 de la loi du 5 août 1978 ne sont pas applicables aux agents de la S.N.C.B.; qu'en effet, celle-ci n'est pas mentionnée à l'article 54 qui énumère les organismes dont les agents peuvent invoquer ces dispositions; que le moyen manque ~n droit, · ·

(Rejet - dépens à charge du requérant).

N° 33.179

ARRET du 11 octobre 1989 (VIe Chambre) MM. Tapie, Président du Conseil d'Etat, Martens, rapporteur, et Hanotiau, conseillers, et Mendiaux, premier auditeur.

RIGA c/ Etat belge représenté par le Ministr~ des Communications (M. Gallien), Société nationale des chemins de fer belges (Me Gérard) et Secrétariat permanent au recrutement du personnel de l'Etat

INTERET (POUR AGIR DEVANT LE CONSEIL D'ETAT) Classement selon la qualité du requérant - Agents et fonctionnaires publics - Nomination, promotion et changement de grade -Modification dans la situation administrative du requérant - Mise à la retraite

Un agent cesse d'avoir intérêt à poursuivre!' annulation d'une promotion dont il.a été évincé lorsqu'il est mis à la retraite en cours d'instance.

Vu la requête ,introduite le 20 mars 1988 par Joseph :Riga qui demande l'annulatio~ de la décision du 23 janvier .1987 par laquelle le conseil d'administration de la Société nationale des Chemins de Fer b,elges. a désigné B. de Closset comme directeur au département des Finances pour une période de six ans ,n;nouvelable, à partir du 1er février 1987; · . .

RECUEIL DES ÀRRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.169 à 33.189 Page 17 N° 33.180

Considérant que le requérant a été mis à la retraite d'office au 1er août 1988, en application d'une décision générale prise le 24 novembre 1987 par le conseil d'administration de la S.N.C.B.; que le recours qu'il avait introduit contre cette décision a été rejeté par l'arrêt n° 33.178 rendu ce jour; qu'il s'ensuit que le requérant a perdu tout intérêt à son recours,

(Rejet - dépens à charge du requérant).

N° 33.180

ARRET du 11 octobre 1989 (VIe Chambre) MM. Tapie, Président du Conseil d'Etat, Martens, rapporteur, et Hanotiau, conseillers, et Mme Dagnelie, auditeur.

THILL (Mes Detry et Geairain) c/ Régie des voies aériennes (M. Gallien) - Partie intervenante: Dumonceaux (Mes Gehlen et Putzeys)

1. AGENTS DE LA REGIE DES VOIES AERIENNES - Promotion - Comparaison des titres des candidats - Nomination

En l'espèce, le ministre n'a pas pris une décision manifestement déraisonnable en nommant un fonctionnaire, sur la proposition du collège des chefs de service, au terme d'une procédure dont la régularité n'est pas contestée.

II. AGENTS DE LA REGIE DES VOIES AERIENNES - Promotion - Conditions de promotion par avancement de grade - Personnel des services administratifs - Commandant d'aéroport

La fonction d'inspecteur ne se limite pas à des tâches administratives mais comporte des missions relatives à la bonne gestion des aéroports, au contrôle du matériel et à la sécurité du service, qui se retrouvent dans les attributions du commandant d'aéroport.

Vu la requête introduite le 12 juin 1987 par Raymond Thill qui demande l'annulation de l'arrêté ministériel n° 10.587 du 27 mars 1987 nommant Philippe Dumonceaux au grade de commandant d'aéroport;

Vu la requête introduite le 4 décembre 1987; par laquelle Philippe Dumonceaux demande à être reçu en qualité de partie intervenante;

Vu l'ordonnance du 9 décembre 1987 accueillant cette intervention;

Considérant que, le 24 novembre 1986, le collège des chefs de service de la Régie des Voies aériennes a examiné les candidatures à l'emploi de commandant d'aéroport vacant à l'aéroport de Liège-Bierset; qu'il a constaté que, des neuf candidats en présence, qui avaient tous la mention «favorable», seul Philippe Dumonceaux, l'intervenant, satisfait aux conditions requises, tandis que Raymond Thill, le requérant, ne comptait pas les trois ans d'ancienneté requis dans le grade; que sa candidature fut néanmoins examinée, le président ayant demandé si les candidats qui ne satisfaisaient pas aux conditions requises pour accéder à l'emploi de commandant d'aéroport ne pouvaient être pris en considération du <ifait qu'ils (étaient) occupés dans la même branche»; que le requérant soutient qu'il avait bien une ancienneté de grade de trois ans, que c'est depuis le 30 octobre 1981 qu'il a le grade de commandant adjoint d'aérodrome et non depuis le 1er mai 1986 et qu'à cette date, indiquée dans les listes soumises au collège, c'est l'appellation de son grade et non celui-ci qui a été modifiée, le terme aérodrome étant remplacé par celui d'aéroport; que deux des candidats firent l'objet d'une appréciation particulière, dont le requérant, au sujet duquel fut faite la remarque suivante:

«La candidature de M. Thil/ R. (F) re.tient aussi l'attention bien qu'il soit signalé que l'intéressé a, à plusieurs reprises, été absent pour des raisons de santé. Ses absences étaient couvertes par des attestations médicales»;

que, par sept voix contre deux au requérant, le collège décida de proposer la candidature de l'intervenant, «candidat classé <ifavorable» avec la plus grande ancienneté et qui remplit les conditions requises»; que cette proposition fut publiée le 1er décembre 1986;

Considérant que, le 19 janvier 1987, le collège des chefs de service examina deux réclamations dont celle du requérant; que celui-ci avait fait valoir l'élément suivant:

« ... le fait qu'il est nommé commandant adjoint d'aéroport principal et que le grade directement supérieur dans la hiérarchie est celui de commandant d'aéroport donne à penser que sa réclamation envers le candidat proposé est fondée, d'autant que son ancienneté de niveau et dans le rang est plus grande»;

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.180

que le collège répondit:

Arrêts Nos 33.169 à 33.189

Page 18

<<Les données fournies par M. Thil! R. (F) sont inexactes en ce sens qu'il ne s'agit pas (d' )éléments qui soient déterminants. Il est fait référence aux considérations émises durant l'examen des candidatures et portant sur ses aptitudes physiques amoindries»;

qu'il en conclut que l'examen des réclamations n'apportait aucun élément nouveau et décida, à l'unanimité cette fois, de proposer définitivement la candidature de Philippe Dumonceaux; que celui-ci fut nommé par l'arrêté attaqué;

Considérant que, par un moyen unique, le requérant soutient que la partie adverse a fait un usage abusif ou à tout le moins déraisonnable de son pouvoir discrétionnaire en nommant l'intervenant qui, occupant une fonction purement administrative, ne pouvait se prévaloir des qualifications et capacités requises pour exercer la fonction dirigeante opérationnelle de commandant d'aéroport; qu'il rappelle la jurisprudence selon laquelle il n'est pas exigé que des conditions de capacité pour exercer une fonction déterminée soient consignées dans un texte formel dès lors que ces conditions résultent implicitement de la nature spéciale de cette fonction; qu'il invoque les motifs de plusieurs arrêts dans lesquels le Conseil d'Etat a considéré que, de l'absence de fixation d'un statut ou de conditions d'avancement des agents de la Régie des Voies aériennes, il ne pourrait être déduit que tout emploi de la Régie serait accessible par voie de promotion à tout agent, indistinctement, et qu'un agent pourrait être promu à des fonctions techniques auxquelles les tâches administratives qu'il effectuait auparavant ne le prédestinaient pas; qu'il voit une confirmation de ces principes dans la circonstance que, à l'emploi de commandant d'aéroport vacant à Anvers-Deume, le ministre a nommé un candidat dont la carrière l'avait préparé à cette fonction, s'écartant de l'opinion du collège des chefs de service qui avait proposé de nommer un administratif qui, comme l'intervenant, était secrétaire d'administration-directeur adjoint; qu'il a joint à sa requête son curriculum vitae pour démontrer qu'il a exercé quasiment sans interruption, depuis son entrée en service en 1948, des fonctions qui l'ont préparé à celle de commandant d'aéroport;

Considérant que le requérant est commandant adjoint d'aéroport principal à Zaventem; qu'avant la promotion attaquée, !'intervenant était secrétaire d'administration-directeur adjoint; qu'ils appartenaient tous deux au rang 11, le requérant, depuis le 30 octobre 1981, l'intervenant depuis le 1er novembre de la même année; qu'il résulte de l'ensemble de la procédure de nomination que la partie adverse a finalement admis, contrairement à ce qu'avait cru initialement le collège des chefs de service et à ce que soutient aujourd'hui l'intervenant, que c'est bien le 30 octobre 1981 que le requérant avait accédé au rang 11 et qu'il avait les trois ans d'ancienneté de grade requis;

Considérant que la partie adverse a produit, à la demande de l'auditeur rapporteur, une note décrivant la fonction de commandant d'aéroport et celle de secrétaire d'administration-directeur adjoint, plus particulièrement la fonction d'inspecteur qu'exerçait l'intervenant; que cette dernière fonction ne se limite pas à des tâches administratives mais comporte des missions relatives à la bonne gestion des aéroports, au contrôle du matériel et à la sécurité du service, qui se retrouvent dans la description des attributions du commandant d'aéroport; que, comme il le souligne, l'intervenant exerçait, au sein de la direction «gestion des aéroports», l'inspection des missions techniques dont les commandants d'aéroport assument la gestion; que les fonctions spécifiques confiées à l'intervenant ne peuvent être tenues pour purement administratives, comme pourrait le laisser croire le titre qu'il portait;

Considérant que le ministre n'a pas pris une décision manifestement déraisonnable en nommant l'intervenant, sur la proposition faite par le collège des chefs de service au terme d'une procédure dont le requérant ne critique pas la régularité; que le moyen n'est pas fondé,

(Rejet - dépens à charge du requérant et de la partie intervenante).

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.169 à 33.189 Page 19 N° 33.182

N° 33.181

ARRET du 11 octobre 1989 (VIe Chambre) MM. Tapie, Président du Conseil d'Etat, Martens, rapporteur, et Hanotiau, conseillers, et Coolen, premier auditeur.

HAYOT et consorts (Mes Lindemans, Detry et Geairain) c/ Ville de Charleroi (Me Lorent) et Région wallonne (M. Chapelle)

PROCEDURE - 1° Requête - Objet - Disparition en cours d'instance - Improbation de l'acte attaqué; - 2° Non lieu de statuer; - 3° Dépens

Le recours en annulation d'un acte de l'autorité communale devient sans objet lorsque l'acte attaqué est improuvé en cours d'instance par l'autorité de tutelle. Il n'y a pas lieu de statuer. Les dépens sont mis à charge de la commune.

Vu la requête introduite le 11 décembre 1987 par André Hayot qui demande l'annulation de la délibération du 7 septembre 1987 du Conseil communal de Charleroi relative au statut administratif des membres de la police communale;

Vu la requête introduite le 14 décembre 1987 par Gervais Blairon qui demande l'annulation de la même délibération ainsi que de la décision ou de l'arrêté par lequel !'Exécutif de la Région wallonne l'aurait approuvée;

Vu la requête introduite le 14 décembre 1987 par Georges Sauvage qui demande l'annulation de la même délibération ainsi que de la décision ou de l'arrêté par lequel !'Exécutif de la Région wallonne l'aurait approuvée;

Vu la requête introduite le 14 décembre 1987 par Jean-Marie Barbier qui demande l'annulation de la même délibération ainsi que de la décision ou de l'arrêté par lequel !'Exécutif de la Région wallonne l'aurait approuvée;

Considérant que les recours sont connexes; qu'il y a lieu de les joindre;

Considérant que, par un arrêté du 28 janvier 1988 qui n'a pas été entrepris en annulation dans le délai de recours, le Ministre de la Région wallonne pour le Logement et la Tutelle a décidé de ne pas approuver la délibération attaquée du 7 septembre 1987; que les recours sont devenus sans objet,

(Jonction - non lieu de statuer - dépens à charge de la Ville de Charleroi).

N° 33.182

ARRET du 11 octobre 1989 (VIe Chambre) MM. Tapie, Président du Conseil d'Etat, Martens, rapporteur, et Hanotiau, conseillers, et Mme Dagnelie, auditeur.

BOURDON (Mes Detry et Geairain) c/ Régie des voies aériennes (M. Gallien)

AGENTS ET FONCTIONNAIRES PUBLICS - Promotion - Nomination - Généralités

Lorsque le ministre n'est lié ni par le classement établi par le collège des chefs de service ni par le critère del' ancienneté, son choix, sous peine d'apparaître comme arbitraire, doit reposer sur des motifs pertinents que le juge de l'excès de pouvoir doit trouver dans le dossier administratif, faute de quoi il est mis dans l'impossibilité d'exercer son contrôle de légalité.

Le Conseil d'Etat ne substitue pas son appréciation à celle du ministre lorsqu'il exige que celui-ci révèle les motifs de son choix, surtout lorsqu'il s'écarte de la proposition du collège des chefs de service.

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.182

Arrêts Nos 33.169 à 33.189

Page 20

Vu la requête introduite le 29 février 1988 par Jean-Pierre Bourdon qui demande l'annulation de l'arrêté ministériel n° 10.843 du 10 décembre 1987 nommant Michel Cowez au grade de sous-officier pompier d'aviation;

Considérant que, le 21 septembre 1987, le collège des chefs de service de la Régie des Voies aériennes a examiné les candidatures à des emplois correspondant au grade de sous-officier pompier d'aviation, emplois déclarés vacants par un avis n° 69 du 5 août 1987; que, dans le procès-verbal de la réunion, il est rappelé que la fonction se situe au rang 34 et que peuvent y être promus les agents des rangs 33 et 32 qui comptent une ancienneté de neuf ans au moins dans le niveau 3; qu'il est également mentionné que, compte tenu de la hiérarchie des grades au sein du service «Incendie», qui ne permet pas de faire application des règles de promotion édictées par le statut des agents de l'Etat, le collège a décidé de prendre en considération les candidatures des agents du rang 30; qu'enfin il est précisé que, vu l'absence d'examens à la Régie des Voies aériennes pour accéder au rang 34, le collège a décidé de s'en tenir uniquement aux conditions générales; qu'à propos de l'emploi vacant à l'aéroport de Charleroi-Gosselies, le collège a classé les neuf candidats, qui avaient tous la mention <1avorable», selon l'ordre d'ancienneté, Michel Cowez étant cinquième et Jean-Pierre Bourdon premier; qu'à l'unanimité, il a proposé la candidature de celui-ci; que, le 26 octobre 1987, le collège a rejeté les réclamations des agents Van Leemput et Thyrion et a confirmé sa proposition;

Considérant que, par l'arrêté attaqué, le ministre a nommé Michel Cowez, sa décision étant portée à la connaissance du personnel par un avis n° 138 du 29 décembre 1987;

Considérant que le requérant prend un moyen unique, notamment de !'«absence de motivation interne de l'acte attaqué»; qu'il fait observer qu'aucune pièce du dossier ne fait apparaître les motifs de la préférence accordée à Michel Cowez; qu'il ajoute que «si l'on compare la carrière du requérant avec celle du bénéficiaire de la promotion, on constate que le requérant, premier pompier d'aviation, depuis le 1a mars 1978, a été chargé de fonctions supérieures de sous-officier pompier d'aviation du 8 janvier 1985 au 31 décembre 1987, alors que le bénéficiaire de la promotion attaquée n'est premier pompier d'aviation que depuis le 1 a janvier I 985 et a été nommé sous-officier pompier d'aviation par l'acte attaqué au 1er janvier 1988»;

Considérant que la partie adverse répond qu'en l'absence de dispositions statutaires régl.ant l'attribution des emplois en compétition, le ministre jouit d'un large pouvoir discrétionnaire de nomination et n'est dès lors pas lié par l'appréciation du collège des chefs de service, gu'il n'est pas obligé de motiver son choix ni de communiquer ses raisons à celui-ci, qu'il juge seul des opportunités de nommer tel agent plutôt que tel autre et que le Conseil d'Etat ne peut substituer son appréciation de l'intérêt général à celle du ministre; qu'elle ajoute que le requérant, parmi des candidats qui avaient tous la mention <1avorable», n'a été classé premier que parce qu'il possédait la plus grande ancienneté;

Considérant que le collège des chefs de service a, selon le procès-verbal de la réunion du 21septembre1987, délibéré «sur les titres invoqués par les candidats, leurs qualités personnelles, leurs aptitudes, leur ancienneté, leur formation» et, tenant compte de ce qu'ils avaient tous la mention <1avorable», établi un classement qui correspond à celui de leur ancienneté; que le ministre n'était lié ni par ce classement ni par ce critère; que toutefois, sous peine d'apparaître comme arbitraire, son choix devait reposer sur des motifs pertinents que le juge de l'excès de pouvoir doit trouver dans le dossier administratif, faute de quoi il est mis dans l'impossibilité d'exercer son contrôle de légalité;

Considérant que ni le dossier ni même le mémoire en réponse ne permettent de discerner pour quel motif le ministre a écarté la candidature du requérant, classé premier par le collège des chefs de service; qu'il n'est pas possible de vérifier si le ministre a réellement exercé son pouvoir d'appréciation, si le critère qui l'a guidé dans son choix s'inspire de l'intérêt du service et s'il en a fait une application raisonnable; que le Conseil d'Etat ne substitue pas son appréciation à celle du ministre lorsqu'il exige que celui-ci révèle les motifs de son choix, surtout lorsque, comme en l'espèce, il s'écarte de .la proposition du collège des chefs de service; que le moyen est fondé,

(Annulation de l'arrêté ministériel n° 10.843 du 10 décembre 1987 qui nomme Michel Cowez au grade de sous-officier pompier d'aviation - dépens à charge de la partie adverse).

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.169 à 33.189 Page 21

N°8 33.183 à 33.189

ARRETS du 11 octobre 1989 (VIe Chambre)

N° 33.183

MM. Tapie, Président du Conseil d'Etat, Martens, rapporteur, et Hanotiau, conseillers, et Rousseaux, premier auditeur.

n° 33.183 - BERGILEZ (Me Cavenaile) n° 33.184 - CAPELLE (id.) n° 33.185 - DETRIER (id.) n° 33.186 - PEIFFER (id.) n° 33.187 - ROUELLE (id.) n° 33.188 - MICHEL (id.) n° 33.189 - RONDIA (id.)

c/ Communauté française (Me Van Assche)

1. PERSONNEL DES ETABLISSEMENTS SUBVENTIONNES DE L'ENSEIGNEMENT LIBRE -Agréation

II. INTERET (POUR AGIR DEVANT LE CONSEIL D'ETAT) - Circonstances ayant une influence sur l'intérêt - Mesure prise en cours d'instance pour donner satisfaction au requérant

III. PROCEDURE - Dépens

1. Un enseignant cesse d'avoir intérêt à poursuivre l'annulation du refus d'agréer sa nomination définitive lorsque le ministre agrée cette nomination en cours d'instance. Les dépens sont mis à charge de la partie adverse.

2. Peu importe son intérêt à être agréé à une date antérieure à celle qui a été fixée par le ministre en cours d'instance, dès lors que cette décision ministérielle, faute d'avoir été attaquée, est devenue définitive.

N° 33.183 Vu la requête introduite le 9 mai 1988 par Jacques Bergilez qui demande l'annulation de la décision

par laquelle le Ministre de !'Education nationale a fait connaître au pouvoir organisateur de l'Institut supérieur d'architecture Saint-Luc à Liège «son refus d'agréer le requérant dans la proposition de nomination définitive qui avait été introduite par le pouvoir organisateur le 20 janvier 1987»;

Considérant que, par un arrêté du 13 octobre 1988, le Ministre de !'Education nationale a agréé la nomination définitive du requérant dans l'enseignement supérieur de plein exercice de type long à partir du 1°' juin 1988; que le requérant a perdu intérêt à son recours;

Considérant sans doute que, comme il le soutient en réplique, le requérant aurait intérêt à faire dire que sa nomination devait être agréée à partir du 20 janvier 1987, non à partir du 1°' juin 1988; que toutefois cette dernière date a été fixée par l'arrêté ministériel du 13 octobre 1988 qu'il n'a pas entrepris en annulation et auquel il n'a pas déclaré, dans ses écrits de procédure, vouloir étendre son recours; que, par le biais du présent recours, il ne pourrait obtenir la modification d'un acte distinct, devenu définitif;

Considérant qu'en raison des circonstances de la cause, la partie adverse doit supporter la charge des dépens,

(Rejet - dépens à charge de la partie adverse).

* * * Les arrêts n°' 33.184 à 33.189 sont identiques au n° 33.183.

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêt N° 33.190 Page 1 N° 33.190

N° 33.190

ARRET du 12 octobre 1989 (Vile Chambre) M. Tacq, président de chambre, Mmes Vrints, rapporteur, et Tulkens, conseillers, et M. Hubregtsen, premier auditeur.

V AN BELLE ET PEENE (Me Windels) c/ Commune de Zedelgem (Me Vandeputte) et Région flamande (Me Bossuyt)

1. PROCEDURE - Mémoire en réponse et communication du dossier administratif - Délai

Le mémoire en réponse tardif est irrecevable en tant que pièce de procédure et n'a que la valeur d'un renseignement.

Il n '.Y a pas lieu de répondre aux moyens de défense qu'il contient ni aux exceptions prises de la tardiveté du recours et du défaut d'intérêt qui, en l'espèce, non seulement sont manifestement non fondées, mais qui sont en outre soulevées à des fins purement dilatoires.

II. BATISSE ET LOTISSEMENT EN GENERAL - Procédure administrative d'octroi des permis -Introduction des demandes - Nouvelle demande

Lorsque le demandeur n'a pas interjeté appel de la décision de refas du collège des bourgmestre et échevins, celui-ci ne peut prendre une nouvelle décision, éventuellement con­traire, qu'après que le demandeur a introduit une nouvelle demande.

m. AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - Plans de secteur - Plan - Destination des zones et modes d'utilisation du sol - Zone d'habitat - Compatibilité avec le voisinage immédiat - Exploitations agricoles

Il ressort de l'article 5.1.0. de l'arrêté royal du 28 décembre 1972 que les zones d'ha­bitat sont les zones principalement destinées à la résidence, que d'autres activités sont admises sous certaines conditions, généralement relatives ou inhérentes à la résidence, ainsi que des exploitations agricoles, que ces autres activités et exploitations agricoles peuvent être interdites si elles ne sont pas compatibles avec le voisinage immédiat. Il en découle que dans une zone d'habitat, une exploitation agricole peut être interdite au motif que le voisinage immédiat est une zone résidentielle et que les destinations agricole et résidentielle ne sont pas compatibles.

Il résulte de ce qui précède que, du moins du point de vue de la destination, sont auto­risés dans les zones d'habitat visées à l'article 5, J.O.:

- les bâtiments destinés à la résidence (sans limitation); - les bâtiments destinés à l'agriculture ainsi que les établissements socio-culturels, les

équipements de service public et les équipements touristiques, à condition qu'ils soient compatibles avec le voisinage immédiat;

- les bâtiments destinés aux activités de commerce, de service, d'artisanat et de petite industrie, à condition qu'ils soient compatibles avec la fonction résidentielle de la zone et avec le voisinage immédiat.

IV. AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - Plans de secteur - Plan - Destination des zones et modes d'utilisation du sol - Zone d'habitat à caractère rural- Compatibilité avec le voisinage immédiat -Exploitations agricoles

La zone d'habitat à caractère rural visée à l'article 6.1.2.2. de l'arrêté royal du 28 décembre 1996 constitue une indication supplémentaire de la zone d'habitat; que l'arti­cle ne contient pas de disposition explicite dérogeant à celle de l'article 5.1.0. L'article af­fecte la zone d'habitat à caractère rural d'une part, à la résidence et à ce qui en dépend ou s '.Y rattache, et, d'autre part, à l'agriculture.

Dès lors que l'article 6.1.2.2. met également l'accent sur l'agriculture, l'habitat en général et l'agriculture sont, dans cette zone, placés sur un pied d'égalité, de sorte qu'ils sont tous deux des destinations principales, déclarées compatibles par l'article lui-même.

Il résulte de ce qui précède que, du point de vue de la destination, sont autorisés dans les zones d'habitat à caractère rural visées à l'article 6, 1.2.2.:

- les bâtiments destinés à la résidence (sans limitation),

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT- 1989

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N° 33.190

- les bâtiments destinés à l'agriculture (sans limitation),

Arrêt N° 33.190

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- les établissements socio-culturels, les équipements de service public et les équipe-ments touristiques, à condition qu'ils soient compatibles avec le voisinage immédiat,

- les bâtiments destinés aux activités de commerce, de service, d'artisanat et de petite industrie, à condition qu'ils soient compatibles tant avec la fonction résidentielle qu'avec la fonction agricole de la zone, et avec le voisinage immédiat.

Si, dans une zone d'habitat à caractère rural, un permis pour la construction d'un bâtiment destiné à l'agriculture ne peut être refusé sur la base de la destination de la zone ou sur la base de l'incompatibilité avec le voisinage immédiat, un permis ne peut être accordé, alors même qu'il est conforme à la destination du plan de secteur, sans qu'il ait été examiné sérieusement s'il est conforme au bon aménagement des lieux.

Vu la requête introduite le 4 février 1982, par laquelle Pierre Van Belle et Roza Peene demandent l'annula­tion de la délibération du 7 décembre 1981 du collège des bourgmestre et échevins de la commune de Zedelgem, délivrant à Roger Vanhove un permis pour la construction d'un hangar et la transformation d'une porcherie existante sur la parcelle sise Faliestraat 24 à Zedelgem, et y cadastrée section C, n° 241 h;

Considérant que la demande introduite le 13 août 1981 par Roger Vanhove pour la construction d'un hangar et la transformation d'une porcherie existante, fut refusée le 8 septembre 1981 par le collège des bourgmestre et échevins de la commune de Zedelgem, en ce qui concerne la construction du hangar, sur la base d'un avis défavorable «conservatoire» du fonctionnaire délégué; que l'administration des structures agricoles du Ministère de 1' Agriculture a émis, le 24 septembre 1981, un avis favorable sur la demande de permis de bâtir, étant donné «qu'ils 'agit d'une transformation et d'une extension sur le fonds même d'une exploitation agricole existante, qui est située partielle­ment en zone agricole, et partiellement en zone d'habitat à caractère rural»; qu'il ne fait aucun doute que la porcherie est située dans la zone d'habitat à caractère rural, que le hangar sera implanté dans la zone agricole située à l'arrière et que la porcherie sera transformée en porcherie d'élevage pour 39 bêtes; que le 7 décembre 1981, le collège a accordé le permis par la délibération présentement attaquée, tant pour la construction du hangar que pour la transformation de la porcherie; que la délibération fait référence à un avis favorable du fonctionnaire délégué, lequel fait lui-même référence à l'article 11, 4.1., de l'arrêté royal du 28 décembre 1972 relatif à la présentation et à la mise en œuvre des projets de plans et des plans de secteur, et pose, ensuite, notamment comme condition qu'un écran de verdure d'au moins 3 m de largeur soit aménagé entre la porcherie et la villa des requérants;

Considérant que la deuxième partie défenderesse a introduit un mémoire en réponse après l'expiration du délai qui lui était accordé par l'ordonnance du 20 avril 1982;

que ce mémoire est dès lors irrecevable en tant que pièce de procédure et n'a que la valeur d'un renseignement; qu'il n'y a pas lieu de répondre aux moyens de défense qu'il contient ni aux exceptions prises de la tardiveté du recours et du défaut d'intérêt, qui, non seulement, sont manifestement non fondées mais sont en outre soulevées à des fins purement dilatoires;

Considérant qu'en un deuxième moyen, les requérants allèguent notamment que la délibération attaquée <<se base à présent sur des motifs, que ce même collège a interprétés différemment auparavant>>, que le permis de bâtir pour la construction de la porcherie a d'abord été refusé, qu'ensuite, le collège a fait «une volte-face» flagrante en octroyant le permis;

Considérant qu'en tant qu'elle octroie un permis de bâtir pour la construction d'un hangar, la délibération attaquée a été prise après que le collège eut refusé, par délibération du 8 septembre 1981, d'accéder à cette même demande; que le demandeur n'a pas interjeté appel de ce refus; que celui-ci était donc définitif; que le collège n'aurait pu prendre une nouvelle décision éventuellement contraire qu'après que le demandeur eut introduit une nouvelle demande, ce qui ne fut pas le cas; que dans son dernier mémoire, la première partie défenderesse admet que l'illégalité commise résulte inévitablement du procédé- qui n'est plus d'application depuis-, qui consiste soit à émettre des avis défavorables «conservatoires», soit à refuser provisoirement des demandes de permis de bâtir; que le moyen est fondé; qu'il entraîne l'annulation de la délibération attaquée en tant qu'elle accorde le permis de bâtir pour le hangar;

Considérant que les requérants allèguent par ailleurs que le collège des bourgmestre et échevins n'a pas tenu compte du fait que les constructions faisant l'objet de la demande de permis sont partiellement situées dans une zone d'habitat à caractère rural, et que l'administration a dès lors délivré le permis, sans avoir égard aux «exigences de qualité de vie d'un noyau d'habitat sain, à savoir surtout un nouveau quartier de villas», notamment au fait que la porcherie serait implantée à moins de 10 mètres de l'habitation des requérants;

Considérant que la première partie défenderesse réplique qu'il s'agit en l'espèce d'une vieille ferme, bâtie avant que les requérants ne construisent sur la parcelle contiguë, que les travaux de transformation, ne peuvent qu'améliorer la situation existante sous l'angle de l'aspect, qu'il s'agit de porcheries existantes, que les maisons de la Faliestraat ne forment pas un quartier de villas, qu'il s'agit au contraire d'une zone d'habitat rural à caractère

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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agricole, qui remplit à la fois une fonction agricole et une fonction d'habitat, et où l'on peut dès lors envisager la construction de bâtiments d'exploitation;

Considérant que dans leur mémoire en réplique, les requérants contestent que l'exploitation existante comprît déjà une porcherie d'élevage; qu'ils allèguent que, du point de vue de l'aménagement, il est totalement inacceptable d'autoriser la construction d'une porcherie juste à côté d'une habitation, et, de surcroît, <'faisant face» au séjour -d'autant plus que la condition posée par le permis, prescrivant l'aménagement d'un écran de verdure de 3 mètres de largeur, ne peut être respectée alors que la configuration de la propriété du demandeur laissait pourtant suffisamment d'espace pour implanter la porcherie plus en retrait de la voie publique, à une distance qui se justifie mieux du point de vue de l'aménagement- p. ex. à 70 mètres de l'habitation mentionnée;

Considérant que dans son dernier mémoire, la première partie défenderesse souligne qu'elle a tenu compte du commentaire administratif joint à l'arrêté royal précité du 28 décembre 1972 et qui s'énonce comme suit:

<<il convient tout particulièrement, dans les zones d'habitat rurales à caractère agricole (Villages et hameaux à vocation agricole), de tenir compte tant de la fonction agricole que de la fonction d'habitat. S'il ressort de la situation des lieux que la fonction agricole prédomine, il faut en tenir compte».

qu'en outre, la première partie défenderesse transmet une lettre du fonctionnaire délégué datant du 25 février 1982, dans laquelle celui-ci déclare, après l'octroi du permis de bâtir:

<<En ce qui concerne mon avis du 20111181 sur le dossier d'urbanisme précité, j'ai l'honneur de vous faire savoir que l'obligation d'aménager un écran de verdure serré d'au moins 3 m de largeur, ne vaut pas pour la construction bordant la limite parcellaire sud, étant donné que les bâtiments existants qui longent cette limite n'en sont écartés que d'un mètre environ.L'écran de verdure requis peut donc être limité à une largeur d'environ 1 m à cet endroit».

Considérant que l'alinéa 1er de l'article 5, 1.0., de l'arrêté royal du28 décembre 1972 relatif à la présentation et à la mise en œuvre des projets de plans et des plans de secteur, dispose que les zones d'habitat sont destinées à la résidence ainsi qu'aux activités de commerce, de service, d'artisanat et de petite industrie, pour autant qu'elles («ces activités>>) ne doivent pas être isolées dans une zone prévue à cet effet pour des raisons de bon aménagement, aux espaces verts, aux établissements socio-culturels, aux équipements de service public, aux équipements touristiques, aux exploitations agricoles; que l'alinéa 2 du même article dispose que ces installations, établissements et équipe­ments ne peuvent toutefois être autorisés que pour autant qu'ils soient compatibles avec le voisinage immédiat; que l'article 6 du même arrêté royal porte: «1.2. Les zones d'habitat peuvent faire l'objet des indications supplémentaires suivantes: (...) 1. 2. 2. les zones d'habitat à caractère rural sont destinées à recevoir l'habitat en général ainsi que les exploitations agricoles»;

Considérant qu'il ressort de la disposition de l'article 5, 1.0., que les zones d'habitat sont les zones princi­palement destinées à la résidence, que d'autres activités sont admises sous certaines conditions, généralement relatives ou inhérentes à la résidence, ainsi que des exploitations agricoles, que ces autres activités et exploitations agricoles peuvent être interdites si elles ne sont pas compatibles avec le voisinage immédiat; qu'il en découle que dans une zone d'habitat, au sens de l'article 5, 1.0., une exploitation agricole peut être interdite au motif que le voisinage immédiat est une zone résidentielle et que les destinations agricole et résidentielle ne sont pas compatibles;

Considérant que la zone d'habitat à caractère rural visée à l'article 6, 1.2.2., constitue une indication supplé­mentaire de la zone d'habitat; que l'article ne contient pas de disposition explicite dérogeant à celle de l'article 5, 1.0.; que l'article affecte la zone d'habitat à caractère rural d'une part, à la résidence et à ce qui en dépend ou s'y rattache, et, d'autre part, à l'agriculture; que, dès lors que l'article 6, 1.2.2., met également l'accent sur l'agriculture, dans cette zone, l'habitat en général et l'agriculture sont toutefois placés sur un pied d'égalité, de sorte qu'ils sont tous deux des destinations principales; qu'il s'agit de destinations principales déclarées compatibles par l'article lui­même; qu'il en découle que l'article 5, 1.0., alinéa 2, ne peut conclure à l'incompatibilité de l'exploitation agricole avec le voisinage immédiat dans cette zone, sans nier la double destination qu'il consacre; que, dans le cas contraire, la disposition de l'article 6, 1.2.2., se confondrait avec celle de l'article 5, 1.0.; que l'article 6, 1.2.2., serait dénué de sens en droit, s'il n'était admis qu'il a été établi dans le but - du fait de la destination réglementaire résidence/ agriculture - de dispenser l'autorité qui délivre le permis, d'apprécier, pour chaque cas séparément, la compatibilité des destinations résidence et agriculture;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, du moins du point de vue de la destination, sont autorisés dans les zones d'habitat visées à l'article 5, 1.0.:

- les bâtiments destinés à la résidence (sans limitation);

- les bâtiments destinés à l'agriculture ainsi que les établissements socio-culturels, les équipements de service public et les équipements touristiques, à condition qu'ils soient compatibles avec le voisinage immédiat;

- les bâtiments destinés aux activités de commerce, de service, d'artisanat et de petite industrie, à condition qu'ils soient: 1. compatibles avec la fonction résidentielle de la zone, 2. compatibles avec le voisinage immédiat;

Considérant qu'il résulte, en outre, de ce qui précède, toujours du point de vue de la destination, que sont autorisés dans les zones d'habitat à caractère rural visées à l'article 6, 1.2.2.:

- les bâtiments destinés à la résidence (sans limitation),

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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- les bâtiments destinés à l'agriculture (sans limitation),

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- les établissements socio-culturels, les équipements de service public et les équipements touristiques, à condition qu'ils soient compatibles avec le voisinage immédiat;

- les bâtiments destinés aux activités de commerce, de service, d'artisanat et de petite industrie, à condition qu'ils soient: 1. compatibles tant avec la fonction résidentielle qu'avec la fonction agricole de la zone, 2. compatibles avec le voisinage immédiat;

Considérant que la première partie défenderesse allègue par conséquent à raison que dans une zone d'habitat à caractère rural, un permis pour la construction d'un bâtiment destiné à l'agriculture ne peut être refusé sur la base de la destination de la zone ou sur la base de l'incompatibilité avec le voisinage immédiat, à savoir l'incompatibilité avec la destination donnée aux bâtiments et aux terrains, situés dans le voisinage immédiat et autorisée par l'article 5, 1.0., alinéa l er;

Considérant toutefois qu'un permis ne peut être accordé, alors même qu'il est conforme à la destination du plan de secteur, sans qu'il ait été examiné sérieusement s'il est conforme au bon aménagement des lieux; que sans qu'il soit besoin de relever que le permis de bâtir attaqué fait uniquement référence à l'article Il, 4.1., de l'arrêté royal du 28 décembre 1972, applicable aux zones agricoles - ce qui montre que, dans la mesure où elle porte sur la transformation de la porcherie existante, la demande a été appréciée sans que l'autorité ait eu connaissance de la situation exacte de la construction - il y a lieu de constater que le dossier de la demande ne contient aucune indication qui aurait pu attirer l'attention de l'autorité qui délivre les permis sur le fait que la porcherie à transformer était située à proximité immédiate d'une habitation; que sur le dessin à l'échelle l/500, indiquant l'implantation des travaux de construction, l'habitation des requérants n'apparaît pas; que seule la photo n° 3 permet à l'observateur averti de percevoir la partie supérieure du toit de l'habitation des requérants; que ces lacunes du dossier sont de nature à induire l'autorité en erreur quant à l'aménagement des lieux; que le moyen est fondé; que la délibération attaquée est également entachée d'illégalité, en tant qu'elle implique l'autorisation de transformer la porcherie;

Considérant que le troisième moyen de la requête, filt-il recevable et fondé, ne peut conduire à une annulation plus étendue que les deux premiers moyens dont le bien-fondé a été reconnu ci-dessus; qu'il ne doit pas être examiné,

(Annulation de la délibération du 7 décembre 1981 du collège des bourgmestre et échevins de la commune de Zedelgem, délivrant à Roger Vanhove un permis pour la construction d'un hangar et la transformation d'une porcherie existante sur la parcelle sise Faliestraat 24 à Zedelgem, et y cadastrée section C, n° 241 h- partage des dépens par moitié entre la commune de Zedelgem et la Région flamande)

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Arrêts Nos 33.191à33.238 Page 1

N° 33.191

ARRET du 12 octobre 1989 (VIIe Chambre)

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\ M. Tacq, président de chambre, rapporteur, Mmes Vrints et Tulkens, conseillers, et Vandendriessche, auditeur.

ELECTION DES MEMBRES DU CONSEIL DE L'AIDE SOCIALE DE KORTE­MARK (Me Daems)

I. ELECTIONS DES CONSEILS DE L'AIDE SOCIALE - Contentieux - Conseil d'Etat -Procédure - Mémoire en réplique

L'arrêté royal du 12 janvier 1977 ne prévoit pas le dépôt d'un mémoire en réplique. Un tel mémoire doit être écarté des débats.

Il incombe cependant au Conseil d'Etat de prendre acte de la déclaration que le requérant y fait, selon laquelle il souhaite expressément que l'article 51 du règlement de procédure soit appliqué aux fins de démontrer qu'un faux en écriture a été commis en ce qui concerne un acte de présentation.

II. ELECTION DES CONSEILS DE L'AIDE SOCIALE - Opérations préalables au vote - Can­didatures

1. Il ressort de l'article 11, §1er, de la loi du 8 juillet 1976 que les candidats à l'élection des membres du conseil de l'aide sociale doivent accepter leur candidature par une déclaration signée sur l'acte de présentation. La preuve de cette acceptation, qui a pour but d'éviter qu'une personne soit présentée comme candidat à son insu ou contre sa volonté, peut être donnée autrement que par une déclaration signée sur l'acte de présentation.

Lorsqu'il est établi qu'un candidat suppléant a signé l'acte de présentation comme conseiller communal proposant, il ne peut faire aucun doute qu'il a accepté sa candidature comme candidat suppléant à la date même où l'acte de présentation a été introduit auprès du bourgmestre.

2. Du fait qu'un acte de présentation mentionne un candidat en dernier lieu dans le tableau des candidats suppléants, il ne peut se déduire que l'intention des conseillers communaux intervenus dans la présentation aurait été de désigner cette personne comme premier suppléant de chacun des candidats effectifs proposés.

3. La critique relative aux formulaires distribués par le bourgmestre pour l'acte de présentation, à l'absence de toute observation émanant du bourgmestre à propos de la manière dont l'acte de présentation d'une liste aurait été établ~ à la manière dont le bourgmestre a établi le bulletin de vote et à l'ajout apporté tardivement à un acte de présentation, est sans pertinence pour celui qui, de toutes manières, n'aurait pu être le candidat suppléant d'un des membres effectifs de sa liste.

m. ELECTION DES CONSEILS DEL' AIDE SOCIALE - Contentieux - Conseil d'Etat - Qualité pour interjeter appel - Candidats suppléants

Celui qui a été régulièrement candidat suppléant a intérêt à contester le résultat de l'élection en ce qui concerne les candidats suppléants de son groupe.

Il ne justifie d'aucun intérêt à l'invalidation de l'élection des membres effectifs ni de celle des suppléants élus sur les autres listes que la sienne.

IV. ELECTION DES CONSEILS DE L'AIDE SOCIALE - Contentieux - Députation permanente - Procédure - Droits de la défense

V. PROVINCE - Députation permanente - Attributions - Attributions juridictionnelles

L'article 18 de la loi du 8 juillet 1976 n'impose aucun délai en ce qui concerne la convocation des parties à l'audience où sera examinée la réclamation formulée contre l'élection des conseillers de l'aide sociale, ni en ce qui concerne la communication des jours et heures où le dossier doit pouvoir être consulté avant l'audience. Mais il ressort de l'article 104bis de la loi provinciale et de l'article 5 de l'arrêté royal du 17septembre1987 que la députation permanente et le greffier provincial sont en tout cas tenus de respecter des

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Arrêts Nos 33.191 à 33.238

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délais raisonnables pour observer les obligations que leur imposent ces articles, afin que celles-ci se justifient comme garantie de la préparation d'une défense adéquate.

Même si aucune autre partie n'était en cause et si le dossier n'était pas volumineux, une convocation à l'audience faite cinq heures avant l'instruction de l'affaire et la faculté de consulter le dossier pendant une demi-heure seulement avant l'audience ne répondent manifestement pas aux conditions minimales posées par ces dispositions .

... Alors spécialement qu'il ne ressort d'aucun élément de l'affaire qu'il n'a pas été possible d'avertir le requérant au moins vingt-quatre heures avant l'audience et de déposer le dossier aux fins de consultation au greffe provincial.

VI. ELECTION DES CONSEILS DE L'AIDE SOCIALE - Contentieux - Conseil d'Etat -Compétence

Lorsqu'il statue sur un recours au sens de l'article 18 de la loi du 8 juillet 1976, le Conseil d'Etat siège en tant que juge de pleine juridiction et sa décision se substitue à celle de la députation permanente.

VIL ELECTION DES CONSEILS DE L'AIDE SOCIALE - Contentieux - Conseil d'Etat -Moyens - Intérêt

Le moyen pris de la violation des droits de la défense par la députation permanente ne saurait justifier l'invalidation du résultat de l'élection.

VIII. ELECTION DES CONSEILS DE L'AIDE SOCIALE- Dépouillement- Suppléants

Il ressort des articles 14 et 18 de la loi du 8 juillet 1976 qu'un seul vote peut être émis en regard du nom d'un membre effectif, et que les candidats suppléants d'un membre effectif élu sont, de plein droit et dans l'ordre de l'acte de présentation, suppléants de ce membre effectif.

L'invalidation des résultats de l'élection peut être limitée à un suppléant et ne doit pas entratner celle des voix qui ont été régulièrement accordées au membre effectif que le candidat suppléant était appelé à remplacer.

La présence au conseil de l'aide sociale d'un membre effectif qui n'a pas de suppléant ne fait pas obstacle au fonctionnement régulier du conseil.

Vu la requête introduite le 29 mai 1989 par laquelle Firmin Dupulthys interjette appel de la décision de la députation permanente du conseil provincial de la Flandre occidentale du 11 mai 1989, rejetant comme non fondée la réclamation qu'il avait introduite contre l'élection des membres du conseil local de l'aide sociale qui s'est tenue le 10 avril 1989 au conseil communal de Kortemark;

Considérant que les formalités prescrites par les articles 3, 4 et 5 de l'arrêté royal du 12 janvier 1977 déterminant la procédure devant la section d'administration du Conseil d'Etat, en cas de recours prévu par les articles 18, 21 et 22 de la loi du 8 juillet 1976 organique des centres publics d'aide sociale, ont été observées;

Considérant que le requérant a introduit, le 19 avril 1989, une réclamation auprès du gouverneur de la province de Flandre occidentale, contre l'élection par le conseil communal de Kortemark, le 10 avril 1989, du conseil communal de Kortemark, le 10 avril 1989, du conseil local del 'aide sociale, 1) au motif que les bulletins de vote le désignaient uniquement comme suppléant de Camiel Vanloocke, bien que l'acte de présentation introduit par son groupe auprès du bourgmestre l'ait désigné comme premier suppléant de tous les candidats membres effectifs qui y étaient présentés, 2) au motif que le bourgmestre a intentionnellement remis à son groupe des formulaires d'acte de présentation qui ne permettaient pas d'établir les bulletins de vote comme l'impose l'article 9 de l'arrêté royal du 22 novembre 1976 et qu'il n'a pas vérifié si l'acte de présentation de son groupe était conforme aux articles 4 et 5 du même arrêté royal, ni n'a recommandé de le rectifier ou de le compléter, et n'a de ce fait pas observé l'article 6 de l'arrêté royal, 3) au motif que le bourgmestre a empêché les conseillers communaux des <partis n'appartenant pas à la majorité» de se concerter avant le début de la séance du conseil communal au cours de laquelle il fallait élire les membres du conseil de l'aide sociale; que, par un arrêté du 11mai1989, la députation permanente du conseil provincial de la Flandre occidentale a rejeté la réclamation; qu'elle a validé l'élection des neuf membres effectifs élus du conseil de l'aide sociale de Kortemark et des suppléants de sept d'entre eux et invalidé l'élection des suppléants des membres effectifs élus du groupe du requérant; que sa décision a été portée à la connaissance du requérant par une lettre recommandée à la poste, envoyée le 17 mai 1989; que, le 29 mai 1989, c'est-à-dire dans le délai des 15 jours qui suivent cette notification, le requérant a interjeté appel de cette décision devant le Conseil d'Etat;

RECUEIL DES ARRIIl'S DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.191 à 33.238 Page3 N° 33.191

Considérant que, le 13 juin 1989, c'est-à-dire dans les 15 jours à compter de la date à laquelle l'avis de dépôt de la requête a été publié dans la commune, Daniël Lambrecht, bourgmestre de Kortemark et en outre cosignataire d'un acte de présentation, a déposé un mémoire en réponse recevable;

Considérant que le requérant a déposé, le 29 juin 1989, un mémoire répliquant au mémoire en réponse de Daniël Lambrecht que le règlement de procédure spécial devant la section d'administration du Conseil d'Etat, fixé par l'arrêté royal du 12 janvier 1977 en ce qui concerne les élections du conseil du C.P.AS., ne prévoit pas le dépôt d'une telle pièce de procédure; que le mémoire visé n'est pas recevable; qu'il doit être écarté des débats; qu'il incombe cependant au Conseil d'Etat de prendre acte de la déclaration que le requérant y fait, déclaration selon laquelle il souhaite expressément que l'article 51 du règlement de procédure soit appliqué aux fins de démontrer qu'un faux en écriture a été commis en ce qui concerne l'acte de présentation du C.V.P., déclaration qui doit s'entendre comme l'expression de son intention de faire usage de la pièce du dossier administratif arguée de faux;

Considérant que la partie intéressée fait valoir, tout d'abord, que le requérant, dès lors qu'il n'a pas été présenté comme candidat membre effectif, ni comme candidat suppléant de l'un des deux membres effectifs élus de son groupe, ne peut justifier d'un intérêt légitime, l'irrégularité de l'élection qu'il invoque n'étant pas de nature à avoir empêché son élection comme membre effectif ou comme premier ou second suppléant d'un membre effectif élu, ensuite, que le recours est de toute manière irrecevable dans la mesure où il tend à l'invalidation de l'élection des suppléants des membres effectifs de la liste C.V.P., dès lors «que ceci est sans aucun rapport avec le fait qu'il ait été présenté ou qu'il ne l'ait pas été»;

Considérant que le requérant justifie son intérêt en faisant référence à la circonstance que les irrégularités qu'il dénonce ont empêché, lors du scrutin contesté, son élection comme suppléant de Daniël Derynck et d'Eric Vanthuyne;

Considérant qu'en vertu de l'article 11, § 1"', de la loi organique du 8juillet1976, les candidats à l'élection des conseillers C.P.A.S. doivent accepter leur candidature par une déclaration signée sur l'acte de présentation; que cette acceptation a explicitement pour but d'éviter qu'une personne soit présentée comme candidat a son insu ou contre sa volonté; qu'il peut être admis que la preuve de cette acceptation peut être donnée autrement que par une déclaration signée sur l'acte de présentation; que le requérant figure dans l'acte de présentation comme conseiller communal étant intervenu dans la présentation des candidats, et qu'il figure de surcroît dans l'acte de présentation comme candidat suppléant; qu'il est établi qu'il a signé l'acte de présentation comme conseiller communal proposant; que, dans ces conditions, il ne peut faire aucun doute que le requérant a accepté sa candidature comme candidat suppléant, et ce à la date même à laquelle l'acte de présentation a été introduit auprès du bourgmestre; qu'il peut être admis que le requérant a été régulièrement candidat suppléant pour son groupe; qu'en cette qualité, il a intérêt à contester le résultat de l'élection du 10 avril 1989 en ce qui concerne les candidats suppléants de son groupe; que la première branche de l'exception d'irrecevabilité soulevée par la partie intéressée n'est pas fondée à cet égard;

Considérant que le requérant a formé un recours en sa qualité de candidat suppléant à l'élection du conseil de l'aide sociale de Kortemark, pour la liste «Nieuw»; que la seconde branche de l'exception n'est pas fondée;

Considérant que le requérant allègue notamment que la députation permanente a méconnu son droit de défense en ce qu'en méconnaissance des articles 104bis, alinéa 1er, 3° et 6°, de la loi provinciale, et 5 de l'arrêté royal du 17 septembre 1987 relatif à la procédure devant la députation permanente dans les cas où elle exerce une mission juridictionnelle, le greffier provincial faisant fonction l'a prévenu le 11 mai 1989, «quelques heures» seulement avant la séance, par un message télexé, envoyé à son bureau, confirmant une communication faite par téléphone le même jour, vers 12 heures, par l'administration provinciale à son épouse, que sa réclamation serait examinée le même jour à partir de 17 heures au <«'rovinciaal Hof>> à Bruges et que le dossier pouvait être consulté à cette adresse à partir de 16 h 30, et en ce que la députation permanente a en outre interprété de manière complètement erronée et injuste sa réponse à ce message télexé, selon laquelle «l'avertissement tardif et des rendez-vous d'affaires pris antérieurement l'empêchaient de venir consulter des dossiers cet après-midi», comme une indication de ce qu'il ne souhaitait pas donner suite à l'invitation;

Considérant que l'article 104bis inséré dans la loi provinciale par la loi du 6 juillet 1987 et l'article 5 de l'arrêté royal du 17 septembre 1987 précité, pris en exécution de cet article de la loi, disposent notamment que, dans tous les cas où la députation permanente exerce une mission juridictionnelle, l'instruction est contradictoire, les parties et leurs avocats ont le droit de prendre connaissance au greffe provincial du dossier de l'affaire, de déposer un mémoire et de présenter des observations orales à l'audience, le greffier provincial informe les parties des jours et heures où elles peuvent consulter le dossier et notifie aux parties la date de l'audience publique;

Considérant que l'article 18 de la loi organique du 8 juillet 1976, il est vrai, n'impose aucun délai en ce qui concerne la convocation des parties à l'audience lors de laquelle sera examinée la réclamation formulée contre l'élection des membres du conseil de l'aide sociale, ni en ce qui concerne la communication des jours et heures où le dossier peut être consulté, ni ne détermine le délai pendant lequel le dossier doit pouvoir être consulté avant l'audience; que cependant, en vertu de l'article 104bis de la loi provinciale et de l'article 5 de l'arrêté royal du 17 septembre 1987, la députation permanente et le greffier provincial sont en tout cas tenus de respecter des délais raisonnables pour observer les obligations que leur imposent ces articles, afin que celles-ci se justifient comme garantie de la préparation d'une défense adéquate; que, bien qu'en l'espèce aucune autre partie n'ait été en cause et que le dossier de l'affaire n'ait certes pas été volumineux, une convocation à l'audience faite quelque cinq

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'Hl'AT - 1989

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N° 33.191

Arrêts Nos 33.191 à 33.238

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heures avant l'instruction de l'affaire et la faculté de consulter le dossier pendant une demi-heure seulement avant l'audience ne répondent manifestement pas aux conditions minimums posées par les dispositions législatives et réglementaires précitées, d'autant qu'il ne ressort d'aucun élément de l'affaire qu'il n'a pas été possible d'avertir le requérant au moins vingt-quatre heures avant l'audience, et de déposer le dossier aux fins de consultation au greffe provincial; que le moyen est fondé;

Considérant que l'illégalité ainsi constatée affecte cerres la régularité de la décision de la députation perma­nente; que le Conseil d'Etat, lorsqu'il statue sur un recours au sens de l'article 18 de la loi organique du 8 juillet 1976, siège toutefois en tant que juge de pleine juridiction et sa décision se substitue à celle de la députation permanente; que, pendant la durée de la procédure devant le Conseil d'Etat, le requérant a eu la possibilité de consulter toutes les pièces du dossier au greffe du Conseil d'Etat et d'exposer ses moyens de défense devant la section d'administration; que les irrégularités commises par la députation permanente, qui sont invoquées dans le moyen, ne sauraient, en soi, justifier l'invalidation du résultat de l'élection des membres du conseil de l'aide sociale de Kortemark;

Considérant que le requérant fait valoir, en outre, que les actes de présentation introduits non seulement par sa liste <<Nieuw» mais également par la liste C.V.P. n'ont pas été établis conformément aux conditions posées à l'article 4 de l'arrêté royal du 22 novembre 1976, modifié par l'arrêté royal du 29 décembre 1988, au motif que, dans aucune de ces deux listes, les candidats suppléants pour chaque candidat membre effectif ne figuraient dans l'ordre exact dans lequel ils étaient appelés à remplacer ce dernier, que le bourgmestre a toutefois rectifié après coup l'acte de présentation de la liste C.V.P. en faisant précéder les noms des candidats membres effectifs d'un numéro d'ordre et en indiquant en regard des noms des candidats suppléants le numéro d'un ou de deux candidats membres effectifs, en précisant même dans un cas l'ordre de succession, et a, par conséquent, commis un faux en écriture, que le bourgmestre, pour l'affecter, a établi «erronément» le bulletin de vote utilisé pour l'élection en le mentionnant sur ce bulletin uniquement comme suppléant de Camiel Vanloocke, que le bulletin de vote «ne répondait>> pas, ainsi, à l'acte de présentation introduit par la liste <<Nieuw» dans lequel il était appelé, conformément à l'intention de son groupe politique, à être le premier suppléant des trois candidats membres effectifs présentés par le groupe; que tout ceci a pu se faire dès lors que le bourgmestre a distribué, aux différents groupes politiques représentés au conseil communal, des formulaires erronés pour l'établissement de l'acte de présentation et qu'en recevant les actes de présentation, alors que l'article 6 de l'arrêté royal du 22 novembre 1976 lui en offrait la possibilité, il a omis de signaler aux déposants que leur acte n'avait pas été établi de la manière prescrite par l'article 4 du même arrêté royal;

Considérant que l'acte de présentation des candidats membres du conseil de l'aide sociale de Kortemark, introduit par la liste <<Nieuw» est établi comme suit: sont mentionnés dans le tableau des «candidats membres effectifs», dans l'ordre mais sans mention d'un numéro d'ordre, les noms d'Eric Vanthuyne, de Daniël Derynck et de Camiel Vanloocke, leur date de naissance, profession et résidence principale, et dans le tableau des «candidats suppléants», également dans l'ordre, sans autre précision, les noms de Marie-Louise Mostrey, de Roland Vancoillie et de Firmin Dupulthys, ainsi que leur adresse complète; que, sur la base de l'acte de présentation ainsi établi, il peut tout au plus être considéré que l'intention du groupe concerné peut avoir été que la première personne mentionnée dans le second tableau serait candidat suppléant de la première personne mentionnée dans le premier tableau, la deuxième personne mentionnée dans le second tableau, le candidat suppléant de la deuxième personne mentionnée dans le premier tableau, et la troisième personne mentionnée dans le second tableau, le candidat suppléant de la troisième personne mentionnée dans le premier tableau; que, eu égard notamment au fait qu'il est mentionné à la troisième place dans le second tableau, il ne peut aucunement se déduire de l'acte de présentation visé, que l'inrention des conseillers communaux intervenus dans la proposition de la liste <<Nieuw», à l'exception peut-être de sa propre intention, aurait été de désigner le requérant comme premier suppléant de chacun des trois candidats membres effectifs proposés; que la thèse du requérant ne peut nullement être retenue; que l'allégation du requérant, selon laquelle il avait été désigné, dans l'acte de présentation de la liste <<Nieuw», comme candidat suppléant de tous les candidats membres effectifs, ne se vérifie en rien ni dans cet acte ni dans les autres éléments de la cause; que le requérant, suivant sa propre déclaration, s'est abstenu lors de l'élection du 10 avril 1989; que, dès lors, seuls cinq des six conseillers communaux de la liste «Nieuw» ont pris activement part à l'élection; qu'ils ont accordé douze voix à Daniël Derynck et Eric Vanthuyne et une voix à Camiel Vanloocke; que, même si l'acte de présentation de la liste <<Nieuw» avait été établi conformément aux prescription de l'article 4 del 'arrêté royal du 22 novembre 1976 et si le bulletin de vote avait été arrêté en conformité avec cet acte, le requérant n'en aurait pas pu être pour autant le suppléant de l'un des membres effectifs élus de la liste <<Nieuw»; que la critique du requérant relative aux formulaires distribués par le bourgmestre pour l'établissement de l'acte de présentation, à l'absence de toute observation émanant du bourgmestre à propos de la manière dont l'acte de présentation de la liste <<Nieuw» avait été établi, à la manière dont le bourgmestre a établi le bulletin de vote et à l'ajout apporté tardivement à l'acte de présentation de la liste C.V.P., est sans pertinence pour lui; qu'il y a lieu de rejeter le moyen dans sa totalité;

Considérant que l'excès de pouvoir invoqué dans le dernier moyen peut uniquement justifier l'invalidation de l'élection en ce qui concerne les suppléants des membres effectifs élus sur la liste C.V.P.; que, pour les motifs exposés plus haut, le requérant n'a aucun intérêt à invoquer ce moyen; que l'acte de présentation de la liste C.V.P. argué de faux, ne présente aucun intérêt essentiel pour la solution du litige;

Considérant que, conformément aux articles 14 et 15 de la loi organique du 8 juillet 1976, modifiés par la loi du 29 décembre 1988, un seul vote peut être émis en regard du nom d'un membre effectif et les candidats

RECUEIL DES ARRErS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.191à33.238 Page 5 N° 33.191

suppléants d'un membre effectif élu sont, de plein droit et dans l'ordre de l'acte de présentation, suppléants de ce membre effectif; que, ni la désignation des candidats suppléants ni leur ordre de succession ne peuvent influencer l'élection des membres effectifs du conseil de l'aide sociale; qu'une irrégularité dans la présentation des candidats suppléants est sans incidence sur le résultat de l'élection des membres effectifs; que, sauf contretemps, seul le membre effectif est pris en considération pour siéger pendant six ans au conseil de l'aide sociale; que la présence, dans ce conseil, d'un membre effectif qui n'a pas de suppléant, ne fait pas obstacle au fonctionnement régulier du conseil; que la suppléance d'un membre effectif qui n'a pas de suppléant, est du reste réglée de manière explicite à l'article 17 de la loi organique du 8 juillet 1976; que l'invalidation du résultat de l'élection n'est possible et permise qu'en ce qui concerne un suppléant; qu'elle ne doit assurément pas conduire à l'invalidation des voix qui ont été régulièrement accordées au membre effectif que le candidat suppléant était appelé à remplacer; que rien ne justifie de prendre, à l'égard de l'élection des suppléants mentionnés dans l'acte de présentation de la liste «Nieuw», une autre décision que celle prise par la députation permanente.

(Annulation de l'arrêté de la députation permanente du conseil provincial de la Flandre occidentale du 11 mai 1989, rejetant la réclamation que Firmin Dupulthys avait introduite contre l'élection des membres du conseil local de l'aide sociale organisée le 10 avril 1989 par le conseil communal de Kortemark - l'élection des membres du conseil local de l'aide sociale, organisée le 10 avril 1989, par le conseil communal de Kortemark est validée, dans les mêmes limites que dans l'arrêté de la députation permanente du conseil provincial de la Flandre occidentale du 11 mai 1989).

N°" 33.192 à 33.231

ARRETS du 12 octobre 1989 (VIIe Chambre)

33.192 à 33.205 - NYAME et autres: désistement.

33.206 et 33.207 - ARTHUR et NTIAMOAH: pas de sursis à exécution, l'étranger n'ayant pas comparu à l'audience.

33.208 à 33.231- AMANGUA et autres: désistement de la demande de sursis à exécution.

N° 33.232

ARRET du 13 octobre 1989 (IIIe Chambre) MM. Van Aelst, président de chambre, rapporteur, François et Mme Thomas, conseillers, et M. Falmagne, premier auditeur.

BASANGA BOKANYELA c/ Etat belge représenté par le Vice-Premier ministre et ministre de la Justice et des Classes moyennes (Me Scarcez)

I. (voir n° 33.922, I)

II. ETRANGERS - Police des étrangers - Etrangers à statut spécial - Réfugiés - Demande urgente de réexamen

En l'espèce, le requérant reste en défaut d'établir qu'il n'a pas reçu les convocations du commissaire général aux réfùgiés et aux apatrides.

Vu la requête introduite le 19 avril 1988 par Jean-Victor Basanga Bokanyela, de nationalité zaïroise, qui demande l'annulation de la décision de rejet d'une demande urgente de réexamen de refus de séjour avec ordre de quitter le territoire, notifiée le 8 avril 1988;

Vu l'arrêt n° 30.657 du 9 septembre 1988 rejetant la demande de sursis à exécution;

Considérant que les envois recommandés par lesquels les différentes pièces de la procédure ont été notifiées au requérant en son domicile déclaré n'ont pu lui être remis; que ces documents ont été renvoyés au Conseil d'Etat avec la mention <<Maison fermée»;

RECUEIL DES ARRHrS DU CONSEIL D'ErAT - 1989

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N° 33.232

Arrêts Nos 33.191 à 33.238

Page 6

Considérant que c'est par le seul fait du requérant que les pièces de la procédure n'ont pu lui être notifiées; qu'il appartenait au requérant de prendre des mesures pour que la procédure qu'il avait engagée puisse suivre régulièrement son cours; que l'impossibilité de notifier les pièces de la procédure dans laquelle le Conseil d'Etat a été placé, ne saurait faire obstacle à ce qu'il se prononce sur le recours dont il a été saisi;

Considérant que le requérant est entré en Belgique le 9 janvier 1988, titulaire d'un passeport avec un visa valable un mois; qu'il a demandé à être reconnu comme réfugié; que, cette demande ayant été rejetée pour tardiveté, une décision de refus de séjour avec ordre de quitter le territoire lui a été notifiée le 16 février 1988; qu'il a introduit une demande urgente de réexamen qui a été rejetée, le 30 mars 1988, par la décision attaquée motivée comme suit:

«Vu l'avis du commissaire général aux réfugiés et aux apatrides rendu le 16 mars 1988 et concluant qu'il n'est pas en mesure de donner un avis, l'intéressé n'ayant pas donné suite à deux convocations;

»Considérant que la demande urgente de réexamen introduite n'apporte aucun élément neuf justifiant la tardiveté de la demande d'asile,»;

Considérant que le requérant dit n'avoir pas reçu les deux convocations du commissaire général aux réfugiés et aux apatrides;

Considérant que le requérant, qui n'a d'ailleurs pas non plus été chercher les documents envoyés par le Conseil d'Etat, reste en défaut d'établir qu'il n'a pas reçu les convocations du commissaire général aux réfugiés et aux apatrides que celui-ci justifie avoir adressées à l'avocat du requérant chargé de la procédure; qu'il ne peut être contesté que la partie adverse a appliqué les dispositions légales propres au cas d'espèce, soit l'article 63/3 de la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers, inséré par l'article 14 de la loi du 14 juillet 1987; que la mesure attaquée n'est empreinte d'aucune illégalité; que le recours n'est pas fondé.

(Rejet - dépens à charge du requérant).

N° 33.233

ARRET du 13 octobre 1989 (Ille Chambre) MM. Van Aelst, président de chambre, rapporteur, François et Mme Thomas, conseillers, et M. Falmagne, premier auditeur.

AN CEL (Me Lagasse) c/ Etat belge représenté par le Vice-Premier ministre et ministre de la Justice et des Classes moyennes (Me Scarcez)

I et II. (voir n° 31.924, 1 et II) III. ETRANGERS - Police des étrangers - Demande en révision

En l'espèce, le ministre a réexaminé le cas du requérant, notamment en ayant égard à l'avis de la Commission consultative des étrangers, et explicité les circonstances en raison desquelles il estimait que cet étranger devait être éloigné du territoire.

Et le délai mis pour prendre la décision de révision ne semble pas anormalement long.

IV. ETRANGERS - Police des étrangers - Renvoi et expulsion - Motifs de renvoi - Etranger nuisible pour l'ordre public

1. En l'espèce, le ministre s'est fondé non sur la condamnation pénale mais sur les faits qui l'ont justifiée.

2. En l'espèce, le ministre a pu, sans excéder ses pouvoirs, estimer que le comportement de l'étranger présentait un danger tel pour l'ordre public qu'il se justifiait de l'éloigner du Royaume pour la période de dix ans prévue par l'article 26 de la loi du 15 décembre 1980.

3. En l'espèce, /'Office des étrangers, d'abord, la Commission consultative des étrangers ensuite, ont examiné la situation familiale de l'étranger à l'intention du mini­stre qui a valablement pu estimer que, s'agissant d'un célibataire sans charge de famille, flgé de 24 ans au moment de la prise de décision, rien ne faisait obstacle à l'éloignement.

Vu la requête introduite le 24 juin 1988 par Pascal Ancel, de nationalité française, qui demande l'annulation de:

«1° l'arrêté ministériel de renvoi du 29 août 1986, notifié le 25 septembre 1986,

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETPü' - 1989

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Arrêts Nos 33.191 à 33.238 Page 7 N° 33.233

»2° la décision du Ministre de la Justice du 25 mai 1988 de rejet de demande en révision portée à la connaissance du requérant de manière i"égulière le 22 juin 1988;»

Vu l'arrêt n° 30.660 du 9 septembre 1988 rejetant la demande de sursis à exécution;

Considérant que le requérant est né en 1964; qu'il est entré en Belgique en 1984; qu'il a fait l'objet, le 29 aodt 1986, d'un arrêté ministériel de renvoi dont il a demandé la révision; que, sur avis de la commission consultative des étrangers concluant au bien-fondé de cet arrêté, le ministre a pris, le 25 mai 1988, la décision de rejet de la demande en révision, décision motivée comme suit:

«Considérant qu'il n'a été ni autorisé ni admis à séjourner plus de trois mois ou à s'établir dans le Royaume;

»Considérant qu'en 1986 ils' est rendu coupable de vol avec violences, ou menaces, commis la nuit, en bande, avec effraction, escalade ou fausses clefs, et avec armes et véhicule volé, ainsi que de plusieurs vols qualifiés, faits établis pour lesquels il a d'ailleurs été condamné, le 25juin1986, à une peine devenue définitive de 2 ans de prison avec sursis de 4 ans pour ce qui excède 12 mois;

»Considérant qu'il résulte des faits précités que, par son comportement personnel, il a porté atteinte à l'ordre public;»;

Considérant que le requérant, en un premier moyen, conteste en vain que! 'acte de notification de la décision de rejet ait été accompli par une autorité compétente; qu'en effet, une éventuelle irrégularité de la notification n'est pas de nature à affecter la légalité de la décision de rejet; que le moyen ne peut être retenu;

Considérant que le requérant soutient, en un deuxième moyen, que tant l'arrêté ministériel de renvoi que la décision de rejet de la demande en révision se fondent sur la condamnation pénale et non sur le comportement personnel du requérant et n'invoquent pas l'existence d'une menace réelle et suffisamment grave affectant l'intérêt fondamental de la société; qu'il ajoute que rien dans la motivation n'indique que le ministre ait réexaminé le cas du requérant et que l'existence du danger pour l'ordre public est démentie par le délai mis par le ministre à prendre la mesure d'éloignement;

Considérant qu'il ressort du dossier que le ministre a réexaminé le cas du requérant, notamment en ayant égard à l'avis de la commission consultative des étrangers, et explicité les circonstances en raison desquelles il estimait que le requérant devait être éloigné du territoire; que l'avis des autorités judiciaires n'est qu'un des éléments qui ont contribué à former la décision du ministre; que celui-ci s'est fondé, non sur la condamnation pénale mais sur les faits qui l'ont justifiée; que le délai mis pour prendre la décision attaquée ne semble pas anormalement long puisque le requérant, détenu du 12 mars 1986 au 22 décembre 1986 et condamné le 25 juin 1986, s'est vu notifier, le 25 septembre 1986, l'arrêté ministériel de renvoi pris le 29 aodt 1986; qu'il en a demandé la révision le 6 octobre 1986; que l'avis du procureur du Roi a été sollicité le 26 novembre 1986 et celui de la commission consultative des étrangers le 5 février 1987, l'audience de celle-ci étant fixée le 11 juin 1987 mais remise à plusieurs reprises en raison des changements d'adresse du requérant; que ce n'est que le 31 mars 1988 qu'il a pu être entendu et que la commission a donné son avis, le ministre prenant sa décision le 25 mai 1988; que le moyen n'est pas fondé;

Considérant qu'en un troisième moyen, le requérant soutient que l'atteinte à l'ordre public n'est pas démontrée, ou en tout cas que la mesure est disproportionnée à l'infraction, de sorte que l'interdiction de rentrer en Belgique pendant dix ans est discriminatoire;

Considérant que le ministre a pu, sans excéder ses pouvoirs, estimer que le comportement du requérant présentait un danger tel pour l'ordre public qu'il se justifiait de l'éloigner du Royaume pour la période de dix ans prévue par l'article 26 de la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers; que le moyen ne peut être retenu;

Considérant que le requérant, en un quatrième moyen, allègue que le ministre a omis de vérifier si la nécessité de protection de l'ordre public devait primer le droit du requérant à la vie familiale;

Considérant que !'Office des étrangers d'abord, la commission consultative des étrangers ensuite, ont exa­miné la situation familiale du requérant à l'intention du ministre qui a valablement pu estimer que, s'agissant d'un célibataire sans charge de famille, âgé de 24 ans au moment de la prise de décision, rien ne faisait obstacle à l'éloignement; que le moyen n'est pas fondé.

(Rejet - dépens à charge du requérant).

RECUEIL DES ARREfS DU CONSEIL D'Hf1'f - 1989

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N° 33.234

N° 33.234

ARRET du 13 octobre 1989 (III° Chambre)

Arrêts Nos 33.191 à 33.238

Page 8

MM. Van Aelst, président de chambre, rapporteur, François et Mme Thomas, conseillers, et M. Falmagne, premier auditeur.

BOUANATI (M0 Daoût) c/ Etat belge représenté par le Vice-Premier ministre et ministre de la Justice et des Classes moyennes (M0 Scarcez)

ETRANGERS - Police des étrangers - Renvoi et expulsion - Motifs d'expulsion - Etranger portant atteinte à l'ordre public

S'agissant d'un étranger qui, IJ,gé de 24 ans, n'a ni femme ni enfants, le ministre a pu valablement estimer que sa situation familiale ne présentait aucun obstacle à l'éloignement.

Vu la requête introduite le 13 juillet 1988 par Amar Bouanati, de nationalité algérienne, qui demande l'annulation de l'arrêté royal d'expulsion du 2 juin 1988 qui lui a été notifié le 28 juin 1988;

Vu l'arrêt n° 30.986 du 7 octobre 1988 rejetant la demande de sursis à exécution;

Considérant que le requérant, né le 18 mai 1964, est entré en Belgique en janvier 1965; que la commission consultative des étrangers, dont l'avis a été demandé sur une proposition d'expulsion, a estimé, le 10 février 1988, que celle-ci était justifiée; qu'après avoir décrit quatorze délits commis par le requérant entre 1982 et 1985, elle écrivait:

<<. •• L'intéressé, né en France en 1964, est de nationalité algérienne. Ses parents résident en Belgique depuis 1965 ainsi que d 'f1Utres de leurs enfants. Il est célibataire, sans profession, ni travail, ni ressources connues.

»Les rapports de police ne pouvaient qu'être fort défavorables( ... ).

>~ucune circonstance ne permet de considérer que serait écartée la grave menace que son comportement fait craindre pour l'ordre public.»;

que le Roi a pris, le 2 juin 1988, l'arrêté d'expulsion attaqué, motivé comme suit:

«Considérant que le 6 janvier 1983, il s'est rendu coupable de coups, faits établis pour lesquels il a d'ailleurs été condamné le 27avril1984, à des peines devenues définitives de 5 mois d'emprisonnement et 100 francs d'amen­de, d'un mois d'emprisonnement et 100 francs d'amende, de 3 mois d'emprisonnement et 100 francs d'amende, avec sursis de 5 ans pour les trois peines d'emprisonnement;

»Considérant qu'il s'est rendu coupable de vol à l'aide de violences, commis la nui~ par deux ou plusieurs personnes, avec utilisation d'un véhicule, extorsion à l'aide de violences, vols qualifiés, tentative de vol qualifié, port d'arme de défense sans motif légitime, vol simple et bris de clôtures, faits établis pour lesquels il a d'ailleurs été condamné, le 14 novembre 1984, à des peines devenues définitives de 3 ans d'emprisonnement avec sursis de 3 ans pour la moitié, et de 50 francs d'amende;

»Considérant qu'en juin, juillet et août 1985, avec des coauteurs, il a commis cinq cambriolages et un vol avec effraction dans une voiture;

»Considérant qu'entre le 1.,. et le 5juillet1985, il a falsifié et utilisé une carte d'identité qu'il savait volée;

»Considérant qu'il a recelé une autre carte d'identité, faits établis pour lesquels il a d'ailleurs été condamné le 5 mars 1986 à une peine devenue définitive de 4 ans d'emprisonnement et 1 OO francs d'amende;

»Considérant qu'il résulte des faits précités que, par son comportement personnel, il a porté une atteinte grave à l'ordre public;

»Vu l'avis de la commission consultative des étrangers concluant à l'expulsion;»

qu'en même temps que cet arrêté royal, le ministre a pris un arrêté mettant le requérant à la disposition du Gouvernement en vue de sa remise à la frontière;

Considérant que le requérant prend un moyen unique de la violation de l'article 8 de la Convention eu­ropéenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales; qu'il soutient qu'il «est toujours à charge de ses parents» et qu'il «a manifestement droit au regroupement familial qui lui assure la protection et l'assistance nécessaires et qui sont les seuls moyens de lui assurer une réinsertion sociale dans le pays qui a toujours été le sien»;

RECUEIL DES ARREI'S DU CONSEIL D"E'OO" - 1989

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Arrêts Nos 33.191à33.238 Page 9 N° 33.234

Considérant que la commission consultative des étrangers a indiqué à l'intention du ministre la situation familiale du requérant; que comme celui-ci, âgé de 24 ans, n'a ni femme ni enfants, le ministre a valablement pu estimer que sa situation familiale ne présentait aucun obstacle à l'éloignement; que le moyen n'est pas fondé.

(Rejet - dépens à charge du requérant).

N° 33.235 ARRET du 13 octobre 1989 (me Chambre)

MM. Van Aelst, président de chambre, rapporteur, François et Mme Thomas, conseillers, et M. Falmagne, premier auditeur.

MAHRIA (Mes Ardeleanu et Fraiture) c/ Etat belge représenté par le Vice-Premier ministre et ministre de la Justice et des Classes moyennes (Me Scarcez)

ETRANGERS - Police des étrangers - Renvoi et expulsion - Motifs d'expulsion - Etranger portant atteinte à l'ordre public

1. Il ressort des articles 20 et 21 de la loi du 15 décembre 1980 qu'il suffit que le Roi justifie sa décision par la gravité de l'atteinte que l'étranger porte à l'ordre public.

2. En l'espèce, le Roi a eu égard à la situation familiale de l'étranger, mais a estimé que la menace résultant pour l'ordre public était telle que le droit à la vie familiale ne pouvait prévaloir sur la sauvegarde de l'ordre public.

Vu la requête introduite le 8 aollt 1988 par Ali Mahria, de nationalité marocaine, qui demande l'annulation de l'arrêté royal d'expulsion du 8 juin 1988, à lui notifié le 11juillet1988;

Vu l'arrêt n° 30.998 du 11 octobre 1988 rejetant la demande de sursis à exécution;

Considérant que le requérant, né en 1963, est entré en Belgique en 1969; que la commission consultative des étrangers appelée à donner son avis sur une demande d'expulsion a estimé, le 31 mars 1988, que celle-ci était justifiée; qu'elle écrivait:

<<Le comportement de Ali Mahria justifie, par la gravité des nombreuses atteintes portées à l'ordre public, la proposition d'expulsion. Il a en effet commis les infractions suivantes:

»1. Dans la nuit du 7 au 8 avril 1984, avec un coauteur, il a tenté de s'emparer, à l'aide d'effraction, de divers objets, dans un magasin.

»2. Dans la nuit du 14 au 15 mai 1985, alors qu'il circulait dans Bruxelles au volant d'une voiture auto­mobile, avec des coauteurs, il a pénétré par effraction dans un établissement et y a dérobé des marchandises pour une valeur de 3.000 F.

»3. Dans la nuit du 4 au 5 août 1985, il a volé par effraction et bris de vitre 5 musicassettes dans une voiture automobile.

»4. Dans la nuit du 28 au 29/10/1985, il a tenté, par effraction, de voler divers objets dans un magasin;

»5. Surpris et appréhendé, il se rebella contre les agents de police, les outragea et les menaça.

»6. Entre janvier et mars 1986, il a recelé un abonnement trouvé par lui, dit-i~ dans une station de métro.

»7. Dans la nuit du 9 au 10/08/1986, avec des coauteurs, il a pu dérober des bijoux, 2 briquets et une petite somme d'argent en faisant usage, dans une maison où il était reçu, à l'égard de trois personnes, d'un produit inhibant incorporé dans de la boisson et qui rendit les préjudiciés inconscients du vol dont ils étaient victimes.

»Il a été condamné de ces chefs 1. le 29/01/1986, à 6 mois d'emprisonnement avec sursis (1) 2. le 9/02/1987, à 30 mois d'emprisonnement avec sursis partiel (2 à 7).

»L'intéressé est né au Maroc en 1963. Il réside en Belgique depuis 1969. Ses parents y résident ainsi que d'autres de leurs enfants. Il est célibataire.

>-,Aucune des circonstances invoquées en sa faveur (études, travail, milieu familial, personnalité, relations, ferme volonté de reclassement) ne peut faire considérer que serait écartée la grave menace que son comportement fait craindre pour l'ordre public.»;

RECUEIL DES ARREI'S DU CONSEIL D'EfAT - 1989

Page 85: (VIe - KU Leuven · 33.103 - CLOETENS et REKOMS = n° 33.100 +désistement. RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989 . Arrêt N° 33.107 Page 1 N° 33.107 ARRET du 3octobre1989

N° 33.235

que le Roi a pris, le 8 juin 1988, l'acte attaqué motivé comme suit:

Arrêts Nos 33.191à33.238

Page 10

«Considérant qu'en 1984, il s'est rendu coupable de vol qualifié, fait établi pour lequel il a d'ailleurs été condamné le 29 janvier 1986 à une peine, devenue définitive, de 6 mois d'emprisonnement avec sursis de 5 ans, sursis révoqué par la suite;

»Considérant qu'en 1985 et 1986, il s'est rendu coupable de vol à l'aide de violences par deux ou plusieurs personnes, ayant fait usage de substances toxiques, commis la nuit; de vols qualifiés, de tentative de vol qualifié, de recel, de rébellion et d 'outrages à la police, faits établis pour lesquels il a d'ailleurs été condamné le 9 février 1987 à une peine devenue définitive de 30 mois d'emprisonnement avec sursis de 5 ans pour la 1/2 de l'emprisonnement principal;

»Considérant qu'Ü résulte des faits précités que, par son comportement personnel, il a porté une atteinte grave à l'ordre public;

»Considérant que la menace très grave résultant pour l'ordre public du comportement de l'intéressé est telle que ses intérêts familiaux et personnels et ceux des siens ne peuven~ en l'espèce, prévaloir sur la sauvegarde de l'ordre public;»;

Considérant que le requérant soutient qu'il ne pouvait être expulsé qu'en cas d'atteinte grave à l'ordre public et à la sécurité nationale et que «dans l'A.R. attaqué, aucune mention d'une quelconque atteinte à la sûreté de l'Etat n'est faite, pas plus d'ailleurs dans la décision prise le 29/04/ 1988 par la commission consultative des étrangers»; qu'il ajoute que depuis sa libération, soit le 29 décembre 1987, il vit sans qu'il puisse lui être adressé de reproche, qu'il a rompu avec ses anciennes fréquentations, qu'il veut fonder un foyer, que sa famille est honorable et qu'il a droit au respect de sa vie privée et familiale;

Considérant qu'aux termes des articles 20 et 21 de la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers, sur lesquels se fonde l'acte attaqué, un étranger peut être renvoyé en cas d'atteinte grave soit à l'ordre public soit à la sécurité nationale; qu'il suffisait que le Roi justifie Sa décision par la gravité de l'atteinte que portait le requérant à l'ordre public; qu'Il a eu égard à la situation familiale de l'intéressé, mais a estimé que la menace résultant pour l'ordre public était telle que le droit à la vie familiale ne pouvait prévaloir sur la sauvegarde de l'ordre public; que les moyens ne sont pas fondés.

(Rejet - dépens à charge du requérant).

N° 33.236

ARRET du 13 octobre 1989 (IIIe Chambre) MM. Van Aelst, président de chambre, rapporteur, François et Mme Thomas, conseillers, et M. Falmagne, premier auditeur.

MARRO (Mes Neuray et de Raedt) c/ Etat belge représenté par le Vice-Prenùer nùnistre et ministre de la Justice et des Classes moyennes (Me Scarcez)

ETRANGERS - Police des étrangers - Renvoi et expulsion - Motifs d'expulsion - Etranger portant atteinte à l'ordre public

1. En l'espèce, le Roi s'est fondé, non sur les condamnations mais sur les faits qui les ont amenées. Une erreur dans l'arrêté d'expulsion, relative à une des moins importantes des condamnations, n'a pu déterminer sa décision.

2. En constatant que depuis plus de quatorze ans l'étranger montrait une persistance dans la délinquance, le Roi a pu valablement déduire des faits de la cause que, par son comportement, l'intéressé constituait une menace grave, réelle et actuelle affectant un intérêt fondamental de la société belge.

Vu la requête introduite le 23 aoftt 1988 par Emilio Marro, de nationalité italienne, qui demande l'annulation de l'arrêté royal d'expulsion du 30 juin 1988 à lui notifié le 27 juillet 1988;

Vu l'arrêt n° 31.349 du 18 novembre 1988 rejetant la demande de sursis à exécution;

Considérant que le requérant, né en 1948, est entré en Belgique en 1966; qu'il a commis plusieurs faits délictueux; que la commission consultative des étrangers a émis l'avis, le 4 novembre 1987, que son expulsion était justifiée; qu'elle écrivait:

RECUEIL DES ARRHI'S DU CONSEIL D'E'OO' - 1989

Page 86: (VIe - KU Leuven · 33.103 - CLOETENS et REKOMS = n° 33.100 +désistement. RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989 . Arrêt N° 33.107 Page 1 N° 33.107 ARRET du 3octobre1989

Arrêts Nos 33.191à33.238 Page 11 N° 33.236

<<Le comportement de Emilio M arro justifie, par les atteintes graves et répétées à l'ordre public, la proposition d'expulsion.

»Un vol à l'aide de violences ou de menaces et un détournement frauduleux ont été réprimés le 11/02/1974 par une peine de 1 mois d'emprisonnement avec sursis; un délit de fuite et des blessures involontaires, le 4/07/1978, par une peine d'amende; un voi le 5/05/1982, par une peine de 3 mois.

»Nonobstant les avertissements qu'il aurait dû retenir de ces condamnations, il prit occasion d'un accident de roulage, le 3/10/1984, pour porter des coups à son antagoniste et endommager volontairement sa voiture. Il fut condamné le 10/06/1986, de ces chefs, à 8 mois d'emprisonnement avec sursis.

»Dans le cours du mois d'octobre 1982, à deux reprises, successivement le 7 et le 17 de ce mois, il a commis, avec des coauteurs, formant ensemble une association de malfaiteurs, deux hold-up, les armes à la main, au préjudice d'établissements du pays de Waas et des clients qui s'y trouvaient.

»Le butin du premier hold-up fut une somme de 400.000 Fau préjudice de l'établissement et de nombreuses sommes d'argent et des objets divers au préjudice de huit clients au moins (2.000 F + 21.000 F + 2.000 F + 2.200 F + des formulaires de chèques, portefeuilles, montres, briquets, bagues, cartes de banque, etc ... ) toutes les poches furent vidées.

»Quant au second, il rapporta une somme d'au moins 600.000 Fau préjudice de l 'établissemen~ de la même façon, des sommes d'argent et des bijoux extorqués sous la menace aux clients. Ces butins n'ont pas été restitués.

»Il fut condamné, le 18/12/1986, à une peine d'emprisonnement de 2 ans.

»Le procureur général a estimé qu'une mesure d'éloignement s'imposait.

»L'intéressé est né le 28/11/1948 en Italie. Il est venu en Belgique en 1966. Il vit avec une femme de nationalité belge laquelle a deux enfants, nés respectivement en 1974 et en 1977, qu'il a reconnus comme siens.

»Il n'est pas sans intérêt de relever qu'il a pu ouvrir un restaurant à Uccle à partir du 23/09/1983, alors que les hold-up ont été commis en octobre 1982 (pièce 6 -datée du 18/10/1983). Les butins ont sans doute servi à quelque chose.

»Aucune circonstance ne permet de considérer que serait écartée la grave menace que fait craindre pour l'ordre public le comportement de l'intéressé.

»L'intérêt éventuel de la concubine et de ses enfants doit céder devant l'intérêt public qui exige son éloigne­ment.»;

que, le 30 juin 1988, le Roi a pris l'acte attaqué ainsi motivé:

«lm la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers, modifiée par les lois du 28 juin 1984 et 14 juillet 1987, notamment les articles 20, 21 et 43-2°;

»Considérant que l'étranger mieux qualifié ci-après est ressortissant d'Italie;

»Considérant qu'il est établi dans le Royaume;

»Considérant qu'il s'est rendu coupable de vol à l'aide de violences ou de menaces et de détournement frauduleux; faits établis pour lesquels il a d'ailleurs été condamné le 11février1974 à une peine devenue définitive d'un mois d'emprisonnement avec sursis d'un an;

»Considérant qu'il s'est rendu coupable de blessures involontaires et de délit de fuite; faits établis pour lesquels il a d'ailleurs été condamné le 4 juillet 197 à 100 frs + 150 frs d'amende;

»Considérant qu'il s'est rendu coupable de vols; faits établis pour lesquels il a d'ailleurs été condamné le 5 mai 1982 à une peine devenue définitive de 3 mois d'emprisonnement+ 250 frs;

»Considérant que le 3 octobre 1984 à l'issue d'un accident de voiture, il endommagea volontairement la voiture de la partie adverse et porta des coups à son occupant; faits établis pour lesquels il a d'ailleurs été condamné le 10 juin 1986 à une peine devenue définitive de 8 mois d'emprisonnement avec sursis de 5 ans+ 300 frs;

»Considérant qu'il s'est rendu coupable avec deux complices de hold-up commis à l'aide d'un véhicule et d'armes dans les casinos de jeux de Stekene au cours desquels une somme de 600.000 frs a été dérobée;

»Considérant que de l'argen~ des bijoux et des affaires personnelles appartenant à la clientèle du casino ont été extorqués; faits établis pour lesquels il a d'ailleurs été condamné le 18 décembre 1986 à une peine devenue définitive de 2 ans d'emprisonnement + 1000 frs;

»Considérant qu'il résulte des faits précités que, par son comportement personnel, il a porté une atteinte grave à l'ordre public et que sa présence dans le pays constitue une menace grave, réelle et actuelle, affectant un intérêt fondamental de la société belge;

>>Considérant que la menace très grave résultant pour l'ordre public du comportement de l'intéressé est telle que ses intérêts familiaux et personnels, et ceux des siens, ne peuven~ en l'espèce, prévaloir sur la sauvegarde de l'ordre public;»;

RECUEIL DES ARREfS DU CONSEIL D'EI'AT - 1989

Page 87: (VIe - KU Leuven · 33.103 - CLOETENS et REKOMS = n° 33.100 +désistement. RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989 . Arrêt N° 33.107 Page 1 N° 33.107 ARRET du 3octobre1989

N° 33.236

Arrêts Nos 33.191 à 33.238

Page 12

Considérant que le requérant prend un premier moyen de la «violation d'une règle de procédure», en ce que l'arrêté attaqué vise notamment l'article 43, 2°, de la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers alors que, selon lui, c'est l'article 45, deuxième alinéa, qui devait être visé, en ce que «le mot établissement» doit être absent de la motivation d'un arrêté «d'expulsion notifié à un étranger CEE» et en ce que l'avis de la commission consultative des étrangers contient des erreurs importantes;

Considérant, en ce qui concerne les deux premières branches du moyen, que l'on n'aperçoit pas en quoi, à les supposer fondées, les erreurs qui y sont dénoncées auraient pu faire grief au requérant, l'essentiel étant qu'il a été tenu compte de sa qualité de ressortissant C.E.; que les erreurs alléguées dans la troisième branche ne sont pas précisées;

Considérant que le requérant prend un deuxième moyen de l'erreur dans la motivation, en ce que les faits pour lesquels il a été condamné le 5 mai 1982 ont bien été sanctionnés d'une peine de trois mois de prison, mais avec sursis, ce que ne précise pas la décision attaquée;

Considérant qu'il s'agit là d'une erreur, relative à une des moins importantes des condamnations retenues, qui n'a pas pu déterminer la décision du Roi, fondée d'ailleurs, conformément à l'article 43, 2°, non pas sur les condamnations, mais sur les faits qui les ont amenées;

Considérant que le requérant prend un troisième moyen du défaut de motivation, en ce que «les termes employés par l'arrêté entrepris correspondent à la jurisprudence communautaire, en tant qu'ils qualifient la menace que représenterait le requéran~ mais qu'aucun argument (actuel) quel qu'il soit ne vient étayer cette affirmation a priori»;

Considérant que le Roi, en constatant que depuis plus de quatorze ans le requérant montrait une persistance dans la délinquance, a pu valablement déduire des faits cités que, par son comportement, le requérant constituait une menace grave, réelle et actuelle affectant un intérêt fondamental de la société belge; que le recours n'est pas fondé.

(Rejet - dépens à charge du requérant).

N° 33.237

ARRET du 13 octobre 1989 (111" Chambre) MM. Van Aelst, président de chambre, rapporteur, François et Mme Thomas, conseillers, et M. Falmagne, premier auditeur.

Mahli (M"" Deleuze et Pegorer) c/ Etat belge représenté par le Vice-Premier ministre et ministre de la Justice et des Classes moyennes (Me Scarcez)

I. ETRANGERS - Police des étrangers - Renvoi et expulsion - Motifs d'expulsion - Etranger portant atteinte à l'ordre public

1. En l'espèce, le Ro~ en se fondant sur les faits de la cause, n'a pas excédé son pouvoir d'appréciation en estimant que, par son comportement personnel, l'étranger avait gravement porté atteinte à l'ordre public.

2. La circonstance que des congés pénitentiaires ont été accordés à l'intéressé n'établit pas que son comportement paraît ne plus présenter aucun danger pour la société car l'intéressé reste soumis à un contrôle particulier durant ces congés.

3. Le Roi peut, sans excéder ses pouvoirs, inférer du comportement de l'étranger quand il est libre qu'il continue à présenter un danger pour l'ordre public, nonobstant sa bonne conduite en prison.

4. En l'espèce, la Commission consultative des étrangers d'abord, le Roi ensuite ont tenu compte de la situation familiale de l'étranger, mais ont estimé que les faits qu'il avait commis revêtaient une gravité telle que son expulsion prévalait sur ses intérêts familiaux.

Il et m. (voir n° 31.934, 1 et II)

Vu la requête introduite le 2 septembre 1988 par Aïssa Mahli, de nationalité marocaine qui demande l'annulation de l'arrêté royal d'expulsion du 26 juillet 1988 et de l'arrêté ministériel de même date, le mettant à la disposition du Gouvernement en vue de sa remise à la frontière, notifiés au requérant le 23 août 1988;

Vu l'arrêt n° 31.350 du 18 novembre 1988 rejetant la demande de sursis à exécution;

RECUEIL DES ARRHfS DU CONSEIL D'ETJIT - 1989

Page 88: (VIe - KU Leuven · 33.103 - CLOETENS et REKOMS = n° 33.100 +désistement. RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989 . Arrêt N° 33.107 Page 1 N° 33.107 ARRET du 3octobre1989

Arrêts Nos 33.191 à 33.238 Page 13 N° 33.237

Considérant que le requérant, né en 1956, est entré en Belgique en 1974; que la commission consultative des étrangers a émis l'avis, le 11 mai 1988, que son expulsion était justifiée; qu'elle écrivait:

«Le comportement de MahliAïssa justifie, par la gravité des nombreuses atteintes portées par lui à l'ordre public, la proposition d'expulsion.

»1. Le 11/10/1979, il a été trouvé en possession de 7 grs de cannabis;

»2. Le 30/06/1981, il a été trouvé en possession de 5 grs d'héroïne qu'il avait achetés pour le prix de 15.000 F. L'instruction révéla notamment qu'il se droguait depuis le 15 mars 1980 et qu'il approvisionnait en héroïne une mineure d'âge;

»3. Le 19/12/1986, à l'occasion d'un contrôle douanier et alors qu'il entrait en Belgique, venant de France, accompagné par un coauteur, il fut trouvé en possession de 51 kgs de haschisch, dissimulés dans les coussins de la voiture automobile qu'il conduisai~ immatriculée à son nom.

»Il participait à l'activité d'une association. Sa participation à l'importation ainsi découverte devait lui rapporter 200.000 F. L'instruction a révélé que, drogué notoire, il se livrait à ce genre de trafic depuis septembre 1984-.

»Il a encouru, de ces chefs, des peines d'emprisonnement:

»1. 14/03/1980 - 2 mois avec sursis (1)

»2. 2/09/1981 - 8 mois avec sursis partiel (2)

»3. 28/10/1987 -3 ans (3) en état de récidive.

»L'intéressé est né au Maroc en 1956. Il est venu en Belgique à l'âge de 18 ans en 1974. Ses parents résident en Belgique ainsi que plusieurs autres de leurs enfants. Il a épousé, le 24/07/1976, au Maroc, une de ses compatriotes, avec laquelle il vit à Bruxelles (pièce 12). Il est chômeur depuis 1975. Les ressources connues du ménage se montent à 25.000 F par mois (pièce 12).

»Aucune circonstance ne permet de considérer que serait écartée la grave menace que fait craindre le comportement de l'intéressé.

»Si l'éloignement d'un étranger doit être tenu pour une ingérence dans l'exercice de son droit au respect de sa vie privée et familiale au sens de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, cette ingérence serait ici légitime, étant prévue par la loi et constituan~ dans le cas de l'intéressé et vu la gravité de la menace que présenterait sa présence en Belgique, une mesure nécessaire à la sûreté publique, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales.»;

que le Roi a pris, le 26 juillet 1988, l'arrêté attaqué ainsi motivé:

«Considérant que, le 11 octobre 1979, il s'est rendu coupable de détention de stupéfiants, fait établi pour lequel il a d'ailleurs été condamné le 14 mars 1980 à une peine devenue définitive de 2 mois d'emprisonnement+ 250 Frs avec sursis de 3 ans pour la peine d'emprisonnement principal;

»Considérant qu'entre le 15 mars 1980 et le 30 juin 1981, il s'est rendu coupable à plusieurs reprises, de détention et usage de stupéfiants, faits établis pour lesquels il a d'ailleurs été condamné le 2 septembre 1981, à une peine devenue définitive de 8 mois d'emprisonnement avec sursis de 3 ans pour la moitié;

»Considérant que le 19 décembre 1986, il s'est rendu coupable, comme auteur ou coauteur d'importation de stupéfiants, avec la circonstance que les faits constituent des actes de participation à l'activité principale ou accessoire d'une association, en récidive, faits établis pour lesquels il a d'ailleurs été condamné le 28 octobre 1987 à une peine devenue définitive de 3 ans d'emprisonnement+ 1.000 Frs d'amende;

»Considérant qu'il résulte des faits précités que, par son comportement personnel, il a porté une atteinte grave à l'ordre public;

»Considérant que la menace très grave résultant pour l'ordre public du comportement de l'intéressé est telle, que ses intérêts familiaux et personnels et ceux des siens ne peuven~ en l'espèce, prévaloir sur la sauvegarde de l'ordre;

que, le 26 juillet 1988 également, le ministre a pris un arrêté mettant le requérant à la disposition du Gouvernement en vue de sa remise à la frontière;

Considérant que le requérant soutient que la décision attaquée est mal motivée en ce qu'elle se fonde sur les condamnations encourues et non sur son comportement personnel, que ce comportement est, selon lui, très bon puisque l'administration lui a accordé plusieurs congés pénitentiaires;

Considérant que le Roi, en Se fondant sur les faits qu'Il cite, n'a pas excédé Son pouvoir d'appréciation en estimant que, par son comportement personnel, le requérant avait gravemement porté atteinte à l'ordre public; que la circonstance que des congés pénitentiaires ont été accordés au requérant n'établit pas que son comportement paraît ne plus présenter aucun danger pour la société car l'intéressé reste soumis à un contrôle particulier durant ces congés;

Considérant que le requérant invoque encore sa bonne conduite en prison;

RECUEIL DES ARREfS DU CONSEIL D'BI'Af' - 1989

Page 89: (VIe - KU Leuven · 33.103 - CLOETENS et REKOMS = n° 33.100 +désistement. RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989 . Arrêt N° 33.107 Page 1 N° 33.107 ARRET du 3octobre1989

N° 33.237

Arrêts Nos 33.191à33.238

Page 14

Considérant que le Roi a pu, sans excéder Ses pouvoirs, inférer du comportement qu'avait le requérant lorsqu'il était libre que celui-ci continuait à présenter un danger pour l'ordre public, nonobstant sa bonne conduite en prison;

Considérant que le requérant invoque aussi la violation de l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en ce que sa cause n'a pas été entendue équitablement;

Considérant que le requérant a pu faire valoir ses moyens, le 11 mai 1988, devant la commission consultative des étrangers et déposer toutes pièces qu'il jugeait utiles; que le moyen n'est pas fondé;

Considérant que le requérant invoque enfin qu'il n'a pas été tenu compte de sa vie privée et familiale;

Considérant que la commission consultative des étrangers d'abord, le Roi ensuite, ont tenu compte de la situation familiale de l'intéressé, mais ont estimé que les faits qu'il avait commis revêtaient une gravité telle que son expulsion prévalait sur ses intérêts familiaux;

Considérant que le requérant critique encore l'arrêté ministériel de mise à la disposition du Gouvernement; qu'il s'agit toutefois d'une mesure d'exécution de l'arrêté royal d'expulsion qui n'est pas de nature à affecter la légalité de celui-ci;

Considérant que le recours n'est pas fondé.

(Rejet - dépens à charge du requérant).

N° 33.238 ARRET du 13 octobre 1989 (IIIe Chambre)

MM. Van Aelst, président de chambre, rapporteur, François et Mme Thomas, conseillers, et M. Falmagne, premier auditeur.

AKHEDDIOU (Mes Fraiture et François) c/ Etat belge représenté par le Vice-Premier ministre et ministre de la Justice et des Classes moyennes (Me Scarcez)

ETRANGERS - Police des étrangers - Renvoi et expulsion - Motifs d'expulsion - Etranger portant atteinte à l'ordre public

1. En l'espèce, un des motifs de l'arrêté d'expulsion, s'il n'est pas à lui seul déterminant, tend à démontrer, joint à d'autres, le comportement délictueux persistant de l'étranger.

2. En l'espèce, en libérant conditionnellement l'étranger, le ministre peut n'avoir pas estimé pour autant qu'il ne présentait plus aucun danger puisqu'il avait, avant cette libération, entamé la procédure d'expulsion du territoire.

Vu la requête introduite le 16 septembre 1988 par Mimoun Akheddiou, de nationalité marocaine, qui demande l'annulation de «l'arrêté royal d'expulsion pris à son encontre le 30juin1988 et (à) lui notifié le 19 juillet 1988, avec ordre de quitter le territoire dans les 30 jours»;

Vu l'arrêt n° 31.351 du 18 novembre 1988 rejetant la demande de sursis à exécution;

Considérant que le requérant, né en 1949, est entré en Belgique en 1969; que la commission consultative des étrangers a estimé, le 14 décembre 1987, que son expulsion était justifiée; qu'elle écrivait:

«Le comportement de Akheddiou Mimoun justifie, par la gravité de l'atteinte portée à l'ordre public, la proposition d'expulsion.

»Le 20 juin 1986, vers la fin de la nui~ il rentra chez lui, avec deux amis et une femme dont ils avaient fait connaissance dans un débit de boissons. L'exposé des faits établi par le procureur du Roi s'exprime comme suit:

»«Akheddiou (les deux amis étant partis) entraîna W.M. et la jeta à terre la prenant par les poignets. Comme la victime appelait au secours, il la roua de coups. Il la prit ensuite par les cheveux et la traîna sur un divan où elle fut contrainte sous la menace de se déshabiller. Elle fut sodomisée à trois reprises. Il laissa ensuite la victime repartir». ·

»L'intéressé a été condamné, le 10/09/1986, à 2 ans d'emprisonnement du chef d'attentat à la pudeur avec violences.

»L'intéressé, né en Algérie le 1/09/1949, de nationalité marocaine, était arrivé en Belgique à l'âge de 20 ans, en 1969. Se trouvant en situation de séjour illéga~ il fut condamné de ce chef et fit l'objet d'un arrêté de renvoi du 15/02/1971.

RECUEIL DES ARREfS DU CONSEIL D'E'Im' - 1989

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Arrêts Nos 33.191 à 33.238 Page 15 N° 33.238

»Cet arrêté fut abrogé à la suite du mariage contracté par l'intéressé, le 29/01/1972, avec une femme de nationalité belge. Deux enfants sont nés de ce mariage respectivement en 1971 et en 1983.

»Les époux vivent actuellement séparés depuis plusieurs années, la mère ayant la garde des enfants.

»L'intéressé a travaillé en qualité d'aide-monteur en chauffage et d'ouvrier nettoyeur.

»Plusieurs condamnations prononcées notamment du chef d'ivresse publique et d'outrage à la police, expli­quent un avertissement notifié le 17/04/1977 (pièce 29). Il est actuellement en chômage (pièce 37) mais ne bénéficie pas d'allocations (pièce 42). Il n'a pas de permis de travail (pièce 42). Il fait valoir notamment que:

»1) les délits qu'il a commis ont été causés par l'ivrognerie dont il tente de se défaire. Un certificat médical du 11/12/1987 atteste qu'il suit un traitement à l'antabuse.

»2) bien que vivant séparé de son épouse, il aiderait celle-ci à éduquer les enfants à qui il rendrait régulière­ment visite. (attestation de l'épouse du 13/12/1987).

»3) un document daté du 26/08/1987, atteste qu'il sera employé, à partir de cette date, en qualité (de) «demi-monteur chauffagiste» dans une entreprise de Bruxelles (?).

»Aucun de ces éléments ne permet de considérer que serait écartée la grave menace que fait craindre pour l'ordre public son comportement.»; que le Roi a pris, le 30 juin 1988, l'acte attaqué motivé comme suit:

«Considérant qu'il a été assujetti, le 15 février 1971, à un arrêté ministériel de renvoi, qui a été abrogé le 16 mars 1977, suite à son mariage avec une ressortissante belge;

»Considérant que, le 17 avril 1977, il lui a été notifié un avertissement;

»Considérant qu'ils' est rendu coupable d 'outrages par gestes ou menaces à la police, destruction, rébellion à la police et ivresse publique en récidive, faits établis pour lesquels il a d'ailleurs été condamné, entre le 15 février 1978 et le 24 septembre 1979, à des peines devenues définitives, allant de 12,5 frs à 1 mois d'emprisonnement+ 50 frs + 25 frs d'amende, avec sursis de 3 ans pour l'emprisonnement principal;

»Considérant que, le 20 juin 1986, il s'est rendu coupable d'attentat à la pudeur avec violences, rouant sa victime de coups, et lui infligeant des sévices sexuels, faits établis pour lesquels il a d'ailleurs été condamné le 10 septembre 1986, à une peine devenue définitive de 2 ans d'emprisonnement;

>>Considérant qu'il résulte des faits précités que, par son comportement personnel, il a porté atteinte grave à l'ordre public et que sa présence dans le pays constitue une menace grave, réelle et actuelle affectant un intérêt fondamental de la société belge;

»Considérant que la menace très grave résultant pour l'ordre public du comportement de l'intéressé est telle que ses intérêts familiaux et personnels et ceux des siens ne peuven~ en l'espèce, prévaloir sur la sauvegarde de l'ordre;

»Vu l'avis de la commission consultative des étrangers qui estime que l'expulsion est justifiée;

Considérant que le requérant conteste la pertinence des motifs de l'acte attaqué, en ce que les deux premiers considérants ne démontrent pas en quoi le requérant constitue une menace grave, réelle et actuelle pour l'ordre public et en ce que les faits repris au troisième considérant remontent à plus de dix ans;

Considérant que les deux premiers considérants de l'acte attaqué n'ont manifestement pas fondé la décision attaquée; que le troisième considérant, s'il n'est pas à lui seul déterminant, tend à démontrer, joint au quatrième considérant, le comportement délictueux persistant du requérant; que le moyen n'est pas fondé;

Considérant qu'en un deuxième moyen, le requérant soutient que la circonstance qu'il a été libéré condi­tionnellement démontre qu'il ne constitue pas une menace grave, réelle et actuelle pour l'ordre public;

Considérant que la partie adverse, en libérant conditionnellement le requérant, peut n'avoir pas estimé pour autant qu'il ne présentait plus aucun danger, puisqu'elle avait, avant cette libération, entamé la procédure d'expulsion du territoire; que le moyen n'est pas fondé;

Considérant qu'en un troisième moyen, le requérant prétend que la commission consultative des étrangers s'est basée sur des éléments inexacts ou contraires à la réalité, tels les faits relatés à la pièce 42 du dossier;

Considérant, d'une part, que la pièce 42 du dossier (rapport de police), dont il n'est pas démontré qu'elle contient des renseignements inexacts, est un élément dont a pu tenir compte la commission consultative des étrangers et, d'autre part, qu'il ne s'agit manifestement pas là, à supposer que cette pièce soit entachée d'erreur, d'un élément déterminant de l'avis de la commission consultative des étrangers; que le moyen n'est pas fondé.

(Rejet - dépens à charge du requérant).

RECUEIL DES ARRHfS DU CONSEIL D'EI'M" - 1989

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Arrêts Nos 33.239 à 33.242 Page 1 N° 33.239

f.;i·(· cZ \ p 1 R) L.

N° 33.239

ARRET du 13 octobre 1989 (Irre Chambre) MM. Van Aelst, président de chambre, rapporteur, François et Mme Thomas, conseillers, et M. Falmagne, premier auditeur.

ROSSETTO (Me Coppens) c/ Etat belge représenté par le Vice-Premier Ministre et Ministre de la Justice et des Classes moyennes (Me Scarcez)

1. DROITS ET LIBERTES - Peines II. ETRANGERS - Police des étrangers - Renvoi et expulsion - Généralités

L'expulsion est une mesure administrative prise non afin de punir, encore qu'elle comporte des désagréments pour celui qui la subit, mais dans le seul but d'éloigner un étranger jugé indésirable en Belgique.

III. ETRANGERS - Police des étrangers - Renvoi et expulsion - Motifs d'expulsion - Etranger portant atteinte à l'ordre public

1. En l'espèce, l'arrêté royal se fonde non sur les condamnations encourues par l'étranger mais sur les faits qui les ont amenées et qui ne sont pas contestés.

2. L'article 21 de la loi du 15 décembre 1980 ne subordonne ni le renvoi ni l'expulsion à une atteinte particulièrement grave à l'ordre public.

3. Dès lors qu'un étranger n'a pas d'attache familiale en Belgique, le Roi a pu estimer que sa situation familiale n'était en rien un obstacle à l'expulsion.

Vu la requête introduite le 29 avril 1988 par Leopoldo Rossetto, de nationalité italienne, qui demande l'annulation de l'arrêté royal d'expulsion du 11 février 1988 qui lui a été notifié le 29 février 1988;

Considérant que le requérant, né en 1928, est entré en Belgique en 1951; que, le 11 février 1988, il a fait l'objet d'un arrêté royal d'expulsion ainsi motivé:

«Considérant que l'intéressé s'est rendu coupable de vol simple, fait établi pour lequel il a d'ailleurs été condamné le 27 décembre 1971 à une peine devenue définitive de 1 mois de prison avec sursis simple de 5 ans + 100 frs;

»Considérant que, par après il se rendit encore coupable de vol qualifié,fait établi pour lequel il fut d'ailleurs condamné le 27 novembre 1984 à une peine devenue définitive de 1 an d'emprisonnement avec sursis probatoire de 5 ans + 200 frs;

»Considérant qu'au cours de la nuit du 18 au 19 août 1985, il attira, dans l'intention de la voler, une dame, âgée de 75 ans au domicile de sa belle-fille; qu'après avoir enivré leur victime, les intéressés la rouèrent de coups et la dévalisèrent; qu'ils utilisèrent même du savon pour lui arracher une bague au doigt et, une fois leur forfait accompli, ils abandonnèrent leur victime inconsciente sur la voie publique,faits établis pour lesquels il fut d'ailleurs condamné le 24 février 1986 à une peine devenue définitive de 3 ans d'emprisonnement;

»Considérant qu'il résulte des faits précités que, par son comportement personnel, il a porté une atteinte grave à l'ordre public et que sa présence dans le pays constitue une menace grave, réelle et actuelle, affectant un intérêt fondamental de la société belge;

»Considérant que la menace très grave résultant pour l'ordre public du comportement de l'intéressé est telle que ses intérêts familiaux et personnels ne peuvent, en l'espèce, prévaloir sur la sauvegarde de l'ordre;

»Vu l'avis de la commission consultative des étrangers qui estime que l'expulsion est justifiée;»

Considérant que le requérant fait valoir, en un premier moyen, que l'expulsion constitue pour lui une nouvelle condamnation alors qu'il a purgé sa peine;

Considérant que l'expulsion est une mesure administrative prise non afin de punir, encore qu'elle emporte des désagréments pour celui qui la subit, mais dans le seul but d'éloigner un étranger jugé indésirable en Belgique; que le moyen n'est pas fondé;

Considérant que le requérant, en un deuxième moyen, invoque la violation de l'article 43, 2° de la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers, en ce que l'arrêté royal est fondé uniquement sur les condamnations qu'il a encourues;

Considérant que l'arrêté royal attaqué se fonde non sur les condamnations encourues par le requérant mais sur les faits qui les ont amenées et qui ne sont pas contestés; que le moyen ne peut être retenu;

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.239

Arrêts Nos 33.239 à 33.242

Page 2

Considérant que le requérant prend un troisième moyen de la violation de l'article 21 de la loi du 15 décembre 1980, en ce que l'arrêté royal a été pris au motif que le requérant aurait porté une atteinte grave à l'ordre public, alors qu'une atteinte particulièrement grave était requise;

Considérant que les dispositions légales invoquées ne subordonnent ni le renvoi ni l'expulsion à une atteinte particulièrement grave à l'ordre public; que le moyen n'est pas fondé;

Considérant que le requérant prend un quatrième moyen de .la violation de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales;

Considérant que, le requérant n'ayant pas ·d'attache familiale en Belgique, le Roi a pu estimer que sa situation familiale n'était en rien un obstacle à l'expulsion; que le moyen n'est pas fondé,

(Rejet - dépens à charge du requérant).

N° 33.240

ARRET du 13 octobre 1989 (IIIe Chambre) MM. Van Aelst, président de chambre, rapporteur, François et Mme Thomas, conseillers, et M. Falmagne, premier auditeur.

ARJOUN (Me de Beer de Laer) c/ Etat belge représenté par le Vice-Premier Ministre et Ministre de la Justice et des Classes moyennes (Me Scarcez)

ETRANGERS - Police des étrangers - Renvoi et expulsion - Motifs d'expulsion - Etranger portant atteinte à l'ordre public

En l'espèce, le Roi a pu valablement déduire des faits qu'il cite que l'étranger, nar son comportement personnel, avait constitué un danger et continuait à présenter une ~enace pour l'ordre public.

Vu la requête introduite le lundi 26 septembre 1988 par Mohamed Arjoun, de nationalité marocaine, qui demande l'annulation de l'arrêté royal d'expulsion, pris Je 24 juin 1988 et notifié le 27 juillet 1988;

Vu l'arrêt n° 31.345 du 16 novembre 1988 rejetant la demande de sursis à exécution;

Considérant que le requérant, né en Belgique en 1966, a fait l'objet, le 24 juin 1988, d'un arrêté royal d'expulsion motivé comme suit:

«Considérant qu'ils' est rendu coupable la nuit du la au 2 mars 1986 de vol avec violences, en bande, avec armes, et de port d'arme prohibée;

»Considéraf!t que, le 16 octobre 1986, il a commis un vol à la tire d'un sac, a.u préjudice d'.une dame,faits établis pour lesquels il a d'ailleurs été condamné, le 15 juillet 1986, à une peine devenue définitive de 7 mois d'emprisonnement+ 100 frs, sursis probatoire de 3 ans pour ce qui excède la détention préventive, révoqué par la suite;

»Considérant qu'au cours de la nuit du 23 au 24 septembre 1986, il pénétra avec effraction dans une armurerie du centre de Bruxelles, emporta trois pistolets, et résista violemment à une patrouille de police, faits établis pour lesquels il a d'ailleurs été condamné le 30 janvier 1987 à unè peine devenue définitive de 2 ans d'emprisonnement;

»Considérant que le 12 décembre 1984 avec des coauteurs, ils' est rendu coupable de vandalisme,fait établi pour lequel il a été condamné le 13 octobre 1987 à une peine devenue définitive de 15 jours d'emprisonnement et 1 OO frs d'amende avec sursis de 3 ans pour l'emprisonnement;

»Considérant qu'il. résulte des faits précités que par son comportement personnel il a porté une atteinte grave à l'ordre public;

»Vu l'avis de la commission consultative des étrangers qui estime que l'expulsion est justifiée;»; ·

Considérant que le requérant allègue qu'il a commis les faits qui lui sont reprochés «alors qu'il traversait une période de crise profonde, liée à des difficultés relationnelles personnelles et familiales», soutient qu'«il ne représente plus actuellement le moindre danger pour la sécurité publique, qu'il n'a d'ailleurs jamais réellement mise en danger par son comportement»; qu'il expose que sa mère est abandonnée par son mari; qu'il est l'aîné des enfants et fait part de son désir de poursuivre sa formation d'électricien;

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT ~ I989

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Arrêts Nos 33.239 à 33.242 Page 3 N° 33.241

Considérant que le Roi a valablement pu déduire des faits qu'Il cite que le requérant, par son comportement personnel, avait constitué un danger et continuait à présenter une menace pour l'ordre public; qu'au surplus, les considérations du requérant ne sont pas de nature à affecter la légalité de la décision attaquée; que le recours n'est pas fondé,

(Rejet - dépens à charge du requérant).

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N° 33.241 Pw ARRET du 17 octobre 1989 (IVe Chambre)

MM. Baeteman, président de chambre, Borret et De Brabandere, rapporteur, conseillers, et Van Assche, auditeur général.

S.P.R.L. SKY-SERVICE (Mes Mittenaere et D'hoore) c/ Etat belge représenté par le Ministre des Communications (M. Roman)

I. PROCEDURE - Règles spéciales à la demande de suspension - Moyen sérieux II. AFFICHAGE ET PUBLICITE - Vols de remorquage de panneaux publicitaires

Par moyens sérieux, il faut entendre les moyens qui, à première vue, vu les circon­stances de la cause, peuvent être recevables et fondés, et peuvent entraîner, par conséquent, !'annulation de !'acte attaqué.

En l'état actuel de la cause, le moyen pris de la violation des articles 6 et 6bis de la Constitution ne peut être considéré comme un moyen sérieux, compte tenu des explications de la partie défenderesse qui répond que les vols de remorquage de panneaux publicitaires constituent une catégorie distincte parmi les vols de remorquage, ce qui ressort notamment de la circonstance que, contrairement à d'autres vols de remorquage, tels le remorquage de cibles militaires ou le remorquage de planeurs, qui ont un but spécifique et qui sont soumis d'ailleurs à des réglementations distinctes, !'organisation de vols de remorquage de panneaux publicitaires recherche de toute évidence les grandes concentrations de personnes, avec tous les dangers spécifiques que cela comporte, de sorte qu'une réglementation distincte se justifie manifestement.

Vu la requête introduite le 1er septembre 1989 par laquelle la s.p.r.l. Sky-Service demande l'annulation de l'arrêté royal du 30 juin 1989 portant réglementation des vols de remorquage de panneaux publicitaires;

Vu la requête que la s.p.r.l. Sky-Service a introduite le même jour pour demander la suspension de l'arrêté royal précité du 30 juin 1989;

Considérant qu'il y a lieu de statuer sans délai sur la demande de suspension de l'exécution;

Considérant qu'aux termes de l'article 17, § 2, des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat, inséré par l'article 15 de la loi du 16 juin 1989 portant diverses réformes institutionnelles, la suspension de l'exécution de l'acte attaqué ne peut être décidée que si notamment des moyens sérieux fondés sur la violation des articles 6, 6bis et 17 de la Constitution sont invoqués;

Considérant que par moyens sérieux, il faut entendre les moyens qui, à première vue, vu les circonstances de la cause, peuvent être recevables et fondés et peuvent entraîner, par conséquent, l'annulation de l'acte attaqué;

Considérant que dans sa requête en annulation, la partie requérante invoque notamment que le Roi, en n'imposant que des limitations et interdictions aux vols de remorquage de panneaux publicitaires, .. a opéré une distinction considérable entre les vols de remorquage de panneaux publicitaires et les autres vols de remorquage, qui ne paraît justifiée ni par des nécessités techniques ni par d'importants motifs d'intérêt général, de sorte que l'arrêté royal attaqué méconnaît le principe constitutionnel de l'égalité devant la loi;

Considérant que la partie requérante semble ainsi prendre un moyen d'annulation.de la violation du principe d'égalité formulé aux articles 6 et 6bis de la Constitution;

Considérant que la partie défenderesse répond que les vols de remorquage de panneaux publicitaires constituent une catégorie clairement distincte des vols de remorquage, ce qui ressort notamment de la circonstance que, contrairement à d'autres vols de remorquage tels le remorquage de cibles militaires ou le remorquage de planeurs largués dans les airs, qui ont un but très spécifique et qui, par ailleurs, sont soumis à des réglementations

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.241

Arrêts Nos 33.239 à 33.242

Page 4

distinctes l'organisation des vols de remorquage de panneaux publicitaires recherche de toute évidence les grandes concentrations de personnes, avec tous les dangers spécifiques que cela comporte, de sorte qu'une réglementation distincte se justifie manifestement;

Considérant qu'en l'état actuel de la cause, eu égard à la réplique de la partie défenderesse, le moyen pris de la violation des articles 6 et 6bis de la Constitution ne peut être considéré comme un moyen sérieux au sens de l'article 17, § 2, des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat; que l'une des conditions au moins de l'article 17 précité n'étant pas remplie, il ne saurait dès lors être accédé à la demande de suspension,

(Rejet de la demande de suspension de l'exécution de l'arrêté royal du 30 juin 1989).

N° 33.242

ARRET du 17 octobre 1989 (IVe Chambre) MM. Baeteman, président de chambre, Barret et De Brabandere, rapporteur, conseillers, et Vandendriessche, auditeur.

A.S.B.L. «V.V.V. DE VOERSTREEK» (Me Danckaert) c/ Commune de Fourons (Mes Deben et Hoge), Gouverneur de la province de Limbourg (M. Honings) et Collège des Gouverneurs

PROCEDURE - Règles spéciales à la demande de suspension - Risque de causer un préjudice grave difficilement réparable

Un exposé sommaire qui ne révèle pas pourquoi le préjudice ne serait pas réparable ou même ne le serait que difficilement, ne peut être censé satisfaire à la condition énoncée par l'article 17, § 3, alinéa 2, des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat ..

Vu la requête introduite le 1°' septembre 1989 par l'a.s.b.l. V.V.V. De Voerstreek tendant à l'annulation:

1. «(du) refus de subvention par le Conseil communal de la commune des Fourons du 29 décembre 1988, qui refuse d'accéder à la demande de subvention (de la partie requérante) et de l'inscrire au budget de l'année 1989, de sorte que le conseil communal a été mis dans l'impossibilité de se prononcer sur le sujet et que la partie requérante n'a pus' adresser au Gouverneur de la Province de Limbourg afin de soumettre l'affaire au Collège des Gouverneurs, institué par l'article l"- de la loi du 9 août 1988 portant modification .de l'article 13lbis,de la loi provinciale (Moniteur du 13 août 1988, p. 11.374 et 11.375)»;

2. «(de) l'octroi des subventions, inscrites au budget 1989 et soumises au conseil communal de Fourons le 29 décembre 1988, qui le même jour a octroyé les subventions aux associations francophones suivantes» (suivent alors les noms de quinze associations); ·

Vu la requête introduite à la même date par laquelle l'a.s.b.l. V.V.V. De Voerstreek demande la suspension de l'exécution des actes susmentionnés, ainsi que celle de la «décision» du collège des gouverneurs du 5 juillet 1989 portant avis négatif à l'égard de la proposition du gouverneur de la province de Limbourg de ne pas approuver les articles concernés. du budget communal de Fourons;

Considérant qu'il y a, lieu de statuer sans délai sur la demande de suspension de l'exécution; Considérant qu'aux termes de l'article 17, § 3, alinéa 2, des lois coordonnées sur.le Conseil d'Etat, inséré

par l'article 15 de la loi du 16 juin 1989 portant diverses réformes institutionnelles, la demande de suspension de l'exécution contient un exposé des faits de nature à établir que l'exécution immédiate de l'acte attaqué risque de causer un préjudice grave difficilement· 'réparable; ·

Considérant que si, dans sa requête en suspension de l'exécution, la partie requérante allègue effectivement que cette exécution lui causera un préjudice grave irréparable, elle décrit ce préjudice uniquement comme suit: « ... il n'est pas établi que la non-inscrijJtion de subventions au profit d'associations flamandes pourra conduire, après le prononcé de l'arrêt sur le recours en annulation, à des crédits pour le requérant et les associations flamandes qui sont connus de la commune»;

Considérant qu'un tel exposé sommaire, notamment en ce qu'il ne révèle pas pourquoi le préjudice ne serait pas réparable ou même ne le serait que difficilement, ne peut être censé satisfaire aux dispositions de l'article 17, § 3, alinéa 2, des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat; que l'une des conditions au moins de l'article 17 susnommé n'étant pas remplie, le recours en suspension de l'exécution doit être rejeté,

(Rejet de la demande de suspension de l'exécution).

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts N°8 33.243 à 33.246 Page 1

N°s 33.243 à 33.245

ARRET du 17 octobre 1989 (IVe Chambre)

33.243 - LOWIJCK: désistement

33.244 -TEMMERMAN: désintérêt du requérant

33.245 -MEYNS: désistement.

N° 33.246

ARRET du 17octobre1989 (Ne Chambre)

N° 33.243

MM. Baeteman, président de chambre, Borret et De Brabandere, rapporteur, conseillers, et Aertgeerts, auditeur.

DE ZUTTER c/ Etat belge représenté par le gouverneur de la province de Flandre orientale (Mme De Candt)- Partie intervenante: Gevaert (M' De Bruyn)

1. AGENTS DES COMMUNES - Entrée en service - Règles spéciales au brigadier champêtre

II. PROCEDURE NON CONTENTIEUSE -Avis, proposition et concertation - Caractère substan­tiel - Généralités

L'obligation imposée par l'article 55bis du code rural, d'entendre le commissaire d'arrondissement et le procureur général est d'ordre substantiel et peut être invoquée par chaque candidat évincé.

Un avis est destiné à informer l'autorité chargée de la nomination à propos des éléments de fait et de droit existant au moment où il est procédé à la nomination. L'avis ne porte pas seulement sur l'aptitude générale d'un candidat à une fonction conçue abstraite­ment, mais bien sur l'aptitude à un emploi bien déterminé. La durée de l'espace de temps qui s'écoule entre l'avis émis en vue d'une précédente nomination, et celui qui concerne une nomination suivante, est dès lors dénuée de toute influence, tout comme la circonstance que les candidats sont les mêmes ou que le requérant ne soutient pas que les avis auraient été modifiés.

Lorsque la loi prévoit «l'audition» d'une autorité, en d'autres termes qu'un avis est recueilli avant qu'il soit procédé à une nomination, il va de soi que l'avis est donné en vue d'une nomination déterminée, comme élément d'une procédure déterminée de nomination, de sorte que lors de chaque nouvelle vacance un nouvel avis doit être fourni.

Vu la requête introduite le 3 février 1984, par laquelle Werner De Zutter, garde-champêtre à Gand, demande l'annulation de l'arrêté adopté le 4 octobre 1983 par le gouverneur de la province de Flandre orientale, nommant Laurent Gevaert, chef de brigade de la deuxième brigade de la police rurale de Flandre orientale;

Les éléments du litige.

Considérant que l'on peut résumer comme suit les éléments du litige:

1.1. Le requérant est garde-champêtre à Gand, et porteur du brevet de candidat-commissaire de police. Il remplit donc les conditions pour être nommé chef de brigade de la police rurale, telles qu'elles ont été portées à la connaissance des intéressés par une circulaire du 10 janvier 1978 du gouverneur de province de Flandre orientale, annonçant qu'un emploi de chef de brigade était vacant. La procédure de nomination aboutit à la nomination de Lucien Dhaenens aux fonctions de chef de brigade;

1.2. Le 16 juin 1981 est annoncée par voie de circulaire une nouvelle vacance d'emploi de chef de brigade. Cette fois cependant un examen est organisé à l'intention des gardes champêtres qui ne sont pas titulaires du brevet de candidat-commissaire de police ou de candidat-commissaire de police adjoint. La durée de validité de cet examen est limitée au 31 décembre 1983, et aucune réserve de recrutement n'est constituée.

Trois candidats réussissent cet examen, à savoir Herman De Beule, Laurent Gevaert et Louis Monsieur. Le requérant ainsi que Jan Van Cleemput sont dispensés de l'examen, en raison de la possession du brevet précité.

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT- 1989

Page 96: (VIe - KU Leuven · 33.103 - CLOETENS et REKOMS = n° 33.100 +désistement. RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989 . Arrêt N° 33.107 Page 1 N° 33.107 ARRET du 3octobre1989

N° 33.246

Arrêts N°8 33.243 à 33.246

Page 2

Le Procureur-général de la Cour d'appel de Gand, le 24 décembre 1981, 12 et 13 janvier 1982, le commis­saire d'arrondissement d'Audenarde le 23 décembre 1981 et le commissaire d'arrondissement de Gand-Eekloo le 3 février 1982 envoient au gouverneur de la province leur avis concernant les cinq candidats, requis en vertu de l'article 55bis du Code rural.

Par arrêté du 11 mars 1982 le gouverneur nomme Louis Monsieur chef de brigade de la première brigade.

1.3. Par arrêté du gouverneur du 1er août 1983, démission de ses fonctions est accordée à Lucien Dhaenens, chef de brigade de la deuxième brigade, lequel atteint le 11 décembre 1983 l'âge de soixante cinq ans. L'emploi devient dès lors vacant à cette dernière date;

1.4. Par l'arrêté attaqué du 8 octobre 1983, sans qu'il ait été procédé à un appel aux candidats, et sans que les avis prescrits par l'article 55bis du Code rural aient été à nouveau recueillis, le gouverneur nomme Laurent Gevaert, garde champêtre à Kruishoutem, chef de brigade de la deuxième brigade;

1.5. Par arrêté du 1er juin 1987 le gouverneur nomme Laurent Gevaert commissaire de brigade avec effet au 16 décembre 1986.

Le bien-fondé du recours.

2.1. Considérant que le requérant invoque entre autres la violation de l'article 55bis du code rural, en ce que les avis du Procureur général et du commissaire d'arrondissement n'ont pas été recueillis; qu'il a ajouté à cet argument que le gouverneur se serait simplement basé sur les avis émis par les fonctionnaires précités à l'occasion de la nomination précédente, soit celle de Louis Monsieur au grade de chef de brigade il y a environ deux ans;

2.2. Considérant que la partie défenderesse répond que l'avis du Procureur-général a bel et bien été recueilli au début de l'année 1982, alors que l'emploi en cause ne devenait vacant que le 1er août 1983, soit un an et demi plus tard; qu'elle expose en outre que, s'agissant des mêmes candidats exactement, et étant donné qu'une brève période seulement s'était écoulée depuis le dernier avis, il était superflu de recueillir à nouveau cet avis; qu'elle conclut que l'article 55bis du Code rural ne prévoit aucun délai en la matière et que, étant donné que tant pour le requérant que pour les autres candidats, les avis étaient favorables, et que le requérant ne fait pas valoir qu'il existait des raisons d'admettre que les avis auraient été modifiés, il n'est pas établi que, si de nouveaux avis devaient être recueillis, l'omission de cette formalité puisse porter atteinte aux intérêts du requérant;

2.3.1. Considérant que l'article 55bis du Code rural, tel qu'il était encore en vigueur au moment où la nomination attaquée a eu lieu, s'exprimait en ces termes:

<<Les chefe de brigade sont nommés par le gouverneur parmi les gardes champêtres et les gardes champêtres auxiliaires, le commissaire d'arrondissement et le procureur général entendus»;

2.3.2. Considérant que l'obligation imposée par cette disposition d'entendre le commissaire d'arrondissement et le procureur général est d'ordre substantiel et peut être invoquée par chaque candidat évincé; que lorsque, comme en l'espèce, la loi prévoit «l'audition» d'une autorité, en d'autres termes qu'un avis est recueilli avant qu'il soit procédé à une nomination, il va de soi que l'avis est donné en vue d'une nomination déterminée, comme élément d'une procédure déterminée de nomination, de sorte que lors de chaque nouvelle vacance un nouvel avis doit être fourni; qu'un avis est en effet destiné à informer l'autorité chargée de la nomination à propos des éléments de fait et de droit existant au moment où il est procédé à la nomination; que la durée de l'espace de temps qui s'écoule entre l'avis émis en vue d'une précédente nomination, et celui qui concerne une nomination suivante, est dès lors dénuée de toute influence, tout comme la circonstance que les candidats sont les mêmes ou que le requérant ne soutient pas que les avis auraient été modifiés; qu'en effet l'avis ne porte pas seulement sur l'aptitude générale d'un candidat à une fonction conçue abstraitement, mais bien sur l'aptitude à un emploi bien déterminé; que le moyen est fondé et aboutit à l'annulation de la nomination attaquée; que les autres moyens, à les supposer fondés, ne peuvent pas donner lieu à une annulation plus étendue et ne doivent dès lors pas être examinés;

2.4. Considérant que par arrêté du gouverneur du 1er juin 1987 Laurent Gevaert a été nommé commissaire de brigade avec effet au 16 décembre 1986, conformément au nouvel article 185 de la loi communale inséré par la loi du 11 février 1986 sur la police communale, qui dispose que toute brigade est désormais placée sous le contrôle d'un commissaire de brigade, et conformément à l'article 3 de l'arrêté royal du 14 novembre 1986, disposant que les chefs de brigade, en service au moment de l'entrée en vigueur de la loi du 11 février 1986, sont nommés commissaire de brigade; que cette nouvelle nomination trouve dès lors son fondement direct et nécessaire dans la nomination du 4 octobre 1983 aux fonctions de chef de brigade, laquelle doit être annulée; que le Conseil d'Etat est tenu de prononcer d'office l'annulation de cette nouvelle nomination;

Quant aux dépens.

3. Considérant que le gouverneur ayant agi en qualité d'organe de l'Etat belge, les dépens du recours doivent être mis à charge de ce dernier,

(Sont annulés:

1° l'arrêté du 4 octobre 1983 du gouverneur de la province de Flandre orientale nommant Laurent Gevaert chef de brigade de la deuxième brigade de la police rurale de Flandre orientale;

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT -1989

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Arrêts N°" 33.243 à 33.246 Page 3 N° 33.246

2° l'arrêté du 1er juin 1987 du gouverneur de la province de Flandre orientale, nommant Laurent Gevaert aux fonctions de commissaire de brigade avec effet au 16 décembre 1986-dépens du recours à la charge de l'Etat belge - dépens de l'intervention à la charge de la partie intervenante)

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT- 1989

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Arrêts Nos 33.248 à 33.252 Page 1 N° 33.248

N° 33.248

ARRET du 18 octobre 1989 (IIIe Chambre) MM. Van Aelst, président de chambre, François, rapporteur, et Mme Thomas, conseillers, et M. Dumont, auditeur général adjoint.

COMMUNE DE VILLERS-LE-BOUILLET (Me Ranscelot) c/ Gouverneur de la province de Liège - Partie intervenante: Société coopérative intercommunale mixte Société provinciale d'industrialisation S.P.I. (Mes Collignon et Rigaux)

COMMUNES - Actions judiciaires - Compétence du collège pour intenter l'action

Il ressort des articles 90, 9°, et 148 de la loi communale que c'est le collège des bourgmestre et échevins et non le conseil communal qui est habilité à intenter les actions en justice au nom de la commune. La circonstance que l'introduction d'un recours doit être autorisée par le conseil communal, sans qui dès lors rien ne peut être fait, n'empêche nullement qu'il faille en passer aussi par le collège.

Rien ne permet de supposer que cette répartition de compétences ait été arrêtée sans prévoir l'hypothèse d'une divergence entre le conseil et le collège.

Vu la requête introduite le 4 décembre 1987 à l'initiative du conseil communal de Villers-le-Bouillet qui poursuit l'annulation de l'arrêté du gouverneur de la province de Liège du 5 octobre 1987 approuvant une délibération du conseil communal du 16 octobre 1975 (A. 37.475/III-10.245);

Vu la requête introduite le 26 juillet 1988, par laquelle la société coopérative intercommunale mixte Société provinciale d'industrialisation demande à être reçue en qualité de partie intervenante;

Vu l'ordonnance du 9 août 1988 accueillant cette intervention;

Vu la requête introduite le 30 mars 1988 par le conseil communal de Villers-le-Bouillet qui poursuit l'annulation de l'arrêté du gouverneur de la province de Liège du 1er février 1988 annulant une délibération du conseil communal du 3 décembre 1987 (A. 38.535/III-10.421);

Vu la requête introduite le 26 juillet 1988, par laquelle la société coopérative intercommunale mixte Société provinciale d'industrialisation demande à être reçue en qualité de partie intervenante;

Vu l'ordonnance du 9 août 1988 accueillant cette intervention;

Vu la requête introduite le 9 mars 1988 par le conseil communal de Villers-le-Bouillet qui poursuit l'annulation de l'arrêté du gouverneur de la province de Liège du 1er février 1988 annulant une délibération du conseil communal du 3 décembre 1987 (A. 39.431/III-10.764);

Vu la requête introduite le 31 mars 1988 au nom de !'«Administration communale ... représentée par son conseil communal» de Villers-le-Bouillet qui poursuit l'annulation de l'arrêté précité du 1er février 1988 (A. 39.432/III-10.765);

Vu l'ordonnance du 11 octobre 1988 joignant les causes ...

Vu la lettre du 7 décembre 1988 par laquelle le bourgmestre et le secrétaire communal de Villers-le-Bouillet informent le Conseil d'Etat de la décision prise le 28 novembre 1988 par le conseil communal de retirer les recours introduits;

Considérant que le conseil communal de Villers-le-Bouillet prit le 16 octobre 1975 une délibération relative à une éventuelle acquisition de terrains; que cette délibération fut aprouvée par un arrêté du gouverneur de la province de Liège du 5 octobre 1987 notifié à la commune le 8 octobre; que le conseil communal prit le 3 décembre 1987 une délibération chargeant l'avocat Y. Ranscelot de demander au Conseil d'Etat l'annulation de l'arrêté du 5 octobre 1987 et retirant la délibération du 16 octobre 1975; que le recours décidé par le conseil communal fut introduit le 4 décembre par l'avocat Y. Ranscelot agissant pour «la commune»; que le collège des bourgmestre et échevins n'a pris la décision d'introduire ce recours que sous la forme d'une confirmation exprimée dans sa délibération du 10 décembre 1987; que le gouverneur annula le 1er février 1988 la délibération du conseil communal du 3 décembre 1987 retirant la résolution du 16 octobre 1975; que, le 29 février 1988, le conseil communal résolut de demander au Conseil d'Etat l'annulation de l'arrêté du gouverneur du 1er février 1988; que

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.248

Arrêts Nos 33.248 à 33.252

Page 2

cette résolution fut communiquée au Conseil d'Etat par une lettre signée, <<par le conseil», du bourgmestre et du secrétaire communal; qu'une délibération du conseil communal du 28 mars 1988 se référant à cette résolution <<précise que le recours introduit auprès du Conseil d'Etat constitue bien une demande d'annulation de l'arrêté du ]".février 1988»; que, comme l'auditeur chargé de faire rapport avait demandé des précisions sur la portée de la résolution du 29 février, il y eut encore, d'une part, une requête introduite le 30 mars 1988 contre l'arrêté du 1er février par l'avocat précité se référant à la résolution du 29 février et exposant «que la présente requête est déposée en exécution de cette décision sans attendre les diligences du collège échevinal, en vue de respecter le délai réglementaire», et d'autre part, une «requête en annulation» introduite le 31 mars 1988 au nom «de l' Administration communale ... représentée par son conseil communal» et signée <<par ordre» du bourgmestre et du secrétaire communal; que l'avocat de la commune expose que le conseil communal et le collège sont en désaccord sur l'opportunité d'attaquer l'arrêté du 1°' février 1988;

Considérant qu'en raison de la connexité des causes, il y a lieu de joindre l'affaire portant le n° A. 37.475/III-10.245 aux trois affaires jointes par l'ordonnance du 11 octobre 1988;

Considérant, d'office, qu'aucun des recours n'a été-introduit par le collège des bourgmestre et échevins dans le délai où il pouvait l'être, soit que le collège ait refusé de former un recours en dépit de l'injonction du conseil communal, soit qu'il ait confirmé après l'expiration du délai un recours formé par le conseil; qu'aux termes des articles 90, 9°, et 148 de la loi communale, c'est le collège et non le conseil communal qui est habilité à intenter les actions en justice au nom de la commune; que si la requérante observe à juste titre que l'autorisation du conseil communal reste nécessaire et que le défaut de diligence ou la réticence d'un collège à se conformer au voeu d'un conseil de voir introduire un recours peuvent avoir pour effet que les intérêts de la commune tels que les apprécie le conseil communal ne soient pas défendus, il n'en demeure pas moins que la loi communale, disposant avant la codification du 24 juin 1988, en son article 90, 9°, que le collège intente les actions en justice alors qu'il est déjà chargé par ailleurs, à l'article 90, 2°, d'exécuter les résolutions du conseil communal, entend que l'intérêt et par conséquent l'urgence, pour une commune, d'introduire ou non un recours devant le Conseil d'Etat soient appréciés en tout cas par le collège; que rien ne permet de supposer, comme le fait la requérante en son dernier mémoire, que cette répartition des compétences ait été arrêtée sans prévoir l'hypothèse d'une divergence entre le conseil et le collège; que la circonstance que l'introduction d'un recours doit être autorisée par le conseil communal, sans qui dès lors, allègue la requérante, rien ne peut être fait, n'empêche nullement qu'il faille aussi en passer par le collège; que les recours ne sont pas recevables,

(Jonction - rejet des requêtes - dépens à charge de la requérante et de l'intervenante).

N° 33.249

ARRET du 18 octobre 1989 (me Chambre) MM. Van Aelst, président de chambre, François, rapporteur, et Mme Thomas, conseillers, et M. Hoeffter, premier auditeur.

VILLE DE GENAPPE c/ Région wallonne (Mes Gillet et Lambert) - Partie inter­venante: Veraghaenne

PROCEDURE - Requête - Délai - Prorogation et interruption - Circonstances qui n'interrompent pas le délai - Recours à l'auteur de l'acte

Une demande de retrait de l'acte attaqué n'interrompt pas le délai de recours en annulation de cet acte.

Vu la requête introduite le 11 mars 1988 par la ville de Genappe qui poursuit l'annulation de l'arrêté du fonctionnaire délégué du ministère de la Région wallonne, administration de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme, du 17 décembre 1987, délivrant un permis de lotir à Hugues Veraghaenne;

Vu la requête introduite le 12 juillet 1988, par laquelle Hugues Veraghaenne demande à être reçu en qualité de partie intervenante;

Vu l'ordonnance du 20 juillet 1988 accueillant cette intervention;

Considérant que la partie adverse déduit une fin de non-recevoir de la tardiveté du recours;

Considérant que la ville requérante reconnaît avoir reçu copie de l'acte attaqué le 21 décembre 1987; qu'elle expose que le collège avait, dans les soixante jours de l'acte attaqué, introduit auprès du ministre une requête en

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.248 à 33.252 Page 3 N° 33.250

retrait de l'acte attaqué, et vainement attendu une réponse jusqu'au 21 février 1988, jour où il sollicita du conseil communal une autorisation d'ester qui lui fut accordée le 8 mars; que la loi ne dispose pas qu'un tel recours au ministre interrompt le délai de recours au Conseil d'Etat; que le recours est tardif et, partant, irrecevable,

(Rejet - dépens à charge de la requérante et de l'intervenant).

N° 33.250

ARRET du 18 octobre 1989 (VIe Chambre)

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Po-0

M. Martens, président-rapporteur, Mme Thomas et M. Hanotiau, conseillers, et M. Quintin, auditeur.

HANSENNE (Mes Renette et Wolf) c/ Ville de Liège (Mes Liénard et Franchimont)

1. PROCEDURE - Requête - Objet - Extension - A des actes antérieurs à l'acte attaqué - Acte confirmé par l'acte attaqué

Le recours en annulation d'un acte confirmatif doit être interprété comme dirigé également contre l'acte confirmé.

II. AGENTS ET FONCTIONNAIRES PUBLICS - Suspension préventive - Contentieux III. COMPETENCE DU CONSEIL D'ETAT - Contentieux de l'annulation - Droits subjectifs -

Traitement

Lorsqu'aucune disposition statutaire ne règle le régime pécuniaire de l'agent détenu, l'autorité qui décide de ne pas le payer pendant la période de détention ne peut prétendre qu'elle aurait fait une application pure et simple d'un tel statut ou, inversément, que l'agent y puiserait le droit subjectif au paiement de son traitement.

Lorsque le règlement communal dispose que la suspension conservatoire dans l'intérêt du service avec privation de traitement est décidée par le conseil communal, la mesure prise par celui-ci relève de son pouvoir discrétionnaire. Il s'agit d'une décision individuelle qui détermine la position administrative de l'agent. Le Conseil d'Etat est compétent pour contrôler la légalité d'une telle mesure, alors spécialement que l'agent soutient qu'elle ne repose sur aucun texte légal et qu'elle constitue une sanction disciplinaire déguisée.

IV. AGENTS ET FONCTIONNAIRES PUBLICS - Suspension préventive - Levée ou conversion en peine disciplinaire

Du règlement aux termes duquel dès la décision prise en matière disciplinaire par l'autorité compétente, la suspension conservatoire est réputée n'avoir jamais été décidée, il ressort que lorsque l'autorité ne prend pas une décision disciplinaire qui aurait pour effet d'absorber la mesure conservatoire, elle doit rapporter celle-ci et procéder à la reconstitution de la carrière del' agent pour toute la période durant laquelle il a été écarté de ses fonctions. En décidant que les effets de la suspension sont maintenus pendant la période de détention préventive, l'autorité abroge, à partir de la fin de cette période, la décision de suspension mais ne la retire pas.

A défaut de retrait, cette décision doit être annulée. S'il est vrai que le règlement la répute inexistante, il convient néanmoins de la mettre à néant, d'une part, dans l'intérêt de la sécurité juridique, d'autre part, parce quel' autorité en a maintenu partiellement les effets.

L'annulation de cette décision entraîne, par voie de conséquence, l'annulation des décisions qui maintiennent les effets pécuniaires de la suspension initiale.

V. AGENTS DES COMMUNES - Discipline - Suspension préventive VI. COMPETENCE DES AUTORITES ADMINISTRATIVES - Caractère d'ordre public

Seul le conseil communal est compétent pour prendre à l'égard d'un agent des me­sures modifiant sa situation administrative et nécessitées par l'application d'une décision provisoire de suspension préventive qu'il a prise lui-même. Le Conseil d'Etat relève d'office l'incompétence du collège des bourgmestre et échevins.

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.250

Arrêts Nos 33.248 à 33.252

Page 4

Vu la requête introduite le 20 octobre 1986 par Jean Hansenne qui demande l'annulation de la décision du 30 juin 1986 par laquelle le Conseil communal de la Ville de Liège l'a suspendu de ses fonctions, à titre conservatoire et avec privation de traitement, à partir du 13 juin 1986;

Vu la requête introduite le 9 décembre 1987 par Jean Hansenne qui demande l'annulation de la délibération du 18 septembre 1987 par laquelle le Collège des bourgmestre et échevins de la Ville de Liège a décidé de ne pas lui infliger de peine disciplinaire, de l'inviter à reprendre ses fonctions à partir du 1er septembre 1987 et d'autoriser le paiement de son traitement pour la période du 20 novembre 1986 au 31 août 1987;

Considérant que le requérant, professeur de cours généraux nommé à titre définitif dans l'enseignement communal liégeois, a été détenu préventivement du 13 juin au 19 novembre 1986, inculpé de complicité dans un hold-up; qu'il reçut en prison, le 25 juin 1986, la visite du directeur du département juridique de la ville qui l'avertit que le conseil communal allait délibérer sur une éventuelle suspension sans traitement; qu'invité à faire valoir ses observations écrites, le requérant protesta de son innocence et souligna qu'une suspension, qui lui semblait prématurée, réduirait à néant ses chances de réhabilitation; que, le 30 juin 1986, le conseil communal prit la décision, attaquée par le premier recours, de suspendre le requérant à titre conservatoire et avec privation de traitement à partir du 13 juin 1986, en faisant valoir «qu'en raison de la gravité des faits, il (convenait) de tenir !'intéressé à l'écart de son emploi»;

Considérant que, le 26 août 1986, le gouverneur fit savoir au bourgmestre que la délibération du 30 juin 1986 ne soulevait pas d'objection de sa part; que, le 5 novembre 1986, le président du Tribunal de première instance de Liège, siégeant en référé, rejeta la demande de sursis à exécution, que le requérant avait fondée sur l'illégalité de la décision de suspension; que, le 27 novembre 1986, la députation permanente, estimant que le requérant qualifiait à tort sa suspension de mesure disciplinaire, déclara irrecevable le recours qu'il avait exercé en invoquant l'article 85bis de la loi communale;

Considérant que le requérant a été acquitté par un jugement du Tribunal correctionnel de Liège du 12 février 1987 confirmé par un arrêt de la Cour de Liège du 18 juin 1987; qu'en raison de cet acquittement les décisions suivantes ont été prises:

1. Le 4 septembre 1987, le collège des bourgmestre et échevins:

«a) décide qu'il n'y a pas lieu d'infliger une peine disciplinaire à M. J.-M. Hansenne, professeur de cours généraux à!' l.C.E.T. de chimie, de dessin et d'habillement et classe dès lors sans suite le dossier établi à sa charge.

»b) constate que cet agent a été détenu du 13 juin au 19 novembre 1986 et décide de ne pas le payer pour cette seule période».

2. Le 18 septembre 1987, le collège, complétant le procès-verbal de la séance du 4 septembre, décide:

«l. qu'il n'y a pas lieu d'infliger une peine disciplinaire à Monsieur Jean Hansenne mais bien de classer sans suite le dossier disciplinaire ouvert à son encontre;

»2. d'inviter !'intéressé à reprendre effectivement ses fonctions dès le l"" septembre 1987 (date de rentrée scolaire);

»3. d'autoriser, en application de !'article 9 du règlement sur la suspension conservatoire, le paiement à l'intéressé des traitements dus pour la période du 20 novembre 1986 au 31 août 1987, période pendant laquelle il n'était pas incarcéré».

3. Le 16 juin 1989, le collège, constatant qu'il est opportun que le dossier soit examiné par le conseil communal, décide de retirer le point 1 de ses décisions des 4 et 18 septembre 1987 et invite le conseil communal à prendre une décision au sujet du requérant.

4. Le 26 juin 1989, le conseil communal «constate qu'il n'y a pas lieu d'infliger une peine disciplinaire à Monsieur Jean Hansenne mais bien de classer sans suite le dossier disciplinaire ouvert à son encontre».

La deuxième de ces décisions est attaquée par le second recours;

Considérant que les deux recours sont connexes; qu'il y a lieu de les joindre;

Considérant, sur l'exception d'irrecevabilité que la partie adverse déduit de la tardiveté du premier recours, que celui-ci a été introduit le 20 octobre 1986, soit moins de soixante jours après la notification de la délibération du 30 juin 1986, qui avait été faite au requérant à la prison de Lantin le 22 août 1986; que la· fin de non-recevoir manque en fait;

Considérant, sur l'exception d'irrecevabilité que la partie adverse déduit du caractère purement confirmatif de la décision du 18 septembre 1987 attaquée par le second recours, que celui-ci doit être interprété comme dirigé également contre l'acte confirmé du 4 septembre 1987 dont il n'est pas prétendu qu'il aurait été notifié au requérant plus de soixante jours avant l'introduction du recours; que la fin de non-recevoir ne peut être retenue;

Considérant que la partie adverse conteste que le Conseil d'Etat soit compétent pour connaître du second recours au motif qu'il soulève une contestation ayant pour objet le droit subjectif du requérant au paiement de

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.248 à 33.252 Page 5 N° 33.250

son traitement et qu'une telle contestation doit être soumise aux tribunaux, ce que le requérant a d'ailleurs fait en assignant la Ville de Liège devant le tribunal de première instance; qu'elle soutient, dans son dernier mémoire, que le refus de payer le requérant pour la période de son incarcération est la conséquence de son absence et non l'exécution d'une décision contenue dans l'acte attaqué, que le paiement du traitement implique que l'agent accomplisse le service qui en est la contrepartie, que l'agent n'a aucun droit acquis au traitement afférent à une période pendant laquelle il n'a pas travaillé sans qu'il justifie avoir obtenu un congé ou une dispense, qu'à supposer que sa détention inopérante soit considérée comme un fait du prince, elle constituerait un cas de force majeure exonérant la ville de ses obligations; qu'elle ajoute qu'en décidant de ne pas entamer de poursuites disciplinaires contre le requérant et en lui payant, le 15 mars 1988, les arriérés de traitement à l'exception de ceux qui correspondent à la période d'incarcération, la ville a implicitement mais certainement retiré sa décision de suspension provisoire; qu'elle précise qu'une décision explicite n'était d'ailleurs pas nécessaire, l'article 9 du règlement communal du 15 mars 1982 sur la suspension provisoire disposant que «dès la décision prise en matière disciplinaire par l'autorité compétente à cet égard, la suspension conservatoire est réputée n'avoir jamais été décidée»;

Considérant qu'aucune disposition statutaire applicable au requérant ne règle le régime pécuniaire de l'agent détenu préventivement; que la ville ne peut prétendre qu'elle aurait fait une application pure et simple d'un tel statut ou, inversement, que le requérant y puiserait le droit subjectif au paiement de son traitement; qu'au contraire, la disposition dont il a été fait application dans les décisions attaquées par le premier recours est l'article 5 du règlement du 15 mars 1982 selon lequel «la suspension conservatoire dans l'intérêt du service avec privàtion de traitement est décidée par le conseil communal»; que la mesure prise par celui-ci à l'égard du requérant relevait de son pouvoir discrétionnaire; qu'il s'agit d'une décision individuelle qui a déterminé la position administrative du requérant; qu'il en est de même des décisions des 4 et 18 septembre 1987 qui sont indissociables de la mesure initiale de suspension avec privation de traitement et qui, en ce qu'elles n'ont décidé de payer les arriérés qu'à partir du 20 novembre 1986, ont consolidé la mesure initiale de privation du traitement en la limitant à la période d'incarcération du requérant; que le Conseil d'Etat est compétent pour contrôler la légalité d'une telle mesure, alors spécialement que le requérant soutient qu'elle ne repose sur aucun texte légal et qu'elle constitue une sanction disciplinaire déguisée; que le déclinatoire ne peut être accueilli;

Considérant cependant que, comme le soutient la partie adverse, le point a) de la décision du 4 septembre 1987 et les points 1 et 2 de celle du 18 septembre 1987 n'ont causé aucun préjudice au requérant; qu'il est sans intérêt à leur annulation; que le recours n'est recevable qu'en ce qu'il attaque le point b) de la première décision et le point 3 de la seconde;

Considérant, d'office, quant au premier recours que, selon l'article 9 du règlement du 15 mars 1982, «dès la décision prise en matière disciplinaire par l'autorité compétente à cet égard, la suspension conservatoire est réputée n'avoir jamais été décidée»; que lorsque l'autorité ne prend pas une décision disciplinaire qui aurait pour effet d'absorber la mesure conservatoire, elle doit rapporter celle-ci et procéder à la reconstitution de la carrière de l'agent pour toute la période durant laquelle il a été écarté de ses fonctions;

Considérant qu'en décidant que les effets de la suspension seraient maintenus entre le 13 juin et le 20 novembre 1986, la partie adverse a abrogé, à partir de cette dernière date, la décision de suspension mais ne l'a pas retirée;

Considérant que la réintégration du requérant et son acquittement disciplinaire, décidés par les délibérations des 4 septembre 1987, 18 septembre 1987 et 26 juin 1989, démontrent que, à supposer qu'une commune puisse priver un agent de la totalité de son traitement pour une durée indéterminée, par une décision provisoire et rétroactive, la mesure prise à l'égard du requérant ne présente pas le fondement de fait et de droit légalement requis et qu'elle doit, à défaut de retrait, être annulée; que s'il est vrai que l'article 9 du règlement du 15 mars 1982 la répute inexistante, il convient néanmoins de la mettre à néant, d'une part, dans l'intérêt de la sécurité juridique, d'autre part, parce que la partie adverse en a maintenu partiellement les effets par les décisions attaquées par le second recours;

Considérant que les actes attaqués par le second recours ne trouvent de fondement possible que dans la suspension avec privation de traitement attaquée par le premier recours; que l'annulation de cette mesure entraîne, par voie de conséquence, celle des délibérations des 4 et 18 septembre 1987 en ce qu'elles ont maintenu les effets pécuniaires de la décision de suspension initiale; qu'en outre, seul le conseil communal était compétent pour prendre à l'égard du requérant des mesures modifiant sa situation administrative et nécessitées par l'application d'une décision provisoire qu'il avait lui-même prise; que le moyen qui a trait à la compétence est d'ordre public et doit être soulevé d'office; qu'il est sans intérêt d'examiner les moyens de la requête faute qu'ils puissent aboutir à une annulation aux effets plus étendus,

(Jonction - annulation de la délibération du 30 juin 1986 par laquelle le Conseil communal de la Ville de Liège a suspendu Jean Hansenne de ses fonctions, à titre conservatoire et avec privation de traitement, à partir du 13 juin 1986, de la délibération du 4 septembre 1987 par laquelle le Collège des bourgmestre et échevins de la Ville de Liège «constate que cet agent a été détenu du 13 juin au 19 novembre 1986 et décide de ne pas le payer pour cette seule période» et de la délibération du 18 septembre 1987 par laquelle le même collège limite la régularisation de la situation du requérant à la «période pendant laquelle il n'était pas incarcéré» - dépens à charge de la partie adverse).

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.251

N° 33.251

ARRET du 18 octobre 1989 (VY Chambre)

Arrêts Nos 33.248 à 33.252

Page 6

MM. Tapie, Président du Conseil d'Etat, Martens et Hanotiau, rapporteur, conseillers, et Rousseaux, premier auditeur.

SEYNAEVE (Me Maingain) c/ Province de Brabant

I. ENSEIGNEMENT ET SCIENCES - Généralités - Enseignement subventionné - Enseignement officiel - Examens

La députation permanente n'est pas compétente pour annuler les résultats des examens tels qu'ils ont été décidés par le jury compétent de l'établissement d'enseignement provincial. L'acte par lequel elle rejette une réclamation formée contre ces résultats n'est pas susceptible de recours devant le Conseil d'Etat.

II. PROCEDURE - Dépens

Le recours formé par les parents d'un mineur en tant que représentants légaux de celui-ci ne doit être soumis qu'à une seule taxe de 4.000 F.

III. PROCEDURE - Requête - Délai - Simple application

Vu la requête introduite le 22 mai 1986 par Roger Seynaeve et Marie-Josée Deboes, agissant en qualité de représentants légaux de leur fils mineur d'âge Jean Seynaeve, et ce dernier, qui demandent l'annulation de la décision de la Députation permanente du Conseil provincial d11 Brabant de déclarer non fondée «la requête par laquelle ils invitaient l'autorité provinciale à annuler la session d'examens du mois de juin 1985 présentés par les élèves de la 6e T.S.S. de l'Institut provincial secondaire horticole d'Anderlecht, dont le requérant Jean Seynaeve»;

Considérant que Jean Seynaeve s'est présenté à la session d'examens du mois de juin 1985 de l'Institut provincial secondaire horticole d' Anderlecht et a échoué; que, le 23 septembre 1985, les requérants ont introduit trois requêtes respectivement auprès du Président de la Commission d'homologation, de la Députation·permanènte de la Province de Brabant et du Ministre de l'Education nationale en vue d'obtenir l'annulation de la session d'examens du mois de juin 1985; que le ministre s'est déclaré incompétent puisqu'il s'agissait de l'enseignement officiel subventionné; que, par l'acte attaqué du 25 mars 1986 et après enquête, la députation permanente a rejeté la demande comme non fondée;

Considérant que la Députation permanente du Conseil provincial du Brabant n'était pas compétente pour annuler les résultats des examens de cette session tels qu'ils avaient été décidés par le jury compétent; qu'un tel acte n'est pas susceptible de recours devant le Conseil d'Etat; que la circonstance que la députation permanente a procédé à une enquête est sans pertinence; que, faute d'avoir été attaquées devant le Conseil d'Etat dans le délai de soixante jours, les décisions du jury sont devenues définitives; qu'il s'ensuit que le recours est irrecevable;

Considérant que la requête a été introduite concurremment par les époux Seynaeve-Deboes, agissant en qualité de représentants légaux de leur fils mineur d'âge Jean Seynaeve, et par celui-ci; que c'est par erreur que des timbres fiscaux d'une valeur de 12.000 francs ont été apposés sur la requête; qu'il y a lieu de redresser cette erreur et, en conséquence, d'ordonner la restitution aux deux premiers requérants du trop-perçu de 4.000 francs,

(Rejet - la taxe de 4.000 francs indûment acquittée lors de l'introduction du recours sera remboursée aux deux premiers requérants par l'Administration de l'Enregistrement et des Domaines (Direction régionale de Bruxelles) à l'intervention du Ministre de l'Intérieur - dépens, liquidés à la somme de 8.000 francs, à charge des requérants).

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.248 à 33.252 Page 7 N° 33.252

I ri.) Y f,, N° 33.252 'r 0 '-1 ARRET du 18 octobre 1989 (VIe Chambre)

MM. Tapie, Président du Conseil d'Etat, Martens et Hanotiau, rapporteur, conseillers, et Debra, premier auditeur.

ELADMI (Mes Josseaux et Messinne) c/ Communauté française (Me Van Assche)

1. PERSONNEL DE L'ENSEIGNEMENT DE L'ETAT - Généralités - Condition de nationalité II. PROCEDURE - Dépens

Il ressort del' article 4, l°, de la loi du 22 juin 1964 que la dérogation à la condition de nationalité est accordée par le Roi. La lettre par laquelle le ministre exprime seulement son intention de soumettre au Roi un arrêté de refus d'accorder la dérogation, n'est pas susceptible de recours. En raison des termes impératifs dans lesquels elle est rédigée, qui ont pu induire l'intéressé en erreur, il y a lieu de mettre les dépens à charge de la Communauté.

Vu la requête introduite le 21 octobre 1987 par El Mustapha Eladmi qui demande l'annulation de la décision du Ministre de l'Education nationale, notifiée le 25 août 1987, de ne plus lui accorder la dérogation de nationalité pour donner des cours de religion islamique dans l'enseignement de l'Etat;

Considérant que les faits de la cause se résument comme suit:

1. Le 27 avril 1987, le préfet de l'Athénée royal de Schaerbeek signale au ministre que le requérant, professeur de religion islamique, s'est livré à des voies de fait sur certains de ses élèves; il propose son licenciement.

2. Par une lettre du 25 août 1987, le ministre fait savoir au conseil du requérant qu'il n'accordera plus la dérogation de nationalité requise par l'article 4, 1°, de la loi du 22 juin 1964 relative au statut des membres du personnel de l'enseignement de l'Etat. Cette décision qui constitue l'acte attaqué est libellée comme suit:

«Suivant les propositions de /'Imam directeur de la mosquée de Bruxelles et du préfet de /'Athénée royal de Schaerbeek, Monsieur Eladmi ne sera plus désigné dans cet établissement /'année scolaire prochaine.

»De plus, vu la gravité des événements du 23 avril 1987 et la perte de confiance en Monsieur Eladmi qui en découle, j'ai décidé de ne plus lui accorder désormais de dérogation de nationalité, et ce pour quel qu' établissement que ce soit.

»le ne vois donc pas la nécessité de vous accorder l'audience que vous sollicitew.

3. L'arrêté royal du 27 juillet 1988, postérieur au recours, refuse la dérogation de nationalité au requérant; il fait l'objet du recours A. 39.470NI-9024;

Considérant d'office qu'en vertu de l'article 4, 1°, de la loi du 22 juin 1964 relative au statut des membres du personnel de l'enseignement de l'Etat, la dérogation à la condition de nationalité est accordée par le Roi; que la lettre du 25 août 1987 exprime seulement l'intention du ministre de soumettre au Roi un arrêté de refus d'accorder la dérogation de nationalité, arrêté contre lequel le requérant a introduit un recours en annulation; que cette lettre n'est pas un acte susceptible de recours; que les termes impératifs dans lesquels elle est rédigée ont cependant pu induire le requérant en erreur; que, pour cette raison, il y a lieu de mettre les dépens à charge de la partie adverse,

(Rejet - dépens à charge de la partie adverse).

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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ï

Arrêts Nos 33.253 à 33.260 Page 1

N°8 33.253 à 33.259 ARRETS du 19 octobre 1989 (VIIe Chambre)

VAN DE WEYER et autres: désistement.

N° 33.260

ARRET du 19 octobre 1989 (Vil" Chambre)

N° 33.253

M. Thcq, président de chambre, rapporteur, Mmes Vrints et Thlkens, conseillers, et Vandendriessche, auditeur.

ELECTION DES MEMBRES DU CONSEIL DE L'AIDE SOCIALE DE PEER (Mes Vandijck, Van de Velde et Boes)

I. ELECTION DES CONSEILS DE L'AIDE SOCIALE - Contentieux - Conseil d'Etat -Procédure - Connexité

Sur deux recours émanant des mêmes personnes, tendant l'un et l'autre à l'invalidation de l'élection des membres du conseil de l'aide sociale et invoquant le même moyen, il convient de statuer par un arrêt unique.

II. ELECTION DES CONSEILS DE L'AIDE SOCIALE - Contentieux - Conseil d'Etat - Intérêt

1. Le recours au Conseil d'Etat contre l'élection des membres du conseil de l'aide sociale n'est recevable que si la personne qui l'introduit justifie d'une lésion ou d'un intérêt.

2. Un requérant qui n'a pas été présenté comme candidat-membre effectif ou candidat­suppléant, qui n'a pas agi comme conseiller communal auteur d'une présentation et qui n'a aucun lien individualisé avec l'élection du conseil de l'aide sociale, ne justifie pas de l'intérêt personnel requis par la loi pour attaquer la validation de l'élection, que celle-ci ait été décidée par la députation permanente ou qu'elle résulte de l'inaction de ce collège.

3. Un conseiller communal qui n'a pas été présenté comme candidat-membre effectif ou candidat-suppléant, qui n'a pas agi comme conseiller communal auteur d'une présentation ne peut justifier d'un intérêt fonctionnel à intervenir devant le Conseil d'Etat contre la valida­tion del' élection des membres du conseil del' aide sociale qu'en raison de la méconnaissance de ses prérogatives en tant que conseiller communal ou des règles de la procédure en matière de décision au sein du conseil communal.

Le défaut dans l'acte par lequel une personne a été proposée comme candidat-membre effectif, d'une déclaration signée par lui, faisant foi de son consentement, est totalement étranger tant à l'exercice du mandat d'un conseiller communal qu'au fonctionnement et à la procédure en matière de décision du conseil communal.

Vu la requête introduite le 1er juin 1989, par laquelle Alfons Van Dyck et Raymond Eerlingen interjettent appel de l'arrêté de la députation permanente du conseil provincial du Limbourg, du 25 mai 1989, rejetant leurs réclamations contre l'élection par le conseil communal de Peer, le 17 avril 1989, des membres du conseil local de l'aide sociale et validant l'élection, et demandent «l'annulation» de l'élection dans son ensemble, tout au moins de l'élection de Jan Braeken;

Vu la requête introduite le 1er juin 1989, par laquelle Alfons Van Dyck et Raymond Eerlingen demandent l'annulation de la validation implicite de l'élection des membres du conseil de l'aide sociale de Peer, résultant du défaut d'une décision de la députation permanente du conseil provincial du Limbourg dans les trente jours suivant la réception du dossier;

Considérant que les formalités prescrites par les articles 3, 4 et 5 de l'arrêté royal du 12 janvier 1977 déterminant la procédure devant la section d'administration du Conseil d'Etat en cas de recours prévu par les articles 18, 21 et 22 de la loi du 8 juillet 1976 organique des centres publics d'aide sociale, ont été observées;

RECUEIL DES ARRHI'S DU CONSIDL D'Hl'JIT - 1989

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N° 33.260

Arrêts Nos 33.253 à 33.260

Page 2

Considérant que les deux recours émanent des mêmes personnes, qu'ils tendent l'un et l'autre à l'invalidation de l'élection des membres du conseil de l'aide sociale de la ville de Peer, qui a lieu le 17 avril 1989, et qu'ils invoquent tous deux le même moyen; qu'il convient de statuer sur les deux recours par un arrêt unique;

Considérant que le 26 avril les deux requérants ont introduit chacun une réclamation contre l'élection par le conseil communal de Peer, le 17 avril 1989, du conseil local de l'aide sociale, du chef de violation de l'article 11, § 1"', de la loi du 8 juillet 1976 organique des centres publics d'aide sociale, en ce que Jan Braeken a été élu bien qu'il edt donné son accord en vue de sa présentation comme membre effectif, non pas par une déclaration signée figurant sur l'acte de présentation, mais par une télécopie envoyée d'Espagne; que la députation permanente du conseil provincial du Limbourg rejeta, le 25 mai 1989, les deux réclamations et qu'elle valida l'élection des membres du conseil de l'aide sociale de la ville de Peer; que le 26 mai 1989 cet arrêté fut notifié, par lettre recommandée, aux deux requérants; que le 1er juin 1989, c'est-à-dire dans les 15 jours suivant cette notification, les requérants interjetèrent appel de cet arrêté;

Considérant que par délibération de son collège des bourgmestre et échevins du 5 juin 1989, confirmée par son conseil communal le 11 septembre 1989, la ville de Peer, ainsi que Jan Braeken, dont l'élection comme membre effectif du conseil de l'aide sociale de Peer est attaquée, ont introduit conjointement un mémoire en réponse recevable le 14 juin 1989, c'est-à-dire dans les 15 jours suivant la publication par le bourgmestre de l'avis relatif au dépôt de la requête;

Considérant que les parties intéressées font valoir que les requérants ne justifient d'aucun intérêt à l'annula­tion de la validation de l'élection du conseil de l'aide sociale de Peer, du 17 avril 1989, d'une part parce que la loi organique du 8 juillet 1976 elle-même dispose qu'à l'expiration du délai fixé à l'article 18, alinéa 3 de cette loi, l'élection est considérée comme valide, d'autre par pour le motif lorsqu'il agit sur la base de l'alinéa 5 du même article de la loi, le Conseil d'Etat siège comme juge ayant pleine juridiction, sa décision se substituant dès lors â celle de la députation permanente;

Considérant que le recours visé â l'article 18, alinéa 5, de la loi organique du 8 juillet 1976 n'est recevable, conformément â la disposition formelle de l'article 19, alinéa premier, des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat, que si la personne qui l'a introduit justifie d'une lésion ou d'un intérêt;

Considérant qu'aucun des deux requérants ne justifie dans sa requête introductive son intérêt à obtenir l'in­validation totale ou partielle de l'élection du conseil de l'aide sociale de la ville de Peer; que dans leur réclamation adressée â la députation permanente du conseil provincial du Limbourg, ils font respectivement état de leur qualité d' «habitant de la commune de Peer» et de «conseiller communal de la commune de Peer»; qu'il ne ressort d'aucun élément du litige qu' <<il ne puisse pas être admis qu'ils ont formé en la même qualité leur recours au Conseil d'Etat>>;

Considérant qu'aucun des deux requérants n'a été présenté comme candidat-membre effectif ou candidat­suppléant et n'a pas davantage agi comme conseiller communal, auteur d'une présentation; qu'il n'existe entre l'élection du conseil local del 'aide sociale et le premier requérant aucun lien individualisé; que le premier requérant n'a pas plus d'intérêt â l'annulation de cette élection que n'importe quel autre habitant de la ville de Peer; qu'il ne justifie pas de l'intérêt personnel requis par la loi pour attaquer la validation de l'élection, peu importe que celle-ci ait été décidée par la députation permanente ou qu'elle résulte de l'inaction de ce collège; qu'en sa qualité de membre du conseil communal de Peer le second requérant pourrait justifier d'un intérêt fonctionnel à intervenir devant le Conseil d'Etat contre la validation par le conseil communal de Peer de l'élection des membres du conseil local de l'aide sociale, mais uniquement en raison de la méconnaissance de ses prérogatives en tant que conseiller communal ou des règles de la procédure en matière de décision au sein du conseil communal; que l'unique moyen invoqué par les requérants est déduit du défaut, dans l'acte par lequel Jan Braeken a été proposé comme candidat membre effectif, d'une déclaration signée par lui, faisant foi de son consentement, et qu'il est dès lors totalement étranger tant â l'exercice par le second requérant de son mandat de conseiller communal de Peer qu'au fonctionnement et à la procédure en matière de décision du conseil communal; qu'aucun des deux requérants ne justifie de l'intérêt requis par la loi pour obtenir l'invalidation totale ou partielle de l'élection du conseil de l'aide sociale de Peer, ou l'annulation de sa validation tacite; qu'il y a lieu de constater d'office que, pour ce motif, les recours sont irrecevables;

Considérant qu'il n'y a pas lieu d'examiner l'exception d'irrecevabilité que les parties intéressées déduisent pour d'autre motifs du défaut d'intérêt.

(Jonction et rejet des recours - confirmation de l'arrêté du 25 mars 1989 par lequel la députation perma­nente du conseil provincial du Limbourg rejette les réclamations d'Alfons Van Dyck et de Raymond Berlingen contre l'élection le 17 avril 1989, par le conseil communal de Peer, du conseil local de l'aide sociale, et valide cette élection).

RECUBil.. DES ARRHI'S DU CONSEil.. D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.264 à 33.277 .Page 1

N° 33.264

ARRET du 19 octobre 1989 (Vile Chambre)

N° 33.264

M. Tacq, président de chambre, rapporteur, Mmes Vrints et Tulkens, conseillers, et M. Hubregtsen, auditeur.

PIERETS et consorts (Mes Weber et Deceuninck) c/ Commune de Knokke-Heist (M. Claeys) et Région flamande (Me Germain)- Parties intervenantes: S.A. N.C.P. et S.A. Immobilien Royal Building II (Mes Deconinck et Borgers)

1. PROCEDURE - Règles spéciales à la demande de suspension - Recevabilité du recours principal

La demande de suspension de l'exécution d'un acte administratif, qui ne peut être formée que conjointement avec un recours en annulation de cet acte, ne constitue qu'une action accessoire du recours en annulation et y est subordonnée.

La question de la recevabilité du recours en annulation, lorsqu'elle est soulevée par les parties défenderesses ou intervenantes ou, le cas échéant, lorsqu'elle l'est d'office, doit être analysée dès l'examen de la demande de suspension. Si un premier examen révèle, sur la base des éléments fournis par les parties, que le recours en annulation est irrecevable, la demande de suspension test également.

Il. BATISSE ET LOTISSEMENT - Recours au Conseil d'Etat - Délai - Tiers - Point de départ III. PROCEDURE - Requête - Délai - Point de départ - Connaissance - Preuve de la con­

naissance de l'acte

Les riverains et les autres intéressés doivent recourir dans un délai raisonnable à la faculté de prendre connaissance à la maison communale, des permis de bâtir et de lotir délivrés.

. Le délai dans lequel les tiers intéressés sont tenus de recueillir, à la maison communale, les renseignements relatifs à l'existence et au contenu d'un permis de bâtir, commence le jour où ils doivent ou peuvent raisonnablement supposer qu'un permis a été délivré, c'est-à-dire le plus souvent le jour où, se fondant sur ce qu'ils ont pu constater sur le lieu où les travaux de construction sont exécutés, force leur est de conclure qu'en vertu de la loi organique de l'urbanisme, l'exécution des travaux requiert un permis de bâtir.

IV. BATISSE ET LOTISSEMENT - Permis de bâtir - Existence d'un plan particulier d'aménagement - Dérogations au plan particulier ou au permis de lotir - Procédure

V. PROCEDURE - Règles spéciales à la demande de suspension - Objet

La décision du fonctionnaire délégué qui accorde l'autorisation de principe de déroger à un plan particulier d'aménagement n'est qu'un acte administratif préparatoire au permis de bâtir et, partant, non exécutoire. Il ne saurait faire l'objet d'une suspension de l'exécution*.

Vu la requête introduite le 1er septembre 1989 par laquelle Edmond Pierets et son épouse Maria Bellemans, Monique De Nijs, Eugeen Luyckx et son épouse Elsa Heylen, Gabriëlla Simon et Renée Demarteau, représentés par leur conseil, Me L. Deceuninck, avocat, demandent l'annulation:

1. de la délibération du 5 avril 1988 du collège des bourgmestre et échevins de la commune de Knokke­Heist qui a accordé à l'association momentanée «s.a. N.C.P. et s.a. lmmo Royal Building Il», le permis en vue d'édifier après la démolition des villas existantes, un immeuble à appartements sur la parcelle située à l'angle de la Engelsestraat-Majoor Quaillestraat et de la Bergdreef (section Heist) et cadastrée section F, n°' 119, 120, 121, 122 et 123;

2. de la «décision» du fonctionnaire délégué, préalable à la délibération précitée du collège et contenue dans une lettre du 9 mars 1988 adressée à l'administration communale de Knokke-Heist, qui accorde l'autorisation - de principe - de déroger au plan particulier d'aménagement n° H-12 «Duinbergen-Center» de l'ancienne commune de Heist-aan-Zee, approuvé par l'arrêté royal du 13 octobre 1964, en ce qui concerne le nombre d'habitations et la hauteur de l'immeuble pour lequel est délivré Je permis;

Vu la requête introduite également le 1er septembre 1989 par laquelle Edmond Pierets, Maria Bellemans, Monique De Nijs, Eugeen Luyckx, Elsa Heylen, Gabriëlla Simon et Renée Demarteau représentés par le même conseil, demandent la suspension de l'exécution de la délibération précitée du collège des bourgmestre et échevins de Knokke-Heist et de la «décision» précitée du fonctionnaire délégué;

* Comparer: arrêt Wellens et consorts, n° 32.953, du li août 1989.

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

Page 108: (VIe - KU Leuven · 33.103 - CLOETENS et REKOMS = n° 33.100 +désistement. RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989 . Arrêt N° 33.107 Page 1 N° 33.107 ARRET du 3octobre1989

N° 33.264

Vu la requête en intervention du 20 septembre 1989;

Arrêts Nos 33.264 à 33.277

Page 2

Vu l'ordonnance du 25 septembre 1989 autorisant l'intervention de la s.a. N.C.P. et de la s.a. Immobiliën Royal Building II;

Considérant qu'il y a lieu, au préalable, de statuer sur la demande de suspension;

Considérant que l'article 17, rétabli dans les lois coordonnées sur le Conseil d'Etat par l'article 15 de la loi du 16 juin 1989 portant diverses réformes institutionnelles, dispose que le requérant qui poursuit l'annulation d'un acte administratif peut demander la suspension de l'exécution de cet acte «si le recours (en annulation) invoque la violation des articles 6, 6bis et 17 de la Constitution» et que «la demande de suspension est introduite par un acte distinct qui est joint à la requête»;

Considérant que les parties intervenantes et défenderesses allèguent que le recours en annulation est irrecevable au motif qu'il a indéniablement été introduit tardivement, à savoir en tout cas plus de soixante jours après que les requérants se fondant sur les renseignements recueillis à la commune, avaient déposé, le 5 avril 1989, une réclamation auprès de l'administration communale de Knokke-Heist en raison de l'exécution, en bordure de la Engelsestraat, de travaux de construction qui ne respectent pas «lalignement»;

Considérant qu'une demande de suspension de l'exécution d'un acte administratif ne peut être formée que conjointement avec un recours en annulation de cet acte; que la demande de suspension ne constitue qu'une action accessoire du recours en annulation et y est subordonnée; que la question de recevabilité du recours en annulation lorsqu'elle est soulevée par les parties défenderesses et/ou intervenantes ou, le cas échéant lorsqu'elle l'est d'office, doit être analysée dès l'examen de la demande de suspension; que si un premier examen révèle, sur la base des éléments fournis par les parties, que le recours en annulation est irrecevable, la demande de suspension

· l'est également;

Considérant que les permis de bâtir ne doivent pas être notifiés à des tiers intéressés; qu'à leur égard, le délai de soixante jours fixé à l'article 4 du règlement de procédure devant la section d'administration du Conseil d'Etat commence à courir à dater du jour où ils ont connaissance du permis de bâtir attaqué; que d'une part, le principe qui préside à l'article 4 précité du règlement de procédure et selon lequel il faut éviter que la validité des décisions administratives demeure trop longtemps incertaine et d'autre part, la nécessité de parvenir à une protectfon équilibrée des intérêts tant du maître de l'ouvrage que des voisins et autres intéressés ont pour corollaire que les riverains et les autres intéressés doivent recourir dans un délai raisonnable à la faculté que leur offre l'article 2 de l'arrêté royal du 22 octobre 1971 portant exécution de l'article 63 de la loi organique de l'urbanisme de prendre connaissance à la maison communale, des permis de bâtir et de lotir délivrés;

Considérant que le délai dans lequel les tiers intéressés sont tenus de recueillir, à la maison communale, les renseignements relatifs à l'existence et au contenu d'un permis de bâtir, commence à courir le jour où ils doivent ou peuvent raisonnablement supposer qu'un permis a été délivré, c'est-à-dire le plus souvent le jour où, se fondant sur ce qu'ils ont pu constater sur le lieu où les travaux de construction sont exécutés, force leur est de conclure qu'en vertu de la loi organique de l'urbanisme, l'exécution de ces travaux requiert un permis de bâtir;

Considérant que lorsqu'un requérant potentiel constate que sur une parcelle avoisinante l'on exécute des travaux exigeant manifestement un permis de bâtir, il doit, s'il entend agir avec prudence comme il se doit, faire usage dans un délai raisonnable du droit de consulter le permis de bâtir délivré qui lui est garanti par l'arrêté royal du 22 octobre 1971 précité; ,

Considérant que tous les requérants sont propriétaires d'un appartement de la «Résidence Fabiola», sise dans la Engelsestraat, juste en face du terrain sur lequel l'immeuble à appartements faisant l'objet du permis est érigé;

Considérant qu'il ressort des pièces déposées que la démolition des villas a été entamée le 10 mai 1988 à l'endroit où devait s'ériger l'immeuble faisant l'objet du permis, que les travaux de démolition se sont achevés le 4 juillet 1988, que les travaux de gros oeuvre ont commencé le 27 février 1989;. que, dès avant la délivrance du permis de bâtir attaqué, l'un des riverains, à savoir Willy Woestyn, a engagé une action contre l'exécution des travaux de construction projetés, que ce dernier a tenté d'associer les autres riverains à son action en distribuant un tract, qu'après la délivrance du permis de bâtir attaqué, Willy Woestyn a poursuivi son action, que les premier et troisième requérants lui ont donné une <<procuration» écrite, respectivement les 3 mai et 27 avril 1988, dans laquelle ils lui «accordent leur soutien moral pour mener toutes les procédures judiciaires nécessaires et lui permettent de mentionner leurs noms dans le cadre de l'opposition au projet de construction», que le troisième requérant également, agissant en sa qualité de «syndic» de la «Résidence Fabiola» et à la demande de tous les copropriétaires de l'immeuble à appartements visé, dans une lettre du 22 mai 1988 adressée à Willy Woestyn, accorde son soutien et celui de tous les copropriétaires à l'opposition formée par celui-ci contre les plans de construction, que Willy Woestyn, conjointement avec son épouse, a introduit un recours en annulation contre le permis de bâtir ainsi que contre la dérogation à certaines prescriptions du plan particulier d'aménagement précité de l'ancienne commune de Heist-aan-Zee, accordée par le fonctionnaire délégué, que tous deux ont obtenu, d'abord du Président du tribunal de première instance à Bruges, ensuite de la Cour d'appel à Gand, l'ordre d'arrêter les travaux de construction <<}usqu' à la décision au fond du Conseil d'Etat et des tribunaux civils», que, les travaux ont été arrêtés en conséquence, qu'à la demande de Willy Wostyn, le désistement de l'instance a été décrété par l'arrêt du 12 janvier 1989, que les travaux ont repris le 16 février 1989 et ont été poursuivis depuis lors .sans interruption, que, le 5 avril 1989, le

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.264 à 33.277 Page 3 N° 33.265

premier requérant a écrit une lettre au collège des bourgmestre et échevins de Knokke-Heist «en tant que mandataire de tous les propriétaires de l'immeuble à appartements «Résidence Fabiola» pour déposer une réclamation au nom de tous les propriétaires de l'immeuble à appartements précité au motif qu'un mur orbe a été érigé le long de la Engelsestraat «à environ 3,7 m du côté intérieur du troittoir» alors que «selon des renseignements recueillis après du service communal l'alignement de l'immeuble à appartements doit se trouver à cinq mètres au moins du côté intérieur du trottoir», que, dans cette lettre justificative de sa réclamation, il a déclaré que «ce mur, dans une large mesure, empêche la vue de nos propriétaires d'appartements» et qu'il «est déjà suffisamment navrant pour nous que l'immeuble à appartements visé soit érigé devant notre propriété», et «qu'il ne faudrait donc pas, en plus, frauder encore environ 1,30 m», qu'il a demandé, enfin, que «les travaux effectués au mur litigieux soient immédiatement arrêtés» et qu' ordre soit donné de détruire ce mur dans les plus brefs délais;

Considérant qu'à la lumière de ce qui précède, il y a lieu d'admettre que tous les requérants devaient savoir pertinemment si ce n'est au moment où les villas existantes ont été démolies et où un vaste chantier de construction a été ouvert sur les parcelles groupées et les travaux de fondations ont commencé, à tout le moins au moment où Willy Woestyn, au su des requérants, a attaqué le permis de bâtir par un recours en annulation, que des travaux de construction importants pour lesquels un permis préalable est requis et avait même été accordé seraient exécutés à cet endroit, qu'il semble qu'il faille inférer des termes de la lettre précitée du 5 avril 1989 que les requérants, de quelque manière que ce soit, avaient connaissance à cette date tant de l'existence'que du contenu du permis de bâtir attaqué ainsi que de la dérogation au plan particulier d'aménagement contestée; que même à supposer qu'au 5 avril 1989, ils savaient uniquement qu'un permis devait être délivré et dans l'hypothèse où ils n'auraient pris connaissance, à la maison communale de Knokke-Heist, du dossier relatif à la construction, de la dérogation accordée et du permis que le soixantième jour qui précède l'introduction de leur recours en annulation, il est néanmoins constant que les requérants ont attendu 90 jours pour introduire leur recours alors qu'ils savaient avec certitude qu'un permis de bâtir avait été délivré; qu'il ne s'agit pas là d'un délai raisonnable;

Considérant qu'un premier examen des éléments communiqués fait apparaître qu'il y aurait des motifs fondés d'admettre que le recours en annulation a été introduit tardivement; que la demande de suspension est irrecevable tant en ce qui concerne le premier que le deuxième acte attaqué;

Considérant que la deuxième partie défenderesse soulève à juste titre que, n'étant qu'un acte administratif préparatoire et, partant, non exécutoire, le deuxième acte attaqué ne saurait, quoi qu'il en soit, faire l'objet d'une suspension de l'exécution,

(Rejet de la demande de suspension de l'exécution de la délibération du collège des bourgmestre et échevins de la commune de Knokke-Heist du 5 avril 1988 et de la décision du fonctionnaire délégué qui l'a précédée et qui est contenue dans la lettre de celui-ci du 9 mars 1988).

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N° 33.265 ç• Il ~'i .,, 1

ARRET du 20 octobre 1989 (VIe Chambre) MM. Tapie, président du Conseil d'Etat, rapporteur, Closset et Martens, conseillers, et Salmon, premier auditeur.

BERNARD (Me Cambier) c/ Conservatoire royal de musique de Liège et Communauté française (Mes Lejeune, Matra y et Van Assche)

1. AGENTS ET FONCTIONNAIRES PUBLICS - Statut - Règles applicables en l'absence de statut

II. PERSONNEL DE L'ENSEIGNEMENT DE L'ETAT - Personnel administratif des conservatoires royaux de musique - Statut

A défaut de dispositions particulières applicables au Conservatoire royal de musique de Liège, la situation statutaire d'un agent temporaire est régie par les principes applicables à la fonction publique en général et notamment par ceux qui se dégagent de l'arrêté du Régent du 30 avril 1947 fixant le statut des agents temporaires de l'Etat.

III. AGENTS DE L'ETAT - Agents temporaires - Arrêté du Régent du 30 avril 1947

1. S'il est exact que l'article 1 abis de l'arrêté du Régent du 30 avril 1947 dispose que la nomination' d'un agent temporaire pour une durée indéterminée ne peut excéder deux ans, il ne s'ensuit pas que l'agent laissé au-delà de cette limite devrait être considéré comme un agent nommé à titre définitif en l'absence d'un acte formel de nomination.

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.265

Arrêts Nos 33.264 à 33.277

Page 4

S'agissant d'un agent nommé à titre temporaire depuis plus de deux ans, la nomination à titre définitif n'est pas la seule manière de régulariser sa situation, c'est-à-dire de mettre fin à !'illégalité de celle-ci.

Il n'appartient pas au Conseil d'Etat de suppléer à !'absence d'acte formel de nomi­nation, fût-ce en interprétant !'attitude d'une autorité administrative de manière à rendre celle-ci légale.

IV. AGENTS DE L'ETAT - Agents temporaires - Cessation des fonctions - Licenciement (1 à 5) V. PROCEDURE NON CONTENTIEUSE - 1° Motivation formelle des actes - Obligation de

motiver en la forme - Fonction publique - Cessation des fonctions - Licenciement (1); - 2° Droits de la défense - Cas où il faut les observer - Licenciement d'un agent temporaire (2)

VI. COMPETENCE DES AUTORITES ADMINISTRATIVES - Généralités (3)

1. Aucune disposition n'impose la motivation en la forme de la décision de ne pas reconduire la désignation d'un agent temporaire et de le mettre en préavis.

Cette décision relève de !'appréciation discrétionnaire de !'administration qui, même si elle a envisagé une autre solution peu auparavant, peut, sans excéder ses pouvoirs et sans avoir à se justifier davantage, choisir d'appliquer l'article 7 de !'arrêté du Régent du 30 avril 1947 pour des motifs d'opportunité.

2. La décision de ne pas nommer un agent temporaire à titre définitif et celle. de faire une application analogique de !'article 7 de !'arrêté du Régent du 30 avril 1947 sont indissociables. Dès lors que !'intéressé n'a aucun droit à une nomination définitive et que !'autorité décide discrétionnairement de ne pas le faire bénéficier d'une telle nomination, elle ne peut qu'appliquer le principe inscrit à l'article 7.

Elle n'a pas !'obligation d'entendre !'agent dès lors que, si la mesure a incontestable­ment des conséquences préjudiciables pour lui, elle a pour seule base une application exacte des principes et non le comportement personnel de !'agent.

La critique de!' attitude del' autorité à l'égard d'autres agents est dénuée de pertinence. 3. Lorsque la décision a été prise de. commun accord entre deux ministres, il n'est

pas nécessaire d'examiner lequel était compétent ni lequel aurait joué un rôle prépondérant dans la décision.

Ce commun accord n'équivaut nullement à la délibération d'un collège. 4. Dès lors que le régime de !'agent est statutaire, aucune disposition législative ou

réglementaire n'impose d'appliquer par analogie la loi du 3 juillet 1978 sur le contrat de travail, loi qui est étrangère à ce régime.

5. En !'espèce, le comportement de !'agent est juridiquement étranger à la mesure prise, même s'il se peut qu'en fait ce comportement !'ait influencée dans une mesure d'ailleurs indéterminable.

VII. PROCEDURE NON CONTENTIBUSE - Notification des actes - 1° Nature; - 2° Effets de la notification irrégulière; - 3° Autorité compétente pour notifier

La notification d'une décision n'est ni un acte susceptible d'annulation ni un acte dont l'irrégularité éventuelle serait de nature à affecter la validité de la décision elle-même.

Elle ne doit pas nécessairement émaner de !'auteur de celle-ci.

VIII. PROCEDURE - Dernier mémoire - Moyen

Le moyen invoqué pour la première fois dans le dernier mémoire n'est pas recevable lorsqu'il aurait pu être produit dans la requête.

Vu la requête introduite le 19 mars 1987 par Daniel Bernard qui demande l'annulation:

1. de la décision de date inconnue, prise par les deuxième et troisième parties adverses, de ne pas reconduire la désignation du requérant en qualité de rédacteur à titre temporaire, à partir du 1er janvier 1987, et de lui notifier un préavis prenant cours le 1er février 1987 pour se terminer le 30 avril 1987, décision notifiée au requérant le 20 janvier 1987;

2. du refus implicite que comporte cette décision de nommer le requérant à titre définitif ou de reconnaître sa qualité d'agent définitif au Conservatoire royal de musique de Liège;

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL.D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.264 à 33.277 Page 5 N° 33.265

3. de la décision, de date inconnue, de renouveler les nominations à titre temporaire de Heselmans Jeanne, Kohl Pierre, Pahaut Patricia et Fagnoul Michel;

Considérant que les faits de la cause peuvent être résumés comme suit:

1. Par arrêté du 23 août 1973 du Ministre de !'Education nationale et de la Culture française, le requérant, qui était rédacteur temporaire depuis le 28 octobre 1971 au ministère de !'Education nationale et de la Culture française, a été désigné en qualité de rédacteur temporaire au Conservatoire royal de musique de Liège, du 1er septembre 1973 au 31 décembre 1973.

L'arrêté du ministre a été pris sur la base de l'arrêté du Régent du 30 avril 1947 fixant le statut des agents temporaires de l'Etat et de l'arrêté royal du 1°' décembre 1970 fixant le statut pécuniaire notamment des membres du personnel administratif des établissements d'enseignement de l'Etat.

La désignation du requérant a été renouvelée plusieurs fois, à durée déterminée, jusqu'au 31 décembre 1986, la dernière désignation résultant d'une lettre du 5 août 1986 et portant sur la période du 1er juillet 1986 au 31 décembre 1986.

2. A partir du 15 avril 1975, le requérant avait exercé les fonctions d'économe au mess «Le Foyer» du conservatoire.

A la suite d'irrégularités de sa gestion, une enquête avait été ouverte. Le requérant avait entre-temps démissionné de sa fonction de secrétaire économe le 20 avril 1978.

La procédure pénale aboutit à un arrêt du 1°' octobre 1980 qui dit établies les préventions de détournement de 234.666 francs et de faux, mais suspend le prononcé de la peine pendant cinq ans.

3. En outre, selon les parties adverses, le comportement du requérant ne donnait guère satisfaction.

Face à cette situation, le directeur du conservatoire écrivit, le 15 décembre 1986, aux deuxième et troisième parties adverses qu'il ne demandait pas la reconduction de la désignation du requérant.

Dans une lettre adressée le 23 décembre 1986 à la direction générale des services pour la culture, le directeur du conservatoire a communiqué diverses précisions concernant le comportement du requérant et plus particulièrement concernant des faits commis le 19 décembre 1986 (remise de formulaires C4).

4. Le 30 décembre 1986, les deuxième et troisième parties adverses ont décidé de ne pas maintenir le requérant en fonction au-delà du 31 décembre 1986.

Le directeur du conservatoire a été avisé de cette décision. Il en informa le requérant le 5 janvier 1987.

Cette décision a été confirmée par la direction générale des personnels, des statuts et de l'organisation ad­ministrative par lettre du 6 janvier 1987 adressée au directeur du conservatoire, l'invitant à prendre immédiatement les mesures d'exécution requises.

5. Le 16 janvier 1987, le directeur du conservatoire écrivit au requérant:

«En confirmation de ma notification du 5 janvier 1987, je suis au regret de vous signaler que MM. les mini;çtres ont décidé de ne pas reconduire votre désignation de rédacteur à titre temporaire à partir du 1er janvier 1987.

»Votre préavis commencera donc le 1er février pour se terminer de plein droit le 30 avril 1987».

Le requérant a reçu copie de ce document le 20 janvier 1987;

Considérant que la deuxième partie adverse conteste la recevabilité du recours au motif que la requête serait rédigée de manière imprécise et contradictoire quant à l'indication de ses objets; qu'elle fait valoir qu'à supposer, ce qu'elle conteste, qu'une décision ait été prise au sujet du requérant, on ne peut considérer cette décision comme étant simultanément le non-renouvellement d'une désignation temporaire, le refus implicite de considérer le requérant comme agent définitif et le refus implicite de le nommer à titre définitif; qu'elle ajoute qu'on aperçoit malaisément comment le requérant peut poursuivre l'annulation du non-renouvellement de sa désignation temporaire en affirmant que s'il n'est pas nommé à titre définitif, il doit nécessairement être sous contrat de travail;

Considérant que la lettre du 16 janvier 1987 relate incontestablement une décision des ministres; que cette décision ne s'analyse pas en une simple constatation de l'échéance du terme de la désignation temporaire du requérant; qu'il n'y a, de la part de celui-ci, aucune contradiction à attaquer cette décision explicite et à soutenir, à l'appui de ce recours, qu'il aurait dû, en réalité, être considéré comme un agent définitif et, à défaut, être nommé définitivement et, à défaut encore, bénéficier des avantages liés à un contrat de travail; que cette première fin de non-recevoir ne peut être retenue;

Considérant que, dans son dernier mémoire, la troisième partie adverse conteste l'intérêt du requérant à attaquer la décision de renouveler les nominations à titre temporaire de Jeanne Heselmans, de Pierre Kohl, de Patricia Pahaut et de Michel Fagnoul;

Considérant que, contrairement à ce que le requérant soutient dans son dernier mémoire, si le Conseil d'Etat annulait les quatre désignations attaquées, il ne s'ensuivrait nullement que lui-même devrait soit être nommé à titre définitif soit voir renouveler sa désignation comme rédacteur temporaire; qu'il n'a donc aucun intérêt à poursuivre

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.265

Arrêts Nos 33.264 à 33.277

Page 6

l'annulation des désignations des quatre autres rédacteurs temporaires; qu'·en son troisième objet, le recours n'est pas recevable;

Considérant que le requérant prend un premier moyen de «la violation de la Constitution, notamment de son article 66, de la violation de l'arrêté du Régent du 30 avril 1947 fixant le statut des agents temporaires, notamment de ses articles 1, 1 bis et 2, de la violation de l'arrêté royal du 2 juillet 1937 conférant la personnalité juridique au Conservàtoire de Liège, de la violation del' arrêté royal du 7 mars 1974, relatif au recrutement des agents dans les administrations et les autres services des ministères, notamment de ses articles 5 à 9, de la violation dé l'arrêté royal du 29' août 1966 fixant statut des membres du personnel administratif, du personnel de maîtrise, gens de métier et de service des établissements d'enseignement gardien, primaire, spécial, moyen, technique, artistique et normal de l'Etat, notamment de ses articles 11 et suivants et 45 à 50, de la violation de la loi du 10 juillet 1972 permettant des mesures temporaires en faveur de certains agents des services publics et de l'arrêté royal du 12 mars 1973 portant des mesures temporaires en faveur de certains agents des administrations de l'Etat, notamment de ses articles 1, 2 et 25, de la violation de l'arrêté de /'Exécutif de la Communauté française du 20 mars 1984 fixant le cadre du personnel administratif, du personnel de maîtrise, gens de métier et de service des Conservatoires royaux de musique de Bruxelles (secteur français), Liège et Mons, de la violation des principes généraux du droit et des formes substantielles ou prescrites à peine de nullité, de l'erreur dans les causes ou les motifs et de l'excès de pouvoir»;

Considérant qu'à défaut de dispositions particulières applicables au Conservatoire royal de musique de Liège, la situation incontestablement statutaire du requérant était régie par les principes applicables à la fonction publique en général et notamment par ceux qui se dégagent de l'arrêté du Régent du 30 avril 1947 fixant le statut des agents temporaires de l'Etat, arrêté d'ailleurs visé au premier alinéa du préambule de l'acte de désignation du 23 août 1973;

Considérant que s'il est exact que l'article 101.bis de l'arrêté du Régent du 30 avril 1947 dispose que la nomination d'un agent temporaire pour une durée indéterminée ne peut excéder deux ans, il ne s'ensuit pas que l'agent laissé en fonction au-delà de cette limite devrait être considéré comme un agent nommé à titre définitif, en l'absence d'un acte formel de nomination; que les parties adverses pouvaient, comme elles l'ont fait, mettre fin aux fonctions du requérant, qui avait conservé le statut d'agent temporaire, moyennant le préavis de trois mois prévu par l'article 7 du même arrêté; que, contrairement à ce que le requérant soutient dans son dernier mémoire, la nomination à titre définitif n'était nullement la «seule manière de régulariser sa situation», c'est-à-dire de mettre fin à l'illégalité de celle-ci, et, par ailleurs, il n'appartient pas au Conseil d'Etat de suppléer à l'absence d'acte formel de nomination, fût-ce en interprétant «l'attitude d'une autorité administrative de manière à rendre celle-ci légale»; que le moyen manque en droit;

Considérant qu'en réplique, le requérant déclare renoncer à ses deuxième et troisième moyens; que ceux-ci ne touchaient pas à !'ordre public;

Considérant que le requérant prend un quatrième moyen «de la violation de l'arrêté du Régent du 30 avril 1947, notamment de ses articles 1, Ibis, 2 et 4, de la violation des principes généraux du droit et des formes substantielles ou prescrites à peine de nullité, de l'absence, de l'erreur, de l'insuffisance et de la contradiction dans les causes ou les motifs et de l'excès de pouvoir»,

«En ce que la décision de notifier au requérant un préavis, près d'un mois après l'expiration de sa dernière désignation écrite en qualité de temporaire, ne repose sur aucun motif;

»Alors que pareille décision doit reposer sur des motifs légitimes et licites (voy. notamment: C.E., 21.481, 20.10.1981,

»Que pareille motivation s'imposait d'autant plus que la décision de licencier le requérant est intervenue quelques semaines, à peine, après qu'on lui eut proposé une nomination à titre définitif (voir lettre du 2.12.1986,

»Que pareil changement d'attitude des parties adverses, à quelques semaines de distance seulement, est non seulement inexpliqué, mais inexplicable, en manière telle que les actes attaqués doivent être annulés»;

Considérant qu'aucune disposition n'imposait aux parties adverses de motiver en la forme la décision qu'elles ont prise; que, pour le surplus, si la situation du requérant était illégale, cette illégalité ne lui conférait aucun droit à une nomination définitive; que la décision d'y mettre fin de la manière prévue à l'article 7 de l'arrêté du Régent du 30 avril 1947 relevait de l'appréciation discrétionnaire de l'administration qui, si elle avait envisagé une autre solution peu auparavant, pouvait, sans excéder ses pouvoirs et sans avoir à se justifier davantage, choisir d'appliquer l'article 7 pour des motifs d'opportunité; que le moyen manque en droit;

Considérant que le requérant prend un cinquième moyen «de la violation des principes généraux du droit, notamment des exigences d'une saine gestion administrative, de la violation des formes substantielles ou prescrites à peine de nullité et d~ l'excès de pouvoir,

»En· ce que la décision de mettre fin aux fonctions du requéi-ant et de lui notifier un préavis a été prise sans qu'il ait été préalablement informé et entendu,

»Alors que tout acte affectant gravement la situation individuelle d'un agent ne peut être pris qu'après que l'intéressé a été informé de l'intention des autorités à son égard et a été entendu par celles-ci (voy. notamment: C.E., 12.082, 1.12.1966; C.E., 26.206, 25.2.1986)»;

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

Page 113: (VIe - KU Leuven · 33.103 - CLOETENS et REKOMS = n° 33.100 +désistement. RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989 . Arrêt N° 33.107 Page 1 N° 33.107 ARRET du 3octobre1989

Arrêts Nos 33.264 à 33.277 Page 7 N° 33.265

Considérant que la décision de ne pas nommer le requérant à titre définitif et celle de faire une application analogique de l'article 7 de l'arrêté du Régent du 30 avril 1947 sont évidemment indissociables; que, dès lors que le requérant n'avait aucun droit à une nomination définitive et que les parties adverses décidaient discrétionnairement de ne pas le faire bénéficier d'une telle nomination, elles ne pouvaient qu'appliquer le principe inscrit à l'article 7 précité; que la critique de leur attitude à !'égard d'autres agents et dénuée de pertinence; que les parties adverses n'avaient donc pas l'obligation d'entendre le requérant puisque, si la mesure prise avait incontestablement des conséquences préjudiciables pour lui, elle avait pour seule base une application exacte des principes indiqués et non le comportement personnel du requérant; que le moyen manque en droit;

Considérant que le requérant prend un sixième moyen «de la violation de la Constitution, notamment de ses articles 59bis et 66, de la violation de l'arrêté du Régent du 30 avril 1947, notamment de ses articles 1, 2 et 3, de la violation de la loi du 8 août 1980, notamment de son article 4, de la violation des principes généraux du droit et de l'excès de pouvoir,

»Première branche,

»En ce que la décision de mettre fin aux fonctions du requérant a été prise par «Messieurs les Ministres» (voir lettre de licenciement du 16 janvier 1987) et sur base d'un dossier instruit par les services du ministère de l' Education nationale (F),

»Alors que, en vertu des dispositions visées au moyen, le fonctionnement du Conservatoire royal de musique de Liège relève des attributions exclusives de la Communauté française,

»Qu'il en résulte que, tant le Ministre de /'Education nationale que ses services sont incompétents pour traiter le dossier du requérant et pour proposer son licenciement,

»Deuxième branche,

»En ce que la décision de notifier au requérant un préavis de trois mois, prenant cours le 1e1· février pour se terminer le 30 avril 1987, a été prise par le seul directeur du conservatoire royal de musique, ·

»Alors que non seulement la décision de ne pas renouveler la désignation du requérant, mais également celle de lui notifier un préavis de trois mois, devaient être prises par l' Exécutif de la Communauté française,

»Qu'à supposer même que le pouvoir de notifier le préavis puisse qppartenir à la première partie adverse, c'était alors à la commission administrative de prendre la décision et de la notifier (art. 2 de la loi du 27 juin 1930, accordant la personnalité civile aux établissements scientifiques et artistiques dépendant du ministère des Sciences et des Arts),

»Que les actes attaqués émanent donc d'autorités incompétentes pour les prendre et doivent être, en conséquence, annulés»;

Considérant que la décision attaquée a été prise de commun accord par le Ministre de !'Education nationale et par le Ministre de la Communauté française pour la Santé et !'Enseignement; que sans qu'il soit nécessaire d'examiner lequel de ces deux ministres était compétent ni lequel aurait joué un rôle prépondérant dans la décision, il suffit de constater que leur commun accord qui, contrairement à ce que le requérant soutient dans son dernier mémoire, n'équivaut nullement à la délibération d'un collège, prive de toute pertinence le moyen en sa première branche;

Considérant que la notification d'une décision n'est ni un acte susceptible d'annulation ni un acte dont l'irrégularité éventuelle serait de nature à affecter la validité de la décision elle-même; qu'elle ne doit pas nécessairement émaner de l'auteur de celle-ci; qu'en sa deuxième branche, le moyen ne peut être retenu;

Considérant que, dans son dernier mémoire, le requérant soutient «que la décision des ministres (ne lui) a pas été notifiée»; qu'il formule ainsi un moyen nouveau qui aurait pu être produit dans la requête et qui, par suite, n'est pas recevable;

Considérant que le requérant prend un septième moyen «de la violation de l'arrêté du Régent du 30 avril 1947, notamment de ses articles Ibis, 2 et 7, de la violation des principes généraux du droit et des formes substantielles ou prescrites à peine de nullité et de l'excès de pouvoir,

»En ce que les parties adverses ont notifié au requérant un préavis d'une durée réduite à 3 mois,

»Alors que, à supposer même que le requérant puisse être licencié moyennant préavis - quod non - il ne pouvait l'être moyennant un préavis aussi réduit, qu'en effet, le préavis de trois mois prévu par l'article 7 de l'arrêté du Régent du 30 avril 1947 n'est applicable qu'aux agents qui n'ont exercé des fonctions temporaires que pendant 2 ans, voire 3 ans, maximum, qu'il y avait dès lors lieu d'appliquer, à tout le moins, par analogie, les dispositions de la loi du 3 juillet 1978 relatives aux contrats de travail et d'accorder au requérant un préavis au moins équivalent à celui qui aurait dû lui être notifié sur base de la législation sur le contrat de travail (art. 82 de la loi du 3 juillet 1978), que le préavis qui lui a ainsi été notifié est manifestement insuffisant et illégal,

»Et alors que les règles applicables au personnel de la première partie adverse ne prévoient pas la possibilité de nominations à titre temporaire, en manière telle que, si le requérant n'est pas nommé à titre définitif, il doit nécessairement être sous contrat de travail, conformément notamment aux dispositions de l'arrêté du 7 mars 1974 (art. 5, 5bis et 7)»;

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.265

Arrêts Nos 33.264 à 33.277

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Considérant qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'imposait en l'espèce, le reg1me du requérant étant statutaire ainsi qu'il le reconnaît dans son dernier mémoire, d'appliquer «.par analogie» la loi du 3 juillet 1978 sur le contrat de travail, loi qui est étrangère à ce régime; que le septième moyen manque en droit;

Considérant que, dans son mémoire en réplique, le requérant produit un moyen nouveau qu'il énonce en ces termes:

<<A la lecture des mémoires en réponse et du dossier administratif, le requérant a constaté que le non­renouvellement de son mandat ne s'expliquait nullement par le fait quel' autorité se serait trouvée dans l'obligation de réduire le nombre de rédacteurs.

»Le requérant a ainsi appris que la raison du non-renouvellement de son mandat est tirée uniquement de faits qui lui sont imputés.

»Comme il a déjà eu l'occasion de le développer, les faits qui ont justifié le non-renouvellement de son mandat sont inexacts.

»1° - Ce n'est bien évidemment pas en raison des faits qui se sont déroulés entre 1975 et 1978 et qui ont abouti à un arrêt de la Cour d'appel de Liège suspendant le prononcé de la condamnation que les actes attaqués sont motivés.

»De même, en ce qui concerne le comportement du requérant, plus aucune observation n'a été formulée après la mi-décembre 1985.

»Le seul élément nouveau survenu depuis cette date est la délivrance par Monsieur Bernard des formulaires C4.

»Or, comme cela a déjà été rappelé, la délivrance de ces documents ne constitue nullement un acte fautif du requérant qui avait, au contraire, l'obligation de remettre ce formulaire aux intéressés.

»Il en résulte que les décisions prises à son égard reposent sur des motifs inexacts et sont donc illégales.

»En outre, les décisions prises paraissent bien devoirs' assimiler à des sanctions disciplinaires, sans que la procédure n'ait été respectée.

»A cet égard, le requérant fait valoir que les parties adverses ont méconnu les articles 12 et suivants de l'arrêté du Régent du 30 avril 1947 qui règle précisément les sanctions disciplinaires et la procédure à suivre.

»Enfin, et eu égard aux raisons invoquées pour ne pas renouveler le mandat du requérant, cette décision aurait dû être précédée de l'audition de M. Bernard.

»Les actes attaqués reposent donc sur une erreur ou une insuffisance des causes et des motifs et ont été pris en méconnaissance des formes substantielles et des principes généraux du droit, notamment du droit d'être entendu avant la prise de toute mesure individuelle»;

Considérant que, pour les raisons exposées à propos du quatrième et surtout du cinquième moyens, le comportement personnel du requérant est juridiquement étranger à la décision prise, même s'il se peut qu'en fait ce comportement l'ait influencée dans une mesure d'ailleurs indéterminable; que le Conseil d'Etat ne pourrait en effet retenir ce moyen sans consacrer un droit inexistant soit à une nomination définitive, soit au maintien d'une situation temporaire illégale; que le moyen manque en droit,

(Rejet - dépens à charge du requérant).

N° 33.266

ARRET du 20 octobre 1989 (VIe Chambre) MM. Tapie, Président du Conseil d'Etat, Closset et Martens, rapporteur, et Kreins, auditeur.

NABAVI c/ Université libre de Bruxelles (Mes Maussion et Simont)

I. ENSEIGNEMENT ET SCIENCES -Enseignement universitaire - Universités libres - Etudiants ~ Examen (1 à 3)

II. COMPETENCE DU CONSEIL D'ETAT - Contentieux de l'annulation - Actes des autorités administratives (1 et 2)

1. Les lois coordonnées sur la collation des grades académiques et le programme des examens universitaires ont attribué aux universités, quelle que soit la forme juridique qui leur ait été donnée, donc même quand il s'agit d'établissements de droit privé, la compétence exclusive, dans l'intérêt général, de conférer des grades académiques assortis de certains

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BlBUùTHÈQUE

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effets juridiques tels que le droit d'exercer une profession déterminée. Les décisions prises par les organes d'une université en matière de délivrance de diplômes académiques dans le cadre de leurs attributions légales, produisent à l'égard des tiers des effets juridiques impératifs. De telles décisions sont dès lors soumises au contrôle du Conseil d'Etat.

2. Si les diplômes scientifiques ne confèrent pas les droits inhérents aux diplômes légaux sauf les exceptions prévues par la loi, les grades scientifiques sont protégés par l'article 1er de la loi du 11 septembre 1933. Dans la loi du 27 juillet 1971, il n'est fait aucune distinction entre les études selon qu'elles ont pour objet l'obtention d'un diplôme légal ou d'un diplôme scientifique. L'organisation des études est la plupart du temps identique. Dans la majorité des cas, les diplômes scientifiques ont des effets comparables à ceux des diplômes légaux.

Il s'ensuit que la protection accordée aux étudiants qui font des études sanctionnées par un diplôme légal ne peut être refusée à ceux qui font des études qui, à de nombreux égards, sont également reconnues par les autorités publiques même si elles n'ont pas tous les effets qui s'attachent aux diplômes légaux. Les décisions prises en la matière par les organes des universités libres sont soumises au contrôle du Conseil d'Etat.

3. La décision qui déclare irrecevable un travail déposé en vue de l'obtention d'un doctorat spécial doit être annulée lorsque la partie adverse n'a fourni aucun élément qui permettrait au Conseil d'Etat de contrôler les motifs qui ont amené le jury à estimer que la thèse ne répondait pâs aux exigences scientifiques de l'université.

III. COMPETENCE DU CONSEIL D'ETAT - Contentieux de l'indemnité - Compétence résiduelle du Conseil d'Etat - Responsabilité aquilienne des pouvoirs publics

Une demande d'indemnité fondée sur une faute qui aurait été commise par la partie adverse n'est pas de la compétence du Conseil d'Etat.

IV. PROCEDURE - Règles spéciales à la requête en indemnité - Requête préalable en indemnité - Nécessité d'une requête préalable

La demande d'indemnité n'est pas recevable, à défaut d'avoir été précédée de la requête préalable prévue par l'article 11, alinéa 2, des lois coordonnées du 12 janvier 197 3.

Vu la requête introduite le 23 juillet 1985 par Seyfedine Nabavi qui demande l'annulation de la décision de la Faculté de médecine et de pharmacie de l'Université libre de Bruxelles déclarant irrecevable le travail qu'il avait déposé en vue de l'obtention d'un doctorat spécial, décision portée à sa connaissance par une lettre du président de la faculté du 29 mai 1985;

Considérant que les faits de la cause se résument comme suit:

1. Le 12 février 1982, Seyfedine Nabavi, de nationalité iranienne, docteur en médecine diplômé de­l'Université de Nancy, demande à être admis au doctorat spécial en cardiologie (grade scientifique) à la Faculté de médecine de l'Université libre de Bruxelles. Il est autorisé à s'inscrire le 11 mars 1982. Il dépose une thèse intitulée: «L'effet bénéfique de l'exercice physique chez les patients atteints de cardiopathies ischémiques en Iran».

2. Le 27 octobre 1982, la commission spéciale de la faculté constitue une commission chargée de juger la thèse du requérant. Elle comprend quatre professeurs et deux experts étrangers à la faculté qui siègeront avec voix consultative.

3. Le 3 décembre 1982, le président de la commission écrit au président de la faculté que, selon les membres de la commission, ce travail n'est pas recevable et qu'il n'y a pas lieu d'en prévoir une défense privée.

Il écrit notamment que «la médiocrité générale de ce travail ne permet pas de le prendre en considération pour l'obtention d'un titre universitaire».

4. A la fin de l'année 1983, le requérant, qui a remanié sa thèse, prend une nouvelle inscription. Une commission est constituée le 18 janvier 1984. Elle entend la défense privée le 15 mars 1984 et conclut comme suit:

«La commission a estimé que ce travail n'était pas recevable, tant au point de vue de sa conception que de sa méthodologie et de sa conclusion; elle a estimé insuffisantes les réponses du candidat aux questions posées».

5: Le 28 mai 1984, le requérant introduit une nouvelle version de sa thèse et prend une nouvelle inscription.

6. Le 12 décembre 1984, la commission spéciale décide que le requérant doit être entendu. Le 19 février 1985, la commission désignée par la faculté entend la défense du requérant et conclut comme suit: «Le jury a estimé, à l'unanimité, que ce mémoire n'était pas recevable sur le plan méthodologique et statistique et a jugé la défense orale tout à fait insuffisante». Cette décision est notifiée au requérant le 11 mars 1985.

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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7. Le 29 mai 1985, le président de la faculté écrit dans les termes suivants au requérant, qui a déposé une nouvelle version de sa thèse:

<<.!'ai le regret de vous faire savoir que la faculté, après avoir entendu l'avis d'experts, a décidé de l'irrecevabilité du nouveau travail que vous avez déposé en vue de l'obtention du doctorat spécial, estimant que ce travail ne répond pas aux exigences scientifiques de l'Université libre de Bruxelles».

Cette décision constitue l'acte attaqué;

Considérant qu'il convient de s'interroger d'office sur la compétence du Conseil d'Etat;

Considérant que les lois coordonnées sur la collation des grades académiques et le programme des examens universitaires ont attribué aux universités - quelle que soit la forme juridique qui leur ait été donnée, donc même quand il s'agit d'établissements de droit privé - la compétence exclusive, dans l'intérêt général, de conférer des grades académiques assortis de certains effets juridiques tels que le droit d'exercer une profession déterminée; que les décisions prises par les organes d'une université en matière de délivrance de diplômes académiques dans le cadre de leurs attributions légales, produisent à l'égard des tiers des effets juridiques impératifs; que de telles décisions sont dès lors soumises au contrôle du Conseil d'Etat;

Considérant certes qu'en vertu de l'article 3 de la loi du 28 avril 1953 sur l'organisation de l'enseignement universitaire de l'Etat, modifiée par les lois des 21 mars 1964, 9 avril 1965 et 28 mai 1971, les diplômes scientifiques ne confèrent pas les droits inhérents aux grades légaux, sauf les exceptions prévues par la loi; que toutefois les grades scientifiques sont protégés par l'article 1er de la loi du 11 septembre 1933 sur la protection des titres d~enseignement supérieur; que dans la loi du 27 juillet 1971 sur le financement et le contrôle des institutions universitaires, il n'est fait aucune distinction entre les études selon qu'elles ont pour objet l'obtention d'un diplôme légal ou d'un diplôme scientifique; que l'organisation des études est la plupart du temps identique; que, dans la majorité des cas, les diplômes scientifiques ont des effets comparables à ceux des diplômes légaux; qu'il s'ensuit que la protection accordée aux étudiants qui font des études sanctionnées par un diplôme légal ne peut être refusée à ceux qui font des études qui, à de nombreux égards, sont également reconnues par les autorités publiques même si elles n'ont pas tous les effets qui s'attachent aux diplômes légaux; que le Conseil d'Etat est compétent de ce point de vue;

Considérant que, dans son mémoire ampliatif, le requérant préç;ise qu'il demande l'annulation de la décision attaquée «avec toutes ses conséquences de droit et notamment (la condamnation du) défendeur à (lui) payer une somme d' 1.000.000 de francs belges»; qu'une telle demande, en ce qu'elle se fonde sur une faute qui aurait été commise par la partie adverse, n'est pas de la compétence du Conseil d'Etat; qu'à supposer qu'elle poursuive la réparation d'un dommage exceptionnel au sens de l'article 11 des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées le 12 janvier 1973, la demande est irrecevable pour n'avoir pas été précédée de la requête préalable prévue au deuxième alinéa de l'article 11;

Considérant que, par son moyen unique, le requérant soutient que la décision attaquée est entachée d'excès de pouvoir et fait valoir qu'il est «tout à fait regrettable qu'une telle décision soit prise sans que les motifs ayant présidé à celle-ci soient clairement exposés»;

Considérant que le «Règlement du doctorat spécial», adopté par l'Université libre de Bruxelles le 11 juillet 1936, dispose comme suit en son article 2:

«L'examen pour le grade de docteur spécial comprend:

»1° La présentation d'une dissertation, travail original constituant une contribution au progrès de la science, et de trois thèses ou questions accessoires.

»Les sujets de la dissertation et des thèses ou questions accessoires sont choisis librement par le récipiendaire.

»La dissertation ne peut avoir été soumise dans son ensemble à l'appréciation d'une société savante ou d'un jury; elle ne peut avoir été mise en vente ni répandue dans le public en nombreux exemplaires.

»2° La défense devant le jury de la dissertation et des thèses ou questions y annexées d'abord en séance privée ensuite en séance publique.

»3° Une leçon orale sur un sujet en rapport avec celui de la thèse et indiqué par le jury»;

que, selon l'article 4, trois jours au moins et un mois au plus après la date du dépôt de la thèse, la faculté se réunit pour statuer sur la «recevabilité de la requête» et désigne pour l'apprécier une commission d'examen composée de trois ou cinq professeurs ou chargés de cours auxquels la faculté peut adjoindre des personnalités étrangères à la faculté ou à l'université, qui interviennent à titre consultatif; qu'enfin, selon l'article 5:

<<Au cours de la même séance et dans les conditions pévues à l'article précédent, la f acuité peut décider que la commission prévue ci-dessus, mais obligatoirement composée de cinq professeurs ou chargés de cours, sera constituée en jury substitué à la faculté dans les attributions conférées à celle-ci par les articles suivants du présent règlement ... »;

Considérant que, bien que la partie adverse ait parfois utilisé le terme de recevabilité, il se dtiduit des documents versés au dossier administratif que, pour apprécier les trois premières versions de la thèse du requérant, elle a chaque fois agi selon la procédure décrite à l'article 5 du règlement; que, selon les déclaration$ faites à

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l'audience, c'est en vertu de l'article 4 qu'a été prise la décision relative à la quatrième version et qui constitue l'acte attaqué;

Considérant que le dossier administratif comporte, pour unique document relatif à la décision attaquée, la copie de la lettre adressée au requérant le 29 mai 1985; qu'il ne contient pas le procès-verbal de la réunion de la faculté statuant sur la recevabilité de la requête et désignant la commission d'examen chargée d'apprécier la thèse du requérant; qu'il ne comprend pas davantage un document quelconque relatif à l'avis des experts dont il est fait état dans la lettre du 29 mai 1985; qu'ainsi la partie adverse n'a fourni aucun élément qui permettrait au Conseil d'Etat de contrôler les motifs qui l'ont amenée à estimer que la thèse du requérant ne répondait pas aux exigences scientifiques de l'Université libre de Bruxelles; que les appréciations émises lors de l'examen des trois premières versions ne peuvent pallier cette absence de motifs puisque la partie adverse a permis au requérant d'en présenter une quatrième et qu'elle l'a soumise à l'examen d'experts dont elle ne précise pas autrement l'identité ni le mode de désignation ni même les motifs de la conclusion négative;

Considérant que le moyen est fondé,

(Annulation de la décision de la Faculté de médecine et de pharmacie de l'Université libre de Bruxelles, notifiée le 29 mai 1985, déclarant irrecevable le travail qu'avait déposé Seyfedine Nabavi en vue de l'obtention d'un doctorat spécial - rejet de la demande pour le surplus - dépens à charge de la partie adverse).

N° 33.267

ARRET du 20 octobre 1989 (VIe Chambre) MM. Tapie, Président du Conseil d'Etat, rapporteur, Martens et Hanotiau, conseillers, et Quintin, auditeur.

MOMBEECK (Me Lefèvre) c/ Commune de Bruxelles-Sainte-Agathe (M. Baert) et Région de Bruxelles-Capitale

PROCEDURE - 1° Requête - Objet - Disparition en cours d'instance - Improbation de l'acte attaqué; - 2° Non-lieu de statuer; - 3° Dépens

Le recours devient sans objet lorsque l'acte attaqué est improuvé en cours d'instance par l'autorité de tutelle. Il n'y a pas lieu de statuer.

Il ne résulte pas de l'irrecevabilité du recours prématuré que le requérant doive supporter la charge des dépens car la brièveté du délai de recours justifie que, même dans le doute sur le caractère exécutoire de l'acte qu'il estime lui faire grief, un requérant dépose une requête en annulation à titre conservatoire.

Il ne peut être imposé au Conseil d'Etat, saisi d'un recours qui a perdu son objet, de procéder à l'examen du fondement de ce recours à seule fin de statuer sur les dépens.

Il suffit de constater que l'autorité de tutelle a refusé d'approuver la délibération attaquée en raison de diverses illégalités dont elle l'a jugée entachée, pour en déduire que les dépens doivent être supportés par l'auteur de l'acte improuvé. Peu importe que, parmi les illégalités retenues dans la motivation de l'arrêté de l'autorité de tutelle, ne figurent pas celles que le requérant avait invoquées, cette motivation n'impliquant pas a contrario que l'autorité de tutelle n'aurait pas pu fonder sur celles-ci son refus d'approbation.

Vu la requête introduite le 18 avril 1988 par Michel Mombeek, qui déclare agir en qualité de membre effectif de la délégation syndicale de la Centrale générale des Services publics, représentée dans le comité particulier de négociation créé auprès de la Commune de Berchem-Sainte-Agathe, et qui demande l'annulation des actes administratifs suivants:

1. la délibération du 11 février 1988 au Conseil communal de Berchem-Sainte-Agathe, relative au statut administratif du personnel de la police;

2. l'arrêté royal de date inconnue portant approbation de la délibération précitée du 11 février 1988;

Considérant, sur la fin de non-recevoir soulevée par l'Etat belge, actuellement la Région de Bruxelles­Capitale, qu'un arrêté royal du 3 juin 1988 a improuvé la délibération du 11février1988 du Conseil communal de Berchem-Sainte-Agathe, relative au statut administratif du personnel de police, c'est-à-dire l'acte attaqué en premier lieu; qu'il s'ensuit que le recours est devenu sans objet, ainsi que le requérant et la commune en conviennent dans leur dernier mémoire;

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.267

Arrêts Nos 33.264 à 33.277

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Considérant, quant aux dépens, que la deuxième fin de la requête montre que, lorsqu'il a introduit celle-ci, le requérant croyait que la délibération du 11 février 1988 avait fait l'objet d'un arrêté royal d'approbation; que cette erreur l'a conduit à faire un recours prématuré, donc irrecevable; qu'il ne résulte toutefois pas de cette irrecevabilité qu'il doive supporter la: charge des dépens car la brièveté du délai fixé par l'article 4 de l'arrêté du Régent du 23 août 1948 déterminant la procédure devant la section d'administration du Conseil d'Etat justifie que, même dans le doute sur lé caractère exécutoire de l'acte qu'il estime lui faire grief, un requérant dépose une requête en annulation à titre conservatoire;

Considérant qu'il ne peut être imposé au Conseil d'Etat, saisi d'un recours qui a perdu son objet, de procéder à l'examen du fondement de ce recours à seule fin de statuer sur les dépens; qu'il suffit en l'espèce de constater que l'autorité de tutelle a refusé d'approuver la délibération attaquée en raison de diverses illégalités dont elle l'a jugée entachée, pour en déduire que les dépens doivent être supportés par la commune, auteur de ces illégalités; qu'il importe peu, à cet égard, que, pa1mi les illégalités retenues dans la motivation de l'arrêté royal du 3 juin 1988, ne figurent pas celles que le requérant avait invoquées, cette motivation n'impliquant pas a contrario que l'autorité de tutelle n'aurait pas pu fonder sur celles-ci son refus d'approbation;

(Non lieu de .statuer - dépens à charge de la Commune de Berchem-Sainte-Agathe).

N° 33.268

{., ARRET du 20 octobre 1989 (VIe Chambre) MM. Tapie, Président du Conseil d'Etat, rapporteur, Martens et Hanotiau, conseillers, et Bouvier, auditeur.

DELVAUX (Me Joly) c/ Régie des postes

I. AGENTS DE L'ETAT - Cessation des fonctions - Démission d'office - Agent négligeant de reprendre son service

II. SERVICE DE SANTE ADMINISTRATIF - Règlement du Service de santé administratif

En l'espèce, en prenant prétexte de la violation du règlement, d'ailleurs illégal, du Service de santé administratif pour s'abstenir d'examiner si un agent, qui souffrait à l'époque de troubles psychiques dont la réalité et la gravité sont attestées par plusieurs pièces du dossier, ne justifiait pas d'un motif valable de ne pas avoir repris son service, l'autorité fait une fausse application de l'article 112, 3°, de l'arrêté royal du 2 octobre 1937.

Vu la requête introduite le 29 juin 1988 par Jacques Delvaux qui demande l'annulation de l'arrêté ministériel du 3 mai 1988 en ce qu'il le démet d'office et sans préavis de ses fonctions d'agent des postes de première classe au 24 décembre 1987;

Considérant que les faits de la cause peuvent être résumés comme suit:

1. Absent depuis le 13 octobre 1987, le requérant reste en défaut de répondre à deux télégrammes de service envoyés les 19 et 20 suivants, ainsi qu'à un envoi recommandé du 20 octobre, d'ailleurs non réclamé, par lesquels il est invité à reprendre son service ou à se justifier.

La période d'absence du 13 au 23 octobre est, dans les jours qui suivent son expiration, médicalement justifiée avec la validation du Service de santé administratif (S.S.A.).

2. La période d'absence du 24 octobre au 2 novembre 1987 est couverte par un certificat médical validé par le S.S.A. et reçu le 29 octobre par la partie adverse.

Il en va de même pour les périodes suivantes:

- du 4 au 18 novembre: validation du S.S.A. reçue le 6 novembre;

- du 19 au 28 novembre: validation du S.S.A. reçue le 25 novembre;

- du 29 au 8 décembre: validation du S.S.A. reçue le 23 décembre.

3. Le 9 décembre 1987, le requérant est toujours absent. Il ne réserve aucune suite au télégramme de service du 15 suivant et ne réclame pas l'envoi recommandé le lendemain, par lequel il est invité à reprendre le service ou à se justifier.

Le 22 décembre 1987, la partie adverse reçoit une justification de l'intéressé ainsi que le formulaire S.S.A. 1 validé. Le requérant est ainsi couvert du 9 au 23 décembre.

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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4. Le 24 décembre 1987, un télégramme de service attire l'attention du requérant sur son «absence illégale» à partir de ce jour. Il n'y donne pas suite, pas plus qu'il ne réclame l'envoi recommandé du 28 décembre qui l'invite «une dernière fois» à reprendre son service ou à se justifier et lui communique le contenu de l'article 112, 3° et 4°, de l'arrêté royal du 2 octobre 1937.

5. Le 5 janvier 1988, la partie adverse interroge le centre médical de Jambes afin de savoir si celui-ci n'est pas en possession d'un certificat médical concernant le requérant, absent sans justification depuis le 24 décembre. Un rappel est. adressé le 12 janvier.

6. Le 13 janvier 1988, le requérant justifie son absence pour une période de 20 jours à partir du 15 décembre 1987.

7. Le 14 janvier 1988, le centre médical de Jambes informe la partie adverse qu'il valide le certificat médical relatif à la période de 20 jours visée ci-avant, point 6.

Le même jour, par mention manuscrite sur la lettre reçue de la partie adverse le 5 janvier, il fait savoir à celle-ci: «Nous avons 15 jours du 4 novembre 1987, rien depuis lors».

8. Le 15 janvier 1988, la partie adverse s'adresse au centre médical de Jambes dans ces termes:

«Nous vous informons quel' agent des postes Delvaux Jacques n° médical 515 867 est absent irrégulièrement et sans motif valable depuis le 24 décembre 1987. De ce fait, il ne doit plus être considéré comme faisant partie du personnel de la Régie des Postes. Une proposition de démission d'office est introduite. En conséquence, le certificat médical que vous nous avez fait parvenir, le 13 janvier 1988, ne peut être pris en considération (20 jours du 15 décembre 1987). 1l en est de même pour les certificats médicaux qui pourraient encore vous parvenir sauf exceptionnellement et pour des raisons bien déterminées».

9. Le 19 janvier 1988, le centre médical de Jambes confirme à la partie adverse avoir reçu le certificat de 20 jours à partir du 15 décembre 1987, le 13 janvier 1988.

10. Par une note interne du 21 janvier 1988, l'inspecteur de la distribution Noël propose que le requérant soit démis d'office et sans préavis, Il précise notamment: <<La réponse fournie, le 19 janvier 1988, par le S.S.A. montre clairement que l'agent des postes Delvaux est en absence irrégulière depuis le 24 décembre 1987, c'est-à­dire plus de 10 jours» Cette proposition est appuyée par le directeur régional des postes qui cite l'article 112, 3°, du statut des agents de l'Etat à titre de fondement juridique et précise que le certificat litigieux n'a pas été accepté par le percepteur principal parce qu'il a été envoyé plus de 10 jours après le début de l'absence.

11. Par recommandé non réclamé du 27 janvier 1988, la partie adverse a voulu avertir le requérant que le certificat litigieux n'était pas pris en considération, qu'il serait démis d'office et qu'il ne pouvait plus reprendre son service.

12. Le 28 janvier 1988, le requérant introduit un certificat médical, cependant non validé par le S.S.A., justifiant son absence pour 28 jours à partir du 3 janvier. Il avise également la partie adverse de ce qu'il rentrera en fonctions le 31 janvier 1987 (lire: 1988).

Ainsi qu'il résulte des documents joints à la requête, le requérant a été hospitalisé à la clinique Saint-Luc à Bouge du 3 au 28 janvier 1988.

13. Interrogé sur la validité du certificat litigieux, l'inspecteur général Debeffe est d'avis le 16 février 1988 que l'absence du requérant était irrégulière car il ne s'est pas conformé au règlement du S.S.A.

14. Sur proposition de l'administrateur général, le Secrétaire d'Etat aux Postes, Télégraphes et Téléphones prend l'acte attaqué le 3 mai 1988. Il est notifié, le 16 mai, à l'intéressé qui refuse d'en accuser réception. Une nouvelle notification - semble-t-il - est faite par la voie recommandée le 25 mai.

L'acte attaqué se fonde notamment sur les articles 66, § 1er, et 112, 3°, du statut des agents de l'Etat, ainsi que sur la considération selon laquelle l'agent a négligé, sans motif valable, de reprendre son service le 24 décembre 1987 à l'expiration d'un congé de maladie. Il dispose, en son article 3:

«Delvaux Jacques( .. .) est démis d'office et sans préavis de ses fonctions à la date du 24 décembre 1987»;

Considérant que le requérant prend un moyen unique de la violation de l'article 112, 4°, de l'arrêté royal du 2 octobre 1937 portant le statut des agents de l'Etat; qu'il expose que le motif de son absence était valable puisqu'il était victime d'une décompensation psychique majeure qui l'a placé dans un état tel qu'il a omis de veiller à sa situation administrative et ainsi de remettre le certificat médical ou les certificats médicaux nécessaires; qu'à l'appui de son affirmation, il produit un rapport d'expertise dressé par le Docteur Goffaux, le 27 avril 1988, selon lequel «ladite décompensation phychique grave empêchait toute activité professionnelle dans la deuxième partie de décembre 1987 et en janvier 1988»;

Considérant que la partie adverse répond que l'agent ne s'est pas conformé aux dispositions du règlement du Service de santé administratif et que son absence a donc été considérée comme irrégulière, qu'il a dès lors été démis d'office sur la base de l'article 112, 3°, du statut des agents de l'Etat pour avoir négligé de reprendre son service après une absence pour maladie;

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.268

Arrêts Nos 33.264 à 33.277

Page 14

Considérant que l'arrêté royal du 2 octobre 1937, rendu applicable au personnel de la Régie des Postes par l'article 20 de la loi du 7 juillet 1971 portant création de cette régie, dispose notamment comme suit en son article 112:

«Sont d'office et sans préavis démis de leurs fonctions:

»( ... );

»3° ceux qui, après une absence autorisée, négligent, sans motif valable, de reprendre leur service;

»4° ceux qui, sans motif valable, abandonnent leur poste et restent absents pendant plus de dix jours»;

Considérant que la décision attaquée a fait application du 3° et non du 4° de l'article; qu'il y a lieu d'interpréter le moyen unique de la requête comme invoquant la violation du 3°, en ce que ce n'est pas «sans motif valable» que le requérant s'est abstenu de reprendre son service après une absence autorisée;

Considérant qu'il ressort de l'exposé des faits de la cause que les absences du requérant ont été couvertes jusqu'au 23 décembre 1987 par des certificats médicaux dont la partie adverse n'a pas contesté la validation par le Service de santé administratif, malgré certaines incohérences dans les écrits de celui-ci; que son absence aurait été couverte de même jusqu'au 31 janvier 1988 si la partie adverse n'avait pas elle-même, dans sa lettre du 15 janvier 1988 au centre médical de Jambes, refusé que soient pris en considération les certificats que ce centre avait reçus le 13 et le 28 janvier 1988; qu'en prenant prétexte de la violation du règlement, d'ailleurs illégal, du Service de santé administratif pour s'abstenir d'examiner si le requérant, qui souffrait à l'époque de troubles psychiques dont la réalité et la gravité sont attestées par plusieurs pièces du dossier, ne justifiait pas d'un motif valable de ne pas avoir repris son service le 24 décembre 1987, la partie adverse a fait une fausse application de l'article 112, 3°, de l'arrêté royal du 2 octobre 1937; que le moyen unique est fondé,

(Annulation de l'arrêté ministériel du 3 mai 1988 en ce qu'il démet d'office et sans préavis de ses fonctions d'agent des postes de première classe, Jacques Delvaux, à la date du 24 décembre 1987 - dépens à charge de la partie adverse).

N° 33.269

ARRET du 20 octobre 1989 (VIe Chambre) MM. Tapie, Président du Conseil d'Etat, rapporteur, Martens et Hanotiau, conseillers, et Dumont, auditeur général adjoint.

VAN DROOST (Mes Van Aelst et Lothe) c/ Ville de Namur (Me Fivet)

1. PROCEDURE - Requête - Délai - Prorogation et interruption - Circonstances qui peuvent interrompre le délai - Réclamation à l'autorité de tutelle

Le délai de recours en annulation d'un acte de l'autorité communale est interrompu par une réclamation adressée à l'autorité de tutelle. Le délai recommence à courir à l'expiration du délai dans lequel l'autorité de tutelle peut annuler cet acte.

II. PROCEDURE - Réouverture des débats

Vu la requête introduite le 2 septembre 1988 par Jean Van Droost, directeur de la Régie foncière de la Ville de Namur, qui demande l'annulation de la délibération du 20 avril 1988 du Collège des bourgmestre et échevins de la Ville .de Namur, lui infligeant la peine disciplinaire de la réprimande;

Considérant. d'office que le requérant a reçu notification de la décision attaquée le 18 mai 1988; que le délai de soixante jours dont il disposait depuis cette date pour introduîre le présent recours en annulation a été interrompu par la réclamation qu'il a adressée le 13 juin .. 1988 au Gouverneur de la Province de Namur et dont il a produit copie en annexe à son dernier mémoire; qu'il ressort de la pièce 41 du dossier de la Ville de Namur que celle-ci a transmis le 18 mai 1988 la délibération attaquée au gouverneur; qu'en supposant que la délibération soit normalement entrée le jeudi 19 au gouvernement provincial, le délai de trente jours ouvrables dont, en vertu de l'article 87bis de la loi communale, le gouverneur disposait pour l'annuler, serait venu à échéance le ier juillet 1988 de sorte que le délai du recours en annulation aurait eu lui-même pour date ultime le mardi 30 août 1988, avec la conséquence qu'introduit le 2 septembre 1988, le recours serait tardif; que cette différence de trois jours impose cependant de vérifier si la délibération attaquée est effectivement entrée au gouvernement provincial le 19 mai 1988, ce qu'aucune pièce du dossier ne permetde faire; qu'il y a lieu de rouvrir les débats,

(Réouverture des débats).

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.264 à 33.277 Page 15 N° 33.273

N°8 33.270 à 33.272 ARRETS du 20 octobre 1989 (VIe Chambre)

33.270 et 33.271 - HAVART et BORLEZ: désistement.

33.272- FETTWEIS = n° 33.125.

N° 33.273 ARRET du 20 octobre 1989 (VIe Chambre)

MM. Tapie, Président du Conseil d'Etat, rapporteur, Martens et Hanotiau, conseillers, et Rousseaux, premier auditeur.

DEHAN de NERCIAT c/ Commission communautaire française et Communauté française (Me Legros)

PROCEDURE - Requête - Délai - Prorogation et interruption - Circonstances qui peuvent interrompre le délai - Plainte à la Commission nationale permanente du pacte culturel

Il ressort de l'article 25 de la loi du 16 juillet 197 3 que la plainte à la Commission nationale permanente du pacte culturel suspend le délai de recours en annulation devant le Conseil d'Etat. Le nouveau délai de soixante jours prend cours à l'expiration du délai dans lequel l'avis aurait dû être donné, c'est-à-dire à dater de la réception de la plainte sauf si cette réception s'est située en juillet ou en août.

Vu la requête introduite le 13 mars 1989 par Jacqueline Dehan de Nerciat qui entend former une <<plainte contre la Commission française de la Culture et contre la Communauté française sur la base de l'article 6bis de la Constitution et de la loi du 16 juillet 1973, articles 1"', 13, 24 et 25»;

Vu l'ordonnance du 11 mai 1989 dispensant les parties des mesures préalables à l'instruction et ordonnant le dépôt au greffe du dossier et du rapport;

Considérant qu'après avoir demandé sans succès à l'Exécutif de la Communauté française et à la Commission française de la Culture de l' Agglomération de Bruxelles une subvention pour ses oeuvres, la requérante a, le 28 décembre 1987, saisi d'une plainte la Commission nationale permanente du pacte culturel, qui, le 24 octobre 1988, rendit un avis déclarant la plainte recevable mais non fondée; que la requérante déclare avoir reçu notification de cet avis le 16 décembre 1988;

Considérant, sur la fin de non-recevoir déduite par la Communauté française de la tardiveté de la requête, que la loi du 16 juillet 1973 garantissant la protection des tendances idéologiques et philosophiques dispose comme suit en son article 25, alinéas 2 et 3:

«Lorsque la partie plaignante dispose d'un recours en annulation devant la section d'administration du Conseil d'Etat quant aux faits faisant l'objet de sa plainte, le délai imparti pour le dépôt de sa requête en annulation est suspendu.

»La partie plaignante dispose d'un nouveau délai de 60 jours pour saisir le Conseil d'Etat, prenant cours à l'expiration du mois qui suit la notification de l'avis de la commission ou à l'expiration du délai dans lequel l'avis aurait da être donné»;

Considérant que le «délai dans lequel l'avis aurait da être donné» était, aux termes de l'article 24, § 2, alinéa 2, de la même loi, de soixante jours à dater de la réception de la plainte sauf si cette réception s'était située en juillet ou en août; qu'en l'espèce, la commission avait été saisie de la plainte de la requérante le mardi 29 décembre 1987 au plus tard; que le délai dont elle disposait venait donc à expiration le 27 février 1988, date à laquelle le nouveau délai du recours en annulation commençait à courir pour venir à échéance le 27 avril 1988; qu'introduite le 13 mars 1989, la requête est tardive et donc irrecevable,

(Rejet - dépens à charge de la requérante).

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.274

N° 33.274

ARRET du 20 octobre 1989 (IIIe Chambre)

Arrêts Nos 33.264 à 33.277

Page 16

MM. Van Aelst, président de chambre, François, rapporteur, et Mme Thomas, conseillers, et M. Hoeffler, premier auditeur.

A.S.B.L. COMITE DES QUARTIERS AUTOUR DU PRINCE D'ORANGE et BRIF­FEUIL (Me Neuray) c/ Commune d'Uccle (Me Slusny) et Région de Bruxelles­Capitale (Me Maussion) - Partie intervenante: S.A. IDAC (Mes Van Doosse­laere et Boccart)

::i tj I et II. (voir n° 32.953, II et ill, n° 1) III. BATISSE ET LOTISSEMENT - Recours au Conseil d'Etat - Moyen - Généralités IV. PROCEDURE - Règles spéciales à la demande de suspension - Moyen sérieux

1. En l'espèce, le moyen, invoqué à l'appui du recours en annulation d'un permis de bâtir, n'est pas suffisamment précis pour établir qu'une discrimination aurait été commise au détriment du requérant en faveur d'autres particuliers qui se seraient opposés en tant que voisins à un projet et dont les objections auraient triomphé contrairement à ce qu'il est advenu de celles du requérant alors qu'ils se seraient trouvés, quoiqu'en d'autres lieux, dans une situation identique à la leur.

2. En l'espèce, le requérant ne fait pas valoir qu'il aurait été victime d'une discrimi­nation par rapport au bénéficiaire du permis attaqué, en se heurtant à un refus pour une demande identique à celle que cet acte a accueillie.

Vu la demande de suspension introduite par l'association sans but lucratif «Comité des quartiers autour du Prince d'Orange» et André Briffeuil;

Considérant que par requête introduite le 6 septembre 1989 l'association sans but lucratif Comité des quartiers autour du Prince d'Orange et André Briffeuil poursuivent l'annulation du permis de bâtir délivré le 1°' août 1989 à la société anonyme ldac pour construire un immeuble commercial à l'angle de la chaussée de Waterloo et de la drève Pittoresque, ainsi que l'annulation de l'avis du fonctionnaire délégué du 17 juillet 1989 relatif à la même demande;

Considérant qu'il y a lieu d'examiner sans délai la demande de suspension de l'exécution de l'acte attaqué;

Considérant que l'immeuble litigieux est destiné à l'exposition, au stockage et au commerce de meubles, et à contenir un logement; que la parcelle où il est projeté de le construire est placée par le plan de secteur de l'agglomération de Bruxelles en zone d'habitation et en zone de servitude au pourtour du bois;

Considérant que l'avis favorable du fonctionnaire délégué, faute d'être en soi un acte exécutoire, n'est pas compris dans l'objet de la demande de suspension de l'exécution; qu'il est néanmoins de bonne administration de la justice d'entendre les observations de la Région wallonne;

Considérant que la requête en suspension fait valoir que le recours en annulation contient un moyen pris de la violation, notamment, de l'article 6 de la Constitution, en même temps que:

«... des articles 11 et 12 et 54 de la loi du 29 mars 1962 organique de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme, des articles 5 et 9 del' arrêté royal du 28décembre1972 relatif à la présentation et à la mise en oeuvre des projets de plans et des plans de secteur, de l'article 1.0.1 de l'arrêté royal du 28 novembre 1979 arrêtant le plan de secteur de l'agglomération de Bruxelles, du principe du bon aménagement et de l'excès de pouvoir,

»en ce que les actes attaqués autorisent la construction d'une swface commerciale de grande dimension en zone d'habitat, ·soit en dérogation aux dispositions du plan de secteur de l'agglomération de Bruxelles, en se bornant à retenir quelques modalités d'exécution qui ne sont pas susceptibles de rendre le bâtiment compatible avec la destination de la zone,

»alors que le préambule de l'arrêté royal précité du 28 novembre 1979, évoquant sÙr ce point l'avis de la commission consultative régionale bruxelloise d'aménagement du territoire rendu le 14 décembre 1977 avait notamment attiré l'attention sur la possibilité d'une violation du principe d'égalité lorsqu'il s'agissait de déroger au plan de secteur après publicité et concertation, le préambule précisant en particulier ce qui suit:

»«La commission souligne la possibilité d'arbitraire lors de la délivrance des permis de bâtir et de lotir à la suite d'une procédure de concertation, sans cependant proposer de solution concrète à ce problème.

»C'est pour répondre à cette crainte que diverses prescriptions du plan de secteur stipulent que le dépassement des seuils de superficie au-delà desquels les mesures particulières de publicité sont requises doit

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.264 à 33.277 Page 17 N° 33.275

être objectivement motivé et ne peut mettre en cause l'affectation principale» (supplément au Moniteur belge du 21 décembre 1979, p. 2);

»que la motivation de l'acte attaqué, extrêmement lacunaire en l'espèce ne permet pas de vérifier pour quelle raison objective les parties adverses ont autorisé une dérogation au plan de secteur à tel endroit, et alors que, précisément, d'autres projets situés dans l'agglomération de Bruxelles et dans des situations comparables sinon identiques, sont rejetés par les autorités administratives;

»que, pour éviter le grief d'inégalité, il aurait fallu que l'administration, soit adopte des circulaires indiquant avec précision dans quelles circonstances et moyennant quelles précautions il était permis de déroger aux disposi­tions du plan de secteur lorsqu'ils' agissait d'installer des surfaces commerciales ou des bureaux en zone d'habitat ou, à tout le moins, que l'administration justifie sa position, dans le cas d'espèce, par une motivation adéquate;

»qu'en particulier, l' Exécutif de la Région de Bruxelles-Capitale issu des élections du 18 juin 1989 a clairement manifesté son intention de limiter l'implantation des bureaux dans la région en faveur du logement, notamment pour des raisons de lutte contre la spéculation immobilière; qu'on comprend d'autant moins que, après pareil changement de politique, une dérogation aussi importante ait pu être accordée aux dispositions du plan de secteur et alors que, précisément, des demandes analogues introduites à la même époque ont reçu des sorts différents»;

que les requérants ajoutent: «Ce moyen est incontestablement sérieux au sens del' article 17, § 2, nouveau, des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat, dans la mesure où il est constant que l'administration réserve des sorts différents à des demandes identiques, sans justification valable dans la région de Bruxelles-Capitale, et qu'il n'y a, au jour du dépôt des présentes, pas de politique cohérente en matière de dérogations au plan de secteur lorsqu'il s'agit d'implanter des bureaux ou des commerces en zone d'habitat»;

Considérant que le moyen n'est pas suffisamment précis pour établir qu'une discrimination aurait été commise au détriment des requérants en faveur d'autres particuliers qui se seraient comme eux opposés en tant que voisins à un projet et dont les objections auraient triomphé contrairement à ce qu'il est advenu de celles des requérants alors qu'ils se seraient trouvés, quoiqu'en d'autres lieux, dans une situation identique à la leur; que les requérants ne font pas valoir non plus qu'ils auraient été victimes d'une discrimination par rapport au bénéficiaire du permis attaqué, en se heurtant à un refus pour une demande identique à celle que cet acte a accueillie; qu'en raison de la nécessité où ils se trouvent, et à laquelle ils ne répondent pas, de justifier d'un intérêt propre à leur moyen, il n'apparaît pas, en l'état présent du dossier, qu'un moyen sérieux fondé sur la violation de l'article 6 de la Constitution soit invoqué; que la demande de suspension ne satisfait pas à une des conditions qui doivent être réunies pour que la suspension puisse être accordée;

Considérant qu'il n'y a pas lieu d'examiner présentement le sérieux des autres griefs, puisque l'article 15 de la loi du 16 juin 1989 portant diverses réformes institutionnelles ne permet au Conseil d'Etat d'ordonner la suspension de l'exécution d'un acte qu'à la condition qu'un des moyens invoqués dans le recours, non seulement soit sérieux, mais soit fondé sur la violation des articles 6, 6bis ou 17 de la Constitution,

(Rejet de la demande de suspension du permis de bâtir délivré le 1er août 1989 à la société anonyme ldac).

'

ciAV 0-( N° 33.275

ARRET du 20 octobre 1989 (IIIe Chambre) MM. Van Aelst, président de G:hambre, rapporteur, François et Mme Thomas, conseillers, et M. Falmagne, premier auditeur (avis contraire)*.

ATIA (Me Pelgrims de Bigard) c/ Etat belge représenté par le Vice-Premier Ministre et Ministre de la Justice et des Classes moyennes (Me Scarcez)

ETRANGERS - Police des étrangers - Séjour de plus de trois mois - Droit à l'autorisation

Il ressort des articles 10, alinéa 1 a, 4°, et 15, 2°, de la loi du 15 décembre 1980 que la loi impose à l'étranger non C.E. deux conditions pour pouvoir bénéficier du séjour de plus de trois mois ou del' établissement, à savoir, d'une part, le mariage avec un étranger admis ou autorisé à séjourner dans le Royaume, d'autre part, la volonté de cohabitation avec ce dernier et dès le moment de l'entrée en Belgique la réalité de cette cohabitation. Les mots «qui vient vivre avec lui» de l'article 10, 4°, relatifs à un étranger qui n'est pas encore entré

*Selon l'avis, «après la célébration d'un mariage non suspect, suivi d'une cohabitation, il n'appartient pas à l'administration de faire vérifier si cette cohabitation est continuée, ni pour le motif d'une séparation des époux, qui ne la concerne pas, de retirer un permis de séjour». L'avis concluait dès lors à l'annulation de la décision attaquée.

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.275

Arrêts Nos 33.264 à 33.277

Page 18

en Belgique, ne signifient pas que le législateur se satisferait d'une déclaration d'intention suivie d'un instant de vie commune.

L'étranger qui, étant en séjour illégal au moment où il a contracté mariage, a vu régulariser sa situation à la suite de celui-ci, perd le bénéfice de cette régularisation lorsqu'il cesse de cohabiter avec son épouse.

Le ministre ne porte pas une atteinte indue à la vie privée de l'intéressé en vérifiant, ainsi que l'y invite la loi, la réalité de la cohabitation du requérant ave.c $On épouse.

Vu la requête introduite le 28 mai 1988 par Abderrahmane Atia, de nationalité marocaine, qui demande l'annulation de la décision de rejet de la demande en révision prise par le ministre le 10 mars 1988 et notifiée le 31 mars 1988;

Considérant que les faits sont les suivants:

- Le requérant est entré en Belgique, le 21 avril 1984, sous le couvert d'un passeport délivré le 28 janvier 1982 et d'un visa de l'ambassade de Belgique à Rabat du 19 avril 1984 valable pour un mois.

- Le 18 juin 1984, un ordre de quitter le territoire lui a été notifié au motif qu'il demeurait dans le Royaume au-delà du délai fixé.

- Le 7 juillet 1984, il a épousé une compatriote bénéficiant du droit d'établissement; celle-ci ayant déclaré qu'il s'agissait d'un mariage blanc arrangé par ses parents et que les époux vivaient séparés, une décision de refus de séjour avec ordre de quitter le territoire a été prise le 12 février 1985 sur la base de la motivation suivante:

«L'intéressé ne peut se prévaloir du droit de séjour consacré par l'article JO, 4°, de la loi du 15112180 du fait qu'il ne vit plus avec son épouse.»;

- Le requérant ayant demandé la révision de cette décision, la commission consultative des étrangers a émis l'avis, le 21 décembre 1987, que le refus était justifié et, le 10 mars 1988, a été prise la décision attaquée motivée comme suit:

«Considérant qu'il est acquis et non contesté qu'à la date du 8 février 1985 déjà, l'intéressé ne vivait pas ou plus avec son époùse; que la loin' a d'égard qu'à une situation de fait et non à la cause, toujours discutable, de la non-cohabitation; que les conditions légales du regroupement familial n'étaient pas réunies»;

Considérant que le requérant invoque la violation de l'article 10, 4°, de la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers en ce que la décision attaquée est fondée sur la non-cohabitation des époux alors que d'une part «les conditions légales du regroupementfamilial doivent être réunies au moment où celui qui en demande le bénéfice introduit sa demande, c'est-à-dire au moment de son mariage» et, d'autre part, la loi ne précise aucune durée de vie commune exigible pour l'application de cette disposition; qu'il invoque aussi la violation de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en ce que le ministre «ne pouvait faire reproche au requérant et arguer de modification intervenue dans la vie privée ultérieurement à la demande de séjour et indépendamment de la volonté du requérant»;

Considérant que l'article 10, quatrième alinéa, de la loi du 15 décembre 1980 dispose que:

«Sous réserve des dispositions des articles 9 et 12, sont de plein droit admis au séjour de plus de trois mois dans le Royaume ...

» ...

»4° le conjoint étranger d'un étranger admis ou autorisé à séjourner dans le Royaume ou autorisé à s'y établir, qui vient vivre avec lui ... ;»;

que l'article 15 dispose que« ... l'autorisation d'établissement doit être accordée ... 2°) au conjoint étranger d'un étranger autorisé à s'établir dans le Royaume, qui vit avec ce dernier ... »;

Considérant qu'il ressort de ces dispositions que la loi impose à l'étranger non C.E. deux conditions pour pouvoir bénéficier du séjour de plus de trois mois ou de l'établissement, à savoir, d'une part, le mariage avec un étranger admis ou autorisé à séjourner dans le Royaume, d'autre part, que la volonté de cohabitation avec ce dernier et dès le moment de l'entrée en Belgique la réalité de cette cohabitation; que les mots «qui vient vivre avec lui» de l'article 10, 4 °, relatifs à un étranger qui n'est pas encore entré en Belgique, ne signifient pas que le législateur se satisferait d'une déclaration d'intention suivie d'un instant de vie commune;

Considérant que le requérant, qui était en séjour illégal au moment où il a contracté mariage, a vu régulariser sa situation à la suite de celui-ci; qu'il a toutefois perdu le bénéfice de cette régularisation lorsqu'il a cessé de cohabiter avec son épouse; que la partie adverse n'a pas porté une atteinte indue à la vie privée du requérant en vérifiant, ainsi que l'y invitait la loi, la réalité de la cohabitation du requérant avec son épouse; que le moyen n'est pas fondé, '

(Rejet - dépens à charge du requérant).

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.264 à 33.277 Page 19

N° 33.276

ARRET du 20 octobre 1989 (Ille Chambre)

N° 33.276

MM. Van Aelst, président de chambre, rapporteur, François et Mme Thomas, conseillers, et M. Hoeffier, premier auditeur (avis en partie conforme)*.

ETAT BELGE représenté par le secrétaire d'Etat aux Pensions, adjoint au Ministre des Affaires sociales (Me Cahen) c/ Vanthuyne (Me Gérondal)

I. PENSIONS DE REPARATION - Contentieux - Commission d'appel - Intervention de l'Office médico-légal - Pouvoir d'appréciation de l'Office

S'il est vrai que, quant au degré d'invalidité, les commissions sont liées par les conclusions de!' Office médico-légal en vertu del' article 45, § 3, d, des lois coordonnées du 5 octobre 1948, en revanche, en ce qui concerne la relation entre le fait du service et!' affection, les conclusions de cet office ne constituent qu'une information pour les commissions qui conservent leur pouvoir souverain d'appréciation.

II et III. (voir n° 32.126, Il et Ill)

Vu la requête introduite le 31 mars 1988 par l'Etat belge, représenté par le Secrétaire d'Etat aux Pensions, qui demande l'annulation de la décision rendue par la commission d'appel des pensions de réparation le 13 janvier 1988 en cause de Gaston Vanthuyne;

Considérant que les faits sont les suivants:

- Gaston Vanthuyne, ancien prisonnier de guerre, bénéficiait, à la suite d'une décision ministérielle du 16 octobre 1953, d'une pension définitive calculée sur la base d'une invalidité de 25 p.c. en réparation de plusieurs affections jugées imputables à la captivité, spécialement une tachycardie, cette dernière invalidité étant évaluée à 10 p.c.

- Une demande en révision pour aggravation a été rejetée par décision ministérielle du 24 juin 1968 conformément à un rapport du 5 mai 1968 de l'Office médico-légal qui énonce notamment que la tachycardie constatée précédemment «n'existe plus».

- Une décision ministérielle du 22 avril 1980 a attribué à G. Vanthuyne l'invalidité forfaitaire de 10 p.c. prévue par l'article 8, 4°, des lois coordonnées sur les pensions de réparation, ce qui a porté son pourcentage d'invalidité de 25 à 35 p.c. à partir du 1er juillet 1980.

- Le 29 novembre 1985, G. Vanthuyne a introduit une demande en révision pour erreur de la décision du 24 juin 1968, demande rejetée en première instance mais accueillie par la décision attaquée du 13 janvier 1988 qui conclut que le pourcentage d'invalidité attaché à la tachycardie ne pouvait être supprimé en 1968 et qui porte le taux d'invalidité à 30 p.c. au 1er novembre 1967 et à 40 p.c. à partir du 1er juillet 1980. Cette décision est ainsi motivée:

<<Attendu que le collège médical d'appel estime que l'examen qui a précédé la décision de 1968 prise sur pièces était faussé à cause des médicaments qui ralentissaient le rythme cardiaque du requérant;

»Attendu, dès lors, que le pourcentage accordé antérieurement pour la tachycardie ne pouvait pas être supprimé en 1968;

»Attendu que la CAPR se rallie aux conclusions médicales;»;

Considérant que l'Etat prend un premier moyen de l'insuffisance de la motivation; qu'il expose:

« ... il y a lieu de remarquer que c'est seulement en octobre 1985, soit 17 ans après la décision ministérielle de 1968 que le Dr Legrand examine M. Vanthuyne. Dans son rapport, il signale qu'il persiste chez son patient de la tachycardie émotionnelle mais n'en décrit pas l'importance. En outre, il précise que la tachycardie est réduite par une thérapeutique médicamenteuse. Or, la C.A.P.R. admet l'idée qu'à l'époque, c'est-à-dire en 1968, une telle thérapeutique a pu être administrée sans qu'aucun document prouvant la réalité de ces soins ne figure au dossier.»;

Considérant que G. Vanthuyne répond que «la C.A.P.R. justifie à suffisance sa décision par référence à un avis de l' Office médico-légal», que «le requérant n'a soulevé devant la C.A.P.R. aucun argument que celle-ci n' auraÛ pas rencontré dans sa motivation»; qu'il soutient qu'il n'a pas cessé de souffrir de tachycardie depuis son retour de captivité et qu'il est impensable qu'elle se soit arrêtée temporairement en 1968;

Considérant que s'il est vrai que, quant au degré d'invalidité, les commissions sont liées par les conclusions de l'Office médico-légal en vertu de l'article 45, § 3, d), des lois coordonnées sur les pensions de réparation, en

*L'avis ne concluait qu'à l'annulation partielle, quant au taux d'invalidité pour la période du ier octobre 1967 au 1er janvier 1974.

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.276

Arrêts Nos 33.264 à 33.277

Page 20

revanche, en ce qui concerne la relation entre le fait du service et l'affection, les conclusions de cet office ne constituent qu'une information pour les commissions qui conservent leur pouvoir souverain d'appréciation;

Considérant que le Dr Legrand, sur le rapp01t duquel !'Office médico-légal s'est fondé pour rectifier ce qu'il considérait comme une erreur, se borne à affirmer le 21 octobre 1985 «qu'il persiste de l' extrasystolie et de la tachycardie émotionnelle nettement améliorées par les bêta-bloquants utilisés contre l'hypertension artérielle» et qu' «elle est actuellement masquée au repos par le traitement bêta-bloquant»; que toutefois, pour 1968, il n'existe au dossier aucun document établissant que G. Vanthuyne suivait une thérapeutique médicamenteuse destinée à réduire sa tachycardie; que la commission d'appel des pensions de réparation en décidant que l'examen de G. Vanthuyne en 1968 «était faussé à cause des médicaments qui ralentissaient (son) rythme cardiaque», alors que n'était pas rapportée la preuve de la réalité d'un tel traitement pour cette période, a excédé son pouvoir; que le moyen est fondé;

Considérant que la partie adverse est étrangère à l'erreur commise par la commission d'appel des pensions de réparation; qu'il y a lieu de mettre les dépens à charge de l'Etat belge,

(Annulation - transcription - renvoi - dépens à charge de l'Etat belge).

N° 33.277

ARRET du 20 octobre 1989 (IIIe Chambre) MM. Van Aelst, président de chambre, François, rapporteur, et Mme Thomas, conseillers, et M. Hoeffler, premier auditeur (avis contraire)*.

A.S.B.L. EL FATH (Me Gillardin) c/ Région de Bruxelles-Capitale (Mes Gillet et Lambert)

1. BATISSE ET LOTISSEMENT - Procédure administrative d'octroi des permis - Recours admi­nistratifs - Députation permanente - Décision: notification

II. PROCEDURE NON CONTENTIEUSE - Notification des actes - Compétence pour recevoir la notification - Tiers non mandaté

' Lorsque deux avocats se sont présentés devant la députation permanente comme étant l'un et l'autre mandataires du demandeur de permis et comme collaborant en cette qualité en faisant état d'un mandat qui leur avait été donné pour introduire et défendre un recours devant la députation permanente et non pour recevoir à la place du demandeur de permis l'arrêté statuant sur ce recours, c'est au demandeur lui-même en tout cas que l'arrêté de la députation permanente doit être notifié.

Vu la requête introduite le 17 décembre 1987 par l'association sans but lucratif El Fath qui poursuit l'annulation de l'arrêté royal du 18 septembre 1987 déclarant irrecevable le recours.introduit au nom de la requérante contre la décision du 26 juin 1986 de la députation permanente du conseil provincial du Brabant;

Considérant que l'association requérante s'est vu refuser par le collège des bourgmestre et échevins de Schaerbeek le permis de bâtir qu'elle avait demandé pour construire un centre culturel avec mosquée; qu'un recours introduit en son nom le 8 octobre 1985 devant la députation permanente contre ce refus a été rejeté le 26 juin 1986; que ce rejet ayant à son tour été attaqué, le Roi, par l'acte contre lequel la requête est dirigée, a déclaré le recours irrecevable pour tardiveté;

Considérant que la requérante prend un premier moyen de ce que l'arrêté de la députation permanente fut notifié à un autre destinataire que «le requérant»;

Considérant que le recours de l'association El Fath à la députation permanente a été signé pour la requérante par son conseil, l'avocat J. Gillardin; qu'en revanche la lettre d'envoi de ce recours, datée du 8 octobre 1985, est rédigée par l'avocat A. Jadoul, et signée pour lui par son confrère J. Gillardin dont le nom figure d'ailleurs à côté du sien, dans l'en-tête imprimé de cette lettre, parmi ceux de plusieurs avocats apparemment associés; que, dans cette lettre, l'avocat Jadoul déclare avoir été «chargé d'introduire» le recours et demande à être entendu; qu'aucun de ces deux documents ne mentionne d'élection de domicile; que, dans sa décision, la députation permanente vise le recours «introduit par Monsieur A. Jadoul, avocat» au nom de l'association El Fath, relate que le président de l'association et l'avocat J. Gillardin ont été entendus, et dispose qu'une expédition sera envoyée à A. Jadoul et,

* L'avis invoquait la foi due à l'acte d'introduction du recours à la députation permanente et l'usage administratif constant selon lequel la décision est notifiée au mandataire.

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.264 à 33.277 Page 21 N° 33.277

pour information, à diverses administrations; que la décision a été notifiée à l'avocat A. Jadoul qui a signé l'accusé de réception le 24 novembre 1986; que lui-même d'abord, le 16 janvier 1987, et J. Gillardin ensuite, le 13 février 1987, en ont demandé une copie envoyée le 26 février 1987; que l'avocat J. Gillardin a introduit le 24 mars 1987 contre l'arrêté de la députation permanente un recours que le Roi rejeta au motif que cet arrêté avait été notifié à A. Jadoul plus de trente jours avant l'introduction du recours;

Considérant qu'il ressort des faits exposés que les deux avocats se sont présentés devant la députation permanente comme étant l'un et l'autre mandataire d'El Fath et comme collaborant en cette qualité; qu'ils faisaient cependant état d'un mandat qui leur avait été donné pour introduire et défendre un recours devant la députation permanente, et non pour recevoir à la place de l'association l'arrêté statuant sur ce recours; que c'est donc à l'association elle-même en tout cas que l'arrêté de la députation permanente devait être notifié; que le moyen est fondé; ·

Considérant qu'il est sans intérêt d'examiner les autres moyens de la requête, faute qu'ils puissent conduire à une annulation plus étendue,

(Annulation de l'arrêté royal du 18 septembre 1987 déclarant irrecevable le recours introduit le 24 mars 1987 par M. J. Gillardin, au nom de l'association sans but lucratif El Fath, contre la décision du 26 juin 1986 de la députation permanente du conseil provincial du Brabant - dépens à charge de la Région de Bruxelles-Capitale).

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.281 et 33.282 Page 1 N° 33.281

N° 33.281

ARRET du 24 octobre 1989 (IIIe Chambre) MM. Van Aelst, président de chambre, François et Mme Thomas, rapporteur, conseillers, et M. Dumont, auditeur général adjoint.

C.P.A.S. SOIGNIES (Mes Saint Viteux et Blontrock) c/ Communauté française -Partie intervenante: Capelle (Me Daoût)

1. CENTRES PUBLICS D'AIDE SOCIALE - Séances du conseil de l'aide sociale - Publicité

II. PROCEDURE NON CONTENTIEUSE - Procédure collégiale - Publicité ou huis clos

Par l'exigence du huis clos prévue par l'article 31 de la loi du 8 juillet 1976 pour toutes les réunions du conseil de l'aide sociale, lequel statue le plus souvent sur des questions de personnes, le législateur a voulu garantir aux conseillers la faculté d'exprimer leur opinion et de voter à l'abri de toute pression et soustraire à la connaissance du public les affaires mettant en cause des personnes et des intérêts privés.

La sauvegarde de la liberté de parole et de vote des conseillers exige d'écarter de la séance du conseil lors de la discussion et du vote toutes les personnes qui n'en sont pas membres, sauf celles qui sont exceptées expressément par la loi.

Lorsqu'une procédure disciplinaire est instruite au cours d'une séance du conseil, la règle du huis clos s'impose non pour préserver la liberté de parole et de vote des conseillers, puisqu'ils ne délibèrent ni ne votent à ce moment, mais pour préserver le caractère secret de l'affaire, notamment dans l'intérêt de la personne en cause.

L'avocat, conseil du centre public d'aide sociale et invité par celui-ci à assister à l'audition d'un agent, est tenu au secret professionnel. Sa présence à cette seule audition ne viole pas la règle du huis clos.

Vu la requête introduite le 12 juillet 1988 par le centre public d'aide sociale de Soignies qui demande l'annulation de l'arrêté de !'Exécutif de la Communauté française du 6 mai 1988 improuvant la délibération du 29 juin 1987 par laquelle il avait infligé à Françoise Capelle, aide hospitalière, la peine disciplinaire de la suspension avec privation de traitement pour une durée de deux ans;

Vu la requête introduite le 24 août 1988, par laquelle Françoise Capelle demande à être reçue en qualité de partie intervenante;

Vu l'ordonnance du 2 septembre 1988 accueillant cette intervention;

Considérant que, le 25 mai 1987, le conseil de l'aide sociale du centre public d'aide sociale de Soignies, qui avait entamé une procédure disciplinaire à l'égard de Françoise Capelle, aide-hospitalière, l'a entendue sur les faits qui lui étaient reprochés; que cette audition s'est déroulée en présence du conseil de l'intervenante et de celui du centre public; qu'avant le début de l'audition, l'avocat de F. Capelle avait fait acter au procès-verbal «que la loi ne prévoit pas que le conseil de l'aide sociale se fasse assister par un conseil»; qu'après en avoir délibéré, le conseil de l'aide sociale avait décidé «d'admettre la présence de Me L. Blontrock durant l'audition de Madame Capelle»; que, le 29 juin 1987, le conseil de l'aide sociale a statué sur l'action disciplinaire et infligé à l'intervenante la peine de suspension avec privation de traitement pour une durée de.deux ans; qu'en ce qui concerne la présence de Me Blontrock à l'audition, la décision est motivée ainsi qu'il suit:

«Entendu celle-ci (F. Capelle) en ses moyens de défense assistée de son conseil, Maître François Daoût, avocat au barreau de Mons;

»Considérant que ce dernier a émis une objection à ce que soit présent à la séance du 25 mai 1987 l'avocat du C.P.A.S., Maître L. Blontrock, dont la présence a été décidée par le conseil de l'aide sociale;

»Considérant que cette objection n'est pas fondée, qu'en effet aucune disposition légale, y compris l'art. 31 de la loi organique du 8.7.1976, n'interdit au conseil de l'aide sociale statuant en matière disciplinaire de décider d'entendre des personnes qui ne sont pas membres du conseil et ce à titre de témoins, experts ou conseillers;»;

que, par arrêté du 20 aofit 1987, la députation permanente du conseil provincial du Hainaut a approuvé la délibération du conseil de l'aide sociale du 29 juin 1987;

Considérant que, le 3 novembre 1987, l'intervenante a pris, devant !'Exécutif de la Communauté française, le recours prévu par l'article 54 de la loi du 8 juillet 1976 organique des centres publics d'aide sociale; que l'arrêté

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.281

Arrêts Nos 33.281 et 33.282

Page 2

attaqué du 6 mai 1988 a accueilli le recours de F. Capelle et improuvé la délibération du conseil de l'aide sociale du 29 juin 1987; qu'il se fonde sur les motifs suivants:

«Considérant qu'il ressort du procès-verbal de son audition devant le conseil de l'aide sociale de Soignies, que Maître Blontrock assistait à celle-ci en qualité de conseil du centre public d'aide sociale;

»Considérant quel' article 31 de la loi du 8 juillet 1976 organique des centres publics d'aide sociale prévoit que les réunions du conseil de l'aide sociale se tiennent à huis clos;

»Considérant que la loi précitée prévoit expressément les personnes autres que les membres du conseil de l'aide sociale qui peuvent assister aux réunions de celui-ci, que la présence d'un avocat appelé à assister le conseil dans le cadre d'une procédure disciplinaire n'est pas envisagée;

»Considérant dès lors que la présence d'une personne extérieure constitue une violation de la loi et plus particulièrement de l'article 31,»;

Considérant que le centre requérant prend un moyen de la violation «des articles 31 et pour autant que de besoin 51 à 54 de la loi du 8 juillet 1976»; qu'il expose que «l'obligation du huis clos prévue par l'article 31 de la loi du 8 juillet 76 signifie uniquement que le public n'a pas accès à la séance mais n'interdit nullement au conseil d'inviter des personnes étrangères si leur présence paraît nécessaire ou utile et ce même en dehors des personnes expressément visées par la loi, à savoir en matière disciplinaire le membre du personnel concerné et son défenseur»; qu'il ajoute qu'«un C.P.A.S. comme toute autre personne a le droit de recourir aux conseils d'un avocat y compris quant au bon déroulement d'une action disciplinaire intentée à charge d'un membre du personnel ... ;» que le centre requérant fait observer que son avocat n'a pas participé à la délibération et n'était pas présent à la séance au cours de laquelle la sanction a été prononcée;

Considérant que la partie adverse répond que «la composition du conseil de l'aide sociale est déterminée par la loi et (qu' )il est prévu que ses réunions se tiennent à huis clos»; que «lorsque le législateur a voulu élargir la séance à d'autres personnes, il l'a expressément prévu», par exemple aux articles 26, 45 et 47 de la loi du 8 juillet 1976; qu'elle soutient que l'accès limité aux séances du conseil est rappelé par l'article 36, deuxième alinéa, de la loi qui impose le secret aux membres du conseil et à «toutes les autres personnes qui, en vertu de la loi assistent aux réunions du conseil ... »; que la partie adverse ajoute que «le requérant établit une distinction inexistante dans la loi» entre la participation à la séance du conseil et la participation à ses délibérations, l'article 31 de la loi ayant trait à la publicité des séances en général;

Considérant que l'article 31 de la loi du 8 juillet 1976 prévoit que toutes les réunions du conseil de l'aide sociale se tiennent à huis clos; que, par cette exigence imposée aux conseils de l'aide sociale qui statuent le plus souvent sur des questions de personnes, le législateur a voulu garantir aux conseillers la faculté d'exprimer leur opinion et de voter à l'abri de toute pression et soustraire à la connaissance du public les affaires mettant en cause des personnes et des intérêts privés; que la sauvegarde de la liberté de parole et de vote des conseillers exige d'écarter de la séance du conseil lors de la discussion et du vote toutes les personnes qui n'en sont pas membres, sauf celles qui sont exceptées expressément par la loi; que lorsqu'une procédure disciplinaire est instruite au cours d'une séance du conseil, la règle du huis clos s'impose non pour préserver la liberté de parole et de vote des conseillers, puisqu'ils ne délibèrent ni ne votent à ce moment, mais pour préserver le caractère secret de l'affaire, notamment dans l'intérêt de la personne en cause; que l'avocat, conseil du centre public d'aide sociale et invité par celui-ci à assister à l'audition d'un agent, est tenu au secret professionnel; que sa présence à cette seule audition ne viole pas la règle du huis clos énoncée à l'article 31 de la loi; que l'exécutif de la Communauté française a fondé sa décision sur une interprétation erronée de l'article 31; que le moyen est fondé;

Considérant qu'il n'y a pas lieu d'examiner les autres moyens de la requête, faute qu'ils puissent conduire à une annulation plus étendue,

(Annulation de l'arrêté de !'Exécutif de la Communauté française du 6 mai 1988 improuvant la délibération du 29 juin 1987 du conseil de l'aide sociale de Soignies infligeant à Françoise Capelle la peine disciplinaire de la suspension avec privation de traitement pour une durée de deux ans - dépens à charge de la partie adverse et de l'intervenante).

N° 33.282 ARRET du 24 octobre 1989 (IIIe Chambre)

COLIN et consort: désistement.

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.289 à 33.311 Page 1 N° 33.289

N° 33.289

ARRET du 25 octobre 1989 (VIe Chambre) MM. Tapie, Président du Conseil d'Etat, Martens et Hanotiau, rapporteur, conseillers, et Leroy, auditeur (avis contraire)*.

NOEL (Me Lagasse) c/ Caisse générale d'épargne et de retraite (C.G.E.R.) (Me Cambier)

1. PROCEDURE - Règles spéciales à la requête contre le silence de l'administration - Nécessité d'une mise en demeure

Le refus implicite de l'autorité de confier des attributions à un agent n'est pas un acte susceptible d'annulation lorsqu'il n'y a eu ni mise en demeure de !'autorité ni écoulement d'un délai de quatre mois à partir de celle-ci. Cette exception est d'ordre public.

II. AGENTS ET FONCTIONNAIRES PUBLICS - Signalement - Réclamation III. CONVENTIONS INTERNATIONALES - Convention de sauvegarde des droits de l'homme et

des libertés fondamentales

L'article 6, §1er, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne s'applique pas aux procédures relatives à l'attribution d'un signalement.

IV. AGENTS DE LA CAISSE GENERALE D'EPARGNE ET DE RETRAITE - Signalement (1 à 3) V. INTERET (POUR AGIR DEVANT LE CONSEIL D'ETAT) - Circonstances ayant une influence

sur l'intérêt - Décision ultérieure privant d'effet l'annulation de l'acte attaqué (1) VI. AGENTS ET FONCTIONNAIRES PUBLICS - Signalement - Contentieux (2 et 3) VII. PROCEDURE NON CONTENTIEUSE -1° Composition des collèges administratifs - Séances

- Impartialité (2); - 2 ° Droits de la défense - Assistance d'un conseil - Choix du conseil (3) VIII. AVOCATS - Droits et obligations - Exercice de la profession (3)

1. A la Caisse générale d'épargne et de retraite, la décision prise par le président sur recours de !'agent contre la décision attribuant à celui-ci un signalement se substitue à cette décision, que !'agent est dès lors sans intérêt à critiquer.

2. La composition (impartiale) d'un organe n'est pas seulement fonction du nombre de membres, mais aussi du grade de ceux-ci. A la Caisse générale d'épargne et de retraite, la décision sur recours contre le signalement d'un agent de rang 13, qui est prise par le président, !'est par un agent qui, dans la hiérarchie, est situé à un niveau supérieur à ceux qui composent !'organe ayant pris la première décision.

3. Aucune disposition législative ne garantit à !'ensemble des agents et fonctionnaires publics le droit de se faire assister par un avocat lorsqu'il leur est attribué un signalement «insuffisant». Sil' article 440 du code judiciaire dispose que «devant toutes les juridictions, sauf les exceptions prévues par la loi, seul les avocats ont le droit de plaider», le terme «juridictions» doit s'entendre des juridictions qui font partie du pouvoir judiciaire.

Mais le respect des droits de la défense est un principe général de droit qui est d'ordre public. Partout où les droits de la défense trouvent à s'exercer, la partie qui a le droit d'être entendue doit pouvoir être assistée de !'avocat qu'elle a choisi. li s'agit d'un corollaire inséparable de !'exercice du droit de défense auquel aucun règlement ne peut légalement porter atteinte.

En matière d'attribution de signalement, le respect de ce principe implique qu'à tout le moins au cours de la procédure qui précède immédiatement la décision del' autorité, !'agent puisse être assisté.

Dès lors spécialement que ce droit est reconnu par le règlement en vigueur de la Caisse générale d'épargne et de retraite qui permet à !'agent de se faire assister par un délégué syndical, aucun motif légalement admissible ne justifie qu'il ne puisse se faire

"' Selon l'avis, d'une part, les articles 439 et 440 du code judiciaire ne contèrent pas aux avocats le droit d'assister ou de représenter les clients devant les organes non juridictionnels et, d'autre part, «la disposition dépourvue d'équivoque de l'article 66bis (du statut des agents de la C.G.E.R.) ne semble ... contrevenir à aucune règle non écrite».

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.289

Arrêts Nos 33.289 à 33.311

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assister d'un avocat. En vertu de l'article 107 de la Constitution, le Conseil d'Etat doit écarter l'application d'un règlement qui lui enlève cette faculté.

Vu la requête introduite le 3 avril 1987 par Jacques Noël qui demande l'annulation:

«1. (du) signalement «insuffisant» qui lui a été infligé par décision de date inconnue de la partie adverse pour la période du 1er octobre 1985 au 30 septembre 1986;

»2. (du) refus de la partie adverse de confier des attributions au requérant depuis le début de février 1987»;

Considérant que les faits de la cause peuvent se résumer comme suit:

1. Agent de la C.G.E.R. depuis 1970, le requérant a été nommé au grade de chef de service en 1982.

Par décision du 2 mai 1985, le requérant a été promu au grade de sous-directeur à la date du 1er juin 1985. Cette promotion a été attaquée devant le Conseil d'Etat par plusieurs requêtes qui ont toutes été rejetées.

2. A la suite de sa nomination au grade de sous-directeur, le requérant s'est vu confier diverses missions par l'administrateur-directeur G. Lannoy. Le dossier fait état de quelques-unes d'entre elles, à savoir:

A. l'établissement d'un vade-mecum à l'usage des membres du conseil d'administration,

B. la coordination des délégations de pouvoirs;

C. la coordination du statut administratif et syndical du personnel de la C.G.E.R.;

D. la revision des règles relatives au signalement du personnel et des cadres;

E. la direction d'un groupe de travail traitant des règles spécifiques aux différents marchés passés par la C.G.E.R.;

F. un projet de création d'une A.S.B.L. «l.S.E.R.»;

G. une étude sur les «intermédiaires indépendants»;

H. la tenue du secrétariat du conseil d'administration d'«Escovi»;

1. la présence comme membre du jury de l'examen de chef de bureau.

3. La réalisation des tâches énumérées ci-avant a donné lieu à plusieurs récriminations ou rappels de la part de l'administrateur-directeur G. Lannoy:

- le 25 octobre 1985, un rappel au sujet du «vade-mecum» (<<A»);

- le 10 janvier 1986, un nouveau rappel pour le même travail et une demande pressante relative aux délégations ( <<11» );

- le 7 mars 1986, encore un rappel pour le «vade-mecum» («A») dans une note relative à d'autres tâches ( <<11», «C» et «D» );

- le 7 mai 1986, dans une note relative à une nouvelle mission («E»), rappel pour les tâches «A», <<11» et <<D»;

-le 13 octobre 1986, l'administrateur-directeur refusa d'accorder un entretien au requérant, aussi longtemps que celui-ci ne pourrait lui présenter une étude terminée; il souligna à cette occasion que, depuis sa nomination le 1er juin 1985, le requérant n'avait mené à bien aucune des tâches qui lui étaient confiées; d'autre part, le dossier «délégations de pouvoirs» ( «B») avait, entre-temps, été confié à un autre service.

4. Le 16 octobre 1986, le requérant communiqua un nouveau projet relatif aux délégations de pouvoirs (<<11») et une note sur la création de l'A.S.B.L. «l.S.E.R.» («F»), indiqua l'état d'avancement de l'étude «marchés» ( <<E» ), expliqua le cheminement du dossier «délégations» ( <<11») et souligna les autres tâches dont il avait été chargé.

5. Le 21 novembre 1986, l'administrateur-directeur G. Lannoy fit au collège des administrateurs-directeurs la proposition de lui attribuer le signalement «insuffisant». Cette proposition était motivée comme suit:

«Monsieur Noël a été nommé sous-directeur au r· juin 1985.

»Il a été affecté à ma direction en qualité de chargé de missions pour les affaires juridiques,faute d'affectation à la tête de services opérationnels.

»A partir de septembre 1985, époque à laquelle il a été déchargé de sa tâche de chef de service du Contentieux, je l'ai successivement chargé des missions suivantes:

»1° Coordination des délégations de pouvoirs.

»Ce dossier a été présenté au comité de direction commun le 4 mars 1986 et le comité a estimé que ce dossier devait être remanié. La version définitive a été présentée par le service juridique en raison de l'inertie de Monsieur Noël.

»2° Vade-mecum à l'usage des administrateurs et des membres des comités de direction.

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.289 à 33.311 Page 3 N° 33.289

»Une première version incomplète de ce vade-mecum m'a été présentée au mois de mars 1986. Je n'ai pas reçu, à ce jour, de version plus élaborée.

»Au mois de mars 1986, deux autres missions lui ont été confiées:

»3° Coordination du statut administratif et syndical du personnel de la C.G.E.R.

»Il semble que pour la réalisation de cette mission, Monsieur Noël se soit heurté à certaines difficultés au niveau du service du personnel. Aucune suite à ce jour.

»4° Régime de signalement du personnel et des cadres de la C.G.E.R.

»Il est clair que le système de signalement appliqué à l'heure actuelle n'est pas satisfaisant.

»Devant cette situation, Monsieur Noël a été chargé d'un travail original faisant appel à d'éventuelles qualités d'imagination.

»le n'ai aucune nouvelle de ce dossier à l'heure actuelle.

»Enfin, par décision du comité de direction commun du 6 mai 1986, Monsieur Noël a été chargé de diriger un groupe de travail dont l'objectif était de mettre en oeuvre des règles spécifiques pour les différents marchés passés par la C.G.E.R .. Le comité de direction avait fixé comme date ultime pour l'examen du rapport du groupe de travail, le mois d'octobre 1986.

»Nous sommes à la fin du mois de novembre et ce rapport m'est entièrement inconnu.

»En conclusion, il est clair que Monsieur Noël

»---laisse apparaître de graves carences sur le plan de l'exécution du travail,

>>--ne tient aucun compte des délais fixés pour la réalisation des travaux demandés,

>>---présente, dès lors, au terme d'une année de fonctions, un bilan excessivement négatif.

»Par conséquent, je propose au collège des administrateurs-directeurs d'attribuer le signalement «insuffi­sant» à Monsieur Noël et je demande à la direction du personnel de trouver une autre affectation pour l'intéressé. A partir de la date d'attribution des signalements, Monsieur Noël ne fera plus partie de ma direction».

6. Le requérant introduisit le 8 décembre 1986 une demande de revision de ce signalement. Il faisait valoir les arguments suivants:

«Coriformément à l'article 62 du statut administratif et syndical du personnel de la C.G.E.R., j'introduis par la présente une demande de revision du signalement «insuffisant» qui m'a été attribué par le collège des administrateurs-directeurs le 25 novembre 1986 et dont le bulletin m'a été transmis le 2 décembre 1986.

»Ma demande en révision est motivée comme suit:

»l. L'autorité compétente chargée d'attribuer le signalement n'a pas été dûment informée; le rapport qui lui a été présenté n'est ni complet ni objectif; à défaut de disposer de tous les éléments d'information et d'appréciation, cette autorité n'a pu prendre attitude en pleine connaissance de cause;

»2. Vu son caractère exceptionnel, la décision n'a pas été précédée d'un examen sérieux et complet de tous les éléments du dossier;

»3. Mon supérieur hiérarchique, en tant que proposant, ne pouvait délibérer;

»4. Le signalement lui-même est dépourvu de motivation ce qui est contraire à l'article 56 du statut administratif et syndical du personnel de la C.G.E.R.;

»5. La procédure suivie l'a été en violation des droits de la défense au sens large étant donné que je n'ai pas été invité à exprimer mon point de vue - même par une note écrite - avant que le collège des administrateurs­directeurs ne prenne sa décision;

»6. Le rapport de mon supérieur hiérarchique contient certaines erreurs dans ses motifs;

»7. A titre subsidiaire, compte tenu à la fois de mes antécédents - notamment en matière de signalement - à la C.G.E.R. et dans d'autres administrations publiques et de mon expérience administrative, vu son caractère exceptionnel et tout à fait déshonorant, le signalement qui m'a été attribué est totalement disproportionné par rapport aux faits invoqués.

»le demande expressément à pouvoir me faire assister par un avocat de mon choix pour la défense de ma demande en révision».

7. La chambre de recours se réunit le 30 janV'.ier 1987. Le requérant fut longuement entendu. Dans ses observations, il fit valoir principalement des considérations relatives aux points suivants:

- il regretta que l'assistance d'un avocat lui fût refusée;

- il insista sur les tâches qu'il avait menées à bien et dont l'administrateur-directeur G. Lannoy n'avait pas fait mention;

- il imputa l'inachèvement de ses travaux au peu de rencontres qu'il eut avec l'administrateur-directeur;

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT -- 1989

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N° 33.289

Arrêts Nos 33.289 à 33.311

Page 4

- il se plaignit de ce que son travail fut à plusieurs reprises remanié par le service juridique sans qu'il y fût associé;

- au sujet des conditions dans lesquelles il fut amené à collaborer avec le service juridique, «s'estimant compétent dans un certain nombre de matières juridiques, il dit qu'il (fut) invivable pour un sous-directeur de se faire contrôler systématiquement par des attachés plus jeunes et pour lesquels il (aurait été) un intrus»;

- il exposa de manière circonstanciée les causes du retard survenu dans les dossiers «marchés» («E»), «signalement» ( <<D») et «vade-mecum» («A»).

8. La décision prise par le président - le premier acte attaqué - se présente comme suit:

«-pour Monsieur Noël: maintien du signalement «insuffisant».

»motivation: Le président estime insuffisantes chez l'intéressé:

>>--les réalisations concrètes en suite des missions qui lui furent confiées par son directeur,

>>-- la conformité aux orientations données à son travail par son directeur.

»Il entend par ce signalement désapprouver en outre l'attitude générale de l'intéressé vis-à-vis de ses supérieurs dont il met en cause l'objectivité (son propre directeur à qui il impute l'origine de ses problèmes et le président lui-même puisqu'il déplore l'absence de son avocat) et sur lesquels il jette une suspicion difficilement admissible, ainsi que son manque de bonne volonté au travail lorsqu'il estime que sa direction ne tient pas suffisamment compte, à son gré, de ses avis.

»Il espère ramener ainsi l'intéressé à une plus juste compréhension de ses responsabilités et à une colla­boration plus efficace».

Cette décision fut notifiée au requérant le 13 février 1987.

9. Le 2 février 1987, le requérant changea de service et fut mis à la disposition de l'administrateur­directeur A. Violon.

Le 24 mars 1987, il écrivit simultanément à celui-ci et au président du comité de direction commun, sollicitant que des attributions lui soient confiées au plus tôt, et en tout cas avant le 1er avril, afin qu'il puisse les avoir exercées pendant au moins six mois avant l'attribution d'un nouveau signalement.

Il semble que cette demande n'eut pas de suite avant le 3 avril 1987, date de la requête. Le refus de lui confier des attributions constitue le second acte attaqué.

Le 28 avril toutefois, une mission relative à la revision des cadres linguistiques lui fut confiée, conjointement avec un agent du rôle néerlandais;

Considérant d'office que la requête, en son second objet, est irrecevable; qu'en effet, le refus implicite de la partie adverse de confier des attributions au requérant n'est pas un acte susceptible d'annulation puisqu'il n'a pas été établi dans les conditions prescrites par l'article 14, alinéa 2, des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées le 12 janvier 1973, qu'il n'y eut ni mise en demeure ni écoulement du délai de quatre mois à partir de celle-ci; que cette exception étant d'ordre public, il n'est pas nécessaire d'examiner les exceptions soulevées par la partie adverse;

Considérant que le requérant prend un premier moyen «de la violation de l'article 25, alinéa 2, de la Constitution, de l'article 6, § l"", de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, des principes généraux du droit, des lois coordonnées sur l'emploi des langues, des articles 55, alinéa 2, 59, alinéa 2, et 65bis du statut administratif et syndical du personnel de la C.G.E.R. et de l'incompétence,

»En ce que, première branche, le signalement infligé au requérant le 25 novembre 1986 l'a été par un collège des administrateurs-directeurs composé de MM. Violon, Dewaersegger, Lannoy, Frantzen, De Doncker et Schoofs,

»Alors que, l'administrateur-directeur G. Lannoy, en tant que supérieur hiérarchique du requérant et proposant le signalement, ne pouvait participer à la prise de décision,

»Et alors que, dans la mesure où M. Lannoy n'aurait pas pris part à la décision, celle-ci aurait été prise par un organe composé majoritairement de membres de rôle linguistique néerlandais,

»Et en ce que, deuxième branche, la décision prise par la partie adverse à la suite de la demande de revision du requérant a été prise par le président du comité de direction de l' Entité 11 et, semble-t-il, deux assesseurs, MM. Lannoy et Dewaersegger,

»Alors qu'ayant pris part à la décision du 25 novembre 1986, MM. Lannoy et Dewaersegger ne pouvaient statuer en degré d'appel,

»Et alors que, dans la mesure où MM. Lannoy et Dewaersegger n'auraient pas pris part à la décision de confirmation, celle-ci ne pouvait être prise par un organe offrant par sa composition moins de garanties que l'organe ayant pris la première décision; qu'il suffit à cet égard de comparer les articles 64, 65 et 65bis avec les articles 58 et 59 du statut précité, pour constater que l'auteur de ce statut a voulu, conformément d'ailleurs aux principes généraux du droit, que les agents ayant introduit une demande de révision de leur signalement voient cette demande examinée (par) un organe de la partie adverse offrant par sa composition plus de garanties que l'organe ayant pris la première décision»;

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.289 à 33.311 Page 5 N° 33.289

Considérant que les articles 59, 62, 65bis, 66 et 66bis du statut des agents de la C.G.E.R. sont rédigés comme suit:

«Article 59. -Le signalement des agents des rangs 12 à 10 est attribué par un collège composé de premiers conseillers désignés par le comité de direction.

»Le signalement des agents du rang 13 est attribué par un collège d'administrateurs-directeurs délégués par le comité de direction.

»Toutefois, le signalement des agents des rangs 13à10 du service Audit interne est attribué par le président et le vice-président du comité de direction de la Caisse d'épargne».

<<Article 62. - Les intéressés disposent d'un délai de cinq jours ouvrables, non compris le jour de la remise du bulletin de signalement, pour introduire, par la voie hiérarchique, auprès du directeur du personnel une demande en révision, écrite et motivée».

«Article 65bis. - Les demandes en révision des agents du rang 13 sont examinées par le président ou à défaut le vice-président de l'un des comités de direction. Ce président statue après avoir entendu le requérant en présence d'un ou de plusieurs supérieurs hiérarchiques et d'un membre du collège qui a attribué le signalement.

»Toutefois, les demandes en révision des agents du niveau 1 affectés à l' Audit interne sont examinées par un collège de trois membres que le comité désigne en son sein. Ce collège statue après avoir entendu le requérant en présence d'un ou de plusieurs supérieurs hiérarchiques et du président ou du vice-président qui lui a attribué le signalement».

<<Article 66. - Les supérieurs hiérarchiques de l'agent et le premier conseiller qui lui a attribué le signalement ne peuvent siéger dans les collèges visés aux articles 64 et 65».

<<Article 66bis. - En cas de recours, le requérant peut se faire assister par un agent délégué par une organisation syndicale agréée conformément au présent statut, cet agent ne pouvant toutefois faire partie à aucun titre de ladite chambre de recours»;

Considérant que la décision prise par le président s'est substituée à celle qui avait été arrêtée par le collège des administrateurs-directeurs; que, dans son dernier mémoire, le requérant insiste sur «Z' irifluence décisive de la décision du collège des administrateurs-directeurs sur la décision du président du comité de direction»; que, néanmoins, toutes les parties intéressées ont été à nouveau entendues avant que le président ne prenne l'acte attaqué de sorte que, sous réserve de l'examen du deuxième moyen, les irrégularités éventuellement commises par le collège des administrateurs-directeurs ont pu être redressées; que, dès lors, le requérant est sans intérêt à critiquer la décision de ce collège; qu'en sa première branche, le moyen ne peut être accueilli;

Considérant, quant à la deuxième branche, que le requérant ajoute, dans son dernier mémoire, que «l'article 65bis du statut étant entaché d'évidence d'une erreur matérielle ou, à tout le moins, étant contraire aux principes généraux du droit, il ne peut être invoqué avec pertinence en l'espèce»;

Considérant que l'article 65bis du statut prévoit que le président ne peut statuer qu'après avoir entendu «le requérant en présence d'un ou de plusieurs supérieurs hiérarchiques et d'un membre du collège qui a attribué le signalement»; que s'il est vrai qu'il est décidé sur le recours en revision par une seule personne, le président d'un comité de direction, lorsqu'il s'agit d'un agent du rang 13, et par un collège désigné par le comité de direction pour les agents des rangs 12 à 10 (article 64), il ne s'ensuit pas pour autant que l'organe chargé de connaître de ce recours offre par sa composition moins de garanties que l'organe ayant pris la première décision puisque celui-ci est différent pour les agents du rang 13 et ceux des rangs 12 à 10; que la composition d'un organe n'est pas seulement fonction du nombre de membres, mais aussi du grade de ceux-ci; que, pour les agents du rang 13, la décision est prise par un agent qui, dans la hiérarchie, est situé à un niveau supérieur à ceux qui composent l'organe ayant pris la première décision;

Considérant que l'article 6, § 1°', de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne s'applique pas aux procédures relatives à l'attribution d'un signalement;

Considérant qu'en sa deuxième branche, le moyen n'est pas fondé;

Considérant que le requérant prend un deuxième moyen «de la violation de l'article 25, alinéa 2, de la Constitution et des principes généraux du droit, en particulier du principe général du droit de défense,

»( .. .),

»En ce que, deuxième branche, la décision de la partie adverse confirmant le signalement infligé au requérant a été prise sans que lui ait été donnée la possibilité de se faire assister par un avocat de son choix lors de son audition du 30 janvier 1987,

»Alors que le requérant avait expressément demandé dans sa demande de révision du 8 décembre 1986 que cette possibilité lui soit reconnue; que cette possibilité lui fut expressément refusée ( .. .),

»Et alors que conformément aux principes généraux du droit, en particulier au principe général du droit de défense, le requérant devait pouvoir se faire assister par un avocat de son choix»;

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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)

N° 33.289

Arrêts Nos 33.289 à 33.311

Page 6

Considérant que la partie adverse répond que l'assistance d'un avocat n'est pas prévue par le règlement établissant le statut des agents de la C.G.E.R. et ne doit pas l'être puisque la mesure attaquée n'est pas disciplinaire;

Considérant que l'article 66bis concerne la procédure en cas de recours exercé par un agent en vue d'obtenir la revision de son signalement; qu'il autorise l'agent à se faire assister par un délégué d'une organisation syndicale .agréée conformément au statut mais ne prévoit pas la possibilité d'être défendu par un avocat;

Considérant que, pour maintenir le signalement «insuffisant» du requérant, le président du comité de direction a ajouté un motif à ceux qui avaient été retenus par le collège des administrateurs-directeurs; que ce motif tient à la désapprobation du président à l'égard de «l'attitude générale de l'intéressé vis-à-vis de ses supérieurs dont il met en cause l'objectivité (son propre directeur à qui il impute l'origine de ses problèmes et le président lui-même puisqu'il déplore l'absence de son avocat) et sur lesquels il jette une suspicion difficilement admissible ... »; qu'ainsi non seulement le requérant n'a pu se faire assister d'un avocat mais encore il lui est reproché d'avoir demandé une telle assistance;

Considérant qu'aucune disposition législative ne garantit à l'ensemble des agents et fonctionnaires publics le droit de se faire assister par un avocat lorsqu'il leur est attribué un signalement «insuffisant»; que, si l'article 440 du Code judiciaire dispose que «devant toutes les juridictions, sauf les exceptions prévues par la loi, seuls les avocats ont le droit de plaider», il fut précisé par le commissaire royal à la réforme judiciaire que le terme <<juridictions» doit s'entendre des <<juridictions qui font partie du pouvoir judiciaire» (Doc. Sénat, 60 (1963-1964), p. 836);

Considérant, cependant, que le respect des droits de la défense est un principe général de droit qui est d'ordre public; que partout où les droits de la défense trouvent à s'exercer, la partie qui a le droit d'être entendue doit pouvoir être assistée de l'avocat qu'elle a choisi; qu'il s'agit d'un corollaire inséparable de l'exercice du droit de défense auquel aucun règlement ne peut légalement porter atteinte;

Considérant qu'en matière d'attribution de signalement, eu égard aux conséquences que celui-ci peut avoir pour la carrière de l'agent, le respect de ce principe implique qu'à tout le moins au cours de la procédure qui précède immédiatement la décision de l'autorité, l'agent puisse être assisté; que ce droit est reconnu par le règlement en vigueur de la C.G.E.R. puisqu'il permet à l'agent de se faire assister par un délégué syndical; qu'aucun motif légalement admissible ne justifie qu'il ne puisse se faire assister d'un avocat; qu'en vertu de l'article 107 de la Constitution, le Conseil d'Etat doit écarter l'application d'un règlement qui lui enlève cette faculté;

Considérant que le moyen, en sa deuxième branche, est fondé; qu'il est sans intérêt d'examiner les autres moyens de la requête,

(Annulation de la décision par laquelle le signalement «insuffisant» a été attribué à Jacques Noël pour la période du 1er octobre 1985 au 30 septembre 1986 - rejet de la requête pour le surplus - dépens à charge de la partie adverse).

N°s 33.290 à 33.296

ARRETS du 25 octobre 1989 (VIe Chambre) MM. Tapie, Président du Conseil d'Etat, Martens, rapporteur, et Hanotiau, conseillers, et Mendiaux, premier auditeur.

n° 33.290 - DESCOUVEMONT (Mes Detry et Geairain) n° 33.291 - WINAND (id.) n° 33.292 - LOKKER n° 33.293 - RIGA (Mes Detry et Geairain) n° 33.294 - KUBORN (id.)

et-·· n° 33.295 - HERBAUTS (id.) n° 33.296 - MOELIBECQ (id.)

c/ Etat belge représenté par le Ministre des Communications (M. Gallien) et Société nationale des chemins de fer belges (Me Gérard)

\èi

1. AGENTS DE LA SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER BELGES - Emploi des langues · ' ..

II. INTERET (POUR AGIR DEVANT LE CONSEIL D'ETAT) - Classement selon la qualité du requérant - Moyens - Problèmes particuliers à la fonction publique - Nomination et promotion -Généralités

III. LANGUES EN MATIERE ADMINISTRATIVE - Services dont l'activité s'étend à tout le pays - Services intérieurs - Cadres linguistiques - Intérêt à invoquer l'absence de cadres linguistiques

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

Page 136: (VIe - KU Leuven · 33.103 - CLOETENS et REKOMS = n° 33.100 +désistement. RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989 . Arrêt N° 33.107 Page 1 N° 33.107 ARRET du 3octobre1989

Arrêts Nos 33.289 à 33.311 Page 7 N° 33.290

Il serait inconcevable que l'adjoint du directeur général de la S.N.C.B. puisse appar­tenir au même rôle linguistique que celui-ci, du moins aussi longtemps qu'il n'a pas été procédé au remplacement de l'administrateur délégué démissionnaire.

Un agent du même rôle que l'adjoint du directeur général est sans intérêt actuel au moyen tiré de l'inexistence de cadres linguistiques régulièrement établis pour attaquer la nomination de cet adjoint (n°8 33.290 à 33.292 et 33.294 à 33.296).

IV. (voir n° 33.179) (n° 33.293) V. PROCEDURE - Réouverture des débats (n°s 33.290 à 33.292 et 33.294 à 33.296)

N° 33.290 Vu la requête introduite le 21 janvier 1987 par Alfred Descouvemont qui demande l'annulation de l'arrêté

royal du 26 novembre 1986, publié au Moniteur belge du 28 novembre 1986, nommant Jacques Cornet directeur général adjoint à la S.N.C.B. pour une période de six ans;

Vu l'arrêt n° 31.665 du 21 décembre 1988 mettant hors de cause le Secrétaire permanent au Recrutement du Personnel de l'Etat, rouvrant les débats et chargeant le membre de l'auditorat désigné par M. l'auditeur général de poursuivre l'instruction;

Considérant que, par l'arrêt interlocutoire n° 31.665, le Conseil d'Etat a jugé que la répartition entre les rôles linguistiques des emplois de directeur général et de directeur général adjoint, telle qu'elle a été opérée en fait par les arrêtés royaux nommant ces fonctionnaires, ne serait illégale que s'il était démontré soit que le cadre unilingue français était saturé, soit que le cadre bilingue français était incomplet; que l'instruction menée par le premier auditeur rapporteur révèle que, avant la restructuration de la S.N.C.B., la situation des emplois occupés à l'administration centrale au 26 novembre 1986, dans les deux premiers degrés de la hiérarchie, était la suivante:

Degré Cadre Effectif

Total F N F(N) N(F) Total F N F(N) N(F)

1 63 25 25 6/7 7/6 33 13 11 2 7

II 203 81 81 20/21 21/20 160 65 58 16 21

Considérant cependant qu'il convient de tenir compte d'un élément nouveau invoqué par la S.N.C.B. à l'audience du 4 octobre 1989;

Considérant que la nomination de Jacques Cornet au poste de directeur général adjoint s'est faite le 26 novembre 1986, soit quelques jours après celle d'Etienne Schouppe, nommé en qualité de directeur général par arrêté royal du 19 novembre 1986; que la nomination de celui-ci, qui appartient au rôle néerlandais, a été attaquée par des agents de la S.N.C.B. appartenant aux rôles néerlandais et français; que tous se sont désistés de leur recours (arrêts de désistement: Winand n° 28.559, Lokker n° 28.560, Riga n° 28.561, Lallemand n° 28.562, Herbauts n° 28.563, Huybens n° 28.633, Meyns n° 28.634, Browaeys n° 31.691, De Groot n° 32.141 et Pardon n° 32.142); que les derniers arrêts de désistement ont été prononcés respectivement le 10 janvier 1989 et le 7 mars 1989, c'est-à-dire après l'arrêt interlocutoire du 21 décembre 1988; qu'il s'ensuit que la nomination d'Etienne Schouppe est devenue définitive; que, quelle que soit la fixation des futurs cadres de la S.N.C.B., il serait inconcevable que l'adjoint du directeur général puisse appartenir au même rôle linguistique que celui-ci, du moins aussi longtemps qu'il n'a pas été procédé au remplacement de l'administrateur délégué N. Paelinck, fonctionnaire du rôle néerlandais, nommé par arrêté royal du 17 octobre 1986 et depuis lors démissionnaire; qu'un agent francophone est donc sans intérêt actuel au moyen tiré de l'inexistence de cadres linguistiques régulièrement établis pour attaquer la nomination d'un directeur général adjoint francophone;

Considérant que le moyen est irrecevable; qu'il y a lieu de rouvrir les débats afin de permettre la poursuite de l'instruction sur les autres moyens de la requête,

(Réouverture des débats).

* * * Les arrêts n°s 33.291 et 33.292 sont identiques au 33.290.

L'arrêt n° 33.293 est identique au n° 33.179.

Les arrêts n°s 33.294 à 33.296 sont identiques au 33.290.

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.297

N° 33.297

ARRET du 25 octobre 1989 (VIe Chambre)

Arrêts Nos 33.289 à 33.311

Page 8

MM. Tapie, Président du Conseil d'Etat, Martens et Hanotiau, rapporteur, conseillers, et Mme Dagnelie, auditeur.

POCHET (Mes Vandenbossche et Lambrechts) c/ Communauté française - Partie intervenante: Mathieu (Mes Detry et Geairain)

INTERET (POUR AGIR DEVANT LE CONSEIL D'ETAT) - Classement selon la qualité du requérant - Agents et fonctionnaires publics - Mutations, transferts et affectations

1. Un agent n'a pas intérêt à poursuivre l'annulation de la décision qui, lui refusant une mutation, l'accorde à un autre agent, lorsque l'emploi est supprimé en cours d'instance.

2. Un agent en activité, ne pouvant bénéficier d'une réaffectation, n'a pas intérêt à poursuivre l'annulation de la décision qui réaffecte un agent qui avait perdu son emploi.

Vu là requête introduite le 29 octobre 1985 par Freddy Pochet qui demande l'annulation de:

«1. la décision de date inconnue, probablement émanant du Ministre de l' Education nationale, par laquelle Monsieur Jean-Pierre Mathieu a été muté comme professeur de cours généraux dans l'enseignement secondaire inférieur à l' Athénée royal de Châtelet ( .. .);

»2. la décision implicite refusant au requérant ladite mutation»;

Vu la requête introduite le 18 septembre 1986 par Freddy Pochet qui demande l'annulation de:

1. la décision ministérielle du 19 décembre 1985 par laquelle Jean-Pierre Mathieu a été réaffecté à l' Athénée royal de Mons I;

2. la décision implicite lui refu~ant cette réaffectation;

Vu la requête introduite le 6 mars 1987, par laquelle Jean-Pierre Mathieu demande à être reçu en qualité de partie intervenante;

Vu l'ordonnance du 11 mars 1987 accueillant cette intervention;

Considérant que les faits de la cause se résument comme suit:

L Freddy Poche! est agrégé de l'enseignement secondaire inférieur (mathématiques, physique). Il est nommé à la fonction de professeur de cours généraux (mathématiques, physique, sciences économiques) dans l'enseignement secondaire du degré inférieur (à l'exclusion du degré inférieur des athénées et des lycées royaux) par un atTêté royal du 25 mai 1979 produisant ses effets le 1er septembre 1978. Il exerce ses fonctions au Lycée d'Etat de Fosses-la-Ville.

2. Le Moniteur belge du 11 avril 1985 publie un avis relatif aux mutations dans l'enseignement de l'Etat dont la langue de l'enseignement est le français.

Le 19 avril 1985, le requérant introduit deux demandes de mutation:

a) une demande de modèle A par laquelle il sollicite sa mutation à !'Athénée royal de Charleroi (liste n° 06/85);

b) une demande de modèle B par laquelle il sollicite sa mutation dans un emploi qui deviendra vacant à la suite des mutations réalisées dans les emplois mentionnés à la liste de mutation n° 06/85.

3. L'emploi vacant à !'Athénée royal de Charleroi est attribué à Françoise Daix, affectée à l'origine à l 'Athénée royal de Châtelet.

4. Par plis recommandés à la poste les 5 et 14 juin 1985, l'administration notifie les mutations accordées aux 2e et 3e tours dans les emplois de la liste n° 06/85. Le requérant reçoit ces lettres. Il soutient sans être contredit que la mutation à !'Athénée royal de Châtelet n'y était pas mentionnée.

5. Par une décision de date inconnue, Jean-Pierre Mathieu est muté à !'Athénée royal de Châtelet. Cette décision fait l'objet du recours A. 33.708/VI-8114.

6. Par pli recommandé à la poste le 1er avril 1986, Jean-Pierre Mathieu fait savoir au Conseil d'Etat qu'il est déclaré en surnombre à !'Athénée royal de Châtelet et qu'il est réaffecté à !'Athénée royal de Mons I à la date du 1er janvier 1986.

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D"ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.289 à 33.311 Page 9 N° 33.298

Ce fait avait été porté à la connaissance du requérant par le rapport déposé dans l'affaire A. 33.708NI-8114.

7. Par pli recommandé à la poste le 18 septembre 1986, Freddy Pochet poursuit l'annulation de la décision ministérielle du 19 décembre 1985 qui réaffecte l'intervenant, Jean-Pierre Mathieu, à !'Athénée royal de Mons I. Cette décision fait l'objet de l'arrêté ministériel du 6 mars 1987 (recours A. 34.855NI-8332).

8. Le 1er septembre 1986, le requérant est détaché du Lycée d'Etat de Fosses-la-Ville à !'Athénée royal Vauban de Charleroi pour y donner 22 heures de cours de mathématiques au degré inférieur en remplacement de Nicole Cheron.

Le 1er janvier 1987, le requérant perd son emploi au Lycée d'Etat de Fosses-la-Ville. Il est alors réaffecté provisoirement à !'Athénée royal Vauban de Charleroi pour y donner 13 heures de cours de mathématiques au degré inférieur et y accomplir pendant 10 heures des tâches administratives ou pédagogiques.

9. A partir du 1er septembre 1987, le requérant est réaffecté provisoirement à l 'Athénée royal de Gilly pour y donner 24 heures de cours de mathématiques au degré inféiieur en remplacement de Fernand Sauvage;

Considérant que les deux recours sont connexes; qu'il y a lieu de les joindre;

Considérant que depuis l'introduction du recours A. 33.708NI-8114 l'emploi de professeur de cours généraux dans l'enseignement secondaire inférieur à !'Athénée royal de Châtelet, auquel Jean-Pierre Mathieu a été muté, a été supprimé; que, dans son dernier mémoire, le requérant justifie le maintien de son intérêt au motif que s'il avait été affecté à !'Athénée royal de Châtelet, «il est évident que lui-même (et non Jean-Pierre Mathieu) aurait été réaffecté à /'Athénée royal de Mons!»; que, dans sa requête A. 34.855NI-8332, il justifie de la même manière son intérêt à obtenir l'annulation de la réaffectation de l'intervenant à !'Athénée royal de Mons I;

Considérant que, dans les deux recours, le requérant prend un même moyen unique de la violation de l'article 7 de l'arrêté ministériel du 9 mars 1983 fixant les priorités et les modalités selon lesquelles ont lieu les mutations dans les emplois des fonctions de recrutement; qu'il affirme qu'il disposait d'une ancienneté plus grande que celle de l'intervenant de sorte qu'il avait priorité sur celui-ci;

Considérant qu'à partir du moment où l'emploi de professeur de cours généraux dans l'enseignement secondaire inférieur à !'Athénée royal de Châtelet a été supprimé, l'intervenant a été mis en disponibilité par défaut d'emploi; que la réaffectation dont il a bénéficié n'est pas une conséquence directe de la suppression de l'emploi à !'Athénée royal de Châtelet; qu'en effet, à supposer que la mutation attaquée par le premier recours soit annulée, le requérant ne pourrait plus être muté à cet emploi désormais supprimé; qu'en outre, l'annulation éventuelle de la réaffectation de l'intervenant à!' Athénée royal de Mons I n'aurait pas pour effet la réaffectation du requérant à cet athénée mais seulement la mise en disponibilité de l'intervenant par défaut d'emploi; qu'au surplus, étant en activité de service au moment de l'introduction du second recours, le requérant ne pouvait bénéficier d'une réaffectation, laquelle est réservée à l'enseignant qui a perdu son emploi; que, dès lors, contrairement à ce que prétend le requérant, la réaffectation et la mutation ne sont pas indissociables; qu'il s'ensuit que le requérant n'a intérêt à aucun des deux recours,

(Jonction - rejet - dépens à charge du requérant et de l'intervenant).

N° 33.298

ARRET du 25 octobre 1989 (VIe Chambre) MM. Tapie, Président du Conseil d'Etat, Martens et lfanotiau, rapporteur, conseillers, et Rousseaux, premier, auditeur.

BRIKE-BLEUS (Me Misson) c/ Communauté française et Conseil de classe de 2ème professionnelle de l' Athénée royal de Flémalle

1. ENSEIGNEMENT ET SCIENCES - Enseignement secondaire - Enseignement de l'Etat - Elèves - Discipline

Il ressort de !'article 7 de l'arrêté royal du la mai 1928 que c'est le préfet, et non le conseil de classe, qui est habilité à prendre une mesure de renvoi d'un élève.

II. (voir n° 33.042)

Vu la requête introduite le 16 juin 1986 par Monsieur et Madame Brike-Bleus, agissant en leur qualité d'administrateurs légaux des biens de leur fils mineur d'âge Philippe Brike, qui demande «l'annulation de la décision de renvoi de Philippe Brike de /'Athénée royal de Flémalle, décision notifiée à ses parents par lettre recommandée du 18 avril 1986, signée par le préfet des études(. . .)»;

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.298

Considérant que les faits de la cause se résument comme suit:

1. Philippe Brike était élève en 2ème professionnelle à !'Athénée royal de Flémalle.

Arrêts Nos 33.289 à 33.311

Page 10

2. Le 31 janvier 1986, à la suite d'une bagarre entre Philippe Brike et un condisciple, le préfet convoqua les requérants. La discussion fut houleuse. Selon la mère de Philippe Brike, le préfet aurait déclaré que son fils était renvoyé. Pour le préfet, c'est la mère qui voulut retirer son fils de l'établissement.

3. Les requérants écrivent au Ministre de !'Education nationale. A la suite de cette intervention, Philippe Brike fut admis à nouveau à l'athénée mais il lui fut interdit de suivre les cours.

4. Le 17 avril 1986, le préfet réunit le conseil de classe. L'élève fut entendu brièvement par trois professeurs sans. pouvoir être assisté de qui que ce soit. Le conseil de classe décida l'exclusion définitive de Philippe Brike à partir du 23 avril 1986. Par lettre du 18 avril 1986, le préfet notifie aux parents cette décision qui constitue l'acte attaqué;

Considérant que les requérants prennent un premier moyen de «1' absence de réglementation autorisant l'exclusion d'un élève d'un athénée royal de l'Etat»;

Considérant que, par un deuxième moyen, les requérants invoquent «l'incompétence des autorités admini­stratives», tant celle du préfet des études que celle du conseil de classe;

Considérant que les requérants prennent un troisième moyen du non-respect des droits de la défense, en ce que l'élève n'a été entendu que par trois professeurs, sans avoir pu être assisté soit par un défenseur soit par un membre du centre psycho-médico-social, de sorte qu'il n'a pu présenter une défense utile;

Considérant que, par un quatrième moyen, les requérants soutiennent qu'il y a une disproportion entre la sanction et les faits ayant justifié le renvoi;

Considérant, quant au deuxième moyen, que la partie adverse répond comme suit:

<<L'arrêté ministériel du 15 avril 1929 (M.B. du 16 juillet 1986) précise en son article 31 que l'exclusion définitive de l'établissement est infligée par le chef d'établissement.

»Par ailleurs, contrairement à la thèse défendue par la partie (requérante), il n'appartenait pas au préfet d'interpeller le ministre.

»Ce sont les parents del' élève, s'ils n'admettaient pas la mesure prise, qui auraient da introduire un recours auprès du ministre.

»Cette procédure n'a pas été respectée. La question, dans ces conditions, se pose de savoir si le présent recours est recevable»;

Considérant que les articles 30 et 31 de !'arrêté ministériel du 15 avril 1929 contenant le règlement d'ordre intérieur des athénées royaux et des sections d'athénée ont seulement été publiés au Moniteur belge du 16 juillet 1986; qu'ils n'étaient donc pas obligatoires au moment où l'acte attaqué a été pris; que l'exception d'irrecevabilité fondée sur l'article 31 de l'arrêté précité ne peut dès lors être retenue;

Considérant que le préfet était chargé du maintien de la discipline en vertu de l'article 7 de l'arrêté royal du 1er mai 1928 portant règlement organique des athénées royaux; que le conseil de classe n'était pas habilité à prendre la mesure de renvoi; que le moyen est fondé;

Considérant, cependant, que si le premier moyen était fondé, aucune mesure disciplinaire ne pourrait plus être prononcée à l'égard du requérant; que si le troisième moyen était accueilli, l'autorité compétente devrait recommencer la procédure disciplinaire ab initio; que si le quatrième moyen était retenu, elle ne pourrait plus prononcer qu'une mesure autre que le renvoi; que l'annulation aurait donc des effets plus étendus si elle n'était pas prononcée uniquement sur la base du deuxième moyen; qu'il convient dès lors de rouvrir les débats afin de permettre au membre de l'auditorat désigné par M. l'auditeur général de poursuivre l'instruction,

(Réouverture des débats).

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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9

du 25 octobre 1989 (VIe Chambre) J ~ 0 3 MM. Tapie, Président du Conseil d'Etat, rapporteur, Fincoeur et Martens, conseillers, et Leroy, ~uditeur. TOURNEUR (Mes Saint Viteux et Blontrock) c/ Ville de Tournai (Me Rivière)

COMMUNES - Tutelle - Contravention au principe de la tutelle administrative

Si l'annulation, par l'autorité de tutelle, pour cause d'illégalité, de la délibération d'un conseil communal ne dessaisit pas celui-ci de l'objet de la délibération annulée, il ne s'ensuit pas que le conseil communal puisse légalement reprendre cette même délibération sans en corriger le vice dont l'autorité de tutelle l'a estimée entachée dans une décision qui est devenue définitive, son annulation n'ayant pas été poursuivie devant le Conseil d'Etat.

En juger autrement porterait atteinte au fondement même de la tutelle administrative d'annulation en permettant à l'autorité qui y est soumise de réitérer indéfiniment le même acte et en obligeant ainsi l'autorité de tutelle à réitérer elle-même ses décisions d'annulation, celles-ci n'empêchant toutefois pas l'acte réitéré de produire des effets illicites jusqu'à sa nouvelle annulation.

Pour la même raison, la légalité d'une délibération réitérée dans ces conditions ne saurait être déduite du fait que l'autorité de tutelle s'est abstenue de l'annuler une nouvelle fois.

Vu la requête introduite le 23 octobre 1987 par Daniel Tourneur qui demande l'annulation de la délibération du 6 juillet 1987 par laquelle le Conseil communal de la Ville de Tournai:

- considère comme non fondé l'arrêté d'annulation de sa délibération du 15 décembre 1986 qui fait suite à un arrêté de suspension du gouverneur tout aussi non fondé, en date du 6 février 1987,

- et confirme sa décision antérieure constatant que Daniel Tourneur est démissionnaire d'office de ses fonctions de sous-lieutenant professionnel du service d'incendie pour n'avoir pas respecté la condition de domiciliation depuis le 15 décembre 1986;

Considérant que Daniel Tourneur, entré en 1974 dans le corps des sapeurs-pompiers de la Ville de Tournai, y porte le grade de lieutenant depuis le 1°' septembre 1977; qu'à deux reprises, le 27 février 1985 et le 27 novembre 1986, le bourgmestre lui écrivit pour lui rappeler qu'il avait à prendre à Tournai un domicile effectif; que, par la deuxième de ces lettres, le bourgmestre l'invita à se présenter, le 15 décembre 1986, devant le conseil communal afin de s'entendre signifier d'office la cessation définitive de ses fonctions; que, le 15 décembre 1986, le conseil communal, par 32 voix pour, 3 contre et une abstention, déclara «avoir constaté que la condition de domiciliation prévue par l'arrêté royal du 20 juillet 1972 et par les statuts arrêtés par le conseil le 10 mars 1972, n'était pas remplie et qu'en vertu de l'article 21 desdits statuts la démission d'office est prononcée avec effet au 16 décembre 1986»; que, suspendue par un arrêté du 6 février 1987 du Gouverneur du Hainaut et maintenue par une délibération du 30 mars 1987, cette délibération fut annulée par un arrêté du 21 mai 1987 du Ministre de la Région wallonne pour le Logement et la Tutelle, au motif que la contradiction du débat n'avait pas été suffisamment assurée et qu'ainsi les droits de la défense avaient été violés à l'occasion de la prise d'«une mesure d'ordre dont les effets sont particulièrement graves»; que, le 6 juillet 1987, sur le seul rapport du bourgmestre, le conseil communal prit, dans les termes suivants, la délibération attaquée:

«Le conseil communal,

»(. .. );

»Vu l'arrêté de /'Exécutif régional wallon en date du 21 mai 1987 annulant la délibération précitée;

»Attendu qu'il y a lieu tout d'abord de relever que, dans cet arrêté d'annulation, l'autorité de tutelle ne conteste plus le caractère fictif de la domiciliation de M. Tourneur alors que ce fait constituait le seul motif de la suspension susvisée;

»Attendu que cet arrêté d'annulation est illégal pour deux raisons développées ci-après;

»Attendu, premièrement, que l'article 86 de la loi communale stipule formellement que l'arrêté de suspension doit être notifié immédiatement à l'autorité communale; or, en l'espèce, l'arrêté de suspension daté du 6 février fut notifié à l'administration communale le 25 février sous le couvert d'une lettre d'accompagnement datée du 17, soit 19 jours après la prise de décision;

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.299

Arrêts Nos 33.289 à 33.311

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»Attendu que dans son arrêt A.C.E. Commune de Doel n° 11.600 du 18 janvier 1966 (R.J.D.A. 1966, p. 40), le Conseil d'Etat considère la notion «immédiatement» non comme une simple recommandation mais bien comme une obligation dont la méconnaissance est susceptible d'annulation par le Conseil d'Etat;

»Attendu qu'il résulte de ce qui précède que la tardiveté de la notification frappe d'illégalité l'arrêté de suspension; qu'il s'ensuit que l'arrêté d'annulation en est lui aussi vicié car sans l'arrêté de suspension, l'arrêté d'annulation est établi hors délai;

»Attendu, deuxièmement, que l'arrêté d'annulation est motivé par la considération que l'autorité communale n'aurait pas tout mis en oeuvre pour assurer l'exercice effectif des droits de la défense en organisant une procédure contradictoire;

»Attendu que la loi ne prescrit rien en ce sens dans le cas d'une démission d'office;

»Attendu que, suivant la jurisprudence, l'administration communale n'est pas tenue de respecter les droits de la .défense lorsqu'elle applique une mesure d'ordre;

»Attendu, bien plus, que dans son arrêt Detournay du 26 mars 1974, n° 16.328, le Conseil d'Etat enseigne que le principe du respect des droits de la défense perd tout son sens lorsque l'autorité communale ne jouit d'aucun pouvoir discrétionnaire de décision;

»Attendu qu'en l'espèce, l'autorité communale ne jouit d'aucun pouvoir discrétionnaire. En effet, l'obligation de domiciliation est imposée comme condition d'exercice des fonctions de pompier tant par le règlement communal d'incendie du 10 mars 1972 portant organisation du service communal d'incendie que par/' arrêté royal du 20 juillet 1972 visant les officiers. De plus, la délibération nommant M. Tourneur en qualité de sous-lieutenant professionnel et datée du 19 décembre 1975 rappelait expressément cette condition. Dès lors que l'agent ne remplit plus cette condition, il ne peut plus faire partie de ce corps. L'autorité communale n'intervient que pour «constater>> la perte de cette condition d'exercice et pour «prendre acte» de la conséquence qui en découle à savoir, la démission d'office;

»Attendu, en outre, que l'autorité de tutelle ne conteste nullement le caractère fictif de la domiciliation aux termes de l'arrêté d'annulation. Or, il résulte de ce qui précède que seule une contestation sur la question de domiciliation aurait pu légalement fonder une décision d'annulation;

»Attendu qu'en tout état de cause, la question de domiciliation n'est plus contestable à l'heure actuelle puisque l'intéressé a lui-même demandé son changement de domicile pour Flobecq dès le début du mois de janvier de cette année;

»Attendu que ce fait constitue une preuve supplémentaire du caractère fictif de sa domiciliation à Tournai;

»Attendu, en conséquence, qu'il serait illégal de réintégrer M. Tourneur au sein du service des pompiers;

»{. . .),

»Considère:

»non fondé l'arrêté d'annulation de sa délibération du 15 décembre 1986 qui fait suite à un arrêté de suspension du gouverneur tout aussi non fondé, en date du 6 février 1987,

»Confirme:

»sa décision antérieure par laquelle il constate que M. Daniel Tourneur est démissionnaire d'office de ses fonctions de sous-lieutenant professionnel du service d'incendie pour n'avoir pas respecté la condition de domiciliation depuis le 15 décembre 1986»;

Considérant que le requérant prend un premier moyen «de la violation de l'autorité de chose décidée qui s'attache aux arrêtés d'annulation du ministre de tutelle, des articles 87 et 87bis de la loi communale, du principe général de la motivation des actes administratifs, en ce que la Ville de ToUrnai a restatué sur le sort du requérant sans se conformer aux motifs de la décision d'annulation du Ministre Dalem du 21 mai 1987, alors que, première branche, cet arrêté d'annulation a autorité de chose décidée entre parties et de sorte s'impose à la partie adverse lorsqu'elle recommence sa décision ... »;

Considérant que la partie adverse répond en substance que l'autorité de chose décidée ne concerne que les rapports entre l'auteur de l'acte et les administrés, que cette autorité est inférieure à celle qui s'attache à la chose jugée, qu'une autorité communale peut prendre une délibération identique à une délibération précédente qui aurait été annulée par l'autorité de tutelle et que la ville pouvait statuer à nouveau sur le cas du requérant sans entendre celui"ci; que, dans ,son dernier mémoire, faisant référence à l'arrêt n° 27.450 du 4 janvier 1987, elle insiste sur le fait que l'autorité de tutelle n'a pas annulé la délibération attaquée et voit dans cette circonstance, rapprochée de l'arrêt précité, «la pa1faite illustration du principe selon lequel l'autorité de la chose décidée ne .dessaisit en principe jamais l'auteur de l'acte, celui-ci pouvant et même parfois devant revenir sur l'acte définitif qu'il a pris pour l'adapter à la légalité et aux variations de l'intérêt général»;

Considérant que si l'annulation par l'autorité de tutelle, pour cause d'illégalité, de la délibération d'un conseil communal ne dessaisit pas celui-ci de l'objet de la délibération annulée, il ne s'ensuit pas que le conseil puisse légalement reprendre comme en l'espèce cette même délibération sans en corriger le vice dont l'autorité de tutelle l'a estimée entachée dans une décision qui est devenue définitive, son annulation n'ayant pas été poursuivie

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.289 à 33.311 Page 13 N° 33.300

devant le Conseil d'Etat; qu'en juger autrement porterait atteinte au fondement même de la tutelle administrative d'annulation en permettant à l'autorité qui y est soumise de réitérer indéfiniment le même acte et en obligeant ainsi l'autorité de tutelle à réitérer elle-même ses décisions d'annulation, celles-ci n'empêchant toutefois pas l'acte réitéré de produire des effets illicites jusqu'à sa nouvelle annulation; que, pour la même raison, la légalité d'une délibération réitérée dans ces conditions ne saurait être déduite, ainsi que le voudrait la partie adverse, du fait que l'autorité de tutelle s'est abstenue de l'annuler une nouvelle fois; que le premier moyen est fondé en sa première branche;

Considérant que le Conseil d'Etat ne pourrait se prononcer sur les autres moyens soulevés dans la requête sans préjuger de la décision que, le cas échéant, le conseil communal prendra après avoir suivi une procédure effectivement contradictoire,

(Annulation de la délibération du 6 juillet 1987 par laquelle le Conseil communal de la Ville de Tournai considère comme non fondé l'arrêté d'annulation de sa délibération du 15 décembre 1986 et confirme sa décision antérieure constatant que Daniel Tourneur est démissionnaire d'office de ses fonctions de sous-lieutenant profes­sionnel du service d'incendie pour n'avoir pas respecté la condition de domiciliation depuis le 15 décembre 1986 - dépens à charge de la partie adverse).

N° 33.300

ARRET du 27 octobre 1989 (lle Chambre) MM. Van Aelst, président de chambre, rapporteur, François et Mme Thomas, conseillers, et M. Fortpied, premier auditeur.

Association momentanée S.A. ENTREPRISES GENERALES R. LECOMTE ET C0

et S.A. BOUWMATERIALEN KUMPEN (Me Flamme) c/ Etat belge représenté par le secrétaire d'Etat chargé de la Restructuration du Ministère des Travaux publics, adjoint au Ministre des Communications (Me Lejeune)

MARCHES DE TRAVAUX, DE FOURNITURES ET DE SERVICES - Adjudication publique -Etablissement de la soumission - Nullité des soumissions irrégulières - Prix anormaux

En l'espèce, le maître de l'ouvrage a soigneusement étudié les prix proposés par les soumissionnaires et il a examiné les justifications remises pour certains postes par le soumissionnaire le plus bas. Le ministre, en présence d'avis divergents de ses services, a pu fixer son choix en pmfaite connaissance de cause.

Vu la requête introduite le 18 juin 1987 par la société anonyme Entreprises générales R. Lecomte et C0 et la société anonyme Bouwmaterialen Kumpen, agissant en association momentanée, qui demandent l'annulation de la décision «d'adjuger à l'association momentanée Mathieu-Lambert et Jerouville les travaux de modernisation de la voirie N87 entre les cumulées 19.200 et 24.200 ... »;

Considérant que les faits sont les suivants:

- Le marché portant sur des travaux de modernisation de la section Etalle-Croix Rouge de la route N87 a été mis en adjudication publique suivant le cahier spécial des charges F86 B69.

- Le 30 octobre 1986, dix soumissions ont été recueillies, la plus basse étant celle des requérantes avec un montant de 100.787.275 francs devant celle de l'association momentanée des sociétés Mathieu, Lambert et Jerouville avec un montant de 113.340.903 francs.

- Par une lettre datée du vendredi 7 novembre 1986, les requérantes ont été invitées à justifier le montant de leur offre qui s'écartait de plus de 15 p.c. de la moyenne, ce qu'elles ont fait par leur lettre du 20 novembre 1986, reçue le 21.

- Le 26 novembre 1986, l'administration a proposé au ministre d'écarter comme irrégulière l'offre des requérantes au motif que «la justification fournie ... ne correspond nullement à l'esprit de l' A.R., (du 19 août 1985 modifiant celui du 22.4.1977), car elle ne porte pas sur des éléments propres au soumissionnaire, à la soumission ou au marché».

- Le 27 novembre 1986, les requérantes ont fourni des explications complémentaires prises des avantages que constituaient l'usage d'une décharge privée, la récupération de matériaux et l'utilisation d'une centrale à béton.

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.300

Arrêts Nos 33.289 à 33.311

Page 14

- Le 28 novembre 1986, le bureau des prix, dont l'avis avait été demandé le 7 novembre, a conclu: «l'offre la plus basse Lecomte-Kumpen, doit être considérée comme globalement valable, bien qu'elles' écarte de -12,87 % de l'estimation rectifiée généralisée du bureau des prix. ... le seul poste à prix apparemment anormal relevé est d'une importance relativement faible ... (il) ne devrait pas mettre en péril l'économie générale de ce marché. En conséquence, l'offre la plus basse Lecomte-Kumpen, malgré le caractère assez bas de son offre, pourrait être acceptée sans qu'une demande de justification de prix unitaire ne soit nécessaire.».

- En revanche, le 2 décembre 1986, l'ingénieur en chef, directeur des ponts et chaussées d'Arlon, a critiqué les trois justifications fournies par les requérantes le 27 novembre 1986. Il considère que l'avantage de la décharge était nul, que l'utilisation des produits de récupération ne présentait un avantage que de 432.500 francs et que la centrale à béton était sans intérêt.

- Le 22 décembre 1986, le bureau des prix, ayant passé en revue les justifications fournies, les a jugées «acceptables quant à la forme et plausibles quant au fond» sous réserve que soit vérifié «le bien-fondé des arguments de l'entrepreneur».

- Le 3 janvier 1987, l'ingénieur en chef, directeur des ponts et chaussées d'Arlon, a repris les arguments énoncés le 2 décembre 1986 et a conclu au rejet de l'offre Lecomte-Kumpen «comme irrégulière et, partant, comme nulle et non avenue».

- Une note du 11 février 1987 relève que «le délai de 12 jours de calendrier expirait le 19 novembre 1986», et conclut que «les justifications fournies sont tardives et ne sont pas recevables». Elle invite toutefois le Fonds des routes à «Contrôler le bien-fondé des justifications remises le 21 novembre 1986».

- Dans une lettre du Fonds des routes - Direction du Luxembourg - du 23 février 1987, il a été soutenu que les justifications fournies le 20 novembre 1986 l'ont été dans le délai. Cette lettre expose ensuite que les prix unitaires de l'association momentanée Lecomte-Kumpen ont été expliqués comme si toutes les tâches étaient exécutées «par de la main-d'oeuvre à 600 Flh», sans qu'il soit «jamais que,stion ni de contremaître, ni de chef d'équipe, ni de chef de chantier, ni de topographe».

- Suivant une note du 9 mars 1987 du service juridique des marchés, le délai de douze jours expirait bien le 19 novembre 1986, mais il a été jugé «.préférable» d'examiner malgré cela les justifications tardivement fournies. Il est souligné qu'il incombe au soumissionnaire «d'établir avec suffisamment de certitude que ses prix sont normaux».

- Une note du 19 mars 1987 conclut que «les justifications données hors délai sont irrecevables» et «qu'en plus elles ne sont pas fondées».

- La décision attaquée semble avoir été prise entre le 19 mars et le 24 avril 1987. Une lettre du 30 avril 1987 en a informé le conseil des parties requérantes;

Considérant que les requérantes prennent un moyen unique «de la violation des articles 12, § 1e1·, de la loi du 14 juillet 1976 relative aux marchés publics de travaux, de fournitures et de services, des articles 25 et 34 del' an•êté royal d'exécution du 22 avril 1977, (de la) méconnaissance du principe d'égalité entre les soumissionnaires et du principe suivant lequel l'administration est tenue de procéder à un examen objectif et réel des offres, en particulier de leurs prix»; qu'elles en concluent que le marché devait leur être attribué, leur soumission étant régulière et la plus basse;

Considérant que la partie adverse répond que «les justifications fournies par l'entrepreneur, bien que tardives ( .. .) ont néanmoins fait l'objet d'un examen attentif ... » et que l'administration n'a fait qu'user de son <<pouvoir d'apprécier souverain quant aux justifications fournies»;

Considérant que les requérantes répliquent à juste titre, quant à la tardiveté, que «la lettre de l'administration faisant courir le délai de 12 jours, si elle était datée du 7 novembre 1986 (un vendredi), n'est enfait parvenue que le lundi 10 novembre 1986 aux parties requérantes qui disposaient par conséquent d'un délai expirant le 21 novembre 1986»; que d'ailleurs, si la tardiveté des justifications a été alléguée par certains services de la partie adverse, celle-ci n'a pas invoqué l'exception pour écarter l'offre des requérantes;

Considérant que, contrairement à ce qu'affirment les requérantes, il ressort du dossier que la partie adverse a soigneusement étudié les prix proposés par les soumissionnaires; qu'ainsi, en ce qui concerne les requérantes, elle a examiné les justifications remises pour les trois postes jugés litigieux; que le dossier montre que si, pour l'un d'eux (l'utilisation des produits de récupération) la justification a été admise, quoique jugée sans grande incidence, en revanche, pour les deux autres postes (décharge et centrale à béton) l'avantage allégué a été étudié mais jugé nul; que le ministre, en présence d'avis divergents d'une part du bureau des prix, encore que celui-ci ait semblé émettre des réserves, et d'autre part de la direction de la province du Luxembourg du Fonds des routes, a pu fixer son choix en parfaite connaissance de cause; que le moyen n'est pas fondé,

(Rejet - dépens à charge des parties requérantes).

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ARRET du 27 octobre 1989 (me Chambre)

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MM. Van Aelst, président de chambre, François, rapporteur, et Mme Thomas, conseillers, et M. Coolen, premier auditeur.

NUSGENS (Me De Klippeleyr) c/ Députation permanente du conseil provincial de Liège

I. COMPETENCE DES AUTORITES ADMINISTRATIVES - Limitation dans le temps - Délai fixé par la loi - Délai d'ordre

t' 1. II. ETABLISSEMENTS DANGEREUX, INSALUBRES ET INCOMMODES - Première instance -

Décision - Délai

L'article 10, alinéa la, du règlement général pour la protection du travail ne prescrit qu'un délai d'ordre.

L'hypothèse du dépassement de ce délai est faite au deuxième alinéa du même article sans que la nullité de la décision tardive y soit prévue.

III. ETABLISSEMENTS DANGEREUX, INSALUBRES ET INCOMMODES - Deuxième instance - Compétence - Pouvoir d'appréciation - Eu égard au lieu - Plan d'aménagement approuvé

En l'espèce, si la députation permanente s'intéresse à la construction d'un chenil impliquée par l'exploitation projetée, elle le fait en tant que cette construction situerait l'exploitation de manière à créer une incommodité pour les voisins et la mettrait en outre en opposition avec la réglementation sur l'aménagement du territoire, considérations qui sont toutes pertinentes pour la police des établissements classés.

IV. DROITS ET LIBERTES - Egalité devant la loi - Discrimination dans l'exercice du pouvoir d'appréciation

V. ETABLISSEMENTS DANGEREUX, INSALUBRES ET INCOMMODES - Deuxième instance - Compétence - Pouvoir d'appréciation - Eu égard au lieu - Généralités

Les décisions relatives à l'opportunité d'autoriser un établissement dangereux, in­salubre ou incommode sont, pour tout lieu donné, la solution d'un problème unique, en raison de la nécessité qui se présente le plus souvent d'avoir égard à des circonstances (caractéristiques de l'établissement, précautions prises, importance des troubles de voisi­nage, prescriptions urbanistiques, dispositions des lieux) dont l'ensemble ne peut se retrou­ver intégralement en deux endroits différents que par une coïncidence extraordinaire.

Vu la requête introduite le 3 décembre 1986 par Yves Nusgens qui poursuit l'annulation de l'arrêté de la députation permanente du conseil provincial de Liège du 4 septembre 1986 rejetant son recours et confirmant un arrêté du 18 juillet 1985 du collège des bourgmestre et échevins de Juprelle;

Considérant que le requérant écrivit le 24 janvier 1985 à la commune de Juprelle, sur un formulaire relatif aux établissements dangereux, insalubres ou incommodes de deuxième classe, et en indiquant divers motifs: «je sollicite l'autorisation de pouvoir tenir un chenil sportif amateur. Je compte bâtir un chenil en dur pourvu d'eau, gaz, électricité, chauffage et carrelage, éloigné de toute habitation et dans un cadre de verdure agréable»; qu'il joignit à cette demande un schéma sommaire et non signé indiquant l'implantation et la disposition du chenil projeté; que le collège lui refusa le 18 juillet 1985 «1' autorisation d'établir( .. .) à son domicile un chenil sportif amateur comprenant six dogues allemands»; que le requérant introduisit contre ce refus le recours rejeté par !'acte attaqué;

Considérant que le requérant prend un premier moyen de la méconnaissance de !'article 10 du règlement général pour la protection du travail en ce que la décision attaquée juge respectés les délais prescrits à l'administration communale pour se prononcer alors qu'elle ne l'a fait qu'après plus de trois mois;

Considérant que l'article 10, premier alinéa, du règlement général pour la protection du travail ne prescrit qu'un délai d'ordre; que d'ailleurs l'hypothèse du dépassement de ce délai est faite au deuxième alinéa du même article sans que la nullité de la décision tardive y soit prévue; que, contrairement à ce que le requérant déclare, ce n'est pas à une première demande introduite le 4 juillet 1984 que l'arrêté du collège et la décision attaquée répondent, mais à celle du 24 janvier 1985; que le moyen ne peut être retenu;

Considérant que le requérant prend un deuxième moyen de l'insuffisance de motivation de la décision de la commune du 18 juillet 1985 et de la décision attaquée; qu'il ajoute que l'auteur de celle-ci aurait de ce fait

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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commis un détournement de pouvoir; qu'il précise que sa demande, qui tendait à obtenir un permis de bâtir et une autorisation d'exploitation, n'a pourtant été examinée que sous l'un de ces deux aspects;

Considérant que la critique adressée à la décision du 18 juillet 1985 est étrangère à l'objet du recours; que la demande adressée par le requérant à la commune le 24 janvier 1985 dans les termes qui ont été indiqués plus haut n'avait trait qu'à une autorisation d'exploitation; que la circonstance que le requérant y déclarait qu'il «compt(ait) bâtir un chenil en dur pourvu d'eau, gaz, électricité, chauffage et carrelage» n'équivaut nullement à une demande de bâtir, car d'une pait les formes d'une telle demande n'étaient pas respectées, et de l'autre il ne laisse pas d'être pertinent de fournir des précisions sur l'aménagement des lieux dans une demande d'autorisation d'exploiter un établissement dangereux, insalubre ou incommode; que pour la même raison, le fait qu'une importante partie de la motivation de la décision attaquée avait trait au chenil à construire ne signifie pas que la députation permanente se soit prononcée sur la construction plutôt que sur l'exploitation; qu'en effet, lorsque la députation permanente écrit:

«- l'établissement est situé en zone d'habitat dans un quartier à vocation résidentielle et de nombreuses oppositions ont été recueillies lors de l'enquête de commodo et incommodo;

>>--- le chenil qui abrite des dogues allemands est établi dans une construction située derrière l'habitation du demandeur (à 50 mètres environ) et à proximité de la propriété voisine;

>>--- cette construction initialement destinée à abriter un véhicule va à l'encontre des prescriptions urba­nistiques;

>>---en effet, le chenil est construit dans un lotissement dont les prescriptions urbanistiques ne prévoient pas ce type de construction;

>>---d'une part, la construction du chenil nécessite un permis de bâtir qui n'a jamais été délivré;

>>--- d'autre part, la régularisation de la situation nécessiterait une modification préalable du permis de lotissement;

>>--- comme le lotissement ne comporte que deux lots, cette modification ne peut se faire que moyennant l'accord du propriétaire du second lot et ( ... ) celui-ci s'y oppose;»,

Elle s'intéresse certes à la construction d'un chenil impliquée par l'exploitation projetée, mais elle le fait en tant que cette construction situerait l'exploitation de manière à créer une incommodité pour les voisins et la mettrait en outre en opposition avec la réglementation de l'aménagement du territoire, considérations qui sont toutes pertinentes pour la police des établissements classés; que l'arrêté de la députation permanente reproduit d'ailleurs les arguments contenus dans le rapport du 16 juin 1986 du directeur du service de prévention des pollutions du ministère de la Région wallonne; qu'il se réfère à la délibération du collège, que le requérant connaissait, et à une enquête de commodo et incommodo qui a provoqué de nombreuses réclamations fondées sur les troubles dus à des aboiements continuels et à un sentiment d'insécurité; qu'une décision ainsi conçue ne laisse paraître aucune insuffisance de motivation; que le requérant ne fait en rien la preuve d'un détournement de pouvoirs; que le moyen ne peut être retenu;

Considérant que le requérant prend un troisième moyen de la violation du principe de l'égalité devant la loi consacré par l'article 6 de la Constitution, en ce que la députation permanente a infirmé un autre refus d'autorisation d'exploiter un chenil émis pru· le même collège des bourgmestre et échevins alors qu'elle a confirmé celui qui lui a été opposé; qu'il ajoute que le collège a encore autorisé l'exploitation de deux autres chenils à Juprelle, et en zone urbaine alors que l'exploitation qui fait l'objet de sa demande est en zone rurale;

Considérant que les décisions comparées par le requérant n'ont pas trait au même chenil ni au même endroit; que les décisions relatives à l'opportunité d'autoriser un établissement dangereux, insalubre ou incommode sont, pour tout lieu donné, la solution d'un problème en principe unique, en raison de la nécessité qui se présente le plus souvent d'avoir égard à des circonstances (caractéristiques de l'établissement, précautions prises, importance des troubles de voisinage, prescriptions urbanistiques, disposition des lieux) dont l'ensemble ne peut se retrouver intégralement en deux endroits différents que par une coïncidence extraordinaire; que le moyen ne peut être retenu,

(Rejet - dépens à charge du requérant).

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ARRET du 27 octobre 1989 (IIIe Chambre)

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MM. Van Aelst, président de chambre, François et Mme Thomas, rapporteur, conseillers, et M. Dumont, auditeur général adjoint.

DAVIN c/ C.P.A.S. Saint-Georges-sur-Meuse (Mes De Coninck et Housiaux)

I. AGENTS ET FONCTIONNAIRES PUBLICS - Statut - Caractère statutaire ou contractuel de l'engagement

Le recrutement d'un agent en qualité de stagiaire n'exclut pas qu'il soit sous régime statutaire.

II. AGENTS DES CENTRES PUBLICS D'AIDE SOCIALE - Entrée en service - Stage et titu­larisation (1 à 3)

III. AGENTS ET FONCTIONNAIRES PUBLICS - Entrée en service - Stage - Licenciement -1° Nature (2); - 2° Droits de la défense (3)

IV. PROCEDURE NON CONTENTIEUSE - Droits de la défense - Cas où il faut les observer -Licenciement d'un stagiaire (3)

1. Le Conseil d'Etat est compétent pour connaître de la décision qui licencie un agent stagiaire lorsque la nomination était faite à un emploi du cadre administratif du centre public d'aide sociale et qu'aucun contrat n'a été conclu entre cet agent et le centre.

2. Une telle décision, n'ayant pas un caractère disciplinaire, n'est pas soumise à l'approbation de l'autorité de tutelle.

3. La décision de licenciement d'un stagiaire doit être annulée lorsqu'il n'apparaît d'aucune pièce du dossier que l'agent ait été entendu ni qu'il ait eu l'occasion de demander son audition.

V. ACTES DES AUTORITES ADMINISTRATIVES - Effets de leur annulation

L'annulation du licenciement d'un stagiaire a pour effet que l'agent n'a pas cessé de faire partie du personnel.

Vu la requête introduite le 21 avril 1987 par Martine Davin qui demande l'annulation des actes suivants:

- la décision du conseil de l'aide sociale du centre public d'aide sociale de Saint-Georges-sur-Meuse du 19 février 1987 de ne pas la nommer à titre définitif en qualité de gestionnaire-économe de la maison de retraite Saint-Georges;

- le refus implicite qu'emporte la décision précitée de la nommer à titre définitif (recours A. 35.973/III-9916);

Vu la requête parvenue au Conseil d'Etat le 1er décembre 1987 par laquelle Martine Davin demande l'annulation de la délibération du conseil de l'aide sociale du même centre public d'aide sociale du 17 septembre 1987 qui décide de ne pas la nommer définitivement et de la licencier pour faute grave (recours A. 37.421/III­I0.220);

Vu l'ordonnance du 17 mai 1989 joignant les causes;

Considérant que, par une délibération du 16 janvier 1986, le conseil de l'aide sociale du centre public d'aide sociale de Saint-Georges-sur-Meuse a nommé Martine Davin en qualité de gestionnaire-économe de la maison de retraite Saint-Georges pour une période de stage d'un an; qu'elle est entrée en fonction le IO février 1986; que, par une délibération du 19 février 1987, qui contient les actes attaqués par le premier recours, le conseil de l'aide sociale, après avoir constaté que le stage probatoire de M. Davin s'était terminé le IO février 1987 et entendu un «rapport circonstancié» du président, a décidé de ne pas nommer la requérante à titre définitif; que le procès-verbal de la séance résume le rapport du président en ces termes:

«Préalablement au vote, Monsieur le président a signalé que Mme Bawin (la requérante) avait fait déposer par Ms Freson à la maison communale des factures impayées pour 551.000 francs. li a aussi donné lecture des lettres adressées par Ms Doppagne, brasseur, signalant qu'une somme de 94.860 F restait impayée pour notamment des factures de novembre et décembre 1986 et d'une seconde lettre de la Maison Michel de Stockay signalant également des factures impayées de novembre et décembre 1986 et janvier 1986 pour un total de 28.845 F;

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»Il a encore ajouté que Mme Bawinfaisait preuves (sic) de négligences incompréhensibles dans les problèmes d'argent qui sont les plus importants et qu'elle jouait à la directrice uniquement en se faisant craindre du personnel.»;

que la requérante a quitté ses fonctions le 20 février 1987;

Considérant que, le 15 juillet 1987, après l'introduction du premier recours devant le Conseil d'Etat le président du centre public d'aide sociale a établi un nouveau «rapport circonstancié» qui a été communiqué à la requérante; que celle-ci a été entendue le 7 août 1987 par le président et le secrétaire du centre requérant et a signé le procès-verbal de son audition; que, par une délibération du 17 septembre 1987 qui constitue l'acte attaqué par le second recours, le conseil de l'aide sociale a décidé de ne pas nommer définitivement la requérante et de la licencier pour faute grave; que, dans le mémoire en réponse relatif au second recours, la partie adverse expose les raisons de cette deuxième procédure, à savoir que le conseil de l'aide sociale a constaté «au vu du recours en annulation et du mémoire en réplique qu'il n'avait peut-être pas respecté tout à fait la lettre de la loi», qu'il a agi «sagement et dans l'intérêt financier du centre en recommençant la procédure de la manière prescrite par le statut administratif du personnel communal arrêté par le conseil communal par délibération du 29.3 .79 et en particulier par l' ai·ticle 10 dudit arrêté» qu'un «rapport écrit a été adressé» et que «Madame Davin a été entendue»;

Considérant que s'appuyant sur la circonstance qu'un certificat de chômage complet (C4) a été remis à la requérante, la partie adverse décline la compétence du Conseil d'Etat pour connaître du premier recours, au motif que M. Davin était, au cours de son stage, «employée dans le cadre de relations contractuelles de travail régies par la loi du 3.7.78»;

Considérant que le recrutement d'un agent en qualité de stagiaire n'exclut pas qu'il soit sous régime statutaire; que le recrutement de la requérante s'est fait à un emploi du cadre administratif; qu'aucun contrat n'a été conclu entre la requérante et le centre public; que le déclinatoire de compétence ne peut être retenu;

Considérant, sur la fin de non-recevoir que la partie adverse déduit du défaut d'intérêt né et actuel de la requérante au motif que la première décision attaquée n'a pas été approuvée par l'autorité de tutelle, que la délibération du 19 février 1987, n'ayant pas un caractère disciplinaire, n'était pas soumise à approbation; que l'exception ne peut être retenue;

Quant au recours A. 35.973/III-9916:

Considérant que la requérante invoque la violation de l'article 10 du statut du personnel communal applicable au personnel du centre public d'aide sociale en vertu de l'article 42 de la loi du 8 juillet 1976 organique des centres publics d'aide sociale; qu'elle expose que la délibération du 19 février 1987 a été prise sans qu'elle ait eu la faculté de prendre connaissance du rapport du président, de demander à être entendue par le conseil de l'aide sociale et de se faire assister par un délégué d'une organisation syndicale;

Considérant que la partie adverse reconnaît qu'«aucun rapport motivé établi par le président du C.P.A.S. et visé par l'agent n'a été établi»; qu'elle affirme que la requérante a été entendue par le président du centre public d'aide sociale et le secrétaire;

Considérant que l'article 10 du statut du personnel communal dispose notamment ainsi qu'il suit:

« ...

»A l'issue du stage, cette autorité (le collège des bourgmestre et échevins) décide de la nomination définitive ou du licenciement, au vue du rapport motivé établi par le bourgmestre et visé par l'agent.

»Le stagiaire peut, à sa demande, être avant toute décision, entendu par le collège échevinal. Il peut se faire assister par un délégué d'une or15anisation syndicale agréée.

»Tout acte fautif commis dans l'accomplissement du stage ou à l'occasion de celui-ci, tout manquement aux obligations du stage et toute action qui compromet l'honneur de la fonction peuvent donner lieu au licenciement sans préavis du stagiaire quis' en rend coupable. L'intéressé doit, au préalable, être entendu par le chef de service compétent et, s'il en fait la demande, par l'autorité qui détient le pouvoir de licenciement»;

Considérant qu'aucun rapport motivé n'a été établi par le président du centre public d'aide sociale préalablement à la décision du 19 février 1987; qu'il n'apparaît d'aucune pièce du dossier que la requérante ait été entendue ni que la partie adverse lui ait donné l'occasion de demander son audition; que le moyen est fondé;

Quant au recours A. 37.421/III-10.220:

Considérant qu'aux termes d'un moyen unique, la requérante relève que la décision du 19 février 1987 n'a été ni retirée ni abrogée par le conseil de l'aide sociale; qu'elle expose qu'elle n'était plus agent du centre public d'aide sociale depuis le 20 février 1987 et que la seconde procédure est viciée puisqu'elle a abouti à la licencier alors qu'elle l'était depuis plusieurs mois; qu'elle conclut que «les actes entrepris à la faveur du (second) recours sont dépourvus de tout fondement juridique et doivent être tenus pour nuls et inexistants»;,

Considérant que l'annulation de la décision du 19 février 1987 a pour effet que la requérante n'a pas cessé de faire partie du personnel du centre public d'aide sociale à partir du 20 février 1987; que le conseil de l'aide sociale était compétent pour statuer sur la nomination à titre définitif de la requérante; que le moyen ne peut être retenu,

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D"ETAT - 1989

Page 148: (VIe - KU Leuven · 33.103 - CLOETENS et REKOMS = n° 33.100 +désistement. RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989 . Arrêt N° 33.107 Page 1 N° 33.107 ARRET du 3octobre1989

Arrêts Nos 33.289 à 33.311 Page 19 N° 33.303

(Annulation de la décision du conseil de l'aide sociale du centre public d'aide sociale de Saint-Georges-sur­Meuse du 19 février 1987 de ne pas nommer Martine Davin à titre définitif en qualité de gestionnaire-économe de la maison de retraite Saint-Georges, et du refus implicite qu'emporte la décision précitée de nommer la requérante à titre définitif (recours A. 35.973/111-9916) - rejet de la requête portant le numéro A. 37.421/111-10.220 - partage des dépens par moitié entre la partie adverse et la requérante).

N° 33.303

ARRET du 27 octobre 1989 (Ille Chambre) MM. Van Aelst, président de chambre, rapporteur, François et Mme Thomas, conseillers, et M. Falmagne, premier auditeur.

CARBONARO (Mes Moens et Misson) c/ Etat belge représenté par le Vice-Premier Ministre et Ministre de la Justice et des Classes moyennes (M. Deknop)

1. ETRANGERS - Police des étrangers - Renvoi et expulsion - Motifs d'expulsion - Etranger portant atteinte à !'ordre public (1 à 5)

II. CONVENTIONS INTERNATIONALES - 1° Convention européenne d'établissement (3); - 2° Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (4)

1. En l'espèce, le Roi s'est fondé, non sur les condamnations, mais sur les faits qui les ont amenées.

2. En l'espèce, le Roi a pu estimer que les faits revêtaient une gravité telle que l'expulsion de l'étranger était nécessaire pour l'ordre public belge. Il a satisfait à la loi belge en fondant sa décision sur la gravité de l'atteinte que l'étranger avait portée à l'ordre public.

3. Si la Convention européenne d'établissement requiert pour justifier le renvoi que les faits soient d'une particulière gravité, cette particulière gravité a en l'espèce été reconnue par le Roi. Si le Roi n'a pas tenu compte de la conduite de l'étranger pendant toute la durée de sa résidence en Belgique, il a du moins eu égard à la délinquance dans laquelle l'étranger a persisté depuis l'âge de dix-huit ans.

4. En l'espèce, le Roi a pu valablement estimer que les intérêts familiaux et personnels de l'étranger ne pouvaient prévaloir sur la sauvegarde de l'ordre.

5. Les articles 20 et 21 de la loi du 15 décembre 1980 n'exigent qu'une atteinte grave, non une atteinte particulièrement grave, à l'ordre public pour justifier l'expulsion.

III. PROCEDURE - Requête - Exposé des faits et des moyens - Requête contenant des moyens irrecevables - Moyen imprécis

Le moyen imprécis n'est pas recevable.

Vu la demande de sursis à exécution introduite par Antonio Carbonaro;

Considérant que par requête introduite le 12 septembre 1989, Antonio Carbonaro, de nationalité italienne, demande l'annulation de l'arrêté royal d'expulsion du 15 juin 1989 et de l'arrêté ministériel de mise à la disposition du gouvernement pris à la même date, qui lui ont été notifiés le 17 juillet 1989; que, dans le même acte, il demande qu'il soit sursis à l'exécution de l'arrêté d'expulsion;

Considérant qu'il y a lieu d'examiner sans délai la demande de sursis à exécution;

Considérant que le requérant, né en Belgique en 1967, a fait l'objet d'un arrêté royal d'expulsion motivé comme suit:

«Considérant qu'ils' est rendu coupable de vols qualifiés et conduite sans permis,faits établis pour lesquels il ad' ailleurs été condamné le 25 août 1987 à une peine devenue définitive de 15 mois d'emprisonnement avec sursis de 4 ans pour ce qui dépasse la détention préventive et 500 frs d'amende avec déchéance du droit de conduire pour 3 mois;

»Considérant qu'il s'est rendu coupable de vol à l'aide de violences avec effraction la nuit, par deux ou plusieurs personnes, avec véhicule, association de malfaiteurs,faits établis pour lesquels il ad' ailleurs été condamné le 20 avril 1988 à une peine devenue définitive de 3 ans d'emprisonnement;

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

Page 149: (VIe - KU Leuven · 33.103 - CLOETENS et REKOMS = n° 33.100 +désistement. RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989 . Arrêt N° 33.107 Page 1 N° 33.107 ARRET du 3octobre1989

N° 33.303

Arrêts Nos 33.289 à 33.311

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»Considérant qu'il résulte des faits précités qu'il a, par son comportement personnel, porté une atteinte grave à l'ordre public et qu'il constitue une menace grave, réelle et actuelle affectant un intérêt fondamental de la société belge;

»Considérant que ses intérêts familiaux et personnels ne peuvent en l'espèce prévaloir sur la sauvegarde de l'ordre;

»Vu l'avis de la commission consultative des étrangers concluant à l'expulsion»;

que, le même jour, il a fait l'objet d'un arrêté ministériel de mise à la disposition du gouvernement;

Considérant que le requérant prend un premier moyen de la violation de «larticle 3 de la Directive du Conseil des ministres de la Communauté économique européenne, en ce que (l'acte attaqué) est fondé exclusivement sur l'existence des condamnations pénales et ne précise nullement le caractère nécessaire de cette expulsion au vu du droit communautaire»;

Considérant que la commission consultative des étrangers a exposé à l'intention du Roi les faits délictueux commis par le requérant; que le Roi les a cités tels qu'ils ont été retenus par les juridictions; qu'ainsi Il s'est fondé, rton sur les condamnations, mais sur les faits qui les ont amenées; que le Roi a valablement pu estimer que ces faits revêtaient une gravité telle que !'expulsion du requérant était nécessaire pour !'ordre public belge;

Considérant que le requérant invoque en un deuxième moyen la violation «des articles 3, 3°, de la Convention européenne d'établissement du 13 décembre 1955, approuvée par la loi du 24 mars 1961, et de la section 1, B et C, de son protocole additionnel en ce que (l'acte attaqué) fonde la mesure d'expulsion sur une atteinte grave à l'ordre public, alors que lesdites dispositions exigent une atteinte particulièrement grave, et sans tenir compte de la conduite qu'a eu l'intéressé pendant toute la durée de sa résidence en Belgique»;

Considérant qu'aux termes de la législation belge, et plus particulièrement les articles 20, 21 et 43, 2°, de la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers, l'expulsion d'un étranger se justifie lorsqu'il a porté une atteinte grave à l'ordre public; que le Roi a donc satisfait à la loi belge en fondant sa décision d'éloigner le requérant sur la gravité de l'atteinte qu'il avait portée à l'ordre public; que, sans doute, la Convention européenne d'établissement requiert pour jusitifier le renvoi que les faits invoqués soient d'une «.particulière gravité»; qu'en l'espèce, cette particulière gravité a été reconnue par la partie adverse en ce qu'elle a estimé qu'étant donné qu'il s'agissait d'une «association familiale (père et fils) de malfaiteurs dangereux» et «eu égard à la spécificité des deux dossiers», il y avait lieu «à titre exceptionnel» de poursuivre la procédure d'expulsion; que si le Roi n'a pas tenu compte de la conduite de l'intéressé pendant toute la durée de sa résidence en Belgique, Il a du moins eu égard à la délinquance dans laquelle il a persisté depuis l'âge de 18 ans;

Considérant que le requérant prend un troisième moyen de la violation de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales;

Considérant que !'Office des étrangers d'abord, la commission consultative des étrangers ensuite ont examiné à l'intention du Roi la situation de famille de l'intéressé; que l'attention du ministre a été attirée sur le fait que le requérant était né en Belgique où toute ~à famille résidait; que toutefois le ministre a estimé que, dans les circonstances exposées plus haut, il y avait lieu de poursuivre la procédure d'expulsion; qu'en agissant de la sorte, la partie adverse a valablement pu estimer que les intérêts familiaux et personnels du requérant ne pouvaient en l'espèce prévaloir sur la sauvegarde de l'ordre;

Considérant que le requérant invoque, en un quatrième moyen, la violation de l'article 21, 1°, de la loi du 15 décembre 1980 en ce que le Roi ne pouvait l'éloigner du Royaume que pour une atteinte particulièrement grave à l'ordre public et en ce que l'application de l'atteinte ne correspond pas aux critères déterminés par le ministre dans sa circulaire;

Considérant que le requérant ajoute à la loi en soutenant qu'il faut une atteinte <<particulièrement» grave, les articles 20 et 21 n'exigeant qu'une atteinte grave pour justifier l'expulsion; qu'au surplus, c'est précisément en raison de la gravité particulière des faits que la partie adverse a estimé qu' «à titre exceptionnel» la procédure d'expulsion était justifiée;

Considérant que le requérant soutient en un cinquième moyen que «l'arrêté royal d'expulsion viole aussi les formes substantielles exigées par les articles 23 et 62 de la loi du 15 décembre 1980, en ce qu'il se fonde sur des motifs erronés en droit ou des appréciations erronées des faits de la cause, ce qui équivaut à l'absence de motivation»;

Considérant que le moyen est imprécis et, partant, irrecevable;

Considérant que les moyens ne paraissent pas, dans les circonstances de la cause, sérieux et de nature à entraîner !'annulation de l'arrêté d'expulsion; que la demande de sursis ne satisfait pas à une des deux conditions qui doivent être réunies pour que le sursis puisse être accordé,

(Rejet de la demande de sursis à exécution).

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.289 à 33.311 Page 21 N° 33.304

N° 33.304

ARRET du 27 octobre 1989 (IIIe Chambre) MM. Van Aelst, président de chambre, François et Mme Thomas, rapporteur, conseillers, et Mme Haubert, auditeur.

UNION PROFESSIONNELLE DES ENTREPRISES D'ASSURANCES (Me Delfos­se) c/ Etat belge représenté par le Ministre des Affaires sociales (M. Mathieu)

PROCEDURE - Règles spéciales à la demande de suspension - Risque de causer un préjudice grave difficilement réparable

En !'espèce, l'exécution immédiate de !'acte attaqué n'est pas de nature à causer au requérant un préjudice grave difficilement réparable.

Vu la demande de suspension introduite par l'Union professionnelle des entreprises d'assurances;

Considérant que, par une requête introduite le 18 septembre 1989, la requérante demande l'annulation de l'arrêté royal du 23 juin 1989 relatif à la perception d'une cotisation spéciale sur les versements effectués par les employeurs en vue de la constitution d'avantages extra-légaux en matière de retraite ou de décès prématuré; qu'elle demande la suspension de cet arrêté;

Considérant qu'il y a lieu d'examiner sans délai la demande de suspension de l'exécution de l'acte attaqué;

Considérant qu'en son article 152, la loi-programme du 30 décembre 1988 a inséré dans l'article 38 de la loi du 29 juin 1981 établissant les principes généraux de la sécurité sociale des travailleurs salariés, un paragraphe 3ter rédigé ainsi qu'il suit, en ses premier et deuxième alinéas:

«A partir du 1er janvier 1989, il est instauré une cotisation spéciale égale à 3,5 %, calculée sur tous les versements effectués par les employeurs en vue d'allouer aux membres de leur personnel ou leur(s) ayant(s) droit des avantages extra-légaux en matière de retraite ou de décès prématuré. Ne sont toutefois pas visés les versements ou partie de versements relatifs aux années de service prestées par les membres du personnel avant le 31 décembre 1988. Cette partie est, pour chaque membre du personnel, obtenue en multipliant le versement total par une fraction qui a pour dénominateur le nombre total d'années de service et pour numérateur le nombre d'années prestées avant cette date.

»L' Office national de sécurité sociale est chargé, selon des modalités à déterminer par le Roi, de la perception et du recouvrement de cette cotisation.»;

Considérant que l'arrêté royal attaqué du 23 juin 1989 dispose notamment comme suit en ses articles 1er et 2:

«Article 1"".

»Pour l'application del' article 38, § 3ter, de la loi du 29 juin 1981 établissant les principes généraux de la sécurité sociale des travailleurs salariés, ... sont exclus de la base de perception de la cotisation spéciale de 3,5 %:

»JO

»20

»3° les versements d'avantages extra-légaux en matière de retraite ou de décès effectués directement par l'employeur aux membres du personnel lorsque lesdits versements sont relatifs aux années de service prestées avant le 1er janvier 1989.

»Article 2.

»Lorsque les versements d'avantages extra-légaux sont effectués directement par l'employeur à des membres du personnel ou à leur(s) ayant(s) droit et sont relatifs à la fois à des années situées avant le 1er janvier 1989 et après le 31 décembre 1988, la cotisation est calculée sur le montant des versements, après multiplication de ce montant par une fraction dont le numérateur et le dénominateur sont fixés comme suit:

»--le numérateur est formé par le nombre d'années de carrière comprise entre l'âge du travailleur au 31 décembre 1988 et l'âge de 65 ou 60 ans, selon qu'il s'agit d'un homme ou d'une femme, le nombre de ces années ne pouvant dépasser respectivement 45 ou 40 ans;

>>-- le dénominateur est égal au nombre total d'années de service, soit 45 ou 40, selon qu'il s'agit d'un homme ou d'une femme.»;

Considérant que la requérante déclare agir en sa qualité d'employeur effectuant des versements en vue d'allouer aux membres de son personnel des avantages extra-légaux en matière de retraite ou de décès prématuré; qu'elle invoque la violation de l'article 6 de la Constitution en ce que l'acte attaqué étendant illégalement la base de perception de la cotisation instituée par la loi-programme du 30 décembre 1988, amènerait la requérante à

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.304

Arrêts Nos 33.289 a 33.311

Page 22

supporter un «surcroît de cotisation annuelle del' ordre de 150.000 francs», que son budget ayant été établi sur la base de la loi-programma du 30 décembre 1988, elle devra procéder à un «appel complémentaire de cotisations» auprès de ses membres, que cet appel «donne de la requérante une image peu crédible» et qu'elle sera «dans l'impossibilité d'effectuer les investissements nécessaires à concurrence d'un montant annuel de F.B.150.000 tant que cet appel complémentaire n'aura pas été suivi d'effet»;

Considérant que le crédit de la requérante auprès de ses membres ne saurait être sérieusement entamé par un appel de cotisations justifié par la nécessité de se soumettre, pour l'année 1989, à des règles fixées par un arrêté royal pris le 23 juin 1989 et produisant ses effets le 1er janvier 1989; que la requérante se plaint pour le surplus d'un préjudice pécuniaire; que celui-ci peut être déterminé sans difficulté; qu'en cas d'annulation de l'arrêté attaqué, la requérante serait fondée à demander la réparation de ce préjudice par le remboursement des sommes indûment perçues; que l'exécution immédiate de l'acte attaqué n'est pas de nature à causer à la requérante un préjudice grave difficilement réparable; que l'une des conditions prescrites par!' article 17 des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat pour que celui-ci puisse décider qu'il y a lieu de surseoir à l'exécution de l'arrêté attaqué n'est pas remplie,

(Rejet de la demande de suspension de l'arrêté royal du 23 juin 1989).

* * *

N° 33.305 Cet arrêt, du 27 octobre 1989, rectifie une erreur matérielle.

N° 33.306

ARRET du 31 octobre 1989 (IIIe Chambre) MM. Van Aelst, président de chambre, François et Mme Thomas, rapporteur, conseillers, et M. Leroy, auditeur.

RORIFE (Me Put) c/ Députation permanente du conseil provincial de Liège - Partie intervenante: C.P.A.S. Awans (Mes Liénard et Franchimont)

I. AGENTS DES COMMUNES - Statut pécuniaire - Contentieux II. COMMUNES - Contentieux - Compétence - Décisions de .l'autorité de tutelle relatives à des

traitements, indemnités, pensions ou autres droits subjectifs III. COMPETENCE DU CONSEIL D'ETAT - Contentieux de l'annulation - Droits subjectifs -

Tutelle administrative

La décision par laquelle l'autorité administrative fixe, en application du statut pécuniaire de son personnel, le traitement d'un agent détermine l'étendue du droit de cet agent au traitement. Le différend opposant l'agent qui se prévaut d'une application erronée du règlement lors de la fixation du traitement à l'autorité débitrice de celui-ci est une conte­station qui a directement pour objet la reconnaissance du droit de cet agent à un traitement déterminé et qui échappe à la compétence du Conseil d'Etat, en vertu des articles 92 et 93 de la Constitution.

L'autorité de tutelle exerçant son contrôle de légalité et d'opportunité peut, dans les conditions prévues par la loi qui l'y habilite, annuler la décision fixant le traitement de l'agent. En introduisant contre l'acte de l'autorité de tutelle un recours qui peut être introduit aussi par l'autorité subordonnée, l'agent ne tend qu'à faire établir que l'autorité de tutelle n'a pas exercé régulièrement son pouvoir d'annulation. En statuant sur le litige qui oppose l'agent créancier du traitement à l'autorité de tutelle qui n'en est pas débitrice, le Conseil d'Etat prend une décision qui a une incidence sur le droit subjectif de l'agent, mais il ne tranche pas une contestation ayant directement pour objet la reconnaissance de ce droit. Le Conseil d'Etat est compétent pour connaître du recours*.

IV. PROCEDURE - Réouverture des débats

*Comparer: arrêts Agglomération bruxelloise, n°' 21.940 et 21.941, du 27 janvier 1983, et la note, Smeulders, n° 23.066, du 24 mars 1983, et Commune de Mortsel, n° 31.957, du 14 février 1989.

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.289 à 33.311 Page 23 N° 33.306

Vu la requête introduite le 18 août 1988 par Lambert Rorife qui demande l'annulation de l'arrêté de la députation permanente du conseil provincial de Liège du 16 juin 1988 annulant la délibération du conseil de l'aide sociale d' Awans du 7 avril 1988 fixant son traitement individuel;

Vu la requête introduite le 9 février 1989, par laquelle le Centre public d'aide sociale d'Awans demande à être reçu en qualité de partie intervenante;

Vu l'ordonnance du 15 février 1989 accueillant cette intervention;

Vu la requête introduite le 18 août 1988 par Lambert Rorife qui demande l'annulation de l'arrêté de la députation permanente du conseil provincial de Liège du 14 juillet 1988 annulant la délibération du conseil de l'aide sociale d'Awans du 19 mai 1988 fixant son traitement individuel;

Vu la requête introduite le 9 février 1989, par laquelle le Centre public d'aide sociale d'Awans demande à être reçu en qualité de partie intervenante;

Vu l'ordonnance du 15 février 1989 accueillant cette intervention;

Considérant qu'il y a lieu de joindre les causes en raison de leur connexité;

Considérant que le requérant est secrétaire à temps partiel du centre public d'aide sociale d'Awans; que, par une délibération du 7 avril 1988, le conseil de l'aide sociale a fixé le traitement individuel du requérant sur la base de l'échelle barémique 1.67 réduit à 17/38èrnes, du 1er février 1985 au 31 décembre 1986;

que cette délibération a été suspendue par le collège des bourgmestre et échevins de la commune d'Awans en application de l'article 111, § 2, de la loi du 8 juillet 1976 organique des centres publics d'aide sociale qui permet au collège de suspendre, par un arrêté motivé, l'exécution de toute décision du conseil de l'aide sociale, à l'exclusion des décisions d'octroi d'aide individuelle et de récupération, qui nuit aux intérêts financiers de la commune; qu'après le maintien de sa décision par le conseil de l'aide sociale, la députation permanente l'a annulée le 16 juin 1988 en application de l'article 111, § 2, précité; qu'il s'agit de l'acte attaqué par le premier recours;

Considérant q~e, par une délibération du 19 mai 1988, le conseil de l'aide sociale a fixé le traitement individuel du requérant sur la base de l'échelle barémique 1.80 réduit à 17/38èrnes, à dater du 1er janvier 1987; que, par application de l'article 111, § 2, précité, cette délibération a été suspendue par le collège des bourgmestre et échevins, maintenue par le conseil de !'aide sociale et annulée par la députation permanente le 14 juillet 1988; qu'il s'agit de l'acte attaqué par le second recours;

Considérant que la décision par laquelle l'autorité administrative fixe, en application du statut pécuniaire de son personnel, le traitement d'un agent détermine l'étendue de son droit au traitement; que le différend opposant l'agent qui se prévaut d'une application erronée du règlement lors de la fixation du traitement à l'autorité débitrice de celui-ci est une contestation qui a directement pour objet la reconnaissance du droit de cet agent à un traitement déterminé et qui échappe à la compétence du Conseil d'Etat, en vertu des articles 92 et 93 de la Constitution; que l'autorité de tutelle exerçant son contrôle de légalité et d'opportunité peut, dans les conditions prévues par la loi qui l'y habilite, annuler la décision fixant le traitement de !'agent; qu'en introduisant contre l'acte de !'autorité de tutelle un recours qui peut être introduit aussi par l'autorité subordonnée l'agent ne tend qu'à faire établir que l'autorité de tutelle n'a pas exercé régulièrement son pouvoir d'annulation; qu'en statuant sur le litige qui oppose l'agent créancier du traitement à l'autorité de tutelle qui n'en est pas débitrice, le Conseil d'Etat prend une décision qui a une incidence sur le droit subjectif de l'agent, mais il ne tranche pas une contestation ayant directement pour objet la reconnaissance de ce droit; que le Conseil d'Etat est compétent,

(Jonction - réouverture des débats).

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.307

N° 33.307

ARRET du 31 octobre 1989 (Ille Chambre)

Arrêts Nos 33.289 à 33.311

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MM. Van Aelst, président de chambre, François et Mme Thomas, rapporteur, conseillers, et M. Quintin, auditeur.

C.P.A.S. GANSHOREN (Me Van der Borst) c/ Etien

1. AIDE SOCIALE - Droit à l'aide sociale - Centre compétent pour accorder l'aide

L'erreur que commet la chambre de recours en affirmant que le demandeur d'aide était domicilié dans la commune du centre public d'aide sociale intimé porte sur un élément essentiel pour la détermination du centre compétent pour accorder les secours.

II et III. (voir n°5 32.106, Il et III)

Vu la requête introduite le 29 octobre 1987 par le centre public d'aide sociale de Ganshoren qui demande l'annulation de la décision de la chambre de recours de langue française de la province de Brabant du 5 juin 1987;

Considérant que le 15 avril 1985 Jeanine Etien, rayée d'office depuis le 31 octobre 1978 des registres de la population de Jette, a été admise à la section psychiatrique de l'hôpital Brugmann, établissement dépendant du centre public d'aide sociale de Bruxelles; que, par une décision du 4 juin 1985, le conseil de l'aide sociale du centre public d'aide sociale a accordé à J. Etien le bénéfice du minimum de moyens d'existence; que, le 4 juillet 1985, J. Etien a été inscrite dans les registres de la population de Bruxelles; que, le 23 septembre 1985, le comité spécial du service social du centre public de Bruxelles a autorisé son placement pour une durée indéterminée dans un établissement géré par l'association sans but lucratif «THUIS» à Ganshoren à l'adresse duquel J. Etien a fait transférer son domicile à partir du 1er décembre 1986; que le centre public de Bruxelles est intervenu dans les frais d'hébergement; qu'en décembre 1986, le conseil de l'aide sociale du centre public de Bruxelles a décidé de ne plus accorder le minimex à J. Etien et de ne plus intervenir dans les frais de son hébergement, à partir du 1er décembre 1986, au motif qu'elle avait quitté Bruxelles pour Ganshoren à cette date; qu'en février 1986, J. Etien s'est installée, avec l'accord des responsables de l'établissement, dans un «appartement supervisé par l'association sans but lucratif «THUIS»»; que, le 16 février 1987, le conseil de l'aide sociale de Ganshoren a refusé d'intervenir dans les frais d'hébergement;

Considérant que, le 30 décembre 1986, J. Etien a introduit un recours auprès du tribunal du travail contre la décision du centre public d'aide sociale de Bruxelles de ne plus lui accorder le minimex; que, par un arrêt du 1er octobre 1987, la cour du travail, réformant un jugement du tribunal du travail du 2 mars 1987, a maintenu le bénéfice du minimex à la partie adverse; que sur recours introduit par la partie adverse contre la décision précitée du conseil de l'aide sociale du centre public de Ganshoren du 16 février 1987, la chambre de recours de langue française de la province de Brabant a, par la décision attaquée du 5 juin 1987, «dit que le C.P.A.S. de Ganshoren est compétent en la cause et que l'aide qu'il doit accorder à la demanderesse sera fixée à 15 .600 Frs par mois à dater du r· juin 1987»; que cette décision est ainsi motivée:

«Attendu qu'il résulte desdites explications ainsi que des éléments de la cause ce qui suit:

,,_,__la requérante, âgée de 37 ans, de nationalité belge, est célibataire;

,,_,__était déjà domiciliée à Ganshoren lorsqu'elle fut placée, en octobre 1985 et après une hospitalisation à l'Institut Brugmann, dans le home «Thuis», centre ouvert de post-cure psychiatrique, sis 35 rue Zeyp à Ganshoren, adresse à laquelle elle se domicilie;

})--,--- ( .. .);

»Attendu que les débats ont établi que l'intéressée est domiciliée sur le territoire de Ganshoren depuis une date antérieure à son retour sur cette commune, en octobre 1985, après son hospitalisation à l'Institut Brugmann;

»( .. .);»;

Considérant que le centre requérant prend un premier moyen de la violation de l'article 580, 8°, du code judiciaire, en ce que le tribunal du travail est seul compétent pour connaître des contestations relatives au droit à un minimum de moyens d'existence; qu'il soutient que la chambre de recours aurait dû se déclarer incompétente;

Considérant qu'il ressort des éléments de la cause que les relations entre la partie adverse et les centres publics d'aide sociale de Bruxelles et de Ganshoren ont donné naissance à des litiges distincts ayant trait à des décisions relatives d'une part à l'octroi du minimum de moyens d'existence et d'autre part à l'intervention financière dans les frais de placement de la partie adverse; que celle-ci a porté devant le tribunal du travail, en application de l'article 10 de la loi du 7 août 1974 instituant le droit à un minimum de moyens d'existence et de l'article 580, 8°, du code judiciaire, la contestation née du refus du centre public de Bruxelles de continuer à lui accorder le minimex et devant la chambre de recours la contestation née du refus du centre requérant d'intervenir

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

Page 154: (VIe - KU Leuven · 33.103 - CLOETENS et REKOMS = n° 33.100 +désistement. RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989 . Arrêt N° 33.107 Page 1 N° 33.107 ARRET du 3octobre1989

Arrêts Nos 33.289 à 33.311 Page 25 N° 33.308

dans les frais de son hébergement; que la chambre de recours a statué sur le recours introduit contre une décision refusant une aide matérielle sollicitée sur la base de l'article 60, § 3, de la loi du 8 juillet 1976 organique des centres publics d'aide sociale; qu'elle était compétente pour connaître de ce recours en vertu de l'article 71 de la loi précitée; que le moyen n'est pas fondé;

Considérant qu'en un deuxième moyen, le centre requérant soutient que la décision de la chambre de recours «est motivée par un élément manifestement inexact: à savoir que Madame Etien était «domiciliée sur le territoire de Ganshoren depuis une date antérieure à son retour sur cette commune, en octobre 1985, après son hospitalisation à l'hôpital Brugmann>»>;

Considérant que la chambre de recours a commis une erreur en affirmant que J. Etien était domiciliée à Ganshoren lorsqu'elle fut placée au home «Thuis» en octobre 1985, après son hospitalisation à l'hôpital Brugmann; qu'en effet, J. Etien était, à cette époque, inscrite dans les registres de la population de la ville de Bruxelles depuis le 4 juillet 1985 et n'a fait transférer son domicile à Ganshoren que le 1er décembre 1986; que cette erreur porte sur un élément essentiel pour la détermination du centre public d'aide sociale compétent pour accorder des secours à la partie adverse; que le moyen est fondé;

Considérant que la partie adverse est étrangère à l'erreur commise par la chambre de recours; que, celle­ci ayant agi dans l'exercice d'une mission d'intérêt général, il y a lieu de mettre les dépens à charge de la Communauté française,

(Annulation - transcription - renvoi - dépens à charge de la Communauté française).

N° 33.308 ARRET du 31 octobre 1989 (IIIe Chambre)

MM. Van Aelst, président de chambre, rapporteur, François et Mme Thomas, conseillers, et M. Fortpied, premier auditeur.

S.A. ORGANISATION BELGE DE TRAVAUX «ORBETRA» (Mes Leurquin et Putzeys) c/ Commune d'Estaimpuis (Mes Dujardin et Wagnon)

MARCHES DE TRAVAUX, DE FOURNITURES ET DE SERVICES - Adjudication publique -Etablissement de la soumission - Nullité des soumissions irrégulières - Nullités relatives - Irrégularités non substantielles

En l'espèce, si le cahier spécial des charges porte la liste de certains documents techniques à joindre à l'offre, il n'indique toutefois pas que l'absence de ces documents entraînerait nécessairement une nullité absolue.

Alors spécialement que ces documents ne contenaient que des renseignements généraux destinés à illustrer le poste «chauffage» de la soumission pour les travaux de construction d'une école.

Vu la requête introduite le 11 mai 1987 par la société anonyme Orbetra qui demande l'annulation de:

«- la décision de la partie adverse, de date inconnue, par laquelle ladite partie adverse, dans le cadre d'une deuxième procédure de remise en adjudication a décidé de confier le marché relatif aux travaux.fournitures, transports, main-d'oeuvre et tous moyens d'exécution concernant la construction d'une école primaire et gardienne sur un terrain situé à Leers-Nord (commune d' Estaimpuis), rue du Rieu, à la S.A. Declerck de Roeselare.»;

Vu l'arrêt n° 32.259 du 22 mars 1989 rouvrant les débats en ce qui concerne la présente affaire ... ;

Considérant que, par l'arrêt 32.259 du 22 mars 1989, le Conseil d'Etat a rejeté la requête portant le n° A. 35.547/lll-9851 en mettant les dépens à charge de la requérante; qu'en ce qui concerne l'affaire portant le n° A. 36.060/IIl-9933, il a rejeté le moyen développé dans la requête mais a ordonné la réouverture des débats étant donné que, dans un dernier mémoire complémentaire déposé sur le vu de nouvelles pièces, la requérante avait présenté un nouveau moyen qui n'avait pu être examiné par le premier auditeur rapporteur;

Considérant que, dans ce moyen, la requérante fait grief à la partie adverse d'avoir attribué le marché à un soumissionnaire dont l'offre serait entachée de nullité absolue à défaut «d'y avoir joint des documents essentiels engageant les soumissionnaires au même titre que leurs offres de sorte qu'en outre, en les exigeant de la requérante, mais non pas à l'adjudicataire, la partie adverse a rompu l'égalité entre soumissionnaires»;

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.308

Arrêts Nos 33.289 à 33.311

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Considérant qu'il ressort du rapport d'étude des soumissions, établi le 27 janvier 1987 par l'auteur du projet, que «Concernant les documents qui devaient être joints à la soumission, il (le rapporteur) constate que l'offre Declerck ne joint aucun document»; qu'il ajoute toutefois: «Cette situation n'entraîne pas la nullité des offres»;

Considérant que si le cahier spécial des charges portait la liste de certains documents techniques à joindre à l'offre, il n'indiquait toutefois pas que l'absence de ceux-ci entraînerait nécessairement une nullité absolue; qu'il ne s'agissait pas là d'une prescription essentielle du cahier spécial des charges, d'autant que ces documents ne contenaient que des renseignements généraux destinés à illustrer le poste «chauffage» de la soumission; que la partie adverse n'a pas excédé ses pouvoirs en estimant qu'elle pouvait procéder à la comparaison des offres nonobstant l'absence de ces documents; que le moyen ne peut être retenu,

(Rejet - dépens à charge de la requérante).

N° 33.309

ARRET du 31 octobre 1989 (IIIe Chambre) MM. Van Aelst, président de chambre, rapporteur, François et Mme Thomas, conseillers, et M. Fortpied, premier auditeur.

S.A. ETABLISSEMENTS DRUART (Me Van Ommeslaghe) c/ C.P.A.S. La Louvière (Me Bringard)

MARCHES DE TRAVAUX, DE FOURNITURES ET DE SERVICES - Règles applicables aux adjudications et aux appels d'offres - Contentieux

Dès lors que le maftre de l'ouvrage a mené à bon terme une première procédure d'adjudication en désignant un adjudicataire, il n'a aucun motif légitime de déclarer cette procédure inopérante et de l'abandonner.

Vu la requête introduite le 16 décembre 1987 par la société anonyme Etablissements Druart qui demande l'annulation des «décisions de la partie adverse, prises à des dates indéterminées, d'organiser presque simul­tanément deux procédures d'adjudication restreinte pour les mêmes travaux et d'adjuger à la S.A. Dulière de Morlanwelz les travaux d'installation de chauffage central et de ventilation de la phase 3, lot 3 (. . .) des travaux d'aménagement de l'ancien hôpital de Bois du Luc, en un home occupationnel et un centre de jour pour handicapés adultes sévères et profonds»;

Considérant que les faits sont les suivants:

- Le marché litigieux a été mis en adjudication restreinte pour le 30 septembre 1985.

- La société anonyme Etablissements Druart, ayant déposé l'offre la plus basse avec un prix de 8.265.684 francs T.V.A. comprise, a été déclarée adjudicataire par le centre public d'aide sociale le 6 novembre 1985 et par le conseil communal le 18 novembre 1985.

- Les 14 novembre et 20 décembre 1985, le centre public d'aide sociale a communiqué le dossier, pour approbation des subsides, au ministre compétent.

- En l'absence de décision du ministre, le centre public d'aide sociale a demandé à plusieurs reprises à la requérante, qui a marqué son accord, de prolonger la validité de son offre.

- Le 29 janvier 1986, le centre public d'aide sociale a décidé, devant les réticences de la Communauté française, de procéder à une réadjudication en consultant un nombre plus important d'entreprises.

- La requérante a reçu un nouvelle invitation à soumissionner pour le 19 février 1986.

- Le délégué de la firme Druart s'est présenté après l'ouverture à la séance d'adjudication. Il n'a pas déposé de soumission.

- Le soumissionnaire le moins disant était la société anonyme Flakt-Dulière avec un montant de 8.796.918 francs T.V.A. comprise. Elle a été désignée comme adjudicataire le 28 août 1986.

- Le 26 novembre 1986, le centre public d'aide sociale a de nouveau déclaré adjudicataire la société anonyme Etablissements Druart mais, le 29 décembre 1986, il a retiré sa délibération du 6 novembre 1985 «ainsi que toute délibération subséquente portant sur pareil objet» et a déclaré adjudicataire la société anonyme Flakt-

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.289 à 33.311 Page 27 N° 33.309

Dulière, décision qui a été approuvée par le collège des bourgmestre et échevins le 26 janvier 1987 et le 9 mars 1987 par le Ministre de la Communauté française.

- Entretemps, les 12 mai et 24 septembre 1986, le centre public d'aide sociale avait invité à nouveau la requérante à prolonger le délai de validité de son offre, ce qu'elle avait fait le 7 juillet et le 10 octobre 1986.

- Le 16 octobre 1987, la requérante a invité le centre public d'aide sociale à lui faire savoir s'il entendait donner suite à la procédure d'adjudication et à l'informer, sinon, des motifs pour lesquels elle avait été écartée du marché.

- Il lui a été répondu en ces .termes le 22 octobre 1987:

«Nous tenons à porter à votre connaissance les éléments suivants: notre administration a organisé une deuxième adjudication restreinte en date du 19 février 1986, à la demande de la Communauté française, notre pouvoir de tutelle, et en accord avec notre auteur de projet.

»Il est malheureux de constater qu'à cette occasion votre délégué est arrivé en retard et que votre soumission n'a pu être prise en considération (cfr. article 26, §§ 2 et 3 de l'A.R. du 22 avril 1977).

»D'autre part, vous n'êtes pas sans savoir qu'en vertu de l'article 15, § l''", de la loi du 14 juillet 1976, lorsque le maître de l'ouvrage décide de refaire la procédure, le marché, s'il est attribué, ne peut l'être que sur base des résultats de la dernière consultation (le Conseil d'Etat, dans son arrêt 7901 du 31 mai 1960, ne dément d'ailleurs pas cette procédure).»;

Considérant que la partie adverse objecte que le recours est tardif, la seconde adjudication à laquelle la requérante a été appelée étant intervenue le 19 février 1986 «en telle sorte que dès ce moment la S.A. Etablissements Druart avait implicitement connaissance de la désignation d'un autre adjudicataire»; qu'elle ajoute qu'«en outre, dès le début du mois de juillet 1987 (. . .) cette société savait que le marché ne lui était pas attribué eu égard aux contacts qu'elle avait entretenus avec le bureau d'études chargé de la conception de la construction ... »;

Considérant que la requérante a sans doute été surprise par l'annonce de la deuxième adjudication, le 19 février 1986; qu'elle a pu croire que la première n'était pas abandonnée pour autant, puisque le centre public d'aide sociale persistait à lui demander de prolonger la validité de son offre et que ce n'est que le 29 décembre 1986 qu'il a fait son choix définitif, approuvé par les autorités compétentes les 26 janvier 1987 et 9 mars 1987 et notifié à l'intéressée le 29 mai 1987; qu'aucun élément du dossier ne prouve que la requérante avait eu connaissance du choix autrement que par la lettre du 22 octobre 1987; que l'exception ne peut être retenue;

Considérant que la partie adverse objecte encore que la requérante, n'ayant pas soumissionné dans le cadre de la deuxième procédure d'adjudication, est sans intérêt à en poursuivre l'annulation;

Considérant que, s'agissant manifestement de deux procédures menées conjointement et non successivement, il ne peut être reproché à la requérante de ne pas avoir soumissionné à la seconde alors qu'elle se savait la moins disante pour la première dont on ne lui avait pas dit qu'elle était abandonnée; que l'exception ne peut être retenue;

Considérant que la requérante prend un moyen de la violation de l'article 12, § 1er, de la loi du 14 juillet 1976 relative aux marchés publics de travaux, de fournitures et de services et des articles 34, 37, § 3 et 38 de l'arrêté royal du 22 avril 1977, en ce que la partie adverse n'a pas attribué le marché à la requérante, soumissionnaire régulier le moins disant;

Considérant que la partie adverse répond qu'en prenant la décision de ne pas attribuer le marché sur la base de la première procédure et de refaire une nouvelle procédure, elle a rendu sans objet les soumissions antérieures;

Considérant que la partie adverse a mené à son terme la première procédure d'adjudication en désignant la requérante comme adjudicataire le 6 novembre 1985 et en confirmant cette décision le 26 novembre 1986; qu'elle n'avait donc aucun motif légitime de déclarer cette procédure inopérante et de l'abandonner le 29 décembre 1986; que le moyen est fondé,

(Annulation de

- la décision du 29 janvier 1986 du conseil de l'aide sociale du centre public d'aide sociale de La Louvière de procéder à une réadjudication des travaux d'installation de chauffage central et de ventilation de la phase 3, lot 3 ( ... ) des travaux d'aménagement de l'ancien hôpital de Bois du Luc, en un home occupationnel et un centre de jour pour handicapés adultes sévères et profonds;

- la décision du 29 décembre 1986 par laquelle ce même conseil décide de désigner comme adjudicataire de ces travaux la société anonyme Flakt-Dulière de Morlanwelz - dépens à charge de la partie adverse).

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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N° 33.310

N° 33.310

ARRET du 31 octobre 1989 (lue Chambre)

Arrêts Nos 33.289 à 33.311

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MM. Van Aelst, président de chambre, rapporteur, F~~çois et Mme Thomas, conseillers, et M. Fortpied, premier auditeur.

S.A. WEGEBO (Mes Sprockeels et Flamme) c/ Région wallonne (Me Lejeune)

I. MARCHES DE TRAVA.UX, DE FOURNITURES ET DE SERVICES - Adjudication publique ;.._ Choix de l'adjudicataire --rDétermJnation de l'offre la plus basse - Rectification des soumissions par l'administration - Rectificatimrd~rreurs mathématiques et des erreurs matérielles

En !'espèce, c'est à juste titre que le maftre de !'ouvrage a rectifié une simple erreur d'addition de !'adjudicataire qui est ainsi devenu le moins disant.

II. MARCHES DE TRAVAUX, DE FOURNITURES ET DE SERVICES - Adjudication publique -Etablissement de la soumission - Situation en matière de paiement des cotisations de sécurité sociale

En!' espèce, le maître del' ouvrage a pu considérer que!' absence de sceau de!' O.N.S.S. n'était pas de nature à mettre en doute!' authenticité del' attestation de cet office, qui gardait toute sa valeur quant à la nature des renseignements qu'elle contenait.

... Alors spécialement qu'il disposait, grâce à d'autres dossiers, d'attestations perti­nentes avec cachet sec.

Vu la requête introduite le 15 avril 1988 par la société anonyme Wegebo qui demande l'annulation de «la décision par laquelle la partie adverse a écarté (son offre) déposée ... en réponse .à l'adjudication du 9 septembre 1987 (cahier spécial des charges n° KF/87.E.29) et a attribué le marché à une firme tierce».

Considérant que les faits sont les suivants:

- Le marché litigieux a fait l'objet d'une adjudication publique. Le 9 septembre 1987, six soumissions ont été recueillies dont celle de la société anonyme Wegebo avec un montant de 32.858.467 francs et celle de l'association momentanée Namur Enrobes avec un montant de 32.925.726 francs.

- Toutefois, après rectifications, l'association momentanée Namur Enrobes s'est trouvée le soumissionnaire le moins disant avec un montant de 32.788.920 francs et, le 9 décembre 1987, le ministre l'a désignée comme adjudicataire;

Considérant que la requérante, en un moyen unique, reproche à la partie adverse de ne pas l'avoir désignée comme adjudicataire alors qu'elle était la moins disante; que toutefois, dans son mémoire en réplique déposé après examen du dossier administratif, elle s'en remet à justice; qu'il apparaît en effet du dossier que c'est à juste titre que la partie adverse a rectifié une simple erreur d'addition de l'adjudicataire qui est ainsi devenu le moins disant; que le moyen n'est pas fondé;

Considérant que dans le mémoire en réplique la requérante prend un moyen nouveau de la violation des articles 15, §§ 3 à 5, et 25, § 1°', de l'arrêté royal du 22 avril 1977 relatif aux marchés publics de travaux, de fournitures et de services, en ce que l'attestation de l'Office national de sécurité sociale qui se trouvait jointe à la soumission de l'adjudicataire n'était pas «revêtue d'un cachet sec aux empreintes de l'O.N.S.S.» alors que 1' attestation portait qu'elle n'était pas valable sans cette empreinte;

Considérant que la partie adverse n'a pas excédé les limites de son pouvoir d'appréciation en estimant que la formalité requise n'était pas substantielle; qu'en effet, elle a pu considérer que l'absence de sceau n'était pas de nature à mettre en doute l'authenticité de l'attestation de l'Office national de sécurité sociale, qui gardait toute sa valeur quant à la nature des renseignements qu'elle contenait, d'autant plus que le Fonds des routes disposait, grâce à d'autres dossiers, d'attestations pertinentes avec cachet sec; que le moyen ne peut être retenu,

(Rejet - dépens à charge de la requérante).

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.289 à 33.311 Page 29

N° 33.311

ARRET du 31 octobre 1989 (Ille Chambre)

N° 33.311

! JY v''-..,_

MM. Van Aelst, président de chambre, rapporteur, François et Mme Thomas, conseillers, et Mme Dagnelie, auditeur.

BROGNIEZ (Mes Detry et Geairain) c/ Office national des pensions (Mes Gehlen, Putzeys et Leurquin)

LANGUES EN MATIERE ADMINISTRATIVE - Services dont l'activité s'étend à tout le pays -Services centraux - Cadres linguistiques - Critères de la répartition des emplois - Cadre bilingue

Le cadre bilingue est distinct des cadres français et néerlandais. Le Conseil d'Etat relève d'office l'illégalité de la nomination d'un fonctionnaire uni­

lingue à un emploi qui devait être attribué à un fonctionnaire du même rôle ayant fait la preuve de son bilinguisme.

Vu la requête introduite le 19 juillet 1988 par René Brogniez qui demande l'annulation «de la décision prise par le comité de gestion de !'Office national des pensions en sa séance du 16 mai 1988 portant promotion de Mme Deweze Nicole, conseiller adjoint, au grade de directeur du rôle linguistique français, à l' Office national des pensions, avec effet au la juin 1988»;

Considérant que le requérant et Nicole Deweze ont postulé l'emploi correspondant au grade de directeur dans les services centraux de !'Office national des pensions dont la vacance a été annoncée par l'avis 45/1 du 22 mars 1988; que, par une décision du 16 mai 1988 du comité de gestion, N. Deweze a été promue à ce poste, promotion qui a été publiée par l'avis 45/3 du 26 mai 1988;

Considérant que la nomination attaquée est faite au grade de directeur, grade classé au rang 13; qu'aux termes de l'article 43, § 2, des lois coordonnées sur l'emploi des langues en matière administrative, les fonctionnaires d'un grade égal ou supérieur à celui de directeur sont répartis en trois cadres: un français, un néerlandais et un bilingue; que suivant le paragraphe 3, deuxième alinéa, du même article 43, le cadre bilingue comporte 20 p.c. de l'effectif global des fonctions égales ou supérieures à celles de directeur, ces fonctions étant réservées à tous les degrés de la hiérarchie, en nombre égal, aux fonctionnaires des deux rôles linguistiques; que le paragraphe 3, troisième alinéa, du même article porte que «.pour être admis au cadre bilingue, les fonctionnaires doivent fournir, devant un jury constitué par le secrétaire permanent au recrutement, la preuve qu'ils connaissent suffisamment la seconde langue»; que le paragraphe 5 du même article 43 dispose:

«Les promotions ont lieu par cadre. Les fonctionnaires qui ont fourni la preuve de leur bilinguisme selon les modalités indiquées plus haut, peuvent participer aux promotions tant dans le cadre bilingue que dans le cadre qui correspond au rôle sur lequel ils sont inscrits.

»L'application de cette règle ne peut cependant porter atteinte à l'équilibre arrêté pour le cadre bilingue.»;

Considérant que le cadre bilingue est distinct des cadres français et néerlandais; que l'arrêté fixant les cadres linguistiques de !'Office national des pensions a notamment pour but d'assurer la présence, au deuxième degré de la hiérarchie, d'au moins quatre agents du rôle linguistique français et d'au moins quatre agents du rôle linguistique néerlandais, tous ayant fourni la preuve de leur bilinguisme;

Considérant qu'il ressort du dossier que le jour où l'acte attaqué a été pris, tous les emplois du deuxième degré revenant au cadre français et trois des quatre emplois de ce degré attribués au cadre bilingue français étaient occupés par des agents unilingues du rôle français; que N. Deweze, unilingue du rôle français, a été nommée à un emploi qui devait être attribué à un agent du rôle français ayant fourni la preuve de son bilinguisme; qu'ainsi l'acte attaqué viole l'article 43, §§ 2, 3 et 5 des lois coordonnées sur l'emploi des langues en matière administrative; que le moyen doit être soulevé d'office; qu'il n'y a pas lieu d'examiner les moyens de la requête faute, à les supposer fondés, qu'ils puissent conduire à une annulation plus étendue de l'acte attaqué,

(Annulation de la décision du comité de gestion de !'Office national des pensions du 16 mai 1988 portant promotion de Nicole Deweze, conseiller adjoint, au grade de directeur du rôle linguistique français, à !'Office national des pensions, avec effet au ier juin 1988 - publication de l'arrêt par extrait dans les mêmes formes que la décision annulée - dépens à charge de la partie adverse).

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

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Arrêts Nos 33.323 à 33.327

FAC'UL îf OE DROff Bl8U(fft'JEQUE

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N° 33.323

ARRET du 31 octobre 1989 (VIIe Chambre) M. Tacq, président de chambre, rapporteur, Mmes Vrints et Tulkens, conseillers, et M. Stevens, auditeur.

VALCKX (Me Lysens) c/ Ville de Hasselt

1. BATISSE ET LOTISSEMENT - Permis de lotir - Effets - Généralités

Si le permis de lotir et le contrat de lotissement qui a été conclu par la suite sous la forme de contrats de vente successifs entre le lotisseur et les acheteurs d'un lot procurent effectivement à ces derniers une plus grande protection juridique, ils n'ont pas pour effet que leur droit au respect des prescriptions en matière de lotissement serait différent du droit de tout citoyen belge au respect de la loi ou du règlement, ou lui serait supérieur.

II. PROCEDURE - Règles spéciales à la demande de suspension - Moyen sérieux

Ni la loi du 16 juin 1989, ni les travaux préparatoires de celle-ci ne comportent d'indications que le législateur aurait eu l'intention de faire sanctionner par une suspension l'inégalité ou la discrimination que renferme, dans une certaine mesure, toute illégalité.

Pour qu'il y ait motif de suspension par le Conseil d'Etat, il ne suffit pas que le droit à l'application correcte de la loi ou du règlement, que tout citoyen possède de pareille manière, ait été violé. Une inégalité qui ne trouve son fondement que dans l'illégalité del' acte attaqué ne peut suffire. L'inégalité doit former par elle-même une illégalité qui constitue un motif d'annulation de manière autonome, c'est-à-dire à l'exclusion de toute autre illégalité.

Vu la requête introduite le 1er septembre 1989 par laquelle Ludo Valckx demande l'annulation de la délibération du collège des bourgmestre et échevins de la ville de Hasselt du 1er juin 1989 qui accorde à Gilbert Hermans le permis en vue de bâtir un «café avec habitation» sur une parcelle située Overdemerstraat 15, à Hasselt, et cadastrée section B, division 12, n° 139/p;

Vu la requête introduite le même jour par laquelle Ludo Valckx demande la suspension de l'exécution de la délibération susmentionnée du collège des bourgmestre et échevins de la ville de Hasselt;

Considérant qu'il y a lieu de statuer, au préalable, sur la demande de suspension;

Considérant qu'en vertu de l'article 17, rétabli dans les lois coordonnées sur le Conseil d'Etat par l'article 15 de la loi du 16 juin 1989 portant diverses réformes institutionnelles, le Conseil d'Etat ne peut suspendre !'exécution d'un acte administratif attaqué par un recours en annulation que si des moyens sérieux, fondés sur la violation des articles 6, 6bis et 17 de la Constitution, sont invoqués dans le recours en annulation et à condition que l'exécution immédiate de l'acte attaqué risque de causer un préjudice grave difficilement réparable;

Considérant que dans sa requête en annulation, le requérant invoque que la délibération attaquée du collège est entachée de violation des articles 6 et 6bis de la Constitution, en ce qu'un permis en vue de «bâtir un café» dans les limites d'un lotissement réservé à la construction résidentielle a été délivré à Gilbert Hermans, bien qu'ils soient tous deux <<propriétaires d'une parcelle de terrain comprise dans un même lotissement auquel sont applicables les mêmes conditions de lotissement pour tous les deux», alors que lui même est tenu «de se conformer aux conditions de lotissement», en sorte qu'il n'a ainsi <<pas été traité de la même manière que M. Hermans» et que cette divergence de traitement «n'est justifiée ni par une différence objective, ni par un objectif admissible»; qu'en d'autres termes, le requérant prétend que la partie défenderesse, par sa délibération attaquée, accorde au propriétaire d'un lot un permis de bâtir qu'elle aurait dû refuser parce qu'il était contraire aux prescriptions en matière de lotissement, alors que lui-même est obligé d'observer ces prescriptions;

Considérant que si le permis de lotir et le contrat de lotissement qui a été conclu par la suite sous la forme de contrats de vente successifs entre le lotisseur et les acheteurs d'un lot, procurent effectivement à ces derniers une plus grande protection juridique, ils n'ont pas pour effet que leur droit au respect des prescriptions en matière de lotissement serait différent du droit de tout citoyen belge au respect de la loi ou du règlement, ou lui serait supérieur;

Çonsidérant que ni la loi du 16 juin 1989, ni les travaux préparatoires de celle-ci ne comportent d'indications que le législateur aurait eu l'intention de faire sanctionner par une suspension l'inégalité ou la discrimination que renferme, dans une certaine mesure, toute illégalité; que, pour qu'il y ait motif de supsension par le Conseil d'Etat, il ne suffit pas que le droit à l'application correcte de la loi ou du règlement, que tout citoyen possède de pareille manière, ait été violé; qu'une inégalité qui ne trouve son fondement que dans l'illégalité de l'acte attaqué, ne peut suffire; que l'inégalité doit former par elle-même une illégalité qui constitue un motif d'annulation de manière autonome, c'est-à-dire à l'exclusion de toute autre illégalité; que le requérant n'invoque pas pareille inégalité;

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989

Page 160: (VIe - KU Leuven · 33.103 - CLOETENS et REKOMS = n° 33.100 +désistement. RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989 . Arrêt N° 33.107 Page 1 N° 33.107 ARRET du 3octobre1989

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N° 33.323

Arrêts Nos 33.323 à 33.327

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que, par ailleurs, il ne ressort pas des éléments de la cause que c'est le requérant, plutôt, qui se soit vu refuser le permis en vue de bâtir sur son terrain un «café avec habitation», ou que la partie défenderesse lui refuserait ce permis s'il lui en faisait la demande;

Considérant que dans l'état actuel de la procédure, le moyen pris de la violation des articles 6 et 6bis de la Constitution ne peut être considéré comme un moyen sérieux au sens de l'article 17, § 2, des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat;

Considérant que l'une des deux conditions fondamentales imposées par l'article 17 précité qui doivent être satisfaites de manière cumulative, n'étant pas remplie, la demande de supsension doit être rejetée,

(Rejet de la demande de suspension de l'exécution de la délibération du collège des bourgmestre et échevins de la ville de Hasselt du 1er juin 1989).

N° 33.324

ARRET du 3 novembre 1989 (IIIe Chambre) MM. Van Aelst, président de chambre, François, rapporteur, et Mme Thomas, conseillers, et M. Coolen', premier auditeur (avis contraire)*.

GAUX (Me Du Bosch) c/ Commune d' Anhée (Mes Cambier), Province de Namur et Gouverneur de la province de Namur

I. PROCEDURE- Requête - Désignation de la partie adverse - Autorité étrangère à l'acte attaqué

Une personne publique doit être mise hors de cause lorsque l'acte attaqué n'a pas été pris par: une de ses autorités agissant comme telle.

II. NOTION D'ACTE (SUSCEPTIBLE DE RECOURS) - Abstention -.Tutelle administrative -Intervention facultative

La décision de l'autorité de tutelle de ne pas s'opposer à ce qu'un acte produise ses effets n'est pas susceptible de recours.

III. PROCEDURE - Requête - Délai - Point de départ - Connaissance - Preuve de la con­naissance de l'acte

La circonstance qu'une enquête de commodo et incommodo a été menée ne prouve pas que le tiers ait eu une connaissance suffisante de la décision qui a été prise à la suite de cette enquête, et n'indique pas à partir de quelle date il a entendu dire qu'une décision était prise.

IV. LOIS, DECRETS ET ARRETES -Abrogation -Abrogation implicite - Conditions générales

L'abrogation implicite d'une disposition ne peut s'inférer que de son incompatibilité logique avec une disposition plus récente, et non de ce qu'une disposition présentant des analogies avec la première est expressément abrogée.

V. VOIRIE - Chemins vicinaux - Elargissement, redressement, ouverture et suppression -Décision - Généralités

1. La loi du 3 décembre 1984 n'a pas abrogé implicitement l'article 28 de la loi du 10 avril 1841 en tant qu'il soumet à la députation permanente, laquelle statue sauf recours au Roi, notamment les délibérations des conseils communaux relatives à la suppression d'un chemin vicinal.

2. Si un chemin public dont un tronçon est totalement inutilisable peut conserver par rapport aux parcelles qui le bordent ailleurs un reste d'utilité, il n'en perd pas moins, dès lors qu'il ne permet plus de passer de l'une à l'autre de ses extrémités, une qualité essentielle à tout chemin public.

Un acte par lequel il est prévu de remplacer pendant des dizaines d'années un chemin par deU:x impasses séparées par un tronçon entièrement impraticable en tant que voirie ne peut être, relativement à ce tronçon, une permission de voirie, faute de voirie. Un tel acte

*Selon l'avis, la députation permanente, en ve~u de l'article 28 de la loi du 10 avril 1841, était seule compétente pour décider, sauf recours au Roi, la suppression d'un chemin vicinal. Et la délibération attaquée devait s'analyser comme l'avis destiné à éclairer la députati<?n permanente sur l'utilité de la suppression du tronçon litigieux. L'avis estimait dès lors que le recours était prématuré. ·

RECUEIL DES ARRETS DU CONSEIL D'ETAT - 1989