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VOUS TROUVEREZ DÉSORMAIS CHAQUE MOIS · colonel, de boire, de se battre, voire même de trousser correctement une femme. Je prends donc le flacon, et j'en ingurgite courageusement

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VOUS TROUVEREZ DÉSORMAIS CHAQUE MOIS DANS LES COLLECTIONS

" Inter-Police " "Inter-Espions"

2 TITRES

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POUR LA POCHE ET LE VOYAGE

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E S P I O N N A G E « C H O C »

B. P. KOROF

F U S É E

EN CALE SÈCHE

PRESSES INTERNATIONALES 7, Rue de la Manstenilon, PARIS (XVI

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COPYRIGHT by Editions des P R E S S E S I N T E R N A T I O N A L E S

Tous droits de reproduction, traduction, adaptation

réservés pour tous pays, y compris l'U.R.S.S.

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CHAPITRE PREMIER

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Des éclats de voix me parviennent distincte- ment à travers les deux battants en chêne sculpté. Une voix de basse grondante qui fait penser aux roulements de l'orage.

De loin en loin, de timides « Oui, camarade- colonel ! Non, camarade-colonel ! » lui font écho.

Les minutes s'écoulent lentement, tandis que je fume cigarette sur cigarette.

Les lourdes portes s'entrouvent enfin pour laisser passer l'un de mes collègues, Vania Choltkov. Je le vois qui s'éponge le front d'une main tremblante.

— Cette affaire l'a rendu fou furieux ! me souffle-t-il rapidement, alors que je me pré-

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pare à entrer à mon tour. Je ne l'ai jamais vu dans un pareil état ! Je viens de recevoir une de ces dégelées !... S'il faut l'en croire, nous ne sommes qu'une bande d'incapables tout juste bons à enfermer à la Lubianka ! (1).

Vania me serre vigoureusement la main. — Pauvre vieux ! murmure-t-il avec com-

passion. A toi maintenant ! Je pousse la porte. Au premier coup d'œil,

je constate que les appréhensions de Vania ne sont que trop justifiées.

Le bureau du camarade-colonel Ivan Ser- gueïvitch Onigline, le chef tout-puissant et res- pecté du contre-espionnage soviétique, ressem- ble davantage à un champ de bataille qu'à ce qu'il devrait être en réalité : le bureau d'un digne et grave fonctionnaire de l'U.R.S.S.

Le magnifique tapis persan est jonché de papiers. Les uns roulés en boule, les autres déchirés en menus fragments. Des rapports peu agréables à lire, sans aucun doute.

Le splendide vase chinois, datant de l'époque Ming, et que j'ai tant de fois admiré au cours de mes visites, a été réduit en mille éclats. Par un vigoureux coup de botte, plus que pro- bablement.

Il est vrai que, depuis un certain temps déjà, tout ce qui a un caractère vaguement chinois a le don de plonger le petit père dans les transes...

(1) Lubianka : prison de Moscou.

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Une veste d'uniforme a été catapultée sur une armoire. En passant, elle a balayé une série de maquettes représentant les derniers modèles de nos Mig. Ils se sont écrasés au sol après un vol sans gloire.

Quant au petit père Onigline lui-même... Eh bien !...

Il est tassé au fond de son fauteuil, le souf- fle court, la lippe pendante. Sa main droite passée dans l'entrebâillement de sa chemise, il semble, pour l'instant, s'inquiéter des batter ments de son cœur.

Je me garde de faire le moindre mouvement, le moindre geste qui pourrait trahir ma pré- sence, et déclencher une nouvelle crise dont je ferais, cette fois, tous les frais...

La tête, au crâne lisse et rond comme une bille de billard, se tourne lentement vers moi. Les petits yeux légèrement bridés se vrillent sur ma personne.

— Ah ! C'est toi ! Son bras gauche, un bras étonnamment

court, mais musculeux, esquisse un geste va- gue.

— Assieds-toi, Boris ! Là où tu trouveras de la place !

Je m'installe prudemment sur l'accoudoir du fauteuil réservé aux visiteurs. Le siège lui- même est encombré de débris de verre. Le cristal de Bohème dans lequel le petit père a coutume de lamper sa vodka n'a pas trouvé grâce à ses yeux aujourd'hui.

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— Tu vas m'écouter, Boris Petrovitch ! poursuit le camarade-colonel. Et tu me dis- penseras de tes réflexions ! Compris ?

Je me contente de hocher la tête. Je meurs d'envie de griller une cigarette, mais je pense que le moment est on ne peut plus mal choisi.

— Nous avons des ennuis du côté de Cuba, Boris ! De sérieux ennuis !

Malgré les recommandations du petit père, je ne cherche pas à dissimuler ma stupéfac- tion.

— Cuba ? Mais l'affaire est enterrée ! Les journaux, ce matin encore, disent que...

Mon chef cesse, pour de bon, de s'inquiéter de l'état de son cœur. Son poing droit s'abat sur le bureau, faisant tressaillir un téléphone dont la sonnerie résonne plaintivement.

— Ah ! Tu lis les journaux, imbécile ! Voyez donc ce camarade ! Il a reçu une for- mation qui a coûté des dizaines de milliers de roubles à l'Etat Soviétique ! Et où va-t-il puiser ses informations ? Dans les journaux ! La « Pravda » ? C'est ici que tu la trouveras, dourak ! (1).

Ayant dit, le camarade-colonel se renverse dans son fauteuil. Il contemple un instant le plafond d'un air profondément attristé avant de poursuivre.

(1) La « Pravda », principal quotidien d'in- formation de l'U.R.S.S. En Français : la Vé- rité. — Dourak : imbécile.

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— Bon ! Nous avons donc de sérieux ennuis dans les Caraïbes. Il y a là une quarantaine de fusées qui doivent être rapatriées dare-dare, et c'est à nous qu'il appartient de superviser l'opération !

Là-dessus le petit père Onigline explose lit- téralement. Il tend le bras dans la direction approximative du Kremlin.

— « Ils » ont fait des bêtises, et, bien enr tendu, « ils » comptent sur nous pour les réparer ! Pouah !

Une bordée d'ignobles jurons, qui doivent dater du temps où le camarade-colonel était encore simple poseur de rails quelque part dans le Kazakhstan, fait trembler les vitres.

Il se penche ensuite vers moi pour ajouter sur un ton confidentiel :

— Mieux encore ! « Ils » m'ont vague- ment laissé entendre que nous avions notre part de responsabilités dans cette histoire ! Tu comprends ? Une part qui grossira de jour en jour ! « Ils » en profiteront pour réduire d'autant notre budget ! Après les avoir traî- nées si loin pourquoi ne les ont-ils pas utili- sées, leurs damnées fusées ? Hein ?

Réalisant la portée de sa déclaration, le pe- tit père se tait soudain. Puis il éclate de rire. Un rire gras, énorme. Mon regard plonge jus- qu'aux amygdales qui palpitent d'aise.

— Mais je ne serais pas ici, bien à l'aise dans mon fauteuil ! Ni toi non plus, Boris Pe- trovitch ! Damnés Yankees ! Quand j'y pen-

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se ! Moi, colonel de l'Armée Rouge, réduit à l'état de petite poussière naviguant dans l'es- pace !

— « Ils » y ont pensé également, va ! mur- mure-t-il à mon adresse. Et ces grands brail- lards d'Américains tout autant. Buvons à leur santé, Boris Petrovitch ! Et surtout à la nô- tre !

Il pousse vers moi l'unique rescapé du ser- vice en cristal de Bohème. Un flacon pansu, à moitié rempli d'un liquide incolore. De la vodka. J'ai pour principe de ne jamais boire d'alcool le matin, et il est à peine neuf heures...

Mais je n'ai garde de refuser. Ce serait m'ex- poser à un interminable discours sur la nou- velle génération, incapable, selon le camarade- colonel, de boire, de se battre, voire même de trousser correctement une femme.

Je prends donc le flacon, et j'en ingurgite courageusement quelques bonnes gorgées, sous le regard satisfait de mon supérieur. Lorsque j'ai fini, il me semble que je vais cracher des flammes.

— Maintenant, écoute-moi attentivement, Boris Petrovitch ! fait Onigline tandis que je remets le flacon à portée de sa main. A l'heure où je te parle, les fusées sont en cours de chargement à bord de nos cargos dans un pe- tit port cubain. La plupart de ces engins sont d'un type courant. Mais il en existe trois dans le lot qui sont d'un modèle tout à fait spé- cial, et que nous sommes encore seuls à pos- séder...

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Le petit père m'adresse un clin d'œil. — Tu sais que les Américains inspecteront

le chargement de nos navires dès que ceux-ci seront en haute mer ?

Je fais signe que je le sais, en effet. — Tu comprends bien, Boris Petrovitch,

que le C.I.A. (1) va sauter sur l'occasion pour essayer de jeter un coup d'œil sur nos nou- veaux modèles de fusées ! Nous en ferions autant, pas vrai ? Je sais déjà avec certitude que certains de leurs agents feront partie de la commission. Da !

Cette longue tirade doit avoir épuisé le ca- marade-colonel. Il attrape le flacon, et le porte à ses lèvres. Le niveau du liquide se met à baisser dangereusement.

— Il a donc été décidé que ces fusées se- raient embarquées séparément sur le « Le- ningrad ». Au lieu de naviguer avec le convoi, il fera route à part. Au besoin sous un autre nom, et sous un autre pavillon. Il ne faut, en aucun cas, que le C.I.A. puisse fourrer son nez à bord de ce bateau !

Je m'éclaircis la voix pour questionner avec douceur.

— Les Américains sont assez naïfs, cama- rade-colonel, mais ils s'apercevront rapide-

(1) C.I.A. : Central Intelligence Agency. Principal organisme d'espionnage U.S.

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ment que nous les avons bernés... Ils se met- t ront à hurler...

— On les laissera hurler à leur aise ! ré- torque froidement Onigline. Ils en ont l'habi- tude. Et combien de fois encore devrai-je te demander de t 'abstenir de me donner du gra- de, imbécile ! Tu sais que j 'ai hor reur de ça !

— Le « Leningrad » quit tera les eaux ter- ritoriales de Cuba, cette nuit, poursui t le pe- tit père. Il sera escorté pa r l 'un de nos sous- marins qui se chargera de brouiller les radars yankees, et au besoin de tenir les curieux à distance raisonnable. Cela peut nous at t i rer de nouveaux ennuis, mais nous n'en sommes plus à cela près ! Pour regagner son port d 'attache le « Leningrad » prendra la route la plus sûre ; c'est aussi la plus longue. Pas ques- tion de lui faire passer le canal de Panama ! Les deux rives sont farcies d'Américains, et ils sont capables de vider leur canal pour met- tre le « Léningrad » à sec.

Le camarade-colonel s ' interrompt pour épon- ger la t ranspirat ion qui perle sur son crâne rasé, d 'un grand coup de paume.

Après quoi il essuie consciencieusement sa main sur le devant de sa chemise.

— Le Smerch est tenu pour responsable de la bonne marche des opérations, continue-t-il enfin. C'est pourquoi j 'ai exigé qu'au moins un de mes hommes soit présent sur chaque navire... (1).

(1) Smerch : Contre-espionnage soviétique.

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Un sourire ironique vient creuser le visage de mon chef de mille petites rides. L'entretien prend une tournure inquiétante.

— Un grand honneur t 'échoit, Boris Petro- vitch ! J'ai décidé de t 'envoyer à bord du « Leningrad ».

L'honneur est vraiment t rop grand ! A tel point que j 'esquisse instinctivement un geste de dénégation. Mais, déjà, le visage du peti t père a changé d'expression. Les petites rides ont disparu, et les yeux se sont glacés der- rière les paupières à demi fermées...

— C'est un ordre, Boris Petrovitch ! fait-il avec une certaine douceur dans la voix. Une douceur que je crains encore plus que ses éclats. Il ne te reste plus qu 'à obéir... A bord du « Léningrad », tu auras le pas sur le capi- taine, sauf en ce qui concerne la manœuvre du bâtiment, bien entendu. Tu te t iendras en liaison permanente avec moi, et tu te confor- meras scrupuleusement aux instructions qui te seront données. En fait, tu me représente- ras à bord du « Leningrad », Boris Petrovitch ! Tu vois donc l 'honneur qui t 'est fait.

Il soupire. Un soupir vaste, profond et qui empeste la vodka.

— Si j 'avais vingt ans de moins, me lance- t-il, ce n'est pas à un âne bâté de ton espèce que je confierais cette mission ! Non ! J ' irais moi-même rejoindre le cargo ! Et je te ga- rantis que les Américains n'essayeraient pas d'y fourrer leur nez !

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Je feins d' ignorer le compliment, et je me contente de questionner de m a voix la plus neutre :

— Et comment devrai-je me rendre à bord de ce cargo, camarade ?

Ivan Sergueïvitch me considère avec un sourire amusé.

— Nous avons reçu carte blanche pour cette affaire ! Aussi en ai-je profité. Un Mig t 'a t tend à Scheremetievo (1). Il te conduira au port du Leningrad en moins de temps qu'il n 'en faut pour le dire. Arrivé là tu embarque- ras à bord de l 'un de nos sous-marins les plus rapides, le S.S.R. 223... (2).

— Un sous-marin ?

— Il est inutile que les autres se doutent de quoi que ce soit. Préférerais-tu que je te fasse parachuter au beau milieu de l'Atlantique ? Voici les laissez-passer nécessaires, achève le petit père en me tendant une liasse de papiers. Et prends bien soin de cette enveloppe...

L'enveloppe en question est scellée de cinq cachets de cire rouge por tan t chacun l'em- preinte de l'étoile. Elle porte en toutes lettres cette mention inquiétante :

« A ouvrir en cas d 'arraisonnement en hau- te mer »...

(1) Aéroport de Moscou. (2) S.S.R. : Sovietskaïa Sotsialistitcheskaïa

Respoublika.

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CHAPITRE II

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