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VOYAGE DANS LA CILICIE. ADANA Author(s): Victor Langlois Source: Revue Archéologique, 11e Année, No. 2 (OCTOBRE 1854 A MARS 1855), pp. 641-651 Published by: Presses Universitaires de France Stable URL: http://www.jstor.org/stable/41746270 . Accessed: 19/05/2014 12:11 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp . JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact [email protected]. . Presses Universitaires de France is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Revue Archéologique. http://www.jstor.org This content downloaded from 195.78.109.34 on Mon, 19 May 2014 12:11:34 PM All use subject to JSTOR Terms and Conditions

VOYAGE DANS LA CILICIE. ADANA

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VOYAGE DANS LA CILICIE. ADANAAuthor(s): Victor LangloisSource: Revue Archéologique, 11e Année, No. 2 (OCTOBRE 1854 A MARS 1855), pp. 641-651Published by: Presses Universitaires de FranceStable URL: http://www.jstor.org/stable/41746270 .

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VOYAGE DANS LA CILICIE.

ADANA.

PLANCHE 250.

Adana , l'une des plus anciennes villes de Ia Cilicie , est siluéc entre Tarsous et Anazarbe (1), sur la rive droite du Sarus. Suivant les traditions, elle aurait reçu son nom d'Adanos , fils du Ciel et de la Terre (2).

Bien qu'on ne puisse préciser l'époque de la fondation ď Adana ni indiquer l'origine de ses premiers habitants, on sait que cette ville fut le témoin , sinon le théâtre, de grands événements dans l'anti- quité et le moyen âge. Appien (3) en fait mention dans sa relation de la guerre de Mithridate, et Xénophon dans son récit de l'expédi- tion de Cyrus (4).

Adana était sur la grande voie de communication qui, partant de la Syrie, passait à Mopsueste, traversait Tarse et de là conduisait, en se bifurquant , sur divers points de l'Asie Mineure.

C'est seulement après le passage d'Alexandre, et lors de la domi - nation des Séleucides, qu' Adana prit de l'importance et sortit de son obscurité. La Cilicie faisant alors partie du royaume de Syrie, cette ville prit le nom d'Antioche, que lui donna Antiochus Ëpi- phane passant en Asie Mineure, l'an 171 avant Jésus-Christ , pour ramener à l'obéissance les villes de Tarse et de Mallus révoltées (5}. Un grand nombre de médailles , frappées à Adana pendant l'occu- pation syrienne et la domination romaine, confirment ce fait (6). On y lit la légende : ANTIOXEHNTHN nP02 TOI lAPill, qui, d'ail- leurs , ne laisse aucun doute quant à l'emplacement de cette ville

(1) Ptolémée, Gt'ogr., I. V, chap. vin. (2) Et. de Byz., v" "ASava. (3) Guerre de Milhr. (4) Liv. I, chap. IV. (5) Macchab., Il, chap, iv, v. 30. (G) Froelich., Ann. Syr., p. 46. Vaillant , Num. des rots de Syr., p. I6T.

XI. 41

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642 KEVUE ARCHÉOLOGIQUE. sur les bords du Sarus. C'est ainsi que les villes de Tarse, de Malins cl quelques autres prirent, à l'époque du passage du roi de Syrie en Cilicie, ce même nom d'Antioche, qu'elles taisaient suivre d'une indication topographique empruntée, soit à une rivière, soit à une montagne, soit à toute autre chose. Tarse prit le nom d'Antioche du Cydnus et Mallus celui d'Antioche maritime. Une ville assise au bord de la mer, à l'est de Sélinonte, devint Antioche du Cra- gus , etc. ' C'est aux Romains qu'Adana dut son premier accroissement et sa prospérité. Pompée , après avoir conquis la Cilicie et vaincu les pi- rates qui l'infestaient, établit dans plusieurs villes de cette province des colonies pénitentiaires formées des mêmes pirates tombés en son pouvoir. Adana fut assignée comme centre de l'une de ces co- lonies (1), et eut part dans les bienfaits qui signalèrent le passage et les victoires du général romain.

Adana ressentit les effets désastreux de la guerre civile qui suivit la mort de César. L'an 711 de Home , 43 ans avant Jésus-Christ, Ju- lius Cimber, ayant mission de secourir Cassius , força les défilés du Taurus et se présenta devant Tarse , qui refusa de lui ouvrir ses portes. Ne pouvant s'en rendre maître , Julius Cimber se dirigea vers la Syrie ; mais , après son départ , les Tarsiotes marchèrent en armes sur Adana , qui favorisait le parti de Cassius , tandis que Tarse lui était opposée (2). Cassius*, informé de cette agression, mar- cha contre cette dernière ville, qui se rendit et dut payer un lourd tribut.

Hadrien , dans le cours de ses voyages , visita la ville ď Adana, comme le prouve la légende qui se lit sur une médaille de grand bronze : ADVENTVI AVG. CHIC. - L'empereur embellit cette ville, lui donna son nom (3) et la combla de biens : c'est alors que furent élevés le plus grand nombre des édifices et des monuments d'utilité publique qu'elle possédait, mais que le temps a fait disparaître, sauf quelques-uns qui sont encore debout.

A l'exemple d'autres cités de l'Asie Mineure , Adana prit aussi le nom de Ma?tuemavu)v ASavewv (4), avec l'autorisation de l'empereur Maximin et du sénat, qui alors se réservait le droit d'accorder cette faveur.

(1) Appien, Guerre deMithr ., p. 394. (2) Dion Cassius, 1. XLVII, p. 345. (3) Ml Spart . in Hadr., chap, xx; cf. les médaillés grecques de cette ville avec

la légende AÔptavwv Aôavewv. (4) Tiepo!., 11, 1035.

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ADANA. 643 Pendant les IV* et V« siècles, Adana dut éprouver des revers, par

suite desquels elle descendit à la simple qualification de bourgade, xwur, (î). Cette décadence est attribuée aux Isauriens, qui, sortis de leurs montagnes, firent, à plusieurs reprises, irruption dans ks contrées voisines dans un but de pillage et de dévastation. En 367 de Jésus-Christ , ces mêmes Isauriens poussèrent leurs incursions jusqu'aux frontières de la Syrie (2).

A l'époque byzantine , Adana avait en partie réparé ses pertes et repris son rang. Un historien des croisades (3) dit que celle antique cilé était bien forlifiée, renfermait une nombreuse population et beaucoup d'armes : « Urbs munita turribns , populis capax , armis referta. » Un autre chroniqueur (4) rapporte qu'elle était riche en troupeaux , blés, vins, huiles, et abondamment pourvue en appro- visionnements de toute espèce : « Urbem qui nomen habet Adana, auro et argento , gregibus et armentis , frumento , vino el oleo et omni commoditalcabundantcm. »

Vers la fin du XII* siècle , Adana , alors sous lu domination des rois d'Arménie , vit encore accroître sa puissance et ajouter ii ses fortifications; depuis elle n'a pas cessé de prospérer. Les Turks Ot- tomans, en s'en emparant sous le règne de Bajazet II , lui donné • rent un nouvel essor, en l'érigeant en chef-lieu d'un pachalick et l'assignant pour résidence aux autorités musulmanes , au détriment de Tarsous, qui perdit , avec le rang qu'elle occupait, les avantages dont elle jouissait avant la conquête ottomane.

Nous allons maintenant décrire les monuments des diverses épo- ques qui subsistent encore à Adana , en mentionnant ceux qui ont disparu, mais dont le souvenir est attesté, soit par des inscriptions, soit par les récits des voyageurs. Nous nous occuperons d'abord des monuments de l'époque romaine, ceux antérieurs n'ayant pas laissé les plus légères traces.

Les divinités qui faisaient l'objet d'un culte particulier à Adana étaient Jupiter cl Bacchus , qui figurent sur un grand nombre de médailles des époques grecque cl impériale. On ne peut douter que ces dieux privilégiés avaient des temples dans cette ville ; c'est ce que pense l'abbé Belley (5) , qui suppose qu'Antiochus Épiphane, qui se montrait très-zélé pour le culte des Grecs , avait dû y faire

(I) Griller, p 1052, 4-3. - Muratori, |>. 1861. - lllérodès, Synccdèine. (2) Tillemont , Emp., I. VI, p. 90. (3) Radulf. Cadom., Ilist. Tancred ., chap. xlii. (4) Guill. de lyr, dans les Gesta Dei per t r ancos, p. bu. (5) Mém. de l'Acad. des Iriser., t. XXXV. Le Mém. sur Adana, p. 60S.

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644 REVUE ARCHÉOLOGIQUE. construire un temple de Jupiter, dont la statue se voit sur les mé- dailles frappées, soit sous le nom d'Antioche , soit sous celui d'A- dana. On ne peut donc, s'étonner de voir les titres de 'Ièp* et d"A<iuXoî , que portent les médailles de cette ville , consacrée à Jupiter, quand d'autres cités d'une inoindre importance, et qui ne rendaient pas le même culte à cette divinité, prenaient sur leurs médailles et dans quelques inscriptions des titres non moins distinctifs.

Il ne reste rien des temples qui , suivant toutes les probabilités, ont dû être consacrés aux divinités qui recevaient un culte spécial à Adana. On peut supposer que ces édifices ont été détruits et rem- placés par des églises, lors de l'introduction du christianisme en Ci- licie, après les prédications de l'apôtre saint Paul et de ses disci- ples. Mais , si les temples et les édifices religieux des temps anciens ont disparu à Adana, il n'en a pas été de même d'autres monu- ments construits à l'époque romaine.

Hadrien, ainsi que nous l'avons dit, donna tous ses soins à l'ac- croissement et à l'embellissement d'Adana, qui prit son nom. C'est à cet empereur qu'est due la construction du pont sur le Sarus , qui portait encore, dans le cours de ce siècle , une inscrip- tion daus laquelle se lisait son nom , mais qui aujourd'hui n'existe plus.

Procope (1) donne la description du pont d'Adana , tel qu'il était à l'époque de Juslinien : « Ce pont , d'une structure merveilleuse, dit l'auteur du traité de Edificiis, avait de grosses piles de pierre qui s'élevaient en divers endroits et à petite distance , et soute- naient des arches d'une grosseur extraordinaire. Les piles les plus exposées au courant ayant été affaiblies par le temps , Juslinien tit détourner le cours du fleuve, puis il fit abattre et reconstruire ce qui menaçait ruine, après quoi on ramena le fleuve dans son canal ordinaire. »

Tous les voyageurs qui ont visité Adana s'accordent pour admirer les proportions gigantesques et l'ensemble grandiose du pont d'A- dana (2) ; mais ils ne s'entendent pas sur le nombre des arches qui le supportent , soit que , dans ses diverses réparations , on ail élevé de nouvelles piles, soit, ce qui est plus vraisemblable, que les

(I) De Edif., I. V, &, Irad. du présid. Cousin. (2) Barbaro, Viaggi, p. 30 et suiv.- P. Béion, Obs. sing., I. Il, chap, cviii. - Paul

Lucas, Voy. en As. Min., t. I, p. 341-9.- Kinneïr, Voy. en As. Min., Irad. fr., 1. 1, p. 205-207. - OUer, Voy. en Turq., t.. 1, p. 67.- Pockoke, voy. t. IV, p. 21.

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aDana. 645

voyageurs n'aient donné dans leurs récils que des approxima- tions.

Pockoke (1), qui ne visita pas Adana et ne la décrivit que d'après les récits d'autres voyageurs, dit que le pont a vingt arches. Paul Lucas (2) ne lui en donne que quinze, tandis qu'il en a réellement dix-huit.

Le pont d'Adana a été restauré , il y a peu d'années, par un gou- verneur du pachalick , qui l'a orné d'un kioske élégant élevé au centre et soutenu par quatre colonnettes.

Un autre monument de la même époque se voit h l'entrée du ba- zar : c'est un portique que Kinneïr a mentionné dans son voyage en Asie Mineure (3), et qui sans doute se rattachait à la ceinture de for- tifications qui entourait Adana. Dès le XVI* siècle , ces fortifications avaient disparu, car Pierre Belon (4) nous dit que « la ville d'Adena n'est pas close de murailles. »

Je n'ai trouvé dans cette ville qu'une seule inscription grecque de l'époque romaine : c'est l'épitaphe d'un certain Antiochus , gravée sur un sarcophage qui sert aujourd'hui de cuve'à bain dans l'un des Hammam d'Adana. J'en ai donné le texte et la traduction dans mon recueil des inscriptions de Ia Cilicie (5).

Paul Lucas (6) a découvert une autre inscription de la même épo- que, que Bimard (7) et Bœckh (8) ont publiée d'après lui.

Enfin , une construction monumentale , due aux Romains, exis- tait encore à Adana au commencement du siècle dernier; le voyageur Paul Lucas en donne la description et indique son emplacement : « A main droite, au ponent, sont de grands aqueducs, au bas desquels on voit des roues qui puisent l'eau de la rivière. »

Le même voyageur (9) découvrit sur ces aqueducs et copia une inscription métrique, qui depuis a été transportée dans l'église grecque d'Adana, où je l'ai vue pendant mon séjour dans cette ville ; elle est gravée sur une dalle carrée , en marbre

(t) Voy. t. IV, p. 21. Ci) T. I, p. 347-9. (3) Trad, fr., p. 205 el suiv. (4) Obs . sing., liv. II, chap, cviii. (5) P. 20, n* 40. (6) Voy. en As. Min., t. II, p. 322; 64. (7) In Murât., t. III, p. 1665; 10. (8) Corp. inscr. grxc ., n* 4441 ; cf. aussi mon Recueil dinscr ., p. 19, n# 39. (9) Voy. en As. Jftn., t. Il, lieu cit.

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646 REVUE ARCHÉOLOGIQUE. blanc, qui aujourd'hui sert d'autel. En voici le texte et la tra- duction (l) :

ONTCOCCHCAPETHCAYZENTIEKAITOAEOAYMA ACIMACOAinOTAMOYXEIMCPIOlClAPOMOIC APPHKTONKPHniAACIAHPOA£TOICIOEM€IAOIC WNYneYPeiHNHZETANYCCACOAON

5. HNn0AA0IKAinP020£NAneiP£IHCIN00)l0 KYANAIWNP£IOPU)NT£YZANA<t>AYPOT£PHN COlAYnEPAyiAtüNAICüNIOCGPPIZCüTAI KAinOTAMOCriAHOC0nPHYT£POCT£l£O£l AYTOCTHNAirE<l>YPANANACXOM£NOCT£A£C>CO

10. Hr£MONOCni0OOTOYAIACHMOTAOE 0<t>PACEKAIM£T0niCC0£N£X0IKA£0CIC0N£K£IN0IC OIN£l AOYn POXOACZ£YZAN AIl£l P£CIOYC

"Ovtwç ápSTrjç, Âù^évTtE, xat TOOE Occupa Seí(xas6at icoTa¡/.oü -/£i[xe piotai žpojj.ot[<;]

oppviXTOv xpuiTcîSa atoYipooETOiat OefxeiXotç <î)v iiicep eùpsir,v ¿^eTavvutrva; ó So v,

5. tojXXoÌ xai irpóoÔEv <xiretp¿(r)<;i vóoto KuSvaúov ^síOpwv TEÛijav «(paupoTspYjv.

Hot o íiicžp à'jnSwv aio') v io; í ¡S^íí/oToa xat itorapiò? 7tXy¡0w[v] TcpnjuTepoç Te[X]éÔst

auto; T7yvS[s] ávao^ó jísvoç TEÀí'a[a]<JÔ[ai] 10. riYE|/OVO<: TU[e]i6O[Ì] T0Ü Sia5ï)(i.0T«T0[u] ,

3»pa ore xal |¿ST<m<>0ev ej^ot xXe'o; iaov ÈxeÍvoiç , ot NeÍXou irpo^oàç ÇeõÇav àireipscíouç.

« C'est vraiment un miracle de ton génie , Auxentius , d'avoir construit pour une rivière aux flots impétueux un lit indestructible, aux fondements d'airain, par-dessus lesquels tu lui as frayé un large canal que d'autres avant toi avaient rendu, par leur impéritie, le plus chétif des embranchements du Cydnus. Mais enfin le voilà

(1) Drunk., Ann., t. III, p. 236, n° 401. - Jacobs, Animad t. Ill, part, h, p. 1«0. - Id., Ani. Palat., t. Il , p. 813, il0 270, et l. III , p. 945. - Bceckh, Corp. inscr. gr nw 4440. - Inscr. de la Cilicie , p. 18, n° 38. - Archives' des miss, scient ., t. IV, p. 76; cf. rapp. de V. Langlois, sur l'expl. de la Cilicie et de la pet. Arménie. - Lebas, Voy. arch. m Asie Mineure. Inscript . Cilicie, Ariana.

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ADANA. 647

(grâce ¡' toi) établi pour toujours sur des arcades et devenu la plus paisible des rivières. Tu as eu la constance de terminer toi-même cet aqueduc, par ordre du plus illustre des princes; aussi, dans l'a- venir, obtiendras-tu une gloire pareille à celle de ceux qui muselè- rent les innombrables bouches du Nil. »

Cette inscriplion est d'un haut intérêt par les conséquences qu'on peut en tirer, après , toutefois , l'avoir soumise à un commentaire que je crois indispensable pour en faciliter l'intelligence.

Après avoir prodigué des louanges à Auxentius et vanté son œuvre, le poëtc dit qu'avant lui d'autres architectes avaient tenté la même entreprise; mais ils n'étaient parvenus à rendre le cours d'eau à détourner qu'un des plus chétifs embranchements du Cydnus.

On est étonne de trouver ici le nom de ce fleuve, qui coule sous les murs de Tarse, arrose son territoire et non celui d'Adana, ville qui, dès les temps les plus reculés, est baignée par un autre fleuve dn nom de Sains, et on se demande ce qui a pu porter l'auteur de l'inscription à appliquer au Sarus le nom du Cydnus.

Dans la nomenclature des fleuves de la Cilicie, les anciens com- prennent le Cydnus et le Pyramus; mais peu d'entre eux citent le Sarus, et en voici les causes : le Sarus, bien qu'il soit considérable par l'étendue de son cours, sa largeur et ses eaux, était dans l'an- tiquité regardé comme un affluent du Pyrame. En effet, le Sarus, après avoir traversé Adanu, se jetait dans le Pyrame, au nord de Mallus, et avait une embouchure commune avec ce dernier fleuve, non loin de Mégarsc, là où sont aujourd'hui des marécages et plu- sieurs lacs d'eau salée (1).

Vers le règne de Justinien, une révolution, duc, soit aux ra- vages causés par des inondations, soit à d'autres causes physiques, s'opéra dans le cours inférieur de ces deux fleuves , qui se divisè- rent en se frayant de nouveaux lits. Le Sarus vint se jeter dans la mer, non loin des bouches du Cydnus, et le Pyrame, dirigeant son cours vers l'est, creusa son embouchure en face du Ras-el-Kansir, promontoire situé sur la côte septentrionale de la Syrie.

La séparation des deux fleuves n'était pas encore effectuée lors de la rédaction de l'inscription rapportée plus haut; le Sarus était donc encore considéré comme un affluent du Pyrame.

Le Cydnus, au contraire, était célèbre dès les temps les plus re-

it) Les cartes de Kieperl et tle M. de Tchihattcheff indiquent eel ancien cours et la jonction de cor deux fleuves.

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6i8 REVUE archéologique:. calés, et on peut supposer que le poêle fit application de ce nom de Cydnus au Sarus , classé , malgré son importance , comme affluent du Pyrainc , avec lequel il avait une embouchure commune (l).

On peut encore attribuer celte substitution de noms à l'igno- rance dans laquelle étaient les anciens, des cours supérieurs des rivières débouchant du Taurus ; ce qui expliquerait le silence que gardent les auteurs sur le Sarus, et la confusion des deux fleuves dans les temps antiques, confusion qu'a démontrée le savant voyageur russe , P. de Tchihattcheff (2).

Dans le cours de l'inscription, le poëte dit que l'aqueduc d'Adana était supporté par des arcades, et qu'au moyen de digues, les eaux ne pouvaient plus déborder. Ces digues avaient donc pour but d'éviter que la ville ne fût submergée, comme l'avait été Tarse, où l'empereur Justinien avait dû faire creuser un canal pour la préserver de nouveaux désastres (3).

L'auteur termine en rappelant que c'est par l'ordre des plus illustres des princes que l'aqueduc fut achevé, et que la gloire de l'architecte égalera celle des maîtres qui muselèrent les bouches du Nil. Uuel est le prince que le poêle byzantin désigne par le titre d'illustre ? Ce doit être Justinien ; car on sait combien de travaux il fit exécuter en Cilicie. Procope en donne le détail, et s'il ne eile pas l'aqueduc, c'est que sans doute il rattachait cette construction à l'importante restauration du pont d'Adana, ordonnée par l'em- pereur, et exécutée sous son règne. Ce qui rend celte hypothèse vraisemblable, c'est que l'aqueduc avait pour but, non-seulement de porter l'eau dans les divers quartiers de la ville, mais encore de prendre au fleuve la surabondance des eaux , qui , lors de la fonte des neiges, devaient, poussées par une force irrésistible, ébranler les piles du pont et en hâter la ruine.

Sur la rive droite du Sarus et couvrant le pont d'Adana, dont il défendait l'approche, est un château ruiné , qui paraît être de con- struction byzantine. Paul Lucas (4) donne des détails sur ce monu- ment, qui de son temps était encore en assez bon état, puisqu'il était occupé par une garnison turque. Kinneïr (5), qui le visita

(l) Tchihallcheff, Géographie physique de l'Asie Mineure , I. I, chap, vi, les fleuves. (2) Lieu cilé. (3) Procope, dê Edifie., chap. vi. (4) Voy , en As. Jftn., t. I, p. 347-9. (.r>) Voy. en As. Min., t. I, p. 205-7 de la lr. fr.

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ADANA. 649 ;iu commencement de ce siècle, le prit pour un édifice musulman, et signala son état de délabrement.

De nos jours, il ne reste du château fort que des pans de mu- railles (1), dans l'intérieur desquels sont groupées des habitations turques. Les matériaux entrés dans la construction de la forteresse se composaient de belles pierres de taille. Après les sièges de 1485, par Bajazet II, qui la fit réparer, et de 1488, par le sultan d'Égypte, qui la fil miner pour obtenir et hâter sa reddition , on remarque avec étonnement le bon état de conservation dans lequel s'est maintenue la base de cette forteresse.

Quelques mosquées sont les seuls édifices du moyen âge que pos- sède Adana ; l'une d'elles est une ancienne église chrétienne. Une autre , l'Olou-Djami , a été élevée par le fils d'EI-Rhariiadan-Oglou , conquérant turkoman au XVe siècle.

Près de rOlou-Djami est une maison en ruine, construite en briques, comme le sont la plupart des habitations ď Adana, et dans laquelle le sultan Mourad avait séjourné en se rendant à Bagdad. Cette maison est désignée sous le nom de Wakef-Serai. En Tur- quie, il était autrefois d'usage de faire murer les issues d'une maison qu'un sultan avait habitée, afin que personne n'y pût loger après lui. Celle que je viens de décrire n'a effectivement ni portes ni fenêtres; toutefois, en raison de son état de dégradation, on peut pénétrer par un escalier tournant jusque dans la chambre de Mourad.

Dans le nombre des monuments modernes que renferme Adana, sont neuf mosquées bien construites , ayant d'élégants et gracieux minarets.

Le bazar, outre qu'il est très-vaste, renferme un bezistan qui a quelque ressemblance avec ceux de Constantinople et de Smvrne.

Le serai du pacha, gouverneur général de la province, situé sur les bords du Sarus , présente la forme d'un vaste parallélogramme. Le centre du palais est exclusivement affecté au gouverneur ; l'aile droite est occupée par les troupes et sert aussi de prisons. Dans l'aile gauche résident les grands fonctionnaires du pachalick. En avant du côté qui fait face au fleuve , est une plage assez étendue ; c'est le champ de manœuvres des troupes. Sur cette plage et près des bords du Sarus, gisent quelques anciennes pièces d'artillerie en fonte, portant la marque GtB.

(1) AinsworUi, Ttaveìs in Afia Minor, 1. 1!, p. 8îh»86.

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650 REVUE ARCHÉOLOGIQUE. On compte quatre bains à Adana; ils sont bien construits, spa-

cieux , commodes et reçoivent d'abondantes eaux. Adana possède aussi trois belles églises, édifiées lors de l'occu-

pation égyptienne; deux sont aux Arméniens, la troisième aux Grecs. L'église cathédrale des Arméniens est placée sous l'invoca- tion de la Vierge ; l'autre sous le vocable de Saint-Etienne. Au nombre des manuscrits conservés dans la cathédrale, est un évan- gile in-8, dans lequel j'ai lu le mémento suivant : « Sous le pa- triarcat de Constantin, pendant le règne du Takhavor Hélhum, le seigneur Geoffroy a fait écrire cet évangile pour son usage l'an nrt (697) de l'ère arménienne. »

Le patriarche Constantin I", abbé de Mavrhian , était né à Pard- zerpert; il administra le siège patriarcal d'Arménie de l'an 1220 a l'an 4268 (1). Le roi Hélhum Ier gouverna l'Arménie cilicicnne de 1224 à 1269.

A part cet évangile, qui est du XIIIe siècle, les autres manuscrits sont modernes et dépourvus d'intérêt.

Le cimetière des Arméniens est situé it l'ouest d'Adana et hors de son enceinte; j'y ai vu, encastrée dans le mur extérieur, l'in- scription suivante :

['t* ffr* 1 ] ■í,u'Jn3 1 ÍH 1 ̂1tuußlf-u"~ : fvtuquttjnu ß'p. * utpbujhtftp n t?li » y^pifUuniti : nqnpuft t Çnq.njït t utiTlfu t

« [En l'année] des Arméniens 1050. Ici repose en paix dans le Christ, Minas, fils de Pascal d'Albeslan! Que Dieu aie pitié de son àme ! Amen ! >»

L'année 1050 fh£ correspond à l'an 1602 de l'ère chrétienne. Albestan , dont le nom turc est Elbostan , est une ville située près des sources du Pyrame, dans la partie de la Cappadoce, connue des anciens sous le nom de Cataonie.

L'église grecque n'a rien de remarquable; dans son intérieur et servant d'autel, se trouve la dalle en marbre blanc, sur laquelle est gravée l'inscription relative à l'aqueduc d'Adana, dont j'ai donné plus haut le texte avec la traduction.

Les maisons d'Adana sont généralement bâties en briques; dans le nombre, se remarquent quelques habitations de belle appa- rence; les rues sont plus larges et mieux tenues que celles de Tarsous. Le nombre des maisons d'Adana est d'environ 4500; celui

(1) Saint-Marlin, Mom, sur l'Arménie, t. I, p. 443.

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Page 12: VOYAGE DANS LA CILICIE. ADANA

ADANA. 651 de ses habitants est de 18 000 en hiver, époque à laquelle la po- pulation atteint son maximum. Les maisons sont ainsi réparties, par ordre de nationalité :

Maisons turques 2800 ' Id. arméniennes schismaliques 900 ] Id. arméniennes néophytes 80 i Id. grecques schismatiques 60 v 4500 Id. des Noussariés 600 L Id. des Syriens jacobites ' 55 ] Id. habitées par des Européens ' 5 /

Ainsworth (1) et le colonel Chesney (2) ont exagéré de beaucoup le nombre des maisons et des habitants d'Adana, en portant, le premier à 10000 le chiffre des maisons, et à 50000 le nombre des Adaniotes ; et le second à 8000 le nombre des maisons , ce qui , dans les mêmes proportions, donnerait un total de 40000 ha- bitants. Jamais, dans les temps modernes, la population d'Adana n'a atteint un chiffre aussi élevé.

Adana est dans la position la plus admirable. Cette antique cité, bâtie en amphithéâtre sur les bords du Sarus, est entourée de cam- pagnes fécondes, couvertes de vignobles et d'arbres fruitiers de la plus riche végétation. Les produits sont abondants et tellement variés qu'ils peuvent satisfaire à tous les besoins de la vie. Le climat y est tempéré et le ciel pur. Ces divers avantages font de la ville d'Adana un séjour plein de charmes, au moins pendant la plus grande partie de l'année. L'été, les chaleurs arrivent à un tel de- gré d'intensité, que Jes marais qui avoisinent la ville répandent des miasmes putrides qui corrompent l'air. A cette époque, les habi- tants se retirent en grand nombre dans lès montagnes , afin de se préserver des fièvres qui déciment la population.

Victor Lang lois.

(1) Travels, t. II , p. 85-6. (2) Expéd. de l'Euphr., t. II, 1.

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