19
Annexe GROUPEMENT WEND PANGA DE ZIOU BURKINA FASO UNITE – PROGRES – JUSTICE 01 BP 2978 Ouagadougou 01 – Burkina Faso TEL : (00226) 70 75 61 30 E-mail : [email protected]/[email protected] ETUDE D’UN CAS D’ADAPTATION AUX CHANGEMENTS CLIMATIQUES DANS LA COMMUNE DE ZIOU, REGION DU CENTRE - SUD AU BURKINA « Récit d’une Expérience de Récupération de Terres Dégradées par le Groupement Wend Panga des Productrices Agricoles de Ziou sous l’Impulsion de Mme SIA Marie » Juillet 2015 1

€¦ · Web view2015/09/17  · Compte tenu de l’état d’extrême pauvreté des sols et après les échecs des deux premières campagnes agricoles (2007 -2008 et 2008-2009),

  • Upload
    others

  • View
    1

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: €¦ · Web view2015/09/17  · Compte tenu de l’état d’extrême pauvreté des sols et après les échecs des deux premières campagnes agricoles (2007 -2008 et 2008-2009),

Annexe

GROUPEMENT WEND PANGA DE ZIOU BURKINA FASO UNITE – PROGRES – JUSTICE01 BP 2978 Ouagadougou 01 – Burkina FasoTEL : (00226) 70 75 61 30 E-mail : [email protected]/[email protected]

ETUDE D’UN CAS D’ADAPTATION AUX CHANGEMENTS CLIMATIQUES DANS LA COMMUNE DE ZIOU, REGION DU CENTRE - SUD AU BURKINA 

« Récit d’une Expérience de Récupération de Terres Dégradées par le Groupement Wend Panga des Productrices Agricoles de Ziou sous l’Impulsion de Mme SIA Marie »

Juillet 2015

SOMMAIRE

1

Page 2: €¦ · Web view2015/09/17  · Compte tenu de l’état d’extrême pauvreté des sols et après les échecs des deux premières campagnes agricoles (2007 -2008 et 2008-2009),

TITRES PAGES

Introduction………………………………………………………………………………….. 3

I – Contexte Justificatif de la Mise en Place de l’Initiative………………………………. 3

II – Description de l’initiative………………………………………………………………… 5II.1 - Pourquoi l’initiative ?.......................................................................... …. 5II.2 - Activités réalisées dans le cadre de l’initiative………………………………. 6

II.2.1 - Activité 1 : Réalisation de 25 fosses fumières………………………. 7II.2.2 - Activité 2 : Réalisation des pépinières d’arbres pour la pratique de l’agroforesterie………………………………………………………. 7II.2.3 - Activité 3 : Agroforesterie pratique……………………….………… 7II.2.4 - Activités 4 : la réalisation de cordons pierreux……………………8II.2.5 - Activité 5 : Utilisation de semences améliorées…………………. 8II.2.6 - Activité 6 : Application d’engrais chimique………………………... 8 II.2.7 – Activité 7 : Formation des membres du groupement…………… 9II.2.8 - Activité 8 : Information et sensibilisation des populations environnantes par la communication de proximité……………….. 9II.2.9 - Activité 9 : Sensibilisation des populations lointaines sur les effets des changements climatiques par la radio rurale de Zabré…. 9II.2.10 - Activité 10 : Partage de l’expérience à travers l’accueil de producteurs du Ghana………………………………………………. 9

III – Résultats obtenus dans la mise en œuvre de l’initiative……………………………… 9 III.1 - En termes de la physionomie des champs et de la sécurité alimentaire… 10III.2 - En termes d’accroissement des revenus……………………………………. 11

IV – Difficultés rencontrées…………………………………………………………………… 12

V - Partenaires du Groupement Wend Panga…………………………………………….. 12

VI - Leçons tirées par les initiateurs…………………………………………………………. 13

VII – Pertinence de l’expérience……………………………………………………………….13

VIII – Facteurs de réussite de l’expérience………………………………………………… 14

IX - Apport personnel de Mme SIA Marie dans la réussite de l’initiative……………… 14

Introduction

La présente expérience de restauration des sols est une initiative paysanne d’application des connaissances endogènes d’atténuation des effets des changements climatiques et d’adaptation à ce

2

Page 3: €¦ · Web view2015/09/17  · Compte tenu de l’état d’extrême pauvreté des sols et après les échecs des deux premières campagnes agricoles (2007 -2008 et 2008-2009),

phénomène. Elle est, selon ses porteuses une tentative de résolution durable de l’épineuse question des changements climatiques, loin des salles de négociations politico-climatiques faites d’achoppement entre les différents décideurs, mais effets réels sur le terrain. Mise en œuvre dans le village de Ziou à 210 km au Sud de Ouagadougou dans la Province du Nahouri, Région du centre – sud du pays où les populations vivent entièrement de l’agriculture. Comment est née cette initiative ? Comment a-t-elle évolué ? Quels sont ses acquis actuels ? Et, quels sont ses défis et ses perspectives ?

Dans ce récit, Mme SIA Marie, Présidente du Groupement Wend Panga des Femmes Agricultrices de Ziou, donne son témoignage sur cette expérience réussie d’adaptation au changement climatique, exécutée dans une zone rurale du Burkina Faso.

I – CONTEXTE JUSTIFICATIF DE LA MISE EN PLACE DE L’INITIATIVE

Le Burkina Faso, pays sahélien, situé au cœur de l’Afrique Occidentale connait depuis des siècles le phénomène des changements climatiques qui ont commencé à s’empirer avec les années de grande sécheresse récurrente à partir du début des années 70. Depuis lors, les producteurs agricoles burkinabés vivent au quotidien avec cette réalité cruelle ayant des effets pervers sur leurs activités, leurs vies et leurs environnements (sécheresses répétées, inondations occasionnelles, vents violents, érosion des sols, perte quasi-totale de la fertilité naturelle du sol surtout dans les régions du nord, baisse des rendements des cultures, augmentation de la température de l’air ambiant, etc.).Au regard de l’incidence de ces phénomènes sur le niveau de pauvreté et de la sécurité alimentaire et nutritionnelle du pays, on a vu poindre en filigrane des actions de sensibilisation et d’appui – accompagnement sur la sécheresse notamment, menées par des organisations paysannes et des ONG nationales et internationales.

Par la suite, l’Etat a pris conscience du phénomène et s’est impliqué dans la sensibilisation et l’appui la population burkinabé en général et des producteurs agricoles en particulier. Mieux, au plan politique et institutionnel, il a pris des mesures participant de la résorption des questions liées aux changements climatiques. Ainsi, il a ratifié une série de conventions relatives à la désertification, à l’environnement et au climat. Partie prenante à la CCNUCC, le Burkina Faso a également élaboré un Plan d’Action National d’Adaptation aux Changements et à la variabilité climatique (PANA) dont les objectifs sont en cohérence avec les objectifs de développement du pays contenus notamment dans le Cadre Stratégique de Lutte contre la Pauvreté (CSLP), la Stratégie de Développement Rural (SDR) à l’horizon 2015 et le Plan d’Action pour la Gestion Intégrée des Ressources en Eau (PAGIRE), etc.

Dans le document du PANA, il est mentionné que ‘’ les tendances climatiques traduisent une augmentation moyenne des températures de 0,8 °C à l’horizon de 2025 et de 1,7°C à l’horizon 2050, une diminution de la pluviométrie de – 3,4 % en 2025 et de – 7,3% en 2050.’’

Le PANA a également fait cas des conséquences des changements climatiques sur quatre secteurs d’activités : l’agriculture, l’élevage, la foresterie et l’eau.

Secteurs ConséquencesAgriculture

la baisse des rendements agricoles, l’incapacité de certaines spéculations à résister à la sécheresse, la dégradation des sols, l’insécurité alimentaire à long terme.

Elevage la réduction/dégradation des pâturages, la perte du cheptel pour manque d’eau et

3

Page 4: €¦ · Web view2015/09/17  · Compte tenu de l’état d’extrême pauvreté des sols et après les échecs des deux premières campagnes agricoles (2007 -2008 et 2008-2009),

d’aires de pâture, les conflits éleveurs/agriculteurs et la migration définitive d’éleveurs transhumant vers d’autres zones en l’occurrence dans les pays côtiers.

Foresterie

la baisse du potentiel de biomasse qui passera de près de 200 millions de m3 en 1999 à environ 110 millions de m3 en 2050, la disparition d’espèces (végétales et fauniques) et la migration d’autres espèces des régions sahéliennes vers les régions soudaniennes.

Eaula réduction des précipitations, l’ensablement/assèchement des points d’eaux, des barrages, des fleuves, l’approfondissement de la nappe phréatique.

Au plan socio-sanitaire, les changements climatiques sont à la base d’inondations, de malnutrition, de propagation de maladies surtout pneumogastriques, ophtalmologiques, et tropicales (paludisme, méningite, cécité, etc.).

Face aux effets néfastes des changements climatiques, les populations ont développé des actions d’atténuation et d’adaptation allant des activités de Conservation des Eaux et Sols et Défense et restauration des Sols (CES/DRS) à la stabulation des animaux en passant par l’utilisation des résultats de la recherche.

L’expérience ci-dessous fait partie des nombreuses initiatives menées à l’échelle du Burkina Faso dans l’optique de permettre aux petits producteurs de s’adapter aux changements climatiques.

A l’instar de bon nombre de zones agro-écologiques, Ziou n’est pas à l’abri des changements climatiques dont les conséquences ont été inventoriées par les experts dans le document du PANA du Burkina. En effet, cette localité vit depuis de longues dates les installations tardives et les arrêts brusques de la campagne agricole. Sa population assiste impuissamment à la dégradation des sols et au tarissement des marres et bas-fonds du milieu. C’est pourquoi une partie de la population en fuyant la sécheresse s’était installée sur les terres fertiles des abords du fleuve Nazinon (3ème grand fleuve du Burkina de par sa longueur).

Mais, l’année 2006 verra l’application des textes relatifs à la protection des berges du Fleuve Nazinon et de l’intégralité du Parc Tambi KABORE (155 500 ha) dans lequel se trouvaient les exploitations des membres de l’Union Wend Panga de Ziou. Ce choix de l’Etat s’est traduit par l’expulsion de tous les agriculteurs installés aux abords de ce fleuve.

II - DESCRIPTION DE L’INITIATIVE

L’initiative est ainsi née de l’expulsion par l’Etat de Madame SIA Marie et de ses collègues paysannes du corridor réservé à la faune aux larges du fleuve Nazinon.

Dépossédée de terres riches et fertiles qui leur procuraient d’importantes quantités de productions agricoles, Mme SIA et les membres de son groupement Wend Panga se sont vus attribuer une propriété terrienne dégradée et improductive dans la localité de Ziou. Contrairement à certains agriculteurs (hommes et femmes) qui ont préféré la migration vers d’autres cieux, Madame SIA et d’autres camarades ont décidé de se lancer dans une action de récupération de terres dégradées qui leur ont été nouvellement attribuées.

4

Page 5: €¦ · Web view2015/09/17  · Compte tenu de l’état d’extrême pauvreté des sols et après les échecs des deux premières campagnes agricoles (2007 -2008 et 2008-2009),

Fig 1 : Photo des Femmes en cours de semis manuel Fig 2 : Photo Charrette à traction Asine du Groupement

Le Groupement Wend Panga est constitué par des exploitantes agricoles qui utilisent des outils parfois rudietaires à leur portée

Le Groupement « Wend Panga », expression Mooré qui veut dire « Dieu est Grand » en français), présidé par Mme SIA Marie a été créé en 2001. Il regroupe 65 femmes du village de Ziou et s’est fixé plusieurs objectifs dont : (i) accroître et diversifier les productions agricoles, et contribuer à la sécurité alimentaire et nutritionnelle de la Commune (Département) de Ziou, et (ii) renforcer les capacités de ses membres aux plans techniques, organisationnels et de gestion. Pour les populations de Ziou, le groupement joue un rôle important dans la commune rurale car elle contribue grandement à la sécurité alimentaire des 30 000 habitants du village.

II.1 - Pourquoi l’initiative ?

Dans la Province du Nahouri, aux abords du fleuve Nazinon sur 7 km de part et d’autres, a été délimité un corridor au profit des ressources fauniques qui étaient menacées de disparition. Des milliers d’exploitations familiales des provinces du Boulgou et du Nahouri ont ainsi été chassées par les services en charge de la gestion de l’environnement, des ressources fauniques et halieutiques de la zone.Relocalisée sur des terres pauvres, Mme SIA et ses camarades les ont exploité durant deux campagnes agricoles successives (2007-2008 et 2008-2009) sans résultats satisfaisants.

Fig 3 et 4 : D’une terre riche fertile (à gauche) à une terre pauvre caillouteuse (à droite)

5

Page 6: €¦ · Web view2015/09/17  · Compte tenu de l’état d’extrême pauvreté des sols et après les échecs des deux premières campagnes agricoles (2007 -2008 et 2008-2009),

Face à cette situation, Mme SIA Marie et ses camarades ont choisi de rester à Ziou pour prouver que les changements climatiques ne constituent pas une fatalité. Elles se sont attelées à démontrer par ce biais que les petites productrices qu’elles sont, peuvent bel et bien combiner des savoirs endogènes et modernes pour s’adapter aux changements climatiques en vue d’assurer leur sécurité alimentaire et d’accroître leurs revenus. Mme SIA et ses camarades exploitent au total 52 ha avec des superficies comprises entre 0,25 et 4 ha par personne selon les capacités de chacune d’entre elles.

Fig 5 : Les membres de Wend Panga au sortir d'une rencontre de concertation sur les changements climatiques et de prise de

conscience sur le phénomène

II.2 - Activités réalisées dans le cadre de l’initiative

Fig 6 : Délimitation tout de même des terres acquises pour la production agricole avec le concours des

hommes

A partir de 2008, une série d’activités a été mise en œuvre par les membres du Groupement Wend Panga pour la restauration des 52 ha de sols dégradés à l’effet d’accroître la production et de régénérer la végétation. Il s’agit de : la réalisation de fosses de compostage, la réalisation de pépinières d’arbres fertilitaires, la plantation d’arbres fertilitaires dans les champs, la pratique des semis sous couvert-végétal, la réalisation de cordons pierreux, l’utilisation de semences améliorées, l’application d’engrais minéraux, la formation des femmes en techniques culturales, l’information/sensibilisation des populations

environnantes par la communication de proximité, la sensibilisation des populations lointaines par la radio rurale Pagalayiri des femmes de Zabré, le partage de l’expérience à travers l’accueil de producteurs agricoles du Burkina et du Ghana.

II.2.1 - Activité 1 : La réalisation de fosses fumières

Consciente que la fumure organique enrichit les sols, apportent des éléments nutritifs aux plants et dans l’espoir d’accroître les rendements, la présidente du groupement a construit quatre fosses fumières. A sa suite, chaque membre a construit au minimum une fosse. Sur cette base, le groupement a réalisé 75 fosses fumières. Chaque fosse fumière mesure 3 m de longueur, 3 m de largeur et 1,50 m de profondeur. Le compost est fait à base de déjections d’animaux (bouse de vache surtout), de cendres, de résidus de récoltes (tiges de mil, de gombo et de maïs hachées, herbes ramassées) et de l’eau. Des couches de mélange superposées 10 fois permettent d’extraire de chaque fosse, Fif 7 : Photo d’une fosse de Compostage

6

Page 7: €¦ · Web view2015/09/17  · Compte tenu de l’état d’extrême pauvreté des sols et après les échecs des deux premières campagnes agricoles (2007 -2008 et 2008-2009),

45 charretées de compost bien décomposé.

Fig 8 : Vue d’une pépinière

II.2.2 - Activité 2 : La réalisation des pépinières d’arbres pour la pratique de l’agroforesterieSachant que les arbres atténuent l’érosion des surfaces champêtres, fertilisent les champs, créent un micro climat, produisent des PFNL, du bois de feu et d’œuvre, et bornent les champs, SIA Marie et ses camarades ont décidé de recourir à la plantation d’arbres fertilitaires dans leurs exploitations. A cet effet, elles ont réalisé une première pépinière 3 000 pieds en 2009. Les espèces produites ont été le moringa oleifera, le samanea saman et l’albizia stipulata. Les plants ont été transplantés dans les champs des membres du groupement.

II.2.3 - Activité 3 : Agroforesterie Les plants de moringa oléifera, d’albizia stipulata et de samanea saman produits dans la pépinière ont été mis en terre dans les différents champs (52 ha) en association avec les cultures. Ces arbres à croissance rapide ont été choisis en raison de leur faculté d’héberger dans leurs rhizosphères des symbioses avec des bactéries et des champignons mycorhiziens. Ces symbioses rabattent l’azote de l’air, l’eau et les sels minéraux du sol, pour les mettre à la disposition des cultures et enrichissent ainsi les sols. Le Moringa est non seulement une espèce comestible mais également réputée pour ses vertus thérapeutiques.L’entretien et le suivi de la croissance des arbres sont assurés par des pépiniéristes formés aux frais du groupement et par les techniciens d’APAF

Fig 9 : Scène de plantation d'arbres fertilitaires

Fig 10 : Photo d’un cordon pierreux

Les membres du groupement ont profité des cailloux préexistants dans les champs qu’ils ont complétés avec des cailloux transportés d’ailleurs pour installer les cordons pierreux

II.2.4 - Activités 4 : la réalisation de cordons pierreux

Pour atténuer l’érosion des sols et pour maintenir l’humidité dans leurs champs au cas où Ziou connaîtrait une poche profonde de sécheresse, les membres du groupement Wend Panga ont réalisé des cordons pierreux sur l’ensemble de leurs exploitations. Ces cordons ont été installés suivant des courbes de niveaux et perpendiculairement au sens de ruissellement des eaux de pluie. Environ 16 000 mètres de cordons sont construits à ce jour.

7

Page 8: €¦ · Web view2015/09/17  · Compte tenu de l’état d’extrême pauvreté des sols et après les échecs des deux premières campagnes agricoles (2007 -2008 et 2008-2009),

II.2.5 - Activité 5 : l’utilisation de semences améliorées

Dans le souci d’accroître la productivité dans leurs exploitations, le groupement Wend Panga utilise des semences améliorées de maïs, de sorgho, de niébé et de sésame, achetées auprès des services de la recherche agricole. Pour chaque spéculation, les variétés suivantes sont utilisées :

Spéculations VariétésMaïs MasongoNiébé KVX 396-4-5-2-DSésame F42Sorgho Sariaso 11 Fig 11 : Photo d’un stock de semences

Fig 12 : Photo d’un sac d’engrais

II.2.6 - Activité 6 : L’application d’engrais chimiques Compte tenu de l’état d’extrême pauvreté des sols et après les échecs des deux premières campagnes agricoles (2007 -2008 et 2008-2009), les membres du groupement ont eu recours aux engrais chimiques. Le NPK et l’urée ont été les principaux engrais minéraux utilisés. Mais à la suite de la mise en œuvre des multiples actions de restauration des sols (agroforesterie, paillage, compostage, cordons pierreux, semences améliorées), le groupement s’est orienté vers la production biologique et ne fait plus recours aux pesticides et engrais chimiques depuis 2012. Les rendements ont un peu baissé en 2012 – 2013, mais les membres sont décidés à continuer avec cette option de production sans engrais chimiques.

II.2.7 – Activité 7 : Formations des membres du groupement

Chacune des 65 membres du groupement a été formée et recyclée sur les techniques culturales (maïs, sorgho, niébé et sésame) et sur les technologies appliquées (cordons pierreux, agroforesterie, paillage).

II.2.8 - Activité 8 : Information et sensibilisation des populations environnantes par la communication de proximité

Les initiatives d’adaptations aux changements climatiques promues par le groupement Wend Panga s’accompagnent d’actions de sensibilisation de proximité dans les quartiers de Ziou et dans les localités environnantes. Ces sensibilisations ont touché au moins 1 200 personnes dont environ 900 femmes à travers dix sept (17) séances tenues.

Fig 13 : Vue d’une réunion de sensibilisation de la population de Ziou par le groupement Wend Panga

II.2.9 - Activité 9   : Information / sensibilisation des populations lointaines sur les effets des changements climatiques au moyen de la radio rurale

8

Page 9: €¦ · Web view2015/09/17  · Compte tenu de l’état d’extrême pauvreté des sols et après les échecs des deux premières campagnes agricoles (2007 -2008 et 2008-2009),

Fig 14 : Scène d’émission radiophonique animée par SIA Marie sur à la radio rurale Pagalayiri des Femmes de Zabré

Pagalayiri des femmes de Zabré

Les sensibilisations par la communication de proximité ont été suivies de la sensibilisation par la radio. La radio rurale Paglayiri de femmes basée à Zabré qui émet sur 100 kms à la ronde a été ciblée. Ainsi les animateurs, la présidente et d’autres membres du groupement ont animé 11 émissions de 60 mn chacune sur la problématique des changements climatiques. Les émissions ont été animées en langues nationales Nankana et Gourounsi parlées dans la zone.

II.2.10 - Activité 10   : Partage de l’expérience à travers l’accueil d’autres producteurs

L’expérience du groupement Wend Panga a fait tâche d’huile au point de faire l’objet de voyages d’échanges. Ses membres ont accueilli successivement des producteurs agricoles venus des communes rurales de Zecco, de Zabré, de Tiébélé, de Djara, de Pô et de Gombousgou au Burkina Faso. Des producteurs agricoles du nord du Ghana sont aussi venus au Burkina en 2012 pour s’inspirer de l’expérience de Ziou.

III - LES RESULTATS OBTENUS DANS LA MISE EN ŒUVRE DE L’INITIATIVE

L’expérience de Ziou a produit des résultats satisfaisants en termes de contribution à la sécurité alimentaire d’une part et d’accroissement de revenus de ses membres d’autre part.

III.1 - En termes de la physionomie des champs et de la sécurité alimentaire

Fig 15 : Du sorgho en attente d'être récolté

En visite de terrain à Ziou, les exploitations du groupement Wend Panga attirent l’attention du fait qu’elles affichent une physionomie bien distincte de celles des champs voisins. Les épis de sorgho (photo ci-contre) et de maïs sont suffisamment développés et témoignent de l’importance de la fumure organique dans un contexte de pratique agricole marquée par les changements climatiques. Parmi toutes les exploitations familiales de la Commune de Ziou, c’est seules celles des membres de Wend Panga qui donnent de bons rendements en sésame (photos ci-dessous).

9

Page 10: €¦ · Web view2015/09/17  · Compte tenu de l’état d’extrême pauvreté des sols et après les échecs des deux premières campagnes agricoles (2007 -2008 et 2008-2009),

Fig 16 : Champ de sésame d'un tiers producteur Fig 17 : Champ de sésame de Mme SIA Marie

S’agissant de l’impact de l’initiative sur l’accroissement de la production agricole, il est bien perceptible :

Pour les céréales (maïs et sorgho), les rendements sont passés en moyenne de 200 kg/ha (campagne 2007-2008) à 4 tonnes/ha (campagne 20013-2014) ;

Pour le niébé, ils sont passés de 25 kg/ha en 2007-2008 à 1 tonne/ha en 2013 – 2014 : Pour le sésame, ses rendements sont passés de 600 kg/ha à 1,3 tonnes/ha.

Fig 18 : Stock de sécurité d'un membre

L’accroissement des rendements induisant une augmentation des quantités de productions agricoles, les membres de Wend Panga sont en mesure d’assurer leur sécurité alimentaire à travers l’autoconsommation de 21% en moyenne de leurs productions.

Exemple : Prenons le cas de la Présidente, Mme SIA Marie pour prouver que les membres de Wend Panga sont à l’abri de l’insécurité alimentaire.Selon la FAO, « un Homme est en sécurité alimentaire s’il dispose de 190 kg de céréales par année pour son alimentation ». La Présidente a produit 12 000 kg lors de la campagne 2013-2014. Sa famille étant constituée de 10 personnes, sa consommation annuelle est estimée à 1 900 kg. Ces 1 900 kg représentent seulement 16 % de sa production. Déduction faite du stock total de sa production totale, elle dispose d’une quantité à même de lui conférer des revenus substantiels. A l’image de la Présidente, les autres membres du groupement vivent de leurs productions agricoles depuis 2009 -2010 et ne connaissent plus le phénomène de soudure dont souffrent d’autres ménages du Burkina.

III.2 - En termes d’accroissement des revenus

10

Page 11: €¦ · Web view2015/09/17  · Compte tenu de l’état d’extrême pauvreté des sols et après les échecs des deux premières campagnes agricoles (2007 -2008 et 2008-2009),

L’autoconsommation et le stock de sécurité ôtés des productions totales, il reste en général à chaque membre du groupement environ 50% de sa production. Ces 50% peuvent être placés sur le marché burkinabè ou sur l’un des marchés ghanéen, togolais et nigérien pour accroître les revenus des membres. Au titre de la campagne 2013 - 2014, la présidente après avoir produit 12 000 kg, a réservé 1 900 kg pour l’autoconsommation de sa famille et 1 000 kg de stock pour sa sécurité alimentaire. Fig 19 : Photo du magasin, en vue de grouper sa

production pour mieux la commercialiser

Ainsi, Mme SIA a pu commercialiser 9 100 kg et a obtenu la somme de 1 456 000 francs CFA.

Grâce aux revenus tirés de la commercialisation de leurs récoltes, quelques membres du groupement ont pu améliorer leurs conditions de vie lisibles par leur habitat (Fig 20 ci-dessous).

Aussi, certaines ont pu épargner et d’autres ont même acheté quelques têtes d’ovins et de bovins (fig 21 ci-dessous), lesquelles bêtes permettent d’obtenir du fumier destiné au remplissage des fosses de compostage.

Fig 20 : Photo de l’habitat d’un membre Fig 21 : Photo des bovins d’un membre

IV – Difficultés rencontrées

Durant son parcours, le groupement Wend Panga a connu quelques difficultés, en l’occurrence :

- la difficulté à obtenir des terres agricoles pour les femmes, ce qui les a conduites sur des endroits impropres à l’agriculture. Il est de notoriété un peu partout en Afrique que les femmes accèdent difficilement aux terres fertiles et donc il a fallu de laborieux efforts pour récupérer ces terres ;

11

Page 12: €¦ · Web view2015/09/17  · Compte tenu de l’état d’extrême pauvreté des sols et après les échecs des deux premières campagnes agricoles (2007 -2008 et 2008-2009),

- l’insécurité foncière : à la suite de la mise en valeur des terres, les propriétaires terriens nourrissent désormais l’envie de les reprendre pour leurs besoins agricoles. Après avoir observé des velléités d’expropriation, le groupement a été contraint de solliciter le soutien des autorités locales (Maire de Ziou, Haut Commissaire de la province du nahouri et Gouverneur de la région du Centre-est) afin de faire taire cette situation. Jusqu’à ce jour, les membres du groupement ne disposent d’aucun document officiel au titre de la possession des terres exploitées pour les sécuriser dans leurs activités, d’où elles restent toujours à la merci des propriétaires terriens donateurs ;

- la pauvreté extrême des femmes (et de leur famille) pour prendre en charge les dépenses liées à la mise en valeur des terres dégradées ;

- l’analphabétisme d’une frange très importante des femmes qui n’a pas facilité la maîtrise des technologies appliquées, mais grâce aux multiples formations et échanges bords-champs ce défis a pu être relevé ;

- l’insuffisance de financements extérieurs pour soutenir les femmes engagées dans la valorisation des terres.

V – PARTENAIRES DU GROUPEMENT WEND PANGA L’initiative relève entièrement de la Présidente qui a entrainé les autres membres du

groupement ; Le groupement a contracté un crédit annuel, trois fois de suite auprès de l’Agence de la

Caisse Populaire de Ziou, une Institution de Micro-Finances (IMF) qui a permis de financer l’achat des semences améliorées et des engrais minéraux destinés aux champs au départ. Aujourd’hui, le groupement autofinance ses intrants (semences), l’engrais n’étant plus utilisé depuis fin 2012 ;

Sur la base des premiers résultats encourageants, le groupement a bénéficié d’une subvention du Plan National d’Adaptation aux Changements Climatiques du Burkina (PANA), qui lui a permis de poursuivre la construction de cordons pierreux, d’introduire l’agroforesterie dans les champs, d’acquérir des matériels collectifs (charrettes) et un magasin de stockage des récoltes en commun ;

L’expérience s’est également menée avec l’accompagnement des services techniques agricoles de la commune, de la Confédération Paysanne du Faso et de la Fédération des Professionnels Agricoles du Burkina (FEPAB) en termes d’appuis techniques, organisationnels et de gestion ;

L’Association pour la Promotion de l’Agroforesterie et de la Foresterie au Burkina (APAF – Burkina) a été sollicitée par le Groupement en 2009 pour l’introduction de l’agroforesterie dans les exploitations de ses membres (formations des pépiniéristes et des autres membres, mise en place et suivi de la pépinière, plantation et suivi du développement des arbres fertilitaires dans les champs) ;

Les autorités administratives et politiques locales (Préfet de Ziou, Haut Commissaire de la Province du Nahouri et Gouverneur de la région du Centre Sud) ont encouragé l’initiative en effectuant des visites sur les sites d’adaptation aux changements climatiques.

VI – LECONS TIREES PAR LES INITIATEURS

Méfiants et hésitants au début, les membres du Groupement auxquels, la Présidente a insufflé un dynamisme, se sont appropriés de l’initiative qui leur a permis d’apprendre et de partager des connaissances utiles à la survie des populations. Certains jeunes de la localité qui avaient envi de migrer au Ghana ou en Côte d’Ivoire après leur déguerpissement des abords du fleuve Nazinon, ont

12

Page 13: €¦ · Web view2015/09/17  · Compte tenu de l’état d’extrême pauvreté des sols et après les échecs des deux premières campagnes agricoles (2007 -2008 et 2008-2009),

renoncé à ce projet et se sont transformés en animateurs auprès du groupement Wend Panga en plus d’être des producteurs imitateurs de l’initiative.

Les capacités des membres du groupement ont été également renforcées à travers des sessions de formation dont les modules ont porté sur les changements climatiques, la production de la fumure organique, les techniques culturales, la gestion des stocks et la commercialisation des produits agricoles et le Conseil à l’Exploitation Familiale (CEF). VII - PERTINENCE DE L’EXPERIENCE

A l’analyse, l’expérience de Wend Panga est sans doute pertinente à bien d’égard :

les techniques et technologies adoptées par le groupement Wend Panga sont accessibles et ne sont pas coûteuses. Avec environ 50 000 francs CFA (91 USD environ) soit le prix de 5 sacs de maïs au plus, une fosse fumière se construit. Quant à l’agroforesterie, 500 000 francs CFA (910 USD), soit la valeur de 33 sacs de maïs suffisent à installer la pépinière et à faire les plantations ;

Au vu de ses résultats et de ses coûts accessibles, l’initiative est rentable même si elle utilise en grande partie la force humaine des femmes. En effet, le ramassage des cailloux, la pose des cordons pierreux et l’épandage de la fumure peuvent se faire en comptant sur la main d’œuvre familiale ;

En raison de la pratique de l’agroforesterie, de l’utilisation du compost et des autres mesures mécaniques de conservation des eaux et sols (cordon pierreux), l’emploi des engrais chimiques peut être évité par les paysans, ce qui facilite la duplication de l’initiative ;

Le choix de pratiquer l’agriculture biologique atteste que les membres du groupement sont soucieux du respect de l’environnement et de la biodiversité de leur milieu de vie. En n’utilisant plus les pesticides (herbicides) qui sont une cause de mortalité des abeilles par exemple, les membres du groupement envisagent désormais de faire de l’apiculture ;

L’expérience de Wend Panga se transpose très facilement car elle est déjà dupliquée par plusieurs autres organisations paysannes, dont 84 autres groupements de la Province du Nahouri (à des degrés divers) et par une union de la Commune de Zabré voisine de celle de Ziou. D’autres organisations paysannes nourrissent l’ambition de récupérer des terres appauvries dans leurs communautés voisines de Ziou. Au-delà de ces localités, l’expérience de Ziou peut être pratiquée dans toute autre localité d’Afrique subsaharienne et particulièrement dans les pays sahéliens.

VIII – facteurs de réussite

Bien que maîtrisable et facilement applicable, l’initiative du Groupement requiert quelques conditions :

la volonté des initiateurs et leur attachement à la terre qu’ils veulent récupérer ; la détermination, la rupture d’avec la paresse, l’ingéniosité et l’ardeur au travail ; la patience dans la recherche des résultats et des impacts car l’initiative se voulant durable,

elle ne produit pas d’effets dès la première année de sa mise en œuvre.

Sans ce minimum, toute initiative du type est vouée à l’échec.

13

Page 14: €¦ · Web view2015/09/17  · Compte tenu de l’état d’extrême pauvreté des sols et après les échecs des deux premières campagnes agricoles (2007 -2008 et 2008-2009),

IX – Apport personnel de Mme SIA Marie dans la réussite de l’initiative

Mme SIA Marie est Leader paysanne engagée dans les organisations paysannes depuis de longue date. Elle est Présidente de son groupement villageois à Ziou, Présidente de l’Union Provinciale des Professionnels Agricoles (UPPA) du Nahouri, qui rassemble 85 groupements agricoles, Vice-présidente nationale de la Fédération des Professionnels Agricoles du Burkina (FEPAB) et Vice-présidente du Collège des Femmes de la Confédération Paysanne du Faso (CPF), qui est la plus grande plateforme paysanne du pays regroupant des organisations paysannes faîtières de filières et généralistes.

Fig 22 : Photo de Mme SIA Marie

En plus d’en être initiatrice, Mme SIA Marie s’est investie personnellement à travers l’encouragement et le conseil quotidiens auprès des autres membres de son groupement, la recherche et l’entretien des relations avec les partenaires techniques et financiers (CPF, FEPAB, CRDI, PANA, APAF, etc.). Son charisme et son abnégation ont ainsi permis à 65 familles rurales à l’origine très pauvres de vivre de leur métier d’agriculteur et de contribuer depuis 2010 à la sécurité alimentaire et nutritionnelle du Burkina Faso. Elle a effectué plusieurs déplacements à Ouagadougou auprès des partenaires à ses propres frais.

Tout soutien au maintien, à la recherche-action, au développement et à la vulgarisation du paquet technologique de cette initiative d’adaptation aux changements climatiques, pourrait aider le Burkina Faso tout entier à connaître un lendemain meilleur aux plans, sécurité et souveraineté alimentaire, économique, et environnemental.

14