Par le chef d’escadron Jean Jacques BRENIAUX

Veuillez trouver ci-joint un article sur l'aventure et la fabrication du canon de 75 effectuée par mes réservistes

 Canonniers ! À la pièce !

 

08h00,

le soleil est enfin revenu dans le ciel haut-marnais et inonde de ses rayons la petite courette où travaille le 1cl Pierre. Des gouttes d'eau tambourinent sur les plaques d'acier restées à l'extérieur en attente d'assemblage. Le fer à souder alterne avec la meuleuse et les bavardages des soldats.

On cherche à nouveau ce crayon qui a la fâcheuse habitude de disparaître chaque fois que l'on en a besoin. Pierre, aidé du brigadier-chef Florian, s'acharne sur un morceau de métal qui refuse d'adhérer à la pièce étrange qu'il est en train de monter. Le maréchal des logis chef Romain nettoie de son coté, une autre pièce récupérée au fond d'un court d'eau de Haute-Marne.

10h00,

l' assemblage commence, les canonniers soudent un axe qui accueillera tout à l'heure, deux grandes roues en bois. Ce ballet étrange se poursuit toute la journée et recommencera demain et après demain.

La pièce maitresse prend forme, les travaux ne s’arrêtent que très rarement, souvent pour vérifier si l'ensemble fonctionne ou si les mesures sont bien les bonnes.

Demain, on commencera les essais. Tout le monde attend avec impatience ce moment. Il ne s'agit pas de se rater. Le chef de corps compte bien mettre en avant le travail de ses réservistes lors de sa passation de commandement toute proche.

Et puis, il faut donner à la structure une unité, trouver la bonne couleur afin de pouvoir créer l'illusion.

Au bout de trois semaines, le projet est terminé et trône fièrement au centre de la cour. Il fera illusion : une pièce de 75, le canon servi par les anciens du Premier de la Fourragère dès 1910. Lorsqu'il tire, le tube recule d'un bon mètre sans que les roues ne bougent. Le pari semble gagné.

Ce projet est né il y a plus d'un an. Les réservistes de la 5e batterie du 61e régiment d'artillerie, qui participent chaque année à la réalisation d'un court-métrage retraçant l'histoire de leur régiment, avaient à cœur de posséder un exemplaire de cette pièce d'artillerie afin d'apporter un peu plus de réalisme à leur démarche.

C'est aujourd'hui chose faite. En parallèle, il ont monté une association « Nous autres de la 5 » afin de pouvoir gagner en autonomie. Depuis 2014, ils travaillent en collaboration étroite avec le lycée Gaston Bachelard de Bar-sur-Aube et les élèves de l'option cinéma qui leur apportent leurs savoir-faire techniques et artistiques nécessaires à la réalisation d'un tel projet.

En parallèle, la pièce n°1, baptisée « Pierrepont » a déjà participé activement au rayonnement du régiment en faisant feu à plusieurs reprises devant un public de civils et de militaires rassemblés une dernière fois autour du colonel Marc Bonnet lors de sa passation de commandement le 17 juillet 2021.

Un peu plus de 100 ans après sa création, le 61e régiment d'artillerie accueille à nouveau cette pièce emblématique de la Première Guerre Mondiale, son premier matériel.

 Régiment d'artillerie du renseignement équipé de drones, il est actuellement engagé au Mali avec des équipes de minidrones SMDR. Son expertise, sa connaissance de tous les systèmes de drones  de 18 grammes à 18 mètres d'envergure, sa maîtrise de la 3D et de la sécurité aéronautique en font un régiment unique qui forme la totalité des formateurs qualifiés sur drones dans l’armée de Terre. Mettant en œuvre des systèmes très variés et à forte valeur ajoutée sur le plan opérationnel, il porte en effet en son sein l’école des drones de l’armée de Terre qui forme des opérateurs sur tous les systèmes (du SDT Patroller, remplaçant du SDTI au Drop (Black Hornet) en passant par le Mavic et le NX-70 ou le SMDR).

Si le matériel a changé, les Diables-Noirs restent fortement attachés à leurs traditions, notamment celles issues de l'artillerie.

La pièce de 75 n'a pas fini de faire parler d'elle et donnera de la voix afin que personne n'oublie jamais le sacrifice des anciens du seul régiment d'artillerie à la fourragère rouge.

Chef d’escadron Jean-Jacques Breniaux

OAR du 61ème régiment d’artillerie