10
Annie Ernaux : Biographie : Annie Ernaux passe son enfance et sa jeunesse à Yvetot , en Normandie . Née dans un milieu social modeste, de parents d’abord ouvriers, puis petits commerçants qui possédaient un café-épicerie. Très tôt dans sa carrière littéraire, Annie Ernaux délaisse la fiction pour se concentrer sur le matériau autobiographique que constitue son enfance dans le café-épicerie parental d’ Yvetot , en Normandie . Mêlant expérience historique et expérience individuelle, ses ouvrages dissèquent l’ascension sociale de ses parents ( La Place , La Honte ), son mariage ( La Femme gelée ), sa sexualité et ses relations amoureuses ( Passion simple , Se perdre ), son environnement ( Journal du dehors , La Vie extérieure ), son avortement ( L'Événement ), la maladie d'Alzheimer de sa mère ( « Je ne suis pas sortie de ma nuit » ), la mort de sa mère ( Une femme ) ou encore son cancer du sein ( L'Usage de la photo , en collaboration avec Marc Marie) Annie Ernaux revendique une écriture neutre, « sans jugement, sans métaphore, sans comparaison romanesque », et évoque un style « objectif, qui ne valorise ni ne dévalorise les faits racontés », cherchant ainsi à « rester dans la ligne des faits historiques, du document» Pour Annie Ernaux, il n'existe « aucun objet poétique ou littéraire en soi », et l'écriture est motivée par

Web view« Je ne suis pas sortie de ma nuit ... C’est une interrogation par rapport à la place d’elle-même et du père (ouvrier, commerçant)

  • Upload
    vohuong

  • View
    215

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Web view« Je ne suis pas sortie de ma nuit ... C’est une interrogation par rapport à la place d’elle-même et du père (ouvrier, commerçant)

Annie Ernaux :

Biographie :

Annie Ernaux passe son enfance et sa jeunesse à Yvetot, en Normandie. Née dans un milieu social modeste, de parents d’abord ouvriers, puis petits commerçants qui possédaient un café-épicerie.Très tôt dans sa carrière littéraire, Annie Ernaux délaisse la fiction pour se concentrer sur le matériau autobiographique que constitue son enfance dans le café-épicerie parental d’Yvetot, en Normandie. Mêlant expérience historique et expérience individuelle, ses ouvrages dissèquent l’ascension sociale de ses parents (La Place, La Honte), son mariage (La Femme gelée), sa sexualité et ses relations amoureuses (Passion simple, Se perdre), son environnement (Journal du dehors, La Vie extérieure), son avortement(L'Événement), la maladie d'Alzheimer de sa mère (« Je ne suis pas sortie de ma nuit »), la mort de sa mère (Une femme) ou encore son cancer du sein (L'Usage de la photo, en collaboration avec Marc Marie)

Annie Ernaux revendique une écriture neutre, « sans jugement, sans métaphore, sans comparaison romanesque », et évoque un style « objectif, qui ne valorise ni ne dévalorise les faits racontés », cherchant ainsi à « rester dans la ligne des faits historiques, du document»

Pour Annie Ernaux, il n'existe « aucun objet poétique ou littéraire en soi », et l'écriture est motivée par un « désir de bouleverser les hiérarchies littéraires et sociales en écrivant de manière identique sur des objets considérés comme indignes de la littérature, par exemple les supermarchés, le RER, et sur d'autres, plus nobles, comme les mécanismes de la mémoire, la sensation du temps, etc., en les associant».

Elle déclare par ailleurs tenter d'écrire sur la langue du monde ouvrier et paysan normand qui a été le sien jusqu'à ses dix-huit ans : « Ce qui m'importe, c'est de retrouver les mots avec lesquels je me pensais et pensais le monde autour».

La dernière phrase de Les Années propose une synthèse de l'œuvre d'Ernaux, de ses ambitions, mais surtout de son style : « Sauver quelque chose du temps où l'on ne sera plus jamais », sauver « toutes les images [qui] disparaîtront ».

Page 2: Web view« Je ne suis pas sortie de ma nuit ... C’est une interrogation par rapport à la place d’elle-même et du père (ouvrier, commerçant)

La place :

Ecrit en 1983

Résumé :

L'histoire commence par la mort du père, puis effectue un long retour en arrière sur sa vie. L'auteur, dès les premières pages, annonce son style littéraire : elle compte décrire la vie de son père le plus froidement possible, dans une écriture plate, sans émotions, telle qu'elle lui vient naturellement. Le livre entier est une mise en application de ce principe : le récit d'une vie simple, à l'aide d'un vocabulaire simple, dans des phrases dépouillées à l'extrême.Il s'agit de la vie de sa famille, une famille ouvrière comme il y en avait tant. Elle dresse un portrait froid de ses grands-parents agriculteurs, peu cultivés, puis de ses parents d’abord ouvriers, puis petits commerçants qui possédaient un café-épicerie, rapidement concurrencé par les grandes surfaces. Elle fait comprendre aussi comment ses études puis son métier d'enseignante et enfin, son mariage l'ont peu à peu rendue comme étrangère à sa propre famille, avec laquelle elle avait de plus en plus de mal à partager

Analyse :

C’est une interrogation par rapport à la place d’elle-même et du père (ouvrier, commerçant) dans la société.Culpabilité face au changement de classe sociale écriture = moyen de guérison

p.11-12 : Elle ressent vaguement de la honte par rapport à son changement de classe sociale ; pas tout à fait ce mot pour expliquer ce qu’elle ressent.La honte est dans le rapport à elle-même.

p.23-24 : Eté 67, mort du père. Au cours de l’été, volonté d’écriture vient.Ensuite vient le dégoût de la démarche et elle arrête d’écrireEn 1981-82, projet débuteA partir des années 70, uniquement écriture biographiquePrise de conscience de la distinction des classes

Apparition de la notion de projet volonté d’aborder vie du père + leur relationVolonté de la recherche autobiographiqueL’écriture simple résulte d’une réflexion

Page 3: Web view« Je ne suis pas sortie de ma nuit ... C’est une interrogation par rapport à la place d’elle-même et du père (ouvrier, commerçant)

Refus de faire un roman, refus de l’image idéalisée du père opposition entre art et écriture plateÉcriture plate = renouement avec parents. Langue qu’ils auraient pu comprendreElle est dans la recherche de la vérité

p.51 à 54 : Ascension sociale importanteDescription simple, pas jugement de valeurPère pas habile avec les mots, père préoccupation du regard des autres, peur du jugement des autresParents ont capacité à l’autosuffisance, en plus ils sont indispensables au quartier

p.59 à 63 : Retranscrire parole des parents = fidelité

Le peur a honte, a peur d’être déplacé. Il a peur de manier les mots, conscience de sa maladresse donc il se contrôle.Avant elle partageait la honte de son père.

On est au centre de la réflexion : qu’est-ce que c’est qu’être à la bonne place ?

p.111 à 113 : Son père prend une grande place dans la vie d’Ernaux, il est fier d’elle. Son soutien est important. Elle lui rend hommage par son livre.

Une femme :

Ecrit en 1987

Résumé :

Le livre Une Femme qu’Annie Ernaux a écrit à la mort de sa mère (atteinte de la maladie d’Alzheimer) pour tenter de faire revivre celle-ci et de l’immortaliser par l’écriture au moment précis où elle disparaît définitivement. L’auteure espère ainsi, par ce biais, retrouver le lien qui l’unissait à cette mère, mais aussi tracer le portrait de cet être qui a existé en dehors d’elle (en dehors, donc, de la relation mère/fille). Inconsciemment, donc, Annie Ernaux se retrouve d’un côté dans la position de la petite fille qui évoque ses souvenirs mais aussi d’un autre côté dans celle d’une mère puisque c’est elle, par ses mots, qui redonne naissance à la défunte. Ce livre, qu’elle mettra un an à écrire, est donc une sorte d’accouchement. Il s’agit de donner le jour à un personnage dont elle n’a connu finalement qu’un des aspects et de tenter de le faire revivre en étant fidèle au contexte historique dans lequel s’est déroulée sa vie.

Le début commence comme dans l’Etranger de Camus par une phrase forte : « Ma mère

Page 4: Web view« Je ne suis pas sortie de ma nuit ... C’est une interrogation par rapport à la place d’elle-même et du père (ouvrier, commerçant)

est morte le lundi 7 avril à la maison de retraite de l’hôpital de Pontoise, où je l’avais placée il y a deux ans. » (p.11)

Tout est déjà dit par cette simple phrase. On perçoit la déroute de l’auteure suite à cet événement dramatique mais aussi sa culpabilité latente d’avoir dû placer sa mère quand celle-ci avait perdu la raison.

Le livre retrace donc le parcours de cette mère, qui vivait en Normandie, dans un milieu modeste (ouvrier), mais qu’elle tentera de quitter en s’élevant un peu socialement (petit commerce). C’est elle qui poussera sa fille Annie à faire des études, à « s'en sortir » mais en faisant cela elle la fera passer de l’autre côté de la barrière, dans le monde bourgeois et cultivé où elle-même n’aura jamais accès. D’un côté, donc, elle sera fière du parcours de son enfant, mais de l’autre, cet enfant, elle l’aura perdu car elle ne la comprendra plus vraiment (et réciproquement).L’écriture a finalement un rôle cathartique pour Annie Ernaux :Car si Annie Ernaux se sent coupable envers sa mère (de l’avoir reniée socialement et d’avoir dû la placer), elle éprouve également un certain malaise vis à vis de sa classe d’origine : elle ne la comprend plus et s’y sent mal à l’aise, mais elle n’oublie pas qu’elle en est issue et qu’une partie d’elle-même puise donc ses racines là. La disparition de la mère coupe donc définitivement les ponts avec un monde révolu. D’où la nécessité d’écrire tout cela pour retrouver la paix intérieure.

En lisant ce livre, je me demandais dans quelle catégorie il convenait de le ranger. Car finalement, écrire sur ses parents, est-ce déjà de la littérature ou bien est-ce que cela relève du journal intime ? A un certain moment, l’auteur donne elle-même la réponse :« Ce que j’espère écrire de plus juste se situe sans doute à la jointure du social et du familial, du mythe et de l’histoire. Mon projet est de nature littéraire, puisqu’il s’agit de cherche rune vérité sur ma mère qui ne peut être atteinte que par des mots. (C’est-à-dire que ni les photos, ni mes souvenirs, ni les témoignages de la famille ne peuvent me donner cette vérité.) Mais je souhaite rester, d’une certaine façon, au-dessous de la littérature. » (p. 23)

Annie Ernaux considère donc que le fait d’utiliser les mots rattache d’emblée son travail à la littérature (tout en insistant sur le fait qu’il y a une part personnelle importante qui fait qu’elle reste un peu en dessous).

Evidemment, si elle s’était juste contentée de retracer pour elle seule un portrait de sa mère, on n’aurait pas pu qualifier son livre de littéraire. Mais elle va au-delà de la peinture individuelle en replaçant cette mère dans son contexte historique et social :

« J'essaie de ne pas considérer la violence, les débordements de ma mère comme seulement des traits personnels de caractère, mais de les situer aussi dans son histoire et sa condition sociale. Cette façon d'écrire, qui me semble aller dans le sens de la

Page 5: Web view« Je ne suis pas sortie de ma nuit ... C’est une interrogation par rapport à la place d’elle-même et du père (ouvrier, commerçant)

vérité, m'aide à me sortir de la solitude et de l'obscurité du souvenir individuel, par la découverte d'une signification plus généreuse. »

Petite fille, elle a donc connu sa mère avec certains traits de caractère qu’elle a crus lui être propres. Adulte, elle se rend compte qu’une bonne partie de ce caractère était lié à l’appartenance à une classe sociale bien définie (parler fort, déplacer les objets en faisant du bruit, etc.). Ecrire tout cela dépasse donc le simple compte-rendu individuel et permet d’atteindre une vérité plus générale. C’est en ce sens, à mon avis, que ce livre appartient de plein droit à la littérature.

Mais une fois ce point acquis, qui rassure l’écrivain, un autre doute surgit, qui concerne la petite fille que fut Annie :

« Mais je sens que quelque chose en moi résiste, voudrait conserver de ma mère des images purement affectives, chaleur ou larmes, sans leur donner un sens. »

En livrant sa mère aux lecteurs, elle la sauve de l’oubli mais elle en fait aussi un personnage quasi public, qui ne lui appartient plus vraiment. Autre paradoxe de l’écriture…

Finalement, demeure le problème de savoir dans quelle catégorie on va placer ce livre, puisque c’est bien de la littérature.

« Ceci n’est pas une biographie, ni un roman naturellement, peut-être quelque chose entre la littérature, la sociologie et l’histoire."

Comme quoi, rien n’est simple quand on se met à écrire pour clarifier ses pensées et exorciser ses démons.

p.11 à 19 : Entrée en matière abrupte, figure centrale = mèreDimension autobiographique

p.43-44 : Refus de la mise en scène, réflexion car exigence de perfectionSouffrance face aux évènements mais refus d’un sentimentalisme

p.48 à 50 : Montre différentes facettes de la mère dont celle de femme.Côté excessif en elle attitude d’une femme qui fonceErnaux a honte, elle déteste que sa mère soit pas comme les autres mères ; pas conventionnelle ou discrète.

Page 6: Web view« Je ne suis pas sortie de ma nuit ... C’est une interrogation par rapport à la place d’elle-même et du père (ouvrier, commerçant)

p.52 : Déterminisme socio-culturel important chez ses parentsVolonté de lucidité malgré sentiments (qu’elle s’autorise à ressentir)

p.62 : Démarche explicative, admet difficulté à se distancierAmbivalence de la mère : homme ou femme ? Car travail très masculin (pour l’époque)Difficulté de la relation au corps dans sa famille tabou sexualité

p.68-69 : Ecrire c’est faire encore exister sa mère difficile pour elle de terminer livre car signifie mort de sa mère. (comme pour Meizoz)

Moment de rapprochement, d’union retrouvée

Passage inconnu : L’histoire de la vie de sa mère est précise, Ernaux utilise bcp de dates. L’Histoire aussi s’en mêle.Présence de l’Eglise qui apporte des repères moraux + dignité pour la classe sociale de la mère. A l’église, tout le monde est égal.Pour évolution sociale, que 2 possibilités :

- Soit un bon mari donc +++- Soit un mauvais mari alcolo donc - - - Montre perception du mariage + sexualité