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Y a-t-il negligence vaccinale antipneumococcique ? ,, Le scandale des pneumococcies ., titrait RFL en 1996 (286 [09/96] 37), sans avoir ~t~ d#menti, & la suite d'un constat •~ I'heure ob la r#sistance du pneumocoque aux antibiotiques est alarmante, on pourrait &conomiser ces molecules en utilisant plus largement la vaccination antipneumocoque, disponible depuis 1983. E ncore faudrait-il qu'elle soit etendue, sachant par ailleurs que 25 % des souches (en moyenne) sont resistantes & la penicilline. Quatre ans apres, pneumologues et infectio- Iogues remontent au creneau. Constat actuel, I'incidence annuelle des pneumococ- cies : 132 000 (entre 130 000 et 140 000 ?), avec une mortalite moyenne de 6 000 cas (entre 3 et 10 % ?), principale- ment chez les plus de 60 ans (90 % des daces), une des plus fortes causes de mor- talite par maladie infectieuse. sont responsables de pres de 8 % des daces chez les sujets non proteges ou fragiles. La France a pris du retard dans sa couvertu- re vaccinale optimale, tandis que d'autres pays ,, ont avance sans nous ,,, comme dirait le senateur Neuwirth. Malgre mises en garde et reunion d'experts pneumologues et infectiologues et leurs recommandations d'elargissement, la vacci- nation reste contingentee. C'est ce qu'ils ont laisse entendre Iors d'une nouvelle mise en garde*. De la ville a I'hepital La quasi-totalite des pneumococcies se pro- duit en ville, oQ le traitement antibiotique est probabiliste, en I'absence de recherche bacteriologique. On peut evoquer une surprescription d'anti- biotiques, prescription qui ne tient pas comp- te des resistances qualitatives (selon les molecules) et quantitatives (CMI). La vaccination antipneumocoque est tres peu prescrite en ville. Complications (septicemie, defaillance car- dio-respiratoire...) et daces sont recueillis par I'hepital ;les pneumonies nosocomiales LA GRIPPE, MALADIE JUVI~NILE Est-il normal de n'offrir la vaccination qu'~ 6~14 % des Frcn~ais : tes 65 ans et plus, alors que les enfants de 0 ~ 14ans reprisentent du tiers ~ la mciti6 des cas de grippe et los ados ef les adultes (16 ~ 64 ans} la mciti~ des cas. La prise en chmge commence ~ 50 ans aux I~tats-Unis, ~ 60 arts en Gracde- Bretagne. Les chiffres cites par le Groupe d'~tude et d'information sar la grippe (GEIG) nous rappellent ravertissement du Pr Max Micoud (CHU de Grenoble) rGclamant la vaccination de toas les Frontals. Nous veeions d'~chapper i une. grippe du sikcle., de justesse tu~e dans I'muf par les autorit~s sanitaires de Hong-Kang, mas- sacrant taus les poulets parteurs d'cn variant Aincaanu (H5 N1). $inon, y aurait-ii eu pand~mie ? En p~riode stable, I'incidecce de la grippe estde 11,2%, soit pros de 2,9 millions de cas, avec des extremes de 1,3~ 4,3 millions de cas. Le coGt direct moyen est de 810 millions de francs, dont 429 millions reviennent d la Cnam. Mais le coi~tindirect (arr~ts de travail et pertes de praduction) se monte ~ 3,26 milliards de francs par an. Ona scupt~onn~ les fabricants de vaccins de vouloir 6tendre leur march(}avec la vaccination universelte, scenario d~jb ~tudi~ en ~conomie de sact~ dans rhypath~se d'une prise en charge avant 65 ans. Si 10 % de la population-cible sontvaccinGs,le gain pour la Cnam oct de 96 millions de francs, de 192 millions pour 20 % et de 288 millions pour 30 %, Ce n'est plus notre sact6 qui est en jeu, c'est la sant~ de notre ~conomie de sant& Sources : La Lettre Option/Bio 9 (octobre 2000). Un sous-emploi ? Y a-t-il sous-emploi d'un vaccin disponible, efficace & 23 valences, correspondant & 90 % des souches les plus frequentes en France, susceptible d'eviter des depenses d'antibiotiques et des charges, des charges hospitalieres co0teuses pour des infections & bacteries multiresistantes ? II faut elargir ses indications actuelles, princi- palement aux sujets &ges, chez lesquels les pneumococcies sont d'autant plus fre- quentes qu'il existe un mauvais etat de santa. Aujourd'hui, on admet que I'Age lui-mCme (65 ans et plus) est dej& un facteur de risque : il faut depasser la notion de vaccina- tion exclusive de ,, groupes & risque ,, et s'ins- pirer de la prise en charge de la vaccination antigrippe (critere : 65 ans et au-del& + 9 maladies chroniques). La mortalite par pneumococcie depasse 30 %chezlesplusde75anset40% chez les plus de 85 ans, I'infection peut entrafner la decompensation d'un terrain respiratoire ou cardiaque jusque-I& equilibre. Les groupes & risque (outre les plus de 65 ans) sont alors : sujets atteints de maladie respiratoire ou cardiaque ou avec antece- dents de pneumonie en ville (,, communautai- re ,,), diabetiques mal equilibres, bronchi- tiques chroniques ou & repetition, sujets denutris, patients fragiles/&ges devant etre hospitalises (risque nosocomial), personnes placees en institution, alcoolo-tabagiques et cirrhotiques, insuffisants renaux, immunode- primes (VlH, transplantes...). Si les indications reconnues par la Commission d'autorisation de commerciali- sation du vaccin** rejoignent celles de la Societe de pneumologie de langue frangaise (SPLF), le Comite technique des vaccina- tions du Conseil superieur d'hygiene publique de France a emis, en avril 1999, Groupes a risque et vaccination : I'&ge est d~jb un facteurde risque des recommandations plus restrictives qui ne prennent pas en compte la population-cible des plus de 65 ans. Si le vaccin est prescrit hors normes, il n'est pas rembourse (il I'est & 65 % habituelle- ment). C'est au medecin de trouver un bon pretexte au remboursement ! Or, I'OMS considere la montee des pneumococcies des ,, seniors ,, comme un nouveau probleme de santa publique et recommande la vacci- nation &partir de 65 ans, m6me en I'absence des facteurs de risque habituellement retenus. Impact economique des pneumococcies : en se basant sur 30 000 admissions annuelles, on arrive & 285 000 journees d'hospitalisa- tion, soit un coat global d'environ 610 mil- lions de francs (20 300 F pour un sejour moyen de 9,5 jours). Sans compter la depen- seen antibiotiques.., inefficaces. J.-M. M. m *Prs Dominique Peyramond (Lyon) G~rard Huchon (Paris), Paul L#ophonte (Toulouse), Jodl Belmin (Sevran), Ren# Rou# (Saint-MantiS), Dr Jacques GaiHat (Annecy), reunion Aventis Pasteur MSD. **Pneumo 23, Aventis Pasteur MSD. 14 Revue Frangaise des laboratoires, novembre 2000,N° 327

Y a-t-il négligence vaccinale antipneumococcique ?

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Y a-t-il negligence vaccinale antipneumococcique ?,, Le scandale des pneumococcies ., titrait RFL en 1996 (286 [09/96] 37), sans avoir ~t~ d#menti,& la suite d'un constat • ~ I'heure ob la r#sistance du pneumocoque aux antibiotiques estalarmante, on pourrait &conomiser ces molecules en utilisant plus largement la vaccinationantipneumocoque, disponible depuis 1983.

E ncore faudrait-il qu'elle soit etendue,sachant par ailleurs que 25 % des

souches (en moyenne) sont resistantes & lapenicilline.Quatre ans apres, pneumologues et infectio-Iogues remontent au creneau. Constatactuel, I'incidence annuelle des pneumococ-cies : 132 000 (entre 130 000 et140 000 ?), avec une mortalite moyenne de6 000 cas (entre 3 et 10 % ?), principale-ment chez les plus de 60 ans (90 % desdaces), une des plus fortes causes de mor-talite par maladie infectieuse.

sont responsables de pres de 8 % des daceschez les sujets non proteges ou fragiles.La France a pris du retard dans sa couvertu-re vaccinale optimale, tandis que d'autrespays ,, ont avance sans nous ,,, comme diraitle senateur Neuwirth.Malgre mises en garde et reunion d'expertspneumologues et infectiologues et leursrecommandations d'elargissement, la vacci-nation reste contingentee. C'est ce qu'ils ontlaisse entendre Iors d'une nouvelle mise engarde*.

D e la v i l l e a I ' h e p i t a lLa quasi-totalite des pneumococcies se pro-duit en ville, oQ le traitement antibiotique estprobabiliste, en I 'absence de recherchebacteriologique.On peut evoquer une surprescription d'anti-biotiques, prescription qui ne tient pas comp-te des resistances qualitatives (selon lesmolecules) et quantitatives (CMI).La vaccination antipneumocoque est trespeu prescrite en ville.Complications (septicemie, defaillance car-dio-respiratoire...) et daces sont recueillispar I'hepital ; les pneumonies nosocomiales

LA GRIPPE, MALADIE JUVI~NILE

Est-il normal de n'offrir la vaccination qu'~ 6 ~ 14 % desFrcn~ais : tes 65 ans et plus, alors que les enfants de 0 ~ 14 ansreprisentent du tiers ~ la mciti6 des cas de grippe et los ados efles adultes (16 ~ 64 ans} la mciti~ des cas. La prise en chmgecommence ~ 50 ans aux I~tats-Unis, ~ 60 arts en Gracde-Bretagne.Les chiffres cites par le Groupe d'~tude et d'information sar lagrippe (GEIG) nous rappellent ravertissement du Pr Max Micoud(CHU de Grenoble) rGclamant la vaccination de toas les Frontals.Nous veeions d'~chapper i une. grippe du sikcle., de justessetu~e dans I'muf par les autorit~s sanitaires de Hong-Kang, mas-sacrant taus les poulets parteurs d'cn variant A incaanu (H5 N1).$inon, y aurait-ii eu pand~mie ?En p~riode stable, I'incidecce de la grippe est de 11,2 %, soit prosde 2,9 millions de cas, avec des extremes de 1,3 ~ 4,3 millions decas. Le coGt direct moyen est de 810 millions de francs, dont429 millions reviennent d la Cnam. Mais le coi~t indirect (arr~tsde travail et pertes de praduction) se monte ~ 3,26 milliards defrancs par an.On a scupt~onn~ les fabricants de vaccins de vouloir 6tendre leurmarch(} avec la vaccination universelte, scenario d~jb ~tudi~ en~conomie de sact~ dans rhypath~se d'une prise en charge avant65 ans. Si 10 % de la population-cible sont vaccinGs, le gain pourla Cnam oct de 96 millions de francs, de 192 millions pour 20 %et de 288 millions pour 30 %, Ce n'est plus notre sact6 qui esten jeu, c'est la sant~ de notre ~conomie de sant&

Sources : La Lettre Option/Bio 9 (octobre 2000).

Un sous-emploi ?Y a-t-il sous-emploi d'un vaccin disponible,efficace & 23 valences, correspondant &90 % des souches les plus frequentes enFrance, susceptible d'eviter des depensesd'antibiotiques et des charges, des chargeshospitalieres co0teuses pour des infections &bacteries multiresistantes ?II faut elargir ses indications actuelles, princi-palement aux sujets &ges, chez lesquels lespneumococcies sont d'autant plus fre-quentes qu'il existe un mauvais etat de santa.Aujourd'hui, on admet que I'Age lui-mCme(65 ans et plus) est dej& un facteur derisque : il faut depasser la notion de vaccina-tion exclusive de ,, groupes & risque ,, et s'ins-pirer de la prise en charge de la vaccinationantigrippe (critere : 65 ans et au-del& + 9maladies chroniques).La mortalite par pneumococcie depasse30 % c h e z l e s p l u s d e 7 5 a n s e t 4 0 % chezles plus de 85 ans, I'infection peut entrafnerla decompensation d'un terrain respiratoireou cardiaque jusque-I& equilibre.Les groupes & risque (outre les plus de65 ans) sont alors : sujets atteints de maladierespiratoire ou cardiaque ou avec antece-dents de pneumonie en ville (,, communautai-re ,,), diabetiques mal equilibres, bronchi-tiques chroniques ou & repetition, sujetsdenutris, patients fragiles/&ges devant etrehospitalises (risque nosocomial), personnesplacees en institution, alcoolo-tabagiques etcirrhotiques, insuffisants renaux, immunode-primes (VlH, transplantes...).Si les indications reconnues par laCommission d'autorisation de commerciali-sation du vaccin** rejoignent celles de laSociete de pneumologie de langue frangaise(SPLF), le Comite technique des vaccina-t ions du Consei l superieur d'hygienepublique de France a emis, en avril 1999,

Groupes a risque et vaccination :I'&ge est d~jb un facteur de risque

des recommandations plus restrictives qui neprennent pas en compte la population-cibledes plus de 65 ans.Si le vaccin est prescrit hors normes, il n'estpas rembourse (il I'est & 65 % habituelle-ment). C'est au medecin de trouver un bonpretexte au remboursement ! Or, I 'OMSconsidere la montee des pneumococciesdes ,, seniors ,, comme un nouveau problemede santa publique et recommande la vacci-nation & partir de 65 ans, m6me en I'absencedes facteurs de risque habituellementretenus.Impact economique des pneumococcies : ense basant sur 30 000 admissions annuelles,on arrive & 285 000 journees d'hospitalisa-tion, soit un coat global d'environ 610 mil-lions de francs (20 300 F pour un sejourmoyen de 9,5 jours). Sans compter la depen-seen antibiotiques.., inefficaces.

J . - M . M .

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*Prs Dominique Peyramond (Lyon) G~rard Huchon

(Paris), Paul L#ophonte (Toulouse), Jodl Belmin

(Sevran), Ren# Rou# (Saint-MantiS), Dr JacquesGaiHat (Annecy), reunion Aventis Pasteur MSD.**Pneumo 23, Aventis Pasteur MSD.

14 Revue Frangaise des laboratoires, novembre 2000, N° 327