Remerciements
Cette production est un projet du sous-comité à l’éducation préscolaire de la Montérégie. Nous tenons à remercier les responsables de la coopérative qui ont fourni le soutien financier à la réalisation de ce projet. Nous remercions également les enseignantes qui ont accepté d’expérimenter en classe et de partager avec nous leur vécu afin d’enrichir les documents. Enfin, nous souhaitons remercier notre secrétaire, Natalie, pour son excellent travail de mise en page.
- Les conseillers pédagogiques à l’éducation préscolaire de la Montérégie
« Placé dans un environnement riche et stimulant, l’enfant développe, à l’oral et à l’écrit, des habiletés de
communication qui lui permettent d’affirmer sa personnalité, d’entrer en relation avec les autres, de
construire sa compréhension du monde et de mener à terme une activité ou un projet. » PDF, p. 60.
CONSEILLERS PÉDAGOGIQUES : ENSEIGNANTES COLLABORATEURS : Dany Coisman-Kelly, CSMV Michèle Laliberté, CSSH Karine Gadoua, CSVT Marie-Claude Lévesque, CSVT Marylène Monette, CSDHR Nicolas Boisseau, CSMV Guylaine Legault, CSTL Élyse Laporte, CSP Eric Marchand, CSVDC Alain Bonenfant, CSP Sylvie Bazinet, CSSH
Présentation du projet
PARLER POUR APPRENDRE Les membres du sous-comité à l’éducation préscolaire de la Montérégie vous présentent leur réflexion ainsi que leur travail de recherche concernant l’importance du développement du langage oral au préscolaire. Plus précisément, le comité s’est penché sur l’oral réflexif. Pourquoi « l’oral réflexif »? Tout simplement parce qu’il est à la base de tous les apprentissages, voire du développement de toutes les compétences développées au préscolaire. Les recherches nous démontrent qu’il est de plus en plus important d’accompagner les enfants dans leur développement du langage oral réflexif durant la petite enfance afin de les outiller à prendre les risques nécessaires au plan cognitif, social et langagier. Le rôle des différents intervenants à l’éducation préscolaire est donc d’une grande importance avant que l’enfant entre au primaire. Or, lors d’une étude1 auprès des enfants de classe maternelle, il était observé que près du 1/3 (31%) de ceux-ci ne prenaient que rarement ou jamais la parole dans les causeries traditionnelles. De plus, une autre étude démontre que l’enseignante s’accorde plus de tours de parole qu’elle en donne aux enfants lors des causeries et qu’à chaque prise de parole, elle produit plus d’énoncés qu’eux. Elle accapare ainsi la plus grande part du discours (Doyon et Fischer, 2010), soit 70% du temps de parole (Garcia). Ce document se veut donc un temps d’arrêt permettant d’alimenter la réflexion et les pratiques des enseignantes en classe afin de doter les enseignantes de moyens efficaces pour l’enseignement de la communication orale chez les 4-6ans. Vous trouverez dans ce document, un cadre théorique et une section plus pratique. Des définitions, des principes, une description du rôle de l’enseignante, des stratégies et des pratiques pédagogiques gagnants vous seront proposés. Les petits parleurs et les grands parleurs ont leur place et c’est à nous de les outiller pour permettre l’épanouissement de leur plein potentiel.
Les intentions du projet sont d’amener les enseignantes à :
Prendre connaissance de la recherche portant sur le rôle du langage oral dans l’apprentissage et le développement des compétences de l’éducation préscolaire;
Animer et de faire vivre des activités favorisant le développement de l’oral réflexif chez les enfants comme outil pour se construire, socialiser, apprendre et penser;
Choisir des pratiques pédagogiques à mettre en place en classe pour favoriser le développement du langage dans différents contextes de réalisation (jeux symboliques, causeries, travail coopératif, etc.).
Tout au long du projet, sept conseillers pédagogiques de la Montérégie ont travaillé ensemble pour s’approprier les différentes fonctions du langage et le rôle de l’enseignante dans le développement de l’oral réflexif. Afin de favoriser un transfert entre la théorie et la pratique, quatre enseignantes ont expérimenté des activités contribuant au développement des six compétences en mettant de l’avant l’oral.
1 Braun-Lamesch, in Florin et al., 1985,
AVERTISSEMENT
Dans cet ouvrage, le féminin est utilisé comme représentant des deux sexes, sans discrimination à l’égard des hommes et des femmes,
et dans le but d’alléger le texte.
Table des matières
LES 4 FONCTIONS DE L’ORAL ............................................................................................... 6
QU’EST-CE QUE L’ORAL RÉFLEXIF? ...................................................................................... 12
LA CAUSERIE ........................................................................................................................ 13
LA PHILOSOPHIE POUR ENFANTS ....................................................................................... 14
LA LITTÉRATURE JEUNESSE ................................................................................................. 16
CONTEXTES SPONTANÉS .................................................................................................... 20
L’ART DU QUESTIONNEMENT ............................................................................................ 22
LE RÔLE DES ENSEIGNANTES ............................................................................................... 26
LE DÉVELOPPEMENT DU LANGAGE .................................................................................... 29
PISTES POUR SENSIBILISER LES PARENTS À L’IMPORTANCE DE L’ORAL RÉFLEXIF .............. 31
DES QUESTIONS… ET DES PISTES DE RÉPONSES .................................................................. 32
BIBLIOGRAPHIE ET MATÉRIEL DE RÉFÉRENCE..................................................................... 35
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Parler… pourquoi?
Les 4 Fonctions de l’oral
1. Pour se construire Parler est une activité à haut risque. C’est prendre sa place. Cela implique de prendre de la distance d’une part par rapport aux discours des autres pour construire le sien propre, mais aussi par rapport au sien, pour construire la vigilance et le doute qui permettront de continuer à penser. (Raoux Daumas, 2001) Parler de soi, c’est enfin exprimer son opinion, ce qui demande à la fois des habiletés intellectuelles, langagières et affectives. Organiser les mots et les idées, pour dire ce que l’on pense, est un exercice difficile. Il faut pour cela avoir une idée claire du point de vue que l’on défend, les bons mots pour le décrire et la force de s’affirmer. Autant dire qu’un langage élaboré et bien ancré facilite la chose. (Deschênes, 2008)
ACTIVITÉS VÉCUES EN CLASSE
PAR LES PARTICIPANTS AU PROJET
CONTEXTES DE RÉALISATION
MANIFESTATIONS OBSERVÉES CHEZ LES ENFANTS RÔLES DE L’ENSEIGNANTE, INTERVENTIONS
Causerie : « Quand tu n’arrives pas à dormir, qu’est-ce que tu fais? »
Discussion de groupe
Les enfants ne répètent pas ce que l’enseignante a dit ou ce que les autres enfants ont dit. Ils réalisent qu’il n’y a pas de bonnes réponses, que toutes les réponses sont bonnes.
Amorcer la discussion avec un modelage de l’enseignante en choisissant un exemple d’un adulte que les enfants ne pouvaient pas reprendre (ex. je me fais bouillir de l’eau et me faire une tisane)
Littérature jeunesse : Léon le caméléon (Thème : Les différences)
Discussion de groupe L’intention de départ étant d’en apprendre sur le caméléon
Le thème s’est transposé vers l’importance que les enfants avaient dans la classe. Un enfant soutenait qu’une enfant handicapée dans leur classe, mais absente ce jour-là était plus importante qu’eux.
Saisir l’occasion d’un riche débat spontané. Donner les droits de parole. Reformuler les propos des enfants. Faire progresser la discussion par un bon questionnement. Terminer en rassurant le groupe qu’ils sont tous importants.
Littérature jeunesse : L’horrible monstre « Quel est le monstre le plus horrible? »
Lecture interactive Discussion en groupe
Les monstres décrits par les enfants sont de plus en plus effrayants. Les enfants « osent » être en désaccord avec la fin de l’histoire.
Poser des questions pour animer la discussion autour du livre. Laisser les enfants s’exprimer. Relancer en questionnement : Ex. : Êtes-vous d’accord avec l’auteur? Pourquoi êtes-vous en désaccord? Est-ce que ton loup-garou est plus épeurant que celui de Chloé? Pour quelle raison?
En d’autres mots…
En parlant et en entrant en relation avec les pairs, l’enfant apprend à se connaître et prend conscience de qui il est. Brique par brique, il construit son identité, son unicité. Cette édification complexe fait appel à plusieurs habiletés. À nous de les outiller afin de bâtir de solides fondations.
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Parler… pourquoi?
2. Pour se socialiser Les habiletés sociocognitives sont les outils de la pensée qui servent à comprendre et à agir socialement, notamment lorsqu’il est question de résoudre des problèmes interpersonnels. Elles se développent par la richesse des interactions vécues dans différents contextes et par la maturation de ses capacités cognitives. La capacité à résoudre des problèmes interpersonnels peut être associée à trois aspects du développement : son langage, sa compréhension et sa gestion des émotions, et sa capacité à raisonner et à traiter l’information en situation de désaccord. (Bouchard 2008)
Notre langage parlé est intimement lié à notre appartenance au groupe social. C’est la langue de notre famille, de notre pays. Les êtres humains sont liés entre eux par leur histoire. Ils éprouvent le besoin de se raconter leur passé. Le langage parlé porte aussi chaque société à mettre en commun ses valeurs morales et spirituelles. En plus de lui transmettre les habitudes et savoir-faire indispensables à son adaptation, le langage, par sa forme et son contenu, le mène à sa propre histoire à travers une histoire collective. (Deschênes, 2008)
ACTIVITÉS VÉCUES EN
CLASSE PAR LES PARTICIPANTS AU PROJET
CONTEXTES DE RÉALISATION
MANIFESTATIONS OBSERVÉES CHEZ LES ENFANTS RÔLES DE L’ENSEIGNANTE, INTERVENTIONS
Lors d’un conflit entre copains
Avec les deux enfants qui ont un conflit
Avec le soutien de l’enseignante, ils parlent à l’autre enfant et non à l’enseignante. Les enfants arrivent à exprimer leur point de vue à l’autre, à dire comment ils se sont sentis, à faire une demande claire à l’autre pour éviter la répétition de l’évènement, à s’excuser s’ils sont prêts, etc.
Permettre un temps individuel de gestion des émotions. Être un agent de liaison. Ne pas répondre et régler à la place des enfants, mais soutenir par le questionnement et la mise en perspective. Avoir expliqué, modélisé et fait pratiquer une démarche de résolution de conflit ainsi que les attitudes à avoir avec l’ensemble des enfants dans un autre temps où il n’y avait pas de conflit.
Littérature jeunesse : Frisson l’Écureuil se fait un ami « Pour toi, quelles sont les qualités d’un bon ami? »
Discussion de groupe. Leurs idées sont inscrites sur une affiche.
À la suite de la discussion, il est difficile pour les enfants de répondre à la question. Le lendemain, l’enseignante questionne à nouveau les enfants en apportant un support visuel (affiche) et en les mettant en situation significative. Les enfants se choisissent un nouvel ami pour jouer et sont attentifs aux qualités de l’autre.
Faire un retour à la fin de la période de jeu pour que les enfants puissent nommer les qualités de leur ami et expliciter leur choix. L’enseignante observe les comportements des enfants et leur dit à la fin ce qu’elle a observé. Faire un retour avec les deux enfants qui ne se sont pas choisis.
En d’autres mots…
Dans différents contextes de prise de parole, l’enfant participe à la vie de groupe et discerne avec le temps les conventions et les valeurs qui s’y rattachent. Sa petite histoire tend à devenir collective et le succès de ce changement est généralement fait en étroite collaboration avec l’adulte.
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Parler… pourquoi?
3. Pour apprendre Une des significations essentielles du langage, c’est « cette habileté à créer un pont entre soi et le monde environnant ». Ceci va permettre le développement de l’autonomie et la capacité de transformer le monde. (Michèle Raoux Daumas, 2001) « À quoi servent les mots? Ils permettent aux personnes de partager entre elles ce qu’elles comprennent respectivement du monde... Les mots fournissent alors la base d’un niveau de réalité partagée, d’une réalité qui se trouve en continuité avec celle du niveau antérieur, d’une réalité qui se trouve dans le contexte général. » « Négocier sur le sens signifie construire conjointement du sens, sachant que ce qui est compris par l’un ne l’est pas nécessairement par l’autre, chacun gardant son autorité... Dans une telle perspective, «penser ensemble» signifie penser ensemble sur un même objet avec chacun ses subjectivités, sachant que l’expression de l’un est source d’interprétation de la part de l’autre ». (Makdissi, Boisclair, Sirois, 2010)
ACTIVITÉS VÉCUES EN
CLASSE PAR LES PARTICIPANTS AU PROJET
CONTEXTES DE RÉALISATION
MANIFESTATIONS OBSERVÉES CHEZ LES ENFANTS RÔLES DE L’ENSEIGNANTE, INTERVENTIONS
Que va-t-il arriver à la pomme quand on va la couper?
Discussion en dyade et de grand groupe Formulation d’hypothèses
Réponses des enfants selon leurs connaissances antérieures. Chacun prend position. Cela amène des questionnements, des remises en question ainsi que des réajustements de leur opinion.
Soutenir les différentes hypothèses formulées. Faire progresser la discussion par son questionnement Montrer la pomme couper en deux à la fin de l’échange et compléter les explications déjà formulées par les enfants.
Question spontanée lors de la routine du matin : D’où viennent les prédictions météorologiques?
Discussion de groupe
Les enfants répondent à la question. Plusieurs bonifient leurs explications ou changent d’avis au fil des discussions.
Donner les droits de parole. Reformuler les idées émises par les enfants. Questionner pour faire progresser la discussion. Donner la réponse à la fin pour compléter l’activité.
Activité de classement : Déclencheur : Qu’est-ce qu’un animal doit avoir pour faire partie de la famille des oiseaux?
Discussion en dyade et en grand groupe
Les enfants répondent selon leurs connaissances ou expériences antérieures. Ils raffinent et ajustent leur compréhension au fil du questionnement et de la reformulation faite par l’enseignante.
Faire progresser la discussion par son questionnement. Reformuler les questions lorsque les enfants n’arrivent pas à y répondre. Faire la synthèse des caractéristiques nécessaires pour appartenir à la famille des oiseaux avant l’activité de classement.
En d’autres mots…
Par des activités faisant appel au débat, au questionnement et à la résolution de problèmes, l’acte langagier est sollicité. L’enfant développe ainsi différentes habiletés cognitives qui l’aideront en retour à mieux apprendre.
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Parler… pourquoi?
4. Pour penser Pour Vygotski, le langage est essentiel au développement cognitif, et ce, pour deux raisons. D’une part, parce qu’il permet le soliloque, c’est-à-dire le monologue sonore ou silencieux axé sur la réflexion et l’analyse. Chez l’enfant d’âge préscolaire, le soliloque est sonore. En effet, pour Vygotski, le langage est d’abord extériorisé, c’est-à-dire que l’enfant s’en sert pour communiquer ses besoins, ses sentiments et établir des relations avec les autres. L’enfant se répète à lui-même le langage et les protocoles culturels qui façonnent son développement de l’extérieur. Le langage est ainsi un élément culturel qui construit sa pensée « de l’extérieur ». Le soliloque égocentrique de l’enfant de 3 à 5 ans, centré sur l’action, lui permet de réguler ses comportements. Le langage devient un outil de construction et d’expression de la pensée. Pour l’enfant, le langage égocentrique sert à réfléchir, passer ses connaissances en revue, prendre une décision, diriger son action, s’expliquer à lui-même des évènements, etc. Plus le temps passe, plus le soliloque devient un monologue intérieur. D’ailleurs, à l’âge scolaire, le langage de l’enfant s’intériorise, c’est-à-dire qu’il devient un langage pour soi. D’autre part, le langage joue un rôle fondamental dans le développement de la pensée de l’enfant... En d’autres mots, c’est par le langage que l’enfant arrive à élaborer sa pensée (Bouchard, 2008). À partir du moment où l’enfant utilise les mots, le développement du langage et le développement de la pensée vont s’intégrer et devenir inséparables. (Doyon, Fischer 2010)
ACTIVITÉS VÉCUES EN CLASSE PAR LES
PARTICIPANTS AU PROJET
CONTEXTES DE RÉALISATION MANIFESTATIONS OBSERVÉES CHEZ LES ENFANTS RÔLES DE L’ENSEIGNANTE, INTERVENTIONS
À la suite d’une difficulté rencontrée par une enfant pour s’inscrire à un nouvel atelier et tenter de se rappeler ceux déjà faits. Comment pouvons-nous faire pour retenir les ateliers faits?
Discussion spontanée autour du tableau de programmation
Avant la discussion : Les enfants ont vu une autre enfant se parler à elle-même (soliloque extériorisé) et tenter de se rappeler les ateliers déjà faits. Les enfants donnent leurs trucs personnels pour y arriver. Ils proposent de nouvelles idées. Un enfant demande un papier pour montrer sa stratégie de l’aide-mémoire.
Saisir l’occasion spontanée d’une riche et pertinente discussion métacognitive. Impliquer d’autres enfants à la discussion. Reformuler les propos des enfants. Faire progresser la discussion par un questionnement ouvert.
Lors de la routine du matin : Qu’est-ce qu’il fait? Pourquoi ne parle-t-il pas?
L’ami du jour fait le calendrier sans parler et les autres l’observent.
Les enfants émettent des hypothèses sur ce qui se passe dans la tête de l’enfant. Ils se réfèrent à leurs connaissances antérieures sur la routine du matin.
Être à l’affût et saisir spontanément l’occasion. Faire progresser la discussion par un questionnement ouvert. Encourager la formulation des hypothèses. Faire un retour sur la stratégie de l’ami du jour et de son efficacité.
En d’autres mots… Le langage permet à l’enfant de structurer sa pensée, de prendre conscience de ses activités cognitives et de ses facultés. C’est ce qui lui permettra d’arriver à la métacognition.
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Parler pour penser… penser pour parler?
Qu’est-ce que penser pour un enfant avant 6 ans?
L’enfant est conscient que… L’enfant n’est pas conscient que…
Il sait que penser est une activité de l’humain, du vivant.
Il ne sait pas toujours que penser est une activité continue qui demande beaucoup de temps au quotidien.
Il sait que penser est une activité interne, mentale
Il ne sait pas toujours que la personne peut penser même si elle regarde, écoute, lit quelque chose ou parle à une autre personne. L’enfant ne présume pas que cette personne pense tout en faisant ces activités.
Les personnes pensent à propos des choses présentes ou absentes, réelles ou imaginaires.
Il ne sait pas toujours ce à quoi la personne pense lorsqu’ il réalise qu’elle pense.
Il sait que penser est une activité différente de celles de voir, toucher, parler et connaître.
Il sait inférer qu’une personne pense, qu’elle a une activité mentale, seulement lorsque le contexte et l’expression corporelle rendent ce fait évident en l’observant.
L’enfant a plus de difficultés à rendre compte de sa propre activité mentale que de celle des autres, et cela n’a rien d’étonnant, car ses capacités d’introspection sont limitées.
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Parler pour penser… penser pour parler?
Qu’est-ce que la métacognition?
La métacognition est cette activité mentale pour laquelle les autres états ou processus mentaux deviennent des objets de réflexion. Yussen Flavell (1985) organise ces métaconnaissances en quatre catégories en fonction des objets sur lesquels elles portent :
Sur les personnes Les enfants se connaissent très tôt et comparent leurs
connaissances, leurs savoir-faire et leur savoir être.
Sur le sujet lui-même Il s’agit alors des représentations que l’enfant a sur la «pensée humaine». Ce retour sur soi et cette analyse sont très importants dans la construction du «concept de soi» en tant qu’apprenant. Il est évident que le
langage joue un rôle non moins important.
Sur les tâches « Pour bien coller, il faut essuyer le pinceau et pas en mettre trop, juste un petit point bien au milieu». Ces métaconnaissances s’acquièrent progressivement en
fonction des expériences cognitives réalisées.
Sur les stratégies D’après F. Raynal et A. Rieunier, «une stratégie cognitive
est la coordination de moyens mis en œuvre par un individu pour diriger ses processus d’attention et ses processus d’apprentissage». On peut alors parler de métacognition si l’enfant est capable d’analyser, de
réfléchir, de déduire l’efficacité de ses démarches. Il est évident que plus l’enfant est jeune, plus la médiation de
l’adulte sera nécessaire. (Pillot J. 2006)
Métacognition
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Parler pour penser… penser pour parler?
Qu’est-ce que l’oral réflexif? Quelques définitions de l’oral réflexif :
Dans son livre La lecture : Apprentissage et difficultés (2011), Giasson décrit plusieurs caractéristiques de l’oral réflexif en passant par le langage scolaire : « Le langage scolaire est un langage d’évocation d’évènements passés, futurs ou imaginaires. Il se caractérise d’abord par le fait de parler de quelque chose qui « n’est pas ici et maintenant ». Ce type de langage, qu’on appelle « décontextualisé », se construit entre autres par des activités de rappels d’évènements, par exemple une expérience vécue par le groupe. Le langage scolaire est aussi un langage plus abstrait qui sert à apprendre à réfléchir. Il permet de stimuler la pensée de l’enfant lorsqu’on lui suggère un problème à résoudre, qu’on lui demande d’émettre des hypothèses ou qu’on l’amène à comparer et à classifier. » Chemla et Dreyfus (2002) : « L’oral qui sert à comprendre, à préciser sa pensée, à comparer les interprétations, un oral constitutif de l’apprentissage, voire un révélateur possible des processus d’apprentissage. » Chabanne et Bucheton (2002) : « La réflexivité se définit d’abord dans la prise de distance à l’égard de l’expérience immédiate que permet le langage. »
Selon Vygostski : « Les structures verbales assimilées par l’enfant deviennent les structures fondamentales de sa
pensée. »
Je parle donc de pense ou je pense donc je parle?
Pour Vygotsky, l’apprentissage se réalise par l’intermédiaire du langage; sans langage, il n’y aurait donc pas d’apprentissage. Pour Piaget, ce n’est pas nécessairement le langage qui intervient dans le développement de la pensée, mais bien la manipulation d’objets physiques par l’enfant. En somme, pour Piaget, le langage est le produit du processus de maturation du cerveau, alors que pour Vygotsky, la pensée est construite par l’entremise du langage, c’est-à-dire selon une culture, marquée par un moment historique. Extrais du livre Le développement global de l’enfant de 0 à 5 ans en contextes éducatifs dirigé par Caroline Bouchard
Par définition, toute activité langagière réfléchit l’activité motrice, cognitive et affective de l’individu. En ce sens, le langage est réflexif.
Par réflexivité, il faut entendre une prise de distance par rapport à l’expérience immédiate grâce au langage. L’usage du langage va permettre à l’enfant de se détacher de soi, de son vécu et de son monde, de mettre à distance ce qui est dit et ce qui est vécu afin d’intégrer dans son discours, le discours de l’autre.
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Parler en contexte dirigé : La causerie
La causerie La recherche de Fisher et Doyon (2010) a permis d’envisager la causerie autrement : les questions des enfants ne sont plus traitées de la même manière. Plutôt que d’y répondre de façon convenue, l’enseignante imagine comment elle peut chercher une réponse avec les enfants. La forme du langage devient moins importante que le contenu des échanges. Le désir de faire parler tout le monde fait place à la recherche d’une situation « dialogique » fondée sur l’interaction entre les participants. Le rôle de l’enseignante favorise ou facilite l’expression des enfants. Fischer et Doyon ont établi trois facteurs favorisant la qualité de la causerie :
Une fois compris, les 3 axes fondamentaux à prendre en compte cités ci-dessus constituent des repères simples qui aident l’enseignante à organiser son action.
Deux constats de la recherche de Fisher et Doyon (2010) sur les pratiques actuelles :
1. Le mode d’animation dans les classes donne lieu non pas à une conversation à plusieurs, mais à une succession de dialogues enseignantes/enfant. L’enseignante pose une question; l’enfant lui répond. L’enseignante répète ou commente la réponse et donne ensuite la parole à un autre enfant;
2. Les enseignantes parlent plus que tous les enfants réunis pendant la causerie. Suggestions pour améliorer la causerie :
Diviser la classe en trois sous-groupes homogènes (petits, moyens et grands parleurs); Placer un enfant dans le rôle du locuteur principal. C’est cet enfant qui anime. Ceci libère
l’enseignante qui peut observer les enfants pendant la causerie; Faire une causerie à partir d’une question d’un enfant; Avoir en tête qu’un enfant qui ne parle pas n’est pas nécessairement passif. Il a une activité mentale très active
et réussit à comprendre le sujet de discussion; Animer des causeries autant à partir d’activités scientifiques que d’activités d’ordre affectif; Intervenir dans le but de remplir les fonctions d’étayage et de régulation des échanges (suivre la pensée des
enfants, poser les bonnes questions, les confronter dans leurs idées, savoir tirer parti des énoncés des uns et des autres pour mener la discussion plus loin et favoriser une élaboration des idées en groupe);
Adopter davantage la position de récepteur que de locuteur.
La g
estio
n La manière de
disposer le groupe; en cercle, en dyades, en petites équipes,
etc. L'or
ient
atio
n Le croisement du thème de la causerie avec l’intention de communication. Elles établissent 4 types d’orientations: - causeries pour « parler de soi»; - causeries pour « faire apprendre»; - causeries pour « faire réfléchir»; - causeries pour « raconter une expérience vécue ensemble»;
Rétr
oact
ions
La manière dont
l’enseignante répond aux enfants par le
reflet, l'extension ou les questions.
Des idées pour causer…
À quoi servent les chiffres? À quoi rêvent les animaux?
Comment se fait-il que les oiseaux soient capables de voler?
À quoi servent les chevaliers devant les châteaux?
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Parler en contexte dirigé : La philosophie pour enfant
La philosophie pour enfants
« La philosophie pour les enfants est une pratique éducative qui cherche à développer la pensée réflexive, créatrice et critique chez les enfants de tout âge… la philosophie pour les enfants incarne un nouveau paradigme éducatif qui veut partir de l'expérience et des conceptions des enfants, pour leur apprendre à penser par une pratique où ils sont amenés à découvrir par eux-mêmes divers raisonnements élaborés. Le but n'est pas de donner aux enfants des réponses toutes faites, prêtes à penser, mais de susciter chez eux un questionnement. Il s'agit non pas d'une pédagogie de la réponse, mais d'une pédagogie de la question. » Source : http://fr.wikipedia.org/wiki/Philosophie_pour_les_enfants
Ressources utiles : Les Contes d’Audrey-Anne, Éditions le Loup de gouttière. Le site Pomme d’Api : http://www.pommedapi.com/Pour-les-enseignantes
Le matériel pédagogique est accessible et gratuit sur Internet Les images de Pomme d’Api que l’on peut imprimer en couleur amènent la discussion.
1er temps : Déclencheur
• Conte philosophique • Littérature jeunesse • Image évocatrice • Chanson • Question ouverte • Situation quotidienne
(nature, évènement,etc.)
2e temps : Collecte des questions
• Choisir quelques-unes ou toutes les questions des enfants liées au déclencheur
• Prendre la question proposée par l'enseignante
• Prendre le temps de consigner les questions
3e temps: Échange en communauté
de recherche
• Discussion en grand groupe avec médiation par l'enseignante
• Possibilité de faire engager la discussion entre les enfants sans l'intervention de l'enseignante
Suggestion d’une enseignante Faire l’activité régulièrement, prendre le temps d’installer un rituel avec une petite lumière tamisée, l’ouverture de la session
avec un bâton de pluie, avec une petite chanson thème, etc.
Suggestion d’une enseignante Chanson Ainsi font font font Les tout-petits philosophent Ainsi font font font Nous nous posons des questions
Zoom sur la classe
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Parler en contexte dirigé : La philosophie pour enfant
Les 4 types d’échanges qui se développent progressivement chez l’enfant à l’éducation préscolaire et au primaire
1. Anecdotique
•Phrases courtes et incomplètes •Utilisation du « Je » •Partage d’anecdotes personnelles ou
fantaisistes
2. Monologique
•Décentration du « je » •Réponse qui commence à être reliée à
la question •Points de vue non reliés les uns aux
autres •Difficulté à justifier son point de vue
4. Dialogique quasi-critique •Écoute de plus en plus active • Intérêt pour des concepts plus abstraits •Construction des points de vue •Doutes et questionnements •Critiques ou oppositions • Justification des points de vue
3. Dialogique non-critique
•Écoute de l’autre •Questions et réponses aux pairs •Construction des points de vue •Explication et justification pour appuyer
son point de vue
4 types d'échanges
Une enseignante a fait écouter la chanson « J’ai besoin pour vivre » de Claude Dubois en nommant les mots attrapés lors de l’écoute des élèves. L’enseignante a
ensuite posé la question : « Et toi, qu'as-tu besoin pour vivre? »
Au début, les enfants reprenaient les mots de la chanson
(ex. de m’amuser, de jouer…), mais ensuite la discussion à tourner autour des besoins fondamentaux de l’être humain.
Zoom sur la classe
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Parler en contexte dirigé : La littérature jeunesse
La littérature jeunesse En quoi la lecture interactive, par le biais de la littérature jeunesse, peut-elle aider à développer l’oral réflexif chez les enfants de 4-6 ans? Quelques faits et statistiques pour mettre en évidence notre propos parsèmeront cette section :
En quoi consiste la lecture interactive?
Les chercheurs s’entendent pour dire que la lecture d'histoires par l'adulte est un moyen efficace d'augmenter le vocabulaire d'enfants d'âge préscolaire (Bus, Van Ijzendoorn et Pellegrini, 1995; Elley, 1989; Robbins et Ehri, 1994; Sénéchal et Cornell, 1993). Mais, contrairement à la lecture traditionnelle d'histoires où l'adulte lit et l'enfant écoute, les enfants doivent participer et être engagés dans l'activité pour favoriser l'apprentissage de nouveaux mots de vocabulaire (Hargrave et Sénéchal, 2000; Sénéchal, Thomas et Munker, 1995; Whitehurst et al., 1994 et 1999).
La lecture interactive se veut un moment où l’enseignante encourage les interactions, la participation active des enfants, le partage d'idées avant, pendant et après la lecture. Elle ne se contente pas de lire une histoire aux enfants, mais elle crée un univers autour de cette histoire en posant des questions et en réalisant des activités autour de celle-ci. Ce faisant, elle construit chez les enfants des attitudes de « chercheurs de sens ».
Pour que ses périodes d’échanges se vivent harmonieusement, l’enfant apprendra à s’approprier certains usages culturels du langage : captation de l’attention des partenaires, prises de parole, écoute d’autrui, etc. Il s’agit là d’un véritable apprentissage, qui demande du temps, qui est indispensable à la régulation des échanges avec autrui et qui conditionne la maîtrise de l’expression et de la réception du langage en situation réelle de communication.
Les enfants acquièrent entre 6 et 9 nouveaux mots par jour entre 3
et 6 ans.
(Schicke et Forsythdanz, Schichedanz, Forsyth, 2001).
Plus l’enfant a d’habiletés pragmatiques au niveau du langage (usage correct des
mots dans leur contexte), plus il est susceptible d’entrer efficacement en
interaction avec ses pairs et ainsi entretenir des relations sociales positives.
Les chercheurs observent présentement une inégalité
alarmante entre les enfants des milieux quant à l’étendue et la richesse de leur vocabulaire.
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Parler en contexte dirigé : La littérature jeunesse
La place du livre en classe de maternelle
Le récit est une forme de discours, oral ou écrit, qui organise des événements selon un enchaînement causal. Comprendre un récit, c’est comprendre les liens entre des informations ou des événements rapprochés ou éloignés dans le texte. L’enfant parvient à saisir la trame narrative quand on l’invite d’abord à écouter un lecteur expert lui faire la lecture (imprégnation par un modèle) et ensuite, en l’aidant à résumer ou reconstruire des passages de l’histoire avec ou sans l’aide de l’adulte.
Pour se faire, on doit mettre à la portée de l'enfant des livres colorés, cartonnés, texturés, de tous les genres afin qu'il puisse les manipuler. On lui offre, tous les jours, des périodes de lecture libre ou structurée où il peut s'engager dans un climat de confiance et de sécurité. Quotidiennement, on lit aussi, à voix haute, des textes qui racontent, décrivent, expliquent ou disent comment faire. Il arrivera même, à l’occasion, qu’on relise les mêmes livres plusieurs fois avec une intention pédagogique différente (structure de l'histoire, vocabulaire, anticipation, jouer avec les sons...).
Les différentes activités qui tournent autour de la lecture auront principalement pour but de travailler l’oral réflexif en classe. Cet oral sert à comprendre, à préciser sa pensée, à comparer les interprétations possibles. Il s’agit pour l’enseignante d’être habile à reconnaître ces moments de discussions possibles afin de permettre à ces jeunes enfants de faire leurs premières armes en ce qui concerne le développement de leur pensée critique en lien avec leur compréhension et la mise en mots (Ginette Plessis-Bélair dans Doyon et Fischer, 2010).
Les enfants dont le développement langagier n’est pas optimal à l’âge
préscolaire ont un risque plus élevé de présenter des troubles d’apprentissage de
la lecture. (Schuele, 2004).
Les jeunes enfants présentant des retards de langage expressif sont moins enjoués, ont davantage de comportements dépressifs et de
retrait, et présentent un développement social plus faible que les enfants du même âge connaissant un développement langagier typique
(Irwin et al, 2002).
Les enfants qui possèdent un niveau de vocabulaire réceptif
(mots compris) plus élevé que la moyenne de leurs pairs
manifestent plus d’habilités à communiquer que ceux ayant un niveau langagier moindre.
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Parler en contexte dirigé : Les orthographes approchées
Les orthographes approchées
Les pratiques d’orthographes approchées sont des situations d’écritures significatives et contextualisées où l’enfant est invité à écrire des mots ou des phrases comme il pense avec ses connaissances du principe alphabétique. Les principes des orthographes approchées
L’enseignante doit :
1. Mettre l’enfant en situation de se servir de la langue écrite, même s’il en connaît peu sur le sujet. Ceci l’amènera à se questionner et à vouloir en apprendre davantage;
2. Être à l’écoute des représentations des enfants par rapport à la langue écrite pour mieux comprendre leur réflexion;
3. Valoriser les acquis des enfants et souligner ce que l’enfant construit au cours des situations d’écriture;
4. Encourager la réflexivité par rapport à la langue écrite. (Quelles lettres devrais-je utiliser pour écrire ce mot? Est-ce que je retrouve ce son dans un autre mot?);
5. Favoriser le partage des connaissances et des stratégies à travers la négociation entre les enfants.
Par la confrontation de ses pairs et le questionnement de l’enseignante, l’enfant est
amené à réfléchir sur ses processus d’écriture et à modifier ses croyances par rapport à l’écrit.
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Parler en contexte dirigé : Les orthographes approchées
L’oral réflexif partout…
Les enseignantes qui ont expérimenté l’oral réflexif en classe sont d’avis qu’il est possible de le développer au cœur des six compétences
du programme de l’éducation préscolaire. Par exemple, dans la première compétence sur le développement psychomoteur, l’oral
réflexif peut servir dans les critères d’évaluation « ajuste ses actions en fonction de l’environnement » et « reconnaît des éléments favorisant
le bien-être » (voir la section sur l’art de questionner).
Explique à ton ami comment faire le parcours moteur? Comment faudra-t-il s’habiller pour jouer dans la neige demain?
Phase 1: Contexte d’écriture choix du
mot
•Contextualiser la situation d’écriture (Déclencheur) •Sélectionner d'un mot à écrire en O.A.
Phase 2: Consignes de départ
•Choisir le type de regroupement (collectif individuel/duo/trio/) •Partager les tâches lors de la réalisation des O.A en trio • Scripteur, porte-parole, enquêteur, responsable de l’alphabet,ou gardien du temps)
Phase 3: Tentatives d’écriture et d'échange de
stratégies
•Vivre la situation d’écriture en tant que telle. •Le rôle de l’enseignante pendant la réalisation: • Guider et questionner les enfants • Favoriser les interrogations/ les doutes par rapport à la langue • Favoriser le partage des idées et des stratégies (en collectif/en petits groupes)
Phase 4: Retour collectif
•Si écriture de manière collective: • Présenter les stratégies et les idées utilisées lors des tentatives d’écriture
•Si écriture en petits groupes: • Présenter l’hypothèse d’écriture de chaque groupe à l’ensemble du groupe • Expliquer les choix orthographiques et les stratégies d’écriture • Comparer les hypothèses d’écriture des différentes équipes
Phase 5: La norme orthographique
•Inviter les enfants à trouver la norme orthographique du mot (un ou plusieurs enquêteurs) •Inscrire la norme orthographique au tableau •Partager les stratégies utilisées pour trouver la norme orthographique •Inviter les enfants à observer les hypothèses d’écriture et le mot normé et à identifier les ressemblances entre ces mots •Se questionner sur les particularités de la langue •Le rôle de l’enseignante: Mettre en valeur ce qui est construit chez les enfants et non ce qui leur manque pour atteindre la norme
Phase 6: Conservation et réutilisation des
mots
•Conserver des traces écrites: • Carnet de bord (mot écrit/mot normé/illustration),portfolio, recueil de classe
•Réutiliser des mots: • Réécrire le mot, écrire des mots dérivés à partir de celui-ci. (ex.: chat – chaton)
Trouver la norme en consultant :
- un adulte - un enfant d’une autre classe - un livre de littérature de jeunesse - un dictionnaire - un site web
Un message du matin Un livre de littérature jeunesse Le mot du jour Un message aux parents Une illustration La réalisation d’une affiche sur un thème La création d’une banque de mots thématiques L’écriture d’une lettre à une autre classe L’écriture d’une recette
Pendant les phases de réalisation et d’intégration, les enfants sont amenés à se poser
des questions, à faire des hypothèses et à confronter leurs idées.
Ces attitudes et comportements font partie intégrante de l’oral réflexif.
Ensemble, les enfants réfléchissent et tentent de
trouver des réponses à leurs questions. Cette fois-ci, sur un sujet précis : la langue.
Cette approche peut très bien se vivre en contexte spontané. Lorsqu’un enfant veut
écrire un message à ses parents, l’enseignante peut adopter la même démarche, mais cette fois-ci de façon individuelle. L’enseignante devra donc
l’accompagner dans ses réflexions afin de pousser celles-ci un peu plus loin.
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Parler… avec qui?
Contextes spontanés À la différence des situations planifiées et dirigées par l’enseignante pour faire parler les enfants, la vie courante en classe préscolaire est remplie de moments non prévus où les enfants seront disposés à entrer en situation d’oral réflexif. C’est à ce moment que l’enseignante peut saisir au vol cette opportunité pour :
donner de la place à la parole de l’enfant ou des enfants; soutenir leur expression par des questions (voir l’art du questionnement).
Voici, présenter brièvement, des contextes dits « spontanés » propices au développement de l’oral réflexif :
VÉCU D’UN ENFANT PÉDAGOGIE PAR PROJET
Toutes les situations où l’enfant fait référence à ses expériences, son milieu familial, ses voyages, ses activités à la maison, ses jeux, etc.
Toutes les situations où l’enfant travaille en équipe à réaliser une tâche en identifiant les problèmes rencontrés, les questionnements, les solutions à essayer et les trouvailles à partager.
Exemple de questions favorisant l’oral réflexif Qu’est-ce que tu aimes faire seul? Qu’est-ce que tu aimes faire avec un ami?
Exemple de questions favorisant l’oral réflexif Dans ton équipe, qu’est-ce qui te plaît le moins?
Pourquoi? Dans ton équipe, qu’est-ce qui t’a surpris?
Période de jeu libre (spontané) Retour d’activité Toutes les situations où l’enfant interagit avec les autres pour partager des jeux, pour s’entendre sur les règles à respecter, pour expliquer aux autres ce qu’il fait, etc.
Toutes les situations où on demande à l’enfant d’identifier ce qu’il a aimé, ce qu’il a retenu, ce qu’il n’a pas aimé, etc.
Exemple de questions favorisant l’oral réflexif Pourquoi joues-tu à ce jeu-là? Comment les amis devraient-ils jouer ensemble?
Exemple de questions favorisant l’oral réflexif Laquelle de tes productions préfères-tu? Pourquoi? Dans quoi te sens-tu bon? Pourquoi?
Problématiques - Résolutions de conflits Découverte faite par l’enfant Toutes les situations où l’enfant n’est pas en accord avec les autres autant dans le choix d’activités, la manière de réaliser une tâche, le lieu où s’asseoir, etc.
Toutes les situations où l’enfant s’émerveille devant quelqu’un, quelque chose, une manière de faire, une découverte, une prise de conscience, etc.
Exemple de questions favorisant l’oral réflexif Dans ton équipe, comment te sens-tu? Devant une difficulté, comment vas-tu chercher de
l’aide?
Exemple de questions favorisant l’oral réflexif Où as-tu trouvé ton information? Si tu avais à le refaire, que changerais-tu? Pourquoi?
Routines Productions d’enfant Toutes les situations où l’enfant demande pourquoi on fait une chose de telle manière, toutes les fois où il remet en question la manière de faire, etc.
Toutes les situations où l’enfant est fier de ce qu’il réalise et a le goût de le montrer aux autres, de le leur dire, de leur montrer comment il a fait, à quoi ça sert, etc.
Exemple de questions favorisant l’oral réflexif Pourquoi fait-on cela? Que pourrais-tu faire pour que cela se passe mieux?
Exemple de questions favorisant l’oral réflexif Quels matériaux as-tu utilisés? De quoi es-tu le plus fier?
Toutes les situations que nous n’avions pas planifiées… L’oiseau sur la branche, l’enfant qui est malade, l’ami qui n’est plus mon ami,
la fameuse question « pourquoi? », etc. Exemple de questions favorisant l’oral réflexif
Est-ce qu’il y a des amis plus importants que les autres? Pourquoi? Que penses-tu dans ta tête par rapport à cela?
C1
C4 / C5
C3 / C6 C5
C2 / C6
C6
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Parler… avec qui?
Modes de regroupement Lors des discussions et questionnements de groupe apportés par l’enseignante et/ou les enfants, divers types de regroupements sont possibles. Au moment des causeries, le mode le plus utilisé est assurément la discussion en grand groupe. Pourquoi ne pas utiliser les modèles proposés ci-dessous? De cette façon, vous permettrez à tous de prendre la parole. Les grands parleurs et les petits parleurs pourront participer activement et se sentir interpellés par les sujets proposés. Les modes décrits ci-dessous, pratiqués en alternance favorisent la prise de parole et soutiennent l’attention et concentration puisque ceux-ci sont davantage engagés dans l’acte de parler. Mode 1
L’enfant réfléchit seul à un questionnement apporté par l’enseignante, par lui-même ou par un autre enfant. Cela lui permet d’exercer sa pensée critique, réflexive sur différents sujets qu’ils lui sont proposés.
Mode 2
Les enfants forment des dyades, discutent, argumentent et tentent de répondre aux besoins, aux questionnements émis. Pour faciliter le dialogue, l’adulte accompagnateur peut donner des rôles à chacun des enfants. Par exemple, il pourra demander à un enfant de rapporter l’opinion des deux. Ainsi, un seul des deux fera un
retour sur les discussions de son équipe. En choisissant un petit parleur, nous lui permettons d’occuper un rôle qu’il ne prendrait pas naturellement. Avec ce mode, il est également intéressant de jumeler, un grand du 3e cycle avec un petit de maternelle. Mode 3
Placés en équipe de 4 enfants, ceux-ci peuvent avoir la chance de parler plus fréquemment qu’en grand groupe surtout si chaque enfant a un rôle défini. Les rôles peuvent être établis par l’adulte, mais aussi, ils peuvent être décidés en équipe. Mode 4
En grand groupe, ce mode comporte des défis importants quant à l’attention et concentration des enfants. Il importe de cibler notre objectif et de planifier un court temps d’échange.
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L’art du questionnement
L’art du questionnement « Une question efficace permet de rechercher des solutions possibles et pas seulement de trouver une bonne réponse. »
Adapté de L’art de poser des questions efficaces, Eric E, Vogt, Juanita Brown et David Isaac, 2003.
Il est donc normal de privilégier les questions ouvertes qui permettent de clarifier un concept, de donner des raisons, de tenir compte du point de vue des autres ou des conséquences, de comparer en vue de caractériser et ainsi de comprendre.
suscite la curiosité
force à réfléchir
dégage des hypothèses
encourage la créativité
crée de l'énergie
(une implusion)
concentre l'attention
encourage une
conversation réflexive
« La parole est la pensée extérieure et la pensée est la
parole intérieure. »
- Rivaro
« Penser, c’est parler avec soi-même. »
- Miguel Unamuno
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L’art du questionnement
Des questions pour les aider à se construire
Pourquoi te sens-tu bien (ou mal) dans la classe à tel ou tel moment? Pourquoi es-tu fier de cette production? Quels moyens veux-tu prendre pour t’améliorer? Quelles sont tes ressemblances (ou tes différences) avec les
amis de la classe? Pourquoi cet atelier est-il ton préféré? Pourquoi aimes-tu les illustrations (couleurs, formes,
détails) de ce livre? Que ressens-tu lorsque le personnage de ce livre est en danger (ou en difficulté, ou face à un choix
difficile…)? Pourquoi trouves-tu que tu ressembles à tel ou tel personnage? Raconte-nous une situation que tu as vécue et qui ressemble à celle que vit le personnage ? Quelle musique ou quel bruit ajouterais-tu à cette histoire? À quels moments du texte ou sur quelles
images et pourquoi? Des questions pour les aider à socialiser
Que pourrais-tu faire pour que ça se passe de mieux en mieux dans ton équipe?
Décris-moi les qualités de tes coéquipiers. Pourquoi aimes-tu travailler dans cette équipe? (Pourquoi est-
ce difficile pour toi de travailler dans cette équipe?) Comment avez-vous décidé de régler les conflits dans votre équipe? Pourrais-tu m’expliquer comment vous avez décidé de faire telle ou telle chose dans votre
production? Y a-t-il des personnages dans ce livre qui ressemble à des gens que tu connais? Quand tu rencontres une difficulté, comment essaies-tu d’aller chercher de l’aide, vers qui te tournes-
tu, qui te vient en aide le plus spontanément? Comment vas-tu tenir compte des idées des autres dans ton
travail? Aurais-tu agi avec tes amis (avec les autres, avec ta famille, avec tes animaux…) de la même façon que le personnage de l’histoire?
Peux-tu m’expliquer le point de vue d’un autre enfant?
« La parole est la première démonstration de la nécessité de l’autre. »
- Jacques Attali
« Celui qui sait parler sait aussi quand il faut
parler. »
- Archidamos
« Chacun apprend à penser en même temps qu’il apprend à parler. »
- Le philosophe Alain
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L’art du questionnement
Des questions pour les aider à apprendre
Connais-tu d’autres livres qui parlent des mêmes choses (notions de thèmes, de sujets, de domaines de la connaissance)?
Peux-tu m’expliquer pourquoi les personnages des deux histoires sont semblables (ou sont différents)?
Comment as-tu réussi à faire… ? Compare ceci à cela ? Quelles sont les caractéristiques (essentielles) de…? Explique-moi… ou raconte-moi… ou peux-tu me dire
avec tes mots… ? Et si j’ajoute (ou j’enlève) ceci, que va-t-il se passer? Donne-moi un (ou des) exemple ou un (ou des) contre-
exemple. Comment vas-tu corriger (ou terminer, ou améliorer…) ta production? À quoi cet élément te fait-il penser (dans la classe, chez toi, dans ta vie…)?
Des questions pour les aider à penser
Imagine (ou anticipe) la fin de l’histoire (ou une autre fin, ou un autre problème…). Et si… qu’arriverait-il? Comment vas-tu faire (ou as-tu fait) pour résoudre ce problème (ou ce conflit, ou…)? Comment as-tu su que ta solution était la bonne? Comment sais-tu que les informations que tu as trouvées sont justes (pertinentes, complètes)? Donne-moi ton opinion (réaction-interprétation-
appréciation) sur cette histoire (cette affiche, ce film, ou la production d’une autre équipe…).
Quels liens vois-tu entre ceci et cela? (ressemblances et différences, mais aussi lien de cause à effet)
Dans quelle mesure nos hypothèses de départ sont-elles confirmées (ou infirmées)?
Pourquoi as-tu choisi ce livre, ce projet, ce…? Que vas-tu créer avec...? (ce matériel, ces personnages, ce décor, cette histoire, ces costumes…) ?
« Être et penser ne sont qu’une seule et même
chose. »
- Parmélide
« La fonction de penser ne se délègue pas »
- Le philosophe Alain
Oubliez le « peux-tu? » de politesse qui conduit certains enfants à ne répondre que oui et d’autres à ne pas se sentir capable de
répondre.
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L’art du questionnement
Regardons maintenant l’art de questionner en regroupant les types d’interventions en fonction de l’intention poursuivie par l’enseignante.
• Qu’est-ce que tu trouves intéressant dans cela? • Est-ce que tu as déjà entendu parler de ce dont on parle? • Avec quel point de vue es-tu d’accord, en désaccord? • En quoi ce que nous venons de lire nous aide à mieux comprendre l’ensemble de l’histoire? • Y a-t-il quelque chose qui te surprend dans ce que nous venons de lire?
Pour favoriser l’expression de
points de vue et amorcer la discussion
• Est-ce que c’est ce que tu veux dire? • Ainsi tu penses que les points suivants sont importants :… • Est-ce que je peux résumer comme ceci :…? • Voici ce que je considère comme le point essentiel de ce que tu dis :…
Pour aider les enfants à expliquer leurs points de vue
• Tu sembles vouloir dire que… • Est-ce qu’il se pourrait que…? • Veux-tu dire que…? • Moi, c’est ce que je t’ai entendu dire… • J’ai l’impression que… • Est-ce qu’on pourrait dire que ce que tu dis c’est que…? • Ainsi, selon toi…
Pour amener les enfants à s’exprimer
davantage et à clarifier leurs points
de vue
• Il y a des gens qui pensent que… • Est-ce que quelqu’un a un autre point de vue sur le sujet? • Est-ce qu’il se pourrait que… • Que se passerait-il si quelqu’un proposait de…
Pour faire apparaître des alternatives et examiner des choix
possibles
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Le rôle de l’enseignante dans l’oral réflexif
Le rôle des enseignantes
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Préparer un référentiel visuel qui présente ce qui est attendu de la part des enfants
Mettre à l’horaire un temps de qualité pour la période d’oral réflexif, de 2 à 3 fois par semaine
Offrir des conditions qui invitent les enfants à se questionner et à structurer leur pensée
Savoir reconnaître les moments de discussion possibles avec les enfants et profiter de ces contextes d’oral réflexif, sans toutefois être obligé de s’exprimer. Même en situation d’écoute, l’enfant intègre des éléments de l’oral
Créer un milieu d’apprentissage qui :
invite l’enfant à communiquer avec les autres (enfants et adultes) offre des situations de communication variées procure des expériences de langage riches et diversifiées (conversations, vocabulaire, histoires,
contes, chansons, comptines, poèmes, etc.) valorise les activités d’écoute, de lecture, d’écriture et de communication orale permet d’utiliser le français parlé dans sa région et le français standard
Soutenir et encourager l’initiative des enfants
Partager ses forces et ses habiletés avec ses collègues
Décloisonner les groupes
Profiter des situations imprévues telles que la désorganisation, l’émergence de conflits, les problèmes de tout ordre pour soutenir le développement de l’oral
Être capable de se dégager de sa planification afin d’attraper un beau moment au vol.
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Le rôle de l’enseignante dans l’oral réflexif
L’anim
ation des activités d’oral réflexif
Avant les échanges, l’enseignante :
Présente les attentes liées aux échanges Les stratégies d’écoute Les stratégies de partage et de discussion Les stratégies de base du travail en coopération
Propose les thèmes qui seront abordés Fait un modelage de sa propre réflexion.
Pendant les échanges, l’enseignante :
Pose les questions, les répète et les clarifie au besoin S’assure de poser des questions ouvertes qui n’appellent pas une réponse oui ou non Relance les échanges Redis et reformule ce qui a été dit par les enfants Renomme les différentes hypothèses proposées Soutient et encourage la participation de tous Valorise toutes les prises de parole Permet aux enfants de partager leur opinion même s’ils sont seuls à penser ainsi Adopte un langage non verbal « neutre » pour ne pas influencer les enfants Soutient davantage les équipes des petits parleurs Observe et écoute les enfants pendant les échanges dans les petits groupes d’échange Accueille toutes les réponses et hypothèses des enfants. On ne cherche pas une bonne réponse Rappelle les règles présentées en début de rencontre, au besoin S’intègre à la discussion pour la complexifier, l’amener ailleurs Laisse du temps… jusqu’à 10 secondes pour que l’enfant formule une réponse Donne le temps de faire verbaliser les enfants sur la manière dont ils ont procédé.
Après l’échange, l’enseignante :
Fait un retour sur ce que l’on retient ou ce que l’on a appris Permet aux enfants de faire un transfert dans de nouvelles situations de ce qui a été appris dans le cadre
d’un échange d’oral réflexif.
En t
ou
t te
mp
s
L’enseignante :
Établit un climat de classe dans lequel les enfants se sentent libres de parler Encourage les enfants à parler entre eux Dédramatise et encourager la prise de risque; Observe Fait confiance Est un médiateur, un guide, un accompagnateur et un allumeur Prend le temps d’écouter réellement.
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Le rôle de l’enseignante dans l’oral réflexif
N’hésitez pas également à… Permettre aux enfants de s’enregistrer (ex. lors de la résolution d’un conflit, de l’explication d’une
démarche, lors du jeu symbolique, de l’établissement de règles, etc.) et de reprendre autant de fois qu’ils le désirent (dictaphone, enregistrement à l’ordinateur - Audacity) afin que l’enfant puisse rétroagir sur son verbatim;
Porter une attention particulière aux enfants qui ne semblent pas comprendre les consignes et s’assurer que cette incompréhension n’est pas due à des manifestations d’enfants en difficulté (EHDAA, TED, etc.) en réduisant le nombre de consignes ou en attendant qu’elles soient exécutées avant d’en donner une autre;
Proposer des situations concrètes (jeux spatio-temporels, jeux de comparaisons, le calendrier, le menu du jour, une ligne du temps) pour soutenir l’expression des enfants afin d’expliquer ce qu’ils font (raconter un événement, une situation vécue, un projet personnel, une résolution de conflits, une réussite, une manière de faire, etc.);
S’assurer de présenter des évènements vécus hors de l’école et éloignés dans le temps, même si ceux-ci demeurent difficiles pour l’enfant (cet objectif est à atteindre à la fin du préscolaire). Il s’agit ici de développer les représentations spatiales et temporelles;
Présenter un mot nouveau chaque jour en l’écrivant et en s’amusant à l’utiliser le plus souvent possible dans des contextes verbaux différents;
Faire inventer des devinettes, des histoires, des saynètes, etc.;
Exploiter les chansons et les comptines en prenant le temps d’échanger pour en découvrir la signification.
• en début d’année, protéger toutes les premières prises de parole en instaurant un climat de classe respectueux et ouvert à la diversité; • dans un petit groupe, leur donner un rôle d’importance comme diriger un
jeu simple; • faire découvrir une surprise par un jeu de questions (un objet emballé) • installer des routines entourant les situations de communication en favorisant une constance dans la structure de l’activité (pictogramme, jetons de la parole); • former des petits groupes homogènes (petits parleurs avec des petits parleurs) pour favoriser les prises de paroles d’un plus grand nombre d’enfants.
Pour nos petits
parleurs...
• encadrer les enfants avec la pratique du bâton de la parole, de la ficelle de la parole; • jumeler un grand parleur et un petit parleur dans des situations où ils doivent parler pour l’autre afin de présenter un objet, un travail, une idée, une photo; • offrir des activités de développement en habiletés sociales pour apprendre à tenir compte de l’autre.
Pour nos grands
parleurs...
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Quelques repères relatifs au développement du langage
Le développement du langage Le texte suivant présente l’âge moyen où l’on voit apparaître certains comportements langagiers. Il ne faut pas s’inquiéter si un enfant affiche un retard de quelques mois. Par contre, cela peut indiquer à l’enseignante les objectifs plus spécifiques à travailler en classe. Entre 3 et 4 ans :
La plupart des sons sont bien prononcés. Quand certains sons ne sont pas maîtrisés, l’enfant de cet âge procède parfois par élision (apin au lieu de sapin) ou par substitution (changer un son à l’intérieur d’un mot : toupe au lieu de soupe). L’utilisation de telles stratégies peut-être normale dans le processus de développement du langage;
Il dispose d’une variété de mots pour constituer des phrases complètes qui contiennent un sujet, un verbe et un complément. Les phrases qu’il forme contiennent habituellement trois mots ou plus et la grammaire ressemble souvent à celle de l’adulte;
À cet âge, la plupart des enfants ont acquis les structures syntaxiques de base de leur langue;
Il pose des questions du type « où? », « qui? », « pourquoi? », ce qui a pour conséquence d’allonger ses conversations. Il peut aussi raconter des histoires;
Il maîtrise de plus en plus les habiletés à converser : le tour de parole, le maintien d’un sujet de conversation avec son interlocuteur ou l’initiation d’une conversation (Beauchemin, 2000).
Entre 4 et 5 ans :
L’enfant commence à accorder les verbes au futur (sous la forme du « je vais…);
Il adapte son message à l’âge, au statut et au genre de son interlocuteur;
Il acquiert une quantité phénoménale de nouveaux mots (entre 800 et 1000 par année entre 4 et 6 ans);
Il utilise des phrases de plus en plus complexes qui contiennent davantage de mots comme « que », « quand », « qui », « si », « parce que »;
Il a la capacité d’employer des conjonctions (mais, où, et, donc, car, ni, or) et des propositions (avec, de, par, après, etc.). Ses phrases sont souvent composées de 6 mots ou plus.
Il s’intéresse aux mots et demande « qu’est-ce que ça veut dire? »
Il est avide de découvertes et il tente d’employer des mots nouveaux dans différents contextes, simplement pour en vérifier le sens.
C’est le début de la conscience phonologique. L’enfant est sensible aux syllabes et peut jouer avec les sons sous certaines conditions.
Il manifeste de l’intérêt pour la production de message à l’écrit (produit des lettres pour signifier quelque chose).
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Quelques repères relatifs au développement du langage
Entre 5 et 6 ans :
Il commence à utiliser les verbes à l’imparfait et au conditionnel;
Il fournit des détails entourant des événements et termine souvent ses histoires par un dénouement quelconque (récit structuré);
Il commence à manifester des signes d’écoute attentive en faisant « oui » de la tête;
Il reconnaît l’importance des pauses qui précèdent un changement d’interlocuteur;
Il utilise un vocabulaire de plus en plus varié et étendu;
Il se questionne sur la langue et son fonctionnement; début de l’activité de définition (je pense que ça veut dire…), installation de la conscience phonologique;
Il est sensible à l’humour, aux jeux de mots.
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Pistes aux parents
Pistes pour sensibiliser les parents à l’importance de l’oral réflexif
Comment soutenir les parents par des gestes simples pouvant aider au développement des habiletés langagières de leur enfant? Avant tout, il est souhaitable d’expliquer aux parents les observations faites quant aux forces et/ou faiblesses langagières de leur enfant. Est-ce un petit parleur, un grand parleur? Par le biais d’une rencontre, l’enseignante pourra aider le parent à comprendre la différence entre les termes suivant : « parler à son enfant et parler avec son enfant ».
Voici des suggestions pouvant être faites aux parents : Questionner leur enfant sur les démarches utilisées pour la production d’une réalisation faite en classe
ou à la maison;
Utiliser un vocabulaire varié et riche outre le fait que nous croyons que celui-ci n’est pas adapté au niveau de langage de l’enfant;
Utiliser la littérature jeunesse pour répondre aux questions des enfants, pour enrichir le vocabulaire, sa compréhension du monde, tout en laissant l’enfant intervenir avant, pendant et après la lecture;
Animer une lecture accompagnée d’objet(s) permettant une plus grande accessibilité aux livres de qualité;
Aider son enfant à faire des transferts de ses apprentissages, à trouver du sens à ce qu'il fait à l'école, et ce, par le questionnement;
Dans un cas d’un enfant « grand parleur », encourager l’enfant à attendre son tour dans une conversation, à poser des questions et à attendre la réponse;
Être un modèle pour lui, reprendre ses mots en le questionnant et/ou en l’aidant à mieux formuler : ex:“ Tu voulais dire….”
Écouter, écouter et écouter ce qu’il a à dire.
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Les enseignantes partagent… Des questions et des pistes de réponses
Des questions… et des pistes de réponses
INTERVENTIONS SUGGESTIONS
Quels ont été les contextes les plus propices au
développement de l’oral réflexif?
La philosophie pour enfants; Les trousses de lecture; La résolution de conflits; La littérature jeunesse; Le jeu spontané; L’ami du jour qui a de plus en plus de responsabilités; L’instauration des routines; Le vécu de l’enfant; La causerie.
Y a-t-il du matériel ou des outils qui vous aident à
développer l’oral réflexif?
Le programme « Vers le pacifique »; La littérature jeunesse; Le matériel de philosophie de la revue « Pomme d’api ».
Quel est le temps idéal pour faire de l’oral réflexif et
combien de temps y accorder?
Tout dépend du contexte, du groupe; Un temps où les enfants sont plus concentrés (souvent le matin); Tout peut devenir un prétexte pour faire de l’oral réflexif.
Quelles solutions avez-vous mises en place pour enrichir
les causeries?
Des causeries plus thématiques (questions ouvertes) et moins anecdotiques (tour de table);
Des résolutions de problèmes; Des dyades, des sous-groupes; Des déclencheurs variés; Faire des votes de thèmes.
Que permet la littérature jeunesse dans le
développement de l’oral réflexif?
Un excellent déclencheur (poser des questions sur les personnages, l’histoire, prévoir la fin…);
L’enfant fait des prédictions (au début et au milieu) avec dessin (cela permet un temps de réflexion;
Permets de développer le vocabulaire autour du livre (Le livre à propos des livres de Victor Le Lapin);
Permets de développer le vocabulaire; Permets de faire des inférences.
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Les enseignantes partagent… Des questions et des pistes de réponses
INTERVENTIONS SUGGESTIONS
Comment diminuer la prise de parole par l’enseignante?
Ne pas tout reformuler; Installer une routine claire pour que les enfants soient autonomes (routine
de la journée, présentation de projets); Instaurer des experts; Avoir en tête que l’enfant doit réfléchir pour trouver des réponses à ses
propres questions et ne pas lui donner du « tout cru » en bouche; Retourner la question aux enfants (quand un enfant pose une question, il a
déjà des éléments de la réponse); Privilégier les questions ouvertes plutôt que les questions fermées afin que
le tour ne nous revienne pas tout de suite. (Comment cela fonctionne? Qu’est-ce que tu en penses? sont à privilégier).
Quelles questions avez-vous intégrées dans votre pratique quant à l’art de questionner?
Qu’en penses-tu? Et toi? Comment t’y prends-tu? Qu’est-ce qu’il est en train de faire? Qu’est-ce qui se passe dans sa tête? Est-ce que quelqu’un pense autrement? Qu’est-ce que tu prépares?
Comment faites-vous pour faire parler un enfant qui
parle très peu?
Proposer des dyades; Passer par des médiums différents (dessin, photos, livres, productions…); Faire une entrevue avec l’enfant; Solliciter l’élève et lui dire qu’il a un délai pour réfléchir à sa réponse; Prendre le temps de réfléchir à sa réponse avant de faire l’animation en
grand groupe; Utiliser le bâton de la parole pour l’inciter à parler; Installer des routines (ex. : l’enfant timide à la possibilité de fermer les
lumières et demander aux autres si quelqu’un voudrait jouer avec lui. Cela donne le droit de parole aux petits parleurs qui ne l’auraient pas pris autrement).
Comment faites-vous pour restreindre un enfant qui
parle beaucoup?
Expliquer que la parole, ça se partage; Utiliser les jetons de la parole : chaque enfant a trois jetons, donc trois
droits de parole; Mettre l’accent sur les habiletés d’écoute; Donner un rôle à un parleur (il devient le gardien des réponses, il doit
s’assurer que tous aient parlé); Utiliser le Toubalou; Demander à l’enfant de mettre son doigt sur sa bouche pour retenir ses
interventions.
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Les enseignantes partagent… Des questions et des pistes de réponses
INTERVENTIONS SUGGESTIONS
Que faites-vous comme intervention auprès d’un
enfant hors sujet?
Proposer une autre période de temps pour parler du nouveau sujet qu’il aborde;
Est-ce que c’est dans le sujet? Quel lien fais-tu avec le sujet? Est-ce que c’est ce dont on parle? Je te répète la question; Écoute la conversation des amis et je te reviens; Importance d’enseigner les rôles de locuteur et interlocuteur.
Quelles interventions pratiquez-vous pour
développer le vocabulaire?
Unir la musique et le vocabulaire (la gestuelle aussi); Exploiter le même livre plusieurs fois par semaine (4 mots nouveaux par
semaine); S’arrêter sur les mots difficiles pour demander ce que ça veut dire; Présenter les mots difficiles avant la lecture et trouver des manières de les
utiliser en parlant; Présenter la page couverture et demander quels mots on va trouver dans ce
livre; Faire des cartes d’exploration; Trouver des synonymes des mots que l’on connaît.
Comment réussissez-vous à garder des traces de la
progression des enfants en oral réflexif?
Enregistrer les réflexions (ex. : résolution de conflits et réécouter l’enregistrement);
Enregistrer sur une tablette numérique les observations durant une réflexion et garder les dossiers numériques;
Dans une grille d’observation; Les filmer; Observations de l’enseignante; Préciser les intentions d’observation; Cibler un enfant ou deux à la fois ; Utiliser des notes autocollantes (post-it); Prévoir du temps pour des présentations orales des enfants (de façon
volontaire) pour parler de leurs difficultés vécues et de leurs réussites.
Comment faire reconnaître l’importance de l’oral réflexif
auprès des parents?
En les impliquant (donner des outils aux parents); Demander aux parents de poser des questions sur le contenu de classe
(aller visiter le portail et poser des questions aux enfants : Quel atelier as-tu préféré? Comment as-tu fait? Pourquoi avez-vous fait cela?);
Avec une photo, demandez aux enfants de raconter à leurs parents ce qu’on a fait aujourd’hui;
L’importance de la communication avec les parents (énoncer ce qu’on va travailler cette semaine et demander aux parents de poser des questions ouvertes à leur enfant : comment, pourquoi, avec qui, etc.).
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Bibliographie et matériel de référence
Bibliographie et matériel de référence BAULU-MACWILLIE, Mireillle et Réal SAMSON. Apprendre…c’est un beau jeu, Éditions de la Chenelière,
Montréal, 1990, 215 p. BOISCLAIR, Andrée, Hélène MAKDISSI et Pauline SIROIS. La littératie au préscolaire : Une fenêtre ouverte vers la
scolarisation, Presses de l’Université du Québec, Montréal, 2010, 342 p. BOUCHARD, Caroline. Le développement global de l’enfant de 0 à 5 ans en contextes éducatifs, Presses de
l’Université du Québec, Montréal, 2008, 484 p. CHABANNE, Jean-Charles et Dominique BUCHETON. Parler écrire pour penser, apprendre et se construire,
Presses universitaires France, Paris , 2002, 252 p. CHARRON, Annie, Caroline BOUCHARD et Gilles CANTIN. Langage et littératie chez l’enfant en service de garde
éducatif, Presses de l’Université du Québec, Montréal, 2009, 198 p. (Éducation à la petite enfance). HOHMAN, Mary et David P. WEIKART. Partager le plaisir d'apprendre : guide d'intervention éducative au
préscolaire, Gaëtan Morin éditeur, Montréal, 2007, 489 p. DES CHÊNES, Rosine. Moi, j’apprends en parlant, Chenelière éducation, Montréal, 2008, 219 p. DOYON, Denise et Carole FISHER. Langage et pensée à la maternelle, Presses de l’Université du Québec,
Montréal, 2010, 219 p. GIASSON, Jocelyne. La lecture : Apprentissage et difficultés, Gaëtan Morin éditeur, Montréal, 2011, 398 p. GIORDAN, André. Apprendre!, Belin, 1998, 254 p. MONTÉSINOS-GELET, Isabelle et Marie-France MORIN. Les orthographes approchées : une démarche pour
soutenir l'appropriation de l'écrit au préscolaire et au primaire, Chenelière éducation, Montréal, 2006, 106 p.
PILLOT, Jacqueline. Enseigner à l’école maternelle, ESF éditeur, Paris , 2004, 216 p. (Pédagogies). CHABANNE, Jean- Charles et Dominique BUCHETON. Parler et écrire pour penser, apprendre et se construire;
L’écrit et l’oral réflexif, En ligne , PUF, 2002. http://www.crdp.ac-creteil.fr/langages/rubriques/pdf/ressources/note_lecture_parler_et_ecrire.pdf
RAOUX-DAUMAS, Michèle. L’oral réflexif à l’école primaire, [En ligne], 2001. [http://pratiquesphilo.free.fr/contribu/contrib45.htm] ÉDUCATION-MONTÉRÉGIE, sous-comité à l’éducation préscolaire. Développement global de l’enfant d’âge préscolaire, 2009. [En ligne], [http://vitrine.educationmonteregie.qc.ca/spip.php?article1072] DUNNIGAN, Kathleen. L’Art du questionnement, (Atelier inspiré de Philosophie et pensée chez l’enfant d’Anita Caron).
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Bibliographie et matériel de référence
Littérature jeunesse : WATT, Mélanie. Léon le caméléon, Éditions Scholastics, Markham (Ont.), 2001, 32 p. WATT, Mélanie. Frisson l’Écureuil se fait un ami, Éditions Scholastics, Toronto, 2007, 32 p. SIMARD, Rémy. L’horrible monstre, Les 400 coups, Laval, 1997, 32 p. Illustrations : Service national du RÉCIT à l'éducation préscolaire (http://recitpresco.qc.ca/) Images clipart
Notes personnelles