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S’il est aujourd’huiquelque peu ou-blié, Henri Ko-walski connut, audébut des années1900, une renom-

mée mondiale et fut surnommé le‘prince du piano’. Né le 1er avril1841 à Paris, il était le fils d’un offi-cier polonais qui s’était réfugié àDinan après la révolte avortéecontre les Russes en 1830. Ilpasse les premières années desa vie à Paris, et pour cause. « En1847, il était petit chanteur à laMadeleine et six ans plus tard, ildonnait, en temps que soliste unhymne d’action de grâce au ma-riage de Napoléon III », expliquel’historien local Yves Castel.

Le jeune garçon commencealors sa brillante carrière et aprèsavoir été chanteur de l’académiede musique, il est le pianiste de lafamille impériale qu’il suit aux Tui-leries, à Biarritz, etc. En 1856, ilcompose un nouvel hymne pourle baptême du prince impérial.

Sa légende le présentecomme le dernier élève de Cho-pin mais il n’a fait que le rencon-trer en présence de son pèrealors qu’il n’avait que six ans, soitdeux ans avant la mort du grandcompositeur.

Mais, comme l’explique Ma-rie-Claire Mussat qui lui a consa-cré des articles dans le Pays deDinan, « il fut élevé dans la tradi-

tion de Chopin ».C’est en 1860 que Kowalski

entame une carrière de « grandconcertiste » qui l’amène à voya-

ger à travers l’Europe mais aussià cinq reprises aux Etats-Unis(New-York, Boston, Philadelphie,etc) et au Canada. Il passera

même 15 ans en Australie aucours de deux séjours où il « joueun rôle important dans le dévelop-pement de la vie musicale, l’en-seignement du piano et la diffu-sion de la musique française », re-late Marie-Claire Mussat. Celuique l’on appelle son excellenceou le maître serait à l’origine de lacréation de l’Opéra de Sidneyajoute Yves Castel. « Kowalski futaussi un compositeur féconddont le catalogue (près de 300opus) comporte un certain nom-bre d’œuvres inspirées par sesvoyages. »

De Kerrozen à PéhouKowalski avait coutume de se

rendre en région dinannaise oùs’étaient établis ses parents, ma-riés à Saint-Samson sur Rance en1835. Il répondait notamment auxinvitations de la princesse Guil-laume Radziwill, elle-même « re-marquable musicienne », dansson château de Kerrozen, à Ta-den. Puis c’est au château duChêne Vert ou Péhou, en Plouër,qu’il se fixera.

« Il était le jeune amant de Ma-rie Eloy, une ancienne danseusede l’Opéra, connue sous le nomde ‘La Ferrari’. Celle-ci s’est vu of-frir le domaine de Péhou par sonprécédent amant, le prince polo-nais Basilewski, rentré à Paris »,précise Yves Castel. La Ferraridevient Madame Kowalska en

1869 et accompagne son épouxlors de tournées internationales.

Mais le prince du piano saitaussi s’encanailler. « Il lui arriverade jouer des airs populaires voirelégers dans une maison close deDinan, explique l’historienlocal. Mais rappelons que le bor-del, c’était une pratique normalepour les bourgeois dont les épou-ses étaient souvent des grenouil-les de bénitier. » De grandes fêtesétaient également données dansson château de Péhou ou, là en-core, des femmes légères étaientinvitées pour les messieurs es-seulés.

Yves Castel évoque des té-moignages de serviteurs occa-sionnels évocant des « messieursdéguisés en cochon et courantaprès des filles nues, ou d’autreschevauchant ces mêmes fillesnues » mais on imagine que lesrumeurs allaient déjà bon train àl’époque et qu’on fantasmaitbeaucoup sur ces artistes fortu-nés.

Kowalski tombe malade àNantes alors qu’il visite son vieilami, l’ancien père supérieur desCordeliers, Eugène de la Motte.Son mal empire et il décède àBordeaux en 1916, à 75 ans.

PYG

Sources : Le Pays de Dinan,1987 et1996, articles de Marie-Claire Mussat.

Kowalski jouait du piano au bordelIl fut une célébrité mondiale, une ‘star’ de la musique classique. Moins classiques étaient les soirées qu’il organisait au château de Péhou, où des femmes légères venaient divertir les invités du pianiste Henri Kowalski.

RepèresEn 1986, la société des amisdu musée et de la bibliothè-que de Dinan a acheté desmanuscrits musicaux du pia-niste kowalski. Parmi les 300compositions officielles del’artiste, un grand opéraconsacré à Gilles de Bretagneet joué pour la première fois àRennes en 1877 ; le drame lyri-que Vercingétorix joué au Ca-sino (Théâtre) de Dinan en1899 ; la marche hongroisequi figure parmi ses plus fa-meux airs ; Dom Juan, etc.

photo de Nadar.

À Plouër avec son épouse en 1916 lorsd’un mariage.

Folies douces en Pays de Dinan

Jeudi 25 août 2011 5