Panel 3: Le rôle des savoirs locaux et autochtones dans l’enjeu du changement climatique [Panel en Français) Président de Séance: Mamouda Moussa Na Abou (ENDA-TM) Ahmadou Kanté: Des outils participatifs pour mieux comprendre les liens entre migration et changements climatiques Joséphine Yameogo: Les pratiques d´adaptation au changement climatique dans les secteurs de la médecine traditionnelle, de l´alimentation et de l´exploitation forestière dans les villages riverains de la Mare aux Hippopotames à l´Ouest du Burkina Faso Rivaldo Kpadonou: Innovations paysannes d’adaptation à la vulnérabilité climatique dans la basse vallée de l’Ouémé au Bénin Mbaye Dieng: Le partage de l’information sur les changements climatiques en milieu communitaire: la méthode LEAD Afrique Francophone
Résumé du panel
Pratiques d’adaptation au changement climatique dans les secteurs de la médecine traditionnelle,
de l’alimentation, et de la foresterie – Joséphine Yameogo
La panéliste a présenté différents travaux de recherche menés sur les pratiques d’adaptation au
changement climatique au niveau de la médecine traditionnelle. Après avoir présenté sa
méthodologie (PAPOLD), la panéliste a présenté les différentes vulnérabilités vécus par les
populations locales et les solutions locales apportées.
Des outils participatifs pour mieux comprendre les liens entre migrations et changement
climatique (OIM) - Amadou Kanté
Le panéliste a insisté sur le nombre de déplacés en raison de catastrophes naturelles liées au climat ;
chiffre qui atteint 20 millions. Il a insisté sur l’importance du processus de décentralisation comme
une opportunité non négligeable pour relever les défis du changement climatique mais faible outils
de gouvernance adaptés aux savoirs et savoir faire
Innovation paysannes d’adaptation au Bénin
Le panéliste a présenté quelques innovation en matière de développement agricole qui ont un
intérêt dans le cadre de l’adaptation au changement climatique ; innovations qui permettent de
mieux appréhender la gestion de l’eau dans la basse vallée de l’Ouémé et ainsi de renforcer le
potentiel productif par une meilleure diversification des activités (whédos agro-piscicole) eage des
Partage d’information – Enda Lead
Enda Lead a présenté un film qui met en évidence l’importance des radios locales dans la
compréhension du phénomène du changement climatique.
Discussions
Les discussions ont porté sur différents sujets :
- L’importance dissocier les pratiques anthropiques du changement climatique ; il a été
mentionné que l’on a tendance à tout expliquer du fait du changement climatique alors que
certaines causes de dégradation des terres sont bien liés à la gestion des ressources par
l’homme ;
- Le besoin de placer certains sujets au niveau suprarégional comme le pastoralisme qui
appelle à des réactions concertées à différents niveaux.
- La migration est souvent vue comme un déplacement sud-nord vers les pays européens mais
le climat est également un facteur de migration intra-africain qu’il importe de prendre en
compte dans les politiques d’adaptation.
- Sur le rôle de la Médecine traditionnelle et l’impact du changement climatique sur les
disponibilités de la ressource
- Le besoin de renforcer certains exposés par la mise en place de données économiques
capable justement de valider certaines mesures d’adaptation
Ahmadou Kanté
Des outils participatifs pour mieux comprendre les liens entre migrations et
changements climatiques
Introduction
Les options de développement dans les pays du sud ont souvent été marquées par la
marginalisation de ce qu’on a appelé les savoirs locaux, savoirs endogènes ou
traditionnels compte non tenu dans le cadre de cette communication, des controverses
afférentes aux terminologies. Toutefois, depuis les années 1980, avec l’avènement des
concepts de développement durable et de participation, une valorisation des savoirs et
pratiques des populations locales notamment dans leur rapport à la nature et à la crise
environnementale, devient possible. Des efforts ont été faits pour intégrer ces savoirs
locaux notamment dans les stratégies de lutte contre la désertification et de préservation
de la biodiversité. Cette communication défend la thèse selon laquelle, les défis liés aux
changements climatiques dans les pays africains au sud du Sahara connus pour être des
zones de haute vulnérabilité aussi bien au regard de leurs systèmes humains que naturels,
font de cette option d’intégration des savoirs locaux, une priorité stratégique. Qui plus
est, parmi les effets attendus des changements climatiques, figure la migration interne et
transfrontalière immédiate, notamment pour l’Afrique subsaharienne. De telles
prévisions, malgré les incertitudes dont elles sont constitutives, doivent inciter à la mise
en place de mécanismes et outils alliant savoir local et savoir scientifique pour mieux
comprendre les liens complexes entre changements climatiques et migrations en Afrique.
Dans la première partie, un rappel rapide est fait sur la reconnaissance des savoirs locaux.
La deuxième partie aborde les articulations entre changements climatiques, migrations et
savoir local et enfin dans une troisième partie, une présentation des outils participatifs
actuellement développés en matière de changement climatique est faite.
Crise de l’environnement et reconnaissance du savoir local
Les façons de connaître et d’utiliser les ressources de leurs terroirs par les populations
locales ont souvent été considérées comme un frein au développement et au progrès
réduits à la croissance économique tous azimuts. Auparavant, les politiques publiques de
gestion de l’environnement et des ressources naturelles étaient marquées par une
démarche d’exclusion, de centralisation des décisions, de prédominance des mesures
répressives et de primauté accordée aux valeurs marchandes des ressources naturelles.1
Entre temps, la crise environnementale et de la centralisation excessive des décisions
publiques est passée par là et a permis dans les années 1980, l’émergence des concepts de
développement durable et de participation. Ce nouvel état d’esprit a été a fait le lit d’une
reconnaissance des savoirs qui ont été à la base des adaptations développées par les
populations locales vis-à-vis des changements de leurs terroirs et de ses ressources :
« Ces savoirs représentent tout un éventail de connaissances basées sur des expériences
accumulées et transmises de génération en génération par les collectivités locales:
techniques d’exploitation et de gestion des ressources naturelles, dispositions
institutionnelles et organisationnelles, croyances et valeurs. » (Hermon, 2007).
En effet, malgré les moyens énormes en ressources financières et la mobilisation d’une
expertise technique de haut niveau, force est de reconnaître que les résultats n’ont pas
souvent été à la hauteur des attentes de la part des promoteurs des programmes et projets
de développement en Afrique. Dans le secteur de la gestion des ressources naturelles et
de l’environnement, les échecs et/ou résultats mitigés font légion et ne sont pas sans lien
avec la marginalisation des populations locales et par conséquent des savoirs et pratiques
dont elles sont dépositaires et/ou leur résistance vis-à-vis d’initiatives non conformes à
leurs aspirations et attentes. De plus en plus de voix se sont faites entendre pour défendre
la thèse selon laquelle, c’est un conflit de logiques entre les promoteurs du 1 Ces pratiques antérieures ont été qualifiées de : a) centralisatrices, parce que la gestion des ressources était un monopole de l’État et de l’administration ; b) interventionnistes, en ce sens que l’administration, par l’intermédiaire de ses agents, exerçait des surveillances et des contrôles sur tout agissement des communautés et des individus touchant aux ressources naturelles renouvelables; c) répressives, puisque le dispositif juridico-administratif mis en place pour les réaliser instaurait interdiction, amende et emprisonnement et enfin; d) exclusives, parce que les communautés et les individus n’avaient accès à aucune forme de prise de décision effective dans la gestion des ressources naturelles (Froger et Andriamahefazafy, 2003, p55).
développement et les populations supposées en être les bénéficiaires qui est à la base de
la crise. Au plan international, des institutions comme l’UNESCO, l’IUCN et le CRDI
pour ne citer que celles-ci, ont fait l’effort de soutenir la promotion de la prise en compte
des savoirs locaux dans les politiques environnementales et de gestion des ressources
naturelles.2
Changements climatiques, migrations et savoir local
La planification des stratégies de mitigation et d’adaptation aux changements climatiques
en Afrique subsaharienne a plus de chances de succès en créant les conditions de
valorisation des savoirs et pratiques locaux. En effet, les conséquences des dérégulations
en cause sont vécues dans les territoires où les populations dépendent étroitement des
biens et services environnementaux depuis des temps immémoriaux. De ce fait, elles
savent en reconnaître les évolutions néfastes ou bénéfiques, et ont développé des
stratégies d’adaptation plus ou moins réussies vis-à-vis des modifications intervenues
dans leurs lieux de vie. Le problème est moins de faire accepter cette évidence qui est
d’ailleurs prise en charge dans les fiches de projets déclinés dans les Plans d’Action
Nationaux d’Adaptation (PANA), que de trouver les meilleurs moyens d’inclure les
savoirs locaux qui véhiculent les préoccupations des collectivités locales dans la
définition des politiques environnementales, climatiques et de développement. La 32ème
session du GIEC en 2010 affirme : « Les savoirs autochtones ou traditionnels peuvent
s’avérer utiles pour évaluer le potentiel de certaines stratégies d’adaptation en termes de
rentabilité, de participation et de durabilité » (IPCC-XXXII/Doc 7).
2 Même les bailleurs de fonds pour le développement international ont manifesté de l’intérêt pour les savoirs locaux et traditionnels des bénéficiaires. Ainsi, à la suite d’une enquête menée par la Banque mondiale auprès de clients en Afrique qui a révélé que ceux-ci souhaitaient que la Banque adapte mieux son expertise technique aux conditions locales, son Département Afrique institua en 1998 le Programme Savoirs locaux au service du développement qui vise, selon son directeur, à ‘utiliser les connaissances traditionnelles au service du développement, dans un processus qui consiste à apprendre sans cesse des communautés locales’, affirmation appuyée par le Président de la Banque qui déclara pour sa part que ‘les savoirs locaux font partie intégrante de la culture et de l’histoire d’une communauté’ (Banque mondiale 2000) cité par (Hermon, 2007).
Aussi bien dans les analyses stratégiques environnementales (ASE) que dans les analyses
de vulnérabilité, risques migratoires et migrations sont mentionnés par les populations à
partir des associations entre évolutions climatiques et dynamiques migratoires qu’elles
font. Là aussi, le problème est moins le bien fondé de leurs perceptions des liens entre ces
phénomènes que les attitudes, les pratiques et les attentes qui en découlent et que le
planificateur a intérêt à prendre en compte pour éviter que l’insuccès soit inscrit à
l’entame même de son travail. Dans un tel contexte, les bonnes pratiques veulent que la
planification des politiques migratoires pour être adéquate, soit suffisamment sensible
aux savoirs des populations locales. Il importe de noter dans ce cadre, que celles-ci ne
sont pas que des victimes des perturbations environnementales ou non qui surviennent
dans leurs territoires, mais sont aussi des agents d’adaptation dont ils faut tenir compte
des stratégies en supplément aux logiques scientifiques et techniques.
L’analyse de vulnérabilité et de capacité d’adaptation à base communautaire associée à la
démarche des études d’impact environnemental et social offre un cadre pertinent de prise
en compte méthodique des savoirs locaux aux fins d’une meilleure connaissance des
phénomènes migratoires liés aux évolutions climatiques. En effet, la prise en compte des
savoirs locaux permet de mieux comprendre dans quelles circonstances, la migration peut
être une stratégie d’adaptation, sous quelles modalités temporelles et spatiales se fait-elle,
quels groupes sociaux sont concernés, mais aussi dans quelle mesure peut-elle être
efficace. Les informations qu’un tel cadre d’analyse permet de générer constituent un
apport important pour une planification publique sensible aux enjeux migratoires en
termes de prévention, et de mesures d’accompagnement au cas échéant dans les lieux de
transit et de destination.
Changements climatiques et migrations, quels outils d’analyse participatifs pour un
lien complexe ?
Ainsi, il est actuellement partagé par nombre d’acteurs des problématiques climatiques,
que le succès de la mise en œuvre d’une approche prônant la responsabilisation des
acteurs locaux dépend largement de son institutionnalisation à travers les opportunités
offertes par la décentralisation : « Les collectivités territoriales sont un échelon
incontournable dans la mise en oeuvre des politiques liées à la prise en compte du climat.
En effet, les administrations régionales et locales mettent en oeuvre la politique nationale
mais disposent aussi, grâce au processus de décentralisation en cours dans de nombreux
pays, de prérogatives en matière de planification et de réglementation, ce qui en fait des
donneurs d’ordre et des promoteurs d’investissements dans de nombreux secteurs
vulnérables aux impacts des changements climatiques. Cette opportunité devrait être
saisie pour promouvoir une meilleure gouvernance climatique locale, les actions menées
à ce niveau pouvant atteindre plus facilement les groupes vulnérables ciblés. » (Lo et
Kaéré, 2009)
Dans cette optique, la question des méthodologies et outils appropriés pour garantir la
prise en compte des intérêts des différents groupes concernés et pour gérer les conflits et
les négociations nécessaires dans un processus d’analyse et de planification participative
des politiques publiques se pose avec acuité. (Scoones et Thomson, 1999)
Les outils d’analyse de vulnérabilité et de capacité d’adaptation aux changements
climatiques sont très utiles en ce qu’ils sont flexibles et peuvent être adaptés par les
utilisateurs à diverses réalités. Les nuances et différences entre les outils actuellement
expérimentés n’empêchent pas de retenir quelques caractéristiques fondamentales, à
savoir qu’ils sont, i) des outils de diagnostic pour comprendre les problèmes et leurs
causes sous-jacentes ; ii) des outils de planification pour établir la priorité des mesures et
des apports et les classer, iii) des outils d’évaluation des risques, iv) des outils pour
donner du pouvoir aux communautés vulnérables et les mobiliser. (Quesada, 2011).
Pour conduire ce type d’analyse, les étapes clés sont les suivantes :
Choisir un cadre d’analyse pour donner une définition claire et commune de ce
qui est à analyser et du rôle de l’analyse
Choisir l’unité et/ou le niveau d’analyse pour déterminer la portée et le thème de
l’analyse et la méthode à utiliser
Recenser les parties intéresses de façon à disposer des compétences voulues et à
assurer la prise en charge des résultats
Choisir une technique de collecte et d’analyse des données correspondant à
l’ampleur, au champ et à l’objet de l’analyse
Recueillir les données en employant des techniques de collecte qui permettent de
réunir les faits
Analyser les données e façon à associer divers aspects de la vulnérabilité pour
obtenir une image globale et faire apparaître les rapports de cause à effet
Prendre des décisions et adopter des mesures : intégrer les résultats à l’évaluation
des risques et à la conception du projet et apporter les modifications voulues pour
réduire la vulnérabilité
Conclusion
Les changements climatiques constituent certes une menace notamment pour les pays de
l’Afrique subsaharienne, hautement vulnérables eu égard à leurs systèmes humains et
naturels. Toutefois, ils peuvent constituer des opportunités de développement alternatif en
ce qu’ils suscitent un regain d’intérêt pour des savoirs et pratiques de populations dont les
rapports à la nature méritent d’être mieux pris en compte dans les décisions publiques qui
affectent leur vie. Dans ce sens, la mise en place d’outils pouvant allier savoir local et
savoir scientifique doit être encouragée car permettant aux populations locales d’avoir un
peu plus de pouvoir grâce à leur savoir et de peser plus sur les réponses planifiées aux
changements climatiques.
Joséphine Yameogo
Titre : Les pratiques d´adaptation au changement climatique dans les secteurs de la
medecine traditionnelle, de l´alimentation et de l´exploitation forestière dans les
villages riverrains de la Mare aux Hippopotames à l´Ouest du Burkina Faso
Joséphine YAMEOGO1,*, Mamounata BELEM1, Moumouni NABALOUM1,2
1= CNRST/INERA/DPF, 03 BP 7047 Ouagadougou 03, Burkina Faso
2= Université de Ouagadougou – CNRST/INERA/DPF, 03 BP 7047 Ouagadougou 03, Burkina Faso
*= Participante ; Auteur correspondant; email = [email protected]
RESUME
Le present travail a été réalisé dans le cadre des activités de l´UNESCO-MAB à la Réserve
de Biosphère de la Mare aux Hippopotames à l´ouest du Burkina Faso. Cette réserve
s´inscrit dans un climat sud-soudanien et est vulnérable au changement climatique. Par
conséquent des pratiques d´adaptations aux effets nefastes sont adoptées par les
populations. Cette étude vise à identifier les évènements liés au changement
climatique ; leurs repercussions sur la santé, l´alimentation et la foresterie de ces
villages et les pratiques d´adaptation decoulant des savoirs locaux et indigènes des
populations concernées.
Pour ce faire des entretiens de groupes selon la methode PAPOLD (Participatory
Analysis for Poverty and Livelihood Dynamics) et des interviews individuelles ont été
réalisés auprès des populations de quatre villages riverains que sont Bala, Bossora,
Sokorani et Tiérako.
Il ressort de ces travaux que ces villages ont connu des phénomènes climatiques aux
conséquences negatives très prononcées en 1994, 1995 et 1999. A partir de ces années
des pratiques d´adaptation sur la base des savoirs locaux sont promus. La medecine
traditionnelle est beaucoup plus sollicitée dans les traitements de 29 maladies reparties
en 4 maladies liées aux vents et aux faibles températures, 5 maladies liées aux vents et
aux fortes températures, 8 maladies de toutes les périodes et 12 maladies infantiles. Les
traitements sont axés sur l´usage des plantes. Afin de contribuer à un renforcement de
la sécurité alimentaire, 26 espèces végétales sont les plus impliquées dans la
préparation des repas. Des pratiques agroforestières sont également faites pour
remedier aux problèmes de bois d´energie, l´ensablement et l´envasement des points
d´eau, la disparution des espèces fruitières.
Ces savoir-faires locaux confirmés par les propriétés physico-chimiques des espèces
végétales participent à l´amélioration de la santé des populations rurales et urbaines, à
la sécurité alimentaire et à la gestion des ressources forestières.
Mots clés : Changement climatique, Adaptation, Santé, Alimentation, Foresterie
ABSTRACT
The present study was conducted as part of the activities of UNESCO-MAB at the
Biosphere Reserve of the Hippos Pool in western Burkina Faso. This reserve is located in
a south Sudanese climate and it is vulnerable to climate change. Therefore adaptation
practices to the adverse effects are adopted by people. This study aims to identify
events related to climate change, their impact on health, nutrition and forestry in these
villages and adaptation practices arising out of local and indigenous populations. Group
interviews according to the PAPOLD (Participatory Poverty and Livelihood Analysis for
Dynamics) method and individual interviews were conducted with the populations of
four bordering villages that are Bala Bossora, and Sokorani Tiérako.
It appears from this study that these villages have experienced negative consequences
for weather very pronounced in 1994, 1995 and 1999. From these years some
adaptation practices based on local knowledge are promoted. Traditional medicine is
much sought in the treatment of 29 diseases divided into 4 diseases related to winds
and low temperatures, 5 disease-related to winds and high temperatures, 8 diseases of
all periods and 12 childhood diseases. Treatments are focused on the plant uses. To
contribute to strengthening food security, 26 plant species are more involved in human
food. Agroforestry practices were also made to remedy the problems of wood energy,
siltation of water points, fruit species disappearing.
These local knowledges confirmed by the physico-chemical plant species contribute to
improve the health of rural and urban populations, food security and management of
forest resources.
Keywords: Climate Change, Adaptation, Health, Food, Forestry
INTRODUCTION
Si une certaine combinaison de la moralité narcissique et de nos intérêts de base ne
permet pas de réduire la vulnérabilité, alors peut-être de bonnes analyses et un
engagement politique le permettra. Une meilleure analyse des vulnérabilités peut aider
à répondre où et comment la société peut s´investir pour réduire la vulnérabilité (Ribot,
2009). L´adaptation au changement climatique est un véritable défi, vu les chocs
manifestes dans les multiples secteurs d´activités. Le Burkina Faso a connu
d’importantes sécheresses, notamment en 1965-1966, de 1972 à 1974, de 1981 à 1984,
en 1986-1987, en 1991-1992 et en 1994-1995 (OMM, 1995; Usher, 1997). Les effets de
la sécheresse sont transversaux, et il en résulte de graves répercussions directes sur
l’agriculture, les ressources hydriques et la végétation naturelle ainsi que des
conséquences indirectes sur la santé, l’économie et les institutions. Ces crises
climatiques recurrentes ont entrainé un éveil de conscience par rapport à la
vulnérabilité et aux actions d´adadaption au changement climataique (DMP, 2006 ;
PANA, 2006). Parmi les secteurs les plus vulnérables, ceux de la santé, de la sécurité
alimentaire, de la foresterie ou de l´environnement en général constituent une grande
préoccupation. Des structures ministérielles de la recherche scientifique et des
innovations, de la santé, de l´environnement et du developpement durable ainsi que les
projets, les programmes, les ONGs et associations s´investissent dans les stratégies de
reduction des effets nefastes des changements climatiques (CAPES, 2006). Les
populations affectées ne sont pas en reste de ces engagements. C´est aisnsi que dans le
cadre de la gestion durable des reserves de biosphère de l´UNESCO-MAB ces travaux ont
pour objectifs d´évaluer le savoir local des populations en matière de reduction de la
vulnérabilité au changement climatique dans la reserve de biosphère de la Mare aux
Hippopotames. De façon spécifique il s´agit d´examiner les différents événements liés au
changement climatique ces dernières decenies et d´analyser les pratiques d´adaptation
envisagées par les populations dans les domaines de la santé, de l´alimentation et de la
foresterie.
SITE DE L´ETUDE
La Réserve de Biosphère de la Mare aux hippopotames, se situe dans la région de
l´Ouest du Burkina Faso entre 11°30’ et 11°45’ N et entre 04°05’ et 04°12’O (figure 1).
Elle s´étend sur une superficie de 19 200 ha avec une mare permanente de 660 ha.
Différentes zones caractérisent cette Réserve, notamment ses zones centrale, tampon
et intermédiaire. Parmi la diversité de paysages on note les parcs agroforestiers des
villages environnants. Le climat y est de type sud-soudanien avec des précipitations
allant de 1000mm à 1200mm. La reserve bénéficie d’une grande diversité de paysages
et donc de milieux. C’est ainsi qu’on y trouve des parcs agroforestiers dont l’importance
nous intéresse dans cette étude.
Figure 1 : localisation de la Reserve de Biosphère de la Mare aux Hippopotames
MATERIEL & METHODES
Les enquêtes
La méthode PAPoLD (Participatory Analysis of Poverty and Livelihood Dynamics) a été
développée par le projet Safeguard (sauvegarder les droits des pauvres aux terres cruciales
et à l’eau), pour analyser la dynamique du statut socioéconomique des paysans, c’est à dire
en fonction du temps (ICRAF, 2005). Cette méthode est un outil d´évaluation des conditions
socioéconomiques des producteurs après un évènement lié aux changements climatiques.
Le producteur pourrait évolué de la prospérité à la pauvrété et vice-versa. Dans chaque
village, la population a identifíé les évènements qui ont eu des impacts percutants sur leurs
conditions de vie. Les repercussions sur leurs santé, alimentation et foresterie ont été
repertoriées. Ensuite un questionnaire a été soumise aux populations afin d´identifier les
pratiques d´adaptation dans ces différents secteurs. Les populations interrogées étaient
constituées d´hommes et de femmes de toutes les catégories d´âges, vieux, adultes et
jeunes.
Analyses de données
Chaque producteur s´identifie dans une des classes de prospérité définie de façon
consensuelle par l´ensemble de la population et ainsi des proportions par classe sont
calculées. Pour apprécier l´intensité des chocs du au changement climatique les indices
de risque ont été calculés :
Les indices de risque
Les indices de risque ont été calculés de manière participative selon la méthode de
SMITH et al. (2001) et QUINN et al. (2003). Nous avons ensuite procédé par le calcul des
indices de vulnérabilité pour réaliser le graphique des chocs pour chaque village à partir
des équations ci-après :
index de sévérité Sj = 1 + (r-1)/(n-1)
r = rang de la menace (par ordre d’importance selon le participant)
n = nombre total des menaces énumérées par le participant
Nous calculons ensuite la moyenne pour tous les participants qui ont listé une certaine
menace. Pour ce qui est de la sévérité des chocs (allant de 1à 2), une faible valeur
traduit une grande sévérité.
Index de risque (0-1) : Rj = Ij/Sj
Ij = type de menace x-fois listé/nombre de participants
Les informations sur les stratégies d´adaptations synthétisées dans les tableaux
prennent en compte les actions communes aux quatre villages.
RESULTATS – DISCUSSION
Les principales répercussions du changement climatique en 1994, 1995, 2005
Les quatre villages de la zone d´étude ont connu des évènements liés au changement
climatique au cours des années 1994, 1995, 2005. Les types de variabilité climatique qui
sévissent dans les villages ont été appréhendés par la précocité (novembre-décembre)
de l’harmattan et la violence du vent en hivernage ; la fréquence accrue des vents
chargés de poussières ; une mauvaise répartition des pluies souvent accompagnées
d´intenses tonnerre ; les hausses de températures de l´ordre de 40 °C pendant les
périodes de mars-avril et de faibles températures d´environ 14°C dans les périodes de
décembre-janvier. Les perturbations pluviométriques marquées par une baisse des
précipitations et du nombre de jours de pluies, par des poches de sécheresse en juin-
juillet ou juillet-août ; de nombreuses pluies avortées ; la réduction du nombre de
bonnes pluies durant toute une saison (environ 6 bonnes pluies) ; des pluies avec plus
de tonnerre ; des poches de sécheresse qui peuvent atteindre 25 jours. Dans le secteur
de la santé on note une recrudescence de maladies connues et inconnues. Les
populations sont confrontées á une insécurité alimentaire et aux problèmes de
dégradation des terres et de la végétation. Suite à ces années difficiles, les répercussions
se traduisent par des mouvements des exploitants d’une classe à une autre ou
simplement d’un niveau de la classe à un autre. En effet 19% de producteurs ont évolué
des classes de moyennement nantis á la classe des nantis. Tandis que 32 % ont connu
une regression quittant les classes des nantis et des moyennement nantis pour se
retrouver parmi les démunis ; 42% des producteurs avouent n´avoir pas changé de
niveau de prospérité mais ce groupe est en majorité composé de personnes démunies.
Le tableau I présente un certan nombre de chocs vécus caractérisés par leurs indices de
sévérité et d´incidence. Les innondations, la sécheresse, la déforestation, la famine, les
maladies, le tarissement des rivières présentent de faibles valeurs de sévérité.
Les moyens de subsistance des populations rurales, tout comme des communautés
vivant de productions agrosylvopastorales, restent extrêmement sensibles aux
mutations des indicateurs environnementaux (CTA, 2009)
Tableau I : Les valeurs d’incidence et de sévérité dans l’ensemble des villages riverains
de la Réserve de Biosphère de la Mare aux Hippopotames
N° Chocs donnés par les Hommes Incidence Sévérité
1 Sécheresse 0,7 1,1
2 Maladies 0,5 1,4
3 Pauvreté 0,2 1,5
4 Dégradation des sols 0,3 1,6
5 Déforestation 0,3 1,2
6 Manque d’eau 0,4 1,7
7 Disparition maraîchage 0,1 2,0
8 Problème Foncier 0,2 1,3
9 Mécanisation agricole 0,2 1,7
10 Famine 0,2 1,4
11 Disparition faune 0,2 2,0
12 Vents violents 0,3 1,6
13 Mortalité humaine 0,1 1,7
14 Diminution fruitiers 0,3 1,7
15 Manque Bois 0,1 1,6
16 Disparition pêche 0,2 1,4
17 Exode 0,2 1,9
18 Divagation des animaux 0,1 1,8
19 Tarissement rivière 0,2 1,4
20 Ver de guinea 0,1 1,6
21 Inondations 0,1 1,0
Adaptation dans le secteur de la medecine traditionnelle
Les tableaux II, III, IV et V présentent les principaux chocs ressentis et les mesures
d´adaptation en ce qui concerne la santé infantile, celle des adultes pendant les
périodes de vents et de fortes /faibles températures et les maladies survenant en toute
période de l´année. Au préalable notons que toutes les personnes interrogées affirment
que les maladies sont de nos jours plus douloureuses que ce qu´elles étaient il y a deux
à trois decenies passées.
Ces résultats revèlent que la medecine traditionnelle est essentiellement basée sur
l´utilisations de produits végétaux même si pour certaines maladies des produits
d´origines animales sont utilisés (Guinko, 1993). Par conséquent la question sur la
gestion durable de ces espèces Les vertues de la plupart de ces plantes et leurs
propriétés physicochimiques sont confirmées (Nalcoulma, 1996). Cependant dans le
traitement de la maladie, la medecine traditionnelle fait appel à des incantation, des
rituels, des interdictions, des sacrifices. Ces actions visent à obtenir le consentement
des ancêtres ou appaiser la colère des dieux (CAPES, 2006). Mais la plupart des maladies
infantiles sont juste traitées sur la base de propriétés physico-chimiques des plantes.
Ce qui est important de souligner est que chaque phase du changement climatique est
accompagnée d´un cortège de maladies et les populations rurales sont à l´avant-garde
par leurs savoir-faires traditionnelles. Des mesures d´adaptation sont prises pour
chacune de ces périodes.
Tableau II : Maladies infantiles et soins par les savoirs locaux
Maladie soignée Espèce Nom vernaculaire
(Bobo)
Partie utilisée
Disposition
Oedèmes Parkia biglobosa Noù Feuilles Laver l´enfant avec décoction et boire
Diarrhée Faidherbia albida
Bakané
Gousses ou Ecorces
Piler les gousses ;
laisser sejourner dans l´eau quelques 15 mn ;
boire la substance
Saba senegalensis
Fruits immatures
Piler les fruits ; laisser sejourner dans l´eau quelques 15 mn ;
boire la substance
Dermatoses Securidaga longepedonculata
Siessa Feuilles Se laver et boire la décoction
Amaigrissement Parkia biglobosa Noù Feuilles Decoction, se laver
Tremblements et frayeurs chez l´enfant
Vitellaria paradoxa Mòng Jeunes feuilles bourgeon
Piler les bourgeons ; diluer ; recueillir la substance et boire 3 à 4 fois / jour
Selles vertes Vitellaria paradoxa Mòng Feuilles débarassées des nervures principales
Piler les feuilles, diluées et recueillir la substance et boire
Faiblesses musculaires
Combretum glutinosum
Wabadara Feuilles et branchettes
Buoillir ; laver l´enfant et le faire boire
Maladies inconnues
Tapinanthus dodoneifolius (sur Dichrostachys spp) + Anona senegalensis
Sankoro mamonè + Leguéré
Feuilles Bouillir, boire
Pouls cardiaque élévé
Afrormosia Yantènèsso Feuilles Decoction de feuilles ; se laver et boire
Maux de ventre Cassia sieberiana Kakana Ecorce Sécher l´écorce et piler; diluer la poudre et boire
Furoncle Calotrpis procera Yinafougoudano
Latex des rameaux
Appliiquer le latex sur le furoncle
Anorexie Tapinanthus spp
Vitellaria paradoxa
Guiera senegalensis
Mamomè
Mong
Fifini
Feuilles Decoction , boire, se laver
Tableau III : Maladies liées aux vents et aux fortes températures
Maladie soignée
Espèce Nom vernaculaire
(Bobo)
Partie utilisée Dispositions
Méningite Détarium microcarpum
Kikiré Fruits
Feuilles
Sucer la pulpe des fruits ; boire la decoction des feuilles
Rougeole Burkea africana +
Pteleopsis suberosa
+
Azadirachta indica
Kolosio
+
Popossi
+
Niim
Feuilles
Badigeonnage de poudre de feuilles séche
Se laver á la dernière phase de la maladie
Varicelle Azadirachta indica
Detarium microcapum
Niim
Kikiri
Feuilles Badigeonnage de poudre de feuilles séche
Maux d´yeux Tapinanthus dodoneifolius (sur Piliostigma reticulatum)
Tèbè-mamonè Branchettes munies de feuilles
Se laver les yeux avec la decoction
Fièvre jaune Terminalia macroptera
Kogli-sini Racines Bouillir les racines, boire et se laver
Par rapport aux maladies stimulées par les vents et les faibles températures (tableau
IV), Eucalyptus camaldulensis est surnommé roi des maladies respiratoires pour son
efficacité contre le rhume, les bronchites, la grippe et l´asthme. Il est couramment
appélé « écalitis ou calitis » qui est une deformation de Eucalyptus.
Tableau IV : Maladies liées aux vents et aux faibles températures
Maladie soignée
Espèce Nom vernaculaire
(Bobo)
Partie utilisée Dispositions
Rhume Blighia sapida + Cassia
Kùh + Kinakina Feuilles Decoction,
sieberiana boire, se laver
Eucalyptus camaldulensis
- Feuilles Decoction, bain de vapeur ou inhalation
Toux Faidherbia albida
Sòn Ecorce Boire la decoction de l´écorce
Asthme Eucalyptus camaldulensis
- Feuilles Decoction, bain de vapeur ou inhalation
Bronchite Eucalyptus camaldulensis
- Feuilles Decoction, bain de vapeur ou inhalation
Grippe Eucalyptus camaldulensis
- Feuilles Decoction, bain de vapeur , gargarisme, inhalation
Tableau V : Maladies de toute période
Maladie Espèce Nom Partie utilisée Dispositions
soignée vernaculaire
(Bobo)
Paludisme Mitragyna inermis + Nauclea latifolia + Anogessus leocarpus
Kala + Tineboùn + Didiri
Feuilles Bouillir, se laver et boire
Maux de tête Bridelia ferruginea
Idenfié Feuilles Bouillir, prendre un bain de vapeur
Maux d´oreilles Acacia nilotica Bakina Gousses Piler les fruits frais, diluer, recueillir la substance et mettre des gouttes dans l´oreille
Maux de dents Ximenia americana
Kengkeng Racines Detacher l´écorce des racines, sécher, piler ; buoillir les racines sans écorces, melanger la poudre avec la substance et frotter légèrement la dent
Plaie Ceiba pentandra
Péré Ecorce Ecorce pilée malaxée dans du beure de
karité ; appiliquer sur les plaies
Fatigue E insignus +
Psedoceudrela cotchii + Burkea africana
Yelerekènè + sèré + kolosio
Branchettes munies de feuilles
Bouillir, boire, se laver
Sorcellerie et mauvais génies de la nature
Exalobus m.
Combretum m.
Detarium mic
Combretum glutios
Anona senegalensis
Crossopterix feb
Teleops. Suberosa
Tremalégré
Tienfuru
Kikiri
Wabadara
Legéré
Dèmolo
Poupoussi
Feuilles Bouillir , boire, se laver
Hémorroides Saba senegalensis
Bou Feuilles Bouillir les feuilles, se laver et boire
Aux côtés de ces plantes ligneuses medicinales existent un certain nombre d´herbacées
utilisées contre les maladies respiratoires, le rhume, les problèmes cardiaques. En effet
l´ail (Allium sativum), le gingembre (Siphonochilus aethiopicus) , la citronnelle
(Cymbopogon citratus) qui sont des plantes aromatiques sont couramment utilisées
pour ces soins. Certaines des plantes aromatiques sont employées non seulement pour
leurs vertues médicinales mais aussi comme boissons parfumées (Ng´ang´a, 2010).
Adaptation dans le secteur de l´alimentation
Les espéces alimentaires sont consignées dans le tableau VI suivant. Les 26 plantes
alimentaires (leurs organes) recensées sont utilisées soit crues, soit dans la préparation
de sauces, de couscous, de gâteaux, comme jus de boisson ou comme marmelade. La
période de récolte varie selon les plantes et pour la même plante selon les parties
recherchées. Ces différences dans les périodes de disponibilité des produits sont un
avantage pour combler les besoins alimentaires des populations. Leurs usages sont
surtout intensifiés en temps de disette ou de mauvaise campagne agricole. Leur
composition chimique montre un certain équilibre énergétique à la consommation
(Millogo et Guinko, 1996 ; Zoungrana et al., 1992). Les fruitiers sauvages jouent un rôle
capitale dans l´alimentation de ces populations rurales. Ils contribuent à la lutte contre
l’insécurité alimentaire et la pauvreté en milieu rural (INERA-CRDI, 2009). L´importance
alimentaire de toutes ces espèces est confirmée par la recherche bibliographique. La
plupart des produits forestiers non ligneux issues des espèces énumérées contiennent
du fer, du calcium et des vitamines B1, B2, B3 et C en proportions importantes dont
l´importance est scientifiquement démontrée (Ouédraogo, 1994). Le rôle majeur des
fruits mais surtout des feuilles et jeunes pousses est d’apporter des vitamines A, B1, B2,
C, et PP. Ce sont également des sources de calcium, de phosphore et du fer. Les fruits
sont les uniques sources de vitamine C du régime alimentaire (Bergeret et Jesse 1990).
Les feuilles de Adansonia digitata détiennent le record absolu en matière de calcium et
de phosphore. Le fer est toujours présent dans les feuilles de cueillette et, en moindre
mesure dans les fruits. Par exemple, la pulpe des fruits de Tamarindus indica est riche
en vitamine C ; celle de Parkia biglobosa est riche en vitamine A, B1, B2, C, et PP et
contiennent 60% de sucre (Zoungrana et al. 1992). La pulpe des fruits de Vitex doniana
est très riche en vitamine A, ce qui la rend efficace contre la cécité nocturne (Tiquet,
1985). Par le brassage ethnique et les échanges, la consommation des fleurs de Bombax
est devenue commune dans plusieurs régions du pays. Nous convenons avec Palé (Cité
par Bognounou, 1993) que les plantes alimentaires participent en temps normal à
l’équilibre du régime par leur apport de vitamines et oligo-éléments ; dans les périodes
de soudure elles contribuent largement au régime et au maintien de son équilibre ; en
période de disette, elles assurent la survie.
Tableau VI: Usages de vigt six espèces promues pour l´alimentation dans les villages
riverains de la Mare aux Hippopotames
Espèces
Famille
Disponibilité Partie consommée
Fe Fr
Fl Forme de l´alim.
Adansonia digitata Bombacaceae X x Sauce, bouillie
Fe :SP ; Fr :SS
Annona senegalensis Annonaceae X x Fr. Cru; sauce (Fe)
SP
Psidium guajava Myrtaceae x Fr. Cru SP
Bombax costatum Bombacaceae X X Sauce SS
Ceiba pentandra Bombacaceae X x SS
Crateva religiosa Capparaceae X Sauce SS
Detarium microcapum Caesalpiniaceae x SS
Diospyros mespiliformis Ebenaceae x Fr. Cru SS
Ficus sycomorus Moraceae x Fr. cru SS
Gardenia erubescens Rubiaceae x Fr. Cru SS
Grewia bicolor Tiliaceae x X Fr. Cru SS
Landolphia heudelotii Apocynaceae X x Jus, couscous
SP
Lannea microcapa Anacardiaceae x Fr. Cru SS
Leptadenia hastata Asclepiadaceae X Sauce,
Couscous
SP
Parinari curatelifolia Chrysobalanaceae X x SS
Parkia biglobosa Mimosaceae x Poudre, gâteau, bouillon
SP
Saba floribunda Apocynaceae x Jus, sucettes
SP
Saba senegalensis Apocynaceae x Jus, sucettes
SP
Sclerocarya birrea Anacardiaceae x
Elaeis guineensis Arecaceae x Huile,sauce
SP
Strychnos spinosa Loganiaceae X Couscous SP
Tamarindus indica Caesalpiniaceae X x Jus, bouillie
Fe : Tout temps (Fe) ; Fr : SS
Vitellaria paradoxa Sapotaceae x Fr cru ; beurre
SP
Vitex doniana Verbenaceae x Sauce SS
Ximenia americana Olacaceae x Sucettes Tout temps
Ziziphus mauritiana Rhamnaceae x Sucettes, gâteaux
SS
Adaptation dans l´exploitation forestière
La déforestation et la dégradation constatées au fil du temps ont entraîné des difficultés
d´approvisionnement en bois d´énergie et en charbon de bois. Toutes les femmes
interrogées (100%) affirment aller à 3-5 km loin de leurs habitations pour la recherche
de bois d´énergie. Les régénérations naturelles assistées (RNA) sont entreprises par les
personnes de toutes catégories d´âge pour la restauration des terres dégradées.
Cependant les plantations et les RNA sont le plus souvent faites dans les parcs
agroforestiers. Nous avons aussi noté qu´un certain nombre de totems concourrent à la
restauration de la végétation. En effet il est strictement interdit à tous de couper du bois
vert de Afzelia africana, Diospyros mespiliformis, Erythroploem guineensis, Ceiba
pentandra, Cola laurifolia et Isoberlina doka. Il est interdit aux femmes de faire la cuisine
avec le bois de ces espèces au risque d´être frappé par un malheur. Ces interdits
existent à l´endroit de la faune sauvage. Ils peuvent varier d´un village à l´autre. Dans le
village de Sokourani,, tuer ou manger l´hippopotame et le crocodile est un totem. Ils
sont considérés comme des ancêtres du village. L´iguane sauva un ressortissant de Bala
de la mort par suite de vol d´igname dans un champ. Avec les règlementations
forestières la population n´est pas autorisée à tuer la faune. Il est également interdit de
tuer les serpents boa à Bala, même s´ils rentraient dans une cour. Sinon la campagne
agricole serait catastrophique.
La mare est la première ressource autour de laquelle gravite la diversité et les
exploitations forestières. L´état de la végétation et des ressources forestières dépendent
de celui de la Mare. Les problèmes ressortis au niveau de la Mare sont la reduction de sa
profondeur dûe à l´ensablement, la baisse de la densité et de la diversité des végétaux,
le tarissement précoce et la reduction de la diversité faunique. Les actions d’adaptation
entreprises pour la protection des berges sont : Augmentation des superficies cultivées,
cela conduira les producteurs à s´éloigner d´avantage de la mare. Des plantations
d’arbres et les RNA sont faites suite aux inondations qui ont provoqué la mort de
nombreux jeunes plants déracinés et emportés par l’eau ; Des diguettes et les cordons
pierreux ont été réalisées. Les Comités Villageois de gestion des Terroirs sensibilisent la
non pratique de feux de brousse inutiles dans les villages.
CONCLUSION
L’ensemble des plantes médicinales de la Réserve de Biosphère de la Mare aux
Hippopotames constitue un outil capital pour les naturalistes, les tradithérapeutes, les
pharmacognosistes, les pharmaciens, les centres de santé et les aménagistes. Les
espéces alimentaires constituent un véritable grenier d´éléments nutritifs pour l´homme
en ces temps-ci où le changement climatique menace la sécurité alimentaire. De telles
études doivent être entreprises dans toutes les parties du pays car, avec la diversité
ethnique du Burkina Faso (plus de 60 ethnies), des possibilités d’échanges d’usages
peuvent être exploitées à travers la promotion de l’intérêt alimentaire. Cela sous-
entend que les populations rurales en Afrique disposent de connaissances endogènes
qui devront être exploitées, renforcées et vulgarisées pour de meilleures pratiques
d´adaptation au changement climatique. Cependant des études d’approfondissement
devront être orientées sur la non toxicité des plantes retenues en pharmacopée
populaire de même que la posologie des différentes recettes. Les projets
d’Aménagement en cours pourraient développer des stratégies de conservation, de
restauration et de production compatibles avec le développement local des plantes
aujourd’hui menacées de disparition.
REMERCIEMENTS : cette étude a été financée par le projet UNESCO-MAB/PNUE-GEF sur
les réserves de biosphère dans 6 pays de l’Afrique de l’ouest. Les auteurs remercient les
populations des villages qui ont permis le bon déroulement des travaux
REFERENCES
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TIQUET 1985 - Les arbres de la brousse au Burkina Faso, Centre d'études économiques et
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ZOUNGRANA I., ZOUNGRANA C., MILLOGO-RASOLODIMBY, J. (1992): Les plantes
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UNU-Inst. Res. Nat. en Afrique.
Rivaldo Kpadonou
Innovations paysannes d’adaptation à la vulnérabilité climatique dans la basse vallée de l’Ouémé
Rivaldo A. B. KPADONOU1, Patrice Y. ADEGBOLA1, Silvère D. TOVIGNAN2
1Programme Analyse de la Politique Agricole (PAPA) de l’Institut National des Recherches Agricoles du Bénin (INRAB). BP: 128 Porto-Novo, Bénin, Tél: (229) 20212773, e-mail: [email protected]
2Faculté d’Agronomie (FA) de l’Université de Parakou (UP), Département d’Economie et de Sociologie Rurales (ESR), BP 123 Parakou, BENIN, e-mail: [email protected]
Remarque :
Vous trouverez dans cet extrait quelques éléments sur l’article. La version complète et mieux documentée et détaillée vous sera envoyée sous peu.
Résumé
1. Introduction
Le changement climatique constitue aujourd’hui une menace majeure pour le développement durable. Selon GIEC (2007), les communautés pauvres notamment d’Afrique sub-saharienne seront les plus vulnérables du fait de leur faible capacité d’adaptation et leur grande dépendance des ressources à forte sensibilité climatique telles que les ressources en eau et les systèmes de production agricoles. Déjà dans de nombreuses situations, les conséquences environnementales et sociales du rechauffement global ont mis en péril la survie de nombreuses populations dans les pays en développement où l’agriculture demeure le levier de l’économie et la principale source des denrhées alimentaires. Toutefois, même s’il est largement admis que les communautés pauvres seront les plus affectées par le rechauffement global, l’ampleur de cette vulnérabilité dépend énormément des caractéristiques écologiques et socio-économiques de chaque communauté. Lesquelles caractéristiques rendent certaines sociétés plus exposées aux effets néfastes du changement climatique que d’autres. C’est le cas par exemple des populations de la basse vallée de l’Ouémé qui vivent dans des écosystèmes lacustres déjà fragiles. Ces populations majoritairement agricoles, vivent dans des conditions écologiques très précaires caractérisées par des inondations périodiques et régulières qui menacent leur bien être socio-économique. Or, les risques d’aggravation sont importants avec la menace du changement climatique qui pèse sur leur système de production essetiellement manuel. En effet, il est établi selon les modèles climatiques, que les événements de fortes précipitations, les inondations dévastatrices et les vagues de chaleur continueront à devenir plus fréquents dans le monde avec d’importantes variabilités annuelles et saisonnières. On devra donc s’attendre au cours des années à venir à des situations contrastées alternées de sécheresse et d’excédents pluviométriques avec l’augmentation des catastrophes hydro climatiques.
Du coup, développer des stratégies d’adaptation pour atténuer la vulnérabilité climatique et sécuriser les moyens d’existence est une priorité immédiate pour les ménages agricoles de la basse vallée de l’Ouémé. L’adaptation aux stress climatiques étant selon Ader et kelly (1999) un processus qui prend racine dans la socialisation et l’apprentissage, il est nécessaire de comprendre les manifestations actuelles des contraintes climatiques sur le bien être des populations et les stratégies endogènes d’adaptation pour que des mesures durables soient prises pour réduire la vulnérabilité des populations. Ainsi, ce papier présente les innovations paysannes mise en place par les populations de la basse vallée de l’Ouémé en réponse à leur contexte climatique particulièrement vulnérable.
2. Zone d’étude
L’étude est réalisée dans la basse vallée de l’Ouémé au Sud-Bénin. Cette zone représente l’aire géographique délimitée par le delta inférieur du fleuve Ouémé qui constitue le plus grand bassin fluvial du Bénin. Le fleuve Ouémé, principal cours d’eau du bassin, s’étend du nord au sud sur une longueur de 510 km (Lalèyè et al., 2004). Le contour réel du bassin est peu précis et est énormément déterminé par l’importance des crues. La basse vallée représente le déversoir du bassin où sont accumulées toutes les eaux collectées de l’amont du fleuve vers son delta. Son relief est peu marqué avec une pente très faible favorisant l’étalement et la propagation des crues sur de grandes superficies de plaines inondables, fertiles et favorables aussi bien à la production agricole qu’à la pisciculture.
Mais, la valorisation de ce potentiel agricole est fortement déterminée par le régime hydrologique du fleuve dont les hauteurs et les débits annuels subissent des variations notables et influencent les conditions agro-écologiques du milieu. D’année en année, le régime pluviométrique subit des mutations qui se traduisent par une diminution ou un accroissement du niveau des crues (Chikou, 2006) avec pour conséquence un prolongement ou un raccourcissement des durées de l’étiage. Cette variabilité climatique qui s’amplifie davantage, constitue de véritables menaces aux moyens d’existence des populations dont la vie socio-économique est étroitement liée aux pulsations du fleuve Ouémé.
3. Vulnérabilité climatique dans la basse vallée
a. Vulnérabilité de l’agriculture
La pratique des activités agricoles dans la basse vallée l’Ouémé est étroitement liée aux pulsations du fleuve Ouémé. En fonction des mouvements du fleuve, les populations installent les cultures de décrue dans les plaines inondables pendant l’étiage, suivie de la monoculture du maïs en période de crue et dans une faible mesure du petit élevage. L’intensité des activités agricoles et surtout des cultures de décrue, est déterminée par le régime du fleuve Ouémé notamment du niveau des crues et de la durée de l’étiage. En effet, l’importance de la crue constitue un élément déterminant de la production agricole dans la vallée de l’Ouémé. Lorsque la crue est précoce et importante, le delta est noyé très tôt, ce qui cause des inondations des récoltes du maïs pluvial et détermine également la durée de l’étiage et de la crue. Dans les cas où la durée de la crue est très longue avec un étiage tardif (années très humides), l’installation des cultures de décrue
accuse des retards, ce qui réduit la durée de la saison. Du coup, il s’en suit une baisse considérable des rendements de ces cultures notamment des cultures à cycle long tels que les légumes dont les récoltes sont surprises par des inondations. Par contre en année très sèche, il peut ne pas se produire de crue du tout (Welcome, 1971 ; Lalèyè et al. 2004). Selon Moniod (1973), dans le delta de l’Ouémé en année sèche, il n’y a pratiquement pas de débordements du fleuve. Dans ces cas, le niveau de la nappe phréatique et de l’eau retenue dans les plaines est très faible ; l’étiage est précoce et les plaines inondables se dessèchent rapidement affectant ainsi et par défaut d’eau, les rendements des cultures de décrue. Toujours pendant ces années sèches caractérisées par une faible pluviométrie et/ou une mauvaise répartition des pluies, l’installation du maïs pluvial accuse du retard et les récoltes de cette saison sont englouties par des inondations. Quel que soit le schéma considéré, les pertes sont importantes et peuvent atteindre 100% et affectent aussi toute la population. Ce qui provoque un véritable endettement des paysans. L’élevage est aussi vulnérable par la pression parasitaire qui règne dans le milieu et le noyage périodique des animaux par les inondations.
b. Vulnérabilité sanitaire
La basse vallée de l’Ouémé est milieu lacustre très favorable au développement et à la multiplication des agents pathogènes. Hostile à la vie humaine, elle constitue cependant pour les populations riveraines le refuge le plus idéal. En pareille circonstance, les risques d’épidémie liés aux maladies hydriques telles que le paludisme, la diarrhée et le choléra sont très grands et les plus vulnérables sont les enfants. Cette vulnérabilité sanitaire est aggravée par la fragilité des logements construits sur pilotis en matériaux précaires et très peu résistants aux inondations périodiques dans la zone. Ainsi, les habitations se ruinent fréquemment sous la pression des inondations mettant ainsi les populations hors abri.
4. Innovations paysannes d’adaptation
a. Aquaculture dans les Whédo
L’élevage traditionnel des poissons dans les « whédo » est l’une des plus ingénieuses et les plus anciennes stratégies d’adaptation développées par les populations de la vallée de l’Ouémé pour se prémunir de leur vulnérabilité climatique. Les « whédo » sont des trous piscicoles construits depuis l’époque médiévale dans plaines inondables du fleuve
pour piéger et capturer les poissons sauvages lors de l’étiage. Bien que cette pratique relève d’une époque très ancienne, elle a été améliorée au fil du temps et s’impose actuellement comme la stratégie majeure d’adaptation aux menaces climatiques dans la basse vallée de l’Ouémé. La technique des whédos constitue une des plus remarquables innovations développées par les popultaions de la basse vallée de l’Ouémé pour tirer profit de la succession des crues dans les plaines inondables et donc de leur vulnérabilité climatique. Les trous traditionnels à poissons creusés dans les plaines inondables servent de refuges aux poissons migrants pendant la crue. A l’étiage, ces poissons migrants sont emprivoisés et deviennent des proies faciles pour les paysans. Les « whédo » fournissent un large éventail d’avantages économiques et sociaux aux populations pour lesquelles ils constituent une source de diversification des revenus. En effet, l’aquaculture en « whédo » génère des revenus réguliers qui permettent non seulement d’atténuer la vulnérabilité des paysans face aux risques climatiques, mais aussi de financer les activités agricoles. Cependant, on note depuis plusieurs années une baisse des revenus issus de cette activité qui serait due à l’appauvrissement des cours d’eau conjugés aux effets du changement climatique. Ce qui traduit le manque d’ Toutefois, selon Imorou-Toko (2007), une amélioration de la productivité des « whédo » est fort possible par une mise en charge et l’alimentation artificielles d’espèces piscicoles adaptées.
b. Whéta et Botà : Zones de prédilection l’agriculture de décrue
Malgré la vulnérabilité climatique des exploitations agricoles de la basse vallée de l’Ouémé, elles ont su développer au fil du temps une remarquable faculté d’adaptation en pratiquant dans les plaines inondables une agriculture diversifiée en décrue suivie d’une monoculture du maïs en hivernage. Mais, faute de maîtrise d’eau, les rendements agricoles sont énormément influencés par les variations climatiques qui engendrent des inondations précoces et/ou un dessèchement rapide des plaines inondables. Dans ce contexte, les « whéta » (digues des trous à poissons ou whédo), jadis creusés dans les plaines inondables en vue de piéger les poissons migrant pendant la crue, sont devenues des zones de prédilection pour la culture de certaines spéculations notamment des légumes. En effet, les « whédo » outre leur usage traditionnel pour la capture des poissons, sont devenus de par leurs digues (whéta) les lieux privilégiés pour le maraichage pendant la décrue. L’importance de la hauteur des whéta permet en réalité de préserver les cultures de décrue du dessèchement rapide des plaines inondables et/ou des risques d’inondation des récoltes. Etant donné le succès enregistré du maraîchage sur les « whéta » (digues des trous à poissons) et la faible étendue de
ceux-ci, les paysans ont aménagés dans les plaines inondables de longues diguettes appelées « botà » uniquement pour les cultures de décrue notamment du piment, de la tomate et des légumes feuilles. Il s’agit en fait de hautes planches d’une largeur d’environ 2 à 4m et dont la longueur dépend des capacités du paysan et de la longueur de son champ. Mais, même si ces différents types d’aménagement permettent aux paysans d’améliorer l’humidité des sols en période de décrue et de réduire les risques d’inondations en hivernage, il est important de noter qu’ils sont très exigeants en ressources. De plus, aussi bien les « whéta » que les « botà » s’érodent périodiquement sous la pression des inondations et nécessitent d’être réaménagées après chaque passage de la crue. Toutefois, les « whéta » et les « botà » demeurent les principales stratégies endogènes utilisées par les paysans de la vallée de l’Ouémé pour atténuer leur vulnérabilité climatique. Ainsi, une modernisation de ces techniques constituerait une meilleure option pour renforcer les capacités d’adaptation de ces populations au changement climatique.
Mbaye Dieng Renforcement des capacités d’adaptation de la société civile aux effets des changements du climat La décentralisation des processus décisionnels au Sénégal et au Mali offre des opportunités non encore pleinement exploitées pour améliorer la participation communautaire dans l'’élaboration et la mise en œuvre des politiques de développement. Il convient de souligner que la décentralisation contribue à promouvoir le principe de la participation communautaire dans les processus décisionnels d’une part et d’autre part à renforcer la subsidiarité ainsi que l’apprentissage de l’autonomie par les communautés de base. Ces dynamiques tendent à favoriser l’émergence d’un leadership local. Cependant dans les zones de Bakel (Sénégal) et de Kayes (Mali), qui sont confrontées aux conséquences du changement climatique, la non maitrise des textes régissant la décentralisation apparait comme une contrainte supplémentaire à l’impulsion d’une dynamique de développement local. La présente communication porte sur la stratégie de communication développée par LEAD Afrique francophone dans le «partage de l’information sur les changements climatiques en milieu communautaire à Bakel et Kayes». Ce projet est structuré autour d’un objectif de renforcement des capacités d’adaptation des institutions et des communautés locales afin qu’elles puissent faire face aux effets du changement climatique. Le constat qui est à l’origine de sa formulation est le suivant : les populations ont une perception claire des changements climatiques et développent des tactiques et des stratégies en vue d’atténuer les effets induits par la variabilité et le changement climatique : baisse de la pluviométrie, dégradation des terres de cultures, tarissement précoce des mares temporaires, déficit de pâturage, etc. Le projet a adopté une démarche originale qui consiste à placer les initiatives locales et l’action communautaire au cœur des interventions. Conformément à cette option, LEAD développe une stratégie de communication visant à favoriser le partage de l’information entre les différents acteurs. Le diagnostic communicationnel établi au démarrage des activités du projet a révélé les radios communautaires constituent le médium approprié pour discuter des questions liées aux changements climatiques. La stratégie de communication met le focus sur l’adaptation par l’échange et le partage. Cette communication de proximité qui s’appuie sur les radios communautaires et les causeries d’information et de sensibilisation permet de toucher toutes les catégories et couches sociales qui sont interpellées par les effets des changements climatiques. Dans le cadre de l’expérience du projet, les radios communautaires constituent des supports efficaces de communication en direction des communautés locales. Elles bénéficient d’un immense auditoire surtout en milieu rural où chaque foyer dispose d’au moins d’un poste radio. En partenariat avec la radio communautaire Jida FM de Bakel, le projet a assuré la production et la diffusion d’une émission hebdomadaire dénommée «A Gube y axa a ma joxii» (en langue locale majoritaire, le soninké), et qui a contribué à poser la problématique des changements climatiques.
Les causeries d’information et de sensibilisation constituent également une dimension importante de la stratégie de communication du projet. Les séances d’information et de sensibilisation se déroulent parfois sous forme de projections de films en milieu rural suivies de débats. Elles constituent des moments d’échanges féconds entre les populations et les experts du projet. Une autre composante de la stratégie de communication développée par LEAD concerne la diffusion à grande échelle d’un film réalisé à Bakel et dont le titre est assez évocateur :
«where whe used to fish now we grow food». La projection de ce film en milieu rural est généralement suivie d’échanges et de discussions. Au moment où se déroulait la COP 15, le projet a diffusé en live à Bakel et à Kayes les sessions de négociation qui se tenaient à Copenhague. Les émissions diffusées par les radios communautaires te les séances de discussion avec les communautés ont permis aux populations rurales de suivre les péripéties de la Cop et de prendre connaissance en temps réel des résultats de cette rencontre internationale.
On retiendra en résumé que l’approche du projet vise à renforcer la capacité de résilience des communautés et des organisations de la société civile face aux changements climatiques. A cet effet, l’accent est mis sur un message clair et précis : les impacts de la variabilité des changements climatiques se font sentir aujourd'hui, et il est impérieux que des actions soient menées.