Dans la taule, c’est le grand jour.
Thomas passe en appel, 7 ans qu’il attend.
C’est long 7 ans, ça porte sur le système, ça crée des liens aussi.
Michel en sait quelque chose. Lui est là, disons... peut-être pour
perpète, si un coup de sang venait à lui reprendre.
Y’a que le Youri, le petit dernier, qui est là juste pour un petit tour,
un petit tour d’expérience. Youri, écorché par sa mère et une
société sans demie-mesure.
Ces trois-là vont et viennent entre leurs errances, leurs déchiru-
res, leur passé qui n’en finit pas de repasser comme des vagues
qui cognent contre les quatre murs de leur cellule commune.
Ici, l’enfermement apprend à trouver sa place parmi les hommes.
En quête de liberté, les taulards, capitaines solitaires, naviguent
entre les maux d’une humanité décomposée. A vif, ils révèlent
leur vraie nature, riche et meurtrie, celle qui se cache derrière les
barreaux de la vie.
Durée : 1h15
le texte Intentions De mise-en-scèneL’humanité qui se dégage de ce huis-clos carcéral m’a boulever-
sée, elle nous renvoie à notre propre vécu, à notre besoin d’éva-
sion. On se surprend à rire souvent, tant l’humour est présent dans
les petits faits et maux du quotidien, paradoxe d’une possible
liberté au sein-même de l’enfermement.
La prison détruit. Pourtant, ici, la vie reste vivace.
Il est donc possible à l’homme écrasé de se relever, digne et
confiant dans son avenir. C’est ainsi que les trois taulards
arrivent à se réchauffer à la chaleur de leurs âmes.
Ici, les mots crus claquent et s’échappent de la solitude, la
violence s’exprime en sourdine, il s’agit de tuer le temps, de faire
taire l’ennui, pour donner une chance à l'avenir.
Dans un décor où la géométrie hiérarchise l’individu et lui
confine sa place choisie et inviolable, un seul terrain commun :
les chiottes.
Ici, on est dans la vie, la vie intérieure des taulards, leurs
sensations, leurs sentiments, viscéralité de l'être.
La vérité du jeu et la sincérité des mots est au coeur de mon
travail de mise-en-scène. C’est l'acteur qui fabrique, artisan de
l’histoire, manipulateur du silence.
Il sera un cri, une rage, un imaginaire, un espoir, une intimité
avec lui-même et le spectateur.
Il n’y a pas de représentation dans mon théâtre, mais un
moment d’instantanéité pris sur le vif des émotions, comme
une photographie animée.
Marie Régnier-Le Stanc, septembre 2012
J’ai écrit Les Taulards comme un cadavre exquis, c’est-à-dire en me
promettant de ne jamais relire ce que j’avais écrit la veille, et cela
jusqu’à la dernière ligne. Je me suis ensuite donné la contrainte
suivante : chacun des personnages n’avait droit qu’à une seule
phrase par réplique. Depuis, j’y ai beaucoup retravaillé pour donner
à ces trois taulards leur cohérence et leur profondeur.
Au final, Les Taulards est une pièce sur l’enfermement plus que sur
la prison. Elle raconte trois hommes en quête de vérité, en mal
d’humanité, à fleur de soleil et de liberté.
Comment re-faire, dé-faire sa vie sans pouvoir en sortir ?
L’humour et la distance, l’insolence et la violence, l’apprentissage
et l’oubli comme seules résistances au temps qui passe, au temps
qu’ils passent à se rêver naviguer, à travers les murs et les
barreaux de leur existence, sur une mer tumultueuse et salutaire.
Une seule porte de sortie : l’imaginaire et sa poésie, celle de la vie.
Philippe Nicaud, mars 2012
la Distribution
... et à La mise-en-scène
Philippe Nicaud. Auteur-compositeur-interprète, il se retrouve
très vite sur scène en tant que comédien. Depuis 15 ans, il joue
Molière, Marc Dugowson, Shakespeare, Botho Strauss. Ses plus
beaux rôles, Macbeth, le colonel Verchinine ou encore Teuliers
dans Les Loups, l’amènent à écrire sa première pièce, M ou Les
Blessures silencieuses, un monologue qu’il joue à Paris et dans
plusieurs festivals. En parallèle, il tourne pour la télé et le cinéma.
Il est Michel dans Les Taulards, qu’il a écrite en 2011.
Jacques Démarre. Architecte de profession, initié très jeune aux
textes de théâtre par sa mère, passionné d’échec, il joue des
auteurs classiques et modernes : Y. Reza, E. Manet, E.-E.Schmitt,
L. Bellon, A. Krithoff, A . Tc h e k h o v, Marivaux, et remporte plusieurs
prix d’interprétation masculine dans des festivals. Il a récemment
joué J.-L. Lagarce, H. Levin et H. Pinter. Il participe à de nombreu-
ses lectures. Au cinéma, il joue pour J.-P. Mocky dans Le Deal.
Il est Thomas dans Les Taulards.
Olivier Bruaux. Oscillant longtemps entre deux passions, l’an-
glais et le théâtre, il se forme au Théâtre Angellier de Lille et joue
dans Lady Windermere’s Fan, Les Sorcières de Salem ou Un
tramway nommé Désir. Après plusieurs apparitions dans la série
Samantha oups ! et au cinéma, il s’épanouit au théâtre dans des
rôles comme Chéréa dans Caligula, le chevalier Lennox dans
Macbeth, ou Pierre dans Pierre et Papillon. Il crée Radio Cinéma,
la web-revue Cinéphoto et le magazine I Love Cinema.
Il est Youri dans Les Taulards.
Thomas : Vous saurez jamais ce
que c’est que d’aimer.
Michel : T’as une drôle de façon
d’aimer !
Youri : A i m e r, c’est comme un
grand mouvement de va et vient,
non ? (geste obscène)
Michel : T’es vulgaire.
Thomas : Ça te dépasse, t’es
pas apte à comprendre, tu viens
juste de finir ton acné, et l’amour
tu sais le faire qu'à une main. Un
jour, peut-être....
Youri : Et les chiottes, c’est pour une ou pour deux mains ?
Michel : Vous n’avez aucun style les mecs. Quand je pense qu’on t’a
donné la chance d’aller à l'école, Youri, c’est navrant.
Youri : L’école, ça empêche pas d’être con.
Michel : Non, mais ça empêche de dire des conneries.
Michel : Gamin, je regardais les zingues laisser des traînées blanches
dans le ciel. Je rêvais d’y voir des mots écrits, parfois je voyais un arbre,
un éléphant... Et puis t'as la réalité qui te rattrape. Tu vois ta mère en
pleurs dans la cuisine qui se bat avec elle-même (...) parce qu’elle a peur
d’affronter la vie toute seule sans son tyran... Et toi, quand t’as pris ta
trempe, tu la regardes et tu
voudrais lui dire : « Maman,
pleure pas, je t'aime ». Mais
tu peux pas parce que t’as
mal au ventre et sur le côté, là,
tout près des côtes, et qu’au
fond, tu lui en veux à mort de
l’avoir laissé faire ce salaud.
Mais tu le sais pas, t’es trop
petit. Alors pour oublier que ça
fait mal, tu regardes les
zingues laisser des traînées
blanches dans le ciel.
Marie Régnier-Le Stanc. Marie étudie l’art dramatique à Paris puis se forme à la mise en
scène, la communication et la direction d’acteurs. Par la suite, elle dirige des stages et des
ateliers d’improvisation et fonde la compagnie "Les Arts
Masqués" avec pour devise : « Jouons les auteurs contem-
porains vivants ! ». Elle met en scène plus d'une trentaine
de spectacles : René de Obaldia, Edward Albee, Matei
Visniec, Xavier Durringer, Denise Bonal, Pierre Notte... Elle
est sollicitée par de nombreuses compagnies où elle inter-
vient en tant que consultante.
Philippe Nicaud, qu'elle a dirigé sur plusieurs spectacles, lui
propose la mise en scène de sa pièce Les Taulards.
Contact :
06 15 91 96 44
www.facebook.com/pages/Les-Taulards/104756826352984
Photos : Marie Régnier-Le Stanc. Conception graphique : Céline Spang.