LES TROUBLES NEUROVISUELS
CHEZ L’ENFANT :CÉCITÉ CORTICALE ET DÉFICIENCE VISUELLE
S A R A H G U I L L E M A I N
P SYC H O L O G U E - N E U R O P SYC H O L O G U E
Séjour d’échanges Québec
30 octobre 2014
PRÉSENTATION DE L’INSTITUT MONTÉCLAIR
� Etablissement médicosocial
� Accueil d’enfants déficients visuels de 0 à 20 ans
� L’offre de service:
� SAFEP (Service d’Accompagnement Familial et
d’Education Précoce) 06 ans
� SAAAIS (Service d’Aide à l’Acquisition de l’Autonomie et
l’Intégration Scolaire) 620 ans
� SEES (Section d’Education et d’Enseignement Spécialisé)
620 ans
LE MÉTIER DE PSYCHOLOGUE SPÉCIALISÉ EN
NEUROPSYCHOLOGIE
Psychologie Master 2 = BAC +5Loi du 25/07/1985
Statut : cadreCode de déontologie (1996)
Du développement
Du travail
Cognitive
Neuropsychologie
Sociale
Clinique
DÉFINITION
La neuropsychologie :
« traite des fonctions mentales supérieures dans leurs rapports avec les structures cérébrales »
Hécaen et Lanteri-Laura (1983)
PRÉSENTATION DE LA FONCTION DE NEUROPSYCHOLOGUE
� Enfants DV avec problématiques scolaires ou professionnelles et/ou cognitives
� Mission d’accompagnement
� Soutien psychologique
� Prise en charge neuropsychologique: bilan à viser identification des besoins et
rééducations (pas de diagnostic)
� Identification des systèmes préservés vs déficitaires en jeux dans l’échec scolaire
� Sensibilisation aux difficultés singulières (guidance parentale)
� Indiquer des préconisations pour l’entourage (famille, corps enseignant, équipe)
� Proposer des séances de rééducation (valoriser les points forts et compenser les
fragilités)
� Entretenir le lien avec l’environnement de l’enfant afin d’optimiser l’autonomie /
adapter l’environnement / cohérence des prises en charge / aide à l’orientation
ETUDE DE CAS: MATHILDE
� Contexte familial
� Contexte médical
� Bilan sensoriel
� Contexte scolaire et de socialisation
� Le bilan neuropsychologique
� Les épreuves proposées
� Les résultats
� Les pistes dégagées et les préconisations
� Evolution
� Conclusion
� Problématique
MATHILDE: CONTEXTE FAMILIAL
• Jeune fille de 8 ans
• 2ème d’une fratrie de 2
• Vit avec ses deux parents
• Père: monteurvendeur en optique
• Mère: responsable ressources humaines
• Aucun antécédents familiaux
CONTEXTE MÉDICAL
• Grossesse: née à terme 38 SA
• J+3: Diagnostic d’hyper insulinisme dans un contexte d’hypoglycémie compliqué de convulsion
• Séquelle neurologique
• Retard psychomoteur et visuel
• IRM cérébral: nécrose étendue, substance blanche et grise des lobes occipitaux et pariétaux postérieur correspondant à des séquelles anoxoischémique
• Plus de traitement épileptique depuis l’âge de 9 mois, sans récidive. Ni de traitement insuline
• À 5 mois: complication d’une thrombose portale, varices œsophagiennes
• Ce jour: déficit cognitif et déficience visuelle d’origine corticale
BILAN SENSORIEL: OPHTALMOLOGISTE
� Différents termes… (Atteinte corticale, Malvoyance neurologique, Déficience visuelle par cécité corticale)…
� Aggravée par une myopie et un astigmatisme
� Evaluation précise de sa vision impossible en raison de l’âge, du niveau intellectuel, et de la complexité des tableaux dans le cas d’atteinte corticale
� Suivis ophtalmologiques et orthoptiques réguliers
BILAN SENSORIEL (2)
� Se déplace bien mais se cogne souvent
� Pas de difficulté à l’obscurité
� Luminosité: a des verres solaires pour le soleil bien toléré
� Fait du vélo avec des roulettes
� Ecriture en apprentissage
� Commence à écrire les lettres de son prénom
� Ecrit gros
� Commence à lire quelques lettres
� Vie quotidienne, assez autonome, mange seule, s’habille quasiment seule
BILAN SENSORIEL (3)
� Aide optique: agrandis et pupitre
� Poursuite saccadée mais ne perd pas la cible
Bilan orthoptique:
Fluctuant selon les capacités attentionnelles
Champ visuel (illustration)
Question travaillée en binôme orthoptiste/neuropsy
Héminégligence ou champ visuel rétréci?
= Héminégligence car non spontanée
mais avec verbalisation et indiçage c’est possible
CONTEXTE SCOLAIRE ET DE SOCIALISATION
� PS en sept 2009 (psychomotricité et orthophonie)
� MS en 2010
� AVS depuis 2010 12h par semaine
� Redouble MS en 2011
� GS en 2012 (suivi SAFEP)
� 2013 et 2014 : scolarisation en CLIS (Classe pour
Intégration Scolaire) avec AVS Collective
� Effectif = 12 enfants
� Vie sociale: fait de la piscine, est bien intégrée dans le
groupe classe, a des amis
� Rééducation: orthophonie, orthoptie, neuropsychologie
une fois par semaine
LE BILAN NEUROPSYCHOLOGIQUE
� 1er bilan neuropsychologique: décembre 2012
� 2ème bilan neuropsychologique: septembre 2013 (bilan d’évolution)
� Demande émanant de la famille et de l’équipe éducative
� Recueil de données auprès de l’équipe pluridisciplinaire
� Entretien clinique avec la famille
� Mathilde est dispersée et fait tout pour se faire remarquer
� Entretien clinique avec l’enfant
� beaucoup plus calme, accepte le cadre sans difficulté
� Observation des comportements: agréable et souriante, bonne
coopération, mais trouble attentionnel important observé tout le
long de l’examen nécessitant de nombreuses pauses
LES ÉPREUVES PROPOSÉES
� WPPSI III (Echelle d’intelligence de Weschler)
� Figure de Rey pour tout petit (visuo construction
et planification)
� Orientation de lignes de la Nepsy
�Représentation et analyse spatiale
� Observation clinique: comportements sociaux et
psychologiques, langage, attention
� Evaluation des praxies
� CMS (épreuves de mémoire épisodique verbale)
ANALYSE DES RÉSULTATS
� Sur le plan psychologique: confiante, à l’aise dans la relation à
l’adulte, non inquiète de l’examen
Par ailleurs: ne semble avoir aucune conscience de ses difficultés
(« c’est pas grave »)
� Efficience intellectuelle (notes standards en dessous de la norme
dans l’ensemble des épreuves)
� Profil intellectuel situé en zone inférieure de façon homogène
� Age de développement cognitif inférieur à l’âge réel d’environ deux
à trois ans
� Comparaison des performances à une norme d’enfants de 4 ans:
deux épreuves plus chutées que les autres (une faisant appel à la
vision globale qui pénalise Mathilde et une seconde épreuve de
vocabulaire – trouble d’accès au lexique)
� En revanche, une épreuve est particulièrement réussie: celle faisant
appel aux capacités de raisonnement verbal
RÉSULTATS :FONCTIONS INSTRUMENTALES
� Langage:
� non fluent, peu informatif, ponctué par des difficultés
d’élocution (« mimière »/lumière, « blouque »/boucle,
« tapetévou » /rendezvous)
� Trouble d’accès au lexique facilité par l’ébauche orale
� Praxie:
� Evaluation difficile: mais difficultés observées en motricité fine
et en imitation de gestes simples
� Visuo construction:
� Production d’une figure impossible: trop complexe geste très
imprécis
� Test d’orientation de ligne déficitaire, montrant des difficultés pour
Mathilde d’orientation et d’appariement spatial
RÉSULTATS : FONCTIONS MNÉSIQUES
� Mémoire épisodique verbale:
� Possibilités de rappel en immédiat (note standard faible mais dans la norme) mais en rappel différé: incapacité de restituer les informations apprises
Néanmoins aidée en exercice de reconnaissance
� Note standard faible mais dans la norme
o Encodage possible mais Trouble de récupération
Les difficultés observées s’expliquent par le trouble important du langage qui vient pénaliser ce type d’exercice
� Mémoire à court terme et mémoire auditivoverbale peu efficientes
� Mémoire visuelle semble efficace
RÉSULTATS: FONCTIONS EXÉCUTIVES ET ATTENTIONNELLES
Au niveau exécutif:
� Quelques fragilités (difficilement quantifiable)
� Inhibition motrice difficile et très coûteuse (condition de go/nogo, tâche impossible)
� Processus de planification et de flexibilité non évalués
Au niveau attentionnel:
� Difficulté pour rester concentrée sur du long terme
� Nécessite encadrement particulier
ANALYSE DES RÉSULTATS
Conclusion:
� Retard de développement global retentissant sur l’ensemble des grandes fonctions supérieures, associé à une faiblesse attentionnelle importante pouvant entrainer des difficultés dans les situations du quotidien, et dans les apprentissages
� Avec troubles neurovisuels: mauvaise analyse de l’espace et héminégligence
� Points forts :
capacités de raisonnement verbal
� Points faibles:
présent dans tout ce qui fait appel au langage
et activités de visuoconstruction
LES PISTES DÉGAGÉES
LES PRÉCONISATIONS
� Par l’orthoptiste:
Pour optimiser sa prise d'information visuelle, il paraît souhaitable de:
� favoriser un bon contraste (couleur noir/blanc , tracé épais)
� grossir la taille des caractères en ARIAL 28
� privilégier des présentations ajourées
� rapprocher les documents avec un plan à inclinaison variable pour un meilleur confort postural
� éviter de solliciter sa vision de précision à une distance > à 1.5 m
LES PISTES DÉGAGÉES/LES PRÉCONISATIONS
� Par la neuropsychologue:
� Aménager des temps de pauses réguliers
� Activités ludiques et variées pour maintenir son attention
� Favoriser un environnement calme et stable lors des apprentissages (éviter les distractions)
� Limiter la multiplication des tâches simultanément
� Sollicitation sur activités faisant appel à de la manipulation concrète d’objets et éviter les consignes verbales complexes
� Pour pallier aux difficultés de langage:
� Utiliser la technique de réponse par appariement si possible
� Ébauche orale et désignation plutôt que la dénomination
LES PISTES DÉGAGÉES/LES PRÉCONISATIONS
� Mathilde a besoin de règles, qu’elle peut tout à fait
respecter, et qui l’aident aussi à se repérer et à identifier le
temps de travail
� Sur le plan scolaire: important d’espacer et d’épurer les documents, garder un effectif réduit type CLIS
� Organiser pour elle et décomposer les consignes, tout en
prenant largement en considération ses besoins visuels et
les conseils donnés par l’orthoptiste, afin d’optimiser les
différentes prises d’informations
� Séances de rééducation neuropsychologique
proposées ayant pour objectif de travailler
quelques stratégies attentionnelles et
exécutives dans un premier temps
EVOLUTION: 2014
� Grande évolution sur le plan du langage
� Vocabulaire plus riche, meilleure compréhension
� Effort de prononciation
� Enfant volontaire et très scolaire, apprécie beaucoup
l’école
� Sur le plan attentionnel: idem mais accepte mieux le cadre
scolaire et de rééducation
� Efficience intellectuelle: stabilité des performances
� Persistance des troubles neurovisuels (visuoconstruction,
organisation dans l’espace)
CONCLUSION:
� Enfant avec problématique très complexe:
� ni uniquement déficience visuelle
� ni uniquement trouble neurovisuel
� mais une multitude de difficultés qu’il faut bien comprendre pour pouvoir
prendre en charge et aider l’enfant à être autonome et à se développer
� Méthode de travail en pluridisciplinarité:
� comme pour tout accompagnement mais d’autant plus pour les
problématiques complexes
� Travailler ensemble avec un maximum de cohérence en plaçant toujours au
cœur de notre travail l’enfant et son environnement
� Faire du lien avec l’entourage (familial et scolaire)
� Eclaircir les points forts et les faibles
� Transmissions des préconisations
EN CONCLUSION
Le (neuro)psychologue propose une expertise qui
n’est possible que grâce à la coopération des
différents intervenants.
PROBLÉMATIQUE
� Comment travailler avec la complexité de ces différents
troubles?
� Bien différencier le trouble visuel du trouble neurovisuel
� Les équipes en place sont très bien formées pour la
prise en charge de la déficience visuelle
� Quid de la prise en charge neurovisuelle ?
� Quid du bilan orthoptiste/ neuropsy?
� Formation nécessaire
� Adaptation des prises en charge aux nouveaux besoins
aujourd’hui mieux identifiés
� Habitudes de travail qui changent (ressemblance des
troubles mais grandes différences à prendre en compte)
� Technique de rééducation différente
AUJOURD’HUI
� Besoin de faire le point sur les avancées
scientifiques à ce sujet
� Comment ces troubles sont pris en charge ce
jour dans d’autres endroits ?