Le renforcement des relations entre partenaires techniques et financiers et organisations de la société civile en Tunisie : de la logique de l’assistance à l’exigence du partenariat
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SOMMAIRE
Introduction ................................................................................................................................................. 2 1. Considérations méthodologiques ............................................................................................................ 3
1.1. Objectifs de l’étude .......................................................................................................................... 3 1.2. Méthodologie utilisée ...................................................................................................................... 3 1.3. Précisions lexicologiques .................................................................................................................. 4
2. Acteurs de la société civile et partenaires techniques et financiers dans une Tunisie en transition ....... 5
2.1. La société civile dans la Tunisie postrévolutionnaire : de nouveaux défis pour une nouvelle ambition .................................................................................................................................................. 5 2.2. Les partenaires techniques et financiers, un acteur depuis longtemps présent mais devenu plus visible au lendemain de la Révolution du 14 janvier 2011 ...................................................................... 8
3. Evaluation qualitative des relations entre organisations de la société civile tunisienne et partenaires techniques et financiers ............................................................................................................................ 11
3.1. Les relations entre partenaires techniques et financiers et organisations de la société civile au cours de l’élaboration des stratégies et de la planification des actions ............................................... 11 3.2. Les relations entre partenaires techniques et financiers et organisations de la société civile dans l’exécution des programmes et des activités ........................................................................................ 14 3.3. Les relations entre partenaires techniques et financiers et organisations de la société civile dans la phase d’évaluation des programmes et des activités ....................................................................... 17 3.4. Diagnostic d’une composante transversale : l’état de la communication entre les partenaires techniques et financiers et les organisations de la société civile .......................................................... 19
4. Recommandations en vue de l’amélioration des relations entre les organisations de la société civile et les partenaires techniques et financiers en Tunisie ................................................................................... 22
4.1. Assurer une coordination efficace entre les partenaires techniques et financiers ....................... 22 4.2. Légitimer et améliorer l’élaboration des stratégies des partenaires techniques et financiers ...... 23 4.3. Assurer un traitement équitable, adapté et efficace en faveur des associations .......................... 24 4.4. Améliorer le processus d’exécution des activités .......................................................................... 24 4.5. Inscrire le processus d’évaluation dans une logique de partenariat .............................................. 25 4.6. Instaurer un climat de transparence et de confiance entre les organisations de la société civile et les partenaires techniques et financiers grâce à une meilleure communication ................................. 26
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Introduction Dès les premiers lendemains de la Révolution du 14 janvier 2011, la présence et l’activité des partenaires techniques et financiers en Tunisie ont connu une évolution substantielle. D’une part, les différentes agences de coopération et bailleurs de fonds internationaux déjà installés dans le pays ont été rapidement amenés à reformuler leurs stratégies après les événements qui ont conduit au départ du président déchu Ben Ali, afin de soutenir les associations dans leurs premières expériences dans différents domaines ; d’autre part, des organisations internationales n’ayant pas encore de filiales en Tunisie y ont installé leurs bureaux, nationaux ou régionaux, pour accompagner un processus médiatisé à l’échelle mondiale. De son côté, la société civile a effectué sa propre révolution, en se débarrassant de la l’emprise étatique et en ambitionnant de gagner l’indépendance et l’autonomie qui lui permettront d’être un acteur à part entière dans la construction d’une Tunisie nouvelle et démocratique. Elle a pu, dans cette perspective, compter sur l’appui des partenaires techniques et financiers pour renforcer ses capacités, se familiariser avec la gestion des projets et conduire des activités qui ont couvert un large champ de thématiques, parmi lesquelles on trouve, de manière fort logique, celles relatives à la citoyenneté, à la promotion de la démocratie et de l’Etat de droit et celles relatives au développement régional. Très tôt en réalité, plusieurs questions se sont posées, face à l’importance des fonds disponibles et mobilisés : les partenaires techniques et financiers vont-‐ils remplacer l’Etat et ses collectivités locales dans l’assistance aux associations ? Les thématiques choisies pour être financées sont-‐elles élaborées de manière concertée et répondent-‐elles aux aspirations réelles et concrètes de la société civile tunisienne ? Les partenaires techniques et financiers coordonnent-‐ils, entre eux, leurs appuis aux associations tunisiennes ? Dans ce contexte, et à l’heure où la force de la société civile cherche à s’affirmer, où sa voix tente de se faire forte, et où l’Etat développe, de son côté, des stratégies et des outils de participation citoyenne (souvent d’ailleurs en coopération avec les structures internationales d’appui), comment concevoir une nouvelle relation entre les partenaires techniques et financiers et les associations, basée davantage sur la coopération et le partenariat que sur un paradigme entre assistants et bénéficiaires ? C’est à cette interrogation que le présent travail tente de répondre, en présentant d’abord et de manière succincte le développement et les champs d’intervention des deux acteurs, et en s’attelant ensuite à étudier les relations entre les deux parties tout au long du cycle d’intervention des partenaires techniques et financiers, de l’élaboration de leurs stratégies jusqu’à l’évaluation des activités conduites par les associations soutenues, en passant par les étapes d’exécution et de suivi des projets. La communication entre les bailleurs de fonds et les organisations de la société civile, thématique transversale, a en outre été considérée comme assez importante, et par les acteurs eux-‐mêmes, pour qu’une section du document lui soit spécifiquement consacrée. A partir du diagnostic réalisé et de l’analyse des informations récoltées, une série de recommandations ont été formulées afin d’envisager et d’identifier les moyens à mettre en œuvre en vue d’améliorer les relations entre les organisations de la société civile et les partenaires techniques et financiers, avec pour objectif affiché de passer d’une logique d’assistance à une logique de partenariat.
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1. Considérations méthodologiques
1.1. Objectifs de l’étude L’étude s’inscrit dans un objectif global de contribution à l’amélioration des relations entre les partenaires techniques et financiers et les organisations de la société civile tunisienne. Elle s’inscrit dans le cadre du Programme d’Appui à la Société Civile en Tunisie (PASC), financé par l’Union européenne et mis en place en collaboration avec le Gouvernement tunisien. De manière plus spécifique, l’étude se propose d'identifier les difficultés rencontrées dans les relations entre la société civile et les partenaires techniques et financiers, ainsi que de considérer le niveau et le degré de participation de la société civile à chaque étape du cycle d’intervention de ces derniers (élaboration des stratégies, formulation des appels à propositions, exécution des actions, suivi et évaluation). Ce diagnostic servira de base pour proposer les recommandations jugées pertinentes en vue de construire une nouvelle relation de partenariat entre les deux parties prenantes.
1.2. Méthodologie utilisée L’étude, dont les résultats sont présentés dans le présent document, est une étude qualitative basée essentiellement sur les pratiques constatées sur le terrain. Dans le cadre de ce travail, d’une durée totale de huit mois, l’orientation choisie a conduit l’équipe à adopter une méthodologie s’appuyant sur des outils de récolte de l’information et d’analyse complémentaires, et prenant soin d’associer, dans la mesure la plus large, les partenaires techniques et financiers et la société civile opérant à l’échelle locale, régionale et nationale :
- La recherche documentaire a permis de prendre connaissance des études réalisées dans le domaine des interventions des partenaires techniques et financiers et des mécanismes qui peuvent, en fonction des pays et des contextes, régir les relations entre ces derniers et les organisations de la société civile ;
- Les questionnaires, élaborés sur la base de la recherche documentaire, ont servi à collecter les opinions et les avis de 165 organisations de la société civile dans les 24 gouvernorats du pays, sur des aspects précis qui touchent principalement aux questions de communication entre les deux acteurs;
- Les entretiens de terrain, menés à Tunis et dans les régions, tant dans les chefs-‐lieux
que dans les zones péri-‐urbaines et rurales, ont aidé à infirmer ou confirmer les résultats des questionnaires, à approfondir le diagnostic préétabli et à prendre en compte les recommandations issues du terrain. 112 entretiensa ont été conduits de manière semi-‐directiveb pour laisser aux personnes interviewées une plus grande marge d’expression. Ces entretiens ont été réalisés dans 14 gouvernoratsc, choisis de manière à assurer un équilibre entre les régions côtières et les régions de l’intérieur et
1 Parmi lesquels 44 partenaires techniques et financiers, 65 représentants d’associations et 3 experts de la société civile tunisienne. 2 « L’entretien semi-directif est une technique qualitative fréquemment utilisée. Il permet de centrer le discours des personnes interrogées autour de différents thèmes définis au préalable par les enquêteurs et consignés dans un guide d’entretiens » in Euréval, Réaliser un entretien semi-directif 3 Ariana, Béja, Bizerte, Gabès, Gafsa, Kairouan, Kasserine, Le Kef, Médenine, Sfax, Sousse, Tozeur et Tunis.
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de prendre en compte la diversité des enjeux qui occupent chaque grand espace régional du territoire.
- L’atelier de réflexionda permis, enfin, de présenter aux18 participants, issus des partenaires techniques et financiers et de la sphère associative, les analyses et les recommandations réalisées par l’équipe en charge de la mission et de recueillir leurs avis et leurs préconisations en vue de consolider la qualité de l’étude.
Ce travail a amené l’équipe à intervenir sur l’ensemble du territoire tunisien, à l’échelle locale, régionale et nationale et dans les zones rurales, péri-‐urbaines et urbaines. Au total, 230 associations, 44partenaires techniques et financiers et 3 experts ont été consultés.
1.3. Précisions lexicologiques
L’étude vise à contribuer à l’amélioration des relations entre les organisations de la société civile et les partenaires techniques et financiers. A cet égard, la notion de société civile est susceptible de recevoir des définitions différentes, qui varient d’un pays à l’autre, voire d’une initiative à l’autre. A titre d’exemple, la communication 2012/492 de la Commission européenne définit les organisations de la société civile comme « toutes les structures non étatiques, à but non lucratif, non partisanes et non violentes, dans le cadre desquelles des personnes s'organisent pour poursuivre des objectifs et des idéaux communs, qu'ils soient politiques, culturels, sociaux ou économiques. Agissant à l'échelon local, national, régional ou international, elles comprennent des organisations urbaines et rurales, formelles et informelles »e. Dans le cadre du présent travail, et dans un souci d’offrir une vision à la fois compréhensible et globale, il a été choisi de définir la société civile comme l’ensemble des associations soumises au décret-‐loi n°88-‐2011 régissant les associations, à l’exclusion des organisations de la société civile qui sont soumises à un régime spécial, telles que les associations sportives, les associations de micro-‐crédit, les associations de chasseurs ou certaines associations professionnelles. Les associations de fait, les groupements informels de citoyens, les syndicats et les organisations du secteur privé ne sont pas, non plus, entendus comme faisant partie de la société civile dans le cadre de l’étude.
En ce qui concerne les partenaires techniques et financiers, il a été décidé d’opter pour la définition aux termes de laquelle les Partenaires techniques et financiers (PTF) désignent à la fois :
- les organismes multilatéraux de développement ; - les coopérations bilatérales ; - les agences spécialisées des Nations Unies ; - les fondations privées ; - et les organisations non gouvernementales internationales et régionales.
4 L’atelier de réflexion s’est déroulé à Tunis le 23 janvier 2014 et a réuni des partenaires techniques et financiers et des organisations de la société civile. 5Communication 2012/492 « Les racines de la démocratie et du développement durable: l'engagement de l'Europe avec la société civile dans le domaine des relations extérieures ». Disponible sur : http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=COM:2012:0492:FIN:FR:PDF
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2. Acteurs de la société civile et partenaires techniques et financiers dans une Tunisie en transition
2.1. La société civile dans la Tunisie postrévolutionnaire : de nouveaux défis pour une nouvelle ambition Le paysage relatif à la société civile tunisienne a connu des changements substantiels suite à la Révolution du 14 janvier 2011. Sur le plan quantitatif, plus de 6.000 nouvelles associationsf ont vu le jour au cours de ces trois dernières années, qui sont venues s’ajouter aux9115 associations dénombrées à la veille de la Révolutiong. Ce constat mérite néanmoins d’être précisé, sous l’influence de mouvements concomitants : d’abord, bon nombre d’associations que l’on qualifie souvent –au risque d’être approximatifs-‐ d’associations de l’ancien régime ont, dans une mesure qui est difficilement mesurable, disparu, parfois sous la pression populaire car assimilées –à tort ou à raison-‐ à la dictature et souvent parce que certaines d’entre elles ne constituaient que des coquilles créées à des fins de contrôle ou de propagande au bénéfice des autorités locales ou nationales en place; ensuite, les nouvelles organisations de la société civile, dont la mise en place a eu lieu dans une ambiance d’enthousiasme populaire, n’ont pas toutes « survécu » face aux obstacles devant lesquels elles ont pu se trouver et devant les exigences minimales, en termes d’expérience et de professionnalisme, nécessaires à la conduite du travail associatif. Enfin, il est à noter qu’une part non négligeable des membres ayant milité au sein des structures associatives dissidentes sous l’ancien régime, et qui l’avaient fait à défaut de pouvoir s’engager de manière ostensible au sein des partis politiques d’opposition, ont finalement migré ou réintégré le champ politique pour défendre leurs causes et leurs idéaux originels. Aujourd’hui, si la base de données d’IFEDA (centre d’Information, de Formation, d’Etudes et de Documentation sur les Associations) recense près de 16000 organisations de la société civile, il demeure difficile de connaître le nombre exact d’associations actives, ou du moins le nombre d’associations n’ayant pas abandonné leurs activités. Les témoignages recueillis sur le terrain, à la fois auprès des acteurs étatiques compétents et des experts et observateurs travaillant dans le domaine font état de moins de 5.000associations existantes, bien que ce chiffre soit lui-‐même impossible à vérifier. Sur le plan qualitatif, c’est le statut et les domaines d’intervention des organisations de la société civile qui ont également connu une révolution. Au regard du statut, outre le décret-‐loi n°88-‐2011 qui a consacré pleinement le principe de la liberté associative et régi le fonctionnement des associations, c’est un nouvel état d’esprit qui anime à présent les représentants de la société civile tunisienne : désormais libres, ceux-‐ci envisagent de manière nouvelle leur rôle dans le champ public, avec l’ambition d’œuvrer de manière active à la construction de la démocratie et de l’Etat de droit, en étant – selon le point de vue des acteurs eux-‐mêmes-‐ un partenaire de l’Etat, voire un organe de contrôle de ce dernier.
6 6869 associations créées entre 2011 et aujourd’hui, à savoir : 2103 associations en 2011 ; 3057 associations en 2012 ; 1659 associations en 2013 ; 50 associations au mois de janvier 2014 (informations fournies par le centre IFEDA (centre d’Information, de Formation, d’Etudes et de Documentation sur les Associations)) 7Idem.
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Dans cette perspective, ce sont les nouveaux domaines d’intervention de la société civile qui ont illustré l’émergence de nouveaux rôles pour les associations. Après avoir longtemps été des délégataires de services publics au profit de l’Etat, les organisations de la société civile se sont émancipées pour conquérir de nouveaux champs d’action qu’elles conduisent sans le soutien de l’Etat ou du moins sans que ce dernier soit l’initiateur des programmes ou des activités des associations. Il est à cet égard intéressant de comparer –sous réserve de l’abandon de la classification des associations opérée par le décret-‐loi n°88-‐2011-‐ les domaines dans lesquels œuvraient les organisations de la société civile avant la Révolution et celles dans lesquelles elles se sont impliquées au lendemain de celle-‐cih :
Si les domaines d’intervention des associations ont sans doute évolué et se sont diversifiés depuis 2012, l’examen de la situation sur le terrain montre que deux thèmes majeurs ont en réalité occupé l’attention de la société civile tunisienne au cours de la période de transition : la citoyenneté et l’Etat de droit d’une part, et le développement régional d’autre part. Il s’agit au demeurant d’une réponse logique aux aspirations des citoyennes et des citoyens affichées pendant les évènements qui se sont déroulés du 17 décembre 2010 au 14 janvier 2014 (mais
8« La gouvernance participative en Tunisie : améliorer la prestation des services publics à travers des partenariats État/citoyen », Banque Africaine de Développement.
66%
14%
7% 6%
6% 1% 0%
Répartition des associations par catégorie sous l'ancien régime
Artistiques et culturelles (6005)
Sportives (1281)
Développement (602)
Amicales (579)
ScientiBiques (495)
Générales (129)
Féminines (24)
10,80% 19,30% 20,90% 22,10%
24,90% 29,30% 30,50% 31,30% 32,90% 34,50% 35,30%
40,20% 43% 44,60%
47,40%
Médias Autres
Environnement Droits de la Femme
Démocratie Développement rural
Droits des enfants Emploi / Travail
Santé Droits humains Arts et culture
Jeunesse Développement
Education / Formation Lutte contre la pauvreté
Domaines d'intervention des associations après le 14 janvier 2011
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qui ont en réalité été l’aboutissement de luttes bien plus anciennes), et qui ont porté à la fois sur la démocratie et les droits humains et sur le développement régional et l’équité entre les territoires du pays. Dans les faits, si les associations tunisiennes sont portées par un souffle nouveau qui les pousse au dynamisme, les bases d’une société civile solide et efficace ne sont toujours pas totalement réunies. Le défi le plus important identifié par les associations est le manque de financement. En réalité, si les associations rencontrent globalement cette difficulté, il convient néanmoins de souligner le fossé qui sépare une minorité d’associations disposant de l’organisation, de l’expertise et des fonds nécessaires pour mener leurs activités, et une majorité d’associations éprouvant le plus grand mal à satisfaire leurs besoins de base. A ce titre, il est éloquent de constater que le budget annuel des associations peut, dans certains cas, se limiter à quelques dizaines de dinars et dépasser, dans d’autres, les 500.000 dinars, indiquant ainsi un déséquilibre criant au terme duquel un petit nombre d’associations dispose de ressources très élevées alors que la grande majorité d’entre elles se partage un volume modeste de fonds. Le faible niveau de mobilisation citoyenne par les associations est une autre lacune fondamentale de la société civile tunisienne actuelle. Les problèmes de leadership causent de graves difficultés aux associations, qui peinent à assurer leur légitimité et la représentativité des bénéficiaires sur le terrain. De la même manière, les associations souffrent de leur manque de capacités à s’organiser et à construire des réseaux solides et durables qui leur permettraient de mieux faire entendre leur voix. A côté de la fragilité qui caractérise encore la sphère associative tunisienne, un autre phénomène inquiète à la fois acteurs et observateurs : la politisation de la société civile. Sur le terrain, une partie non négligeable des associations reproduit et prolonge les batailles idéologiques qui clivent les partis politiques. De manière plus nette, un certain nombre d’associations agissent comme les statellites informelsdes partis politiques, intervenant dans des secteurs considérés comme clefs par ces derniers, avec pour objectif de toucher des électeurs potentiels, dans une Tunisie où l’habitude n’est pas encore de voter pour des programmes et où le clientélisme est encore présent. Les domaines d’intervention concernent principalement l’action sociale et la solidarité, mais touchent également l’éducation et la culture. Enfin, et trois ans après la Révolution, les organisations de la société civile éprouvent encore quelques difficultés en termes de capacités techniques. Au manque de maitrise des enjeux de fond liés aux thématiques qui les intéressent, les associations accusent des faiblesses en termes de gestion, de gouvernance et de compétence, ce qui peut s’expliquer par le manque d’expérience d’une société civile encore jeune et non développée. Le tableau qui suit, fruit d’une étude réalisée en 2012 par la Banque Africaine de Développementi, donne un aperçu des capacités des organisations de la société civile, dont l’évaluation a été faite par les associations elles-‐mêmes. On y constate que les difficultés concernent principalement la gestion, en particulier financière, mais également les compétences du personnel et les aptitudes à la médiation et au plaidoyer.
9Idem.
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Pour conclure, il convient de souligner qu’en dépit des nombreuses études conduites, l’état des connaissances relatives à la société civile est encore superficiel en l’absence à la fois d’une base de données des associations agissant sur l’ensemble du territoire, et surtout d’une actualisation régulière du nombre d’associations et des activités qu’elles conduisent. Ces éléments permettraient de disposer d’images en temps réel ou légèrement différé de la scène associative et d’entrevoir ainsi et de manière précise les développements relatifs aux associations, afin de mieux les accompagner et corriger les dysfonctionnements identifiés.
2.2. Les partenaires techniques et financiers, un acteur depuis longtemps présent mais devenu plus visible au lendemain de la Révolution du 14 janvier 2011 Les partenaires techniques et financiers se sont placé, avant la révolution, aux côtés des acteurs étatiques, et dans une mesure plus relative aux côtés des organisations de la société civile, pour soutenir la Tunisie, dans des domaines divers et variés. Cependant, ce soutien avait tendance à couvrir davantage des thématiques liées à l’économie solidaire, à la sauvegarde du patrimoine et à l’environnement qu’à celles concernant la démocratie, la liberté d’expression et l’Etat de droit. Les quelques partenaires techniques et financiers qui entreprenaient de s’investir dans ces domaines rencontraient les plus graves difficultés à le faire, face à l’acharnement de l’ancien régime contre les associations travaillant sur les questions de démocratie et de droits humains. Le plus souvent donc, cet appui prenait des voies informelles et s’opérait de manière discrète. Au lendemain de la Révolution, c’est un changement radical qui s’est produit pour les partenaires techniques et financiers, notamment grâce au décret-‐loi n°88-‐2011 qui permet,
0 20 40 60 80 100
Aptitudes au réseautage Accès Internet
Compétences du personnel Aptitudes au plaidoyer
Aptitudes à la médiation Management financier
Management
Auto-évaluation par les associations de leurs capacités
Très Bien
Bien
Limité
Faible
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sous certaines réserves, aux associations de bénéficier librement et en contrepartie d’une simple déclaration dans ce sens, des financements des bailleurs de fonds. Pendant au moins deux années, une profusion d’opportunités de soutiens à la société civile a vu le jour, soit par le biais de formations et de conférences, soit par des appuis à des projets, menés sur l’ensemble du territoire du pays. En l’absence de coordination entre les partenaires techniques et financiers, il n’est pas possible aujourd’hui de fournir un chiffre précis sur les sommes qui ont été mises en œuvre par l’ensemble des acteurs, mais l’examen de la situation sur le terrain conduit à en mesurer l’envergure, bien que celui-‐ci donne le sentiment que l’appui s’amenuise au fur et à mesure du temps. Ce soutien a pris, en fonction des mandats et des priorités déterminés par chaque acteur, des formes différentesj :
- Il est d’abord possible d’opérer une distinction, dans les modalités d’appui, entre les interventions directes ou indirectes des partenaires techniques et financiers : certains partenaires soutiennent directement les associations tunisiennes, alors que d’autres les appuient indirectement, à travers des organisations intermédiaires ou en fournissant des fonds à différentes agences des Nations Unies pour la mise en place de leurs projets ;
- Tout comme les modalités d’intervention, la dimension géographique des approches
varie en fonction des acteurs. Certains partenaires techniques et financiers s’inscrivent dans une stratégie régionale (Moyen orient et Afrique du Nord) :tel est le cas du programme MEPI (Middle East Partnership, Etats-‐Unis), du programme régional dano-‐arabe, de l’APPF (Arab Partnership Participation Fund, Grande Bretagne) et de l’ANSA (Affiliated Networks of Social Accountability, Banque mondiale). Cependant, d’autres intervenants, comme le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD), penchent pour une approche nationale ;
- Au regard des instruments et des outils utilisés, chaque partenaire dispose de ses
propres mesures. Ces interventions peuvent avoir des objectifs et des objets différents : certaines sont destinées à renforcer les capacités de la société civile –en termes de gestion de projets, d’élaboration de stratégies, de plaidoyer-‐, d’autres à mettre en œuvre des projets de terrain, soit dans des domaines sectoriels, soit dans des thématiques qui peuvent toucher à l’accès à l’information, à la gouvernance participative ou encore à l’évaluation des politiques publiques ;
- Il convient ici de signaler le rôle important qu’ont pu jouer les partenaires techniques et financiers au cours de la transition démocratique tunisienne, en apportant un savoir-‐faire inédit, en particulier pour mettre en place des expériences pilotes de démocratie participative à l’échelle locale, régionale ou nationale. Certains appuis ont même abouti à l’adoption de textes juridiques favorables à la société civile et à la démocratie en général, parmi lesquels le décret-‐loi n°2011-‐41 relatif à l’accès aux documents administratifs. D’autres soutiens se poursuivent d’ailleurs dans ce sens, et portent, notamment, sur la réforme du secteur de la justice ou encore sur la mise en
10Dont nous faisons ici état en s’inspirant largement de la « synthèse de la cartographie des interventions et des approches des partenaires techniques et financiers envers la société civile en Tunisie », étude réalisée pour le compte de l’Union européenne en avril 2013
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place de l’administration électronique ;
- Au regard des mécanismes de soutien, l’outil le plus fréquemment utilisé consiste dans les appels à propositions (Union européenne, PNUD, Institut Français de Tunisie (IFT), etc.). Cependant, dans bien des cas, les associations peuvent et sans appel de la part des partenaires techniques et financiers, déposer spontanément leurs candidatures ; tel est le cas, par exemple, du programme Middle East Partnership Initiative (MEPI). Par ailleurs, d’autres partenaires jouent un rôle d’appui technique sans fournir de soutien financier ;
- Le système de partage des informations relatives aux appels à propositions diffère
également d’un partenaire à l’autre. De manière générale, les partenaires techniques et financiers se contentent de faire état des nouvelles opportunités de financement sur leurs sites Internet et sur leurs pages Facebook. Toutefois, d’autres partenaires utilisent les différents sites du web chargés d’annoncer les opportunités de soutien à la société civile, en les accompagnant de sessions d’informations auxquelles le public associatif est invité et dont le but est d’expliquer ce qui peut être attendu des associations candidates dans l’élaboration du formulaire de proposition. Certains ont de leur côté entrepris de sillonner les régions dans le même but en fournissant, au besoin, des formations dans la rédaction des formulaires. Ceci étant, il est possible, et même si cet aspect sera plus longuement décrit dans la partie relative à l’évaluation qualitative des interventions des partenaires techniques et financiers, de dire que les efforts en termes de partage de ces informations demeurent assez faibles et ne permettent pas de toucher la majorité des organisations de la société civile ;
- L’accompagnement des associations dépend souvent de la capacité des partenaires
techniques considérés : à titre d’exemple, l’Union européenne, à travers son programme d’Appui à la Société Civile (PASC) a mis en place six bureaux de terrain à Tunis et dans les régions pour un appui de proximité aux organisations de la société civile ; le programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) a mobilisé une équipe permanente de cinq personnes encadrées par un consultant expérimenté pour le suivi des actions et le soutien des partenaires associatifs ; la coopération suisse a, de son côté, inauguré deux bureaux de terrain pour un suivi rapproché des actions et bénéficie de l’accompagnement de huit consultants pour le suivi et l’accompagnement des partenaires associatifs. Ces exemples, loin d’être exhaustifs, permettent d’entrevoir les différentes modalités d’appui appliquées par les partenaires techniques et financiers dans leurs actions d’accompagnement et de suivi.
Il existe en Tunisie autant de stratégies, d’approches, de modalités et d’outils d’intervention que de partenaires techniques et financiers. Analyser et conduire un diagnostic des ces acteurs comme un bloc n’aurait pas en réalité grand sens. Cependant, il existe certains points communs et surtout certaines faiblesses partagées sur lesquelles il est possible de se pencher et qui sont susceptibles de donner lieu à des recommandations afin d’améliorer l’environnement général et les liens qu’entretiennent ces partenaires techniques et financiers avec les organisations de la société civile. Ce sont ces lacunes qui seront discutées lors de la partie suivante du document, relative à l’évaluation qualitative des relations entre les deux parties prenantes.
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3. Evaluation qualitative des relations entre organisations de la société civile tunisienne et partenaires techniques et financiers Au delà des dynamiques et des défis qui animent respectivement les organisations de la société civile et les partenaires techniques et financiers, l’objectif du présent travail repose essentiellement sur une meilleure compréhension et un diagnostic des relations qui lient ces deux parties prenantes, afin d’entrevoir les champs d’amélioration possibles, condition d’un partenariat à la fois plus efficace et plus durable. Il a été choisi dans cette perspective d’examiner ces relations tout au long du cycle de travail des partenaires techniques et financiers, et qui comprend, d’abord, l’élaboration des stratégies et la planification des actions, ensuite leur exécution et enfin leur suivi-‐évaluation. Un enjeu transversal, relatif à la communication entre les associations et les partenaires techniques et financiers, sera également envisagé au sein de cette évaluation.
3.1. Les relations entre partenaires techniques et financiers et organisations de la société civile au cours de l’élaboration des stratégies et de la planification des actions Les entretiens de terrain, conduits à la fois auprès des partenaires techniques et financiers et des associations tunisiennes, révèlent la faiblesse essentielle voire l’absence de cette étape : certains partenaires techniques et financiers ne prennent, en effet, pas en compte les avis de la société civile pour décider de la stratégie et des actions qu’ils se préparent à conduire. Si cette opinion est partagée par la plupart des associations tunisiennes ayant bénéficié du soutien des partenaires techniques et financiers, et si le constat se trouve vérifié dans les faits, il n’en demeure pas moins que la responsabilité d’une telle « défaillance » est partagée par les deux acteurs : -‐ L’absence d’approche participative dans la définition de la stratégie est la grande faiblesse des partenaires techniques et financiers, aux côtés d’une mauvaise coordination entre les structures d’appui. L’on remarque d’abord que la décision relative à la mise en place d’une stratégie ou d’une approche particulière dépasse parfois les prérogatives de l’agence basée dans le pays. Autrement dit, les choix des axes ou des domaines d’intervention, la méthodologie adoptée, le public cible visé sont parfois du ressort d’une autorité de tutelle basée à l’international : pour les ambassades offrant un soutien à la société civile par exemple, le siège de décision est le ministère des Affaires Etrangères concerné ; pour des agences de coopération installées en Tunisie, il s’agit des ministères chargés de la coopération internationale respectifs et parfois même du Premier ministère ; les grandes organisations non gouvernementales internationales peuvent, elles aussi, être enclines à suivre la même démarche, la nature, le montant et les axes d’appui étant décidés au siège international de l’organisation. Il est ici possible de dire qu’à la décision purement technique et issue des besoins des populations, se substitue une décision politique, dans laquelle des facteurs externes de nature politique, médiatique et de réputation entrent en jeu et travestissent, dans une certaine mesure, les objectifs poursuivis. Dans ces hypothèses, l’agenda semble conditionner le soutien prodigué, au lieu que les besoins ne permettent de déterminer l’agenda.
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Dans le même sens, certains partenaires techniques et financiers choisissent d’adopter leurs stratégies en fonction d’une approche par mandat, ce dernier pouvant être thématique (démocratie, développement, éducation, environnement, migrations) ou orienté vers des publics cibles spécifiques (jeunes, femmes, personnes souffrant d’handicaps, groupes sociaux marginalisés, etc.). Ce choix au demeurant légitime, conduit en ne prenant pas en compte les réalités du terrain, à déconnecter les partenaires techniques et financiers des enjeux fondamentaux et à souvent tenter de transposer des aides standard à des situations différentes ; cette orientation peut être d’autant moins opportune lorsque l’on considère les pays bénéficiaires au sein d’ensembles régionaux (région arabe, région Middle-‐East North Africa (MENA))dont les réalités des pays qui les composent sont souvent difficilement comparables. Cette absence, dans plusieurs cas, de prise en compte des besoins et des capacités spécifiques de la société civile a conduit, assez souvent, à une disproportion entre le soutien apporté et les possibilités d’exécution de soutien. En Tunisie par exemple –mais cela a également été le cas de pays s’engageant dans une transition démocratique-‐, l’annonce des montants prévus pour les associations a conduit à des interrogations légitimes sur la capacité des organisations de la société civile à absorber de tels montants. Devant une situation dans laquelle les associations, encore jeunes et inexpérimentées, n’avaient pas les capacités techniques de gérer des budgets conséquents et n’avaient pas même encore été sensibilisées quant à leur rôle dans le champ public, une avalanche d’offres de financements a submergé, de manière aussi inattendue que rapide, les organisations de la société civile. Au-‐delà des bénéfices indéniables qu’un tel appui a pu apporter, plusieurs conséquences néfastes ont été constatées : d’abord, un nombre important de projets n’ont pu voir le jour et être finalisés à cause d’une incapacité des associations à les réaliser ;ensuite, sans une réflexion par les associations tunisiennes elles-‐mêmes sur leurs stratégies , ce soutien a amené les organisations de la société civile à choisir leurs actions en fonction des offres de financement et non en fonction des besoins qu’elles auraient identifiés; enfin, les montants en jeu, qui ont vocation à s’amenuiser au fil du temps, ont créé une atmosphère de compétition entre les associations et à lier irrémédiablement l’action associative à la disponibilité des fonds. Parfois, les partenaires techniques et financiers procèdent à une identification des besoins des associations ou des bénéficiaires avant d’élaborer leurs stratégies et leurs plans d’action. Cependant, cette démarche souffre, dans beaucoup de cas, d’une absence de participation des populations directement ou indirectement concernées. L’analyse en question, conduite dans la plupart des cas par des consultants ou des professionnels du conseil, laisse de côté la dimension participative et ne permet pas l’instauration d’un échange entre les partenaires techniques et financiers et la société civile selon une approche Bottom-‐up. Ce constat est d’autant plus à déplorer que les partenaires techniques et financiers encouragent les associations à promouvoir la démocratie participative et que certains projets initiés par ces derniers portent précisément sur la prise en compte par les acteurs étatiques des besoins des bénéficiaires. Le président d’une association, rencontré sur le terrain, a affirmé dans ce sens que « les bailleurs de fonds donnent des leçons qu’ils sont les premiers à ne pas appliquer ». Parmi les facteurs qui peuvent tenter d’expliquer cette réalité, l’on peut mentionner la centralisation –jugée excessive par certains-‐ des partenaires techniques et financiers, qui les privent d’une vision de terrain et les coupent des potentielles personnes ressources qui pourraient utilement les accompagner au niveau local et régional en vue de penser et décider leurs stratégies.
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Un dernier point, qui concerne les rapports qu’entretiennent, entre elles, les différentes structures d’appui au pays, mérite d’être évoqué. Si le cas n’est pas spécifique à la Tunisie, le manque de coordination entre les partenaires techniques et financiers conduit chacun d’eux à faire cavalier seul sans prendre en compte les dynamiques des autres acteurs présents sur le territoire. Il s’ensuit parfois une redondance d’activités dans la même thématique, sur le même espace territorial et quelques fois au profit des mêmes associations ou des mêmes bénéficiaires alors que de grands ensembles géographiques ne bénéficient d’aucun soutien. Une coordination des partenaires techniques et financiers semble dans ce sens nécessaire en vue d’une meilleure allocation des efforts et des ressources, et il y a tout lieu de profiter ici de l’expertise du groupe de coordination des partenaires techniques et financiers, dont le travail est assuré par l’Union européenne. -‐ L’absence d’engagement et de pro-‐activité des organisations de la société civile pour influencer les stratégies des partenaires techniques et financiers Il convient de souligner, préalablement aux constats qui vont suivre, qu’un nombre non négligeable d’organisations de la société civile tunisienne ne se considèrent pas à proprement parler comme des partenaires mais plutôt comme des bénéficiaires des différentes structures d’appui. Il en résulte que ces associations ne voient pas qu’elles ont la possibilité de conseiller les partenaires techniques et financiers ou d’orienter les stratégies de ces derniers dans un sens particulier. En réalité, plusieurs faiblesses empêchent la société civile tunisienne de jouer ce rôle de manière efficace :
- d’une part, les associations –et comme cela a été décrit plus haut-‐ n’ont pas mené, pour la plupart d’entre elles, de réflexion solide à la fois sur la définition de la société civile, son rôle et sa vision. A défaut d’avoir effectué ce travail, il devient difficile pour les associations, qui n’ont pas encore élaboré de stratégies pour elles-‐mêmes, d’accompagner des tierces parties pour le faire ; au-‐delà de cette conséquence, le manque de vision conduit les organisations de la société civile à s’adapter aux stratégies des partenaires techniques et financiers plutôt que de les influencer ;
- d’autre part, les organisations de la société civile rencontrent les plus grandes
difficultés à s’organiser et à se structurer afin de faire entendre leur voix de manière collective et efficace. C’est ainsi que bon nombre de réseaux mis en place de manière spontanée ou dont la création a été appuyée par des partenaires techniques et financiers n’ont pas survécu aux conflits d’égo et aux problèmes de leadership qui minent encore la société civile tunisienne. Dans le même sens, la faible représentativité des associations constitue un autre obstacle qui empêche ces dernières d’être crédibles vis-‐à-‐vis des bailleurs de fonds et autres structures d’appui, faute de la légitimité nécessaire pour porter les revendications de leurs adhérents ou des bénéficiaires pour le compte desquels ils agissent ;
- enfin, si les associations ont bénéficié d’un nombre important de formations relatives
à la gestion des projets ou à la gouvernance locale, peu d’entre elles ont reçu des formations sur le thème du plaidoyer ; la société civile éprouve de ce fait et de manière naturelle des difficultés à influencer les stratégies des partenaires techniques et financiers, en l’absence de connaissance des techniques de plaidoyer et de capacités indispensables pour élaborer et mener des campagnes efficaces à l’endroit des bailleurs de fonds.
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A cette première étape du cycle, qui concerne, rappelons-‐le, l’élaboration des stratégies et la planification des actions et qui conditionne les étapes suivantes, les deux parties prenantes accusent des faiblesses qu’il convient de corriger afin de parvenir à un véritable partenariat, pertinent et solide. A cet égard, l’adoption d’une approche participative, à la fois dans les relations entre les organisations de la société civile et leurs bénéficiaires et dans les relations entre les organisations de la société civile et les partenaires techniques et financiers, semble être la clef de voûte pour arriver à des résultats plus légitimes et plus efficaces.
3.2. Les relations entre partenaires techniques et financiers et organisations de la société civile dans l’exécution des programmes et des activités Deuxième étape du cycle d’intervention des partenaires techniques et financiers, l’exécution des programmes et des actions, par ces derniers, montre également quelques faiblesses, qui relèvent là-‐aussi pour une part de la responsabilité des bailleurs de fonds et d’autre part de celle des organisations de la société civile. -‐ De l’appel à propositions à la réalisation des actions, un processus qui manque encore d’efficacité pour les partenaires techniques et financiers S’agissant d’abord des appels à propositions, qui prennent parfois le nom d’appels à projets ou d’appels à candidatures, les entretiens réalisés à la fois avec les partenaires techniques et financiers et les organisations de la société civile ont permis de mettre en exergue certaines difficultés qui freinent l’efficacité et la fluidité du processus. C’est ainsi que nombre d’associations considèrent les formulaires de candidature trop complexes et souvent inadaptés à leurs capacités. Un membre d’une organisation associative résume ainsi cette difficulté : « on nous demande de remplir une trentaine de pages, en langue française, avec des concepts que l’on ne comprend même pas : on nous parle d’objectifs globaux et d’objectifs spécifiques, de résultats directs et indirects, de méthodologie, de dépenses éligibles et de dépenses inéligibles avec une complexité à laquelle nous ne pouvons pas faire face ». Et de fait, ces difficultés constituent une barrière à l’entrée et surtout un traitement inéquitable entre des associations expérimentées, parlant couramment le français et rompues aux appels à propositions, et des associations nouvelles, inexpérimentées, parlant essentiellement l’arabe, en particulier dans les régions de l’intérieur du pays, et qui se voient refuser des subventions qui sont la condition nécessaire de leur développement et de leur apprentissage. Au fil du temps, et comme le font remarquer certains experts interrogés, un fossé se creuse entre une minorité d’associations élitistes, ayant peu de liens directs avec les réalités du terrain mais qui disposent des clés de la réussite d’une candidature qui leur permettent de « rafler » la majeure partie des fonds disponibles, et une majorité d’associations, parfois profondément connectées avec leurs bénéficiaires, mais qui, par manque de savoir-‐faire, échouent à faire aboutir leurs propositions. Le risque ici est d’assister à l’émergence d’une oligarchie associative, très professionnelle mais peu représentative, qui agit en son nom et pour le compte d’une société civile dont elle est très lointaine; la conséquence consisterait également à enlever toute consistance à la société civile et à abandonner l’approche Botton-‐up qui est pourtant au cœur des enjeux de la transition démocratique en Tunisie.
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Par ailleurs, il convient de constater que les appels à propositions émis par les partenaires techniques et financiers ne trouvent qu’un modeste écho auprès des organisations de la société civile, qui répondent de manière relativement rare aux initiatives des institutions d’appui. Ce faible retour se remarque généralement dans les cas suivants :
- manque de crédibilité du bailleur (qu’on soupçonnerait, surtout après la Révolution, d’avoir des « agendas cachés ») ;
- absence de communication ou mauvaise communication du bailleur sur ses appels (en
empruntant des circuits de communication faiblement audibles) ;
- insuffisance de l’accès à l’information de la part des récepteurs des appels, y compris lorsque des moyens ont été mis en œuvre par le bailleur pour faire connaître ces derniers (insertion sur des sites Internet, envoi sur des mailing-‐listas, etc.).
Les entretiens menés auprès de plusieurs associations de Tunis et des régions font, au-‐delà de ce dernier constat, apparaître que la majeure partie des partenaires techniques et financiers ne communiquent sur leurs appels à propositions que sur leurs sites Internet et via des personnes ressources (invitation par mail à partager l’information), à l’exclusion d’autres types de communication qui peuvent se révéler pertinents. De ce point de vue, une partie importante du public concerné, et en particulier celle qui ne dispose pas d’un accès à Internet, n’a pas nécessairement connaissance des opportunités de financements ou d’appui qui se présentent à elle ;il serait utile de ce point de vue de partager largement les appels à propositions sur Internet, sur des sites généraux d’information, sur les sites spécialisés dans le partage des informations relatives aux financements d’activités, et sur les pages Facebook pertinentes (en comptant sur la coopération des associations ayant des pages et des « leaders de communautés » sur les réseaux sociaux) ; il conviendrait également de publier les appels à propositions dans la presse écrite en français mais surtout en langue arabe et/ou de les annoncer sur les radios locales. A cet égard, il est également possible de citer la bonne pratique du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) qui a entrepris la conduite, dans plusieurs régions, de sessions d’information sur les appels, leurs objectifs et leurs modalités d’exécution. Enfin, il est important de noter que l’évaluation des candidatures par les partenaires techniques et financiers pose un certain nombre d’interrogations, que soulèvent volontiers les organisations de la société civile concertées. D’une part, et dans le prolongement de ce qui a été décrit plus haut quant au manque de coordination entre les différentes structures d’appui, les associations déplorent le fait que les formulaires de candidatures et les évaluations de ces dernières diffèrent substantiellement d’un partenaire à l’autre, désorientant des organisations associatives qui rencontrent déjà des difficultés à remplir les formulaires les moins complexes et qui doivent s’adapter aux exigences variables d’acteurs de soutien devenus nombreux après la Révolution. D’autres part, les obligations de transparence que les partenaires techniques et financiers exigent des associations, ou du moins qu’ils encouragent, trouvent une limite dans le fait que les partenaires, de leur côté, n’affichent pas une ferme volonté et une pratique de transparence à l’égard des associations dans l’évaluation des candidatures qu’ils reçoivent. Peu de partenaires techniques et financiers mettent à la disposition des associations, en amont de la tenue de leur comité de sélection, une grille d’évaluation claire et compréhensible, et qui aurait surtout l’avantage de guider les candidats dans leur processus de soumission ; l’on peut déplorer pareillement l’absence de motivation des décisions relatives aux candidatures rejetées.
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Au regard de l’exécution des programmes et des activités, un certain nombre d’éléments mérite d’être relevé :
- le manque de dialogue entre partenaires techniques et financiers et organisations de la société civile sur leurs rôles respectifs et sur la nature des relations qui les lient conduit à la persistance d’un paradigme assistant-‐assisté loin d’être pertinent pour permettre le progrès des associations. Le membre d’une organisation internationale rencontré fera utilement remarquer que « l’on a remplacé l’Etat providence par les bailleurs de fonds providence » ; le président d’une association ajoutera, dans le même sens, que « les réflexes que l’on essaie de déboulonner dans les relations entre Etat et associations se retrouvent de manière plus importante encore dans les relations entre partenaires techniques et financiers et organisations de la société civile »k ;
- la faible présence des partenaires techniques et financiers dans les régions constitue
un obstacle majeur au bon suivi des activités et à la fourniture de conseils pertinents pour les associations bénéficiaires tout au long de la conduite de leurs projets. Dans la plupart des cas en effet, une formation sur la gestion des projets est prodiguée aux associations retenues après l’acceptation de leurs candidatures, mais à laquelle ne fait pas suite un suivi régulier personnalisé ; il serait peut-‐être utile dans ce sens qu’une assistance sous forme de formations continues soit fournie aux associations tout au long des projets, se rapportant notamment aux difficultés que peuvent rencontrer ces dernières dans l’exécution de leurs activités, afin de permettre le transfert d’un savoir-‐faire qui ne serait pas théorique mais qui serait applicable à des situations concrètes ;
- les partenaires techniques et financiers n’ont pas investi dans les ressources
humaines et matérielles suffisantes pour un suivi de qualité des associations et concentrent leurs efforts sur l’évaluation des associations et de leurs activités. D’ailleurs, les associations et certains partenaires techniques et financiers semblent confondre suivi et évaluation, cependant qu’il s’agit de deux interventions distinctes, répondant à des objectifs différents.
-‐ Les organisations de la société civile ne conçoivent pas l’exécution de leurs activités en partenariat avec les partenaires techniques et financiers Les entretiens réalisés sur le terrain confirment un certain état d’esprit et une certaine attitude des associations envers les partenaires techniques et financiers qu’ils ne considèrent pas comme des partenaires mais beaucoup plus comme des pourvoyeurs de fonds. Comme il a été dit plus haut, l’on a le sentiment que la nature des relations entre les acteurs de la société civile a fait l’objet d’une translation, où les partenaires techniques et financiers font figure de la nouvelle autorité d’assistance. Il s’agit là d’une survivance des pratiques de l’ancien régime et de mécanismes culturels qui devront être corrigés à mesure du temps, à travers un dialogue et une concertation entre les deux parties prenantes.
kSelon les questionnaires distribués, au regard de ce qu’attendent les associations des partenaires techniques et financiers, 80% déclarent les contacter en vue d’obtenir un financement et 100% pour bénéficier d’une formation. Ce taux de réponse très élevé peut s’expliquer notamment par l’offre qui est proposée par la plupart des partenaires techniques et financiers : financement de projets et formations. D’autres alternatives comme les voyages d’étude sont moins fréquentes. Au demeurant, le choix des associations de contacter tel ou tel partenaire est fondé à 73% sur l’existence de fonds et à 50% su la bonne réputation du bailleur.
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Au-‐delà de cette explication, bon nombre de présidents d’associations interrogés et de chefs de projets impliqués dans la conduite d’activités associatives confient ne pas souhaiter associer les partenaires techniques et financiers à l’exécution de leurs actions, car une telle sollicitation de leur part reviendrait à « montrer qu’elles ne sont pas capables de mener convenablement leurs actions ». Et de fait, les associations rechignent à faire part aux partenaires de leurs difficultés d’exécution potentielles, à poser des questions ou à inviter ces derniers à trouver avec elles des pistes de solution. Le directeur d’une organisation internationale regrette que « les associations, en cas de la survenance de problèmes, préfèrent les cacher et mentir plutôt que nous en informer, alors que notre rôle est aussi de les accompagner pour les dépasser et les faire profiter de nos compétences ».
Encore une fois, c’est l’instauration d’un climat de confiance entre associations et partenaires techniques et financiers qu’il s’agit de promouvoir et de mettre en place. Loin d’être des structures de jugement, les partenaires d’appui doivent montrer aux associations qu’ils ne se placent pas au dessus d’eux, mais davantage à leurs côtés. Ainsi construite, la relation sera bénéfique aux deux parties prenantes, les organisations de la société civile bénéficiant d’une expertise supplémentaire et du sentiment d’être épaulés, et les partenaires devenant plus sereins quant à la « sincérité » des rapports narratifs et financiers et des résultats des activités qui leur sont transmis. Pour ce faire, et de concert avec les partenaires techniques et financiers, les associations doivent construire des canaux permanents de communication afin d’échanger de manière plus fluide les informations, de partager et de résoudre ensemble leurs difficultés et les obstacles qu’elles peuvent rencontrer. Il est au demeurant anormal de constater que dans bien des cas et comme le déplore un chargé de suivi au sein d’une organisation non gouvernementale internationale qui appuie des associations dans le sud tunisien, « les associations n’invitent pas les partenaires à leurs activités, à leurs ateliers ou à leurs cérémonies de fin de projet ».Il est en même temps important de souligner que les partenaires doivent répondre aux invitations des associations et se montrer présents et disponibles pour accompagner les structures associatives qu’ils soutiennent.
3.3. Les relations entre partenaires techniques et financiers et organisations de la société civile dans la phase d’évaluation des programmes et des activités L’évaluation est une étape importante à la fois pour les partenaires techniques et financiers, qui doivent s’assurer que les fonds qu’ils ont déployés ont bien été utilisés et ont permis d’atteindre les objectifs qui ont été fixés, mais également pour les associations afin de mesurer leur performance et juger si les capacités et les efforts qu’elles ont mis en œuvre leur ont permis d’honorer leurs engagements, tant vis-‐à-‐vis de leurs bénéficiaires que des bailleurs de fonds qui ont placé leur confiance en elles. Les différents éléments recensés ci-‐dessous s’appliquent dans des termes similaires aux partenaires techniques et aux organisations de la société civile tunisienne :
- tout d’abord, l’une et l’autre des parties prenantes ne disposent pas, pour l’heure, d’un dispositif d’évaluation systématique et/ou uniformisé des activités; du côté des partenaires techniques et financiers, c’est le manque de coordination, encore une fois, entre les acteurs qui est en cause ; du côté des organisations de la société civile, et comme conséquence du premier constat, les évaluations se font en fonction des exigences des bailleurs et la plupart des associations ne disposent que très rarement d’un système d’évaluation qui leur serait propre et qu’elles auraient elles-‐mêmes mis en place ;
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- les mécanismes d’évaluation élaborés reposent le plus souvent sur des indicateurs
quantitatifs plutôt que qualitatifs ; cet élément peut s’expliquer en partie par la faible présence des partenaires techniques et financiers sur le terrain, et en particulier en dehors de la capitale, et qui les amènent à ne pouvoir évaluer les activités qu’ils soutiennent que par le biais de résultats chiffrés. Ainsi, en liant aussi étroitement la performance des associations à leurs impacts quantitatifs, et en n’étant pas en mesure de vérifier la réalité de ces accomplissements, les partenaires techniques et financiers incitent les associations à conduire une « politique du chiffre », voire à surévaluer leurs résultats, notamment en faisant état de chiffres non sincères afin de faire croire au dynamisme de l’association et à l’efficacité de ses interventions ;
- pour les partenaires techniques et financiers aussi bien que pour les organisations de
la société civile, la voix des bénéficiaires n’intervient pas toujours dans le processus d’évaluation. Or, c’est à l’aune de l’impact sur ces bénéficiaires que doivent être également jugées les activités des associations. Il serait dans cette perspective utile que les bénéficiaires puissent donner leurs avis sur les programmes et les actions dont ils profitent : un tel recours, qui pourrait être utilisé de manière concomitante par les associations et les bailleurs de fonds, présenterait en outre l’avantage pour ces derniers de recouper les résultats affichés dans les rapports narratifs et financiers des organisations de la société civile avec la réalité des faits ; ce dispositif doit au demeurant nécessairement être accompagné d’une évaluation par les chargés de suivi des associations directement sur le terrain et auprès des publics ciblés par les associations partenaires ;
- l’évaluation des projets pose également la question des critères utilisés pour la
conduire. Dans la majeure partie des cas, ces critères sont définis en amont et imposés aux associations, en fonction de la vision de chaque partenaire technique et financier. Il serait bien plus pertinent que l’élaboration des critères d’évaluation, des indicateurs de résultats et des valeurs cibles soit menée de manière participative entre les bailleurs de fonds et les organisations de la société civile ; bien entendu, il serait assez difficile et improductif d’imposer aux partenaires techniques et financiers d’adopter au cas par cas et avec chaque association bénéficiaire une grille d’évaluation personnalisée ; en revanche, il semble tout à fait réaliste qu’un dialogue ait lieu entre un groupe de partenaires techniques et financiers d’une part, et un groupe d’associations ou de membres de la société civile d’autre part, afin de conduire de concert un travail d’identification des critères les plus pertinents d’évaluation. Ces derniers pourront reposer sur un socle commun d’indicateurs de base, et laisser la place à des indicateurs variables selon l’ancienneté de l’association, son expérience, son domaine d’activité et l’envergure des actions qu’elle se propose de mener ;
- Au final, et comme pour l’étape relative à l’exécution des programmes et des actions,
c’est tout l’esprit de l’évaluation qui mérite d’être modifié ou au moins revu. Pour l’heure, l’évaluation constitue un « poids psychologique » pour les deux acteurs concernés : elle est, pour les associations, synonyme d’audit et de contrôle ; elle représente, pour les partenaires techniques et financiers, une charge de travail supplémentaire et fastidieuse.
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Pour changer durablement et positivement les relations entre partenaires techniques et financiers et organisations de la société civile, l’évaluation doit être une opportunité de construction commune et l’occasion pour les associations de progresser et pour les partenaires de mesurer la qualité de leur intervention vis-‐à-‐vis de la société civile dans le temps. Des ateliers conjoints et une réflexion concertée entre les deux parties prenantes peuvent permettre de faire cheminer et aboutir cet état d’esprit
3.4. Diagnostic d’une composante transversale : l’état de la communication entre les partenaires techniques et financiers et les organisations de la société civile Au-‐delà des faiblesses relatives à chaque étape du cycle d’intervention des partenaires techniques et financiers, il est important de considérer un autre aspect transversal de la relation entre ces derniers et les organisations de la société civile : la communication. Il s’agit là peut-‐être du cœur des faiblesses qu’expriment les deux parties prenantes. Nous présentons dans les lignes qui suivent quelques éléments qui constatent les lacunes en matière de communication qui méritent d’être améliorées afin de renforcer le partenariat entre les acteurs. -‐ Les partenaires techniques et financiers sont perçus comme étant distants et renfermés sur eux-‐mêmes La faiblesse des partenaires techniques et financiers réside essentiellement dans le fait que ces derniers n’ont pas encore réussi à bien se faire connaître des organisations de la société civile tunisienne et de fait, les associations ont du mal à comprendre le rôle et le mandat de chaque partenaire technique et financier, ses stratégies, ses priorités d’intervention et les modalités précises d’obtention de soutien. En cause, une communication des partenaires techniques et financiers qui repose davantage sur les opportunités de financement que sur eux-‐mêmes, leurs visions et leurs valeurs ; plus encore, en l’absence de vis-‐à-‐vis clairs et identifiés en charge de la relation avec les associations, celles-‐ci éprouvent des difficultés à entrer en contact avec les organisations d’appui et ne peuvent poser des questions et recueillir les informations dont elles ont besoin. Le secrétaire général d’une association, dont les propos ont été confirmés à maintes reprises au cours des entretiens menés sur le terrain, regrette que les informations relatives à la personne contact au sein des bailleurs de fonds ne soient pas disponibles : « même sur le site Internet des bailleurs, il n’y a pas de nom, de téléphone ou de mail d’interlocuteur spécialement en charge des associations. On doit appeler le standard et demander qui s’occupe des associations ». Un autre membre de la société civile enchérit en expliquant que « les bailleurs de fonds ne répondent quasiment pas aux mails qui leur sont envoyés. Cela donne une très mauvaise image des bailleurs, qui ont tendance à donner beaucoup de leçons, mais qui sont les premiers à ne pas faire preuve de professionnalisme ». Ce constat amène d’ailleurs à douter de la sincérité des partenaires techniques et financiers : comme le souligne un observateur interrogé, « les associations ont le sentiment qu’il y a beaucoup de fonds, mais qu’elles n’en profitent pas ; en l’absence de transparence, elles ont le sentiment que ce sont les relations personnelles qui jouent pour l’obtention de financements, et elles y voient une injustice supplémentaire par rapport aux associations connectées de la capitale et de certaines grandes villes ».
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Ce constat est d’autant plus difficile à comprendre que les partenaires techniques et financiers disposent des ressources humaines et matérielles ainsi que des compétences nécessaires pour développer et mettre en place une batterie de supports et d’outils de nature à rendre la communication avec la société civile plus fluide et plus efficace : sites Internet, pages Facebook, inscription sur la plateforme Jamaity, livrets de communication et brochures, bases de données de contacts, téléphones, adresses mail, etc. Ces outils méritent d’être utilisés et permettraient de changer radicalement et positivement les relations avec la société civilel. Bien entendu, le manque de décentralisation des bailleurs constitue un facteur majeur de distorsion dans la communication entre les parties prenantes. L’on insistera donc encore une fois sur l’importance, pour les partenaires techniques et financiers, d’établir des bureaux dans les régions ou à tout le moins de disposer de personnes qui joueront le rôle de relais locaux ou régionaux et agiront pour le compte des partenaires dans la communication avec les associations sur le terrain. Il convient de saluer dans cette perspective l’effort de l’Union européenne, et en particulier du Programme d’Appui à la Société Civile (PASC), en faveur de la mise en place de bureaux de terrain à Tunis et dans les régions. L’on peut enfin ajouter à ces éléments la préférence des partenaires techniques et financiers à communiquer en français, langue de travail de la majorité d’entre eux, mais qui constitue une barrière à l’entrée pour un grand nombre de structures associatives. De ce point de vue, il ne serait pas inutile que les chargés de suivi ou les chargés de relations avec les organisations de la société civile soient tunisiens et maîtrisent parfaitement la langue arabe, à la fois pour des raisons techniques, mais également psychologiques, permettant ainsi d’instaurer un climat de confiance et de sérénité chez les acteurs associatifs.
-‐ Les défaillances des organisations de la société civile en matière de communication avec les partenaires techniques et financiers Loin d’être la responsabilité des seuls partenaires techniques et financiers, les faiblesses de communication échoient également aux organisations de la société civile. Ces dernières peinent à se faire connaître, en l’absence d’abord d’une compréhension solide de ce que sont la communication et ses avantages, et en l’absence ensuite d’un réel savoir-‐faire en la matière. On constate, en particulier, que très peu d’associations ont élaboré une réelle stratégie de communicationm ; la plupart d’entre elles se contente en effet d’utiliser des outils de base tels que le téléphone, les emails et les réseaux sociaux (en particulier Facebook), mais d’une manière qui n’est pas pensée et organisée en amont. Un chargé de la société civile auprès d’un partenaire technique et financier donne une illustration pertinente de cette faiblesse : « lorsque je me rends sur la page Facebook d’une association candidate pour en savoir plus sur elle, je trouve des statuts généraux sans lien avec ses activités, des commentaires de nature politique et pas ou peu de modération des commentaires ; certaines associations se contentent de partager des articles, et même des chansons ! ».
lÀ ce propos, les associations se sont également prononcées, lors des questionnaires distribués, sur les supports de communication que les partenaires techniques et financiers doivent utiliser pour accéder facilement aux organisations de la société civile. Les réponses mentionnent : sites web, réseaux sociaux, annuaire associatif ; les newsletters ; un portail Internet ou une page Facebook avec des informations centralisées sur les partenaires techniques et financiers et les organisations de la société civile ; les mails personnels des partenaires techniques et financiers. mAu regard de la stratégie de communication, plus de la moitié des organisations de la société civile qui ont rempli les questionnaires (56%) déclarent en avoir une, mais celle-ci se limite en réalité à disposer d’une page Facebook. 90% des associations interrogées déclarent avoir une page Facebook contre 60% qui déclarent avoir un site Internet.
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D’autres partenaires techniques et financiers, ce que confirme au demeurant la pratique, déplorent le fait que peu d’associations aient développé des supports efficaces de communication : peu d’associations disposent d’un site Internet, de brochures de présentation ou de livrets de communication. Quand bien même elles en auraient, celles-‐ci ne les partagent pas avec les partenaires techniques et financiers afin de se faire connaître ; ce constat peut être attribué aux faibles capacités de la société civile à chercher l’information pertinente et à accéder aux personnes ressources au sein des structures d’appuin. Les faiblesses des associations peuvent ainsi se résumer à un problème de savoir-‐faire et un problème de faire-‐savoir : d’une part, celles-‐ci ne pensent pas à élaborer un écosystème cohérent et efficace de leurs structures, de leurs visions et de leurs activités en termes de communication ; d’autre part, elles peinent à saisir ou à créer les occasions qui leur permettraient d’entrer en contact et de convaincre les partenaires techniques et financiers, en demandant des rendez-‐vous, en effectuant des relances ou en participant, à leurs frais s’il le faut, aux différentes manifestations qui les feraient se trouver au même endroit et au même moment avec leur vis-‐à-‐vis afin de se créer un carnet d’adresses de soutiens potentiels, à la fois utile et précieux.
11Selon les questionnaires, 76% des associations déclarent rechercher les informations sur les partenaires techniques et financiers à travers leurs sites Internet et/ou leurs pages Facebook même si 57% procèdent par bouche à oreille. Les questionnaires nous renseignent également que 29% des organisations de la société civile ayant répondu au questionnaire cherchent ces informations sur IFEDA, alors même que le site de cette institution ne comprend aucune information sur le sujet. 33% optent pour d’autres organismes appuyant les organisations de la société civile, à cet effet le Bureau Conseil Associations (BAC) a été cité comme exemple.
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4. Recommandations en vue de l’amélioration des relations entre les organisations de la société civile et les partenaires techniques et financiers en Tunisie Les présentes recommandations ont vocation à contribuer à la réflexion sur les moyens à mettre en œuvre afin d’améliorer les relations entre les organisations de la société civile et les partenaires techniques et financiers. Une telle amélioration est une condition préalable à un partenariat efficace et durable entre les deux parties prenantes.
4.1. Assurer une coordination efficace entre les partenaires techniques et financiers
- Préparer et partager une version résumée (d’une dizaine de pages au plus) et traduite en arabe de la « synthèse de la cartographie des interventions et des approches des partenaires techniques et financiers envers la société civile en Tunisie », afin de fournir aux organisations de la société civile et aux partenaires techniques et financiers un aperçu des interventions de ces derniers pour une meilleure compréhension de l’allocation des soutiens en termes de thématiques et/ou de publics cibles. Ce travail pourra, le cas échéant, être réalisé dans le cadre du PASC ou par le biais d’une assistance technique ;
- Renforcer le groupe de coordination des bailleurs de fonds (dont le chef de file est à l’heure actuelle la Délégation de l’Union européenne), en prenant soin d’y associer le plus grand nombre de partenaires techniques et financiers ainsi que les organisations non gouvernementales internationales apportant leur soutien en Tunisie ; la présidence formelle ou informelle de ce groupe pourra au demeurant s’opérer de manière tournante à échéances régulières ; dans le même ordre d’idées, il peut être judicieux de mettre en place une telle coordination au niveau régional en fonction des partenaires présents sur le terrain ;
- Elaborer une matrice de coordination recensant les interventions des partenaires
techniques et financiers en Tunisie, en encourageant ces derniers à déterminer leurs objectifs communs et leurs objectifs spécifiques, les priorités d’intervention selon la même distinction, et des indicateurs unifiés afin d’être en mesure d’entamer un suivi consolidé et cohérent ; une telle matrice pourra au besoin être désagrégée en fonction de certaines thématiques ou populations cibles pour un suivi plus précis et une lecture plus claire des interventions ;là encore, l’assistance technique semble être l’outil le plus pertinent pour atteindre ces résultats ;
- Soutenir la plateforme Jamaity.org et y inclure utilement les éléments qui pourront
faciliter la coordination entre les partenaires techniques et financiers : à titre d’exemple, la matrice précitée pourrait être disponible en ligne sur la plateforme, et les partenaires techniques et financiers auraient la possibilité, grâce à des codes d’accès spécifiques qui leur seraient fournis, d’actualiser en temps réel les informations relatives à leurs interventions et permettre ainsi une mise à jour immédiatement accessible aux autres bailleurs de fonds ;
- Promouvoir l’idée de fonds communs (basket funds) permettant de mobiliser les
ressources des partenaires techniques et financiers, en particulier ceux œuvrant dans la même thématique, afin d’optimiser l’allocation des ressources sur l’ensemble du
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territoire. En constituant un comité de sélection unique pour la même thématique, les partenaires techniques et financiers éviteront de répartir leurs soutiens de manière inéquitable en agissant « à l’aveugle », indépendamment les uns des autres, et permettront de diversifier la nature et l’envergure des projets soutenus, en misant sur la complémentarité entre des associations aux profils variés, adoptant des approches différentes et œuvrant dans des espaces géographiques distincts.
4.2. Légitimer et améliorer l’élaboration des stratégies des partenaires techniques et financiers
- Elaborer des stratégies d’intervention en fonction des besoins réels du terrain, en adoptant idéalement une approche participative qui permettra de recueillir, sur l’ensemble du territoire, les avis et les propositions des organisations de la société civile quant à leurs stratégies, leurs besoins et leurs priorités ;
- Mener des missions régulières d’identification des besoins à Tunis et dans les
régions ; à tout le moins, des questionnaires peuvent être préparés et distribués en ligne à travers des logiciels existants, gratuits et disponibles sur Internet, à partir d’une base de données unifiée et partagée par les différents partenaires techniques et financiers ;
- Investir dans des personnes-‐ressources, aux échelles locale, régionale et nationale pour la définition des priorités stratégiques ;
- Compléter la consultation et la concertation avec les associations par celles avec les
bénéficiaires directs afin de s’assurer de la réalité des besoins et des recommandations exprimées ;
- Former les associations à l’utilité de disposer d’une vision et d’une stratégie claires
afin de les familiariser avec cette exigence ;
- Exiger des associations partenaires, dans la définition des besoins et de la détermination des priorités, un document de stratégie, gage du sérieux de ces dernières et de leurs capacités à disposer d’une vision pour la thématique et l’espace géographique au sein desquels elles interviennent, ainsi que pour les bénéficiaires pour le compte desquels elles œuvrent ;
- Accompagner les associations dans l’élaboration de leurs visions et de leurs
stratégies, qui constituent une base solide et un premier pas nécessaire avant un dialogue de qualité avec les partenaires techniques et financiers ;
- Renforcer les capacités des organisations de la société civile afin que celles-‐ci puissent agir en tant que groupes de pression efficaces auprès des partenaires techniques et financiers pour influencer leurs stratégies ; la réalisation de cet objectif passe par des formations en termes de communication et de plaidoyer, ainsi que par la promotion du travail en réseau.
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4.3. Assurer un traitement équitable, adapté et efficace en faveur des associations
- Adapter les appels à propositions aux capacités de gestion des organisations de la société civile ; à cet égard, l’idéal est de proposer deux types d’appels à propositions : les uns orientés vers les petites associations et pour lesquelles le formulaire de candidature pourra être simplifié, l’autre, plus exigent, serait destiné aux associations bénéficiant déjà d’une expérience solide en termes de gestion de projets et de fonds ; à défaut, il est également possible de favoriser les « appels en cascade », afin d’octroyer des fonds à des agents intermédiaires qui pourront lancer des appels à projets de petite taille et de ce fait plus adaptés aux capacités des associations les plus modestes ;
- Assurer le partage des appels à propositions en utilisant un éventail plus large de supports de communication : sites Internet, réseaux sociaux, radios locales, presse écrite, etc. Il serait également judicieux que les appels soient publiés à la fois en langue arabe et en langue française et que les associations puissent soumettre leurs candidatures dans la langue de leur choix ;
- Accompagner les appels à propositions de visites de terrain destinées à informer et
sensibiliser les associations susceptibles d’être intéressées aux objectifs du soutien et aux modalités et exigences attendues par le partenaire technique et financier;
- Constituer une équipe de suivi en amont de la tenue du comité de sélection, chargée
de répondre aux questions des candidats et de les accompagner en termes de conseils de fond et de forme, afin que leurs candidatures soient plus solides. Ce travail en amont permet d’améliorer la qualité des candidatures soumises mais également de renforcer les capacités des associations, y compris de celles qui ne seraient pas retenues. A cet égard, ce soutien doit être accompagné des outils permettant de le réaliser en termes de ressources humaines et matérielles : chargés de mission compétents et disposant d’une expérience dans le domaine, adresses email dédiées, hotline ou lignes téléphoniques spécifiques ;
- Promouvoir une obligation de redevabilité à l’endroit des partenaires techniques et
financiers et encourager ces derniers à motiver les décisions de refus en expliquant aux associations non retenues les raisons qui ont justifié le choix de ne pas leur accorder de soutien et de leur offrir en même temps des conseils afin d’améliorer leurs futures candidatures.
4.4. Améliorer le processus d’exécution des activités
- Former les associations retenues à la fois à la gestion de projets mais également au respect de leurs obligations juridiques et comptables afin qu’elles satisfassent à la fois les exigences des partenaires techniques et financiers et celles de l’Etat ;
- Accompagner les associations tout au long du projet dans le renforcement de leurs capacités, à la fois en termes de fond mais également sur des aspectes relatifs à la gestion d’équipe, aux procédures d’acquisition de biens ou de services, à l’approche participative, à la communication et au plaidoyer ;
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- Elaborer et distribuer aux structures associatives et aux chefs de projets un manuel de
procédures qui servira de vadémécum et qui détaillera également les modalités de communication avec les partenaires techniques et financiers tout au long du projet ;
- Mettre à la disposition des associations bénéficiaires des chargés de suivi dédiés et
dont le rôle ne sera pas tant de contrôler les activités mais d’accompagner les organisations à résoudre leurs difficultés et conduire convenablement leurs projets. A défaut de présence permanente sur le terrain, les chargés de suivi disposeront utilement d’un budget leur permettant d’effectuer des visites de terrain et de réaliser des entrevues régulières aussi bien avec les membres des associations qu’avec leurs bénéficiaires directs et indirects ;
- Accompagner les associations dans la valorisation de leurs projets et dans les
mécanismes de communication pertinents qui sont susceptibles de faire connaître leurs activités.
4.5. Inscrire le processus d’évaluation dans une logique de partenariat
- Former les associations, avant le début du projet, aux modalités d’évaluation retenues par les partenaires techniques et financiers. Ce faisant, les associations seront sensibilisées à cette thématique et pourront comprendre ses avantages et son utilité ;
- Conduire, avant l’évaluation finale, des évaluations moins complexes et plus régulières tout au long du projet afin de mieux encadrer les associations, qui ont pour l’heure actuelle tendance à considérer l’évaluation comme un audit de fin de projet auquel elles se préparent quelques jours avant ou après la fin des activités ;
- Elaborer et distribuer aux associations un document spécimen d’évaluation qu’elles
pourront utiliser pour le projet en cours et qui peut également servir de source d’inspiration pour mettre en œuvre leurs propres systèmes d’évaluation dans cette perspective. Le document ainsi conçu reposera sur une combinaison de critères qui seront à la fois quantitatifs et qualitatifs afin de mieux envisager l’impact des projets conduits. A cet égard, le cadre d’indicateurs de performance (CIP), élaboré par l’équipe chargée de la présente mission, peut faire figure d’instrument utile à la fois pour les partenaires techniques et financiers et pour les organisations de la société civile. Ce document pourra d’ailleurs être mis en ligne au sein de plateformes telles que Jamaity et être téléchargeable gratuitement par les personnes ou structures intéressées ;
- Remplacer le système d’évaluation conduit unilatéralement par les partenaires
techniques et financiers par un mécanisme d’évaluation conjointe entre ces derniers et les associations bénéficiaires dans un esprit de concertation et de partenariat. L’évaluation ainsi conduite ne sera pas vécue par les structures associatives comme des modalités de contrôle mais plutôt comme une discussion et un échange entre les deux parties prenantes. Idéalement, l’évaluation donnerait lieu à la réalisation d’un document faisant état des difficultés et des faiblesses rencontrées et proposera dans le même temps une feuille d’action incluant des propositions pertinentes et de nature à permettre aux associations d’être plus performantes dans le cadre de leurs activités futures ;
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- Combiner l’évaluation ainsi réalisée avec une évaluation issue des bénéficiaires,
directs ou indirects, des activités menées par les associations. Ce recoupement d’informations permettra de se rendre compte dans une plus grande mesure de l’impact des projets et de faire en sorte que les structures associatives soient plus en lien avec leurs publics cibles sur le terrain.
4.6. Instaurer un climat de transparence et de confiance entre les organisations de la société civile et les partenaires techniques et financiers grâce à une meilleure communication
- Elaborer un guide des partenaires techniques et financiers intervenant en Tunisie afin de permettre aux associations de disposer d’une vue d’ensemble des acteurs d’appui que celles-‐ci peuvent solliciter. Le guide présentera chaque partenaire technique et financier, ses valeurs, son mandat, ses priorités et les montants qu’il est susceptible d’allouer à chaque structure associative ; il pourra également décrire les activités ou les projets récemment appuyés. Ce document, qui serait idéalement actualisé chaque année, pourra être mis en ligne sur les plateformes existantes et en particulier sur la plateforme Jamaity ;
- Accélérer le travail de la plateforme Jamaity pour répertorier les associations actives et inciter ces dernières à être exhaustives dans la présentation de leurs mandats, de leurs valeurs et de leurs activités ;
- Sensibiliser les associations à l’utilité de mettre en place une stratégie de
communication et les former aux différentes approches et outils qui leur permettront d’améliorer leur communication et renforcer leurs voix dans leurs relations avec les partenaires techniques et financiers. Il s’agira ici notamment de permettre aux organisations de la société civile d’élaborer des supports clairs et efficaces tels que sites Internet, animation et modération de pages sur les réseaux sociaux, édition de brochures et de livrets de communication, etc. Il s’agira également de former les associations à l’écriture des emails et courriers et à la préparation d’entretiens ou de rendez-‐vous avec les partenaires ;
- Mettre en place au sein des partenaires techniques et financiers des structures
dédiées à la communication avec la société civile et leur fournir les moyens matériels nécessaires à la conduite de leurs missions. A l’heure actuelle, il existe chez la plupart des structures d’appui une confusion entre les activités de communication et de suivi. Ce travail pourra commencer simplement par l’actualisation des sites Internet des partenaires techniques et financiers qui pourront utilement disposer d’une page dédiée sur laquelle les informations relatives à leur appui à la société civile seront disponibles : mandat, types d’activités soutenues, enveloppe budgétaire disponible, etc. Ces pages contiendront en outre le nom et les coordonnées (email et téléphone) de la personne chargée de la communication avec les associations ;
- Installer au sein de la plateforme Jamaity un espace virtuel de discussion entre
organisations de la société civile et partenaires techniques et financiers qui sera le lieu propice aux échanges et aux conseils mutuels. Outre le fait que la plateforme devra disposer dans ce sens d’une personne chargée de l’animation et de la modération du forum, les partenaires techniques et financiers autant que les associations devront s’investir pour élaborer conjointement un espace vivant et de
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qualité : des personnes ressources au sein de chacune des parties prenantes pourront jouer le rôle de coordinateurs (de manière formelle ou informelle) afin de communiquer autour de la plateforme et de sensibiliser à son intérêt ;
- Organiser un forum annuel au cours duquel les organisations de la société civile et
les partenaires techniques et financiers pourront se rencontrer et échanger leurs points de vue, leurs expériences et leurs recommandations. Ce forum pourra être complété par des ateliers plus restreints entre représentants de chacun des acteurs pour réfléchir de manière régulière à la consolidation des relations entre eux et à la mise en place de procédures destinées à rendre leur partenariat plus efficace.