Revue des Maladies Respiratoires Actualités (2013) 5, 206-210
ISSN 1877-1203
www.splf.org
Actualités
Maladies
RespiratoiresRevue
des
Organe Officiel de la Société de Pneumologie de Langue Française
Congrès de Pneumologie de Langue Française 2013
Lille, Grand PalaisNuméro coordonné par O. Sanchez
Plèvre pariétale
Plèvre viscérale
Poumon
Cavité pleurale
Numéro réalisé avec le soutien institutionnel de Novartis.
8334
3
JuinVol 5 2013 N° 3
Disponible en ligne sur
www.sciencedirect.com
Présidents : M. Beji (Tunis), C. Pinet (Ollioules) Orateur : C.-H. Marquette (Nice)*Article rédigé par : A. Gibelin (Paris)
*Centre hospitalier universitaire de Nice, France
RésuméLes pneumothorax peuvent se classer en trois catégories : spontanés, traumatiques ou iatrogéniques. Parmi les pneumothorax spontanés, on distingue les pneumothorax spontanés primaires (PSP) et les pneumothorax spontanés secondaires (PSS). Cet article s’intéressera uniquement aux traitements des pneumothorax spontanés. Les méthodes de traitements sont multiples (abstention, surveillance, exsuf ation, drainage thoracique, chirurgie thoracique) avec des enjeux différents pour le médecin et le patient dans le choix du traitement. Le traitement du PSP est l’exsuf ation en première intention si on suit les recommandations de la British Thoracic Society. Ces recommandations sont peu suivies par manque de connaissance, de formation, de disponibilité du matériel et de données dans la littérature. Cette prise en charge par exsuf ation, si elle est simpli ée et adaptée aux services d’urgences, pourrait permettre une prise en charge en ambulatoire, permettant un meilleur confort pour le patient et un moindre coût pour la société. Deux premières études françaises ont été réalisées et sont en faveur de cette prise en charge.© 2013 SPLF. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
SummaryPneumothorax can be classi ed into three categories: spontaneous, traumatic or iatrogenic. Spontaneous pneumothoraxes are classi ed in primary spontaneous
MOTS-CLÉSExsuf ation ;Drain de Fuhrman ;Valve de Heimlich
KEYWORDSExsuf ation;Fuhrman drain;
SESSION A58 : PRISE EN CHARGE DU PNEUMOTHORAX
Prise en charge du pneumothorax en ambulatoire
Outpatient management of pneumothorax
Prise en charge du pneumothorax 207
Introduction et recommandations
Le pneumothorax se dé nit par la présence d’air dans la cavité pleurale. Les pneumothorax peuvent se classer en trois catégories : spontanés, traumatiques ou iatrogéniques. Parmi les pneumothorax spontanés, on distingue les pneu-mothorax spontanés primaires (PSP) et les pneumothorax spontanés secondaires (PSS). Cet article ne s’intéressera qu’aux pneumothorax spontanés. Les méthodes de traite-ment sont multiples (abstention, surveillance, exsuf ation, drainage thoracique, chirurgie thoracique) avec des enjeux différents pour le médecin et le patient dans le choix du traitement. Le traitement de PSP, si on suit les recomman-dations de la British Thoracic Society (BTS), est l’exsuf a-tion en première intention (sauf si le patient est instable). Tschopp identi e deux zones d’ombre dans le traitement du pneumothorax : la prise en charge ambulatoire avec un cathéter connecté à une valve de Heimlich d’une part, et la prise en charge chirurgicale après l’échec de drainage d’autre part [1].
Depuis 1993, les recommandations de la BTS (réactualisées en 2010) pour le traitement du PSP chez un patient stable sont l’exsuf ation sans hospitalisation systématique [2]. Mais en réalité, plusieurs études montrent que dans la majorité des cas, la prise en charge comprend la pose d’un drain et/ou cathéter pleural avec une hospitalisation et repos au lit pendant plusieurs jours [3-6]. Les recommandations ne sont pas suivies pour plusieurs raisons : le manque de connaissance et de formation des médecins, le manque de disponibilité du matériel spéci que et le peu d’études cliniques randomisées appuyant les recommandations de la BTS.
Alors que le pneumothorax spontané primaire est une maladie « bénigne », n’affectant pas la survie (le pneumotho-rax compressif n’existe pas dans le cadre du PSP), on impose un traitement conséquent avec hospitalisation de plusieurs jours (4 à 9 jours) et repos au lit qui ne sont pas nécessaires. De plus, le coût de ce traitement conventionnel est élevé.
connaître l’existence de recommandations sur la prise en charge du pneumothorax. Les médecins sont également souvent inquiets d’un traitement ambulatoire et d’un risque de pneumothorax compressif, qui pourtant ne survient jamais dans le cadre des pneumothorax spontanés primaires.
Le risque d’échec de l’exsuf ation est élevé et doit alors amener à un drainage et une aspiration. Ce risque est associé à une peur de l’échec chez les médecins, qui sont alors moins enclins à l’utilisation de l’exsuf ation. Le succès immédiat est obtenu seulement dans 30 à 40 % des cas pour l’exsuf ation, contre 60 à 70 % pour le drainage [8-9].
Le manque de disponibilité du matériel spéci que ralen-tit également la diffusion de la technique d’exsuf ation. En cas d’absence de set destiné à l’aspiration manuelle (l’exsuf ation à l’aiguille), la BTS propose d’assembler le matériel avec une seringue de 50 ml, des cathéters plastiques 16-18 gauge, et un robinet 3 voies. Les cathé-ters usuels ne sont pas adaptés à l’exsuf ation : ils sont destinés à faciliter l’écoulement d’un liquide, ils sont trop courts et inadaptés pour l’évacuation de l’air, facilement endommagés en traversant la paroi thoracique, et souvent tordus à l’entrée de la paroi.
En n, le manque de données dans la littérature sur l’intérêt de l’exsuf ation explique également, en par-tie, l’absence de généralisation de cette technique. Il y a peu d’études randomisées comparant l’ef cacité de l’exsuf ation par rapport au drainage dans le traitement du PSP, et encore moins de données sur la qualité de vie, la satisfaction du patient et le coût.
Les études clés de la prise en charge ambulatoire du pneumothorax
lack of knowledge, training, equipment availability and literature data. The exsuf ation treatment, if it is simpli ed and adapted to emergency services could allow ambulatory care, providing better comfort for the patient and lower cost for society. Two rst French studies were carried out and are in favor of this treatment.© 2013 SPLF. Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
208 C. H. Marquette
en aspiration. La durée moyenne d’hospitalisation était de 2,3 ± 1,3 jours avec un succès et sortie à 24 h dans 61 % des cas. Tous les patients étaient mobiles pendant l’hospitalisation (les 2/3 ont pris une douche dans les 24 premières heures). Devant le succès de ce schéma d’exsuf ation simpli é et adapté au service d’urgences, une deuxième étude a été construite pour évaluer la possi-bilité d’un traitement ambulatoire avec cette technique : l’étude PRIAP.
L’étude PRIAP (prise en charge ambulatoire du pneumo-thorax spontané primaire) avait pour objectif d’évaluer
l’ef cacité et la sécurité d’une procédure de prise en charge ambulatoire du PSP basée sur l’utilisation du drain de Fuhrman [11]. Il s’agit d’une étude de cohorte mono-centrique, prospective, non contrôlée menée au CHRU de Lille. Les critères d’inclusion étaient un premier épisode de PSP ou de récidive controlatérale chez des patients âgés de plus de 16 ans, sans antécédent respiratoire ni traumatique récent, et sans défaillance hémodynamique. Les patients devaient être cliniquement stables, habiter à moins d’une heure du centre hospitalier et avoir compris l’ensemble du traitement. Le schéma de l’étude est reporté dans les gures 2 et 3. Les résultats sont favorables à la prise en charge ambulatoire (Fig. 4) puisque sur les 60 patients inclus, le taux de succès était de 80,3 %. Ainsi, sur les 48 patients ayant nécessité la pose d’un drain de Fuhrman, il y a eu un succès de traitement dans 80 % des cas. Trente-six patients (60 %) étaient rentrés à domicile avec ou sans drain, 6 ont été hospitalisés car la radio-graphie de thorax à la vingt-quatrième heure montrait une persistance du pneumothorax. La durée moyenne d’hospitalisation était de 2,3 jours et le taux de récidive sur les deux ans était de 16 %.
Une autre étude française réalisée à Lorient a con rmé ces résultats. L’étude évaluait 132 patients dont 110 PSP et 22 PSS. Cent trois patients (78 %) ont été traités exclusive-ment en ambulatoire avec un taux de succès à J4 de 85,4 % pour les PSP et 72,7 % PSS. D’autres études randomisées sont en cours pour con rmer ces données.Figure 1. Drain de Fuhrman (drain queue de cochon).
smallpneumothorax
Follow up H4 ± 1
Stability
Instability mini-catheter + Heimlich valve
largepneumothorax
or dyspnea
Follow up
Failure
• CRX at H4 ± 1 if before 8-9 pm• CRX next day if after 8-9 pm
Without catheterat H4
Success
Prise en charge du pneumothorax 209
Conclusion
Les méthodes de traitements des pneumothorax spontanés sont multiples avec des enjeux différents pour le médecin et le patient dans le choix du traitement. Si on suit les recommandations de la BTS, l’exsuf ation devrait être
Without catheterat H4
Clinical follow up+ CRX on thenext work day
Clinical follow up+ CRX
on day 7
airleakstops
catheter withoutsuction for 24 H
Clinical follow up+ CRX
on day 7
Catheterremoval
Success Hospit
Success
Failure Suction(– 20 cm H2O)
Follow up + CRX atH24 and H48
airleak persistingafter 48 H
Pleurodesis(talcage or VATS)
Figure 3. Schéma de l’étude PRIAP [10], si échec de l’exsuf ation à H4.
PSP enrolled,n = 60
Hospitalized,n = 24 (40 %)
Discharged,n = 36 (60 %)
Baseline
Hour 4
210 C. H. Marquette
[5] Mendis D, El-Shanawany T, Mathur A. A RedingtonManagement of spontaneous pneumothorax: are British Thoracic Society gui-delines being followed? Postgrad Med J 2002;78:80-4.
[6] Packham S, Jaiswal P. Spontaneous pneumothorax: use of aspi-ration and outcomes of management by respiratory and gene-ral physicians. Postgrad Med J 2003;79:345-7.
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[11] Massongo M, Leroy S, Scherpereel A, et al. Outpatient mana-gement of primary spontaneous pneumothorax: a prospective study. Eur Respir J 2013 (in press).
Liens d’intérêtsC.-H. Marquette : au cours des 5 dernières années, le Pr Marquette déclare avoir reçu 5 000 € des laboratoires COOK pour nancer des actions de formation pratique à la pose de drains pleuraux.A. Gibelin : intérêts en lien avec le manuscrit : aucun.
Références[1] Tschopp JM, Rami-Porta R, Noppen M, Astoul P. Management
of spontaneous pneumothorax: state of the art. Eur Respir J 2006;28:637-50.
[2] Miller AC, Harvey JE. Guidelines for the management of spon-taneous pneumothorax. Standards of Care Committee, British Thoracic Society. BMJ 1993;307:114-6.
[3] Soulsby T. British Thoracic Society guidelines for the manage-ment of spontaneous pneumothorax: do we comply with them and do they work? J Accid Emerg Med 1998;15:317-21.
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