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Quels sont les principaux obstacles de l’accès aux soins selon les
médecins ?Confrontation des enquêtes réalisées auprès des patients (CSA
Oct. 2011) et auprès de médecins généralistes et spécialistes (CSA Mai 2012)
Dr Jean-Paul Ortiz, Président de l’Union Régionale des Professionnels de Santé Médecins Libéraux du Languedoc-Roussillon
Travaux réalisés par Joy Raynaud, Géographe de la santé
Paris, le 14 novembre 2012
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En 2030 en France, selon les projections de la DREES(1), il y aura :
Baisse plus marquée pour les spécialistes
Moins de médecins libéraux exclusifs ◦ MG : 60% à 56%◦ Spé : 36% à 29%
◦ En Languedoc-Roussillon : chute de 30% de la densité moyenne de médecins libéraux par habitant.◦ Une augmentation de la population de 30%◦ Une baisse du nombre de médecins libéraux de 8%◦ (augmentation du numérus clausus, niveau des flux d’entrée dans la vie active,
structure par âge des médecins, nombre de sorties de la vie active sur la période considérée et flux migratoires lors de l’entrée et de la fin de carrière)
(1) Direction de la Recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques. Sources : ATTAL-TOUBERT K., VANDERSCHELDEN M. (2009), « La démographie médicale à l’horizon 2030 : de nouvelles projections nationales et régionales », Etudes et Résultats, DREES, N° 679. Données issues du fichier du Conseil national de l'Ordre des médecins pour l'année 2006. Projections de population INSEE et DREES. Données concernant les médecins en activité régulière ou remplaçants, hors médecins en cessation temporaire d'activité, France métropolitaine et DOM.
Un contexte national et régional évoluant vers une offre de soins déficitaire
- 36% en ophtalmo
+ 47% en neuro
- 32% en dermato
+ 40% en chirurgie
- 30% en rhumato
+ 24% en endocrino
- 19% en ORL + 13% en gynéco
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Objectif et méthode
OBJECTIFDéterminer les obstacles réels de l’accès aux soins à partir des perceptions des acteurs du territoire
METHODEConfronter les perceptions des patients et des médecins libéraux afin d’identifier les obstacles de l’accès aux soins et d’étudier les solutions envisagées par les médecins.
Interviews téléphoniques réalisées par l’institut CSA (études et sondage)o Enquête auprès des patients : échantillon de 1 006
habitants (méthode des quotas selon le sexe, l’âge, la catégorie socioprofessionnelle du chef de famille, le niveau de diplôme).
o Enquête auprès des médecins : échantillon de 498 médecins libéraux (253 généralistes et 245 spécialistes).
Typologie des communes du Languedoc-Roussillon selon le zonage en aires urbaines de l’INSEE de 2010
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PARTIE IConfrontation des enquêtes auprès des patients et des
médecins
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L’âge : 91% des 75 ans et plus n’ont aucune difficulté contre 53% pour les 18 à 24 ans
Plus d’une personne sur dix a renoncé au moins une fois à consulter
Synthèse des résultats de l’enquête auprès des patients : les principales difficultés pour consulter un généraliste
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Obstacle financier et temps d’attente en cabinet : les deux difficultés majeures selon les généralistes
MÉDECINS PATIENTS
LE MONTANT DES SOINS PRESCRITS RESTANT À LA
CHARGE DU PATIENT
1ÈRE DIFFICULTÉSouvent : 16% - De temps en temps : 36%
3ÈME /4ÈME DIFFICULTÉSouvent : 4% - De temps en temps : 12%
LE TEMPS D’ATTENTE EN CABINET
2ÈME DIFFICULTÉSouvent : 15% - De temps en temps : 28%
1ÈRE DIFFICULTÉpour 15% des patients
Le montant des soins prescrits : l’obstacle majeur selon les généralistes
Le montant des soins prescrits restant à la charge du patient serait un obstacle nettement plus important que le montant de la consultation (notamment hors des grands pôles urbains).
Le temps d’attente en cabinet : un obstacle selon 58% des généralistes exerçant en
communes rurales
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Synthèse des résultats de l’enquête auprès des patients : les principales difficultés pour consulter un spécialiste
Disparités géographiques : la Lozère et les zones urbaines sensibles (ZUS) sont les territoires ayant les plus grandes difficultés pour consulter un spécialiste
Activité et âge : les actifs (employés, artisans, commerçants, chefs d’entreprise) âgés de 35 à 64 ans sont ceux qui rencontrent le plus de difficultés
Près d’un quart des personnes interrogées ont renoncé au moins une fois à consulter
Patients et médecins spécialistes : des perceptions différentes des obstacles de l’accès aux
soins
MÉDECINS PATIENTS
LE MONTANT DES SOINS PRESCRITS RESTANT À LA
CHARGE DU PATIENT
1ÈRE DIFFICULTÉSouvent : 18% - De temps en
temps : 24%
4ÈME DIFFICULTÉDifficultés financières :
obstacle majeur pour 6% des patients
LA DIFFICULTÉ DU TRAJET
2ÈME DIFFICULTÉSouvent : 16% - De temps en
temps : 23%
2ÈME DIFFICULTÉLes difficultés liées au trajet : obstacle majeur pour 6% des
patientsMais la 1ÈRE DIFFICULTÉ pour les patients : le délais d’attente pour obtenir un rendez-vous (43%)
Le montant des soins prescrits : l’obstacle majeur selon les spécialistes
Le montant des soins prescrits restant à la charge du patient serait un obstacle nettement plus important que le montant de la consultation (notamment dans les communes rurales).
Les difficultés liées au trajet selon le lieu d’exercice des spécialistes
Pour les spécialistes, les difficultés liées au trajet sont plus importantes dans les grands pôles urbains et dans les communes rurales
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Patients, généralistes et spécialistes : un même constat des spécialités où la prise en charge des
patients est difficile
Côté patients : Les trois spécialités dont le taux de renoncement est le plus fort sont :
- l’ophtalmologie (citée par 43% des personnes interrogées)
- la dermatologie (citée par 23% des personnes interrogées)
- la gynécologie (citée par 17% des personnes interrogées)
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PARTIE II La recherche des causes des
difficultés de l’accès aux soins
Selon les généralistes, manque-t-il des généralistes actuellement et dans cinq ans ?
ACTUELLEMENT : « Oui » à 44%, il en manque en moyenne 3 par secteur de patientèle.
DANS CINQ ANS : « Oui » à 78%, il en manquera en moyenne 5,5 par secteur de patientèle.
Selon les spécialistes, manque-t-il des spécialistes aujourd’hui et dans cinq ans ?
ACTUELLEMENT : « Oui » à 44%, il en manque en moyenne 3 par secteur de patientèle.
DANS CINQ ANS : « Oui » à 71%, il en manquera en moyenne 5 par secteur de patientèle.
Beaucoup d’heures de travail pour les généralistes libéraux
Moyenne des heures de travail par semaine des généralistes : 53 heures (63 heures en rural)
61% des généralistes pensent qu’ils travaillent trop
Le sentiment de « travailler trop » varie peu suivant la présence ou non d’un secrétariat médical ou suivant si le généraliste exerce en cabinet isolé (58%) ou de groupe (66%)
Pourtant 7 généralistes sur 10 pensent que le temps dédié aux soins est convenable
Beaucoup d’heures de travail pour les spécialistes libéraux
Moyenne des heures de travail par semaine des spécialistes : 48 heures (52 heures en rural)
41% des spécialistes pensent qu’ils travaillent trop
Le sentiment de « travailler trop » :- varie peu suivant que le spécialiste exerce en cabinet isolé ou de
groupe- varie beaucoup avec un secrétariat médical (48%) ou bien sans
secrétariat (33%).
Pourtant 7 spécialistes sur 10 pensent que le temps dédié aux soins est convenable
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POUR LES GÉNÉRALISTES
Facteurs augmentant « souvent » leur temps de travail :
- Augmentation de la charge administrative ou de la paperasse (79%)
- Augmentation du nombre de problèmes dans une même consultation (77%)
- Prise en charge des patients atteints de pathologies graves (61%)
- Vieillissement de la patientèle (56%)
- Prise en charge des patients atteints de maladies ou affections chroniques (56%)
POUR LES SPÉCIALISTES
Facteurs augmentant « souvent » leur temps de travail :
- Augmentation de la charge administrative ou de la paperasse (59%)
- Augmentation du nombre de problèmes dans une même consultation (47%)
Quels facteurs augmentent le temps de travail des médecins ?
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La possibilité de prendre des rendez-vous : une solution pour diminuer le temps d’attente en
cabinet ? TEMPS D’ATTENTE MOYEN
TEMPS D’ATTENTE SELON LA POSSIBILITÉ DE PRENDRE RENDEZ-VOUS
Pour les généralistes : 28 minutes
(35 min : Gard et communes rurales)
Pour les spécialistes : 18 minutes
(29 min dans l’Aude)
Pour les généralistes :
RDV à tout moment : 17 min
RDV sur des créneaux précis : 29 min
Sans RDV : 38 min
28% des généralistes ont un secrétariat (dont 69% sont de type physique)
Pour les spécialistes :
RDV à tout moment : 16 min
RDV sur des créneaux précis : 20 min
62% des spécialistes ont un secrétariat (dont 88% sont de type physique)
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Des pistes pour identifier les causes des difficultés de l’accès aux soins
Une offre de soins ressentie par les médecins comme étant déficitaire :
Près d’un médecin sur deux pense qu’il manque des médecins actuellement
Plus de 7 sur 10 pensent qu’il en manquera davantage dans 5 ans
Sentiment de travailler trop : pour 61% des généralistes et 41% des spécialistes
Une amélioration des conditions de travail des médecins pour :
Renforcer le temps médical : diminution de la paperasse Différencier les consultations en fonction du nombre de
motifs (temps, tarifs…) Diminuer le temps d’attente en cabinet : possibilité pour les
patients de prendre des RDV à tout moment chez le généraliste (nécessite un secrétariat)
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PARTIE III Les perceptions des médecins concernant les solutions pour
réduire les délais d’attente pour la prise en charge des patients
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Le regroupement : une solution pour réduire les délais d’attente pour obtenir une consultation selon les
généralistes
SOLUTIONS AGE TYPES DE COMMUNES
SE REGROUPER POUR LA PERMANENCE DES SOINS (76%)
SE REGROUPER POUR LA CONTINUITÉ DES SOINS (67%)
PRENDRE UN ASSOCIÉ (47%)
DÉLÉGATION DE TÂCHES SOUS FORME LIBÉRALE (46%)
DÉLÉGATION DE TÂCHES SOUS FORME DE SALARIAT (36%)
Le regroupement : une solution souhaitée par les jeunes généralistes
et ceux exerçant en milieu rural
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Un secrétariat médical pour diminuer le temps d’attente ?
77% des généralistes pensent qu’un secrétariat médical ne permet pas de diminuer le temps d’attente en cabinet.
Deux hypothèses explicatives :- Les médecins pensent qu’un secrétariat n’est pas suffisant
pour diminuer le temps d’attente : la solution est l’augmentation de la démographie médicale (Lozère).-Les habitudes de travail
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Des consultations avancées dans les territoires sous-dotés ?
22% des médecins généralistes sont prêts à faire des consultations avancées (à plus de 50 kilomètres).
Ceux exerçant en communes rurales sont 52%
Durée médiane de 2 jours par mois.
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(MG : 76%)
(67%)
(47%)
(46%)
(36%)
Le regroupement : également une solution pour réduire les délais d’attente pour obtenir une consultation selon
les spécialistes
SOLUTIONS AGE TYPES DE COMMUNES
SE REGROUPER POUR LA PERMANENCE DES SOINS (67%)
SE REGROUPER POUR LA CONTINUITÉ DES SOINS (54%)
PRENDRE UN ASSOCIÉ (51%)
DÉLÉGATION DE TÂCHES SOUS FORME LIBÉRALE (35%)
DÉLÉGATION DE TÂCHES SOUS FORME DE SALARIAT (29%)
Le regroupement : une solution souhaitée par les jeunes spécialistes
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Des consultations avancées dans les territoires sous-dotés ?
26% des médecins spécialistes sont prêts à faire des consultations avancées (à plus de 50 kilomètres)
Durée médiane de 2 jours par mois.
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Conclusion et perspectives (1)
Une offre de soins qui semble déficitaire pour les médecins et les patients :
Près d’un médecin sur deux pense qu’il manque des médecins actuellement
Plus de 7 sur 10 pensent qu’il en manquera davantage dans 5 ans
Sentiment des médecins de travailler trop Principale difficulté des patients pour consulter un
généraliste : temps d’attente en cabinet Principale difficulté des patients pour consulter un
spécialiste : délais d’obtention d’un rendez-vous
Les solutions des médecins libéraux : Regroupement et collaboration avec un associé Coordination pour une meilleure organisation de la
continuité et de la permanence des soins. Volontariat limité pour des consultations avancées : les
jeunes spécialistes (moins de 50 ans) et les généralistes plus âgés (65 ans)
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Conclusion et perspectives (2)
Les difficultés d’accès aux soins proviennent-elles d’un manque de médecins ou bien d’une organisation qui n’est pas en adéquation avec les besoins des médecins et des patients ? Þ Pour les médecins : améliorer les conditions de travail, renforcer le
temps médical, diminuer le temps administratif, travailler moins, avoir des remplaçants pour les congés…
Þ Pour les patients : besoin de consulter en dehors des horaires de bureau, diminuer le temps d’attente en cabinet, obtenir des rendez-vous à heure précise…
Les obstacles de l’accès aux soins un sujet complexe : plusieurs dimensions, perceptions divergentes selon les acteurs concernés et selon les lieux
Nécessité de prendre en compte les perceptions pour identifier un ensemble de solutions opérationnelles en adéquation avec le vécu des acteurs
Approfondir les retours d’expériences des nouvelles organisations et pratiques des médecins libéraux afin d’identifier les enjeux et les limites de ces solutions
Enquêtes sur des territoires ciblés et sur des spécialités libérales précises afin d’identifier leurs spécificités.