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Restructurations et cadres d’interventions publiques en Europe

Présentation pour le séminaire de l’IRES

14 avril 2005

Claude Emmanuel TRIOMPHE

Délégué général

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S’agissant des politiques publiques en matière de restructurations, le regard européen – celui

qui porte à la fois sur les divers Etats-membres et sur le niveau proprement communautaire - exige une

très grande prudence. Au niveau national, la définition des restructurations est variée. Il en va de

même avec les modes d’intervention publiques : régulation par la loi, par des incitations économiques,

par le renvoi aux partenaires sociaux, par des recommandations ou encore par la « non intervention ».

Quant au cadre communautaire, il est une sorte de compromis entre les diverses cultures des

Etats-membres. Marqué par des influences françaises, belges et allemandes non négligeables en

matière de législation, il évolue aujourd’hui de manière plus aléatoire et comporte une grande diversité

de composantes : directives, dialogue social interprofessionnel ou sectoriel, instruments financiers

notamment liés aux fonds structurels (FSE, FEDER ou FEOGA), recommandations, indicateurs

d’objectifs, documents à statuts divers...

Cadres nationaux comme cadre communautaires sont aujourd’hui bousculés : des

restructurations récurrentes, des déséquilibres territoriaux persistants ou aggravés, une mobilité

nouvelle des entreprises, intra et extra européenne, ou des travailleurs, notamment liée à

l’élargissement, un chômage de masse relativement élevé au sud (France, Allemagne et Belgique

incluses) et à l’est du continent sont à l’origine de nombreuses initiatives visant à rénover les cadres

traditionnels d’action.

Initialement prévu pour permettre une analyse comparative, notre propos s’est réorienté autour

du cadre communautaire, de l’éclairage de ses diverses composantes et de quelques exemples

nationaux propres à nourrir un débat français récurrent et difficile.

1. Restructurations : concepts, notions et données en Europe

Pas plus qu’en France et bien qu’elle soit communément utilisée, la notion de restructuration

n’a pas de définition juridique en Europe. Les droits nationaux parlent

- d’une part de modification dans la situation de l’entreprise, de fusion, absorption ou de

transferts d’entreprises

- d’autre part et dans certains cas de réorganisations

- enfin de licenciements collectifs ou de licenciements liés à l’entreprise, de licenciement pour

cause économique ou objective.

Ceci a de multiples conséquences. D’une part, l’absence d’une notion de restructurations en tant

que telle – à l’exception du cas allemand (cf. plus loin) - d’autre part une compréhension variable de

ce terme car les « restructurations » renvoient à des contextes très différents.

Le contexte allemand, avec ses champions industriels et ses entreprises qui émigrent au-delà des

frontières polonaises ou tchèques – sans parler dans les nouveaux Länder, de la restructuration radicale

des activités productives depuis la réunification - est très différent de celui du Danemark, dont le tissu

est peu marqué par de grandes entreprises multinationales. La Belgique, avec son sud encore très

marqué par la sidérurgie et la métallurgie et son Nord plus orienté services et activités de haute

technologie diffère très profondément de la Pologne ou d’autres Etats d’Europe centrale où

restructurations rimaient encore très largement avec privatisations et rachats des champions nationaux

par du capital étranger (et souvent ouest européen). L’Espagne vit une situation partagée avec

quelques secteurs industriels déjà largement restructurés – sidérurgie, chantiers navals et automobile -

une industrie du textile et du cuir en pleine reconfiguration, une industrie du tourisme tout à fait vitale

et la montée des services.

Par ailleurs, le débat lié aux restructurations n’est pas le même. Celui-ci est faible en Grande

Bretagne, en Irlande et dans la majeure partie des pays scandinaves. Celui-ci est fort en Allemagne,

dans le sud de la Belgique, en Pologne ou en République Tchèque. Il est « tiède » dans les autres.

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Enfin, les cadres d’interventions publiques comme les données disponibles sont très hétérogènes.

Ainsi, s’agissant des licenciements « économiques » comme des mesures sociales à l’échelle de l’UE,

il est frappant de constater qu’il n’y a pratiquement aucune donnée disponible à l’échelle de l’Union (à

15 comme à 25) et qu’à l’échelle nationale celles-ci sont parfois inexistantes et généralement

fragmentaires.

Savoir qui entreprend ou qui est affecté par des restructurations, même limitées à la notion de

licenciements collectifs, mesurer l’importance des pratiques indemnitaires, des dispositifs de

reconversion, de reclassement ou de réadaptation à la suite de restructurations et de licenciements

collectifs relève aujourd’hui en Europe de l’impossible et souvent de l’impensé.

2. Restructurations : le cadre d'action communautaire

Il est tentant dans cette situation très contrastée d’observer le cadre communautaire. Incomplet,

non prescriptif, parfois surtout rhétorique, il présente l’avantage néanmoins d’offrir une palette

d’instruments variés, d’être aujourd’hui lui aussi tout à la fois bousculé et stimulant pour les réformes

et négociations en cours liées aux restructurations.

Si l’on veut appréhender la question du cadre communautaire d’action sur les restructurations, il

faut nécessairement envisager :

- le niveau législatif avec les directives

- le niveau conventionnel avec le dialogue social européen

- les instruments de "soft law" constitués de la stratégie européenne de l’emploi et d’un certain

nombre d’actes politiques (communications, agenda social, rapports publics etc..)

- les instruments institutionnels et techniques reliés à la question des restructurations, tels que

certains objectifs ou chapitres du Fonds social européen d’une part, la mise en route de

l’observatoire européen du changement de l’autre.

2.1. Les directives et les restructurations

Notre droit social européen envisage la question des restructurations et de sa gestion sociale au

travers de 4 textes assez significatifs dont un des dénominateurs communs est le niveau de l’entreprise

(par différence avec le niveau sectoriel ou territorial)

La directive 98/9 de 1975, modifiée en 1998 sur les licenciements collectifs Cette directive prend en considération un aspect des restructurations d’entreprises, à savoir celui

des licenciements collectifs. Le droit communautaire définit alors ce que sont pour lui les

licenciements collectifs au travers de trois critères : un nombre de licenciements projetés, une durée de

mise en oeuvre de ce projet et enfin une taille d‘entreprise. On notera le caractère optionnel des

niveaux fixés par la directive qui laisse le choix aux Etats-membres d’un nombre de licenciements au

moins égal à 10 dans des établissements employant habituellement plus de 20 ou bien au moins 20

licenciements sur une période de 90 jours quelle que soit la taille de l’établissement.

S’agissant de la gestion sociale, l’objectif affirmé de la directive est de réduire les différences

entre les diverses mesures nationales susceptibles d’atténuer les conséquences des licenciements sur

les travailleurs. Selon son article 2, l’employeur doit procéder à des consultations afin, entre autres,

d’examiner les possibilités d’éviter et de réduire les licenciements collectifs mais aussi d’envisager des

mesures sociales d’accompagnement visant à atténuer les conséquences des licenciements sur les

travailleurs, notamment par l’aide au reclassement ou à la reconversion. La même directive indique

d’une part que l’autorité publique doit être informée des licenciements collectifs et d’autre part peut ou

doit chercher des solutions aux problèmes posés par ces licenciements.

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La directive 2001/23 du 12 mars 2001 sur les transferts d’entreprises, modifiant la directive

originelle de 1977 Cette dernière directive considère les transferts, au sens des modifications dans la situation

juridique de l’entreprise – par fusion, cession, acquisition etc… - et énonce le principe du maintien des

contrats de travail. Elle précise dans son article 7, que la procédure d’information consultation doit

notamment porter sur les mesures envisagées à l’égard des travailleurs, et ce « en temps utile, et en

tout cas avant que les travailleurs ne soient affectés directement dans leurs conditions d’emploi et de

travail par le transfert ».

La directive 1994/45 du 22 septembre 1994 sur les comités d’entreprise européens Celle-ci prévoit, dans ses prescriptions subsidiaires, que la direction de l’entreprise doit informer

et consulter les membres de ce comité, en cas de circonstances exceptionnelles « affectant

considérablement les intérêts des travailleurs, notamment en cas de délocalisation, de fermeture

d’entreprises ou d’établissements ou de licenciements collectifs ».Elle élargit à cette occasion la

définition de la directive de 1975 sur les licenciements en mentionnant explicitement les

délocalisations ou les fermetures.

La directive 2002/14 du 11 mars 2002 sur l’information consultation au niveau national

Cette directive ne prend en compte que les conséquences des restructurations, sans même en citer

l’une des formes possibles. Elle considère dans ses attendus que les cadres juridiques communautaires

et nationaux sont excessivement orientés vers le traitement a posteriori des problèmes d’emploi. Elle

préconise de renforcer le dialogue social notamment pour anticiper les risques. L’information

consultation en matière d’évolution de l’emploi doit se développer pour dégager des mesures

anticipatrices en matière de formation et de développement des compétences des travailleurs afin

d’améliorer leurs capacités d’insertion et d’adaptation professionnelle. Selon son article 4,

l’information consultation doit porter sur la situation et l’évolution de l’activité mais aussi sur la

structure et l’évolution de l’emploi, de manière à pouvoir envisager d’éventuelles mesures

d’anticipation en cas de menaces sur l’emploi.

2.2. Les autres actes communautaires

Il est intéressant de souligner que les restructurations ont fait l’objet de nombreux et récents

travaux postérieurs à la fermeture de l’usine Renault de Vilvoorde, qui, sans avoir au moins pour

l’instant de caractère normatif, sont tout à fait intéressants sur les concepts qu’ils véhiculent. Nous en

retiendrons quatre :

- la décision de créer l’observatoire européen du changement

- le document de saisine des partenaires sociaux européens sur les restructurations au titre des

articles 138 et 139 du Traité

- le nouvel agenda social de l’UE pour la période 2005-2010

- la toute récente communication de la Commission – 31 mars 2005 – intitulée

« Restructurations et Emploi - Anticiper et accompagner les restructurations pour développer

l’emploi : le rôle de l’Union Européenne ».

2.2.1. L’observatoire européen du changement "European Monitoring Center for Change" – EMCC)

Issu des conclusions de plusieurs groupes de travail consécutifs à l’affaire « Vilvoorde »,

l’Observatoire européen a été formellement créé en 2001 par une décision du Conseil européen de

Stockholm. Installé au sein de la Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et

de travail (dite Fondation de Dublin), l’observatoire est un instrument destiné à recueillir toutes les

données pertinentes en matière de « restructurations en Europe » afin de fournir aux acteurs sociaux

les moyens d’analyser le changement et d’en anticiper les conséquences. Administré par des

représentants des partenaires sociaux européens, de la Fondation et de la Commission Européenne, il

diligente un certain nombre d’études, de séminaires et met à la disposition une banque de données

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quantitative et qualitative à destination des entreprises, des partenaires sociaux, des autorités

nationales et territoriales et des institutions européennes.

2.2.2. La saisine des partenaires sociaux sur les restructurations en 20021

Conséquence elle aussi de l’effet Vilvoorde, l’initiative de la Commission en 2002 sur les

restructurations a comporté, conformément au traité de l’UE, une première phase de consultation des

partenaires sociaux européens. Dans un document intitulé « Anticiper et gérer le changement : une

approche dynamique des aspects sociaux des restructurations d'entreprises », la Commission explique

que les « restructurations d’entreprises sont un élément important du processus de changement » et

que la gestion de ce dernier est capital pour la miser en œuvre de la stratégie de Lisbonne qui repose

sur une approche positive des mutations socio-économiques. Les restructurations – d’entreprises, de

secteurs, de régions entières - sont créatives et moteurs de changement même si leurs conséquences

sociales sont parfois douloureuses. Le document passe ensuite en revue les arguments qui militent

pour une action communautaire (restructurations médiatisées, développement du marché intérieur,

futur élargissement, présence montante d’entreprises transnationales, globalisation et les actions

d’adaptation qu’elle requiert). La commission se réfère ensuite à diverses délibérations du Conseil et

du Parlement pour encourager le développement et la diffusion de bonnes pratiques sans forcément

viser à l‘harmonisation des règles.

Dans une deuxième partie du document, elle liste les politiques communautaires qui peuvent

influer sur la gestion des restructurations avant d'aborder dans une troisième partie les orientations

possibles pour l’avenir.

Partant d’un constat que dans la plupart des Etats-membres, la gestion des restructurations

essaie de promouvoir une meilleure anticipation, que le licenciement constitue une ultima ratio, que

beaucoup s’essaient à des solutions alternatives aux licenciements, la Commission interroge les

partenaires sociaux sur l’opportunité de dégager des principes d’action à l’échelle de l’Union, sur les

méthodes d’élaboration de tels principes et sur la place du dialogue social, sur toute autre initiative

communautaire appropriée. Elle ouvre enfin un certain nombre de domaines possibles de discussion :

- sur l’employabilité et la flexibilité avec la sécurisation des trajectoires professionnelles, le

soutien en matière d’employabilité et d’adaptabilité et la prise en considération des options de

restructurations au moindre coût social

- sur l’efficacité et la simplification avec la rationalisation des cadres juridiques et

réglementaires

- sur la responsabilité « extérieure » des entreprises : responsabilité territoriale et responsabilités

en aval sur les sous-traitants

- sur les modalités de mise en oeuvre des restructurations : implication des travailleurs, juste

compensation, prévention et résolution des conflits, situation particulière des PME.

2.2.3. Les propositions de lignes directrices pour les politiques de l’Emploi des Etats membres2

Ces lignes, fruit de la fameuse stratégie de Lisbonne et de la méthode ouverte de coordination,

sont adoptées annuellement sur proposition de la Commission et ne visent pas explicitement les

restructurations mais insistent sur la capacité d’adaptation des entreprises et des travailleurs.

Ces lignes directrices se déclinent ensuite en recommandations par Etats- membres et l’on

notera qu’en 2004, dans le chapitre consacré à l’amélioration de la capacité d’adaptation des

travailleurs et des entreprises, plusieurs d’entre eux se voyaient conseiller d’améliorer leurs systèmes

de gestion des restructurations : la Belgique, la France, l’Autriche (sous l’aspect des indemnités de

départ et des prestations-chômage pour les travailleurs non qualifiés) et la Lituanie (afin d’impliquer

les partenaires sociaux dans la gestion des restructurations).

Enfin, ces lignes s’inscrivent dans les objectifs généraux de la stratégie européenne de

l’emploi et notamment dans le relèvement du taux d’activité des seniors à 50 % : la poursuite de cet

objectif n’est évidemment pas sans incidence que ce soit sur la sélection de la main d’œuvre en termes

1 Cf. Document de la Commission du .1. 2002

2 Cf. Communication de la Commission du 7.4.2004

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de classes d’âge ou sur les systèmes d’accompagnement social du type « préretraites » que la France-

avec l’Allemagne, la Belgique mais aussi sous d’autres formes l’Italie et les Pays-Bas - a largement

pratiqués.

2.2.4. L’agenda social 2005-20103

L’agenda social est un des instruments de la méthode ouverte de coordination. Il inscrit pour

une période donnée un certain nombre de thèmes que l’UE se propose de traiter, sachant que cette liste

est périodiquement révisée.

L’agenda 2005-2010 se propose, ente autres, et sous couvert de l’objectif prioritaire du plein

emploi, d’adopter une approche stratégique de l’anticipation et de la gestion positive du changement.

A ce titre sont visés : « les restructurations, les délocalisations, l’outsourcing et la

désindustrialisation ». Le même agenda se propose, dans le cadre d’une amélioration de la

réglementation, de « mettre à jour » les directives sur les transferts d’entreprises et sur les

licenciements collectifs.

2.2.5. La communication de la Commission du 31 mars 2005

Celle-ci, intitulée « Restructurations et emploi : anticiper et accompagner les restructurations

pour développer l’emploi – le rôle de l’UE », fait suite à l’adoption de l’agenda social le 9 février

2005 et tente de développer une approché intégrée des restructurations.

Dans ce document, les restructurations – qu’il s‘agit de bien anticiper et de bien gérer – sont

mêlées aux concepts de mutations socio-économiques profondes, de « recomposition permanente du

tissu productif », de changement mais aussi de concentrations d’entreprises ou de reconversion. Cette

communication passe en revue tous les instruments communautaires disponibles :

- ceux de la méthode ouverte de coordination avec le renforcement de la coordination entre

Etats-membres et la réforme de la stratégie européenne de l’emploi

- ceux des fonds structurels, à commencer par le FSE qui comportera désormais une enveloppe

d’1 Md € destinée à gérer les crises mais aussi le FEDER

- ceux des diverses politiques concernées : emploi, industrie, concurrence, relations avec les

pays extra- communautaires accompagnées de l’annonce de la création d’une « task force »-

restructurations

- ceux relatifs à la mesure et au suivi des restructurations développés par l’Observatoire

Européen du changement (EMCC)

- ceux du dialogue social avec l’appel, répété plusieurs fois, aux partenaires sociaux

interprofessionnels pour la mise en œuvre de leur texte de 2003 (cf. plus loin) mais aussi

l’appel aux partenaires sociaux sectoriels et l‘annonce de la mise en place dès 2005 d’un

forum multi parties prenantes sur les « Restructurations »

- ceux relatifs à la responsabilité sociale de l’entreprise avec l’annonce d’une communication de

la Commission sur la RSE et les initiatives d’entreprises pratiquant des restructurations

socialement responsables

- ceux de la réglementation avec l’annonce, dans le cadre d’un livre vert sur le droit du travail,

de propositions visant à favoriser des transitions efficaces sur le marché du travail mais aussi

la révision des directives sur les licenciements, sur les transferts d’entreprises et une

proposition de directive sur la portabilité des droits à pension complémentaire afin de favoriser

la mobilité intracommunautaire

3 Cf. Communication de la Commission du 9.2.2005

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2.2.6. Les fonds communautaires

Ceux-ci jouent à plusieurs niveaux

- sectoriels, notamment avec le FEOGA qui a contribué pour beaucoup à la modernisation de

l’agriculture européenne et, en particulier, française

- régionaux, avec le FEDER et son soutien aux actions de rattrapage, d’aménagement et de

réaménagement des régions les plus en retard

- d’entreprises avec le FSE et ses budgets alloués notamment aux actions de qualification,

requalification et d’adaptation de la main d’œuvre.

2.3. Le dialogue social européen

Les restructurations ne sont pas un objet facile de dialogue social et les partenaires sociaux

européens ne s’en sont saisis que récemment, alors que le patronat européen privé (l’UNICE) était

majoritairement réticent et que le mouvement syndical était partagé (avec un certain nombre de

confédérations nationales réservées face à des thèmes qu’elles jugeaient d’ordre national plus que

communautaire et craintives face à la perspective d’un éventuel accord a minima porteur de

régressions sociales potentielles).

Néanmoins, la Commission, par une saisine de 2002 (cf. précédemment), effectuée au titre du

traité lance une première consultation des partenaires sociaux. Celle-ci prolongée à plusieurs reprises

tant les réticences étaient grandes finit par déboucher sur un texte appelé « Orientations de

références » et « signé » le 16 octobre 2003.

Ce texte aborde les restructurations en partant du concept de gestion du changement et de ses

conséquences sociales. Il indique aussi que les mutations économiques et sociales peuvent avoir des

effets sur les régions et territoires, que nombre de PME sont affectées en tant que dépendantes de

grands donneurs d’ordres et que la gestion sociale des restructurations consiste entre autres à

rechercher toutes les alternatives possibles aux licenciements.

Il est par ailleurs remarquable que ce texte très prudent – chaque paragraphe se réfère aux leçons tirées

de 10 cas examinés en commun - ne comporte aucun dispositif de mise en œuvre – chaque

organisation s’engageait uniquement à le diffuser auprès de ses affiliés - et renvoyait à une validation

par les organes exécutifs de chacune des organisations signataires. Or si l’UNICE a adopté les dites

orientations à l’été 2003, la CES, dont l’équipe dirigeante avait été entre-temps presque entièrement

renouvelée, n’a fait que prendre acte de ce texte (octobre 2003).

En conséquence, ce texte ne pouvait ni être considéré comme un accord ni même offrir une

quelconque perspective de mise en œuvre, le seul engagement des signataires4 étant de le transmettre à

leurs membres. D’où le déclenchement par la Commission , par le biais de sa communication du 31

mars 2005, d’une seconde phase de consultation des partenaires sociaux pour leur enjoindre

essentiellement de négocier sur la mise en œuvre de leur texte de 2003 et pour demander aux

partenaires du dialogue social sectoriel de s’engager eux aussi dans de telles discussions.

3. Quelques aperçus nationaux 3.1. Restructurations et mesures sociales en Allemagne

En Allemagne le droit s’est construit autour de la loi sur la constitution de l’entreprise et de celle

sur la protection du licenciement. La première envisage dans son article 111 la notion

d’ "inconvénients" pour le personnel issu des restructurations mais aussi une définition assez large de

ces mêmes restructurations « Betriebsänderungen ».

La loi allemande liste diverses catégories de restructurations : réduction d’effectifs, fermeture

totale ou partielle, déplacements géographiques, fusions ou scissions, modifications substantielles de

4 UNICE, UEAPME, CEEP et CES

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l’organisation, de la finalité ou des installations de l’entreprise, introduction de nouvelles méthodes de

travail.

S’agissant des mesures sociales, la problématique est essentiellement structurée autour de deux

concepts qui s’inscrivent dans la codétermination :

- celui de la compensation des intérêts, qui fixe le principe des discussions entre l’employeur et

le Betriebsrat (conseil de l’entreprise) et qui dans de nombreux domaines incite les parties à

trouver un accord, un compromis. La valeur juridique de cet accord est ceci dit assez faible,

l’employeur devant au mieux verser des indemnités en cas de non-respect de ses engagements.

- Celui de « Sozialplan » qui lorsque la discussion avec le Betriebsrat porte sur les réductions

d’effectifs et les licenciements collectifs doit également faire l’objet d’un accord, ou à défaut,

de recours à une procédure judiciaire d’arbitrage

Le concept de Sozialplan n’a pas fait l’objet en Allemagne d'une définition plus précise et c’est

donc dans la pratique et dans la jurisprudence des tribunaux du travail qu’il faut aller chercher ce à

quoi il aboutit : en général, pour ne pas dire presque exclusivement, il aboutit à des mesures

indemnitaires (la loi allemande ne prévoit pas comme d’autres droits nationaux le principe ou le

montant des indemnités de licenciement). En théorie et selon le texte de la loi sur la protection contre

les licenciements, le conseil d’entreprise peut s’opposer à un licenciement si le reclassement du salarié

est possible au sein de l’entreprise. Et, selon la jurisprudence relative aux décisions d’arbitrage, les

salariés qui refusent le reclassement à un emploi « acceptable », doivent en principe être exclus des

indemnités.

Plus récemment sont venues s’ajouter d’abord dans le droit de la sécurité sociale l’idée de

reconversion et de reclassement des salariés au travers du concept de Transfersozialplan : il s’agissait

pour les entreprises qui recouraient à cette mesure de leur offrir une assistance financière des pouvoirs

publics. Le peu d’effets de cette disposition a amené le législateur allemand à inscrire en 2001 dans la

loi la possibilité pour les procédures d’arbitrage d’inscrire ce Transfersozialplan dans leurs

conclusions. Cette disposition est facultative mais vu le nombre de recours croissant à l’arbitrage, à

cause des désaccords croissants en matière de licenciements entre Betriebsräte et employeurs, la

mesure pourrait connaître un développement plus significatif.

Au-delà de cet instrument de discussion, entre l’employeur et le Betriebsrat, il est intéressant

de jeter un coup d’œil sur les autres aspects de la panoplie d’intervention des puissances publiques

(Etat fédéral, Länder et communes) reliés plus ou moins explicitement à la question des

restructurations. Tout d‘abord notons que la puissance publique allemande se refuse à intervenir sur

les licenciements collectifs en tentant par exemple de les retarder, de les empêcher ou de les atténuer.

Il y a quelques exceptions à ce principe, notamment lorsqu’un Land se trouve historiquement

actionnaire d’une grande entreprise (Volkswagen) mais c’est au titre d’actionnaire que le Land est

intervenu.

L’office fédéral du travail a une possibilité théorique d’intervention dans la mesure où il est

informé des licenciements collectifs. A cela s’ajoutent un droit d’intervention du Ministère fédéral

lorsque les entreprises qui licencient effectuent une mission de service public (notamment dans les

transports). Mais ces possibilité ne sont quasiment jamais utilisées (en dépit du droit théorique de

l’office fédéral de retarder les procédures pour une période de 1 à 3 mois). D’ailleurs ces opérations ne

font pas l’objet d’un comptage et qu’à notre connaissance, il n'existe pas de données statistiques sur

les licenciements collectifs ni a fortiori sur les « Sozialpläne ».

Les restructurations, considérées comme l’affaire des entreprises, n’ont que très peu été l’objet

de politiques publiques spécifiques, à l’exception des préretraites. La responsabilité des entreprises se

limitait aux éventuels reclassements internes et à une politique de compensation des intérêts, les

salariés licenciés faisant ensuite l’objet des mesures générales de la politique du marché du travail.

Pour autant, quelques instruments de gestion sociale ont été mis en place et ont évolué avec le

temps :

- la mise en place d’une retraite anticipée volontaire à partir de 55 ans (en sachant que l’âge de

la retraite était de 63 à 65 a pour les hommes et de 60 ans pour les femmes)

- la mise en place de régimes de chômage partiel pour raisons de structure (chômage partiel

total) qui permettent à l’entreprise d’obtenir une réduction de leurs charges salariales de 60%

environ

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- puis, avec les difficultés de fonctionnement des régimes de retraite et de préretraite qui ont

conduit à leur limitation drastique par rehaussement des âges minima d’entrée (portés à 57

puis à 62 ans), l’évolution s’est faite vers des dispositifs de reconversion - en facilitant le recours au « chômage partiel total »

- en inscrivant les chômeurs partiels sur les registres de l’office fédéral du travail - en favorisant la création de « sociétés de promotion du travail », entreprises à personnalité

morales et à but non lucratif occupant les salariés en sureffectif et pouvant non seulement

organiser des activités de formation, mais aussi des travaux destinés à l’entretien et à

l’amélioration de l’environnement, à renforcer les services sociaux et l’assistance aux jeunes.

Ces sociétés sont subventionnées par l’office fédéral du travail d’une part à hauteur des

prestations moyennes des allocations chômage, les coûts restants étant pris en charge par les

employeurs d’origine.

3.2. Restructurations et mesures sociales en Espagne

Le droit social espagnol est en la matière caractérisé par une grande discrétion. En effet,

s’agissant des mesures sociales, on ne trouve que deux dispositions contenues dans le nouvel

« Estatuto de los Trabajadores » (Statut des travailleurs, « refondé » en mars 1995 puis partiellement

modifié depuis).

D'une part, le Statut prévoit dans ses articles 39 et 40 un processus d’information-consultation

ainsi qu’un certain nombre de droits, dont un droit à indemnisation lorsque sont envisagées soit une

mobilité des travailleurs, à la fois fonctionnelle (à titre individuel) et/ou géographique (qui peut être

collective), soit des modifications substantielles des conditions de travail pour raisons économiques,

organisationnelles ou productives (article 41), soit encore un transfert d’entreprise ou d’activité.

S’agissant des licenciements collectifs (articles 49 et 51), ils sont définis comme devant

concerner au minimum 10 salariés affectés dans des entreprises de moins de 100 personnes ou 30 dans

une entreprise d’au moins 300 personnes (ou seulement 5 salariés s’agissant d’une cession totale

d’activité). Ces licenciements doivent

- comporter des causes économiques, techniques, organisationnelles ou productives

- contribuer à résoudre une situation négative ou à garantir la viabilité de l’entreprise et de l’emploi.

Ces processus de licenciements collectifs sont soumis à une autorisation préalable de l’administration

du travail. Pendant ce temps, une consultation des représentants des travailleurs doit être engagée de

bonne foi et viser à la conclusion d’un accord. Elle doit comporter, outre les causes du dit

licenciement, des possibilités de l’éviter ou de réduire ses effets ainsi que des mesures visant d’une

part à atténuer ses conséquences pour les travailleurs affectés, de l’autre à permettre la continuité et la

viabilité de l’entreprise. Ces mesures ne font pas l’objet d’autres détails dans la législation. En cas

d’accord, l’administration du travail doit autoriser la rupture des contrats. A défaut d’accord,

l’administration peut autoriser ou refuser cette rupture.

Sont tenues à ces obligations de notification et de consultation les entreprises qui ont décidé par

elles-mêmes de procéder aux restructurations ou qui ont été forcées d’y recourir par d’autres qui les

contrôlent (§ 14 de l'article 51).

Les mêmes articles prévoient les modalités d’indemnisation des travailleurs affectés par les

licenciements collectifs (de 20 jours à 12 mois de salaire selon l’ancienneté).

On notera que dans les faits, l’autorisation administrative a surtout servi à la mise en place d’un

système d’indemnisation, même si dans quelques cas ce sont plutôt des alternatives aux licenciements

qui ont été recherchées.

Les mesures de politiques publiques spécifiques aux restructurations ont été, à l’exception de

préretraites particulières à quelques secteurs d’activité, inexistantes et cela perdure.

Les salariés licenciés bénéficient des mesures générales des politiques du marché du travail, la

responsabilité des entreprises en matière de reconversion ou de reclassement est très limitée.

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Notons que les indemnisations espagnoles en matière de licenciement sont les plus élevées

d’Europe(elles représentaient 1,5% du PIB en 19935 mais ont été revues à la baisse lors d’accords

tripartites intervenus depuis les années 90). Pour les titulaires de CDI elles peuvent se monter

couramment à 33 mois de salaire.

3.3. Restructurations et mesures sociales en Suède

Bien que la Suède ait transcrit les directives européennes sur les licenciements collectifs

comme sur les transferts, la loi suédoise ne définit pas cette catégorie, qu’elle inclut plus largement

dans les projets de modification significative des conditions de travail des salariés, mais indique un

certain nombre de procédures de consultations et de négociations entre partenaires sociaux. Le seuil du

licenciement collectif est fixé à 5 personnes « licenciées dans le même temps » et vient se conjuguer

au seuil de 20 licenciements sur 90 jours fixé dans la directive européenne. Tout licenciement est

soumis à l’obligation d’être bien fondé (motif qui n’existe pas s’il y a une possibilité de reclassement

interne). En matière de sélection des salariés licenciés, la loi pose un principe impératif d’ancienneté

auquel il ne peut être dérogé que de deux façons

- légalement et pour un maximum de 2 salariés, lorsque l’employeur peut démontrer que leurs

compétences sont indispensables au bon fonctionnement de l’entreprise

- conventionnellement si par accord entre l’employeur et les syndicats, des alternatives à ce

principe d’ancienneté ont été fixées.

Ce sont les conventions collectives qui régissent de fait la situation de la quasi-totalité des entreprises

et des salariés dans ce pays scandinave. A noter que ce sont aussi les conventions collectives qui

prévoient les modalités de notification des licenciements collectifs aux autorités publiques.

A ce sujet, l’entreprise informe l’Office Régional pour l’Emploi (AMS) en amont (au moins 2

mois lorsque plus de 25 personnes sont concernées, 4 à 6 mois pour les tranches 25-100 et plus de

100) avec une estimation du nombre de personnes concernées. Ces délais conduisent à des actions

anticipatrices courantes et nombreuses.

La notification – dont le défaut est passible de sanctions administratives - entraîne souvent pour

des opérations de licenciement significatives la mise en place d’un groupe de concertation

(Samradsgruppen) qui réunit autour des acteurs de l’entreprise et des syndicats, les représentants des

collectivités locales (municipalités, comtés) ainsi que les représentants de l’office régional ou local de

l’emploi (qui assurent la présidence du groupe). Ce groupe n’a pas d’obligation ni de négocier ni de

conclure mais de facto ce sont des résultats fréquents. Si la négociation locale est difficile, une

négociation « centrale » se met en place.

S’agissant des modalités sociales des licenciements, le grand principe de sélection en vigueur en

Suède est celui du « dernier entré, premier parti » . Les critères d’ancienneté sont donc prépondérants

et constituent une arme de premier ordre pour les syndicats ; ils conduisent de fait à de très

nombreuses négociations en matière d’accompagnement des restructurations.. En ce qui concerne les

salariés amenés à être licenciés, ceux-ci bénéficient du concours à la fois de l’AMS et de fondations

pour la sécurité de l’emploi, mutualisées, auxquelles les entreprises, par voie de conventions

collectives, ont l’obligation de cotiser. Ces fonds, indépendants des fonds d’indemnisation du

chômage, permettent de financer les mesures d’accompagnement et de reconversion des salariés,

mesures souvent prises en concertation avec l’AMS.

A noter qu’en outre l’AMS dispose d’une très large palette de mesures actives sur le marché du

travail : la Suède connaît donc un interventionnisme notable, combinant des mesures dédiées aux

restructurations et des mesures générales d’intervention pour l’emploi.

.

5 cf. « Les conditions du licenciement collectif pour motif économique – comparaison entre sept pays

d’Europe », étude pour la DARES, sous la direction d’Yves Chassard, mai 2002

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4. Quelques enseignements « européens »

En matière de cadre d’action publique, la notion de restructuration est loin d’avoir conquis

droit de cité. Juridiquement limitée ou disséminée, elle n’est repérable que dans le droit allemand mais

avec des effets limités : elle ne concerne que le niveau de l’entreprise voire de l’établissement, et elle

ne sert qu’à élargir les cas de négociation de compensation des intérêts entre l’employeur et le

Betriebsrat.

Le cadre communautaire connaît lui des évolutions sémantiques considérables. Il essaie non

seulement d’aller au-delà des licenciements mais la notion de restructurations tend à se voir supplanter

par la notion de « changement ».

L’analyse permet de souligner quelques points communs dans les diverses approches européennes

prises en considération :

- les restructurations, qu’elles qu’en soit le concept, sont surtout traitées au niveau de

l’entreprise, voire de l’établissement. La perspective sectorielle, l’approche par filière est peu

présente, y compris dans le dialogue social.

- La discussion sur le bien-fondé des restructurations est minoritaire. Les approches

européennes reposent sur la liberté de gestion des employeurs et le bien-fondé implicite de

leurs décisions. Quant aux conséquences pour les salariés, ce sont quasi exclusivement celles

relatives à la perte d’emploi qui sont prises en compte, à l’exclusion des autres comme par

exemple celles relatives à la santé (des licenciés comme des « survivants »).

- Le caractère « privé » des décisions et de la gestion des restructurations est donc de ce fait

dominant, les interventions publiques – quand elles existent - se limitant essentiellement à

l’accompagnement social.

- Les approches traditionnelles autour des licenciements collectifs et de la protection de

l’emploi font l’objet d’une interrogation assez généralisée.

- Les divers systèmes ont tous des trous noirs en commun qu’il s’agisse des salariés en contrats

précaires, des salariés de PME, des entreprises en procédures judiciaires, des sous-traitants.

Il y a bien entendu de fortes divergences :

- dans les responsabilités respectives des acteurs et des conséquences sur le devenir

professionnel des personnes

- dans la capacité de peser et de négocier des représentants des salariés

- dans l’équilibre entre mesures spécifiques dédiées aux restructurations et mesures générales de

l’emploi ainsi que dans les financements publics mobilisés

- etc..

Par ailleurs et alors que la quasi-totalité des Etats–membres ont transposé les directives ayant trait

aux restructurations, il est permis aujourd’hui de s’interroger sur l’impact à la fois national de ces

directives (non négligeable à l’est et au sud du continent, dubitatif au nord ouest, faible dans

l’ensemble Allemagne/France/Benelux) et sur la convergence des pratiques qui en résulte.

Ceci dit, au fur et à mesure que l’Europe élargit sa palette d’instruments de type « soft » il est

permis de s’interroger aussi sur l’efficacité relative des cadres contraignants et des cadres plus

optionnels ou incitatifs.

Avec la stratégie européenne de l’emploi et la méthode ouverte de coordination qui font une

place centrale aux échanges de bonnes pratiques, l’UE connaît aujourd’hui une circulation tout à fait

importante de concepts, initiatives et évaluations en tous genres. Les effets sont parfois très palpables

qu'il s’agisse par exemple de la stratégie de vieillissement actif et de la réduction drastique des

préretraites, de l’extension de codes de conduite, de la diffusion au moins apparente des pratiques de

RSE, de l’élargissement des parties prenantes conviées au dialogue…

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On peut même penser que le processus est encore très peu exploité :

- qui empêcherait demain des partenaires sociaux nationaux de se servir des acquis du dialogue

social communautaire, même inaboutis pour instrumenter leurs discussions et négociations ?

- les Etats-membres ne pourraient-ils pas être tentés de se servir de l'approche intégrée mise en

avant part la Commission pour rénover des cadres nationaux parfois à bout de souffle ?

En d’autres termes, les approches européennes telles qu’elles se développent de nos jours semblent

exercer des effets plus horizontaux que verticaux, plus collatéraux que directs. Elles constitueraient

alors plutôt un ensemble de concepts et de ressources mobilisables au gré des opportunités plutôt

qu’un cadre prescription, homogène ou convergent.

Dans un contexte où les Etats–membres n’ont pas consenti en matière sociale à de nouveaux

transferts de compétences, ce schéma, déroutant à première vue dans la tradition française, ne

mériterait-il pas d’être à la fois mieux pris en compte et mieux exploité ?


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