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UNIVERSITE DE DROIT D'ECONOMIE ET DES SCIENCES D'AIX-MARSEILLE
FACULTE DE DROIT ET DE SCIENCES POLITIQUE D'AIX-MARSEILLE
Centre de Droit Maritime et des Transports
De la reconnaissance du contrat de transport
de déménagement.
Mémoire présenté dans le cadre du Master II de droit des
transports terrestres, Sous la direction de Monsieur Christian SCAPEL,
Par IDYLLE CHERIF.
Promotion 2008/2009
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« Les vues de l’esprit les plus simples et les plus sûres ne
sont pas toujours celles qui rencontrent le plus de crédit
auprès de la conscience universelle, ni même auprès de la
conscience juridique : alors que des sophismes spécieux
résistent indéfiniment à l’action du temps comme à celle
de la critique, il est des vérités éternelles, des idées-forces,
ou, pour parler le langage anglo-saxon, des « standards,
fondamentaux qui, bien que représentant l’armature de
toutes les législations à toute époque et dans tout pays, se
retrouvent périodiquement ou constamment sujets à
contestation, à régression, voire même à négation »
De l’esprit des droits et de leur relativité. Théorie dite de l’abus des droits.
Louis Josserand.
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Remerciements Je souhaitais avant tous adresser mes plus grands remerciements à M
SCAPEL ainsi qu’à l’ensemble de l’équipe du CDMT, pour
l’enseignement de qualité qui m’a été dispensé, porte d’entrée dans la
grande famille des professionnels du transport.
Je remercie aussi l’ensemble des mes collègues pour leur soutien
pendant la période de préparation de cet étude.
Sans oublier, ma famille et mes proches, pilier indispensable sans
lesquels cette aventure n’aurait sans doute pas été possible.
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Résumé Le secteur du déménagement est à l’image de la situation économique
française : peu enviable. L’indécision juridique concernant le régime
applicable au contrat de déménagement n’y est pas totalement
étranger, dans un contexte de crise économique et sociale qui fragilise
d’autant plus la profession. Aussi serait-il tant de « reprendre les
bases » mettre fin à cette instabilité. Etablir des points de repère
durable est essentiel en cette période de changement. La consécration
d’un régime contractuel en concordance avec le statut professionnel
du transporteur déménageur est inévitable. L’essence de l’activité du
déménagement est en effet avant tout le transport du patrimoine
mobilier du client, ce qui n’est pas incompatible avec les perspectives
consuméristes.
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Sommaire Partie 1 : L’essence résolument « Transport » du contrat de
déménagement ....................................................................................…p9
Chapitre préliminaire
Les sources du droit du contrat de déménagement................. p.12
Chapitre I.
Discussion sur la qualification juridique du contrat de
déménagement ......................................................................................... p.20
Chapitre II.
Déménagement et garde meuble : une dualité de contrat.. .. p.40
Partie 2 : Convergence des intérêts par un contrat type
équilibré…………….p51
Chapitre I.
L’utilité d’un contrat type transport pour le déménagement de
particulier ................................................................................................... p.53
Chapitre II.
Aménagement du contrat de transport de déménagement de
particulier ................................................................................................... p.62
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Introduction La profession du déménagement est bien à l’image de la situation économique actuelle de la
France : loin d’être enviable. Face à la concurrence déloyale exercée par les entrepreneurs
clandestins de tout bord, et aux prix sans cesse tirés à la baisse, les procédures de
redressement judiciaire et de liquidation se multiplient.
La structure du secteur d’activité du déménagement est par essence plutôt fragile ; 90% des
entreprises sont des PME de moins de 20 salariés. Elle l’est encore plus en ces temps difficiles
où 7 français sur 10 préfèrent déménager par ses propres moyens. Avec un marché en
récession du fait notamment de la chute de l’immobilier et des coûts de revient de plus en plus
élevés, il leur est de plus en plus difficile de « joindre les deux bouts ».
Mais, « l’union fait la force » ! Les seules entreprises qui semblent apte à traverser cette
période de marasme économique unissent leurs efforts. Les groupements de déménageur tel
les fameux « Déménageur Breton » ont trouvé la parade pour retenir l’attention des chalands.
Les clés résident dans un service de qualité certifié et l’uniformisation du « mode opératoire »
de l’ensemble des adhérents tout cela pour créer un climat de confiance. Parallèlement, la
campagne de communication est lancée « la qualité à un prix ».
Cette nécessité d’action commune est d’autant plus forte que la législation qui encadre la
profession est complexe. La profession s’organise donc pour résoudre les difficultés
auxquelles elle doit faire face, dans l’attente d’un réel « coup de pouce » des autorités
publiques.
Difficultés aux rangs desquelles l’instabilité du régime contractuel applicable aux opérations
de déménagement reste en effet l’un des points noirs de la profession. L’activité du
déménageur ne limite pas au seul déplacement des biens mobiliers, des opérations de
manutention y sont très souvent associées ainsi qu’une éventuelle garde des meubles.
Il faut noter que la nature des biens transportés est loin d’être étrangère à cette diversité
d’opération. Il s’agit bien souvent de biens mobiliers usagers qu’il faut démonter et
conditionner de manière à ce qu’il soit capable de supporter les risques inhérents au voyage.
7
Lorsque l’on sait que les emballages et autres conditionnements de marchandises sont le fruit
d’études très minutieuses réalisées par des ingénieurs appliquant des protocoles très strictes,
l’on mesure la tâche qui pèse sur les épaules du déménageur.
La convention de déménagement est celle qui vient sceller l’accord des volontés entre un
client souhaitant bénéficier des services d’un professionnel pour déplacer son patrimoine
mobilier et l’entreprise de déménagement qui accepte de réaliser l’opération moyennant le
paiement d’un prix.
Le caractère « protéiforme » de la prestation offerte suscite depuis le 19ème siècle des
discussions très riches. Mais la tradition l’emporte toujours. Le critère de l’économie du
contrat à donc prévalu pendant de nombreuses années. Jusqu’à ce que la Cour de cassation
dans un élan consumériste décrète révolue l’ère du contrat de déménagement relevant tantôt
du droit transport, tantôt du contrat de louage d’ouvrage. Celui-ci n’est vraisemblablement
désormais qu’un simple contrat d’entreprise.
Un contrat d’entreprise conclut par un entrepreneur soumis aux règles très strictes du droit des
transports en matière d’accès à la profession et un contrat d’entreprise qui fait « effet miroir »
avec toutes les dispositions applicables aux transporteurs prescrites par le Code de commerce.
Ainsi qu’en est-il réellement ? Ne serait-t-il pas temps de raisonner autrement ? Les objectifs
poursuivis par la qualification de contrat d’entreprise ne peuvent-ils pas être atteints
autrement ?
L’objet de cette présente étude est de montrer que la nature juridique effective du contrat de
déménagement est celle de contrat de transport lorsque la prestation considérée comprend des
opérations de manutention en vu du déplacement, un transport, et une livraison des biens dans
l’état dans lequel ils ont été remis par le client.
Le régime juridique du contrat de déménagement, tel qu’il est présenté dans cette étude,
s’applique au déménagement international dans la mesure où celui-ci est régi par la loi
française.
Pour y répondre au mieux, la première approche est théorique, et s’appuie sur la finalité de
l’opération (Partie I). La seconde acception est pragmatique, un professionnel soumis à une
règlementation aussi spécifique que le droit des transports doit pouvoir bénéficier du régime
contractuel qui en découle. Ceci étant des aménagements sont à mettre en œuvre surtout
8
lorsque le cocontractant est un particulier (Partie II).Certains de ces « aménagements »
existent quand d’autres sont à discuter.
9
Partie 1 : L’essence résolument
« Transport » du contrat de
déménagement
10
Le contrat de déménagement est l’expression d’une part, de la volonté d’un client à recourir
au service d’un professionnel du déménagement pour réaliser son déménagement et d’autre
part, le consentement de ce professionnel à prendre en charge une ou plusieurs prestations
contre le paiement d’un prix. Le déménagement peut consister dans le déplacement des biens
de l’endroit où ils étaient conservés à un nouveau lieu. Toutefois, la prestation revêt en
général un caractère plus complexe. D’autres obligations viennent s’ajouter au déplacement :
la fourniture de matériel de déménagement1, l’emballage, la mise à disposition d’un véhicule
adéquat2, le déplacement des meubles, leur chargement, arrimage dans le véhicule,
déchargement, déballage, gardiennage, la mise en place de mesures de protection
particulières pour les objet sensibles, le repérage et le démontage du mobilier, la protection
des sols fragiles, mise en place dans les nouveaux locaux…et la liste n’est pas exhaustive. Le
déménagement est donc constitué d’un ensemble d’opérations très diversifiées ; Quel (s)
régime(s) leurs appliquer ?
L’objet principal reste en tout état de cause le déplacement des biens dans les conditions
optimum de sécurité. Mais, cet opinion ne fait pas l’unanimité et à l’instar d’Albert WAHL,
l’ « on est surpris que la qualité de voiturier ait pu être refusée aux entreprises de
déménagement. »3
La tradition doctrinale et jurisprudentielle était bien établie jusqu’à la révolution instiguée par
la Cour de cassation en 1998. La qualification alternative du contrat de déménagement entre
1 Cartons et autres mousses en polyesters qui serviront à protéger les biens du déménagé en cas de choc, mais aussi outillages pour les opérations de démontage des meubles. 2 Véhicule dont les murs sont capitonnés par exemple. 3 A Wahl, Nature juridique du contrat de déménagement, I point 3.
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contrat de transport, contrat de louage d’ouvrage et/ou contrat de dépôt est largement
plébiscitée par la doctrine majoritaire. S’en suivra un doux glissement vers la qualification de
contrat d’entreprise, qui sera consacré par l’arrêt de principe du 20 janvier 1998 dans lequel la
Cour de cassation estime que « le contrat de déménagement est un contrat d’entreprise, lequel
se différencie du contrat de transport en ce que son objet n’est pas limité au déplacement de
la marchandise. 4» Solution réitérée depuis, pour exclure l’application des règles de
forclusion et de prescription prévues aux articles L 133-3 à L133-6 du Code de Commerce5.
C’était sans compter sur la résistance des juges du fond face à cette nouvelle qualification
exclusive, qui marque leur opposition en retenant régulièrement la qualification de contrat de
transport ou usant de raisonnements très originaux pour préserver l’essence transport du
contrat de déménagement.
Il faut reconnaitre que les considérations de la Cour de cassation sont en soit très intelligibles
notamment concernant la dualité de contrat qui existe entre contrat de déménagement et
contrat de garde meuble (chapitre II). La prestation du déménageur englobe certaines
opérations distinctes en leur objet et qui ne peuvent être soumises au droit des transports.
Pour notre part, Le principe directeur de la présente étude est simple, la notion de contrat de
déménagement ne peut être entendue que du contrat délimitant l’exécution d’opérations de
manutention et de déplacement de biens mobiliers. Dans cette hypothèse, la qualification
exclusive de contrat de transport de déménagement est préférable à tout autre.
La plupart des positions contemporaines, sont de nature à ignorer le caractère réel du contrat
en cause. L’alternative doctrinale existe depuis toujours, elle réside dans la reconnaissance de
l’essence du déménagement : le transport (Chapitre I).
Mais l’on ne saurait commencer cette étude sans évoquer au préalable la règlementation
applicable au contrat de déménagement. (Chapitre préliminaire).
4 Cour de cassation, 20 Janvier 1998, Bull civ. IV n°26. 5 Sarl AGS c/ Mutuelle assurance des instituteurs de France ; Bulletin 2001 IV, n°70 p 67 ; La semaine juridique Edition générale, 10/10/2001, n°41 chronique I, 354, p. 1882‐1883, note de F. LABATHE.
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Chapitre préliminaire : les sources
du droit du contrat de
déménagement
Tandis qu’en pratique l’on parle volontiers de contrat de déménagement, la simple
consultation de la doctrine en la matière révèle un classement du contrat de déménagement
parmi les contrats innommés.6
Classification, confirmée par le législateur, qui, dans les travaux préparatoires de la loi du 12
Juin 2003 n°2003-495, a préféré opter pour l’expression « Contrat relatif au déménagement »
au lieu et place de celle de « contrat de déménagement ». Et ce, manifestement, pour ne pas
introduire un nouveau contrat nommé dans l’ordonnancement juridique. Cette volonté a
d’ailleurs récemment été réitérée à l’occasion de la LOI n°2009-888, du 22 juillet 20097 dite
loi de développement et de modernisation des services touristiques.
A cet égard, il peut sembler regrettable que le législateur n’est pas saisi cette opportunité pour
affirmer l’existence d’un contrat spécifique de déménagement, en préférant, à la terminologie
précédemment choisie, celle de « contrat de déménagement ». Et ce, pour mettre un terme à
l’incertitude juridique découlant de l’instabilité de la qualification de ce type de contrat.
6 En ce sens : TERRE, LEQUETTE, SIMLER, Droit Civil, Les obligations, Collection Précis Dalloz. 7 Nous aurons, l’occasion de revenir sur ce texte de loi, au cours des développements suivants ; Cependant de manière substantielle, l’on peut retenir que cette loi a « réformé la réforme » amorcée par la loi du 12 mai 2009, qui faisait disparaitre « les déménageurs de la LOTI ».Voir sur ce point « Les déménageur et les commissionnaires de transports disparaissent de la LOTI » Isabelle BON‐GARCIN, Revue de Droit des transports, n°7, Juillet 2009.
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Ceci s’explique sûrement par la complexité des contrats de déménagement, qui en plus du
déplacement des biens mobiliers et leur manutention, sont souvent associés à une autre
convention, le contrat de garde-meuble.
Ceci étant le contrat de déménagement est il réellement un contrat innomé ?
Revenons d’abord sur la notion de contrat innommé. Un contrat est dit innomé lorsque celui
qui ne fait l’objet d’aucune réglementation légale particulière. Or, Le déménagement est tout
de même soumis à une réglementation. Il serait donc plus juste de le qualifier de contrat
« partiellement nommé », à l’instar de certains auteurs8.
Il convient dès lors de faire le point sur les aspects du contrat de déménagement qui font
l’objet d’une règlementation émanant des autorités publiques (section I) ainsi que des
compléments normatifs élaborés sous l’impulsion des organismes de droit privé tel que la
Chambre Syndicale du Déménagement (Section II), mais aussi sur le sort réservé au contrat
de déménagement par la jurisprudence (Section III).
8 V.J. FLOUR, J.L. AUBERT et E. SAVAUX, LES OBLIGATIONS, 1, L’ACTE JURIDIQUE chez ARMAND COLIN. 10ème ed.
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Section I.
Prescriptions légales et règlementaires
applicables au contrat de transport
déménagement
Les règles d’origines publiques encadrant l’exercice de l’activité de l’entreprise de
déménagement sont plutôt squelettiques (I). Cette observation s’explique par le caractère
parcellaire de cette réglementation qui ne s’intéresse qu’au déplacement proprement dit des
biens mobiliers (II).
I) Etat des lieux de régulation publique relative au contrat de
déménagement
Le contrat de déménagement se trouve seulement soumis à trois textes spécifiques.
L’ensemble des documents prescrits par ces textes formeront le « contrat de déménagement »,
qui ne correspond donc pas à un document unique9.
D’une part, la remise obligatoire et gratuite, avant la conclusion du contrat d’un devis, est
imposée au déménageur par l’article 2 de l’arrêté n°86-48 /A du 3 novembre 198610. Le devis
doit être accompagné au minimum des conditions particulières du contrat de déménagement.
L’arrêté établi une liste non exhaustive de mentions à faire figurer sur ces documents.
9 Autrement dit le contrat de déménagement se matérialise par un ensemble de document obligatoire : le devis, les conditions particulières de déménagement, la lettre de voiture de déménagement. 10 Bulletin Officiel de La Concurrence de la Consommation et de la Répression des Fraude du 3 novembre 1986, p 279.
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D’autre part, l’article 6 de l’arrêté du 9 novembre 199911, relatif aux documents de transports
ou de locations qui doivent se retrouver à bord des véhicules de transport routier de
marchandises, prévoit que les transports de déménagement donnent lieu à l’établissement
d’une lettre de voiture de déménagement devant comporter un certain nombre de mentions
obligatoires qui seront détaillées par suite.
Enfin concernant les clauses des conditions générales de déménagement, il fait se référer à la
LOTI. L’article 8 de la loi n°82-1153 du 30 décembre 1982 d’orientation des transports
intérieurs (LOTI), récemment modifié par l’article 34 de la loi n°2009-888 du 22 juillet
200912. Celle-ci énonce que « tout contrat relatif au déménagement doit comporter des
clauses précisant la nature et l'objet (…) du déménagement, les modalités d'exécution du
service (…) les obligations respectives de l'expéditeur, (…) du déménageur et du destinataire,
et le prix (…) du déménagement ainsi que celui des prestations accessoires prévues. ».
II) Objectif de la règlementation de droit public
Toute cette réglementation ne semble appréhender que l’aspect transport de l’activité des
entreprises de déménagement. En atteste, le titre de la partie III dans laquelle est insérée
l’article 6 de la l’arrêté du 9 novembre 1999, intitulé « Transports effectués par les entreprises
de déménagement ». Celle-ci définit les « transports de déménagement » comme « les
transports de meubles ou d'objets mobiliers effectués au départ ou à destination d'un garde-
meubles et, lorsque l'expéditeur est également le destinataire, les transports de meubles ou
d'objets mobiliers usagés en provenance et à destination d'un local d'habitation ou d'un local
à usage professionnel, commercial, industriel, artisanal ou administratif ».
De la même manière, l’article 8 II de la LOTI ne se réfère expressément, dans le contrat relatif
au déménagement, qu’aux modalités d’exécution du service, « en ce qui concerne le transport
proprement dit et les conditions d’enlèvement et de livraison des objets transportés. »
11 Journal Officiel du 25 novembre 1999. 12 Qui revient sur la réforme introduite par la loi n° 2009‐526, 12 mai 2009 (dite de simplification et de clarification du droit et d'allégement des procédures12) pour réintroduire les dispositions de l’article 26, de la loi n°2003‐495 du 12 juin 2003 renforçant la lutte contre la sécurité routière12. Face à cette « sinusoïde législative » l’on est bien tenté de rejoindre l’avis de I. BON‐GARCIN sur la valeur finalement minime des réformes aujourd’hui.
16
Toutefois, la rédaction de l’article 5 de la LOTI, dans sa version consolidée au 6 Aout 200913,
est tout de même source d’une certaine ambiguïté qui peut, être interprété, de manière
différente.
En effet, jusqu’au 14 mai dernier, date d’entrée en vigueur des modifications introduites par la
loi précitée du 12 mai 2009, l’article 5 précisait en son dernier alinéa que « sont désormais
considérées comme des transports des marchandises les opérations de transport effectuées
dans le cadre d’un déménagement. » Cet alinéa qui marquait la volonté de « maintenir sans
ambiguïté les entreprises de déménagement dans le secteur réglementé des transports 14» a
été supprimé.
De nombreux auteurs voyaient d’ailleurs, dans cette disposition, une réaction à l’incohérence
introduite par la Cour de cassation, entre la réglementation professionnelle applicable à
l’entreprise et la qualification juridique du contrat de déménagement15.
Qu’en est-il aujourd’hui ? Que faut-il déduire de cette suppression ? Les explications fournies
quant à l’objet des modifications législatives opérées par la loi du 12 juin 2003 sont elles
toujours d’actualité 16?
L’approche la plus convaincante est celle qui consiste à y voir une invitation à la construction
d’un contrat qui tienne compte de l’intérêt de chaque partie. L’ouverture d’une période de
concertation entre organisation professionnelle, administration compétente et usagers pour
l’élaboration d’un contrat type équilibré.
Cela nous amène à évoquer les apports règlementaires des organisations professionnels en
matière de déménagement.
13 Modifié par l’article 34 LOI n°2009‐888 du 22 juillet 2009, précédemment cité, disponible sur http://www.legifrance.gouv.fr 14 Voir rapport du Sénat n°251, 2002‐2003, Projet de Loi renforçant la lutte contre la violence routière, p 88. 15 En ce sens Mr TILCHE « le hic règlementaire », BTL 2001, p. 671). 16 Aux termes des propos émis par le rapporteur de la loi précitée, devant le Sénat, il a été considéré que ce n’était pas parce que l’opération de déménagement est considérée comme un transport au regard de la règlementation de la coordination des transports que l’on devait nécessairement lui appliquer toutes les règles du transport notamment celles prévues par les articles L 133‐1 et suivants du Code de Commerce.
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18
Section II.
Standardisation et contrat de déménagement
Les organismes de droit privé compétents en matière de déménagement fournissent outils de
droit privé. Ils assurent ainsi une forme de soutien administratif17 et commercial voire même
financier à destination des entreprises de déménagement18.
Sous l’égide notamment de la Chambre Syndicale de Déménagement, qui a entrepris un effort
de normalisation pour encadrer la profession, en élaborant d’une part des contrats types pour
chacune des activités du déménagement, dans un souci d’uniformité (II) et en moralisant la
profession par la mise en place d’une démarche qualité (I) par la labellisation dont nous
donnerons un aperçu.
I) Normalisation des activités de déménagement
Cette démarche ayant pour objet de moraliser la profession. Cela à conduit à l’élaboration
d’un ensemble de normes qualités, applicables au secteur d’activité (déménagement de
particulier, d’entreprise et garde meuble). L’idée étant de faire reconnaitre la qualité de
service du professionnel par un organisme agréé.
Ces normes, pour certaines européennes19, spécifient les règles et caractéristiques qualitatives
et quantitatives minimales s’appliquant aux services de déménagement. Ces normes
17 A l’image de la Chambre syndical du déménagement qui a mis en place une structure de résolution amiable des litiges qui mettent en cause l’un de ses membres ainsi qu’un fond de garantie au bénéfice des particuliers, lésée. Voir: http://www.csdemenagement.fr/PDF/reglement_interieur_CSD.pdf. 18 L’adhésion aux structures associatives tel que l’Association Française du Déménagement d’Entreprises, ou La Chambre syndicale suppose l’adhésion et l’acceptation des règles et usages établies par ces organismes de droit privée. Par conséquent les contrat‐types établies par ces derniers s’imposent à leurs membres et ont quelques peu forces obligatoires. http://www.csdemenagement.fr/PDF/Demande%20admission%20CSD%20_2009.pdf 19 Concernant notamment le déménagement des particuliers, 238 entreprises avaient obtenu la marque NF. http://www.afnor.org/groupe/espace‐presse/les‐communiques‐de‐presse/2009/mai/238‐societes‐de‐demenagement‐certifiees‐nf‐service‐pour‐les‐trouver‐en‐3‐clics‐http‐www.services.afnor.org‐demenagement.
19
s’intéressent aussi aux principes régissant les conditions générales de vente du service de
déménagement, la gestion des litiges, ou encore ceux relatifs à l’établissement d’un cahier des
charges dans l’hypothèse d’un déménagement d’entreprise.
La Marque NF est ainsi attribuée par l’Association Française de Normalisation (AFNOR20)
aux entreprises qui réunissent les garanties « qualités » suffisantes. A titre d’illustration, l’on
peut aussi citer la norme AFNOR NF X 50-815 d’Aide à l’élaboration du cahier des charges
et solutions techniques au déménagement d’entreprises.
L’ensemble de ces certifications sont autant d’outils techniques, garantie d’un service
conforme à l’état de l’art pour les usagers. Cependant le recours à la labellisation repose sur
une démarche volontaire de l’entreprise et force est de constater que les entreprises de
déménagement certifiées ne font pas légion. Cela est sûrement lié au coût économique parfois
important qu’implique ce marquage surtout dans un secteur essentiellement constitué de
petites et moyennes entreprises (PME).
Ce faisant, l’action de la Chambre Syndicale et de ses paires (Association Française du
Déménagement d’Entreprises21 notamment) ne se limite pas à faire reconnaitre le savoir faire
des entreprises de déménagement. Une aide administrative diverse est aussi apportée.
L’exemple le plus caractéristique est celui des contrats types utilisés de manière uniforme par
l’ensemble des entreprises adhérentes. Prenons l’exemple de ceux proposés par la Chambre
Syndicale en matière de déménagement de particulier22.
II) « Le taylorisme contractuel» de la Chambre Syndicale du
Déménagement
Le contrat type désigne un modèle de contrat plus général, rédigé par un tiers, ici la Chambre
Syndical du Déménagement en tant qu’organisme professionnel. Il sera, par la suite, utilisé
par l’ensemble des membres de la profession, de façon à homogénéiser le contenu de ces 20 Pour une approche schématique du rôle de l’AFNOR en matière de normalisation voir : http://www.csdemenagement.fr/demenager_pratique_8.asp 21 Pour une présentation de l’AFDE v. http://www.demenagementdentreprises.fr/ 22 Une structure équivalente existe pour le déménagement à l’échelle internationale, la FIDI (Fédération Internationale des Déménageurs Internationaux qui représente à travers le monde les entreprises spécialisées dans l'exécution des déménagements internationaux. Celle‐ci propose un système de certification FAIM. Basée à Bruxelles, la FIDI regroupe 600 entreprises devant satisfaire à des critères stricts de compétence technique et à des exigences financières, garants d'un service performant.
20
contrats, et de contractualiser certains usages professionnels propres à la profession,23 de
façon supplétive.
Les contrats types déménagements24 et garde-meuble sont donc des référents mis à la
disposition du secteur d’activité du déménagement. Certains auteurs ont pu parler de
« convention collective d’ordre économique25 ».
L’idée est, en effet, d’élaborer un acte règlementaire de droit privé en vu d’organiser,
notamment à l’égard des tiers, l’offre contractuelle des membres de la Chambre26. Ainsi,
contrairement aux conditions générales de ventes établies par un professionnel, il ne s’agit
pas d’un acte unilatéral. En atteste, la prise en considération par la Chambre Syndicale, des
recommandations émises par la Commission des Clauses Abusives27 en 1993.
Malgré cet effort de standardisation pour éviter la dispersion contractuelle, les dispositions
adoptées par la Chambre Syndicale ne sont pas sans engendrer la méfiance de la Commission
des Clauses abusives, qui notamment en matière de déménagement de particulier à rendu un
avis très critique. L’avis 07-01 relatif à un contrat de déménagement (de particulier) déclare
abusives, les clauses relatives à la prescription annale de l’action en responsabilité contre le
déménageur (article 15 des conditions générales ‘type’) ainsi que celles établissant un délai de
trois jours pour émettre des contestations en cas d’avarie (article 1628) en jugeant ces délais
trop courts.
23 Sur la différence entre condition générale de vente et contrat type : P MALIVERNI, Les conditions générales de vente et les contrats types des chambres syndicales, préface J. HEMARD. LGDJ 1978. 24 Un départ est fait entre déménagement de particulier et déménagement d’entreprise. Un devis type ainsi qu’un contrat type garde‐meuble à l’usage des professionnels ont aussi été élaborés par la Chambre syndical. Voir Annexe. 25 Expression empruntée à J. LEAUTE, Les contrats‐types RTD civ. 1953, p 429. 26 800 adhérents en ce jour. 27 On peut lire en introduction des conditions générales de ventes de déménagement de particuliers élaborées par la Chambre Syndicale du Déménagement (contrat type) que celle‐ci ont été établies en collaboration avec les représentants des consommateurs et en accord avec les recommandations 8202 CCA de la Commission des Clauses Abusives. En tout état de cause une nouvelle mise à jour en accord avec l’article L 133‐3 du Code de Commerce relatif à la formulation des contestations dans les 3 jours suivants la fin de l’opération de déménagement (non applicable au déménagement) devrait aussi être entreprise. 28 Voir annexe 1 condition générale de vente du contrat de déménagement des particuliers.
21
Ce raisonnement est justifié dès lors que l’on estime, à l’instar des membres de la
Commission, que le contrat de déménagement est un contrat d’entreprise ordinaire.
C est entre autre, pourquoi une qualification de contrat de transport concernant les opérations
de manutention et de déplacement constitutif d’un contrat de déménagement est souhaitable.
Reste à inscrire cette qualification « dans le marbre ».
L’on constate à cet effet que les conditions générales de vente des contrats de déménagement
d’entreprises spécifient clairement que le droit des transports s’applique à ce type de contrat.
L’on peut s’interroger sur la valeur d’une clause, au vu de la jurisprudence qui, a très tôt pris
le partie de ne pas réduire le contrat de déménagement à un simple contrat de transport de
marchandises29.
29 En ce sens CA de Paris 15 Mai 1896 Gazette du Palais 1896, I, Jurisprudence p.780.
22
Section III.
Jurisprudence et contrat de déménagement
La non application des règles du droit des transports au déménagement est peut être dictée par
le souci de cohérence entre l’ordre interne et l’ordre international.
En effet, cette conception est aussi celle adoptée, à l’échelle internationale par la Convention
de Genève du 19 Mai 1956, relative au contrat de transport international de marchandises par
route dite CMR qui exclut expressément de son champ d’application, les déménagements30.
Cette exclusion est justifiée par le fait que, la plupart du temps, les prestations des
déménageurs ne se cantonnent pas au déplacement du mobilier d’un lieu à un autre. L’activité
du déménageur englobe en effet, d’autres opérations telles que le démontage et le remontage
des meubles, leur emballage et le déballage, leur chargement et déchargement, leur mise en
place dans les nouveaux locaux ou habitations. Parallèlement le déménageur peut, aussi être
chargé d’entreposer et de garder les meubles de son client pendant une certaine durée.
Pendant longtemps, la Cour de cassation s’est inscrite dans la tradition. De manière classique,
la qualification est fonction de l’étendue des obligations des parties comme cela est mise en
évidence par l’analyse de l’économie du contrat.
Durant deux siècles, la qualification alternative prévaut. Le contrat de déménagement relève
du contrat de transport lorsque la prestation principale est le déplacement. A l’inverse, la
qualification de contrat de louage d’ouvrage est retenue lorsque les autres prestations sont
majoritaires.
Cette sérénité troublée par le retour à une qualification exclusive enclenchée par la
jurisprudence de la Chambre commerciale de la Cour de cassation, rend incontournable
l’exposé et l’appréciation des différentes qualifications retenues au fils des soubresauts
législatifs et jurisprudentiels avant de présenter les considérations utiles à l’élaboration d’un
contrat déménagement équilibré. 30 Article 1, paragraphe 4, c est de la CMR.
23
24
Chapitre I.
Discussion sur la qualification juridique
du contrat de déménagement
Malgré, la règlementation professionnelle de l’activité de déménagement qui tend
essentiellement à l’assimiler à un transport, une incertitude règne quant à la qualification
juridique du contrat de déménagement du fait que le déménagement ne se limite pas
seulement à un transport de meuble mais comporte aussi des opérations de manutention et
parfois même de garde meuble.
Il s’agit de savoir si le contrat de déménagement se verra assimiler au contrat de transport ou
s’il sera soumis aux règles de droit commun du contrat d’entreprise.
Pour répondre à cette question essentielle, deux éventualités se présentent : Il est possible
d’attribuer une qualification unique au contrat de déménagement ou de lui préférer une
qualification mixte.
Doctrine et jurisprudence ont majoritairement opté pour une qualification alternative de
contrat de transport ou de contrat d’entreprise en fonction de l’importance respective des
phases de manutention et de transport. (Section I).
Cependant, la Cour de cassation à amorcé en 1998, un mouvement tendant à l’adoption d’une
qualification exclusive de contrat d’entreprise distinct du contrat de transport (Section II).
Cette position, aux effets multiples, notamment en matière de prescription, s’est souvent
heurtée à l’opposition des juges du fond sur le fondement de la volonté des parties (Section
III).
25
C’était sans compter sur l’avant dernier acte législatif 31 (loi du 12 mai 2009) qui, pour des
considérations consuméristes, est venu ajouter un flou supplémentaire aux incertitudes
préexistantes pour relancer, par une nouvelle réintroduction du déménagement dans le champ
de la LOTI,32 l’espoir d’avènement de dispositions réglementaires plus conformes à l’objet du
contrat de déménagement qui reste le transport. (Section IV).
31 L. n° 2009‐526, 12 mai 2009. 32 LOI n°2009‐888 du 22 juillet 2009 ‐ art. 34 précité
26
Section I.
Contrat de déménagement : les heures de
gloire de la doctrine classique
La démarche, a pour effet, d’accorder au contrat de déménagement une seule et même nature
juridique tout au long de son exécution. Il s’agit de le qualifier, soit de contrat d’entreprise,
soit de contrat de transport.
Pour ce faire, il est indispensable de s’appuyer sur l’économie du contrat.
I) Théorie de la règle de l’accessoire et contrat de déménagement
Le critère de la qualification alternative, proposé par le Doyen RODIERE33, a été adopté par
la doctrine moderne34. La qualification du contrat de déménagement est alors fonction de
l’importance respective du déplacement et de la manutention dans l’ensemble des opérations
de déménagement.
Il s’agit de déterminer l’objet principal de la convention de déménagement grâce à la
technique du faisceau d’indice. Autrement dit, pour apprécier de l’importance du déplacement
par rapport aux prestations de manutention, le raisonnement tient d’abord compte de divers
indices tels que la distance parcourue35, le coût respectif des différentes prestations36, la nature
33 Voir, R.RODIERE, « La nature juridique du contrat de déménagement : JCP 1951, I, 917, n°5. 34 Voir M. BOITARD, L’évolution du contrat de transport : JCP G 1952, I, 993, n°3 et L.PEYREFITTE, Le contrat de déménagement :JCP E 1986, II, 14655). 35 Voir Cour d’Appel de Poitier 19 février 1969 RTD com. 1970, p 193 note J.HEMARD « déménagement du mobilier d’un fonctionnaire d’Oran à Toulouse. 36 Voir sur l’influence du prix sur la qualification du contrat de déménagement : TGI Chambéry, 10 septembre 2002, BTL 2003, p. 197.
27
des objets transportés ainsi que les soins particuliers que peut présenter leurs emballages37 ou
leurs mises en place.
Ensuite, par application de la règle selon laquelle « accessorium sequitur principale 38», le
contrat de déménagement se verra attribuer la nature juridique de la prestation principale. Si
l’opération principale est le déplacement, l’ensemble du contrat est alors soumis au régime du
contrat de transport ; Dans l’hypothèse contraire (l’opération principale est la manutention), il
s’agira d’un contrat d’entreprise ordinaire.
II) Contrat de déménagement et contrat de commission de
transport
Ce critère de résolution de la qualification du contrat de déménagement a été adopté par le
juge, notamment pour retenir à plusieurs reprises que le contrat de déménagement est un
contrat de transport chaque fois que le déplacement en constitue l’élément essentiel39.
Dans l’hypothèse où, il est estimé que l’objet principal de la convention est le déplacement,
un autre critère influe également sur la nature juridique du contrat de déménagement : il
s’agit des conditions d’exécution du déplacement.
En effet, lorsque le professionnel prend en charge l’entière organisation du déménagement
sans réaliser lui-même le déplacement des meubles, il intervient alors dans le cadre d’un
contrat bien spécifique qui est celui de la commission de transport, régi par les articles L 132-
3 et suivant du Code de commerce et par l’article L133-6 du Code de commerce40. La solution
37 Sur l’absence d’opération de manutention justifiant une qualification de contrat de transport voir :CA Poitiers, 19 février 1969 : RTD com. 1970, p 193, n°19, J. HEMARD, « absence d’opération de manutention délicate ». 38 Sur la règle de l’accessoire, voir la décision du Tribunal de commerce de Bobigny, 9 juin 1992 ; BTL 1992 p. 568, note Mr TILCHE. 39 Remarque : L’analyse similaire est similaire dans la Convention de Rome du 19 Juin 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles qui définit le contrat de transport de marchandise comme un contrat qui a « principalement pour objet de réaliser un transport de marchandise ». 40 Voir Cassation Commercial, 19 Juin 1957 : Bull. Civ. III, n°203 ; D. 1958, Jurisp. p. 113, note R.RODIERE.
28
est d’ailleurs reprise sur le plan réglementaire de la profession par l’article 8 I de la LOTI qui
prévoit que : « sont considérées comme commissionnaires de transport (…) les personnes qui
assurent, pour le compte d'autrui, des opérations de groupage (…) de déménagement. ».
Cependant, une telle qualification suppose que l’objet de la convention, conclu avec le client,
ait été d’organiser le transport. Ainsi, il ne peut y avoir contrat de commission de transport, si
le déménageur, a fait appel à un autre transporteur pour réaliser l’opération, et ce sans en
avoir informé son client. Il y a alors contrat de transport sous traité41.
Ceci étant, qu’en est-il du cas où le commissionnaire de transport réalise par ses propres
moyens une partie du déplacement promis ?
La jurisprudence semble rejoindre, sur ce point, l’opinion du Doyen RODIERE selon laquelle
cette considération factuelle n’affecte en rien la qualification du contrat en contrat de
commission de transport. Ainsi, la jurisprudence préfère retenir une qualification unique pour
l’ensemble des opérations, par l’application de la prestation accessoire à la prestation
principale.
Il n’en reste pas moins que toutes les fois où le déplacement ne constitue pas l’élément
principal du déménagement, la qualification de contrat de commission de transport pour le
contrat de déménagement n’est pas retenue. Il s’agira d’un contrat de commission 42 ou d’un
contrat d’entreprise.
41 Voir CA Aix‐en‐Provence, 2eme Ch. 22 avril 1992, JOLY c/ Sté Lhermitte et autres, Juris‐Data n°1992‐049553. 42 Article L 132‐1 Code de Commerce.
29
III) Contrat de déménagement et contrat d’entreprise
La qualification de contrat d’entreprise est applicable au contrat de déménagement, selon la
théorie de l’accessoire, dès lors que l’objet principal de la convention est le déplacement du
mobilier. C'est-à-dire quand les prestations de manutention l’emportent sur la fonction de
déplacement.
La jurisprudence a estimé qu’il en était ainsi lorsque le coût du déplacement représentait
moins du 5ème du prix total du déménagement et ceux malgré le déplacement du mobilier sur
2000 kms43 ou encore lorsque des travaux d’emballage, de déballage, de mise des vêtements
sur cintres portables, de démontage et remontage des meubles, présente une importance réelle
par rapport au trajet parcouru44. En voici, une illustration plus concrète concernant le
déménagement d’entreprise.
La qualification de contrat d’entreprise a souvent été retenue lorsque le déménageur se charge
du déménagement d’une entreprise, c'est-à-dire du transfert d’une usine, d’un magasin ou
d’un bureau professionnel d’un lieu à un autre.
Cette solution s’appuyant sur des éléments de fait ne manque pas, en soit, de cohérence même
si elle peut paraitre incomplète45 : le coût et la difficulté des opérations de manutention sont
d’une manière générale plus importants que ceux liés aux transports proprement dit, quelque
soit la distance parcourue46. Ainsi, concernant particulièrement les déménagements
industriels, l’obligation essentielle ne porte alors pas sur le transport mais sur un ensemble
d’opérations de démontage, de remontage avec rebranchement par un personnel spécialisé.
43 Voir CA de Paris, 26 avril 1967, BTL 1967. 44 Voir CA de Grenoble, 1ère Chambre civil, 28 Janvier 199, Juris‐Data n°1997‐041019. 45 Malgré l’importance des opérations de manutentions très spécifique, cela revient à ignorer l’objet principal de toutes des opérations qui ne sont effectué qu’en vue du déplacement des biens. 46 En ce sens Cassation Com. 26 Mai 1998 BTL 1998.
30
IV) Critique du critère du Doyen RODIERE
La théorie traditionnelle, malgré l’adhésion qu’elle a suscitée, présente certaines faiblesses
que certains auteurs n’ont pas manqué de mettre en évidence à juste titre.
D’une part, il faut relever le caractère, finalement artificiel, de la règle de l’accessoire. Le
déménagement étant avant tout une opération globale, composée d’une dualité irréductible de
prestations de manutention et de déplacement qui sont tout aussi fondamentales l’une que
l’autre pour réaliser la finalité du contrat47.
D’autre part, la mise en pratique de la technique du faisceau d’indices peut parfois s’avérer
difficile pour distinguer la prestation principale de la prestation accessoire. Cela est de nature
à rendre flottante la qualification du contrat de déménagement. Ce qui crée une certaine
insécurité juridique.
Enfin, reste à envisager l’hypothèse où les deux prestations s’équilibrent en importance.
Faudrait-il alors favoriser une qualification par rapport à l’autre? Sur quel fondement?
Certains auteurs, dont Albert WAHL48, considèrent qu’une qualification exclusive du contrat
de déménagement serait préférable à une qualification alternative voire même distributive du
contrat de déménagement vu les difficultés engendrées par ces deux modes de raisonnement.
Au demeurant, le juge de droit partage aussi l’avis selon lequel une qualification unique du
contrat de déménagement est préférable. Et ce, surement dans un souci de cohérence. Mais
c’est la voie de la qualification en contrat d’entreprise qui à été adoptée pour tenter de créer
l’unité jurisprudentielle.
47 Voir P. Puig précédemment cité. 48 Voir Nature juridique du contrat de déménagement précédemment cité.
31
Section II.
La désaffection du juge de droit en faveur de
la qualification exclusive de contrat
d’entreprise
L’adoption de la qualification exclusive de contrat d’entreprise est venue bouleverser le
paysage jurisprudentiel. Beaucoup d’auteurs ont parlé de « retour » aux sources doctrinales.
Cette position s’appuie, en effet, sur un critère mis en évidence au 19ème siècle, avant le critère
alternatif qui jusque là prévalait (I). Le contrat de déménagement se trouve dès lors soumis
aux règles de droit commun relatives au contrat de louage d’ouvrage (II). Cette méthode n’est
pas nouvelle en soit puisqu’elle avait préalablement été utilisée pour déterminer la nature
juridique d’un autre contrat : celui de la vente de chose à fabriquer (III). Cependant, ce critère
ne fait pas l’unanimité des juges du fond, le principe de l’autonomie de la volonté leurs a
permis de contourner les prescriptions des juges de Cassation (IV).
I) Critère de la spécificité du travail
Louis JOSSERAND49 est le fer de lance de cette position doctrinale selon laquelle le
déménagement n’est qu’un contrat d’entreprise ordinaire.
Pour ce faire, la théorie s’appuie sur la spécificité du travail du déménageur. Celui-ci ne
s’engage pas seulement à faire parcourir une certaine distance à des objets, il s’engage aussi à
les démonter, les emballer ainsi qu’à les remonter et à les réinstaller dans le local d’arrivée.
Louis JOSSERAND qualifie ces opérations de « trames essentielles » du déménagement.
Elles lui donnent « sa véritable physionomie ». La phase transport a pour unique objet, de
32
relier les deux phases caractéristiques du contrat, qui en soit, justifie le recours à une
entreprise de déménagement.
L’on trouve quelques jurisprudences50 de la fin du 19ème siècle et du début du 20ème siècle en
ce sens, puis la thèse fut abandonnée jusqu’à ce que la Chambre commerciale de la Cour de
cassation décide en 1998 que « le contrat de déménagement est un contrat d’entreprise qui se
différencie du contrat de transport en ce que son objet n’est pas limité au déplacement de la
marchandise 51» et ce, qu’il s’agisse du déménagement d’une entreprise ou d’un particulier.
La Cour de cassation a, par cette décision, remis au goût du jour ce critère doctrinal. Ainsi, la
qualification exclusive de contrat d’entreprise pour le contrat de déménagement repose sur la
nature de l’activité du déménageur qui implique un travail spécifique de manutention en plus
du déplacement.
II) Contrat de déménagement et régime du contrat d’entreprise
Une définition du contrat d’entreprise nous est proposée par le code civil, il convient avant
toute chose de la rappeler avant de l’appliquer au contrat de déménagement.
Le contrat d’entreprise52dont l’ancienne dénomination est contrat de louage d’ouvrage, est un
contrat nommé prévu à l’article 1710 du code civil. Il s’agit d’un contrat par lequel « l’une
des parties s’engage à faire quelque chose pour l’autre, moyennant un prix convenu entre
elles. »
Le contrat de déménagement répond nécessairement à cette définition 53en ce qu’il s’agit bien
d’une convention par laquelle, un déménageur s’engage à opérer le transport du mobilier
d’une autre personne moyennant paiement54.
50 Voir Cour d’appel de Lyon 22 juin 1894, DP 1895, 2, p. 294. 51 Cassation Com. 20 Janvier 1998, n°95‐22.190 ; Juris‐Data n°1998‐000170. 52 Contrats civils et commerciaux de F. COLLART DUTILLEUIL et P. DELEBECQUE, collection Précis Dalloz, 6ème éd. 2002. 53 Le contrat de transport répond aussi à cette définition, il s’agit en effet d’une variante du contrat d’entreprise, que certain qualifie « d’avatar » du contrat d’entreprise.
33
A cet égard, une partie de la doctrine justifie cette qualification de contrat d’entreprise pour le
contrat de déménagement en se fondant sur un raisonnement dont voici un aperçu.
En pratique, le déménagement est un contrat qui comprend non seulement divers travaux de
manutention mais aussi une phase de déplacement d’un lieu à un autre. Or, si le déplacement
est l’objet principal du contrat de transport, il s’agit de ne pas perdre de vu le fait que le
contrat de transport n’est en fait, qu’une variété du contrat de louage d’ouvrage donc du
contrat d’entreprise.
En d’autres termes, de part sa nature générique, le contrat d’entreprise permet d’encadrer
l’ensemble des phases du contrat de déménagement, tant les opérations de manutention que
celles de transport55, d’où son adéquation avec l’activité des entreprises de déménagement.
Mais, comme nous l’exposerons dans les développements suivants et pour reprendre les
propos d’Albert WAHL, ces considérations ne sont pas convaincantes malgré, leur justesse
éprouvée notamment concernant le contrat de vente de chose à fabriquer.
III) Contrat de vente de chose à fabriquer et contrat de
déménagement
Un parallèle peut être fait avec la solution retenue par la Cour concernant la vente d’une chose
à fabriquer.
Pour déterminer la nature de ce contrat, le juge de cassation a fait appel à ce même critère de
la spécificité du travail effectué. Ce contrat est distinct du contrat de vente lorsque la
prestation fournie porte sur un « travail spécifique pour les besoins particuliers exprimés » par
le client56.
54 Sur L’application des règles du code civil prévu à l’article 1710 et suivants voir l’analyse proposé par A.WAHL, « Nature juridique du contrat de déménagement » RTD civ. 1911. 55 Voir en ce sens La qualification du contrat d’entreprise, P. PUIG, aux éditions Panthéon‐Assas 2002, n°132.* 56 Cassation com. 4 juillet 1989 ; « Les principaux contrats spéciaux » J.HUET, LGDJ.
34
De même, l’on retrouve effectivement à l’article 9, des conditions générales du
déménagement de particuliers57, une clause qui indique que le déménagement se réalise au vu
des « prestations convenues avec le client préalablement à chaque opération ».
Ainsi, le juge de droit semble avoir raisonné de manière téléologique en estimant que, tout
comme la vente de chose à fabriquer « sur mesure », n’est pas un contrat de vente ordinaire
mais un contrat d’entreprise, le contrat de déménagement, qui est un contrat adapté aux
souhaits spécifiques du client et qui n’est pas un contrat de transport58 mais un contrat
d’entreprise.
C’est oublier que beaucoup d’opérations de transport répondent à un cahier des charges
spécifique. Les contrats de transport connaissent aussi des opérations « sur mesure »,
notamment en température dirigée que l’on ne saurait ignorer. La perplexité des juges du fond
quant à cette qualification exclusive n’est surement pas étrangère à cette considération.
IV) Réaction des juges du fond
Pour les juges du fond, ce revirement n’a pas fait l’unanimité. Certains d’entre eux, tous en
reconnaissant au contrat de déménagement la qualification de contrat d’entreprise, ont
appliqué dans les rapports de ce déménageur avec son substitué, les règles du contrat de
commission de transport59. Tandis que d’autres, ont continué a appliqué au contrat de
déménagement, la règle de l’accessoire pour retenir la qualification de contrat de transport60.
Mais, en tout état de cause, le raisonnement le plus marquant à été celui des juges du fond qui
après avoir rappelé la position de la Cour de cassation, ont admis la possibilité d’une
57 Article 4 des conditions générales du contrat de déménagement d’entreprises. 58 C’est oublier que beaucoup d’opération de transport réponde à un cahier des charges spécifique. Le contrat de transport connait aussi des opérations « sur mesure » notamment concernant les transports en température dirigée. 59 CA de Versailles, 12eme Chambre 31 octobre 2002. 60 TI, 14 ème arrondissement Paris, 24 avril 2001. BTL 2001, p 677.
35
convention contraire61. Cette position amène ainsi à s’interroger sur l’influence de la volonté
des parties en matière de déménagement.
61 CA de Paris, 5ème Chambre, section A, 24 Mars 2004.
36
Section III.
Volonté des parties et qualification du contrat
de déménagement
Si la volonté des parties occupe une place importante dans la qualification des contrats, il
s’agit ici d’en apprécier la portée général (I), mais aussi dans l’hypothèse particulière ou les
parties auraient défini dans le contrat, le régime applicable (II).
I) Portée de la volonté des parties
La lecture de l’article 12 al. II du Nouveau Code de Procédure Civile pose le principe selon
lequel le juge n’est pas lié par la qualification donnée au contrat par les parties. La nature de
la convention n’est pas définie par la dénomination donnée par les contractants à leur relation
mais par le contenu des obligations qu’ils mettent à leur charge respective. Le juge peut donc
rectifier cette dénomination.
Ainsi, il a été jugé qu’en l’absence de tout déplacement par un moyen de transport, la
qualification de contrat de transport ne pouvait être retenue. C’est notamment l’hypothèse,
d’un déménagement d’un étage à un autre62. A l’inverse, lorsqu’aucune opération de
manutention n’est prévue au contrat seule la qualification de contrat de transport peut être
retenue, malgré le fait que les parties aient optées pour la dénomination de contrat
d’entreprise, dans la convention initiale63.
Qu’en est-il alors lorsque l’on est en présence d’un contrat complexe de déménagement ? Le
juge est-il tenu de se plier à la volonté des parties ?
62 Voir Tribunal de Com. Seine 2 mars 1962 BTL 1962. 63 En ce sens voir Cour d’Appel de Toulouse 28 Février 2002.
37
II) Approche doctrinale de l’étendue de la volonté des parties
La question que l’on est amené à se poser est la suivante : Le juge se retrouve t’il lié par les
clauses qualifiant expressément le contrat de contrat de transport ?
La doctrine est partagée sur ce point.
Certains estiment64 que le juge peut être lié par la qualification du contrat donnée
expressément par les parties. En effet, l’article 12, al. 3 du Code de procédure civile prévoit
que le juge « ne peut changer la dénomination ou le fondement juridique lorsque les parties,
en vertu d'un accord exprès et pour les droits dont elles ont la libre disposition, l'ont lié par
les qualifications et points de droit auxquels elles entendent limiter le débat. »
Cependant, l’article ne précise pas le moment auquel la volonté des parties doit s’exprimer
pour lier le juge. Ce vide juridique alimente une opposition doctrinale : lorsque, les uns65
n’accordent la possibilité d’exercer ce pouvoir aux parties qu’une fois le litige né, d’autres
retiennent que l’accord des parties sur la qualification du contrat doit naitre avant tout litige.
Force est de constater qu’il parait difficile, voir impossible que les parties puissent échanger
leur accord sur la nature du contrat une fois le litige né.
La seconde position semble donc plus raisonnable, tout en suscitant aussi quelques
interrogations quant à sa mise en œuvre pratique. De fait, les parties conservent-ils la
possibilité de contester la dénomination qu’ils avaient précédemment approuvés, une fois le
litige né ?
Une réponse positive serait surement plus conforme à l’esprit du droit positif. Autrement dit,
le juge se retrouverait donc à nouveau libre de déterminer la nature du contrat, peu importe la
qualification initiale retenue ; et ce, qui plus est, à la demande des parties66.
Ceci nous amène à évoquer l’étendue du pouvoir de qualification des parties.
Une partie importante de la doctrine s’accorde à dire que leur volonté occupe une place
indéniable, tout particulièrement dans le cadre des conventions complexes englobant
opérations de manutention et de transport, lorsque plusieurs qualifications sont possibles.
64 « Certains » dont P. DELEBECQUE et L. PEYREFITTE. 65 Dont J. GHESTIN.
38
Mais, cela n’est plus censé être le cas depuis que la Cour de cassation à qualifier le contrat de
déménagement de contrat d’entreprise ordinaire. Les parties devraient donc devoir se
conformer à cette qualification, sous peine d’irrecevabilité de leur demande. Le pouvoir de
qualification des parties s’en trouve d’autant plus limité à priori.
Enfin, à lecture des conditions générales de déménagement des particuliers, l’on observe que,
cette possibilité offerte aux parties est très peu utilisée. Les contrats de déménagement de
particuliers qui définissent expressément le régime qu’ils souhaitent applicable, sont quasi
inexistants67. Cela est plus fréquent dans le déménagement d’entreprise68.
Une petite parenthèse est nécessaire pour s’interroger. En effet, pourquoi ce qui est d’usage
dans le déménagement d’entreprise est l’exception dans le déménagement de particulier ?
Cela tient sans doute au statut du client. L’un est un professionnel soucieux de trouver une
issue rapide aux potentiels litiges, et plus au courant des règles de droit applicables. Ici rien
n’est improvisé, tout a été prédéfini dans un cahier des charges précis. Du particulier, l’on dit
souvent qu’il s’agit d’un consommateur très peu aguerri, et qui vient apposer sa signature sur
un contrat d’adhésion, qui exige un minimum de réactivité en cas de dommage. Définir une
qualification précise dans ce second type de contrat de déménagement, serait, par les temps
qui courent, plutôt malvenue. La protection du consommateur est devenue un leitmotiv que
l’on ne peut ignorer, mais qui, exploité à l’extrême comme cela semble être le cas, est source
de nuisance.
Pour en revenir à notre propos, le contrat porte plutôt sur le contenu des relations entre
déménageur et client, et, c’est essentiellement sur cet aspect que s’exerce la volonté des
parties.
67 Sans doute pour éviter la requalification du contrat. 68 Voir annexe article I contrat type déménagement d’entreprise qui qualifie expression le contrat de contrat de transport.
39
III) Volonté des parties et contenu du contrat de déménagement
L’article 1134 du Code Civil aux termes duquel « les conventions légalement formées tiennent
lieu de loi à ceux qui l’ont faites » reprend l’essence de la théorie de l’autonomie de la
volonté.
Les juges du fond s’y réfèrent très régulièrement pour apprécier de la recevabilité d’une
action, au regard des dispositions des conditions générales69 du contrat de déménagement.
Pour prendre l’exemple des règles de mise en jeu de la responsabilité de l’entreprise de
déménagement, les conditions générales disposent toutes, que la protestation motivée du
client doit être exprimée dans les 3 jours de la réception du mobilier et que toute assignation
doit être signifiée dans l’année qui suit le sinistre. Ainsi, pour que ces clauses soit opposables
aux clients, elles doivent avoir fait l’objet d’une acceptation sans ambigüité70, donc d’une
volonté clairement exprimée.
Le fait que des clauses de prescription et de forclusion, reprenant l’esprit des articles L133-3
et L133-6, soit reprise dans le contrat de déménagement, accepté par les parties, a permis à
certains juges de justifier que la convention relevait du droit des transports. Ils se sont donc
penchés sur le contenu du contrat, même en l’absence de qualification expresse dans la
convention.
Position quelque peu consacrée par le juge de cassation (garant du respect de la théorie de
l’autonomie de la volonté71), lorsqu’une Cour d’appel, qui n’avait pas tenu compte des
prescriptions contractuelles concernant la forclusion et la prescription, a été censurée.
Enfin, la place déterminante accordée à la volonté des parties en matière de déménagement est
en soit, affirmée par l’article 8 II de la LOTI qui prévoit l’élaboration d’un contrat type de
69 Concernant cette notion qui fera l’objet de précision plus loin, retenons simplement qu’il s’agit d’un document qui au même titre que le contrat type permet la standardisation de l’offre. 70 Ambiguïté manifeste lorsque les clauses litigieuses, mentionnées sur le devis de déménagement ne font pas mention de la profession de déménageur parmi les activités du professionnel. Voir CA de Paris 5ème Chambre Section A 24 mars 2004. 71 En ce sens Cour de Cassation 1ère chambre civile 4 février 2003 Axa assurances / Quetin et autres ; cassation de l’arrêt de la cour d’appel qui avait condamné la compagnie d »assurances à garantir la somme due par une entreprise de déménagement en raison des dommages causé au mobilier d’un client a u motif que la Cour d’appel avait éludé la clause relative à la prescription annale de l’action en responsabilité.
40
déménagement à caractère strictement supplétif. Celui-ci ne viendra à s’appliquer qu’ « à
défaut de convention écrites définissant les rapports entre les parties au contrat ».
Pour conclure, le respect de la volonté des parties suppose l’analyse des clauses insérées dans
le contrat de déménagement. Or, celle-ci « mime » les dispositions du code de commerce
applicable au transporteur notamment en matière de responsabilité. Il semble dès lors, utile
de lever le voile et de reconnaitre au déménagement comprenant déplacement et manutention,
la qualification de contrat de transport.
41
Section IV.
La reconnaissance de l’essence du contrat de
déménagement : le Transport
Affirmer que le contrat de déménagement est un contrat de transport consiste à le soumettre
aux même règles particulières, telles que l’interdiction des clauses de non responsabilité72, le
jeu de forclusion et de prescription spécifique73 ; ou encore l’application d’un privilège
garantissant le paiement des créances74. Au demeurant, la Cour de cassation ne semble pas
exclure complètement le recours à cette qualification, qui repose sur des considérations
théoriques et pratiques certaines.
I) Une porte laissée entre ouverte par le juge de cassation
Concernant les prestations les plus simples, dans lesquelles le client prend à sa charge
l’emballage de l’ensemble de ses biens et prend le soin de les disposer de tel sorte que le
déménageur n’a plus qu’à les charger, l’on observe que les prestations sont très similaires à
celles d’un contrat de transport.
L’on peut se réjouir de la position de la Cour de cassation sur ce point.
En effet, la prestation d’un déménageur se limitant au déplacement n’est pas soumise au
régime du contrat de d’entreprise. Dans cette hypothèse la qualification retenue sera plus,
celle de contrat de transport, voire de location de véhicule avec chauffeur si le client conserve
la maîtrise de l’opération.
72 Prescription de l’article L 133‐1 du Code de Commerce. 73 Articles L 133‐3 et L133‐6 du Code de Commerce. 74 Article L 133‐7 du Code de Commerce.
42
Il n’y a qu’un petit pas à franchir avant d’y associer des opérations de manutention d’autant
plus nécessaires au transport des biens dans des conditions assurant leur sécurité et ainsi faire
aboutir à la qualification de transport75.
En effet qu’en est-il lorsque, le déménageur, en plus du déplacement, accomplit également le
chargement et le déchargement des biens mobiliers ; Autrement dit en assure-il la livraison à
domicile ?
Y voir un contrat d’entreprise du fait que la prestation ne se limite pas au seul déplacement
des biens, serait quelque peu erroné. Le chargement et le déchargement sont, d’une manière
générale, considérés comme les accessoires du contrat de transport76 tant par la LOTI que par
les juges du fond, qui estiment qu’il s’agit là de l’exécution d’un contrat de transport.
Cette solution a été admise par la Cour de cassation. Elle retient en 2004 que « les opérations
de manutention pour le chargement et le déchargement des colis étaient l’accessoire du
transport proprement dit et que le contrat litigieux était un contrat de transport.77 »
Une extension de cette jurisprudence, aux opérations de manutention utiles au chargement et
à la livraison dans l’état dans lequel les meubles ont été confiés par le propriétaire serait
bénéfique. En voici le fondement doctrinal.
II) Le critère de la finalité de l’opération
Cette opinion développée par Albert WAHL estime que le contrat de déménagement est
nécessairement un contrat de transport.
75 Propos emprunter L. LEVENEUR « contrat de déménagement : où la règle de l’accessoire aboutit, pour une fois à la qualification de transport ». 76 Article 8 II de la LOTI qui inclut dans le contrat de transport les conditions d’enlèvement et de livraison des objets transportés. 77 Cassation com. 10 Mars 2004 n°02‐14.761, Juris‐Data n°2002‐182669.
43
« Le but principal que poursuit le client du déménageur est de retrouver en un endroit
déterminé les objets qui sont actuellement à un autre endroit ; en d’autre termes le but est de
déplacer, de faire transporter des objets (…). Les autres opérations ne sont destinées qu’à
rendre possible le transport et à empêcher la détérioration des objets transportés. »
Albert WAHL relève également que, l’emballage ne rentre pas dans le rôle essentiel du
déménageur dès lors que le client pourrait le faire lui-même.
De plus, l’auteur note que les opérations de chargement et de déchargement ne sont pas de
nature à exclure la qualification de transporteur, puisque ces manipulations sont souvent mises
à sa charge.
Les activités de manutention se rattachent donc au transport proprement dit ; Toutes ces
opérations ne découlent que de l’exécution du contrat de transport, dont la finalité est le
déplacement de la marchandise avec un moyen de locomotion.
Cependant, cette qualification exclusive du contrat de contrat de transport ne semble pas
encore avoir de réel écho jurisprudentiel. Les décisions, qui penchent en ce sens, sont en effet
plutôt rares.
44
Chapitre II.
Déménagement et garde meuble :
une dualité de contrat
Il arrive que les opérations de déménagement confiées au déménageur comprennent une phase
de mise en garde-meubles du mobilier du client qui entraîne la conclusion d'un contrat de
dépôt. Une certaine hésitation peut parfois être perceptible quant à la qualification adéquate
pour régir une opération complexe de déménagement comprenant déplacement, manutention
et garde des meubles par l’entreprise de déménagement ou son substitué.
La doctrine et la jurisprudence nous font état de trois modes de qualifications possibles.
Certains sont envisageables mais soulèvent de nombreuses difficultés pratiques. Ils consistent
en l’octroi d’une seule qualification à l’ensemble des opérations (Section I). Une seule
méthode parait souhaitable dans un souci de cohérence et de clarté : la dualité de contrat.
Autrement dit, l’activité garde meuble doit être régie par un régime conforme à son objet, le
contrat de dépôt. Tandis que, le contrat de déménagement comprenant manutention en vue du
déplacement et transport apparaît comme un contrat distinct autonome (Section II).
45
Section I.
Qualification envisageable
Qu’elles soient alternatives (A) ou exclusives (B), les tentatives visant à soumettre à un
régime commun, les opérations de transport déménagement et de garde meuble mettent en
évidence une certaine antinomie. L’objet des deux conventions est en effet distinct.
I) Une qualification alternative difficile à mettre en œuvre
Comme cela à été précédemment mis en évidence concernant les opérations de manutention
associées à un déplacement des biens mobiliers, la qualification alternative découle de la règle
selon laquelle l’accessoire suit le principal. Ce qui veut donc dire que le déménagement dans
son ensemble revêtira la qualification juridique de l’opération la plus importante entre
manutention, déplacement et mise en garde meuble.
L’on relève une décision de la Cour d’appel de Paris, qui en faisant application de ce principe
a considéré que l’ensemble de ces opérations ne découlait que de l’exécution d’un contrat de
transport78.
Cependant, le recours à cette technique de qualification alternative n’est pas à l’abri de la
critique puisque d’une part, il est difficile de considérer que la conservation du mobilier
puisse être l’accessoire du déplacement et inversement. Cela rend la mise en œuvre de cette
technique très peu exploitable en pratique.
78 CA de Paris 25eme Chambre, 4 mars 1994 BTL 1994.
46
II) Une qualification exclusive
Reste alors à nous interroger sur l’intérêt d’une qualification exclusive.
Il s’agit donc de concevoir les opérations de déménagement et de garde meuble dans leur
globalité, comme l’exécution d’un contrat unique ayant toujours la même nature juridique.
Certaines décisions ont retenu la qualification de contrat de transport en n’appréhendant que
la finalité de l’opération de déménagement, à savoir le transfert des objets mobiliers.
L’on peut citer en ce sens un arrêt de la Cour d’appel de Montpellier qui estime que la garde
du mobilier concoure à la réalisation de l’objet principal de la convention (à savoir le
déplacement) et que par conséquent l’ensemble du contrat est un contrat de transport79.
Une tout autre démarche consisterait à exclure la mise en jeu des règles spéciales du contrat
de transport en retenant la qualification exclusive de contrat de dépôt.
79 28 septembre 1999, 2eme Chambre section A.
47
Section II.
Qualification souhaitable
Une dualité entre contrat de garde meuble et contrat de transport.
Ce raisonnement est celui des professionnels du déménagement. Le contrat de déménagement
des particuliers reprend cet aspect en précisant dans les conditions générales de
déménagement, que la mise en garde meuble met fin au contrat de déménagement.80
Distinction reconnue aussi par la jurisprudence qui considère que deux contrats séparés ont
été conclu, l’un de déménagement (ou de transport), l’autre de garde meuble (ou de dépôt).
Ainsi, chaque période contractuelle se voit appliquer ses propres règles. Si l’avarie subie par
le mobilier est survenue pendant la mise en garde meuble, il sera fait appel aux règles du
contrat de dépôt. La mise en œuvre des limitations de responsabilité posées par le contrat de
transport81 est dès lors exclue.
Cependant, s’il n’est pas établi que les dommages sont survenus durant l’entreposage et le
gardiennage, les prescriptions du contrat de transport, ou plus généralement du contrat de
déménagement trouveront de nouveau à s’appliquer.
Un constat s’impose : il est très difficile de déterminer l’origine des dommages, ou plus
précisément l’opération pendant laquelle les meubles ont été abîmés (ou perdus).
Une préconisation est faite pour faciliter cette détermination : l’examen minutieux du
mobilier par les parties à chaque phase du déménagement et l’émission de réserves en cas de
dommages observés.
80Articles 17 et 18 des conditions générales. Voir annexes 1. 81 Voir en ce sens CA de Paris 8ème Chambre, Section A, 14 Octobre 1986, Société Nouvelle Unic Transports c/ Grateloup , disponible sur Juris-Data n°1987-021699.
48
Les conditions générales de déménagement de particulier disposent d’ailleurs que « La
livraison en garde meubles (à la demande du client) est assimilée à une livraison à domicile
et met fin au contrat de déménagement. 82»
Ce qui signifie que, comme lors de la livraison à domicile, le client ou son mandataire doit
être présent lors du déchargement des biens mobiliers au garde meuble83, ainsi que lors du
chargement de ceux-ci pour leur réacheminement vers leur destination finale, la résidence du
client.
Or, dans la pratique l’on constate que le client n’assiste que très exceptionnellement au
déchargement du mobilier et à la mise en garde meuble. Il n’est d’ailleurs pas plus présent
lors de la sortie des meubles du garde meuble. Le mobilier est donc presque toujours présumé
avoir été reçu en bon état et sortie en bon état du garde meuble.
Et même dans l’hypothèse où l’état des lieux d’entrée en garde de meuble aurait été dressé,
c’est bien souvent l’état des lieux de sortie et les réserves aux chargements (au garde meuble)
qui manquent à l’appel.
Si bien qu’en règle générale, la responsabilité de l’entreprise de déménagement ne peut être
appréhendée qu’à l’occasion du contrat de transport84. Autrement dit, sauf à missionner un
expert judiciaire ou extrajudiciaire qui établirait qu’au vu de la nature des dommages
constatés ceux-ci ne peuvent avoir pour origine que la mise en garde meuble, rares sont les
litiges dans lesquels, la responsabilité de l’entreprise de déménagement est recherchée au
cours de l’activité garde meuble85.
Parallèlement, dans l’hypothèse où le déménageur transmet la charge du dépôt à une autre
entreprise sans en avoir informé le client, celui-ci reste tenu de l’indemniser en sa qualité de
82 Article 17 condition générale déménagement de particulier. 83 Obligation de présence au chargement et au déchargement prévu à l’article 11 des conditions générales du déménagement des particuliers. 84 En ce sens, CA d’Aix en Provence 9 mars 1990. 85 L’exemple type est celui du meuble endommagé par la moisissure. L’occurrence pour qu’un tel dommage survienne en cour de transport étant quasi inexistante, il parait tout naturel d’en déduire que ce sinistre est à attribuer à un stockage prolongé en milieu humide, et ce même en l’absence de document d’entrée ou de sortie attestant de cet élément factuel.
49
dépositaire86. En effet, par application du principe de l’effet relatif des contrats, l’entrepreneur
de déménagement ne peut opposer au client le contrat qu’il a conclu avec l’entreprise tierce et
ne peut transférer l’obligation qu’il a contractée envers son client à cette entreprise.
Cette dualité de contrat entre contrat de garde meuble et contrat de déménagement permet
d’exclure l’application des règles particulières du contrat de transport au contrat de garde
meuble. Par extension, si l’entreprise de déménagement ne déclare auprès de son assurance
qu’une activité principale de transporteur, les garanties souscrites par ce dernier ne peuvent
bénéficier à l’activité garde meuble. Le juge estime, en ce sens, que le contrat de garde
meuble ne peut constituer une activité « connexe ou annexe à l’activité principale
déclarée87 ».
De même, la doctrine classique soutient que deux contrats sont conclus avec le client.
Mais, selon le doyen RODIERE, cette dualité de contrat s’explique par le fait que selon que le
garde meuble est proche de la première ou de la seconde résidence, l’opération de transport
qui y conduira ou en partira sera considérée comme l’accessoire du contrat de dépôt. Le
déplacement le plus important constituera seul le contrat de transport.
Il est légitime de s’interroger sur l’opportunité de cette solution qui à pour effet de soustraire
une partie du transport (la partie la plus courte) aux règles du droit des transports, tout
particulièrement si les dommages sont survenus durant cette phase de transport. Il paraît
même risqué de s’appuyer sur cette proposition, vu son caractère artificiel.
L’on recense en ce sens, une jurisprudence qui, a appliqué ce raisonnement pour recevoir la
mise en cause de la responsabilité d’une entreprise de déménagement (de très mauvaise fois)
au delà du délai d’action d’un an88.
En tout état de cause, il semble plus judicieux de faire de cette assimilation l’exception.
86 L’entreprise de déménagement pourra par suite se retourner contre son sous traitant responsable du dommage survenu. 87 TI Aubervilliers 17 Février 2004, BTL 2004, p 193. 88 CA Paris 29 Janvier 2002 8eme Chambre Section A SARL Aux artisans Déménageur Réunis c / Saint Martin Petit Jean.
50
Ainsi le contrat de garde meuble bénéficie de règles qui lui sont propres et qu’il convient de
différencier de celles applicables au contrat de transport déménagement tel que nous
l’entendons. Même si cette activité est une activité importante pour les entreprises de
déménagement qui se sont aujourd’hui vraiment diversifiées (self stockage, location et vente
de matériel de déménagement), l’on ne peut, dans un souci de cohérence, soumettre toutes les
activités du secteur au droit des transports. Ainsi, la qualification contrat de transport ne peut
être retenue que pour les contrats comprenant uniquement déplacement et manutention en vu
du déplacement. Pour le reste le Code civil et autre Code de la consommation regorge de
dispositions qui nous paraissent suffisamment adéquates.
51
Partie 2 : Convergence des
intérêts par un contrat type équilibré.
52
Les sénateurs avaient, par la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 de simplification et de
clarification du droit et d'allègement des procédures, « jeter un paver dans la mare » en
adoptant un amendement tendant à ce que les opérations de transport effectuées dans le cadre
d'un déménagement ne soient plus assimilées à du transport de marchandises. Depuis le
législateur s’est « dédit » rétablissant les articles de la LOTI qui avait été modifiés, à
l’occasion de développement et de modernisation des services touristiques du 22 juillet 2009.
L’adoption de cette exclusion est à la mesure de l’importance des enjeux actuels de
protection du consommateur. Ainsi si la cohérence entre statut professionnel du déménageur
et régime contractuel doit être consacrée cela ne peut se faire sans la prise en compte des
intérêts du consommateur. Il semble que cet objectif puisse être atteint par un contrat type de
transports de déménagement de particulier. Reste à en justifier l’utilité réelle dans un secteur
d’activité ou la convention écrite est « monnaie courante » (Chapitre I). L’étude des
conditions générales de déménagement de particulier servira de « boîte à outils » pour mieux
appréhender les clauses contractuelles dont la révision est nécessaire (Chapitre II).
53
Chapitre I.
L’utilité d’un contrat type transport pour
le déménagement de particulier
54
Section I.
Le champ d’application d’un contrat type
déménagement
Cette démarche à un fondement légal puisque la LOTI en prévoit l’élaboration depuis
2003 (I). Toutefois sachant que l’objectif principal du contrat type est de pallier au manque
d’écrit et de sécuriser les relations entre les parties, il paraît plus utile d’en établir un
concernant le déménagement de particulier.
Le déménagement de particulier disposant déjà d’un arsenal conventionnel qualifiant
expressément le contrat de contrat de transport (II).
I) Une mise en œuvre des prescriptions de la LOTI
Pour définir l’utilité des contrats types en la matière, il faut d’abord jeter un regard plus global
sur le transport routier intérieur dont le déménagement est une composante lorsqu’il est
qualifié de contrat de transport. En effet, d’une manière générale, la réglementation des
transports routiers intérieurs est plutôt limitée. L’on ne recense que quelques articles relatifs à
la question dans le Code de commerce et dans le Code civil89.
Ces articles sont essentiellement relatifs aux conditions de mise en jeu de la responsabilité du
transporteur. Il n’y est nullement fait mention des obligations des parties ou des règles
relatives à la réparation des dommages pour perte, avarie ou retard. C’est la raison pour
laquelle la LOTI90 a, d’une part préciser les clauses qui devaient figurer dans le contrat de
transport (Section 1), et a, d’autre part institué un système de contrat type, établi dans la 89 8 articles dans le Code de commerce et 6 dans le Code Civil. Voir annexe. 90 Loi d’Orientation des Transports Intérieurs du 30 décembre 1982.
55
concertation, auquel l’on pourra se référer en l’absence de cahier des charges entre les parties.
Une fois que les différents intervenants du secteur se sont mis d’accord sur le contenu du
contrat-type, ceux-ci sont homologués par décret.
Il s’agit donc d’un document qui vient compléter les prescriptions du Code de commerce. Le
contrat type règle tout ce qui n’est pas prévu dans le Code de commerce et qui est imposé par
la LOTI. Le contrat définit ainsi les informations à donner au transporteur, repartit les rôles
aux parties lors des opérations de chargement et de déchargement, mais répartit aussi les
modalités de paiement et les limites d’indemnités en cas de sinistre.
Cependant, rappelons que malgré leur adoption par décret, les contrats types ne sont pas
d’ordre public. Ils n’ont vocation à s’appliquer que si aucune autre convention n’a été conclue
entre les parties. L’on peut donc y déroger, en aménageant une convention écrite comprenant
des clauses différentes. Cette convention a pleine valeur juridique dès lors qu’elle a été portée
à la connaissance de l’autre partie et qu’elle a été acceptée.
II) Un Contrat type transport de déménagement de particulier
Aujourd’hui, huit contrats types sont en vigueur.
Pourquoi ne pas étendre l’expérience au déménagement ? En effet, l’objet principal de ce type
de prestation n’est t’il pas le déplacement du mobilier d’un client de l’adresse de chargement
à l’adresse de livraison ?
En matière de déménagement d’entreprise, l’on peut estimer que les conditions générales
associées aux cahiers des charges, peuvent suffire. Le contrat type déménagement d’entreprise
ne viendrait, en quelque sorte que valider par décret, les normes AFNOR qui encadrent la
profession. C’est surtout concernant le déménagement de particulier que la démarche peut
être intéressante.
En effet, cela permettrait de couper court à la polémique sur la qualification juridique du
contrat de déménagement (comprenant déplacement et manutention) en le rattachant
expressément au droit des transports. Ce serait l’occasion de concilier l’intérêt du
consommateur et l’intérêt du professionnel autour d’un contrat équilibré. Des négociations, en
ce sens, ont déjà été engagées, sans grand succès.
56
57
Section II.
Une tentative avortée de Contrat type
transport de déménagement de particulier
La volonté de fixer le contenu et le régime applicable au contrat de déménagement de
particulier est une conséquence de l’adoption de la qualification exclusive de contrat
d’entreprise par la Cour de cassation (I). Pour les représentants du consommateur, il s’agit de
prendre acte de cette décision en intégrant l’activité de déménagement dans le Code de la
consommation. Qu’en est-il de la viabilité d’une telle proposition ? (II).
I) Une conséquence directe de la qualification jurisprudentielle de
contrat d’entreprise
Une tentative, en ce sens, à déjà été instiguée en 2002. Le Ministre de L’Equipement, des
Transports de l’époque demandait alors au Conseil National des Transports de créer un
groupe de réflexion sur le déménagement suite à l’arrêt de principe de la Cour de cassation du
3 avril 2001 qui qualifiait le contrat de déménagement, de contrat d’entreprise. Il s’agissait
alors de réfléchir sur l’impact juridique de cette révolution jurisprudentielle et de clarifier la
situation des entreprises de déménagement. Cela s’est avéré être un échec puisque les
propositions formulées par les représentants des consommateurs et celles des professionnels
du déménagement étaient inconciliables.
Ce désaccord portait d’abord sur le choix du Conseil National des Transports comme organe
de coordination de cette réflexion. Les associations de défense des consommateurs
contestaient de manière unanime la légitimité du Conseil. Ce qui était à l’époque justifiable,
la Cour de cassation venait de le qualifier de contrat d’entreprise. Les associations de
consommateur venaient tout juste d’obtenir gain de cause après de longues années de bataille.
La nomination d’un organisme dédié à la représentation des professionnels du transport pour
diriger les travaux de réflexion sur le contrat de déménagement de particulier, paraissait nier
58
la victoire toute fraîchement acquise. Le choix du Conseil National de la Consommation leur
semblait plus cohérent, de façon à éviter les tentations de refaire du déménagement un
transport.
Nous sommes alors en 2002, et La LOTI ne fait pas encore référence au déménagement. Les
seules sources de droit y faisant explicitement ou implicitement allusion sont règlementaires.
Du fait du principe de la hiérarchie des normes, rien ne permettait d’imposer le lien indéniable
entre transport et contrat de déménagement.
II) Intégration du contrat de déménagement au code de la
consommation ?
Dans le contexte de cette année 2002, il s 'agit pour les associations de défense du
consommateur de rester à tout prix sur l’impulsion donnée par la Cour de cassation en
soumettant le contrat de déménagement de particulier au droit commun.
Plus spécifiquement, cette proposition vise à l’élaboration d’un droit spécifique au contrat de
déménagement, placé au sein d’un chapitre du Code de la consommation. Toutefois, les
particularités inhérentes au déplacement seraient prises en considération en retenant certaines
dispositions du droit des transports. En soit, cette ambition n’est pas intéressante et aurait le
mérite de créer un régime uniforme pour toutes les activités des entreprises de déménagement
s’adressant à un public de particulier. Mais, elle n’est pas sans créer des difficultés d’ordre
sociales et économiques.
En tout état de cause, ce projet à été abandonné pour des raisons qu’il convient de mettre en
évidence.
D’une part, il est un point indéniable, qui nous servira d’hypothèse de départ : la
règlementation des transports doit être en concordance avec la qualification du contrat de
déménagement.
Dès lors que l’on considère que le contrat de déménagement est un contrat d’entreprise c’est
l’activité déménagement dans son ensemble qui se retrouve exclue du secteur règlementé des
59
transports. Concernant, l’accès à la profession, nul besoin de s’inscrire au registre des
transporteurs91, la simple inscription au registre de commerce est alors suffisante.
Or, cela n’aurait pour effet que d’aggraver la situation sociale déjà difficile des entreprises de
déménagement. Une telle mesure aurait pour effet d’engendrer le développement de la
concurrence déloyale qui sévit déjà dans le secteur. L’activité clandestine importante viendrait
gonfler les rangs au dépend de tous ceux qui auront investi dans un service de qualité. En ces
temps de crises où l’argumentaire commercial se limite au caractère bon marché de la
prestation, l’on assisterait à la prise du marché par une multitude d’auto entrepreneurs, sans
grande qualification. Ce serait la remise en cause de tous les efforts d’une profession pour
moraliser et former ses membres. En effet, les règles d’accès à la profession conditionnant
l’inscription au registre des transporteurs sont un gage de qualification et d’une concurrence
saine entre professionnels à armes égales92.
En outre, il n’est pas dit que le consommateur y trouve son compte. La triple présomption de
responsabilité pesant sur le transporteur est plutôt favorable au client. En effet, faute de
réserves du transporteur lors de la prise en charge des marchandises, celui-ci est présumé les
avoir reçues en bon état. Ainsi à l’arrivée, si le destinataire constate un quelconque dommage,
il lui suffit de dresser constat des avaries dont il est victime et peut en demander directement
la réparation, sans avoir à en apporter la preuve matérielle. Le droit commun souhaité par les
associations de consommateurs, applicable depuis l’arrêt de principe de la Cour de cassation
est sur ce point moins à l’avantage du particulier puisqu’il supporte la charge de la preuve.
Par ailleurs, rappelons que les règles de procédure posées par le Code de commerce et le jeu
de la présomption en matière de transport reposent sur un réel équilibre. Les contraintes
procédurales qui pèsent sur le sinistré sont la contrepartie de la lourde présomption de
responsabilité du transporteur. Cette facilité offerte par le droit des transports quant au mode
de preuve parait à bien des égards, plus protectrice que le droit commun.
Le déménagement est donc une activité du secteur des transports publics de marchandise. Le
législateur, sensible aux enjeux économiques et sociaux que pouvait engendrer la qualification
de contrat d’entreprise, a « retouché » à la LOTI en 2003 pour apaiser les esprits et pallier au
risque de morcellement de la profession. 91 Sauf si l’entreprise de déménagement effectue en parallèle des transports de marchandises. 92 Le coût de formation est un poste important qui grève fortement le budget des entreprises de déménagement.
60
La réglementation professionnelle est consacrée, cette volonté a été confirmée par la loi du 22
juillet 2009. Quant à l’élaboration d’un contrat type de transport de déménagement, le projet
écarté du fait de la discorde entre les différents intervenants, devrait revenir à l’ordre du jour,
tant il est vrai que le souci de cohérence entre réglementation professionnelle et qualification
du contrat de déménagement est toujours d’actualité.
L’élaboration d’un contrat type transport déménagement de particulier est une étape
importante. L’on remarque que l’objectif visé par cette démarche n’est pas seulement de
sécuriser les relations du transporteur-déménageur avec son client. Il s’agit aussi et surtout de
créer un point de repère fixe pour des professionnels qui bien souvent « ne savent plus sur
quel pied danser. » L’adoption du contrat type transport permettra d’attribuer une identité
principale à cette activité.
D’un point de vue plus global, il faut dire que, jusqu’alors, l’élaboration des contrats types,
d’ailleurs toujours sous l’égide du Conseil National des Transports, avait pour objet d’alléger
les procédures contractuelles, de prendre acte des usages des professionnels du transport. Cela
partait d’un constat : les conventions écrites ne faisaient pas légion entre les transporteurs.
L’entretien téléphonique suffisait (et suffit encore) généralement à sceller l’accord des parties.
L’objectif premier des huit autres contrats types aujourd’hui en vigueur, était de pallier
l’absence de contrat écrit.
En matière de déménagement, la pratique de la convention écrite est très répandue. A moins
de recourir à une prestation clandestine, qui ne fera l’objet d’aucune déclaration fiscale, un
devis plus ou moins détaillé mentionnant les conditions générales au verso est remis avant
l’échange des consentements. C’est donc en toute connaissance de cause que le client
apposera, par la suite, sa signature sur le contrat de déménagement.
Cela explique aussi pourquoi l’idée du contrat type transport de déménagement avait été mise
de coté de 2002 à nos jours.
Par conséquent, l’intention est double : d’une part, apporter une crédibilité supplémentaire à la
profession en leur accordant un statut principal indiscutable et d’autre part, tenir compte des
spécificités liées à l’identité du client : un consommateur. L’alchimie entre ces deux
considérations ne peut naitre que dans un contrat type transport de déménagement applicable
aux prestations comprenant manutention et déplacement des biens mobiliers.
61
Enfin, ce corps de métier organisé, en mal de reconnaissance, surtout lors des opérations
réalisées pour le compte de particulier, propose diverses solutions contractuelles dans les
conditions générales de déménagement mais aussi dans un ensemble de documents assurant le
suivi de la prestation. Certaines d’entre elles pourraient être reprises dans le contrat type
transport de déménagement. Ces dispositions relatives notamment à la détermination des
obligations des parties ont fait leurs preuves, et ne suscitent pas grande contestation sauf de
ceux qui manifestement, ne prennent pas le temps de les lire.
Cette étude succincte des clauses des conditions générales de déménagement de particuliers
nous permettra aussi de mieux comprendre les réticences des consommateurs dont la Cour de
cassation se fait l’écho. Un remaniement des clauses concernant la forclusion et la
prescription peut être envisagé, comme y invitent souvent les décisions rendues en la matière.
Le statut de consommateur des clients est en effet une variable importante à considérer.
Pour ce faire, il semble utile de donner une tournure plus concrète à ces travaux. Le régime
juridique du contrat de déménagement sera ainsi présenté à travers un atelier pratique
reprenant l’ensemble des formalités et difficultés qui peuvent survenir dans le cadre d’une
prestation de déménagement réalisée pour le compte d’un particulier. Il s’agira de mettre en
évidence, les dispositions prévues dans les conditions générales pouvant faire l’objet d’une
intégration au contrat type transport de déménagement, de les réaménager si nécessaire, de
manière à tenir compte des différents intérêts en jeu.
62
Chapitre II.
Aménagement du contrat de transport de
déménagement de particulier
La conclusion du contrat de déménagement est toujours précédée par un échange
d’informations, ayant pour objet de déterminer l’étendue des obligations respectives des
parties (Section I). Si le contrat est conclu, les obligations ainsi définies devront être mises en
œuvre durant l’exécution du déménagement (section II). L’obligation principale du
déménageur étant la livraison complète, en bon état et dans les délais du mobilier. Cependant
d’autres obligations peuvent s’y ajouter si, pour une raison quelconque le transporteur de
déménagement faisait appel à une autre entreprise pour réaliser tout ou partie de l’opération
(Section III). Par ailleurs, si des dommages sont constatés, ils feront l’objet d’une
indemnisation, souvent par l’assureur responsabilité civile en fonction des limitations de
responsabilité conventionnelle sauf à prouver la faute lourde du déménageur. Et en cas
d’échec de la procédure amiable de résolution du litige, la partie lésée se retrouve alors à
devoir intenter une action en responsabilité devant la juridiction compétente (Section IV).
L’interrogation majeure porte alors sur l’importance des réserves et de la confirmation
adressée au déménageur comme moyen de preuve des dommages et comme condition de
recevabilité de l’action. A cela s’ajoute, l’appréciation de la prescription annale en matière de
déménagement. En effet, un aménagement de ces règles devient nécessaire depuis la réforme
de l’article L133-3 du Code de commerce, qui aujourd’hui exclu expressément l’application
du délai de trois jours pour émettre les réserves en matière de déménagement (Section V).
Quant au client, son obligation principale réside dans le paiement du prix de la prestation. En
cas de manquement de sa part, le déménageur dispose d’un certain nombre de garanties qu’il
conviendra d’évoquer. (Section VI).
63
Section I.
Phase préparatoire du contrat de
déménagement : un échange d’informations
Une obligation précontractuelle de renseignement pèse sur le transporteur déménageur. Mais
d’une manière plus générale, la phase de préparation du contrat se caractérise par un échange
d’informations de manière à définir l’étendue de la prestation ainsi que son prix. Cette
échange se matérialise par l’établissement d’un devis (I), la communication des conditions
générales de déménagement (II), ainsi que l’évaluation des biens à déménager dans une
déclaration de valeur (III).
I) L’établissement du devis de déménagement
Il s’agit d’une obligation règlementaire posée par l’article 2 de l’arrêté du 3 novembre 1986.
La non remise du devis, de manière gratuite, avant la conclusion du contrat est assimilée par
la jurisprudence à un manquement du déménageur à son devoir de conseil.
En voici ci-dessous un exemplaire, illustrant l’ensemble des mentions obligatoires qui doivent
y figurer.
64
65
Y figure ainsi, outre les références de l’entreprise de déménagement, l’identité du client, le
lieu de chargement et de livraison, les dates d’exécution, la distance à parcourir, la date
d’établissement du devis, l’indication du volume, le type de voyage, et la définition exacte de
la prestation choisie ainsi que sont coût, l’indication des modalité de paiement.
Le montant de la prestation indiqué en HT et TTC, celui-ci ne peut en principe faire l’objet de
modifications. Toutefois, le prix indiqué sur devis peut être revu si des prestations
supplémentaires sont nécessaires.
II) La communication des conditions générales
C est là une obligation imposée par l’arrêté précité du 3 novembre 1986. Les conditions
générales de déménagement accompagnent le devis. La différence principale entre ces deux
documents est que, tandis que le devis énonce les conditions particulières du déménagement,
les conditions générales informent le client sur ses droits et ses obligations à l’égard de
l’entreprise de déménagement.
Les procédures applicables en cas de constat de dommage se trouvent dans les conditions
générales au verso du devis, comme cela a été recommandé par la Commission des Clauses
Abusives93 en ces termes : «les conditions générales susceptibles d'être opposées au client
soient intégralement, lisiblement et clairement reproduites sur un document qui lui est remis
avec le devis avant la conclusion du contrat ».
III) La déclaration de valeur
L’établissement de la déclaration de la valeur94 des biens permet de fixer à l’avance
l’indemnisation due, en cas de dommage et de porter à la connaissance du client le coût de la
garantie. Celui-ci informe l’entreprise de déménagement de la valeur totale des biens confiés,
laquelle fixe de son coté une valeur plafond pour chaque objet ou élément de mobilier.
93 Recommandation n°82‐02. 94 Article 4 et 14 des conditions générales de déménagement de particulier.
66
Selon l’article 14 des conditions générales de déménagement, la valeur ainsi déterminée doit
apparaitre dans les conditions particulières de déménagement négociées entre les parties sous
peine de nullité de plein droit du contrat.
Une liste valorisée peut aussi être dressée par le client pour les biens dont la valeur dépasse le
plafond forfaitaire fixé par le déménageur. La valeur indiquée pour ces éléments constituera le
plafond d’indemnisation, quelque soit la valeur déclarée par le déménageur lors de la
souscription d’une assurance au bénéfice du client95.
95 CA de Rennes 1 chambre 19/02/1993.Juris‐Data n°1993‐052293.
67
Section II.
Conclusion du contrat de déménagement
I) Un accord de volonté sur l’existence et le contenu du contrat
Conformément au principe du consensualisme qui prévaut en droit français, le contrat de
déménagement est un contrat consensuel. Il existe par le seul échange des consentements des
deux parties à l'acte, c'est-à-dire le déménageur et son client, sans qu'aucune condition de
forme ne soit imposée. Un déménagement pourrait donc s'effectuer à la suite d'un simple
accord verbal96.
Par ailleurs, selon la LOTI « tout contrat relatif au déménagement doit comporter des clauses
précisant la nature et l'objet (...) du déménagement, les modalités d'exécution du service (...),
les obligations respectives de l'expéditeur, (...) du déménageur et du destinataire, et le prix
(...) du déménagement ainsi que celui des prestations accessoires prévues ». Ce qui, en
pratique, recoupe les mentions devant figurer dans le devis ou les conditions générales qui
l'accompagnent, remis au client avant la conclusion du contrat.
Il faut cependant, préciser qu’en l’état actuel des choses, les conditions générales du contrat
de déménagement ne s'appliquent pas de plein droit, car elles ne constituent ni un texte
réglementaire, ni un contrat type. Les parties à un contrat de déménagement doivent donc
intégrer ces conditions générales dans le contenu de leur accord pour leur être applicables à
titre conventionnel.
De plus, il faut pouvoir prouver l'existence et le contenu du contrat de déménagement. En
vertu des articles 9 et 146 du nouveau Code de procédure civile et de l'article 1315, al. 1er du
Code civil, la charge de la preuve de l'existence d'un contrat et de son contenu incombe à celui
qui s'en prévaut, qui aura à supporter les conséquences de sa carence dans l'administration de
la preuve. Quant au mode de preuve, la preuve d'un contrat de déménagement de particulier,
qui est un acte mixte, peut se faire par tous moyens, lorsque la charge de la preuve pèse sur le 96 Cass. com., 5 mars 1973 : BTL 1973, p. 230. – Cass. com., 3 janv. 1978, n° 76‐12641, Bouyakoub c/ Boespflug : contrat verbal de commission de transport passé entre des époux et une personne chargée de pourvoir au déménagement de leur mobilier.
68
client. En revanche, il a été jugé que l’entreprise de déménagement devra fournir un écrit ou
un commencement de preuve par écrit dans les conditions prévues à l’article 1347 du Code
civil97.
A ce titre, l’on retient le plus souvent que la signature du devis vaut acceptation. Il en est de
même de la signature la lettre de voiture sauf à démontrer l’existence d’une relation
contractuelle98.
L’établissement de la lettre de voiture de déménagement est, en effet, prescrit par l'article 6 de
l'arrêté du 9 novembre 1999, relatif aux documents de transport ou de location devant se
trouver à bord des véhicules de transport routier de marchandises. Celle-ci doit être remise au
client avant le déménagement. Selon la recommandation n° 82-02 de la Commission des
Clauses Abusives concernant les contrats proposés par les déménageurs, la lettre de voiture
doit être présentée au client et signée par lui dans un délai raisonnable avant l'exécution du
déménagement. Ce document, dont voici un exemplaire, reprend pour la plupart des
indications figurant déjà sur le devis.
Il est établi en quatre exemplaires.
Le premier, qui constitue la souche, est conservé par l'entreprise. Le second, constituant le
double de la souche, est remis au client avant le déménagement. Le troisième, qui
accompagne le mobilier en cours de transport est remis au personnel d'exécution ou, le cas
échéant, à une entreprise exécutante, ou à un correspondant destinataire ; il constitue le
bulletin de livraison destiné à recevoir en fin d'opération, mention de décharge du client et,
éventuellement, de ses réserves ; il est conservé par l'entreprise. Le quatrième est un double
de bulletin de livraison remis au client en fin d'opération.
Les quatre exemplaires sont classés de A à D.
97 Cass. 1re civ., 16 déc. 1992, n° 91‐12876 : inédit. 98 CA Orléans, ch. com., éco. et fin., 21 oct. 2004
69
70
II) Contrat de déménagement et rétractation
Après sa conclusion, le contrat de déménagement peut cependant ne pas être exécuté en cas
d'exercice d'un droit de repentir ou d'une faculté de résiliation.
Afin de protéger le consommateur contre des pratiques commerciales qui peuvent l'amener à
contracter de façon irréfléchie, le législateur lui octroie parfois un droit de repentir qui lui
permet d'annuler, dans un certain délai, le contrat préalablement conclu. C'est le cas en
matière de vente par démarchage où l'article L. 121-25 du Code de la consommation donne la
possibilité au client de renoncer au contrat dans les sept jours de sa conclusion. Cette règle est
rappelée à l'article 3 des conditions générales du contrat de déménagement de particuliers qui
stipule que “en cas de démarchage et de vente à domicile, le client bénéficie de la faculté de
renonciation dans les 7 jours suivant la signature du contrat de déménagement”. Ce même
article prévoit également que le client reçoit à cet effet un bordereau de rétractation et
qu'aucune contrepartie financière ne doit être perçue pendant ce délai, conformément aux
articles L. 121-24 et L. 121-26 du Code de la consommation.
En outre, dès la conclusion du contrat, les parties peuvent convenir d'une clause de résiliation
qui les autorise à mettre fin unilatéralement à leur accord avant son exécution, le plus souvent
en contrepartie du versement d'une indemnité. L'article 2 des conditions générales du contrat
de déménagement de particuliers dispose que, sauf cas de force majeure, en cas de résiliation
par le client, les sommes versées d'avance (les arrhes) ne sont pas remboursées, tandis qu'en
cas de résiliation par l'entreprise ou de défaillance de celle-ci, le professionnel les restitue au
double. Cette faculté qu'a chaque partie au contrat de déménagement de revenir sur son
engagement en fonction des modalités financières ainsi décrites s'inspire du dernier alinéa de
l'article L. 114-1 du Code de la consommation dont l'application est générale.
En tout état de cause, en l'absence de clause de résiliation en sa faveur, une partie ne peut
mettre fin au contrat de façon unilatérale à ses risques et périls qu'en raison de la gravité du
comportement de l'autre partie. Ainsi, la résiliation d'un contrat de déménagement a été
prononcée aux torts d'un client qui a refusé de remettre son mobilier aux employés d'une
entreprise de déménagement arrivés à 10 heures 30 avec un camion prétendument trop petit et
71
les a renvoyés, alors que le devis accepté ne comportait aucune mention relative à l'heure du
début des opérations ni aux moyens en hommes et en matériels99.
99 CA Paris, 8e ch., sect. A, 31 janv. 1990 : Juris‐Data n° 1990‐020373.
72
Section III.
Les obligations de l’entreprise de
déménagement
Le déménageur doit livrer le mobilier figurant sur l'inventaire, au client qui a régulièrement
payé le prix fixé dans le devis. L'exécution du contrat de déménagement consiste donc pour le
déménageur à réaliser l'opération de déménagement en assurant une livraison complète (I)
mais d’autres obligations peuvent aussi être mises à sa charge(II). Le mis en cause étant
généralement le déménageur, c’est à travers ces obligations que nous présenteront les
obligations et les prérogatives du déménagé pendant la phase d’exécution du contrat.
I) Obligations de résultat du déménageur quant à la livraison
Pour réaliser l'opération de déménagement, le déménageur est tenu d'exécuter un certain
nombre d'obligations. Si l'inexécution des prestations promises par le déménageur peut
entraîner la résolution judiciaire du contrat ayant un effet rétroactif, à certaines conditions
strictement définies ; elle donne le plus souvent lieu à une indemnisation du dommage subi
par le client, à la suite de l'exercice d'une action en responsabilité lorsque la réparation n'est
pas spontanée.
A. Principe de la livraison conforme du mobilier
Ainsi, s'inspirant de la règle contenue dans l'article L. 133-2 du Code de commerce, les
conditions générales du contrat de déménagement de particulier100 prévoient que l'entreprise
est tenue de réaliser le déménagement dans les délais convenus. En principe, la période ou la
date d'exécution prévue pour le déménagement doit figurer dans le devis établi par le
100Article 12 des conditions générales de déménagement de particuliers.
73
déménageur. De même, la date limite des opérations de chargement et de livraison doit
apparaître dans la lettre de voiture remise au client avant le déménagement.
Le déménageur est aussi tenu d'effectuer l'ensemble des opérations de déménagement
convenues et de livrer l’ensemble du mobilier. La perte101 des biens engage la responsabilité
de l’entreprise de déménagement102.
En revanche, on peut s’interroger sur la portée de cette obligation de livraison complète,
particulièrement dans l’hypothèse de l'impossibilité de livrer un meuble en raison de ses
dimensions et de la configuration du lieu de livraison. La Cour d'appel de Paris par arrêt du 29
juin 2000 a estimé, que le déménageur avait manqué à son obligation contractuelle de
livraison dès lors qu'il est de pratique courante pour un tel professionnel, avant de procéder à
un déménagement dans la même région, de visiter les lieux du déménagement et ceux de
l'emménagement. Cependant, cette solution ne peut être retenue dans le cadre des
déménagements « longue distance ». Il semble donc que dans ce cas la distance à parcourir
permet d’apprécier l’étendue de l’obligation de livraison complète pesant sur le déménageur.
De plus, le déménageur a une obligation de livraison en bon état. Celle-ci est double. D'une
part, il est tenu de livrer le mobilier en bon état, faute de quoi, il engage sa responsabilité
contractuelle. Le déménageur engage sa responsabilité, par exemple, en raison d'un mauvais
arrimage et d'un mauvais calage103. D'autre part, le déménageur doit laisser en bon état les
lieux où s'effectuent les opérations de déménagement. Ainsi est-il responsable des dommages
occasionnés à l'immeuble au cours du chargement.
Enfin, L'obligation de livraison du déménageur, telle qu'elle vient d'être définie, est une
obligation de résultat, c'est-à-dire que le seul fait de ne pas effectuer la livraison dans les
délais promis, de façon complète et en bon état, fait présumer la responsabilité du
déménageur. Le déménageur qualifié de transporteur y est tenu par la loi qui rend le
transporteur garant de la perte et des avaries des objets transportés ainsi que du retard de
livraison104. Présomption légale de responsabilité du transporteur qui ne joue pas si le
101 Perte qui peut résulter de l’oublie d’une partie du mobilier à l’ancienne adresse ; CA Paris, 8e ch., sect. A, 29 janv. 2002 102 Article 13 des conditions générales de déménagement de particulier. 103 Cass. com., 26 mai 1998 : RJDA 1998, n° 1110 ; BTL 1998, p. 616. 104 C. com., art. L. 133‐1 et L. 133‐2.
74
déménageur est considéré comme un entrepreneur ordinaire, même si jurisprudence et
doctrine n’en retiennent pas moins l’existence d’une obligation de résultat, du fait de
l’absence d’aléa particulier pour une entreprise spécialisée dans cette activité.
B. Les causes d’exonération de responsabilité
Le déménageur, débiteur d'une obligation de résultat, ne peut s'exonérer de la présomption de
responsabilité pesant sur lui, du fait de l'inexécution de cette obligation, que s'il justifie que
“l'inexécution provient d'une cause étrangère” ; c'est-à-dire d'un cas de force majeure, du fait
d'un tiers ou du fait du créancier de l'obligation.
La cause étrangère peut donc résulter d'un cas de force majeure qui exonère le déménageur de
sa responsabilité pour retard, pertes et avaries, conformément aux articles 1784 du Code civil,
L. 133-1 et L. 133-2 du Code de commerce repris en substance dans les conditions générales
du contrat de déménagement. Mais, le plus souvent, la preuve de cette cause d'exonération
n'est pas rapportée.
De même, il y a peu d'exemple d'exonération de la responsabilité du déménageur en raison du
fait d'un tiers. Les conditions générales du contrat de déménagement envisagent cependant
l'hypothèse où l'entreprise décline sa responsabilité pour pertes et avaries en ce qui concerne
les opérations qui ne seraient pas exécutées par ses préposés ou ses intermédiaires substitués.
Le plus souvent, c'est le fait du client, créancier de l'obligation de livraison, qui est invoqué
par le déménageur pour s'exonérer de sa responsabilité ou, du moins, pour obtenir qu'elle soit
partagée avec son client. Ce fait peut ne pas être fautif. Ainsi, selon les conditions générales
du contrat de déménagement, le déménageur n'est pas responsable des avaries résultant du
vice propre de la chose que lui a confiée le client, ce qui correspond à la règle de l'article L.
133-1, al. 2, du Code de commerce. Toutefois, l'absence de réserves formulées par l'entreprise
de déménagement lors de la prise en charge du mobilier fait présumer le bon état de celui-ci.
Enfin, les conditions générales du contrat de déménagement se réfèrent aussi à la faute du
client pour écarter la responsabilité du déménageur. Cette cause d’exonération permet, par
exemple, d’imputer un retard de livraison au fait du client. Il est possible aussi que la faute du
client résulte de l'inobservation de ses obligations contractuelles. Ainsi, les conditions
générales du contrat de déménagement imposent au client une obligation de renseignement
75
afin de permettre au déménageur d'exécuter correctement son travail : il doit lui fournir toutes
les informations utiles pour la réalisation matérielle du déménagement et lui signaler les
objets dont le transport est assujetti à une réglementation spéciale, les formalités
administratives éventuelles étant à la charge du client105. Elles édictent également une
obligation de présence du client ou de son représentant tant au départ qu'à l'arrivée du
déménagement, notamment pour vérifier que rien n'a été oublié.106
II) Obligations liées à la substitution de déménageur
En dehors de l'obligation essentielle de livrer les meubles qui lui ont été confiés, d'autres
obligations peuvent être mises à la charge du déménageur, comme par exemple celle d'assurer
le mobilier. Mais c'est surtout en cas de substitution dans la réalisation du déménagement que
des obligations supplémentaires apparaissent.
A cet égard, la faculté de confier la réalisation totale ou partielle du déménagement à une
tierce entreprise, sous réserve d'informer le client de l'identité de cette autre entreprise est
reconnue par les conditions générales de déménagement de particulier à l’article 10. Suivant
en cela la recommandation n° 82-02 de la Commission des Clauses Abusives concernant les
contrats proposés par les déménageurs. Le client particulier doit être averti dans un délai
minimum de 48 heures avant la date de réalisation ; il reste en droit de refuser la substitution
et de renoncer au contrat.
Le déménageur le fait alors « sous son entière responsabilité107 », il reste débiteur de la bonne
exécution de la prestation de déménagement envers son client. Ce qui emporte une double
obligation à sa charge. D'une part, il a l'obligation de répondre de son fait personnel. En effet,
en organisant le déménagement sans l'effectuer lui-même en totalité ou en partie, il agit en
principe en qualité de commissionnaire. Et en soit, rien ne s'oppose à ce que cette analyse soit
transposée au déménageur qui n'apparaîtrait pas juridiquement comme un commissionnaire,
mais comme un entrepreneur ayant recours à la sous-traitance, les deux situations étant très
proches. La loi n° 75-1334, 31 déc. 1975, en son article 1er al. 2, relative à la sous-traitance,
105 Article 1 conditions générales de déménagement de particulier. 106 Article 11 des conditions générales de déménagement de particulier. 107 Article 6 des conditions générales.
76
en matière de transport, assimile d’ailleurs le commissionnaire à l'entrepreneur principal qui
sous-traite.
D'autre part, le déménageur a l'obligation de répondre du fait de l'entreprise substituée108, qu'il
intervienne là encore en qualité de commissionnaire ou d'entrepreneur ayant sous-traité.
Lorsqu'il agit en qualité de commissionnaire de transport, il est, en vertu de la loi, "garant" de
l'arrivée des marchandises et le dans le délai convenu109, des avaries ou pertes110. À ce titre, il
est responsable envers son client des faits des personnes qu'il s'est substitué111 .
Cependant, le fait d’assumer une responsabilité contractuelle pour fait d'autrui suppose qu'
"autrui" soit lui-même responsable. Le déménageur commissionnaire est donc exonéré de sa
responsabilité si l'entreprise exécutante qu'il a choisie n'est pas elle-même tenue à
réparation112.
En revanche, s'il est déclaré responsable du fait de ses substitués, il dispose contre eux d'un
recours en garantie. Ceux-ci peuvent aussi être condamnés solidairement.
Enfin, le client a le droit d'agir directement contre le voiturier ou le commissionnaire
intermédiaire que le commissionnaire s'est substitué, sur le terrain de la responsabilité
contractuelle en se fondant sur l'article L. 132-8 du Code de commerce. Cette admission prend
toute son importance dans l’hypothèse de la survenance d’une liquidation judiciaire du
principal cocontractant113.
108 En ce sens CA Versailles, 12e ch., 31 oct. 2002 sur la responsabilité d'un sous‐commissionnaire. 109 C. com., art. L. 132‐4 110 C. com., art. L. 132‐5 111 C. com., art. L. 132‐6. 112 CA Lyon, 14 déc. 1983, qui décide que l'obligation du commissionnaire de réparer le préjudice ne saurait excéder celle de l'entreprise à laquelle il a confié le transport des objets. 113 Il est à noter que ces dispositions ne s’appliquent que dans le cas ou l’on reconnait au déménageur la qualité de transporteur. Lorsque la qualification de contrat d’entreprise est retenue le déménageur, simple commissionnaire ne peut en principe être tenu du fait de la tierce entreprise avec laquelle il a contracté pour le compte de son client. A moins de prévoir une clause de « ducroire » par laquelle il se porte garant. Ce qui est le cas dans les conditions générales par la mention « sous son entière responsabilité. Une fois de plus l’on note un parrallélisme des formes entre clauses des conditions générales et prescriptions légales applicable au transporteur proprement dit.
77
Section IV.
Système de réparation des dommages
Le contrat de déménagement tient lieu de loi entre les parties conformément à l'article 1134
du Code civil.
I) Principe d’indemnisation intégrale du préjudice
Le déménageur ne bénéficie, à l'heure actuelle, d'aucun plafond légal d'indemnisation en cas
de retard de livraison, perte ou avarie du mobilier, opposable de plein droit au client. Il est
donc soumis au droit commun de la réparation intégrale du préjudice subi par le client. Ces
règles sont définies par le Code de commerce au chapitre III relatif au transporteur. Les
conditions générales de vente du déménagement en reprennent la substance.
A. Préjudice lié au retard de livraison
Les dispositions applicables en matière de retard ne semblent pas poser de difficultés
particulières. Ces règles sont définies par les conditions générales de vente.
Le retard est matérialisé lorsque les biens ne sont pas livrés à la date de déchargement prévue
au contrat. Et, les prescriptions des conditions générales applicables aux particuliers sont
conformes aux recommandations de la Commission des Clauses Abusives n°82-02114.
L’article 12 prévoit que « l’indemnité due en cas de retard est calculée suivant le préjudice
démontré et supporté par le client ». Le client bénéficie alors d’une réparation intégrale de
son préjudice s’il réussit à démontrer115 que le retard lui a causé préjudice116.
114 La commission préconise que soit éliminer les clauses de nature à limiter la responsabilité du déménageur en cas de retard dans l’exécution. 115 Tribunal de Commerce de lille 27. 116 Mme TILCHE « Limitation d’indemnité » BTL 2002
78
Le client a donc droit au remboursement des frais occasionnés du fait de la privation de
jouissance de son mobilier117. C est l’hypothèse du client qui ne voyant pas arrivé les
déménageurs, à la nuit résolument tombée, décide d’aller passer la nuit à l’hôtel.
B. La perte ou l’avarie subie par le mobilier
Le principe de l’indemnisation en cas de perte ou d’avarie est posé dans les conditions
générales du déménagement de particulier à l’article 14 al.1.
L’indemnisation peut être effectuée par deux modes : soit par remplacement ou réparation de
l’objet sinistré, soit pas le versement d’une indemnité compensatrice. Il appartient aux parties
de choisir le mode de réparation le plus adéquat118. Cette dernière doit, en principe,
correspondre au coût de la réparation du meuble endommagé (ou à sa valeur au jour du
dommage119) mais aussi à des dommages et intérêts120. En outre, le client sinistré est libre de
disposer comme bon lui semble, de la somme qui lui a été versée. Le droit à l’indemnisation
n’est donc pas soumis à la fourniture d’une facture de remplacement121.
Reste à s’interroger sur l’étendue de l’indemnisation. Celle-ci est en principe intégrale, mais
peut faire l’objet de limitation conventionnelle.
En effet, l’article 14 des conditions générales du déménagement de particulier reprend la règle
de l’indemnisation intégrale du préjudice pour autant que le montant des dommages soit
inférieur à la limitation conventionnelle que les parties ont déterminées dans les conditions
particulières, c’est-à-dire sur la déclaration de valeur.
Ainsi, en principe, l’intégralité du préjudice doit donner lieu à réparation. Selon la
jurisprudence, cette disposition concerne tant le préjudice matériel, que d’éventuels autres
118 En cas de jugement, un seul mode de réparation est en principe admis : les dommages et intérêts. A l’instar de la réparation dû par le transporteur qui ne peut être obligé à exécuter un acte qu’il se refuse à accomplir. (Cassation Chambre Commerciale 4 juin 1924). 120 En pratique, l’indemnité généralement pris en charge par l’assurance de la société de déménagement, ne porte le plus souvent, que sur le dommage matériel en lui‐même, le préjudice immatériel étant par nature difficile à mettre en évidence. 121 En ce sens TGI d’Avignon 30 Août 1996, BTL 1996.
79
préjudices, peu importe le statut du client particulier ou entreprise. La solution retenue par les
conditions générales de déménagement est plus nuancée.
En effet, seule la convention contractée avec une entreprise prévoit la réparation tant pour les
dommages matériels, qu’immatériels consécutifs à l’opération de déménagement réalisée.
L’engagement pris avec le particulier ne comprend, pour sa part, que l’indemnisation du
préjudice matériel prouvé122. Comment apprécier ces dispositions ?
Cela est bien fondé. Si la matérialité des dommages subis par le bien transporté est aisée à
mettre en évidence, il n’en est pas de même de la preuve d’un dommage immatériel
consécutif123, c’est à dire du préjudice indirect. Par ailleurs, les professionnels du
déménagement généralement soucieux de leur image dans un milieu hautement concurrentiel,
effectue souvent des gestes commerciaux 124en faveur des clients qui n’ont pas bénéficié
d’une prestation conforme à ce qu’ils étaient en droit d’espérer.
Laissé au juge le soin de déterminer les tenants et les aboutissants est la meilleure solution de
manière à éviter les réclamations, parfois infondées, de particuliers. Autrement dit,
l’indemnisation pour préjudice indirect des particuliers doit être mise en œuvre de manière
restrictive et soumise à la libre appréciation des tribunaux.
En effet, comment évaluer le montant des réparations dû suite aux démarches que le client a
dû entreprendre pour faire réparer les biens détériorés et pour réunir les éléments de preuves
nécessaires125 ? De quelle catégorie de préjudices s’agit-il ?
Vu la complexité, cette détermination doit rester exclusivement entre les mains du juge.
Toutefois, il en est tout autrement du préjudice financier subis par une entreprise, qui en soit
est quantifiable. En outre, l’admission des limitations de responsabilité rend acceptable la
prise en charge du préjudice commercial de l’entreprise, lorsque son existence est bien établie.
122 C’est au client que revient la charge d’apporter la preuve du dommage et de son importance. 123 Cette disposition est contractuellement prévue à l’article 12 des conditions générales du contrat de déménagement des entreprises en ces termes : l’entreprise de déménagement est « tenue de réparer les conséquences immatérielles des pertes et avaries dont elle est responsable ». 125 Une décision en ce sens à été rendu par la Cour d’Appel de Paris, le 8 Janvier 1988.
80
II) Les limitations conventionnelles de l’indemnisation
L’indemnisation peut être limitée contractuellement par le jeu de clauses limitatives de
responsabilité et de clauses exonératoires de responsabilité.
A. Clauses exonératoires de responsabilité
Dès lors que l’on soumet le contrat de déménagement au régime du droit des transports, les
clauses exonératoires de responsabilité sont prohibées. En effet, l’article L 133-1 al. 3 du
Code de commerce126 interdit d’y recourir pour limiter la responsabilité pour perte et avarie
du contrat de transport. Seules les clauses limitatives de responsabilité sont admises. Cette
prohibition est interprétée très strictement par les tribunaux qui veillent à ce qu’il n’y soit pas
dérogé, notamment en insérant des clauses limitatives de responsabilité d’un montant très
faible127.
Les clauses élusives de responsabilité sont toutefois admises, lorsque le déménageur agit en
tant que commissionnaire de transport128 ou dans le cadre d’un contrat de dépôt129. Elles
peuvent toutefois être écartées lorsqu’elles sont jugées abusives ou portant atteinte à une
obligation essentielle du contrat130 mais aussi en cas de dol ou de faute commise par le
déménageur.
Mais, malgré la validité juridique des clauses exonératoires dans les conventions précitées ;
L’on remarque d’ailleurs que les clauses limitatives de responsabilité ont les faveurs des
126 Ancien article 103 alinéa 3 dite loi Rabier. 127 Cour d’Appel D’Aix en Provence 28 novembre 1990 : annulation des clauses limitatives de responsabilité dérisoire et indemnisation intégrale du préjudice à défaut de clauses limitatives opposables. 128Selon l’article L 132‐5 du Code de Commerce la clause d’exonération doit être claire, précise et accepté par le commettant. Pour en bénéficier le commissionnaire doit prouver qu’il a porté la clause à la connaissance de son affrété. 129 L’article 1933 du Code civil valide les clauses exonératoires de responsabilité concernant les détériorations non imputable au dépositaire. 130 C’est le cas de l’obligation de présenter les meubles confiés en garde meuble. Celle‐ci est de résultat et le dépositaire ne peut s’en exonérer en apportant la preuve que le vol de ces objets lui est étranger. Tribunal de Grande Instance de Paris 6 Octobre 2000, Dalloz 2000.
81
entreprises de déménagement. Celles-ci présentent plus d’attraits sur le plan commercial et
risquent moins la censure en cas de contentieux.
B. Clauses limitatives de responsabilité
Les clauses limitatives de responsabilité peuvent prendre deux formes : certaines délimitent le
contenu des obligations assumées par le débiteur et d’autres limitent le montant de
l’indemnisation en cas d’inexécution de ses obligations par le débiteur.
Les clauses limitant le contenu de l’obligation sont valides au regard de l’article 133-1 du
Code de commerce qui n’exclut que les clauses qui empêchent la réparation des pertes et
avaries. Des dispositions de ce type sont prévues à l’article 9 du contrat de déménagement de
particulier. Est ainsi exclut, la prise en charge de bijoux131.
La limitation conventionnelle de l'indemnisation ne reçoit pas application si elle s'analyse
comme une clause abusive. Il semble néanmoins qu'une telle qualification soit peu susceptible
d'être retenue en la matière surtout si le client consommateur a eu, lors de la conclusion du
contrat de déménagement, la possibilité de négocier effectivement la limitation de
responsabilité en établissant par exemple une liste valorisée de ses biens déménagés.
C'est donc surtout en cas de dol ou de faute lourde du déménageur, dont la preuve incombe au
client que la clause limitant l'indemnisation132 du dommage subi par le client, sera écartée. Le
déménageur est même tenu, conformément à l'article 1150 du Code civil, de réparer le
dommage imprévisible. Il faut rappeler que la faute lourde résulte de l'inexécution d'une
obligation essentielle ou fondamentale du contrat. Ainsi, constitue pour le déménageur une
faute lourde le fait d'avoir, en dépit de ses obligations contractuelles, laissé le destinataire face
aux cartons et meubles non déballés ni montés en prétextant des difficultés de stationnement
qui révélaient, au contraire, une faute supplémentaire d'imprévision et d'inorganisation133.
À défaut de déclaration expresse de valeur par le client, s'applique un éventuel plafond
forfaitaire d'indemnisation, lorsque celui-ci a été prévu contractuellement. Les conditions
131 En ce sens CA Paris 25 e Chambre 28 Juin 2002 ; Juris‐Data 2002‐190709. 132 Cette clause est mentionnée sur la déclaration de valeur faite avant la conclusion du contrat. 133 Cass. com., 3 avr. 2001.
82
générales du contrat de déménagement de particuliers ne prévoient plus, comme autrefois, une
estimation de l'indemnité, calculée sur la base d'une somme forfaitaire multipliée par le
nombre de m3 du mobilier déménagé134. Cette pratique de la limitation de réparation globale
au m3 ayant été condamnée par la Commission des Clauses Abusives, les conditions
générales du contrat de déménagement de particuliers préconisent désormais que soit fixé le
montant de l'indemnisation maximum pour la totalité du mobilier et pour chaque objet ou
élément de mobilier135.
Lorsqu'aucune valeur du mobilier, quelqu’en soit la forme, n’est mentionnée sur le contrat,
aucune clause limitative de responsabilité ne s'applique et le client a droit à l'indemnisation
intégrale de son préjudice136.
III) Déclaration de sinistre
Le constat des dommages subi par le client est souvent suivi par une déclaration de sinistre
auprès de l’assureur137 du déménageur. Cela peut donner lieu à la mise en œuvre de la
garantie responsabilité civile du déménageur (A) ou éventuellement à l’assurance dommage
du mobilier (B).
A. L’assurance responsabilité civile du transporteur déménageur
Lorsqu'il est responsable des dommages au cours des opérations de déménagement, le
déménageur doit normalement bénéficier de la garantie de l'assurance de responsabilité civile
qu'il a souscrite pour indemniser son client, voire un tiers victime. Encore faut-il que le
dommage ait eu pour origine un risque garanti par le contrat d’assurance. De fait, si
l’opération n’est pas garantie, aucune indemnisation ne pourra intervenir dans le cadre du
contrat d’assurance. C’est l’hypothèse des exclusions de garantie. Ainsi, l’on constate que
134 Mme Tilche, Limitations d'indemnités : BTL 2002, p. 630‐631. 135 Cond. gén., dém. particuliers, art. 14. 136 CA Rouen, 2e ch. civ., 15 déc. 1994, Sté Travadon Déménagements c/ Druon : BTL 1995, p. 848‐849. 137 Les entreprises de déménagement veillent cependant à ne pas déclarer un sinistre dont le montant réclamé est inférieure à la franchise qui reste à leur charge et que ces derniers reconnaissent leur responsabilité.
83
souvent, l’activité garde meuble est exclue du champ des activités garanties par le contrat
d’assurance du déménageur. A cela, s’ajoutent les éventuelles conditions138 et limitations de
garantie : dans l’hypothèse du vol, il est généralement exigé de l’assuré qu’il fasse état d’un
minimum de diligences139 sous peine de réduction de la garantie.
Toutefois, ces éventuelles limites de la garantie de l'assureur de responsabilité à l'égard du
déménageur n'affectent pas, en principe, le client qui doit être indemnisé par le déménageur
selon les modalités prévues au contrat de déménagement, à moins que le client n'exerce lui-
même une action directe contre l'assureur.
Faut-il encore que l’existence de la responsabilité du client soit établie. Ce qui n'est pas
toujours possible, d'où l'intérêt de souscrire une assurance de dommage du mobilier.
B. Assurance de dommage du mobilier
Le système d'indemnisation proposé au client en cas de responsabilité du déménageur peut se
révéler insuffisant.
Le client qui a conclu un contrat de déménagement comprenant une indemnisation forfaitaire
ou qui même a souscrit une déclaration de valeur et croit ainsi être couvert jusqu'à cette
hauteur, quoi qu'il arrive, par l'assurance de responsabilité civile du déménageur, commet une
erreur. Il suffit, en effet, que la responsabilité de l'entreprise de déménagement ne puisse pas
être recherchée pour que rien ne lui soit dû. Le client, a alors intérêt à prendre une assurance
complémentaire couvrant les dommages occasionnés au mobilier lors du déménagement, qui
joue indépendamment de la responsabilité du déménageur et notamment dans les cas où la
responsabilité du déménageur n’est pas engagée, par exemple en cas de force majeure.
Le client peut souscrire un contrat d’assurance de dommages de son mobilier, comme le
proposent les conditions générales du contrat de déménagement de particuliers par
l'intermédiaire du déménageur qui ajoutera le coût de l'assurance au prix du déménagement140.
138 C est le cas lorsque l’assurance souscrite ne bénéficie qu’à un seul véhicule déclaré. 139 Il s’agit de ne pas cautionner les négligences qui pourrait rendre prévisible la survenance du vol. Le véhicule doit donc être la plus part du temps fermé, muni d’un antivol, voir même gardé. 140 Article 14 condition générale déménagement de particulier.
84
Le déménageur engage alors, sa responsabilité du fait d'avoir mal exécuté le mandat confié
par le client d'assurer son mobilier.
Cependant, l'indépendance de la couverture de l'assurance par rapport à la responsabilité du
déménageur fait que le jeu de l'assurance obéit à ses propres règles. Ainsi, lorsque le
déménageur souscrit un contrat d'assurance pour le compte de son client, les clauses de ce
contrat, notamment l'exception de déchéance résultant du défaut de déclaration du sinistre
dans les cinq jours, sont opposables aussi bien au souscripteur qu'au bénéficiaire de la police
d'assurance141.
En tout état de cause, le client a toujours la possibilité d'agir en responsabilité contre le
déménageur qui ne peut le renvoyer à se pourvoir contre l'assureur du mobilier, au prétexte
qu'une assurance a été souscrite pour garantir les risques de l'opération de déménagement.
Section V.
Procédure contentieuse et contrat de
transport de déménagement
Pour obtenir réparation de son dommage, le client doit honorer trois conditions.
D’une part, l’action en responsabilité doit être engagée devant la juridiction compétente (I),
après avoir émis des réserves et d’une protestation (II), et d’autre part, il doit intenter l’action
dans les délais (III).
I) Compétence juridictionnelle
La juridiction compétente pour statuer sur la responsabilité du déménageur est déterminée
selon les règles générales de compétence des juridictions françaises. Les juridictions
judiciaires sont compétentes même si le client du déménageur est une personne publique dès
141 Cassation, 1re civil, 10 juin 1997 : BTL 1997, p. 667.
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lors que le contrat de déménagement s'analyse comme une convention de droit privé ; ce qui
est le cas lorsque la convention conclue avec une administration ne comporte aucune clause
exorbitante du droit commun et ne fait pas participer la personne privée cocontractante à
l'exécution du service public.
La détermination de la juridiction judiciaire compétente pour connaitre des litiges liés au
déménagement de particulier, soulève deux questions.
D'abord une question de compétence d'attribution : il s'agit de déterminer dans les attributions,
dans quelle catégorie de juridictions, entre le litige (A). Ensuite, une question de compétence
territoriale : parmi toutes les juridictions de la catégorie précédemment sélectionnée, il faut
rechercher celle qui sera géographiquement compétente eu égard à la localisation du litige
(B).
A. Compétence d’attribution
Pour déterminer dans les attributions, dans quelle juridiction entre le litige relatif à l'action en
responsabilité d'un déménageur, il convient de préciser la matière du litige.
Dès lors que la qualification transport est donnée au contrat de déménagement, l'article R.
321-8, 3° du Code de l'organisation judiciaire attribue spécialement au Tribunal d'instance la
connaissance “des actions entre (...) les transporteurs et les expéditeurs ou les destinataires,
relatives aux indemnités pour perte, avarie, détournement des colis et bagages (...) ou pour
retard dans la livraison” sachant par ailleurs que l'article R. 331-1 du Code de l'organisation
judiciaire donne également pouvoir à la juridiction de proximité de connaître de ces actions
dans les limites de sa compétence.
B. Compétence territoriale
Lorsque le contrat de déménagement est considéré comme un contrat de transport, on peut
recourir à la règle de compétence territoriale spéciale en matière de transport de colis et de
bagages édictée à l'article R. 321-28 du Code de l'organisation judiciaire. Selon ce texte,
“dans le cas prévu à l'article R. 321-8, 3°, la demande peut être portée au choix du
demandeur devant le tribunal du domicile de l'expéditeur ou devant celui du domicile du
86
destinataire”. Ainsi, le client peut agir en responsabilité contre le déménageur devant la
juridiction de son propre domicile.
Il est à noter qu’à ce sujet, l'article 16 des conditions générales du contrat de déménagement
d'entreprises stipule que “les contestations auxquelles peut donner lieu le présent contrat, sont
de la compétence exclusive des tribunaux du siège de l'entreprise, même dans le cas d'appel
en garantie ou de pluralité de défendeurs” fait plutôt application des règles de l’article 42
NCPC. En effet, en application de cet article, le tribunal territorialement compétent est celui
du lieu où demeure le défendeur, c'est-à-dire en l'occurrence le lieu du siège de l'entreprise de
déménagement.
Enfin, conformément à l'article 48 du Nouveau Code de procédure civile, toute clause
attributive de compétence dérogeant aux règles de compétence territoriale qui viennent d'être
énoncées ne peut pas être opposée par un déménageur à un client qui n'a pas la qualité de
commerçant.
II) Emission de réserves et d’une protestation
Pour préserver ses droits et actions, deux diligences peuvent être mises à la charge du client :
émettre des réserves au moment de la livraison (A) et notifier une protestation après la
livraison (B).
A. La sauvegarde des droits et moyens de preuve par l’émission de réserves
Les conditions générales du contrat de déménagement de particuliers, à l’article 11, font
obligation au client ou à son représentant, d'être présent à la livraison du mobilier. Le client
doit, en effet, vérifier l'état de son mobilier et en donner décharge lorsque la livraison est
terminée. En cas de perte ou d'avarie, les conditions générales du contrat de déménagement
invitent le client, dans son intérêt, à émettre dès la livraison et la mise en place des meubles,
en présence des représentants de l'entreprise de déménagement, des réserves, en principe,
écrites, précises et détaillées142 sur la lettre de voiture ,de déménagement.
142 En ce sens, TI Saint Brieuc, 28 mai 2001, De Reganhac c/ Transports Déménagements Le Bourdonnec : inédit : n'est pas retenue la formulation vague et incomplète "sous toutes réserves".
87
Toutefois, lorsque les conditions du déménagement sont jugées insolites par le juge, la
recevabilité de réserves incomplètes à été admise143 .
Selon les conditions générales du contrat de déménagement, les réserves servent au client à
“sauvegarder ses droits et moyens de preuve”. En découle une double utilité de ses mentions.
D’une part, l’émission de réserves aurait pour objet de sauvegarder les droits du client. Qu’en
est-il alors de l’hypothèse quand aucune réserve n’est émise ? Faudrait t’il y voir une cause
de forclusion ?
Ce type de clause se retrouve dans l’activité garde meuble. Ainsi, il a été jugé que le
déménageur qui accomplit une prestation de garde meubles ne pourra pas voir sa
responsabilité engagée si, à la fin du contrat de dépôt les meubles ont été remis au client sans
observations ni réserves de sa part à la livraison144. Cependant une extension, de cette clause,
au contrat de déménagement de particulier n’est pas souhaitable en ce qu’elle abrège le délai
de forclusion.
En effet, dès lors que l’on considère que le contrat de déménagement est un contrat de
transport, cette stipulation entre en conflit avec la règle d’ordre public de l'article L. 133-3 du
Code de commerce qui donne plus de trois jours suivant la livraison pour notifier une
protestation motivée.
Au demeurant, vu le caractère très restrictif de la disposition, la jurisprudence n’y est pas
favorable et les déclare abusifs, conformément à la recommandation n° 82-02 de la
Commission des Clauses Abusives concernant les contrats proposés par les déménageurs, qui
préconise l'élimination des clauses qui ont pour objet ou pour effet d'obliger le client, en cas
de perte ou d'avarie, à émettre des réserves dès la livraison. Celles-ci ne sont donc pas
envisageables.
D'autre part, les réserves apparaissent avant tout comme un moyen de preuve. En effet, il
appartient au client d'apporter la preuve de l'existence et de l'étendue du dommage dont il se
plaint. L'absence de réserves ou des réserves imprécises de sa part au moment de la livraison
entraîne présomption d'une livraison conforme. Il aura alors la charge de prouver par la suite
143 CA Paris, 26 mai 1993 : BTL 1993, p. 757, qui admet que les réserves "peuvent être légitimement incomplètes compte tenu des circonstances" et que des précisions peuvent être données par la suite si elles ne sont pas tardives. 144 Aix‐en‐Provence, 2e ch. civ., 9 mars 1990 : BTL 1990, p. 683.
88
que le dommage qu'il invoque s'est réalisé au cours du déménagement. Et, il en va de même
en cas de livraison faite "sous réserve de déballage".
Enfin, en l’absence de réserves, il appartiendra au juge d’apprécier la valeur des éléments de
preuve apportés par le demandeur. Une expertise judiciaire peut être ordonnée à cet effet.
B. Dénonciation après la livraison : vers un assouplissement procédural
Un courrier de protestation envoyé en recommandé145 par le client au déménageur dans un
court délai après la livraison peut éventuellement servir de moyen de preuve des dommages
allégués par le client. Mais cela ne dispense pas le client d’apporter la preuve des dommages
qui y sont mentionnés et qui ne figurait pas sur les réserves.
C'est surtout comme condition de recevabilité de l'action en responsabilité intentée par le
client contre le déménageur que se pose la question de l'utilité de cette protestation. En effet,
selon l'article L. 133-3, al. 1er, du Code de commerce, toute action contre un transporteur est
éteinte si dans les trois jours qui suivent celui de la réception des objets transportés, le
destinataire n'a pas notifié au transporteur sa protestation, toute stipulation contraire étant
nulle.
La dernière modification de l’article L133-3 alinéa 3, en date de juillet 2009 nous énonce que
ce délai de trois jours146ne trouve pas à s’appliquer en matière de déménagement. Le client
dispose donc de plus de trois jours pour faire état de ses protestations. Un délai maximal doit,
toutefois, être fixé pour ne pas nuire à l’équilibre du contrat.
La reprise du délai de 7 jours retenu, pour le démarchage à domicile et la vente peut être une
solution intéressante. Cette proposition partagée les organisations professionnelles consiste au
« report de trois à sept jours du délai de forclusion en l’absence de réserves à la
livraison147 ». Cette mesure aurait le mérite d’introduire une forme de souplesse comparé au
145 La protestation doit être envoyée au déménageur par acte extrajudiciaire (constat d'huissier) ou lettre recommandée. 146 Jours fériés/ chômés non compris. 147 http://www.cnt.fr/UserFiles/File/Commissions_Permanentes/SP/SP020619_Transport_de_demenagement‐RAPPORT_final.doc
89
délai rigoureux traditionnellement fixée en droit des transports. Ce délai bien connu du grand
public serait raisonnable compte tenu des critiques régulièrement faites au délai contractuel
actuel.
La modération est en effet de mise lorsqu’il s’agit de contracter avec un particulier. Ceci étant
cette mesure se retrouverait en dualité avec les règles du droit des assurances obligeant
l’assuré à déclaré le sinistre dans les cinq jours suivant sa survenance.
Par ailleurs pour inciter le déménagé à faire part au plus vite de ses éventuelles protestations
un système dégressif de limitation de responsabilité pourrait être envisagé, en l’absence de
déclaration de valeur et d’assurance complémentaire. Car, s’il faut « laisser au déménagé le
temps de poser ses valises », il serait aussi nécessaire de l’inciter à les ouvrir, vu la lourde
présomption de responsabilité pesant sur le transporteur- déménageur.
Ainsi plus tôt les dommages seraient constatés plus importants seraient le montant de
l’indemnisation. Le dommage signifié au quatrième jour suivant la livraison, bénéficierait par
exemple d’une prise en charge à 100% dans la limite conventionnelle convenue entre les
parties, tandis que celle-ci passerait à 80% au cinquième jour, 50% au sixième et septième,
pour ne pas être jugé abusive.
L’autre alternative pourrait consister en une distinction des dommages, entre dommages
apparents et dommages non apparent, inspiré de la CMR. Seul les dommages non apparent,
ceux qui ne pouvaient être décelé dans les cinq jours, bénéficierait alors du délai de sept jours
pour l’émission des protestations.
De plus l’approche des organisations professionnelles148 compétentes en matière de
déménagement s’inspire aussi de la jurisprudence149. En effet, la confirmation écrites des
réserves n’est pas toujours exigée, tout particulièrement lorsque l’existence des dommages
n’est pas contesté par le transporteur. Cette pratique pourrait devenir la règle en
déménagement de particulier de manière à alléger les procédures souvent jugé longue et
compliqué. Ces organisations se proposent donc à « abandon de l’obligation de confirmation
des réserves prises à la livraison lorsqu’elles ne sont pas contestées ». Se pose toutefois la
148 FNTR, TLF, UNOSTRA mais aussi la chambre syndicale du déménagement. 149 La jurisprudence admet que l'acceptation expresse ou tacite par le déménageur des réserves formulées par le client au moment de la livraison écarte la fin de non‐recevoir tirée du défaut de protestation motivée dans les trois jours de la livraison (CA Poitiers, 11 févr. 1976 : BTL 1976, p. 128).
90
question de l’opposabilité d’une telle reconnaissance de responsabilité à l’assureur. En effet,
en l’état du droit positif, l’assureur n’est aucunement lié par cette reconnaissance, qui
s’explique parfois par des intérêts commerciaux.
III) Une extension souhaitable du délai d’action en matière de
déménagement de particulier
Le client doit respecter le délai d’un an pour introduire son action sous peine d’irrecevabilité
(A). En dépit du fait que le juge ne conteste pas la validité de ce délai, une extension du délai
spécifique à ce type de contrat de transport pourrait être envisagée pour favoriser la résolution
amiable de ces litiges (B).
A. Le délai de prescription annale
En principe, dès lors que le contrat de déménagement est considéré comme un contrat de
transport, le client peut se voir opposer la prescription annale de l'article L. 133-6 du Code de
commerce. Cette règle ne s’étend pas aux autres activités du déménageur. Ainsi, l’activité
garde meuble ne peut se voir appliquer ce délai de prescription. Le délai de l'action en justice
du client est alors soumis à la prescription quinquennale de l’article L110-4 du Code de
commerce qui dispose que « les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre
commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans si elles
ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes », puisque le déménageur qui
exerce une activité commerciale par nature a la qualité de commerçant.
Quant à son champ d’application, celle-ci s’applique à toutes les modalités d'exécution du
contrat et concerne les actions en indemnisation non seulement pour pertes ou avaries, mais
aussi pour retard. En revanche, la prescription annale ne s'applique pas à l'action permettant
d'ordonner une mesure d'instruction préventive sur le fondement de l'article 145 du Code de
procédure civile, afin de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont
pourrait dépendre la solution du litige. En effet, selon la Cour de cassation, une telle action
91
purement probatoire n'est pas une action née du contrat de transport au sens de l'article L.
133-6 du Code de commerce150.
Enfin la Cour de cassation à reconnu la validité de ce délai dans son arrêt du 14 février 2008
en énonçant que « le délai d'un an pour introduire une action en justice au titre des pertes et
avaries, dont la constatation est possible dès la livraison du mobilier, est suffisant ; qu'ayant
ainsi fait ressortir que le délai de prescription abrégé n'empêchait pas ni ne rendait
particulièrement plus difficile l'exercice par le consommateur de son droit à agir en justice ».
Cependant, la prise en considération des revendications des consommateurs nécessiterait
éventuellement une extension de ce délai.
B. L’alignement du délai d’action sur le délai biennal du code des assurances ?
Pour tenir compte des spécificités liées au consommateur, les organisations professionnelles
semblent favorables à un report du délai de prescription de un à deux années. Cette pratique
relativement répandue dans la profession reprend le délai biennal mentionné sur la police
d’assurance.
L’adoption d’un délai biennal de prescription serait une sorte de geste symbolique montrant
l’intérêt des entreprises de déménagement à protéger les consommateurs. Ceci étant, en
matière de patrimoine mobilier de particulier tout comme en matière de marchandise, la
résolution rapide du litige est une donnée essentielle qu’il ne faudrait pas perdre de vue. Mais
au demeurant, cette disposition constituerait un juste milieu entre prescription annale et
quinquennale.
150 Cass. com., 13 mai 2003, Bull. civ. 2003, IV, n° 81 ; JCP G 2003, II, 10193, note G. Chabot ; Procédures 2003, comm. 173, note H. Croze.
92
Des précautions inhérentes au statut de consommateur doivent être prises dans la
détermination des droits et obligations de chacune des parties, mais sans pour autant conduire
à dénaturer le contrat de transport de déménagement.
Pour l’essentiel, les efforts accomplis par les professionnels pour se doter d’un outil
contractuel équilibré et commun à toute la profession semble avoir payé. Le contrat type
établi par la Chambre Syndicale peut donc servir de base pour l’élaboration d’un contrat type
transport de déménagement approuvé par voie décrétale. Cependant, quelques points
mériteraient d’être éclaircis notamment concernant la sous-traitance, sauf à soumettre ces
relations aux contrats type sous-traitance.
93
94
Annexes
Annexe 1 : Conditions générales
déménagement de particuliers.
Annexe 2 : Condition générale du
déménagement d’entreprise.
Annexe 3 : Condition générale de vente de
garde meuble.
Annexe 4 : Déclaration de valeur type.
95
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Annexe 1
97
Annexe 2
98
Annexe 3
99
Annexe 4
100
101
102
Bibliographie
Codes
• Code de Commerce • Code Civil • Code de la Consommation • Code de Procédure Civile
Ouvrages
• TERRE, LEQUETTE, SIMLER, Droit Civil, Les obligations, Collection Précis Dalloz.
• .J. FLOUR, J.L. AUBERT et E. SAVAUX, LES OBLIGATIONS, 1, L’ACTE JURIDIQUE chez ARMAND COLIN. 10ème ed.
• P MALIVERNI, Les conditions générales de vente et les contrats types des chambres syndicales, préface J. HEMARD. LGDJ 1978.
• Contrats civils et commerciaux de F. COLLART DUTILLEUIL et P. DELEBECQUE, collection Précis Dalloz, 6ème éd. 2002.
• J. Huet Les principaux contrats spéciaux : LGDJ, 2e éd. 2001
• R. Rodière Droit des transports : Sirey, 2e éd. 1977
Articles
• A Wahl, Nature juridique du contrat de déménagement RTD civ. 1911.
• P. PUIG, aux éditions Panthéon-Assas 2002, n°132.
• Mme TILCHE « Limitation d’indemnité » BTL 2002
• TILCHE « le hic règlementaire », BTL 2001, p. 671
• LEAUTE, Les contrats-types RTD civ. 1953, p 429.
• R.RODIERE, « La nature juridique du contrat de déménagement : JCP 1951, I, 917, n°5.
103
• M. BOITARD, L’évolution du contrat de transport : JCP G 1952, I, 993.
• PEYREFITTE, Le contrat de déménagement :JCP E 1986, II, 14655.
• Le contrat de déménagement : Un parcours sinueux entre transport et entreprise MIMOUNI-PERES Rifka ; Transports 2006, vol. , no435, pp.
• I. BON GARCIN, les déménageurs et les commissionnaires disparaissent de la LOTI ; Revue du droit des transports n°7, JUILLET 2009.
• Eternel transport ; Lamy transport, TOME 1, n°889 • P. DELEBECQUE ; Les épaules du déménageur seraient elles devenues trop étroites ?
les règles du contrat de déménagement ne sont plus applicables au contrat de déménagement.
• M TILCHE, face au juge, Bulletin des Transports et de la Logistique - 2008 ; N°3205
Sites institutionnels
• Chambre Syndicale du déménagement http://www.csdemenagement.fr/ • Association française du Déménagement d’Entreprise
http://www.demenagementdentreprises.fr
• Comité national routier http://www.cnr.fr • Conseil national des transports http://www.cnt.fr • AFNOR http://www.afnor.org/
Rapports
• rapport du Sénat n°251, 2002-2003, Projet de Loi renforçant la lutte contre la violence routière, p 88.
• Groupe de réflexion « transport de déménagement » ; Rapport de synthèse Mai 2002.
Bases de données
• XERFI 700
• Lexisnexis http://www.lexisnexis.fr/
• WK TRANSPORT http://www.wk‐transport‐logistique.fr/
• Legifrance http://www.legifrance.gouv.fr/
Revues:
104
• Transports • Bulletin du déménagement • Bulletin des transports • Revue de droit des transports • Bulletins de Transports et de la logistique.
Encyclopédies
• Lamy transports Tome I. • Juris Classeur Transport.
105
106
Table des matières Introduction...........................................................................................................p.6
Partie 1 : L’essence résolument « Transport du contrat
de déménagement. p.9
Chapitre préliminaire : Les sources du droit du contrat de déménagement ..p.12
Section I. Prescription légales et réglementaires applicables au contrat de
transport déménagement ....................................................................................p.14
I)Etat des lieux de régulation publique relative au contrat de déménagement......p.14
II)Objectif de la réglementation de droit public....................................................p.15
Section II. Standardisation et contrat de déménagement................................p.18
I)Normalisation des activités de déménagement...................................................p.18
II)« Le taylorisme contractuel » de la Chambre Syndicale de Déménagement ....p.20
Section III. Jurisprudence et contrat de déménagement.................................p.22
Chapitre I. Discussion sur la qualification juridique du contrat de
Déménagement ..............................................................................................................p.24
Section I. Contrat de déménagement : les heures de gloire de la doctrine
Classique ..............................................................................................................p.26
I)Théorie de la règle de l’accessoire et contrat de déménagement........................p.26
II)Contrat de déménagement et contrat de commission de transport....................p.27
107
III)Contrat de déménagement et contrat d’entreprise ...........................................p.29
IV)Critique du critère du Doyen Rodière..............................................................p.30
Section II. La désaffection du juge de droit en faveur de la qualification exclusive
de contrat d’entreprise........................................................................................p.31
I)Critère de la spécificité du travail.......................................................................p.31
II)Contrat de déménagement et régime du contrat d’entreprise............................p.32
III)Contrat de vente de chose à fabriquer et contrat de déménagement................p.33
IV)Réaction des juges du fond ..............................................................................p.34
Section III. Volonté des parties et qualification du contrat de
déménagement .....................................................................................................p.36
I)Portée de la volonté des parties ..........................................................................p.36
II)Approche doctrinale de l’étendue de la volonté des parties..............................p.37
III)Volonté des parties et contenu du contrat de déménagement ..........................p.39
Section IV. La reconnaissance de l’essence du contrat de déménagement : le
Transport .............................................................................................................p.41
I)Une porte laissée entre ouverte par le juge de cassation ....................................p.41
II)Le critère de la finalité de l’opération ...............................................................p.42
Chapitre II. Déménagement et garde meuble : une dualité de contrat ............p.45
Section I. Qualification envisageable .................................................................p.45
I)Une qualification alternative difficile à mettre en œuvre ...................................p.45
II)Une qualification exclusive...............................................................................p.46
Section II. Qualification souhaitable………………………………………….p.47
108
Partie 2 : Convergence des intérêts par un contrat type
équilibré…………...p.51
Chapitre I. L’utilité d’un contrat type transport pour le déménagement de
particulier .......................................................................................................................p.53
Section I. Le champ d’application d’un contrat type déménagement............p.54
I)Une mise en œuvre des prescriptions de la LOTI ..............................................p.54
II)Un contrat type transport de déménagement de particulier...............................p.55
Section II. Une tentative avortée de contrat type transport de déménagement de
particulier.............................................................................................................p.57
I)Une conséquence directe de la qualification jurisprudentielle de contrat
d’entreprise............................................................................................................p.57
II)Intégration du contrat de déménagement au code de la consommation ? .........p.58
Chapitre II. Aménagement du contrat de transport de déménagement de
particulier .......................................................................................................................p.62
Section I. Phase préparatoire du contrat de déménagement : un échange
d’informations .....................................................................................................p.63
I)L’établissement du devis de déménagement ......................................................p.63
II)La communication des conditions générales.....................................................p.65
III)La déclaration de valeur...................................................................................p.65
Section II. Conclusion du contrat de déménagement.......................................p.67
I)Un accord de volonté sur l’existence et le contenu du contrat ...........................p.67
II)Contrat de déménagement et rétractation..........................................................p.70
109
Section III. Les obligations de l’entreprise de déménagement........................p.72
I)Obligations de résultat du déménageur quant à la livraison...............................p.72
A. Principe de la livraison conforme du mobilier .................................................p.72 B. Les causes d’exonération de responsabilité......................................................p.74
II)Obligations liées à la substitution de déménageur…………………………….p.75
Section IV. Système de réparation des dommages ...........................................p.77
I)Principe d’indemnisation intégrale du préjudice ................................................p.77
A. Préjudice lié au retard de livraison ...................................................................p.77 B. La perte ou l’avarie subie par le mobilier.........................................................p.78
II)Les limitations conventionnelles de l’indemnisation ........................................p.80
A. Clauses exonératoires de responsabilité ...........................................................p.80 B. Clauses limitatives de responsabilité ................................................................p.81
III)Déclaration de sinistre......................................................................................p.83
A. L’assurance responsabilité civile du transporteur déménageur........................p.83 B. Assurance de dommage du mobilier ................................................................p.84
Section V. Procédure contentieuse et contrat de transport de déménagement..p.85
I)Compétence juridictionnelle...............................................................................p.85
A. Compétence d’attribution .................................................................................p.86 B. Compétence territoriale ....................................................................................p.86
II)Emission de réserves et d’une protestation .......................................................p.87
A. La sauvegarde des droits et moyens de preuve par l’émission de réserves......p.87 B. Dénonciation après la livraison : vers un assouplissement procédural ............p.88
III)Une extension souhaitable du délai d’action en matière de déménagement de
particulier ..............................................................................................................p.90
A. Le délai de prescription annale.........................................................................p.91 B. L’alignement du délai d’action sur le délai biennal du code des assurances ...p.92
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Annexes ………………………………………………………………………….p.94 Bibliographie……………………………………………………………………..p.101