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Peut-on critiquer la démocratie ? Les critiques adressées à la démocratie ne signifient nullement qu'elle doit être rejetée, mais plutôt qu'il convient de pallier dans la limite du possible ses défauts. La démocratie est loin d'être un système parfait...
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LA SOCIÉTÉ – L’ÉTATFormateur : Yves LIOGIER
Collection Philosophique
Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation réservés pour tous pays à
l’auteur. Dépôt légal : Janvier 2014
LA SOCIÉTÉ – L’ÉTATPeut-on critiquer la démocratie ?
Pour traiter ce sujet, il conviendra d’abord de définir ce qu’est la « démocratie ». On pourra
alors se demander si c’est l’idée de démocratie et les valeurs qui la fondent qui
sont critiquables ou bien si ce sont seulement les réalisations concrètes de cette idée. On
pourrait éventuellement réfléchir aussi sur le sens du « peut-on » : est-ce une possibilité
théorique ? Une possibilité logique (par exemple défendre la démocratie tout en la
critiquant) ? Ou enfin une possibilité juridique (que permettrait la démocratie elle-même) ? Collection
Philosophique 1
Question
LA SOCIÉTÉ – L’ÉTAT
- La démocratie se définit comme l’ « Etat politique dans lequel la souveraineté
appartient à la totalité des citoyens, sans distinction de naissance, de fortune
-ou de capacité »-(Lalande)
- Elle postule donc l’égalité en droit de tous les citoyens, et se fonde sur la volonté
générale.
Collection Philosophique 2
QuestionL’idéal
démocratique
LA SOCIÉTÉ – L’ÉTAT
« Les idéologies démocratiques : souveraineté du peuple, volonté générale, solidarisme, etc., sont, par essence et par
définition, unitaires et autoritaires. Elles reposent sur une fiction commode pour les
gouvernants tout en flattant la paresse d’esprit des gouvernés »
(G. Palante, Les Antinomies entre l’individu et la société, 1913, p. 194).
On peut en effet sur cette base porter contre l’idéologie démocratique plusieurs
critiques.Collection Philosophique 3
QuestionL’idéal
démocratiqueCritique de l’idéologie
démocratique
LA SOCIÉTÉ – L’ÉTATa) Une pseudo-volonté générale
La prétendue « volonté générale » sur laquelle se fonde la démocratie « n’est pas autre chose
qu’une entité verbale »
(Palante, id.).
Elle n’est au mieux que la volonté d’une majorité de citoyens, au pire celle de l’oligarchie
dirigeante. La prétendue volonté générale ne peut en effet ni gouverner ni légiférer
directement : il y a donc délégation d’une partie de la souveraineté populaire à des
représentants (députés, président, etc.), qui exercent la réalité du pouvoir entre chaque
consultation du peuple.Collection
Philosophique 4
QuestionL’idéal
démocratiqueCritique de l’idéologie
démocratique
LA SOCIÉTÉ – L’ÉTAT
b) Une majorité opprimant une minorité
Dans ces conditions la prétendue volonté générale se réduit au fait qu’une partie
des citoyens impose sa loi à tous les autres.
Collection Philosophique 5
QuestionL’idéal
démocratiqueCritique de l’idéologie
démocratique
LA SOCIÉTÉ – L’ÉTATc) La tyrannie de l’ignorance et des préjugés
L’avis de la majorité ou même de la totalité des citoyens ne prouve pas la valeur ou la justesse de quoi que ce soit. Or, si la volonté était réellement
générale, c’est-à-dire si, chose tout à fait impossible, elle était celle d’absolument tous les
citoyens, il n’y aurait aucun inconvénient à ce que ses décrets fussent même aberrants, puisqu’ils
seraient acceptés par tous. Mais comme la volonté générale n’est pas et ne peut pas être réellement et absolument générale, le régime
démocratique risque d’être celui de la foule ignorante imposant la tyrannie de son ignorance
et de ses préjugés, que peuvent exploiter tous les démagogues. Tel est l’argument fondamental de
Platon pour rejeter le régime démocratique.Collection Philosophique 6
QuestionL’idéal
démocratiqueCritique de l’idéologie
démocratique
LA SOCIÉTÉ – L’ÉTAT
d) La haine de toute personnalité indépendante
Par ailleurs, observe Palante, « l’homme qui a une volonté à lui ne se reconnaît jamais dans la prétendue volonté générale. Et
peu lui importe au fond que le groupe qui l’opprime soit une foule ou une oligarchie. Foule et oligarchie en effet se ressemblent
en un point : leur commune haine de toute personnalité indépendante »
(id., pp. 194-195).Collection Philosophique 7
QuestionL’idéal
démocratiqueCritique de l’idéologie
démocratique
LA SOCIÉTÉ – L’ÉTAT
e) La réduction de la liberté individuelle à la liberté politique
De plus, « l’idéologie démocratique tend à résorber toutes les libertés dans la
liberté dite politique. Mais la liberté politique n’est pas du tout la même
chose que la liberté individuelle »
(Palante, id.).
Collection Philosophique 8
QuestionL’idéal
démocratiqueCritique de l’idéologie
démocratique
LA SOCIÉTÉ – L’ÉTAT
f) Un risque de désordre et d’inefficacité
Enfin, dans une autre perspective que la défense de l’individu, la démocratie a été
critiquée, essentiellement par les théoriciens politiques partisans d’un Etat
fort, voire totalitaire, comme étant, en raison de l’opposition permanente des
partis, potentiellement inefficace et source de désordre, de « guerre
intestine »
(cf. Platon, République, 549 c-d).Collection Philosophique 9
QuestionL’idéal
démocratiqueCritique de l’idéologie
démocratique
LA SOCIÉTÉ – L’ÉTATLes critiques adressées à la démocratie ne
signifient nullement qu’elle doit être rejetée, mais plutôt qu’il convient de pallier dans la limite du possible ses défauts. Ainsi
la démocratie doit :
- Se fonder moins sur le mythe de la volonté générale que sur le respect absolu de
l’individu. C’est pourquoi il faut faire reposer la démocratie non sur cette seule
volonté générale, comme le voulait J.J. Rousseau, mais sur l’affirmation des droits
de l’homme, droits qui ne soient pas seulement des droits théoriques d’une
abstraite personne humaine mais aussi des droits réels de l’individu concret.
Collection Philosophique 10
QuestionL’idéal
démocratiqueCritique de l’idéologie
démocratiqueUne critique, non
une condamnation
LA SOCIÉTÉ – L’ÉTATLes critiques adressées à la démocratie ne
signifient nullement qu’elle doit être rejetée, mais plutôt qu’il convient de pallier dans la limite du possible ses
défauts. Ainsi la démocratie doit :
- Aussi est-il souhaitable que les démocraties posent en préambule de
leur constitution une Déclaration universelle des droits de l’homme, à l’encontre de laquelle ne puisse aller
aucune autorité, pas même la volonté générale.Collection
Philosophique 11
QuestionL’idéal
démocratiqueCritique de l’idéologie
démocratiqueUne critique, non
une condamnation
LA SOCIÉTÉ – L’ÉTATLes critiques adressées à la démocratie ne
signifient nullement qu’elle doit être rejetée, mais plutôt qu’il convient de pallier dans la limite du possible ses
défauts. Ainsi la démocratie doit :
- Veiller à n’être pas une démocratie uniquement formelle, où seule la classe
possédante est en réalité la classe dirigeante (c’est en ce sens que Marx
estimait que la « démocratie bourgeoise » n’est en fait que le
gouvernement de la classe bourgeoise).Collection Philosophique 12
QuestionL’idéal
démocratiqueCritique de l’idéologie
démocratiqueUne critique, non
une condamnation
LA SOCIÉTÉ – L’ÉTATLes critiques adressées à la démocratie ne
signifient nullement qu’elle doit être rejetée, mais plutôt qu’il convient de pallier dans la limite du possible ses
défauts. Ainsi la démocratie doit :
- Veiller non seulement à maintenir la séparation des pouvoirs exécutif,
législatif, judiciaire, mais aussi, dans la mesure du possible, à développer des
contre-pouvoirs face à la puissance étatique, et le contrôle de la classe
politique par la société civile.Collection Philosophique 13
QuestionL’idéal
démocratiqueCritique de l’idéologie
démocratiqueUne critique, non
une condamnation
LA SOCIÉTÉ – L’ÉTAT
La démocratie, comme la plupart des autres systèmes politiques, ne réduit par
l’antinomie entre l’individu et l’Etat et est ainsi loin d’être un système parfait. Cependant, appuyée sur le respect des
droits de l’homme (et non sur une dangereuse mystique de la volonté générale), la démocratie reste sans
doute, en dehors des systèmes utopiques dont la quête n’a jusqu’ici
débouché que sur des totalitarismes, le meilleur système politique existant pour
les sociétés modernes.Collection
Philosophique 14
QuestionL’idéal
démocratiqueCritique de l’idéologie
démocratiqueUne critique, non
une condamnationConclusion
LA SOCIÉTÉ – L’ÉTAT
Il est en effet celui qui garantit aux individus le plus grand espace de
liberté, et constitue, pour reprendre les termes de Karl Popper, une société
ouverte, qui « seule nous fournit un cadre institutionnel permettant
d’effectuer des réformes sans violence, c’est-à-dire d’employer la raison dans le
domaine politique »
(La société ouverte et ses ennemis,
1962, I, p. 11).Collection
Philosophique 15
QuestionL’idéal
démocratiqueCritique de l’idéologie
démocratiqueUne critique, non
une condamnationConclusion
LA SOCIÉTÉ – L’ÉTAT
Formateur : Yves LIOGIER
Collection Philosophique
Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation réservés pour tous pays à
l’auteur. Dépôt légal : Janvier 2014
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