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Barack Obama et la présidentielle 2012 (2/2)

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N°247 - du 18 au 24 janvier 2011

Barack Obama et

sa nouvelle identité pour 2012 (2/2)

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Non seulement les cir-constances ont considéra-blement changé, mais surtout le Parti Républi-cain est allé chasser sur les terres d’Obama no-tamment en matière de militantisme de masse. 9 enjeux sont autant de domaines tests.

1) Le choix de la cause : en 2007, Oba-ma s’est identifié au changement. Etant désor-mais au pouvoir et même accusé de ne pas avoir assez servi le change-ment, il paraît incontour-nable qu’il cherche une autre cause. Ce choix stratégique sera décisif. Le candidat républicain va servir la cause du peuple. Il s’agira de cliver pour renvoyer Obama dans le camp de la défense des élites.

2) La campagne professionnelle en or massif : en 2008, Obama a levé 750 mil-lions de dollars quand McCain levait 350 millions de dollars. C’est un écart considérable d’ailleurs très inhabituel dans ce sens là. De tels moyens financiers ont ouvert des actions majeures dont la rémuné-ration des professionnels qui encadraient les volon-taires locaux. Il y a eu 2 700 organisa-teurs de terrain. Leur budget a représenté 25 % des dépenses globales. Là aussi, il parait proba-ble que l’écart ne sera pas aussi important en 2012 pour Obama. Le Parti Républicain est en position moins défensive. En 2008, 70 % de ce montant record pour Oba-ma est issu de dons de moins de 200 dollars émanant de particuliers

peu fortunés. Si le ressort populaire d’Obama ne devait pas être réactivé, cette nou-velle donne pourrait tarir cette source de recettes indispensables pour me-ner une campagne offen-sive.

3) La logique de proximité : toute la campagne 2008 a consis-té à faire venir Obama sur les lieux de vie. C’é-tait le parti pris de proxi-mité. Il s’est inscrit com-me une famille comme les autres à l’exemple de cet-te carte de vœux pour le 1er janvier 2007 qui avait été le premier envoi en nombre sur Internet (voir page 7). La fonction même de Pré-sident va considérable-ment compliquer cette lo-gique qui avait fait la for-ce d’Obama en 2008. La même proximité est-

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2012 : comment rede-venir proche ? Barack Obama en 2008 était un «copain de vie». A chaque visite sur le terrain, il inscrivait méthodiquement des actes de tous les jours comme la glace achetée au magasin à l’angle de la rue ou le déjeuner pris parmi tous les autres clients. Est-ce encore possible dans le climat actuel ? La fonction de Président des Etats-Unis s’ac-compagne d’un dispositif de sécurité particulièrement lourd. Comment concilier avec cette volonté de proximité ?

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elle encore possible ? Il y a matière à en douter tant les dispositifs de sé-curité sont lourds a fortio-ri dans le contexte qui succède à la tuerie de Tucson. Cette logique a été décisi-ve dans la construction de l’image de marque d’Oba-ma. Il s’agissait d’être là où les gens sont. Globale-ment, il a organisé peu de «grands meetings» en dehors des incontourna-bles. Il est beaucoup allé de petits groupes en pe-tits groupes. Cette logi-que était d’autant plus cohérente que le choix de communication sur le mé-dium TV était l’achat de clips et non pas d’organi-ser des meetings pour ob-tenir une reprise hypothé-tique de 20 secondes. Son équipe de campagne avait calculé les deux hy-pothèses et constaté que l’achat d’espaces publici-taires était plus économe mais surtout plus sécuri-sée. Par conséquent, la quasi-totalité de la campagne et tout particulièrement les premiers mois ont reposé sur des immersions sur les terrains et non pas en l’organisation de grandes réunions publiques.

4) La notion de ga-laxie dans les sup-ports de communi-cation : en 2008 le site

officiel du candidat Oba-ma canalisait seulement 25 % du trafic de la ga-laxie Obama. 75 % des audiences vi-vaient en dehors du pro-pre site d’Obama. C’est un chiffre qui montre le niveau de mobilisation d’un réseau qui pour une grande partie vivait «en complément» du candi-dat. Là encore, tout va dépen-dre du ressort populaire qu’Obama sera capable de rapidement donner à sa campagne pour sa ré-élection. Si ce ressort po-pulaire est cassé ou moindre, c’est l’ensemble de l’architecture de sa campagne qui en sera fragilisée.

5) La segmentation communautaire : en 2008, cet axe a été parmi les innovations majeures de la campagne. Il ne s’agissait pas de me-ner des actions classiques de communication de masse mais de mettre en œuvre une logique de segmentation communau-taire. Cette logique a été ren-due très efficace par la conjonction de trois vec-teurs : • le réseau des mili-

tants de proximité qui avaient vocation à conduire la pros-pection sur le voisi-nage direct,

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• l’apport des nouvel-les technologies qui a donné de la rapidité d’échanges, de la ré-activité et surtout une formidable éco-nomie des coûts. Des chiffres donnent l’ampleur du phéno-mène 2008 : 35 000 groupes de volontai-res, 200 000 évène-ments sur le terrain, 13 millions d’adres-ses mails gérées dans une logique de réseaux de soutiens. C’est près de 4 fois plus que le nombre d’adresses mails gé-rées par Kerry en 2004.

• les cibles à identifier

et à convaincre étaient faciles : le «nouvel électeur ». Sous cette catégorie se cachent non seu-lement l’électeur qui doit s’inscrire sur une liste électorale mais aussi celui qui doit aller voter.

6) La bataille des fi-chiers : en 2008 ce combat a porté un nom : Catalist. C’est une base de données qui a fourni l’architecture de base ali-mentée ensuite par les informations données par tout le réseau Obama. Cette base a permis une

modélisation qui a été très utile tout particuliè-rement dans les Etats clefs lors de la primaire démocrate puis lors du duel avec McCain. Le Parti Républicain qui a été le véritable initiateur de cette technique ne se-ra pas en retard. Il importe en effet de rap-peler que cette logique a été celle de Richard Wir-thlin lors de la présiden-tielle Reagan 1980. Les membres de l’équipe de Richard Wirthlin ont indiqué ultérieurement que les enseignements étaient donnés en moyen-ne en 47 secondes après avoir questionné l’ordina-teur. Leur méthode avait consisté à rassembler les informations disponibles sur les comportements électoraux de 480 catégo-ries d’électeurs distin-guées selon leur lieu de résidence, leur sexe, leur âge, leur catégorie socio-professionnelle, leur reli-gion, leur pouvoir d’a-chat… La «méthode Wirthlin» ne consiste pas à déterminer des intentions de votes mais des critères de com-portements électoraux. Cette différence permet d’explorer les stratégies et de déterminer les choix les plus efficaces.

L’effet Michelle Obama Diplômée de l’Université de Princeton puis d’Harvard, elle s’est spécialisée dans la propriété intellectuelle avant de travailler pour le Maire de Chicago. Tout au long de la campa-gne présidentielle puis de-puis l’installation à la Maison Blanche, Michelle Obama est un atout majeur pour son mari. Trois facteurs ont fondé la reconnaissance de cette fonction d’atout. Tout d’abord, elle incarne l’ancrage social du couple. Tout son cursus personnel est ponctué de fonctions so-ciales à l’exemple de son engagement dans l’associa-tion Chicago Office of Public Allies ou l’Associate Dean of Student Services. Ensuite, elle symbolise le soutien inconditionnel à son époux. Dans les moments difficiles de la campagne et ils furent nombreux, elle a incarné un point de stabilité, de solidité, incapable de va-ciller. Enfin et surtout, elle incarne la femme du 21 ème siècle. Elle est jolie et élégante (la revue Vanity Fair l’a classée dès juillet 2007 parmi «les 10 personnes les mieux ha-billées»). Mais elle est sur-tout moderne partageant son emploi du temps entre de multiples activités dont l’éducation de ses filles. C’est ce dernier volet qui fonde actuellement sa popu-larité.

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Michelle Obama ou le recentra-ge sur le quotidien Michelle Obama crée un message per-manent de sympathie où la sincérité est essentielle. C’est la communication dou-ce par l’image sans prétention ni déma-gogie. Le message passe par une image que l’émotion provoque. Elle n’assène pas de formule choc comme un coup de matra-que ou un ordre implacable. Elle cultive le besoin de proximité là où d’autres tombent si vite dans le besoin de lointain une fois l’élection gagnée. Grâce à cette communication, Michelle Obama s’est éloignée de la «star straté-gie». Elle marque un tournant dominé

par le recentrage sur la vie quotidienne, le tangible. C’est un coup de semonce qui va faire pâlir d’envie tous ceux qui se sont réfu-giés dans la religion de la pub spectacle. Elle est à contre-pied. En pleine crise économique, ce style fait mouche. Les valeurs de consommation courante d’a-vant crise sont arrivés à saturation. Il est fini de vendre des morceaux de soleil découpés selon les jours sur la base du toujours plus. Avec humilité, elle vend de l’utile pour défendre une façon pour chacun d’aller au soleil. C’est une conversion majeure. Avec cette méthode très personnelle, el-le a renvoyé les autres épouses de Chefs d’Etats dans un peloton différent. Elle leur a imposé un vieillissement accéléré.

Les résultats permettent d’affiner la décision, de tester des comporte-ments, de vérifier sans cesse les conséquences de telle ou telle attitude. En 1984, DMI, agence de R. Wirthlin, avait emma-gasiné un nombre consi-dérable de données résul-tats de 150 000 inter-views d’américains répar-tis en 110 catégories et sous catégories d’élec-teurs. Des collaborateurs du Parti Républicain font déjà état d’un dispositif qui les assure d’une réelle per-formance en la matière.

7) La bataille sur le terrain : contrairement

à beaucoup d’analyses ou de projections, Internet a surtout été en 2008 l’outil de l’information interne bien davantage qu’un moyen d’information et de conviction des élec-teurs. Le «on line» était utilisé pour améliorer le «off li-ne». Sur le terrain, la priorité absolue est allée au dialo-gue direct : par porte à porte ou par «réunion Tupperware». Là encore, ce choix a été le produit de l’examen d’études : • 13 rencontres en

porte à porte = un électeur gagné en moyenne,

• ce rapport de 1 élec-teur gagné pour 13 contacts directs en porte à porte passe à 1 électeur gagné pour 100 appels télé-phoniques et à plu-sieurs dizaines de milliers de tracts.

Ce sont ces chiffres qui ont conduit l’équipe Oba-ma à privilégier le porte à porte dont l’efficacité de conviction est sans com-paraison avec les autres supports. L’examen des études a montré que cette convic-tion était renforcée par la logique du voisinage et de l’identification confiante qu’elle permet.

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Par conséquent, tout le travail a consisté à trou-ver des volontaires qui correspondent aux cibles privilégiées : • hispanos, • afro-américains, • jeunes, • femmes seules.

Il importe de rappeler que sur les deux seules pre-mières catégories, il y avait un réservoir de 30 % des cibles à convaincre de s’inscrire sur les listes électorales. Une fois inscrits, l’enjeu était d’inciter et de sur-veiller l’action d’aller vo-ter mais le contenu du

vote «ne pouvait être que pro Obama» tant le rejet de Bush et de «Bush bis» (McCain) était féroce.

8) La situation des Etats indécis : en 2008, 9 Etats méritaient le qualificatif d’Etats clefs : * Caroline du Nord * Colorado, * Floride, * Indiana, * Missouri, * Névada, * Nouveau-Mexique, * Ohio, * Virginie. Dans plusieurs de ces

Etats, la situation locale était très défavorable à McCain pour deux fac-teurs : • l’absence de renouvel-lement local significatif en 2008 à l’exemple de la Floride,

• la poussée d’une nou-velle génération de candi-dats démocrates à l’exemple du Colorado, de la Virginie tout particuliè-rement.

Cette situation a beau-coup changé. Le 2 no-vembre 2010 a souvent marqué une inversion par rapport à 2006. Le vent du neuf et du dynamisme est désormais du côté des

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de leur vie sans cérémo-nial et que l’on souhaite ensuite rencontrer lors de la venue dans la géogra-phie de proximité pour les voir «en vrai». La situation sera très dif-férente en 2012. Barack Obama incarne désormais le pouvoir et il ne bénéfi-ciera pas des mêmes in-dulgences ni des mêmes soutiens. Voilà les 9 chantiers ma-jeurs pour 2012.

Républicains. C’est un nouvel équilibre local qui pourrait beau-coup compter en novem-bre 2012.

9) Les relations avec la presse insti-tutionnelle : en 2008, la presse institutionnelle avait été particulièrement favorable à Obama. Dès 2007, la mode fut aux reportages qui por-taient de plus en plus souvent pour titres «soyez Barack Obama» et qui constituaient des en-trées dans le quotidien du

candidat démocrate que l’on suivait tirant son pilot case à roulettes le lende-main matin d’une réunion publique, montrant le brouillon d’un discours … Une nouvelle communica-tion était en train de naî-tre. A certains égards, el-le rappellait le saut connu dans les années 60 avec la campagne de JF Ken-nedy. Une nouvelle génération de candidats était aussi en train de naître : les «copains du quotidien» auxquels il était possible de s’identifier. Ceux qui partagent chaque heure

Editeur : Newday www.exprimeo.fr

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France : le militantisme a-t-il quitté la vie publique ? 9

A la différence de cette photo prise dans un QG du parti dé-mocrate américain, la vie poli-tique française est-elle deve-nue une terre désertée par les militants, voire même par les électeurs ? A 60 jours des pro-chaines élections cantonales qui concernent pourtant un Canton sur deux, c’est la mor-ne plaine. Les campagnes pei-nent à démarrer. L’abstention pourrait battre des records. Comment expliquer cette si-tuation ?

Parution le : 25 janvier 2011.