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L a loi de finances (LF) pour 2017 suscite une fronde sans précédent : les professions libérales et l’UGTT – pour des raisons différentes – n’en veulent pas. Pire : la centrale syndicale considère que « l’accord de Carthage » a volé en éclats ! En vérité, rien d’étonnant à tout cela puisque celui-ci n’était qu’une vague déclaration d’intentions qui se gardait bien d’entrer dans les détails des mesures qui se préparaient. Et pour cause : il n’y aurait pas eu d’accord du tout. Le Front Populaire et Al-Qotb avaient prévenu que ce gouvernement –conformément aux directives des organismes financiers internationaux – allait mettre en place une politique d’austérité, réponse classique (et malheureusement catastrophique) à la situation calamiteuse de nos finances publiques. La loi de finances propose donc une augmentation globale et significative des impôts et un report de l’augmentation des salaires pourtant prévue (et convenue avec l’UGTT) à…2019, autrement dit aux calendes grecques ! L’expression n’est pas fortuite : c’est bien un scénario à la grecque qui se prépare : en sus d’une loi de finances qui demande aux Tunisiens de se serrer (encore plus) la ceinture, les services publics sont réduits à la portion congrue, une série de privatisations tous azimuts est dans les tuyaux sans compter que la CNAM (la sécurité sociale tunisienne) est au bord de la faillite. Bref, l’étape suivante consistera à demander au FMI de gérer directement le pays.Le comble est d’entendre les gouvernants, c’est-à-dire Nida Tounès et Ennahdha (ainsi que leurs supplétifs) s’ériger en sauveurs du pays tout en pourfendant les corporatismes alors que ce sont ceux-là même qui ont largement contribué à le précipiter dans un marasme profond ! Qui a donc réintégré des milliers de fonctionnaires sur la base de leur affiliation partisane pour un coût exorbitant pour l’Etat, qui a ménagé certains industriels, commerçants, hommes d’affaire et grands propriétaires terriens qui ne payent que peu ou pas du tout d’impôt, qui a accepté le développement d’une économie parallèle et mafieuse,« protégée » en haut lieu, comment expliquer que l’évasion fiscale ne s’est jamais aussi bien portée ? Pendant ce temps, les Tunisiens (et notamment les plus modestes d’entre eux) continuent de souffrir : cherté de la vie, pénurie en eau dans certaines régions, aggravation du chômage, déliquescence du système de santé, entre autres. Pourtant les solutions existent : réforme fiscale courageuse qui exige des efforts certes mais proportionnés en fonction des revenus, lutte (réelle et non « verbale » seulement) contre l’évasion fiscale et la contrebande, moratoire sur la dette, alternative intelligente telle que l’économie sociale et solidaire (voir notre article principal), mobilisation de l’épargne nationale et de l’aide internationale vers des projets d’infrastructures générateurs d’emplois et de croissance. Rien de tel n’est malheureusement envisagé par ce gouvernement qui n’est nullement d’union nationale mais qui nous mène tout droit à la catastrophe nationale ! Que faut-il faire ? Résister, s’organiser au mieux et préparer l’alternative. L es avis sur l’affaire Jemna qui défraie la chronique ces dernières semaines sont partagés entre ceux qui la considère comme un acte hors la loi et ceux qui se félicitent de cette gestion plus sociale de la production nationale. En 2011 une association est née suite à un sit-in de plusieurs jours des habitants, et ce pour exploiter l’oasis de Jemna qui a abouti à la création de l’«association de défense des oasis de Jemna ». Cette dernière est toutefois considérée comme illégitime aux yeux de l’Etat (n’ayant aucun statut légal). Il faut néanmoins relever qu’elle émane des habitants et ne constitue nullement une mainmise de baronnies sur un secteur économique comme cela est le cas de la contrebande ou de la vente illégale de carburants. Signalons à cet égard que Jemna n’est qu’un exemple parmi plusieurs autres, telles que les tentatives d’exploitation agricole deZriba et Smenja, du gouvernorat de Zaghouan. Très récemment une vente aux enchères de la production de dattes a été organisée par l’association, contre l’avis de l’Etat. Le secrétariat d’Etat aux domaines de l’Etat et aux affaires foncières a souligné que l'association Jemna n'a aucun statut pour céder la récolte de dattes, menaçant les contrevenants de poursuites judiciaires. La vente aux enchères a tout de même été organisée à la date prévue et la récolte a été vendue pour 1700 000 dinars (contre 1146 000 en 2011).Plus important encore, un nombre considérable d’emplois a été créé. Cela prouve que l’implication des citoyens pour faire prospérer la terre est payante, mais aussi que la réussite de la gestion sociale de ces oasisest possible. L’association bénéficie du soutien des habitants, de la société civile et de personnalité s politiques. Ainsi le porte-parole du Front populaire Hamma Hammami a affirmé son total soutien et a même invité l’Etat à encourager ce genre d’initiative. Cependant, d’autres partis politiques considèrent cette opération comme illégale, et appellent même le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour faire cesser ce qu’ils qualifient d’opération de communication Jemna : l’économie sociale et solidaire par l’exemple l’économie sociale et solidaire par l’exemple Travail - Liberté - Justice sociale Le bulletin d'Al-Qotb France NUMÉRO 16 Octobre 2016 Editorial

Bulletin Al Qotb - France n° 16 - octobre 2016

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La loi de finances (LF) pour 2017 suscite unefronde sans précédent : les professions libérales

et l’UGTT – pour des raisons différentes – n’enveulent pas. Pire : la centrale syndicale considèreque « l’accord de Carthage » a volé en éclats ! Envérité, rien d’étonnant à tout cela puisque celui-cin’était qu’une vague déclaration d’intentions qui segardait bien d’entrer dans les détails des mesuresqui se préparaient. Et pour cause : il n’y aurait paseu d’accord du tout. Le Front Populaire et Al-Qotbavaient prévenu que ce gouvernement–conformément aux directives des organismesfinanciers internationaux – allait mettre en placeune politique d’austérité, réponse classique (etmalheureusement catastrophique) à la situationcalamiteuse de nos finances publiques. La loi definances propose donc une augmentation globaleet significative des impôts et un report del’augmentation des salaires pourtant prévue (etconvenue avec l’UGTT) à…2019, autrement dit auxcalendes grecques ! L’expression n’est pas fortuite :c’est bien un scénario à la grecque qui se prépare :en sus d’une loi de finances qui demande auxTunisiens de se serrer (encore plus) la ceinture, lesservices publics sont réduits à la portion congrue,une série de privatisations tous azimuts est dans lestuyaux sans compter que la CNAM (la sécuritésociale tunisienne) est au bord de la faillite. Bref,l’étape suivante consistera à demander au FMI degérer directement le pays.Le comble est d’entendreles gouvernants, c’est-à-dire Nida Tounès etEnnahdha (ainsi que leurs supplétifs) s’ériger ensauveurs du pays tout en pourfendant lescorporatismes alors que ce sont ceux-là même quiont largement contribué à le précipiter dans unmarasme profond ! Qui a donc réintégré des milliersde fonctionnaires sur la base de leur affiliationpartisane pour un coût exorbitant pour l’Etat, qui aménagé certains industriels, commerçants, hommesd’affaire et grands propriétaires terriens qui nepayent que peu ou pas du tout d’impôt, qui aaccepté le développement d’une économie parallèleet mafieuse,« protégée » en haut lieu, commentexpliquer que l’évasion fiscale ne s’est jamais aussibien portée ? Pendant ce temps, les Tunisiens (etnotamment les plus modestes d’entre eux)continuent de souffrir : cherté de la vie, pénurie eneau dans certaines régions, aggravation duchômage, déliquescence du système de santé, entreautres. Pourtant les solutions existent : réformefiscale courageuse qui exige des efforts certes maisproportionnés en fonction des revenus, lutte (réelleet non « verbale » seulement) contre l’évasion fiscaleet la contrebande, moratoire sur la dette, alternativeintelligente telle que l’économie sociale et solidaire(voir notre article principal), mobilisation del’épargne nationale et de l’aide internationale versdes projets d’infrastructures générateurs d’emploiset de croissance. Rien de tel n’est malheureusementenvisagé par ce gouvernement qui n’est nullementd’union nationale mais qui nous mène tout droit àla catastrophe nationale ! Que faut-il faire ? Résister,s’organiser au mieux et préparer l’alternative.

Les avis sur l’affaireJemna qui défraie la

chronique ces dernièressemaines sont partagésentre ceux qui la considèrecomme un acte hors la loiet ceux qui se félicitent decette gestion plus socialede la production nationale.

En 2011 une association estnée suite à un sit-in deplusieurs jours des habitants, etce pour exploiter l’oasis deJemna qui a abouti à lacréation de l’«association dedéfense des oasis de Jemna ».Cette dernière est toutefoisconsidérée comme illégitimeaux yeux de l’Etat (n’ayantaucun statut légal). Il fautnéanmoins relever qu’elleémane des habitants et neconstituenullementunemainmise debaronniessur unsecteuréconomiquecomme celaest le cas delacontrebande ou de la venteillégale de carburants.Signalons à cet égard queJemna n’est qu’un exempleparmi plusieurs autres, tellesque les tentativesd’exploitation agricole deZribaet Smenja, du gouvernorat deZaghouan.Très récemment une vente auxenchères de la production dedattes a été organisée par

l’association, contre l’avis del’Etat. Le secrétariat d’Etat auxdomaines de l’Etat et auxaffaires foncières a soulignéque l'association Jemna n'aaucun statut pour céder larécolte de dattes, menaçant lescontrevenants de poursuitesjudiciaires.La vente aux enchères a toutde même été organisée à ladate prévue et la récolte a étévendue pour 1700 000 dinars(contre 1146 000 en2011).Plus important encore,un nombre considérabled’emplois a été créé. Celaprouve que l’implication descitoyens pour faire prospérer laterre est payante, mais aussique la réussite de la gestionsociale de ces oasisest possible.L’association bénéficie du

soutien deshabitants,de la sociétécivile et depersonnalités politiques.Ainsi leporte-paroledu FrontpopulaireHamma

Hammami a affirmé son totalsoutien et a même invité l’Etatà encourager ce genred’initiative.Cependant, d’autres partispolitiques considèrent cetteopération comme illégale, etappellent même legouvernement à prendre lesmesures nécessaires pour fairecesser ce qu’ils qualifientd’opération de communication

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Jemna : l’économie sociale et solidaire par l’exemple

l’économie sociale et solidaire par l’exemple

Travail - Liberté - Justice sociale

Le bulletin d'Al-Qotb FranceNUMÉRO 16

Octobre 2016

Editorial

Page 2: Bulletin Al Qotb - France n° 16 - octobre 2016

populiste et d’atteinte auprestige de l’Etat.Si les ressorts régionalistes voireséparatistes ne sont pasabsents de certains discourspolitiques, il n’en reste pasmoins que cette expériencetraduit une volonté réelled’exploitation plus sociale etlocale des richesses du pays.Sur le plan strictementjuridique, il est vrai que cetteinitiative est hors la loi,néanmoins cela traduit la

nécessité d’une évolution de lalégislation, avec la créationd’un cadre juridique adaptéafin d’assurer toute latransparence requise.L’économie sociale et solidaire(ESS), s’y prête parfaitement. AAl-Qotb nous demandonsdepuis longtemps lapromulgation d’une loi-cadrepour l’ESS. Nous espérons quel’expérience de Jemnaaccélèrera le processus.

Il est possible aujourd'hui en Tunisie de seprocurer tous les biens de consommation, qu'ilssoient courants ou de luxe. On trouve ainsi laplupart des grandes enseignes internationalesdans les zones commerciales voire même dansun "mall", signe extérieur de prospérité.Pourtant, il suffit de regarder d'un peu plus prèsles prix pratiqués pour s'apercevoir que cesproduits ne sont réservés qu'à une infimeminorité de personnes, celle qui détient le grosdes capitaux circulant dans le pays. Certainsvéhicules sont ainsi vendus à près de 500.000dinars, soit plus d'un siècle de SMIG !!

Outre le décalage ahurissant entre les revenusmoyens des tunisiens et le prix de vente de cesproduits (amplifié par la chute vertigineuse dudinar), l'on doit s'interroger sur le sens de cetteuniformisation à outrance imposée par lamondialisation. On peut ainsi vivre dans lemême univers commercial que l'on soit à Tunisou dans une autre capitale. Est-ce pour autantun indicateur de développement ?

Dans le même temps, le patrimoinearchitectural tunisien (maisons, immeubles,marabouts, etc) tombe en ruine ou est rachetépar des promoteurs pour le détruire etconstruire d’horribles constructions, parfois lesfameux « mall » ou encore des habitations dontla laideur le dispute à l’ostentation. Endéfinitive, faute d’une politique d’urbanismedigne de ce nom et d’une action publiquedéterminée de préservation et de restaurationde notre patrimoine, nous sommes toutsimplement en train de perdre notre âme.Certains y gagnent en profits vertigineux. Autreindicateur de développement ?

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Le gouvernement « blackliste » le français àl’école !

Blacklister, pour les non anglophones, signifie évincer, rejeter,

éliminer, en bon français. Le gouvernement par le biais de son

ambitieux et si populiste ministre de l’Education n’a rien

trouvé de mieux pour réformer l’école tunisienne, que de

préférer l’anglais au français comme 2ème langue. Au

prétexte qu’elle serait plus « utile ». Passons sur cette vision

utilitariste voire mercantile de l’école et interrogeons-nous

quant aux motivations réelles de cette « décision » :

complaisance vis-à-vis des islamistes (rappelons que ce même

ministre avait proposé des cours de Coran pour occuper les

élèves pendant l’été), complexe de l’ex-colonisé (qui, dit-on,

envoie ses enfants à l’école française), négation de ce qui

constitue le patrimoine historique et culturel de notre pays (à

ce compte l’arabe est également la langue d’un colonisateur)?

So « stupid » (c’est kif-kif en français avec un e en plus) !

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