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Etats-Unis : les nouvelles Républicaines

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N°238- semaine du 26 octobre au 1er novembre 2010

2 novembre : Les

nouvelles républicaines

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2 novembre 2010 : les nouvelles républicaines

Les élections du mid term marquent toujours un tournant majeur dans la politique des USA. Elles sont un double défi qui conditionne directe-ment le lancement de la campagne électorale pour le prochain scrutin prési-dentiel. Le premier défi est pour le pouvoir en place. Le Président en exercice pos-sède un appareil électoral en parfait état de marche. Il est alors particulière-ment rodé puisqu’il a connu des échéances électorales majeures fran-chies avec succès. Ces élections sont pour lui l’occasion de prouver la confiance populaire qui est la sienne dans le pays. Le second défi est pour ses opposants. Ils doivent créer, morceau par mor-ceau, un nouvel outil pour une campagne nationale en subissant les in-contournables luttes in-

ternes pour le prochain leadership sur le parti. Ce sont donc deux orga-nisations diamétralement opposées qui s’affrontent. D’un côté, l’organisation électorale du pouvoir pré-sidentiel qui repose sur une autorité claire. D’un autre côté, l’organisation des opposants qui par dé-finition est bâtie sur au-tant d’organisations que de courants qui peuvent traverser le parti d’oppo-sition. Il y a souvent des organisations nouvelles en phase de rodage qui tentent de multiplier les relations directes avec les candidats pour tisser un réseau ponctuel de soli-darités susceptibles d’être capitalisées lors des pro-chaines primaires pour les présidentielles. Dans ce contexte perma-nent, les prochaines élec-tions du mid terme vont connaître trois caractéris-tiques nouvelles.

Tout d’abord, la radicali-sation des oppositions dans le pays à la sortie de la réforme de la santé. Ensuite, en raison de l’ac-tuel taux de popularité du Président Obama, le Parti Démocrate sait qu’il ne bénéficie pas de filet de sécurité. Il lui faut créer de nouveaux points de contacts avec l’opinion. Pour gagner les élections de novembre 2010, le Parti Démocrate devait ê t r e c a p a b l e d e «retrouver la confiance de l’américain moyen». C’est cet électorat que le Parti Démocrate doit re-conquérir, celui qui n’est ni pauvre, ni noir, ni syn-diqué. C’est cet électorat que le Parti Démocrate n’est pas parvenu à reconquérir et bien davantage qui a dé-sormais la volonté de montrer son mécontente-ment par les urnes.

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Sharron Angle : le symbole de la victoire sur Harry Reid Dans le Nevada, Sharron An-gle fait la course en tête contre Harry Reid, leader des Démocrates au Sénat. Le der-nier leader démocrate a avoir été battu fut Tom Daschle dans le Dakota du Sud en 2004. Il fallait remonter 54 ans plus tôt pour trouver une telle défaite symbolique. Par la seule victoire de Shar-ron Angle sur Harry Reid, la «team Sarah» remporterait un succès emblématique fédéral.

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La nouvelle révolution conservatrice Cette réconciliation a été rendue difficile par le comportement perçu comme élitiste de la part de Barack Obama. Mais surtout, au même mo-ment, l’émergence du Mouvement Tea Party a changé la donne. Le mouvement Tea Party réconcilie des fondamen-taux de la théorie conser-vatrice avec de nouvelles idées liées pour partie à la crise de confiance ac-tuellement traversée. Les fondamentaux sont simples. C’est d’abord, le refus de l’impôt et la réaffirmation de la théorie de Laffer. Le taux d’imposition élevé n’est pas la meilleure ga-rantie des recettes pour l’Etat. Il y a des taux fai-bles qui produisent da-vantage de recettes car la motivation de richesse des assujettis est plus grande. La théorie de Laf-fer, très à la mode du temps de Reagan, permet dans l’idéal d’abaisser les impôts frappant le secteur privé sans couper les dé-penses du public. En réalité, les tenants de cette école n’ont pas trouvé de démonstration positive. Ils mettent en évidence des exemples a contrario des démocraties social-démocrates qui,

par l’imposition élevée, démotivent et établissent une sorte de seuil prohibi-tif d’impôts. Une nouvelle fois, le dé-bat échappe à la seule théorie économique pour relever d’une logique plus globale de conviction de bon sens. C’est le socle d’une forme de révolte fiscale qui est le refus déterminé face à l’impôt, aux dépenses pu-bliques, à la bureaucratie et aux politiciens. Le second pilier des fon-damentaux de la doctrine du Mouvement Tea Party, c’est le rejet de la classe politique victime d’une suspicion généralisée sur ses compétences, son uti-

lité, son honnêteté. Cette logique est d’abord un refus de l’Etat provi-dence. Mais c’est bien au-delà l’expression d’un mouvement populaire qui ne se sent plus représen-té par les politiciens dé-magogues et profiteurs. Cette logique fait l’apolo-gie des circuits courts de la démocratie dont les re-ferendums. C’est une lo-gique de l’Etat minimum, libertaire, qui redécouvre la «société libre». La «société libre» c’est la société de proximité. Tout ce qui est éloigné est cou-pé des réalités. C’est un monde présenté comme sans âme, dirigé en réali-té par des bureaucrates éloignés du réel.

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Il faut donc s’éloigner de Washington pour revenir à la source, à la base, au réel. La Capitale fédérale est mauvaise, corruptrice, matérialiste, violente. En revanche, le bourg est harmonieux. Il y règne les bonnes moeurs, le bon voisinage, la solidarité de proximité. Cet ancrage conceptuel crée un univers visuel très strict : le monde des prairies face au monde des immeubles. C’est également un uni-vers visuel qui valorise le contact direct et non pas les intellectuels. C’est une logique vestimentaire qui laisse une place aux ha-bits des «racines» et non pas au modèle urbain. Les championnes des gens ordinaires Dans ce nouvel univers conceptuel, les «nouvelles républicaines» à l’exem-ple de Nikki Haley (photo couverture) occupent une place privilégiée. E l l e s s o n t l e s «championnes des gens ordinaires». Elles louent l’héroïsme au quotidien : faire vivre sa famille en respectant des valeurs fortes.

Ce parti pris de proximité crée la valeur à la mode : le choix affinitaire. Le vote est désormais un choix d’appartenance : le candidat qui peut le mieux connaître donc comprendre ses enjeux. Celui-là seul mérite la confiance. Nikki Haley est l’un des fleurons de cette généra-tion. Elle est la «maman griz-zly» : celle qui lutte de toutes ses forces contre l’environnement hostile pour sauver les siens. Cette génération est en passe de changer la don-ne en cumulant le tempé-rament de fer et le char-me de feu. Les campagnes publicitai-res occupent à fond un positionnement séduc-teur. Elles viennent de changer l’image du Parti Républi-cain et de lancer le Parti Démocrate dans l’élitisme intellectuel. Les anciens leaders «ont fait leur temps». Une réelle aspiration au changement de têtes se fait jour. C’est la sanction contre l’establishment : être sor-tant sans être sorti a rele-vé de l’exploit.

Scott Brown : l’alerte de Boston Le message de l’aspiration au changement est passé dès la victoire de Scott Brown rem-portant la «circonscription des Kennedy ».Toute la dialectique de Scott Brown réside dans la reconnaissance de l’héroïsme au quotidien, les qualités des citoyens ordinaires contre les tares de la Capitale qui porte tous les pêchés.

Washington incarne la Capitale d’êtres sans chair ni éthique. Elle n’est pas l’œuvre des pion-niers ni des novateurs. Elle est composée de « têtes d’oeufs » qui sont éloignées du réel, qui acceptent la corruption par va-nité ou intérêt.

Pour Scott Brown, le salut est dans le retour à la base. Il s’a-git de réduire l’influence des politiciens professionnels qui ne seraient que des parasites, des profiteurs et des démago-gues.

Sous cet angle, il n’y a rien de très original dans la doctrine de Brown par rapport au creu-set d’une partie des théories du Parti Républicain.

L’originalité naît davantage du fait qu’il applique sa doctrine à des exemples de la vie quoti-dienne. Il ne se veut pas vi-sionnaire. Il se veut gestion-naire du quotidien : emploi, fiscalité, endettement.

Il a conduit une campagne sur le terrain, à l’écoute, marchant dans la boue pour serrer des mains. Son analyse c’est qu’en réalité la classe dirigeante se-rait en retard sur la révolution conduite par les classes popu-laires. Par sa personnalité, il est parvenu à assurer un amal-game étonnant qui l’a conduit à un succès impensable.

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Le culte du neuf Chaque élection Américaine reflète le culte du neuf. L’électorat exprime son souhait de repartir sur des bases nouvelles et ainsi parvenir à «recommencer le monde». Chaque élection présidentielle est marquée par cette logique de rupture. En 1976, Jimmy Carter promettait la fin d’une présidence machiavélique. En 1980, Reagan marquait le retour d’un pays qui entendait être internationalement respecté. En 1992, la victoire de Clinton était celle de la proximité et du retour aux priorités intérieures. En 2000, le succès de Bush était le triomphe d’u-ne Amérique morale. En 2008, le triomphe de Barack Obama fut celui d’un nouveau leadership basé sur une Présidence moins «impériale» et une puissance internatio-nale moins dogmatique. Chaque présidentielle a une part de ses racines dans les élections du mid term. La présidentielle 2008 a ses racines directes

dans la campagne du mid term en novembre 2006. Une élection qui marque une sévère défai-te républicaine avec le réel tournant du scandale inattendu dit «le scandale Foley». Ce tournant traduit deux phénomènes impor-tants. La place prépondérante de la morale pour «l’Amérique profonde», dont le droite religieuse qui a contribué aux dernières victoires républi-caines de façon décisive depuis 2000, conduit à une forte abstention qui défait des sortants Ré-publicains dans des fiefs classiques.

La propension immédiate de cette «Amérique profonde» à stigmatiser tous les «pêchés» des Capitales de la Côte Est dont Washington, capi-tale politique ou New York, capitale économique et médiatique et à souhaiter du neuf pour évo-luer vers un candidat d’un profil plus modeste, au cursus moins aisé et issu de territoires inté-rieurs moins privilégiés. Aujourd’hui, fidèles à cette culture du «un nou-veau départ» c'est-à-dire un nouveau leader avec des idées nouvelles, les citoyens réaffir-ment leur besoin de changement.

Bien davantage, l’opinion a clairement indiqué ce qu’elle ne voulait plus ac-cepter : • l’idéalisme frustré, • les idéologies tradi-

tionnelles. Elle attend une nouvelle génération qui soit atta-chée au pragmatisme, à l’équité et surtout sou-cieuse de «résoudre les problèmes du quotidien». Ces «problèmes du quoti-dien» ont deux priorités : • l’emploi, • la diminution des

taxes. Ce besoin de neuf comme de quotidienneté a ouvert un espace particulier en faveur des femmes qui ont effectué une percée

sans précédent. C’est le cas notamment de Nikki Haley en Caroline du Sud. Elle vise le poste de Gouverneur. Nikki Haley c’est deux combats : • la défense des contri-

buables par la chasse à l’augmentation des impôts et aux dépen-ses publiques inuti-les,

• la priorité sur l’édu-cation.

Elle incarne la «nouvelle génération républicaine» avec les valeurs du Tea Party. Elle a beaucoup mis en avant le soutien donné par Sarah Palin. Elle exprime avec virulen-

ce la volonté de limiter les pouvoirs de l’Etat fédéral et par conséquent sa dé-fiance face à certaines ré-formes de Barack Obama qui, selon elles, entraî-nent une augmentation sensible de la bureaucra-tie fédérale. Cette nouvelle génération a pu compter sur l’enga-gement d’une presse d’o-pinion à l’exemple d’Elisa-beth Hasselbeck (photo page 4) qui incarne l’une des présentatrices vedet-tes avec un engagement citoyen notoire en faveur de Sarah Palin. Des engagements de ce type ont contribué à po-pulariser les valeurs de cette génération.

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La naissance de la «team Sarah» Depuis le dernier trimes-tre 2009, Sarah Palin est sur tous les fronts : ré-unions de soutien à des candidats républicains, colloques locaux du mou-vement Tea Party et mê-me émissions à la TV au point que certains com-mentateurs commencent à lui prédire une carrière plus médiatique que poli-tique. Comment chercher à comprendre cet activisme tous azimuts ? L’Amérique décide selon

des schémas qui ont fait l’objet d’études très préci-ses. Il existe un clivage réel entre les Républicains et les Démocrates. Les Républicains atten-dent un leader fort. Leur principal critère est l’exa-men de la force morale de son tempérament. Pour les Démocrates, c’est la capacité de jugement qui compte. La sécurité nationale est la première priorité pour les Républicains tandis qu’elle est largement de-vancée par l’économie

pour les Démocrates. Pour ces derniers, les questions sociales arri-vent même devant la sé-curité nationale. Bien entendu, géographi-quement, l’Amérique des rivages est plus ouverte que l’Amérique profonde. Mais surtout, il résulte que l’électeur Américain ne vote pas pour un can-didat quand il ne le connaît pas. Ces données portaient en elles les scores des pri-maires 2008. Seul McCain réunissait en

Sarah Palin : d’abord gagner sur le terrain des images Sarah Palin est l’une des personnalités les plus controversées. Elle a marqué un territoire qu’elle occupe avec efficacité : l’Amérique d’en bas. Dès la présidentielle 2008 aux côtés de McCain, elle a su garder sa différence sur des dossiers majeurs dont l’éthique et la ré-forme des cercles de pouvoirs de Washing-ton. Si bien que la défaite de novembre 2008 ne fut pas la sienne. Le pouvoir d’évocation de Reagan était bâti autour de deux valeurs essentielles : l’éthi-que et l’héroïsme. C’était le John Wayne de la politique. Pour l’instant avec difficulté, Sarah Palin tente d’actualiser les repères et être l’héri-tière d’un nouveau «patrimoine républicain» : l’éthique et l’exemple du quotidien.

Sarah Palin a repris un vieux credo des cam-pagnes de Reagan : pour gagner la Prési-dentielle, il ne suffit pas de quadriller le pays d’Etat en Etat, il faut d’abord et surtout gagner sur le terrain des images pour faire passer des idées. La base va passer le message d’un mouve-ment attendu par elle. L’homme politique choisi sera celui qui ré-pond le mieux à ce message. Sarah Palin considère que le modèle conser-vateur qui est actuellement attendu par la base est le suivant : • Etat minimum, • capitalisme du mérite, • plein emploi par la flexibilité, • Etats-Unis respectés parce qu’à l’impé-

rialisme triomphant. C’est clair, simple, efficace. A l’opposé de cette clarté simple, Obama parait compliqué, nuancé, mais surtout éli-tiste.

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tré que la campagne pré-sidentielle est d’abord une chorégraphie électorale calibrée pour devenir un feuilleton quotidien avec ses rebondissements et ses temps forts. Dans la dernière ligne droite, il s’agit d’identifier l’enjeu du vote et d’être la «bonne réponse à cet en-jeu». En 2008, la mode était aux «nouveaux Démocra-tes» : gouverner comme les Républicains mais avec une émotion compa-tissante en plus. Depuis l’été 2009, la mo-de a changé. L’Amérique profonde retrouve ses an-crages de rejet d’un Etat Fédéral fort et d’une bu-reaucratie qui lèverait des impôts de plus en plus élevés. C’est cette vague qui por-te les Républicains. Sarah Palin sortira très forte du 2 novembre qu’elle a conçu comme le premier tour de la prési-dentielle 2012. Dans de très nombreux Etats clefs, des proches exerceront des responsabilités émi-nentes. La primaire inter-ne au Parti Républicain s’annonce alors sur des bases totalement nouvel-les.

2008 les trois données majeures chez les Répu-blicains : être connu, être doté d’un tempérament fort, rassurer en matière de sécurité. Il a donc tenu face à tous les vents contraires et attendu l’éli-mination des autres concurrents. Chez les Démocrates, en janvier 2008 : • John Edwards était

connu mais son profil restait un mystère,

• Hillary Clinton était connue, perçue com-me compétente mais 50 % des Démocra-tes doutaient de sa sincérité. Hillary Clin-

ton est progressive-ment devenue une caricature de la poli-ticienne froide et cal-culatrice,

• Barack Obama était jugé comme com-mettant des erreurs sur le terrorisme mais parvenait à ins-taller une communi-cation émotionnelle accélérant sa noto-riété et sa bonne image de marque. A l’aide d’un budget historique, Obama allait gagner la noto-riété incontournable rendant le reste pos-sible.

Cette leçon a aussi mon-

Editeur : Newday www.exprimeo.fr

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Crise sociale : le jour d’après ? 9

La crise sociale au sujet de la réforme des retraites est-elle de nature à introduire de nou-veaux éléments dans la donne pour la présidentielle 2012 et si oui lesquels ? Les dernières enquêtes d’opi-nion laissent apparaître des tendances parfois à l’opposé des chiffres qui ont occupé le devant de la scène médiati-que. Que sera le jour d’après ?

Parution le : 2 novembre 2010