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C R C Bilan L’état des Comores après Deux ans de pouvoir du Président Sambi Bilan de deux ans de Pouvoir Sambi Mai 2008 1

BILAN COMPARATIF DU POUVOIR AZALI - 2000-2006

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CCRR

CC

BilanL’état des Comores après

Deux ans de pouvoir du Président Sambi

Elaboré par le Parti « Convention pour le Renouveau des Comores »

CRC

Bilan de deux ans de Pouvoir Sambi Mai 2008

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Résumé

À mi-mandat du régime Sambi, force est de constater que la situation économique s’est détériorée ; la situation sociale est devenue très préoccupante ; la situation politique et diplomatique est confuse.Plus grave encore, les acquis de la réconciliation nationale, fruits de sept années d’efforts, de travail de rapprochement entre les Comoriens, avec l’appui de la Communauté Internationale, sont remises en cause par le pouvoir qui privilégie les affrontements, la violence politique, les emprisonnements et l’exacerbation des haines sociales.

Il est incompréhensible qu’après deux ans de pouvoir, le régime de Sambi continue à afficher son mépris à l’encontre des responsables et hauts dignitaires du régime précédant ; Et pourtant, le Président Sambi a hérité de son Prédécesseur des atouts que n’ont pas bénéficié nos chefs d’État dans le passé : Un pays crédible qui a retrouvé la stabilité politique et économique ; un pays réconcilié avec des institutions certes complexes mais qui fonctionnent, une démocratie enracinée ayant permis au Président Sambi d’être élu ; un pays sur la voie du progrès économique et social ; des grands investissements ayant permis aujourd’hui au régime Sambi de mieux respirer : Une Université des Comores (qui forme plus de 3 000 jeunes comoriens), une téléphonie mobile qui rapporte aujourd’hui des milliards de recettes à l’État, des Équipements électriques qui avaient permis au pays de tourner la page noire des délestages, une nouvelle aérogare aux normes internationales, 3 banques commerciales, des protocoles d’investissements de complexes hôteliers, 34 000 tonnes de goudron qui va permettre de bitumer toutes les routes de l’archipel ; un accord avec le FMI qui aurait permis l’effacement de 100 mds de Francs comoriens de dettes extérieurs, une conférence de bailleurs de fonds qui aurait rapporté plus de 100 milliards de Francs comoriens. Qu’en a fait le Président Sambi de cet héritage ? Quelle est la valeur ajoutée du régime Sambi ?

En continuant à anesthésier la population, notamment par ses formules de bénédictions, adressées aux citoyens avant chaque discours et en persistant à cacher la réalité aux Comoriens, à leur mentir et à entretenir de faux espoirs, le Président Sambi expose le pays à un réveil qui risque d’être brutal et douloureux.

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SOMMAIRE

Résumé............................................................................................2

Introduction.....................................................................................4

1ère Partie : Situation économique et sociale...................................6

1) Les Comoriens vivent ils mieux maintenant qu’avant mai 2006 ?........................62) Année 2007  « Année habitat »: Combien de comoriens ont bénéficié des habitats sociaux ?.......................................................................................................73) La situation économique et financière: Où est passé le FRPC ?...........................7

a) Evolution de la situation économique......................................................................................7Tableau N°2 : Indicateurs de Croissance, d’Inflation et de Construction...................................7b) La situation des Finances Publiques et le Programme FRPC avec le FMI.............................8

4) Lutte contre la Pauvreté : Combien de nouveaux emplois créés ?......................115) Le Social : Education et Santé.............................................................................12

2ème Partie : La Justice et les Affaires............................................14

1) Une Justice équitable et impartiale ?...................................................................142) L’Affairisme / Corruption....................................................................................15

Conclusion sur la réalisation des grands objectifs du Président Sambi :.................17

3ème Partie : Situation diplomatique et politique............................18

1) La situation diplomatique....................................................................................182) Etat de lieu sur l’évolution de la Réconciliation Nationale.................................203) Des institutions malmenées.................................................................................204) Crise Anjouanaise: Créée de toutes pièces à des fins politiques.........................215) Révision de la Constitution?................................................................................22

Conclusion Générale.....................................................................24

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Introduction

Le Président Ahmed Abdallah Mohamed Sambi est au pouvoir voilà bientôt deux ans. Arrivé en tête, d’abord à Anjouan, lors des primaires et ensuite dans les 3 îles lors des élections générales, il a été élu, rappelons-le, en mai 2006, dans le cadre de la présidence tournante avec 56 % des voix.

Le candidat Sambi avait alors promis des réalisations, et avait pris des engagements populistes qui ont émerveillé tous les Comoriens. Ce qui lui a valu une forte adhésion au sein des citoyens les plus démunis qui espéraient voir leur cadre de vie s’améliorer au cours de son mandat présidentiel.

Le phénomène « Sambi » avait ainsi gagné les esprits de la majeure partie des Comoriens. C’est pourquoi, il est utile de faire un bilan politique et socio-économique des actions de celui qui, deux années auparavant, affichait un programme qui tournait autour de trois principales promesses devenues aujourd’hui le Plan d’Action de son gouvernement, à savoir :

- Un Projet Habitat : Ce projet phare du Président Sambi promettait « Une maison en dur pour tous les pauvres » grâce à une révolution « habitat » qui éradiquerait toutes les maisons précaires (en tôle et en paille) pour les remplacer par des maisons en dur. L’année 2007 a ainsi été proclamée « année de l’habitat ».

- Une Justice indépendante, égale et impartiale pour tous- Une lutte contre la Pauvreté   : lutte contre le chômage, lutte contre la précarité et la vie

chère

Beaucoup de Comoriens ont cru au changement, beaucoup ont cru au miracle, et nombreux d’entre eux continuent toujours à y croire. Qu’en est-il réellement ? Où en est – on par rapport aux trois objectifs fixés en 2006 ? Deux années plus tard : c’est l’heure d’un bilan à mi-parcours pour ce programme ambitieux sur lequel les Comoriens avaient placé tant d’espoir.

Peut-on aujourd’hui dire que les Comoriens vivent mieux qu’il y a deux ans ? Peut-on dire que la précarité a diminué chez les Comoriens ? Combien sont les Comoriens qui, grâce au projet habitat, disposent aujourd’hui d’une maison en dur ? Les Comoriens se sentent-ils plus en sécurité, en ayant plus confiance en leur justice qu’il y a deux ans ? Bref, qu’y a – t-il de changer dans la vie quotidienne du Comorien moyen depuis mai 2006 ?

Ou en est-on avec les « Projets d’investissements » ? Que nous réserve le Programme FRPC avec le FMI, censé démarrer depuis 2006 ? Qu’en est-il des nombreuses « Affaires » qui lient des hauts dignitaires du régime avec les milieux douteux ? Où est ce la version anti-corruption du Président Sambi ?

Les réponses à ces questions, qui font l’objet de ce document, nous permettront de dresser une évaluation objective du Programme d’Action économique et social du Président Sambi.

Toutes les analyses qui y sont faites reposent sur des faits réels, c’est-à-dire des résultats appuyés par des chiffres.

Ce document dresse également un bilan politique et diplomatique des actions du gouvernement. Ce qui permettra d’évaluer la consolidation du processus de réconciliation nationale, qui constitue la motivation première de cette première tournante à Anjouan, à la suite de la crise séparatiste anjounaise.

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Il s’agira enfin, d’apprécier le respect ou non, par l’actuel gouvernement, de la Constitution, des textes réglementaires régissant l’organisation et le fonctionnement des nouvelles institutions constitutionnelles voulues par une écrasante majorité des Comoriens. Qu’a pu apporter le Gouvernement du Président Sambi à ces nouvelles institutions démocratiquement mis en place par son prédécesseur et dont lui-même, en a bénéficié, grâce au respect de la tournante qui l’a conduit au Pouvoir en mai 2006 ? Peut-on aujourd’hui, affirmer que les institutions fonctionnent mieux qu’avant d’une façon démocratique et respectent le droit à la différence et à l’opposition ?

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1re Partie : Situation économique et sociale

1) Les Comoriens vivent-ils mieux maintenant qu’avant mai 2006 ?

Une des priorités du Gouvernement du Président Sambi est de rendre la vie quotidienne plus facile et plus abordable pour tous les Comoriens et surtout ceux qui vivent dans une situation de précarité.

C’est ainsi que le Président Sambi a promis l’accessibilité par les plus démunis, des denrées alimentaires de première nécessité et des matériaux de construction les permettant de disposer d’habitats décents.

Peut-on dire aujourd’hui que les denrées et les matériaux de construction sont plus accessibles aux pauvres qu’il y a 2 ans ? L’analyse de l’évolution des prix de quelques denrées alimentaires de base (voir tableau ci joint) nous éclairera sur la réponse à cette question.

Tableau N° 1 : Évolution des Prix des denrées et produits de première nécessitéConsommation Ménagère de base

Avant le pouvoir de Sambi

Pendant le pouvoir de Sambi

Taux d’augmentation

Denrées AlimentairesRiz 225 Francs comoriens /

kg350 Francs

comoriens / kg+55 %

Sucre 300 Francs comoriens / kg

500 Francs comoriens /kg

+66 %

Sel 150 Francs comoriens / kg

250 Francs comoriens /kg

+67 %

Farine 300 Francs comoriens / kg

400 Francs comoriens / kg

+ 33%

Huile 400 FC /Kg 750 FC /Kg +87 %Ailes de Poulet 1 050 FC / Kg 1 400 FC / Kg +33 %Viande 1 100 FC/ Kg 1 500 FC / Kg +36 %Lait en Poudre (Grand Modèle) 7 500 FC 10 500 FC +40 %Produits ÉnergétiquesPétrole lampant 175 FC / litre 300 FC / litre +71 %Gaz 7 500 FC / bouteille 10 000 FC /

bouteille+33 %

Matériel de ConstructionCiment 80 000 FC / Tonne 120 000 FC / Tonne +50 %1 Voyage de sable concassé 80 000 FC /8 m3 120 000 FC /8 m3 +50 %Containers 1 800 000 FC 2 350 000 FC +30 %Fer 6 600 FC 900 FC +50 %Fer 8 800 FC 1 450 FC +81 %Fer 10 1 150 FC 2 000 FC +74 %Médicaments essentiels Droits de Douane

= 0 %Droits de Douane

= +11 %+11 %

(douanes)

Selon le tableau N° 1, il apparaît clairement que durant les deux premières années du mandat du Président Sambi, les prix des produits de première nécessité et des matériaux de construction ont connu des hausses vertigineuses lesquelles se sont également accompagnées des pénuries de produits de base et des délestages quotidiens de l’énergie électrique.

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À titre d’exemple, durant ces deux années dernières années, le Pays a connu Plus de 6 mois de pénuries de ciments Plus de 7 mois de délestage Plus de 3 mois de pénuries de viandes et de poulets

Ainsi, loin d’avoir vu s’améliorer leurs conditions de vie, les Comoriens ont assisté à une détérioration sans précédent de leur train de vie. Le Comorien vit mal aujourd’hui qu’il y a deux ans et ce sentiment est partagé par la rue qui ne cesse d’exprimer une colère contre la vie chère et les pénuries de tout genre.

2) Année 2007 « Année habitat » : Combien de Comoriens ont bénéficié des habitats sociaux ?

Selon les statistiques officielles sur l’habitat, il y a plus de100 000 maisons en paille et tôle sur l’ensemble des 3 îles. Près de 300 000 Comoriens y vivent tous les jours. Le Projet habitat vise à éliminer les 100 000 maisons en paille et tôle sur l’ensemble des 3 îles, et à les remplacer par des maisons en dur. L’année 2007 a été ainsi décrétée « année de l’habitat ». L’année s’est écoulée et nous sommes en mai 2008, sans qu’aucun des 300 000 Comoriens cibles n’ait pu jusqu’alors bénéficier d’un logement social. Deux ans se sont écoulés et deux ans restent encore au Président Sambi pour concrétiser sa promesse, et les Comoriens attendent toujours.Les Comoriens doivent-ils continuer à espérer ? Doivent-ils continuer à croire au miracle que d’ici deux ans, les 100 000 logements sociaux dont aucune n’a encore été construite à mi-chemin du mandat présidentiel, pourront l’être demain ? L’évaluation à mi-parcours de ce « projet » laisse peu d’espoir. Aucune maison n’a été construite jusqu’à aujourd’hui en dehors d’un prototype en cours de construction dans la cour d’un ministère.Toutefois, ce qui est plus grave, c’est qu’aucun espoir sur les chances réelles de pouvoir effectivement atteindre cet objectif n’est permis. En effet, les 2 milliards de FC (Aide d’Arabie Saoudite et de l’Iran) ont déjà été utilisés semble-t-il.Comment a-t-on utilisé cet argent ? Qui les a utilisés ? Pourquoi faire ? Autant de questions sans réponses. Ce qui est sûr, c’est que ce n’était pas pour construire des logements sociaux, car si c’était le cas, nous aurions pu observer au moins 400 maisons construites (avec l’hypothèse d’un prix unitaire de 5 millions de FC).

Ce projet habitat aussi ambitieux soit il, n’a fait l’objet d’aucune étude, d’aucune évaluation sur sa faisabilité technique encore moins financière ; Quel est l’objectif final ? Combien coûte le projet ? Qui va financer ? Qui gère le projet ? Où sera réalisé le Projet ? Le Projet habitat ne pourra pas être réalisable dans les conditions actuelles. Autrement dit, les questions types d’un projet ne sont même pas posées donc ne risquent pas d’avoir des réponses. Car tout le monde sait qu’à part les quelques briques exhibées à la télé un jour par le président il n’y a rien de concret sur ce projet à la date d’aujourd’hui.

3) La situation économique et financière : Où est passé le FRPC ?

a) Évolution de la situation économiqueTableau N° 2 : Indicateurs de Croissance, d’Inflation et de Construction

2005 2007 Variation à 2005Croissance économique 4,2 % -1 % -123 %Inflation 3,2 % 5 % (*) +56 %Importations Ciment 55 868 tonnes 22 525 tonnes -59,7 %Fer et acier et fonte 3 294 tonnes 2 406 tonnes -27 %

Source : Rapport Banque Centrale 2007 et estimation (*)

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La situation économique aux Comores s’est fortement détériorée durant les deux années de pouvoir de Sambi. L’activité économique a été marquée par des pénuries au niveau de principaux produits de base, tels que le riz, et le ciment, par la persistance des délestages dans la distribution d’énergie électrique, et par la pénurie sur l’alimentation en eau potable. C’est dans cet environnement économique difficile marqué par une crise politique (lié à un problème électoral à Anjouan), par une crise financière (due à la suspension des crédits à l’économie de la BIC : principale institution bancaire fournissant 80 % des crédits à l’économie), et par une crise sociale marquée par des grèves prolongées dans les secteurs sociaux (Éducation et Santé) que le Pays vit un des moments difficiles de son histoire économique.

Le taux de croissance officiel du PIB, initialement prévu à 3 %, a été revu à la baisse et se situerait à -1 % (source FMI), contre 1,2 % en 2006 et 4,2 % en 2005. Le chiffre officiel de 0,8 % est au-delà des réalités économiques qu’ont connues les Comores en 2007. Les difficultés rencontrées par le secteur des BTP, paralysé par la pénurie du ciment ; la forte dégradation du réseau routier ; le délestage quasi quotidien de l’énergie ; la baisse générale des activités économiques reflétées par la chute de 35 % des importations en volume (140 millions de tonnes en 2007 au lieu de 202 millions de tonnes en 2006) ; et la chute de plus de 75 % des crédits à l’économie ne peuvent se traduire que par des forts impacts négatifs sur la croissance. Donc selon toute vraisemblance, la richesse du Pays en 2007 n’a pu que chuter par rapport à son niveau de 2006 ; d’où le taux de croissance de 2007 ne peut être que négatif quelle que soit la méthode d’estimation.

Les chiffres encore très provisoires sur l’évolution des Prix, affichent un taux d’inflation de 5 % après 3,4 % en 2006, et 3 % en 2005 ; en dépit des hausses de prix observées sur certaines catégories de produits, tel que la farine, les huiles, le lait, le poulet… etc. Et pourtant l’environnement mondial a été favorable avec l’appréciation de l’euro par rapport au dollar (principale monnaie d’échange). Cette appréciation de l’euro a fortement réduit les coûts des importations, notamment de produits pétroliers qui, en dépit de la flambée des prix sur les marchés internationaux, n’ont enregistré aucune modification des prix domestiques à la pompe. Malgré ce climat mondial favorable aux pays de la zone Euro (dont les principales activités sont fondées sur la base des importations en dollar), les Comores n’ont pas pu tirer profit de cet avantage ; et n’a pas pu contenir le taux d’inflation.

b) La situation des Finances Publiques et le Programme FRPC avec le FMI

Prévu pour entrer en vigueur depuis septembre 2006, le Programme FRPC est renvoyé aux calendes grecques. Rappelons que le dernier rapport d’évaluation du FMI (avant le pouvoir de Sambi), de décembre 2005 avait jugé satisfaisant tous les repères structurels et conjoncturels du Programme de Surveillance ; et que selon toute logique, le Programme FRPC était à notre portée depuis cette date. Néanmoins, la conclusion d’un Programme FRPC nécessitait à l’époque l’engagement d’un Gouvernement de long terme ; ce qui n’était pas le cas pour le gouvernement sortant (son mandat se terminait 5 mois plus tard). Tous les pronostics du FMI comme des autorités comoriennes portaient sur un Programme FRPC en juin 2006 (juste après l’investiture du Président Sambi).

Deux ans de pouvoir, toujours rien ; le principe d’un budget unique et d’un compte commun est abandonné. Les quotas entre les îles et l’Union ne sont plus respectés. Bref tous les efforts déployés par les Comoriens avec l’appui des experts internationaux, notamment ceux du FMI, pour mettre en place une gestion efficace des finances publiques, conforme à notre Constitution sont abandonnés. Et grande fut l’interrogation des citoyens lorsque lors de la dernière mission du FMI (décembre 2007), aucun aide-mémoire n’a été laissée, sur recommandation semble – t-il  du Gouvernement « pour ne pas dévoiler au public les mauvaises performances des indicateurs de Bilan de deux ans de Pouvoir Sambi

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suivi ». À quand le FRPC ? Peut-on encore espérer à une réduction de notre dette globale sur la base de l’IPPTE dont les Comores sont admissibles depuis juillet 2001 ?

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Tableau N° 2 : Évolution des Indicateurs économiques et financiers

2005 2006 2007Taux de variation

par rapport à 2005

En milliards de FC

Total recettes 23 972 21 555 19 576 -18 %Salaires 12 872 13 205 15 720 +22 %Investissements sur fonds propres 1 411 1 250 556 -60,6 %% salaires des recettes 54 % 61 % 80 %Solde Primaire 1 650 -1 859 -3 919 -337,5 %PIB / Tête en FC par an 145 156 143 936 139 565 -3,9 %Croissance économique 4,23 % 1,2 % -1 % -123,6 %Taxe Produits Pétroliers versées par SCH 2 0541 527 1 385 -32,6 %Source : TOFE Ministère des Finances/ FMI

Au regard des données du tableau ci dessus, on peut noter que durant les deux années de pouvoir de Sambi, la gestion des affaires publiques a conduit aux résultats ci après :

- Les Recettes de 2007 ont chuté de – 9 % par rapport à celles de 2006 et de – 18 % par rapport à celles de 2005 ; cette baisse de recettes n’est pas justifiable dans la mesure où les importations (sources de 80 % des recettes) ont augmenté en valeur en 2007 : de +7 % par rapport à 2006 et de +16 % par rapport à 2005. Ce qui laisse présager qu’une forte évasion fiscale surtout douanière est à l’origine de cette baisse spectaculaire des recettes de l’État en 2007.

- La masse salariale a augmenté de +19 % par rapport à celle de 2006 et de +22 % par rapport à celle de 2005. En 2007, la masse salariale représentait 80 % du total des recettes (contre 53 % des recettes en 2005). Résultats des recrutements et nominations abusives.

- Les dépenses de missions à l’extérieur comme à, l’intérieur durant la période 2007 et jusqu’en 2008 ont atteint des sommets jamais égalés par le passé.

- Les investissements sur fonds propres ont chuté de – 55 % par rapport à son niveau de 2006 et de – 61 % par rapport à la valeur des investissements sur fonds propres de 2005. Il faut noter que le fort taux d’investissement sur fonds propres de 2005 à mai  2006 est essentiellement orienté à la Construction de l’Université des Comores.

- Le solde primaire de 2007 est largement déficitaire avec – 2,8 milliards de déficit primaire, contre – 1,8 milliards en 2006 et un excédant primaire de +1,6 milliards en 2005.

Derrière ce tableau, se cache une réalité sociale inédite ; les fonctionnaires cumulent leur cinquième mois d’arriérés de salaires pour les deux dernières années. Si on rajoute les mois d’avril et mai  2006 non payés par le pouvoir Sambi, cela nous ramène à 7 mois d’arriérés de salaires. Depuis décembre 2007, les fonctionnaires ne sont pas payés. Les retraités cumulent 9 mois d’arriérés de paiement. Il convient de rappeler qu’avant la prise de pouvoir de Sambi, les retraités étaient payés régulièrement, et qu’ils avaient même bénéficié de paiements de 23 mois de leurs arriérés cumulés avant 1999.

Le gonflement des arriérés de paiement de salaire est observé aujourd’hui malgré un endettement intérieur massif de l’État auprès de la SNPSF, des autres institutions financières de l’État ; l’objectif initial de cet endettement était de pouvoir payer régulièrement les salaires. Les données récentes sur

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la masse salariale sont alarmantes ; elle serait passée de 1 milliards mensuelle en 2005 (Anjouan compris) à 2 milliards mensuel (2008). Les autorités actuelles font la course au recrutement massif et à la multiplication des nominations dans les superstructures, dont les conséquences sont le gonflement de la masse salariale. Rien que la masse salariale du Ministère des Affaires Étrangères est passée de 34 milliards à 50 milliards actuellement avec les nominations des ambassadeurs, consuls et autre personnel affecté à l’extérieur.

Autre indicateur important : la Taxe Unique sur les Produits Pétroliers (TUPP) versée par la SCH à l’État :

En 2005, période qualifiée par le pouvoir Sambi de gestion chaotique des deniers de l’État, la SCH a versé plus de 3 milliards et quatre millions de FC dans les caisses de l’État, répartis entre TUPP, IBD et recettes de service. La SCH a également renforcé sa crédibilité en réglant toute sa dette auprès de ses fournisseurs à hauteur de 500 000 000 FC. En 2007, cette dernière n’a versé que 1,3 milliards de FC. Une baisse de -33 % des taxes uniques au moment où la valeur des importations des produits pétroliers a augmenté de + 8 % (source rapport de la BCC de 2007). Selon toute logique, plus de valeur à l’importation engendre plus de taxe unique, et pourtant ce qui s’est produit est l’inverse. Ceci montre que la SCH fait face à une gestion loin d’être meilleure à celle de 2005 ; et selon les mêmes autorités actuelles la survie de la SCH est devenue aléatoire. Il est à noter que depuis 2006, le Conseil d’Administration de la SCH ne s’est pas réuni. Dans ce cas qu’en est-il de la certification des comptes et des bilans.La rupture récente du contrat entre la SCH et son fournisseur TOTAL au bénéfice d’un fournisseur iranien a engendré un endettement de la SCH de 2,5 milliards de FC pour un paiement cash à TOTAL afin d’honorer la dernière cargaison de fuel. Ce qui alourdit encore plus davantage la dette de la SCH.

Ainsi, les indicateurs susmentionnés montrent l’état chaotique où se trouvent nos finances publiques. C’est aussi l’expression d’une gestion catastrophique de ceux qui aujourd’hui veulent donner une leçon de morale à leurs prédécesseurs. Si pour le bilan 2006, les détenteurs du pouvoir actuel justifiaient leur mauvaise gestion par « des caisses vides à leur prise de fonction », aujourd’hui, on ne sait pas trop ce que les autorités actuelles diront, car elles sont censées détenir toutes les caisses de l’État.

On se souvient que le Président Sambi avait annoncé partout au lendemain de sa prise de fonction que les caisses de l’État étaient vides. Il convient de rappeler que contrairement à ces allégations, le régime du Président Sambi s’est retrouvé au moment de son installation au pouvoir des ressources financières suivantes :

450 millions de taxes uniques sur le riz, Plus de 500 millions de taxes sur la SCH pour les produits pétroliers de 2006 et un reliquat

de 2005, 400 millions au titre du fonds Walid sur l’énergie des avances statutaires non utilisées de 2006 (équivalent à 2 milliards de FC par an) et qui

ont d’ailleurs permis au pouvoir actuel de mettre en place le mécanisme de sécurisation des salaires (interrompu pour surendettement intérieur de l’État auprès de la SNPSF) ;

des IBD de la SCH et Comores Télécom de près de 2,5 milliards, des sociétés d’État en très bonne santé avec des trésoreries florissantes. La trésorerie léguée

au pouvoir actuel par Comores Télécom était d’au moins 3   milliards de FC dans les comptes extérieurs de Comores Télécoms.

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Enfin, inutile de préciser qu’une gestion efficace, ce n’est pas conserver des « caisses pleines d’argent », au contraire un bon gestionnaire est celui qui sait utiliser l’argent au maximum avec efficience. La question que la population devrait se poser serait plutôt de savoir comment l’argent public a été utilisé ?

4) Lutte contre la Pauvreté : Combien de nouveaux emplois créés ?

Peut - on dire qu’entre mai 2006 et mai 2008, la Pauvreté a diminué chez les Comoriens ? Y aurait-il durant cette période amélioration des revenus des Comoriens, autrement dit, plus de création d’emplois suffisants pour couvrir la croissance démographique de 2,1 % par an. Une Enquête auprès des ménages nous dirait plus davantage sur l’évolution des revenus et de l’emploi. Mais en l’absence des Statistiques sur l’emploi, l’on connaît, que chaque année près de 2000 jeunes se présentent sur le marché de l’emploi, venant se rajouter à l’effectif des chômeurs. Autrement dit, depuis mai 2006, 4 000 nouveaux demandeurs d’emploi se sont présentés sur le marché de l’emploi. Sachant que la situation économique s’est détériorée en 2007 (baisse généralisée des activités de croissance et la tendance à la baisse de la croissance économique depuis 2006), il est évident que le chômage a plutôt augmenté ces deux dernières années. Car une récession de - 1 % (observée en 2007), se traduit par des pertes d’emplois d’environ – 1 %. La création d’emplois annoncée par le Président Sambi est ainsi devenue un leurre, car au vu de la situation macroéconomique ci dessus décrite, aucun nouvel emploi n’est réellement créé durant ces deux dernières années.L’agriculture et la pêche sont les secteurs qui emploient le plus des Comoriens (80 % de l’emploi). Plus de 70 % des pauvres sont dans l’agriculture et la pêche. La chute du prix de la vanille (25 000 FC le Kg en 2003 à 1 000 FC le Kg aujourd’hui) a appauvri des milliers de familles qui vivent de l’Agriculture de rente. Face à ce « désastre agricole », le gouvernement n’a pris aucune mesure et n’a envisagé aucune politique.

Par ailleurs, le tableau ci dessus montre que le PIB par tête est passé de 145 156 FC par an en 2005 à 139 565 FC par an en 2007 (Source : FMI) ; soit une baisse des revenus par tête de -3,8 % en l’espace de 2 ans. Ce qui confirme la détérioration du niveau des revenus des Comoriens ces deux dernières années ;

Dans ces conditions de détérioration généralisée, on ne peut que se demander de quelle lutte contre la pauvreté le Président Sambi faisait – t-il allusion ?

Il convient de rappeler que face au problème de la pauvreté, le régime du Président Azali avait privilégié une politique d’investissements dans les infrastructures de base pour permettre au secteur privé (source de création d’emplois) de se développer. C’est ainsi que pour la première fois dans l’histoire des Comores indépendants, de gros investissements ont été réalisés sur fonds propres dans les secteurs stratégiques. Il s’agit : de l’énergie par l’achat d’une nouvelle centrale électrique, de l’éducation supérieure et professionnelle par la création de la toute première Université des Comores, de la communication par la mise en service de la téléphonie mobile et la vulgarisation des cabines téléphoniques et du secteur routier par le désenclavement de certaines localités. Le coût total des investissements sur fonds propres de 1999 à 2005, s’élevait à 16,5 milliards de FC, plaçant ainsi l’État Comorien au deuxième rang (derrière la Banque mondiale : 17,3 milliards de FC) dans le classement des bailleurs de fonds qui ont financé les investissements aux Comores durant cette période.

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5) Le Social : Éducation et Santé

L’enseignement primaire et secondaire a enregistré 6 mois de grèves qui se sont traduites par la fermeture de tous les établissements publics. Si nous nous référons à 9 mois de période scolaire, sans aucun doute, il ne reste que 3 mois de scolarité dans l’année. Autrement dit, l’année scolaire 2007 – 2008 est une année blanche qui ne dit pas son nom. Nous savons que tous les ans, la population augmente en moyenne de 12 000 personnes. Les constructions de nouvelles salles de classe dans le Primaire et le Secondaire doivent être une priorité du Gouvernement. Rappelons que ces constructions avec celles de nouveaux bâtiments de l’Université des Comores sont prévues dans le Plan d’Action 2006 – 2009 du DSRP présenté à la Conférence des bailleurs de fonds de Maurice en 2005. Malheureusement, cette préoccupation n’est pas celle du gouvernement actuel.

Alors qu’avec le régime précédent, Le spectre des années blanches avait complètement disparu ; les grèves dans l’enseignement étaient rares, les rentrées scolaires avaient lieu normalement, les examens de fin d’année se déroulaient régulièrement. Des conseils d’école et d’administration ont été mis en place dans tous les établissements primaires, secondaires, supérieurs et professionnels. Le livret scolaire a été généralisé. La première édition du Forum des métiers et d’orientation avait débuté à ces moments-là.

L’Université des Comores qui forme les jeunes responsables comoriens de demain (autrement dit le devenir de notre Pays) est délaissée par le pouvoir actuel. Le Plan d’investissement progressif qui animait l’esprit des fondateurs de l’Université des Comores ne trouve plus de répondants. Après la suppression des taxes spéciales en faveur de l’Université, aucune autre mesure compensatoire n’a été prise par l’actuel pouvoir, ôtant ainsi à l’Université des Comores des capacités qui lui permettraient de pouvoir améliorer sa qualité et s’épanouir pour atteindre les niveaux d’efficacité des Universités à travers le monde. Les étudiants galèrent faute de matériels et outils pédagogiques suffisants. Le restaurant universitaire, l’amphithéâtre et les laboratoires prévus au moment de sa création n’ont toujours pas vu le jour faute de suivi auprès du bailleur. Les enseignants de l’Université autrefois qualifiés de « notables » car bénéficiant à l’époque d’un statut spécial et privilégié sont aujourd’hui plus mal traités que les autres fonctionnaires de l’État. Ils totalisent 5 mois d’arriérés ; Le pouvoir actuel est il en train de tuer à petit feu l’Université. Autrement dit l’avenir de notre Pays ?

Le secteur de la Santé n’est pas épargné par la crise sociale. Mis à part les grèves incessantes, des pénuries de produits de soins de base (réactifs, médicaments essentiels) sont monnaies courantes dans les centres de santé et hospitaliers de l’ensemble des pays, et en particulier l’hôpital El Maarouf et l’hôpital de Hombo ; des dysfonctionnements graves qui mettent en péril la vie de tous les jours des pauvres Comoriens. Si durant la période allant de 1999 à 2006, le pays a connu des constructions/ réhabilitations ainsi que l’équipement de tous les centres de santé et hôpitaux (sans exception), il est difficile de comprendre que le pouvoir actuel ne parvient même pas à entretenir ce qui a été construit. Une action facile lorsque nous savons que la Conférence de Maurice avait dégagé des fonds pour la Santé ; rien que pour La Coopération française, avait prévu près de 20 millions d’euros sont destinés à la Santé. Les états généraux récemment organisés sur l’Hôpital El Maarouf ressemblent à une montagne qui a accouché d’une souris. En effet, l’on s’attendait à ce qu’après ces assises, le Président Sambi nomme à la tête de cet établissement de référence un responsable compétent ayant le profil requis pour mener à bien les recommandations qui y sont formulées ; c’est la surprise totale lorsque la population a appris la nomination d’un des proches du régime dont, ni l’expérience, ni la compétence encore moins le profil ne correspondent aux recommandations des états généraux.

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2e Partie : La Justice et les Affaires

1) Une Justice équitable et impartiale ?

Le Président Sambi a promis une justice sociale pour tous. Une justice indépendante et impartiale. Deux ans après, le pouvoir se targue d’avoir accompli sa mission.La question que tout un chacun se pose est de savoir quels sont les critères d’une justice indépendante et impartiale ? Pour les fervents adeptes de la séparation des Pouvoirs, la notion d’indépendance du pouvoir judiciaire se lit par rapport au Pouvoir exécutif. Ainsi, le pouvoir judiciaire devrait être aux yeux de la population, la vitrine du droit où l’État n’impose pas son point de vue, où les magistrats exercent pleinement leurs fonctions sans aucune entrave sur les dossiers et qu’ils délibèrent en toute indépendance. La notion d’impartialité comme le mot l’indique concerne le champ d’application de la justice qui n’a pas de frontière politique ou de considérations partisanes pour un même délit. Ainsi, il n’est pas permis de condamner X pour un délit sachant que Y ayant commis le même délit est libre. C’est en ce sens que l’on trouve, dans les annales judiciaires la notion de jurisprudence. En toute objectivité, Peut-on aujourd’hui affirmer que les magistrats comoriens délibèrent en toute indépendance sans ingérence de l’exécutif et qu’ils condamnent à la même peine tous ceux qui ont commis le même délit ?

Autrement dit, la justice est-elle indépendante et impartiale ?

L’appareil judiciaire comorien tel que nous connaissons est encore loin de cette image ; il est devenu l’instrument du pouvoir exécutif où peuvent à tout moment être licenciés tous ceux qui ne suivent pas la règle du pouvoir. Nous avons tous observé, récemment le limogeage par le Chef de l’État de deux hauts magistrats pour n’avoir pas suivi les instructions du gouvernement dans l’Affaire BIC/NICOM. Dès lors, le Président Sambi n’a cessé de vilipender publiquement la justice en qualifiant les juges qui ne suivent pas ses instructions de « mercenaires » qui devraient être remplacés par des juges étrangers. Une façon d’intimider en permanence le corps magistral afin que celui-ci, soit sous les ordres totaux du pouvoir.

Les emprisonnements politiques de deux Secrétaires généraux de la CRC, Abodo Soefo et Houmed Msaidié témoignent de l’instrumentalisation par le pouvoir actuel de l’appareil judiciaire.Comment expliquer que le Pouvoir de Sambi a emprisonné les dirigeants de la CRC parce que semble-t-il « n’auraient pas respecté les procédures de gestion de la SCH », pendant que tout le monde sait la manière dont sont gérées actuellement les sociétés d’État, notamment, la SCH. Aussi la gestion des fonds publics y comprises les aides constitue une source de préoccupation.

Mis à part, les informations révélées dans ce rapport sur la gestion financière catastrophique, jamais cette société n’a connu d’aussi nombreuses « Affaires louches » que durant ces deux dernières années. Pour ne citer que « l’affaire Nestair », du nom de la société qui rappelons le, commercialisait les produits pétroliers et encaissait l’argent en violation des lois, des textes et au mépris des Comoriens. Les auteurs présumés de ce « cambriolage au sein de la SCH » sont libres et certains continuent toujours à briguer des hautes fonctions gouvernementales. Les vices de procédures (utilisation à la source de la taxe SCH) sont monnaies courantes ; et pire aucun responsable financier n’ose procéder à leurs régularisations par peur de se retrouver demain en prison. Alors pourquoi, emprisonner Soefou, Msaidié et Oubedi et acquitter ceux du pouvoir ? D’autant plus que pour les trois ex-ministres, aucune charge judiciaire pour un « enrichissement personnel » ne pèse sur eux. Ils sont victimes d’avoir appartenu à une époque à un pouvoir, d’avoir été des hauts responsables politiques. Autrement dit, ils sont plutôt victimes de leurs noms. Le citoyen comorien est en droit de se demander qui étaient « les experts-comptables indépendants » mandatés par le pouvoir de Sambi pour auditer la SCH dont le rapport est à l’origine de

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l’emprisonnement des dirigeants de la CRC ? La réponse est claire : ils ne sont rien d’autres que les dignitaires du régime Sambi qui n’avaient comme seul objectif et instruction que de jeter en Prison les hauts responsables politiques de l’ex régime. Le cas le plus flagrant c’est le cas de Salim Ben Ali, financier de la campagne de Sambi, Président de la Commission d’Audit de la SCH, promu ensuite Président de la Commission de la SCH (compensation pour avoir rédigé un rapport permettant d’inculper les dirigeants de la CRC) ; pour se retrouver ensuite en Prison pour l’affaire Nestair et puis libéré parce que proche du pouvoir. Est-ce, cela l’indépendance de l’instruction ? Que peut représenter ce rapport partisan, non objectif, et non conforme à un audit car non professionnel et sur la base duquel la justice a prononcé ses peines contre les dirigeants de la CRC ?

Et pour couronner « la vraie indépendance de la justice » tel qu’il la conçoit, le Président Sambi s’est rendu en personne au Palais de la justice au lendemain de l’ouverture du Procès des dirigeants de la CRC. Au nom de la séparation des pouvoirs, les Comores n’ont jamais vécu un acte d’ingérence aussi flagrante de ce type, de la part d’un président de la République. Quel message aurait donné le Président Sambi au siège du Palais de Justice, aux magistrats en charge du Procès des dirigeants de la CRC en plein Procès ? L’histoire en dira davantage. Ce qui est sûr, c’est que tous les présumés ont écopé des lourdes peines allant jusqu’à 4 ans de prison ferme.

La population rappelle ainsi à leur Président, que la justice indépendante qu’il a promise ne veut pas dire « emprisonnement de tous ceux qui s’opposent à lui ». On attend plus de son combat de « lutte contre la corruption » des actions dirigées vers ceux qui profitant, actuellement, du pouvoir, transgressent toutes les lois et règlement pour se livrer à de courses pour des enrichissements personnels au vu et au su des citoyens. Comme le dit l’adage « charité bien ordonné commence par soi-même ». On nettoie d’abord la maison avant de jeter un coup d’œil chez le voisin. Il n’est point un secret pour personne que les « Affaires » se sont multipliées durant ces dernières années, qui parfois ont créé des crises au sommet de l’État. Face à ces cas avérés de corruption, la justice comorienne est muette.

2) L’Affairisme / Corruption

La lutte contre la corruption prônée par le candidat Sambi n’est qu’une chimère. Le régime actuel est devenu un terreau de corruption, d’affaires et de malversations. Est considérée comme Affaire, toute transaction financière avec en violation des lois et règles en vigueur et octroie de marchés publics sans appel d’offres. Ainsi les transactions financières avec NESTAIR et TREIZE RAJAB et l’attribution des marchés notamment du riz, des véhicules et des Hydrocarbures ne font qu’éloigner le pays de la feuille de campagne de Sambi. Les actions accordées aux proches du régime et aux membres des familles du premier cercle des gouvernants dans les sociétés écrans comme celle d’ALMARWAN prouvent que le régime s’est inscrit dans la logique de la corruption et de l’affairisme. Les millions de dollar offert par l’Arabie Saoudite, l’Iran et l’Emirat de Sharjah, dans le cadre du projet « Habitat » sont apparemment orientés à d’autres fins et gérés dans l’opacité totale malgré les interpellations du président de l’Assemblée et des chefs des Exécutifs des îles.

Ces affaires sont généralement tenues secrètes. C’est pourquoi, sans vouloir être exhaustif (car beaucoup d’affaires sont ultraconfidentiels), nous ne listons ici que celles connues du grand public.

1) Affaire Nestair : Contrat de Vente des produits pétroliers de la SCH par la société Nestair en violation de la loi sur la privatisation. L’implication de hauts dignitaires du régime Sambi est dénoncée publiquement par le Président Sambi sans qu’aucune suite judiciaire ne soit engagée.

2) Affaire ONICOR ; Des privés proches du pouvoir importent du riz ordinaire sans appel d’offres en violation de la loi sur le monopole d’importation de l’ONICOR sur le riz ordinaire.

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3) Affaire Projet Habitat : L’aide de l’Arabie Saoudite d’un montant de 5 millions de $ n’a été ni budgétisé ni géré par la Comptabilité publique (Trésor Public) seule entité habileté à encaisser et à décaisser de l’argent public.

a. Quelle est la somme utilisée ?b. Qui est le détenteur du chéquier ?c. Combien reste – t-il ?d. Pourquoi ce montant d’Aide destiné à un projet aussi « important » n’est pas

répertorié dans le budget de l’État ?

4) Affaire « Achats de ciment par un Privé » : Le gouvernement a conclu avec un privé un contrat d’achat de ciment (800 millions de FC) sans que le ciment ne soit réellement acheté :

a. C’est la première fois dans l’histoire récente qu’on voit un État donner de l’argent public à un privé pour une activité réservée exclusivement à des privés.

b. L’argent n’a été ni décaissé ni reversé au Trésor Publicc. Le privé a gardé l’argent public plus de 6 mois avant que le gouvernement ne lui

demandât sa restitution. Qu’a pu faire le Privé de cet argent, sachant qu’un placement de cet argent pendant 6 mois rapporterait plus de 100 millions de FC d’intérêts ?

5) Affaire « Voiture officielle » : Les voitures officielles du gouvernement sont achetées auprès d’un privé (proche du pouvoir) par compensation de dette ONICOR. Les voitures du gouvernement sont achetées sans appel d’offres et à des prix défiant toute concurrence.

6) Affaire « Vente de Galawa Beach » Le complexe hôtelier, le Galawa Beach est vendu à des hommes d’affaires arabes sans appel d’offres et sans cahier de charge : C’est la première fois dans l’histoire des Comores qu’un patrimoine de l’État est vendu à un particulier et sans appel d’offres ; À quel prix ?

7) Affaire « Treize Radjabous » : Au nom d’un homme d’affaires indien domicilié en Tanzanie et qui par ses relations avec les hauts dignitaires du pouvoir actuel est autorisé par ce dernier à faire des transactions en violation flagrante de la loi régissant les opérateurs privés aux Comores.

8) Affaire « Al Marwan » : Du nom de l’opérateur qui gère la manutention portuaire. C’est la première aux Comores, qu’on observe un privé s’engager ouvertement et en public à soutenir financièrement un pouvoir politique par la confection « gratuite » de plusieurs portraits géants du Président Sambi (interdit par le Code pénal comorien).

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Conclusion sur la réalisation des grands objectifs du Président Sambi :

Deux ans se sont écoulés, et le miracle économique et social tant promis ne s’est pas produit. La revue à mi-parcours du Programme Sambi ressemble plus à des illusions qu’à des réalisations. Aucune des promesses annoncées n’a été réalisée :

Personne, parmi les démunis n’a pu bénéficier d’une maison issue du « Projet habitat » ; La Justice loin d’être indépendante et impartiale est devenue un « instrument » entre les

mains du pouvoir où l’ingérence quasi permanente du pouvoir devient insupportable ; les juges sont qualifiés de « mercenaires » par le pouvoir.

La Lutte contre la pauvreté et l’emploi s’est transformée en un calvaire marqué par l’aggravation de la pauvreté, l’augmentation du chômage, la baisse du pouvoir d’achat due à la montée vertigineuse des prix.

La récession économique a encore aggravé les difficultés liées à la vie au quotidien et a appauvri davantage la population en creusant davantage le fossé des chômeurs.

Aucun des projets promis par le pouvoir Sambi n’a pu démarrer. Les seuls projets dont le pouvoir tire un certain succès politique sont ceux qui ont été initiés et conclus par l’ancien régime (dont les accords ont été signés par le pouvoir passé). On peut citer :

 Les projets de mise en place des Banques « Exim Bank », « Banque Fédérale des Comores » ; « SNPSF »,

 La construction d’un village touristique à Nyamaoui

 Le projet de réfection des routes (les 34 000 tonnes de bitume ont été octroyés en mars 2005 par la Lybie.

 L’achèvement la nouvelle aérogare et la clôture de l’Aéroport Hahaya dont le financement a été aussi obtenu lors de la visite d’État du Président Azali en Chine en 2003.

 La bibliothèque de l’Université des Comores a été négociée avec la Lybie et le financement obtenu au temps du régime passé ;

En dehors de ces anciens projets qui sont en cours de réalisation, les projets propres au pouvoir Sambi demeurent des promesses sans suite. Ce qui est surprenant, c’est que même le projet d’un complexe hôtelier (5 Étoiles) avec un financement de la LAICO et dont la construction était prévue dans la Région de Bambao (Séléa) n’a pas pu se faire pour une affaire banale d’un terrain qui appartiendrait à un dignitaire du pouvoir actuel.

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3e Partie : Situation diplomatique et politique

1) La situation diplomatique

La diplomatie est à l’image de la politique interne. La diplomatie ne peut pas être rythmée par de l’incantation, de l’incohérence encore moins de cafouillage.Tout gouvernement devrait arriver à cerner la réalité de la situation internationale, mesurer le poids et les atouts de notre pays pour mieux appréhender les enjeux et les finalités de toute action.Le pays, longtemps considéré comme un havre de paix avait inscrit la paix comme priorité dans sa politique étrangère malgré les multiples crises qui l’ont secoué. La diplomatie et les négociations politiques avaient toujours prévalu dans le règlement des crises comoriennes, notamment, en 1989,1995 et en 2001. Le débarquement militaire à Anjouan en mars 2008 et la présence des militaires étrangers dans le pays lui confèrent le statut d’un pays à tension au même titre que l‘Afghanistan, l‘Irak, la Corée du Nord, le Cachemire….; ce qui n’est pas réellement le cas sur le terrain. Dès le jour où les militaires étrangers ont foulé le sol comorien la diplomatie comorienne a cessé d’exister.

La diplomatie de moustique n’a jamais payé encore moins de nos jours. Tourbillonner et harceler sans aucune chance de peser sur les événements, finit par irriter, conduire à la catastrophe pour un pays limité, épuisé par le dogmatisme et le populisme.Qu’on cesse de prétendre que ce pays n’a retrouvé le concert des nations que, depuis seulement deux ans car ce n’est vraiment pas sérieux, ça relève même de la malhonnêteté intellectuelle et c’est une insulte très grave à nos aînés qui se sont dépensés sans compter pour nous laisser ce beau pays. Notre pays comme n’importe lequel a eu des hauts et des bas et le rôle de tout gouvernant consiste à relever les défis qui n’arrêteront pas de se poser tant que l’on vit. Si besoin est, on peut citer l’exemple récent de la table ronde des bailleurs de fonds sur les Comores de 2005 à l’île Maurice et les élections présidentielles de 2006. La forte mobilisation de la communauté internationale lors de ces deux événements et surtout la forte participation à cette table ronde, des pays parmi lesquels les cinq membres du conseil de sécurité, plus les organisations internationales dont l’UA, l’ONU, la LEA, l’OIF n’est pas le fruit du hasard. Les nouveaux dirigeants arrivés aux responsabilités avec arrogance et suffisance, ont cru que l’onction du suffrage universel les exonérait de la réflexion nécessaire, de recul suffisant et de l’attention souhaitée pour dessiner et orienter le destin des Comoriens.

Ils ont fait fi de l’héritage de leurs prédécesseurs, surtout dans les dossiers aussi brûlants. Ils l’ont honni, rejeté, caricaturé, et dénoncé, souvent d’une façon vulgaire et haineuse. Pourtant, ils ont fini par comprendre qu’il fallait regarder en arrière pour s’en inspirer, mais il était trop tard. Le mal était fait ; la diplomatie a ses règles et ses codes ; il faut les connaître et les maîtriser avant de parler ou d’agirLa question de Mayotte depuis 1975 n’a pas bougé d’un pouce dans le sens de nos intérêts et est restée immobile et ce malgré les efforts louables et les esquisses de règlement des différents régimes qui se sont succédé auxquels il faut rendre hommage.

Le régime précédent par pragmatisme et réalisme, conscient que seul le dialogue direct avec la France, aussi difficile et long soit-il, pourra véritablement créer le chemin des retrouvailles entre les îles de l’Archipel des Comores a opté pour un changement de stratégie. La Communauté internationale peut accompagner, encourager voire conseiller. Mais jamais, elle ne saurait imposer une solution pour le peuple comorien. L’histoire des règlements de conflits, la vérité des relations internationales nous l’enseignent et surtout depuis 1990, après la chute du mur de Berlin. Aucune question analogue à la nôtre n’a trouvé de solutions que parce que les deux parties ont accepté finalement de s’asseoir et d’en discuter. L’un des conflits les plus dramatiques de nos temps, celui

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israélo-palestinien, n’a trouvé de début de solution que parce que les parties ont commencé à se parler à Oslo en 1993. C’est pourquoi, il a alors créé les conditions d’un dialogue franc et sincère avec la France, étalé dans le temps, avec des étapes à franchir et des revues à mi-parcours. Le Pays a gardé toute sa liberté et pourrait se retirer de ce dialogue à tout moment. Le gouvernement n’a pas rendu public la démarche dans sa globalité parce que la diplomatie ne se fait pas dans la rue. Pour plus d’efficacité, il fallait une discrétion et de la rigueur.L’interprétation qui en a été faite par ceux qui n’avaient pas d’autres choix que la politique de la terre brûlée est scandaleuse. La question de Mayotte n’a jamais été retirée de l’ordre du jour de l’Assemblée Générale des Nations Unies. Personne ne peut le prouver. Il a été décidé de continuer de s’abstenir du débat sur la question pendant deux ans ; c’est-à-dire deux sessions, 2006 et 2007 pour garantir une sérénité dans les discussions avec la France, sachant que le débat sur cette question est suspendu depuis 1995. L’objectif était d’éviter l’escalade et la surenchère afin de créer une atmosphère studieuse, dépassionnée parce que le gouvernement voulait des résultats. Des échanges de lettres entre les ministères des Affaires étrangères des deux pays spécifiaient formellement qu’au bout de deux ans, le gouvernement comorien se réservait le droit, s’il le jugeait utile d’actionner le débat à l’Assemblée Générale de l’ONU. Ceux qui ont tant crié et dénoncé la démarche n’ont pas su faire face à leurs responsabilités. Ils auraient pu demander la reprise des débats sur la question de Mayotte s’ils étaient cohérents envers eux-mêmes. Et ils auraient constaté le changement géopolitique opéré depuis plus de vingt ans, la mondialisation est passée par là. Les résolutions et les condamnations contre la France, restent une routine mollement soutenue, sinon en faire seulement une tribune pour le plaisir de s’en prendre aux Occidentaux. Ce qui n’avançait pas la cause comorienne.

La signature d’un accord par des autorités Comoriennes actuelles avec le préfet de Mayotte sur l’expulsion des Comoriens de cette île n’est pas acceptable et ce quelles que soient les contreparties.En ce qui concerne les jeux des îles, la position du nouveau pouvoir a été du mois très ambiguë et confuse. À force d’affrontements et de reculades instantanés, inexplicables et inexpliquées, le nouveau pouvoir a tout confondu et a tout raté pour finalement s’humilier devant tout le monde. Il ne s’agit pas de la présence du Président aux jeux d’Antananarivo. Aucun de ses homologues n’a fait le déplacement, parce que là n’est pas leur place ; mais l’incapacité de dissocier les jeux qui n’ont que seulement un caractère sportif et qui ne compromettent en rien notre droit reconnu sur l’appartenance de Mayotte aux Comores. Le pouvoir actuel aurait pu réfléchir ou se faire conseiller avant de dire une chose et son contraire.

Dans la coupe d’Europe pour ne citer que celle-là très bien suivie ici chez nous, le Royaume Uni participe dans la diversité de ses régions ou de ses îles avec une identité qui ne met pas en cause l’Unité Nationale. L’île de Zanzibar s’affirme dans des domaines qui le mettent contact avec d’autres pays avec l’autorisation du gouvernement tanzanien. Le Québec est un acteur positif de la Francophonie et cette dimension ne tue pas le Canada.

Le choix porté sur la République Islamique d’Iran dans le domaine de la coopération bilatérale par rapport au monde arabe est une réorientation brutale de la diplomatie comorienne. L’Iran, indexée par la communauté internationale pour ses agissements au Liban, au Bahreïn, aux Émirats Arabes Unis, dans le détroit d’Hormoz et le golfe arabo-persique et pour sa politique nucléaire ne peut pas être à l’instant un allié sûr et fiable.L’affaiblissement des relations de coopération et d’amitié entre les Comores et l’Afrique du Sud, cette puissance régionale qui s’est toujours solidarisée avec le pays, aussi bien sur le plan politique, diplomatique qu’économique, prouvent les limites de la diplomatie exercée par le nouveau régime.

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2) État de lieu sur l’évolution de la Réconciliation Nationale

Les Accords de Fomboni de février 2001 ont débouché sur une nouvelle constitution reflétant les aspirations de la population comorienne à savoir, une Constitution donnant une large autonomie aux îles. Cette Constitution adoptée par référendum par 80 % de la population a prévu la mise en place de toutes les institutions constitutionnelles à savoir : les Présidents de l’Union et des îles autonomes, les Assemblées de l’Union et des îles ; la Cour constitutionnelle. Au total 8 nouvelles institutions ont été mises en place à la suite de neuf élections qui se sont déroulées au niveau national et au niveau des îles. La plupart de ces élections avaient été remportées par la coalition de l’opposition autour des « Midjidjengos ». Seule institution manquante à l’arrivée de Sambi au pouvoir, est la Cour Suprême qui nécessitait « la promulgation de la loi sur la justice ». Deux ans après, la seule institution qui restait n’est toujours pas en place et pire encore, le fonctionnement normal de celles mises en place auparavant, est sévèrement atteint.Les élections présidentielles des îles prévues en juin 2007 ne sont toujours pas achevées une année plus tard (c’est la première et seule élection organisée par le pouvoir Sambi). Les élections des députés des îles de Mohéli et d’Anjouan prévues par la Constitution pour avoir lieu en mars 2008 sont aux oubliettes. Les artisans de la Réconciliation Nationale sont jetés en Prison, les autres sont traqués et certains ont pris le chemin de l’exil. Si réconciliation nationale veut dire « respect des institutions démocratiques » et « Rassemblement des Comoriens quelles que soit leurs opinions », alors le Président Sambi a encore du chemin à parcourir.

3) Des institutions malmenées

a. La Cour constitutionnelle qui, entre sa mise en place effective et mai 2006 (élections du Président Sambi), avait acquis ses titres de noblesse en affirmant, par ses actes et sa crédibilité, son indépendance vis-à-vis du pouvoir exécutif, a été, en quelques mois, mise au pas. Il n’est aujourd’hui, guère plus qu’une chambre d’enregistrement des desiderata du Président Sambi.

Le limogeage illégal du précédent Président de cette institution, qui était représentant de l’Île d’Anjouan, n’a pas été étranger à la dégradation des relations entre le pouvoir central et celui de cette Île.

Faut-il rappeler que Sourette contrairement à son ancien collègue Abdoulmadjid qui de par les manœuvres du pouvoir à vouloir bâillonner la haute institution a préféré se retirer et d’ailleurs nous en profitons pour saluer cet homme intègre dont l’honnêteté intellectuelle est connue de tous a démontré encore une fois son sens du respect du droit. Sourette qui était bel et bien le président de la cour a été évincé, suivant une procédure dont la légalité reste contestable et jusqu’à l’heur d’aujourd’hui il n’a pas été remplacé. Et ça a l’air de déranger personne, même pas nos grands donneurs de leçons qui semblent s’y conformer. Nous ne pensons pas qu’il faille sortir d’une quelconque école de droit pour conclure que conformément à notre constitution qui a fixé le nombre des membres à sept, la cour qui est réduite maintenant à six membres, toutes les décisions prises depuis sont toutes anticonstitutionnelles.

Il s’ensuit que « l’élection » de son successeur ainsi que tous les actes pris par la suite par cette institution, sensé être le gardien de la constitutionnalité de la loi et des règlements, sont sujets à caution et entachés d’inconstitutionnalité, sinon d’illégalité.

b. Prolongation juridiquement illégal et politiquement contestable des mandats des Assemblés de Ndzouani et de Mwali par décret présidentiel.

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c. Agressions verbales répétées du président de la République contre les institutions judiciaires : Le Chef de l’État s’attaque régulièrement et publiquement aux cours, aux tribunaux et aux magistrats qu’il qualifie de « mercenaires » parce que les uns après les autres ont eu le courage de prononcer des jugements contraires aux intérêts du pouvoir.

d. Le Président Sambi dissout, en dehors de toute légalité, la chambre d’accusation qui avait décidé la mise en liberté provisoire des dirigeants du Parti CRC que le pouvoir voulait à tout prix garder en prison.

e. Le président de la République a annoncé son intention, vite traduit par un projet de loi, de faire venir des magistrats étrangers pour remplacer les nationaux qu’il estime corrompus et au service d’intérêts inavouables.

f. Les nominations des Directeurs Généraux de la société d’État et des établissements publics sont illégales : En effet, les nominations des Directeurs Généraux de la SCH, de l’ONICOR, de la MA-MWE et d’autres encore, ont délibérément violé la loi sur l’article 9 de la constitution qui fixe les modalités de nomination dans les sociétés d’État (sur la base des propositions des Conseils d’Administration).

4) Crise Anjouanaise : Créée de toutes pièces à des fins politiques

La dernière crise survenue à Anjouan a été une affaire créée de toutes pièces par le Président Sambi pour un objectif qui reste encore à élucider.

Ce qui est certain, c’est que ce qui allait devenir la rébellion anjouanaise a tiré son origine de la mésentente notoire entre deux hommes, deux anjouanais, détenteurs, l’un du pouvoir central de l’Union, le président Sambi et l’autre, de l’autorité insulaire d’Anjouan, le Colonel Mohamed Bacar qui, dans l’impasse où il s’était fourvoyé, n’a toutefois jamais renié l’unité du pays.

Dire que l’Île Autonome d’Anjouan n’a jamais été coupée du pays depuis 2001 était devenu inaudible, tant la propagande pro débarquement était à son comble. Même rappeler que l’alternance politique de 2006, a été bien accueillie à Anjouan, était un argument agaçant pour le pouvoir.

Mais Bacar a eu le tort de ne pas jouer le jeu imposé par le pouvoir. Pire, il s’est mis en travers de la volonté du président de l’Union de faire élire à la présidence de l’île d’Anjouan, un candidat entièrement à sa dévotion. Et le Président Sambi a su manœuvrer tout le monde, y compris une partie de la communauté internationale, pour arriver à ses fins : débarrasser Bacar de la scène politique anjouanaise et réussir enfin son but ultime, à savoir l’élection d’une marionnette de sa fabrication à la tête de l’île.

Et pourtant, le Président Sambi a bénéficié au début, d’une grande magnanimité du pouvoir Bacar : mise à la disposition de locaux pour abriter la présidence ainsi que la coordination des services de l’état basée à Anjouan. Il est intéressant de souligner que le bâtiment mis à la disposition de la présidence n’est autre que le bâtiment qui l’assemblée insulaire délogée par le colonel Bacar pour ça, présence effective de l’AND à Anjouan, célébration de la fête nationale à Mutsamudu le 6 juillet 2006, mise en place de la DNST à Anjouan, et honneurs militaires rendus au président Sambi à chaque fois qu’il se rendait à Anjouan en présence du colonel Bacar, ce que n’a jamais bénéficié son prédécesseur..

Le report de l’élection présidentielle par un décret du président de la République, sur une partie du territoire national, l’île d’Anjouan, a été d’une illégalité criante et une faute politique majeure. Mais dans l’immense écran de fumée savamment jeté sur le débat politique ces derniers mois, il était difficile, sinon impossible de rappeler que la crise séparatiste s’est bel et bien achevée avec la réconciliation nationale et la mise en place des nouvelles institutions en 2002.Bilan de deux ans de Pouvoir Sambi

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Un an après la prétendue « crise anjouanaise », le gouvernement a décidé d’intervenir militairement à Anjouan pour « libérer l’Île » et traduire son président auto proclamé en justice. Cette opération est menée avec l’appui de certains pays amis des Comores.Si l’opération est sur le plan militaire apparent est un succès, elle est loin de l’être sur le plan politique et social. Anjouan est politiquement et socialement sous tension depuis l’intervention militaire de mars 2008.Pour l’heure, beaucoup de zones d’ombre sont observées. L’opération est menée en dehors de concertation avec les Exécutifs des îles et de l’Assemblée de l’Union. La gestion de l’après-guerre est catastrophique. L’on observe un déchirement total entre les familles d’une part, et entre les régions d’autre part.

Anjouan subit des règlements de compte, des intimidations et des humiliations quasi quotidiennes. Les droits de l’homme sont bafoués et la dignité des prisonniers est atteinte quotidiennement.La tension créée autour de la fuite de Mohamed Bacar après sa chute par le régime qui veut son extradition n’est qu’un théâtre populiste. Sinon pourquoi ne pas commencer par ceux qui ont proclamé l’indépendance d’Anjouan ou ceux qui traînent avec du sang sur leurs mains qui n’ont pas besoin d’être extradées ? Pourquoi une politique de deux poids et deux mesures ?

On ne finit toujours pas de faire le compte des préjudices subis par la population comorienne entière sur les effets de l’enlisement de cette crise. Combien le Pays a perdu financièrement ? Combien a-t-il raté d’opportunités ? Quelle image de la démocratie et de consolidation des nouvelles institutions ? Nous sommes en droit de se poser des questions aujourd’hui sur le coût économique et social de cette crise. Nous savons tous que des sommes importantes ont été dépensées dans cette crise, des projets privés et publics au bénéfice de la population ont été suspendus ; des dommages de part et d’autre, et aujourd’hui des dépenses continuent de l’être pour célébrer la « victoire ». Et ce n’est pas fini car le plus gros reste à faire : les dépenses pour la « reconstruction d’Anjouan ». Qui a financé et qui va financer ? Combien s’élève la facture ? Qui l’a payée ? Et c’est quoi la contrepartie ? Aucune réponse à l’instant, mais ce qui est sûr, le contribuable comorien a payé le plus de frais. Les Comoriens doivent-ils à chaque fois qu’un litige électoral se présente, subir les mêmes dommages que ceux qu’ils ont vécus durant cette crise ? Quel sens donner à la tournante si le Président élu proclame deux ans après son élection qu’il a « intégré » son île natale dans l’Union. Ironie du sort, si cette île n’était pas auparavant intégrée dans l’Union, à savoir pendant son élection au primaire, n’est- on pas en droit de poser un problème de légitimité ? Rappelons-nous que la première condition de la tournante est qu’elle échoit à un natif d’une des îles « intégrées » dans l’Union. Quelle légitimité donner à un Président issu d’Anjouan ? Aux constitutionalistes comoriens d’ouvrir le débat. Quand à la CRC, elle estime que le Président élu en 2006 originaire de l’île d’Anjouan l’a été légalement, car Anjouan faisait partie intégrante de l’Union depuis le 23 décembre 2001. Donc Anjouan ne vient pas d’intégrer l’Union des Comores en 2008.

5) Révision de la Constitution ?

Un constitutionnaliste disait : « Toutes les Constitutions se valent ; aucune n’est mauvaise et aucune n’est bonne : elles sont l’expression de la volonté populaire au moment de son adoption ». Il est vrai que prétendre qu’une Constitution est mauvaise est souvent source d’interprétations et de confusion. Cette confusion est d’autant plus grande lorsque l’interprétation de la Constitution provient de ceux qui ont le pouvoir, c’est-à-dire ceux qui sont censés faire appliquer la Constitution et qui sont garants de cette dernière. Lorsqu’un président est élu, il porte serment devant la haute juridiction qu’il « respectera la Constitution, rien que la Constitution ». C’est la raison pour

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laquelle, dès qu’un pouvoir quel que soit le pays soulève la problématique d’une révision de la Constitution, sans qu’il y ait manifestation d’une volonté populaire, la première réaction est la suivante : « c’est un calcul politique du régime en place pour se maintenir au pouvoir ».

Rappelons-le que durant l’histoire récente des Comores, les deux Constitutions considérées comme émanant d’une volonté populaire, sont celles de 1990, « issues des assises nationales des partis politiques et société civile marquant la fin du parti unique et du mercenariat » et celle de décembre 2001 « issue de la réconciliation nationale marquant la fin du séparatisme anjouanais ». Autrement dit, ce sont des événements populaires nationaux qui ont dicté la révision ou la rédaction des deux Constitutions suscitées ; ce qui n’est pas le cas pour les autres Constitutions qui émanent directement ou indirectement de la volonté des pouvoirs publics en place. C’est aussi le cas aujourd’hui, où le pouvoir en place veut réviser la Constitution malgré la protestation et les réserves émises par des partis politiques, des Exécutifs des îles et l’Assemblée de l’Union.Cette Constitution, aussi complexe qu’elle soit est le fruit d’un compromis entre les Comoriens représentés par les partis politiques de l’opposition, la mouvance présidentielle, la société civile, et les représentants des îles..           En conclusion, vouloir réviser cette Constitution avant terme (tournante de Mohéli), est de nature à soulever encore une fois les problèmes insulaires et réveiller les démons du séparatisme. Les dosages sur le degré de compétences à se partager entre les îles et l’Union, la réduction des effectifs faramineux des superstructures et de la Fonction publique peuvent être résolus par les législateurs (les députés) et ne nécessitent pas une révision de la Constitution du moins pour le moment. Ceux qui soutiennent que la tournante doit être supprimée pour permettre au Président de réaliser ses rêves doivent réfléchir plus deux fois. Car l’on nous a annoncé du pétrole, de l’électricité géothermique, du gaz offshore, une maison dur pour tous et j’en passe. Lorsque cela fait deux ans qu’aucun de ces projets n’a fait l’objet d’une étude, à ce rythme même si ce régime dispose d’un mandat à vie les Comoriens continueraient toujours d’attendre..

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Conclusion Générale

À mi-mandat du régime Sambi, force est de constater que les vrais enjeux ont été relégués au second plan : Stabilité politique, Paix sociale, Croissance économique et mise en valeur des ressources humaines ; lutte contre la pauvreté et atteinte des Objectifs du millénaire. Depuis deux ans, le pays est en récession économique, la situation sociale est devenue très préoccupante ;

Plus grave encore, les acquis de la réconciliation nationale, fruits de plusieurs années d’efforts, de travail de rapprochement entre les Comoriens, d’appui de la Communauté Internationale, ont été remis en cause par le pouvoir qui privilégie les affrontements, la violence politique, les emprisonnements et l’exacerbation des haines sociales.Cela est accentué par une presse publique et privée entièrement à la dévotion du pouvoir et qui a du mal à nourrir le débat public de façon responsable, notamment sur la gestion transparente des affaires publiques.

Les dérives financières deviennent monnaie courante : de la multiplication des ordonnateurs des dépenses publiques à l’attribution des marchés publics de plusieurs centaines de millions de francs sans appel d’offres aux membres de la famille et aux amis, à la cession de la SCH dans de conditions douteuses alors qu’un processus transparent de privatisation avait été engagé avec l’appui des institutions de Breton Wood ; la société d’électricité meurt sous les yeux de la population ; l’eau courante devient une denrée rare ; les hôpitaux sont en faillite totale à un moment où les maladies graves réapparaissent (typhoïde, choléra) ; la gestion calamiteuse des ordures ménagères rend la capitale invivable…

Jamais dans l’histoire des Comores, le pays n’était dans l’incertitude. Et, malheureusement, la politique du « bouc émissaire », en l’occurrence le régime précédent, continue de faire recettes, avec les paroles mielleuses du Président.

La course aux postes politiques qui a atteint son comble, encourage fortement l’émergence de petits partis sans envergure nationale, constitués sur la base des motivations opportunistes. Ce qui contribue à dégrader de plus en plus, l’image des dirigeants politiques, à déformer le rôle des organisations politiques et à vider la vie politique de sa substance vivifiante, en la réduisant à une simple compétition pour des postes.

Le désespoir est total pour une population victime des promesses qui pleuvent à longueur de journée, et qui persiste, malgré elle, à attendre le miracle.

Au lieu d’encourager le peuple à produire et à innover pour améliorer son cadre et la qualité de la vie, le Président Sambi installe le Pays dans la fatalité en axant sa politique sur la mendicité et l’improvisation.

Lorsqu’à mi-parcours, aucune réalisation n’est constatée sur les objectifs initiaux, il est difficile d’imaginer que le miracle est réservé à la fin.

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