4
Savoir vivre en couple Episode VIII : Avez-vous repéré des étapes dans votre vie de couple ? IL : des étapes, je ne sais pas ! si c’est le cas, il y a en a par lesquelles nous avons dû passer plusieurs fois ! ELLE : je parlerais plutôt de crises où nous avions le sentiment de ne plus être sur la « même longueur d’onde » et d’être devenus des étrangers l’un pour l’autre. IL : dans les périodes de conflits, nous nous comportions comme des ennemis : moi, je ne disai s plus rien… et je pensais que je ne pourrais jamais finir ma vie avec cette personne. ELLE : moi, je trouvais tous les prétextes pour lui faire des reproches et pour le rendre responsable de ce qui n’allait pas dans la maison. IL : c’était pénible. Il y avait toujours quelque chose que je faisais mal ! ELLE : j’avais l’impression que tu faisais exprès de faire le contraire de ce que j’attendais ! IL : dans ces moments-là, je trouvais tous les prétextes pour fuir la maison. J’avais peur de rentrer chez moi et d’être accueilli par des reproches. ELLE : tout d’un coup, tu devais aller voir un tel ou un tel pour régler un problème ou rester plus longtemps au travail pour terminer un dossier. Je commençais à me demander s’il n’y avait pas une autre femme ! IL : il y en avait plusieurs autres qui percevaient mes difficultés et m’entouraient de leur gentillesse et de leur compréhension, mais je laissais les choses à leur place, sentant bien que les dérapages étaient faciles. ELLE : j’avais un collègue de travail que j’aimais bien, car il prenait le temps de m’écouter. Il avait lui aussi des problèmes de couple et nous mettions en commun nos histoires. IL : je me sentais incapable de dire quelque chose à ma femme et je savais de toute manièr e qu’elle ne m’entendrait pas. C’est comme si nous parlions deux langues différentes et nous n’avions pas d’interprète ! ELLE : nos enfants sentaient bien les tensions et faute de pouvoir faire revenir mon mari à la raison, je prenais le prétexte des enfants pour faire pression sur lui et lui faire comprendre qu’il devait faire des efforts pour eux ! IL : j’étais encore plus culpabilisé et je prenais sur moi toutes les causes du malaise familial. ELLE : j’avais l’impression de redevenir une petite fille craintive reportant sur mon mari la même crainte qu’à l’égard de mon père, autrefois. J’étais intérieurement en colère contre tout le monde parce que les choses n’allaient pas comme je le voulais. IL : en tant que responsable de ma famille, je voulais donner une bonne image, et prouver que tout allait bien, mais la réalité était tout autre et je me sentais incapable de faire front pour trouver des solutions valables. ELLE : je devais me débrouiller toute seule, tout gérer dans la maison, prendre des décisions… avec la crainte des critiques de mon mari si le résultat n’était pas comme il l’espérait.

Savoir vivre en couple episode8: Avez-vous repéré des étapes dans votre vie de couple ?

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Savoir vivre en couple episode8: Avez-vous repéré des étapes dans votre vie de couple ?

Savoir vivre en couple Episode VIII : Avez-vous repéré des étapes dans votre vie de couple ?

IL : des étapes, je ne sais pas ! si c’est le cas, il y a en a par lesquelles nous avons dû passer plusieurs fois !

ELLE : je parlerais plutôt de crises où nous avions le sentiment de ne plus être sur la « même longueur d’onde »

et d’être devenus des étrangers l’un pour l’autre.

IL : dans les périodes de conflits, nous nous comportions comme des ennemis : moi, je ne disais plus rien… et

je pensais que je ne pourrais jamais finir ma vie avec cette personne.

ELLE : moi, je trouvais tous les prétextes pour lui faire des reproches et pour le rendre responsable de ce qui

n’allait pas dans la maison.

IL : c’était pénible. Il y avait toujours quelque chose que je faisais mal !

ELLE : j’avais l’impression que tu faisais exprès de faire le contraire de ce que j’attendais !

IL : dans ces moments-là, je trouvais tous les prétextes pour fuir la maison. J’avais peur de rentrer chez moi et

d’être accueilli par des reproches.

ELLE : tout d’un coup, tu devais aller voir un tel ou un tel pour régler un problème ou rester plus longtemps au

travail pour terminer un dossier. Je commençais à me demander s’il n’y avait pas une autre femme !

IL : il y en avait plusieurs autres qui percevaient mes difficultés et m’entouraient de leur gentillesse et de

leur compréhension, mais je laissais les choses à leur place, sentant bien que les dérapages étaient faciles.

ELLE : j’avais un collègue de travail que j’aimais bien, car il prenait le temps de m’écouter. Il avait lui

aussi des problèmes de couple et nous mettions en commun nos histoires.

IL : je me sentais incapable de dire quelque chose à ma femme et je savais de toute manière qu’elle ne

m’entendrait pas. C’est comme si nous parlions deux langues différentes et nous n’avions pas d’interprète !

ELLE : nos enfants sentaient bien les tensions et faute de pouvoir faire revenir mon mari à la raison, je

prenais le prétexte des enfants pour faire pression sur lui et lui faire comprendre qu’il devait faire des

efforts pour eux !

IL : j’étais encore plus culpabilisé et je prenais sur moi toutes les causes du malaise familial.

ELLE : j’avais l’impression de redevenir une petite fille craintive reportant sur mon mari la même crainte

qu’à l’égard de mon père, autrefois. J’étais intérieurement en colère contre tout le monde parce que les

choses n’allaient pas comme je le voulais.

IL : en tant que responsable de ma famille, je voulais donner une bonne image, et prouver que tout allait bien,

mais la réalité était tout autre et je me sentais incapable de faire front pour trouver des solutions valables.

ELLE : je devais me débrouiller toute seule, tout gérer dans la maison, prendre des décisions… avec la crainte

des critiques de mon mari si le résultat n’était pas comme il l’espérait.

Page 2: Savoir vivre en couple episode8: Avez-vous repéré des étapes dans votre vie de couple ?

IL : j’estimais que la maison c’était son affaire, et que son activité professionnelle venait au second

plan, puisque, en tant que chef de famille, c’était à moi d’assumer de quoi faire vivre mon foyer.ELLE : avant

de partir au travail, je devais mettre la maison en ordre, mettre en route une lessive, veiller à ce que les

enfants soient prêts pour l’école : tout ça en un temps record !

IL : et le soir, je la voyais afférée et occupée, alors que

j’aurais souhaité qu’elle s’arrête un peu, quand je rentrais

du travail, pour partager avec moi ce qui s’était passé dans

la journée. J’avais besoin de ce temps de détente en

rentrant à la maison pour couper complètement et évacuer

le stress professionnel.

ELLE : on ne peut pas dire que nous étions synchronisés ! La

semaine se passait ainsi, avec des espoirs déçus, des

frustrations rentrées et le sentiment d’être prisonniers de

ces fonctionnements.

IL : l’accumulation de tout cela créait des conflits plus ou

moins ouverts et une réaction de chacun qui paraissait

complètement incongrue à l’autre, comme s’il n’y avait

plus de « courant » entre nous.

ELLE : heureusement, j’avais les enfants pour compenser les « manques » de mon mari !

IL : tu te mettais même entre eux et moi, comme si tu voulais les préserver de mon influence « néfaste » ou de

mon incapacité à donner de l’amour. Avec le recul, j’aurais souhaité que tu me dises en face ce qui n’allait pas,

pour que je sache à quoi m’en tenir. Je sentais bien que ce qui était mis en avant n’était que la surface d’un

problème plus profond.

ELLE : j’avais peur que tu ne me juges mal et surtout que tu ne m’aimes plus, que tu te lasses de moi et que tu

ailles voir ailleurs quelqu’un de forcément mieux. C’est pour cela que parfois je ne disais rien ou je faisais

semblant ou alors j’agissais exactement au contraire de ce que tu attendais de moi !

IL : on dit que les mésententes viennent de malentendus ! Je trouvais que tu ne m’écoutais pas beaucoup, que

ce que je disais te rentrait par une oreille pour sortir aussitôt par l’autre !

ELLE : tu peux parler ! Tu ne te souviens pas les fois où tu faisais ta tête de mule, ou tu faisais exprès de mal te

tenir à table ou ailleurs, où tu faisais semblant de te tromper alors que tu avais agi délibérément uniquement

pour me provoquer.

IL : et toi, tu faisais comme si je n’existais pas, ou comme si j’étais quantité négligeable dans le lot de tes

préoccupations quotidiennes. Je me sentais souvent la cinquième roue de la charrette !

ELLE : nous avons eu de graves conflits qui ont mis en déséquilibre notre relation conjugale, au point qu’il s’en

est fallu de peu de basculer dans la rupture, préférant vivre seule que si mal accompagnée !

IL : comme je ne peux pas vivre seul, j’aurais choisi une autre compagne en me disant que de toute façon,

elles sont toutes pareilles, exigeantes, compliquées et incompréhensibles.

ELLE : ce qui nous retenait de choisir la solution apparemment facile du divorce, c’est notre amour. C’est b ien

cet amour qui était le fondement de notre union et le reste n’était que la forme que nous choisissions de

donner à notre relation conjugale selon les événements et les situations de vie.

Page 3: Savoir vivre en couple episode8: Avez-vous repéré des étapes dans votre vie de couple ?

NOUS : Il y a une chronologie dans la vie conjugale : elle part de la naissance du couple, de sa création,

passe par des étapes de croissance pour atteindre une maturité après avoir surmonté les turbulences de

sa période « adolescente ». Les étapes arrivent au moment d’événements importants dans la vie du

couple qui nécessitent un remaniement, un réaménagement des rôles, des tâches et des investissements de

chacun et la prise de décisions importantes pour l’avenir du foyer.

La première période, dite « lune de miel », même si elle est brève, et du fait de l’importance du

sentiment amoureux, fait partie de ces moments de recréation de la personne, où il est possible de

renouveler son potentiel affectif et ses facultés d’adaptation aux sollicitations de la vie quotidienne. D’où

l’importance de revenir régulièrement à ce « premier amour » sans calcul ni exigence. Il y a un désir

d’authenticité et de qualité de la vie conjugale, qui est déterminant pour la durée du couple. La réalité du

quotidien oblige à l’abandon de certaines illusions, avec la nécessité de se voir et de se comprendre

mutuellement tels qu’on est et non selon une image idéalisée.

Il y a alors le désir d’un retour à l’autonomie personnelle au moyen d’activités extérieures au couple

avec recherche d’autres relations, familiales, professionnelles, amicales pour diminuer le caractère excessif

et exclusif de l’investissement amoureux. Le couple se rode en modifiant son fonctionnement interne, à

l’initiative de la femme souvent, qui par nature est plus réaliste. C’est une phase critique, 95Avez-vous repéré

des étapes dans votre vie de couple ?où le divorce est fréquent, car la réalité et les obligations de la vie

quotidienne ont ternies l’image idéale du couple et obligent chacun à s’ajuster à l’autre et à se placer sur un

même plan d’égalité. C’est le temps où la gestion matérielle de la vie commune et de son organisation

devient prioritaire, car il faut trouver un accord pour les questions de vie : argent, travail, loisirs, enfants,

familles et amis respectifs et réintégrer la vie sociale et le monde environnant.

La recherche de stabilité est la troisième étape, lorsque le couple organise son territoire, ses relations, sa vie

intérieure à la lumière des essais suivis d’erreurs, d’échecs ou de réussites qui contribuent à l’expérience

conjugale. Chaque conjoint est plus autonome, il y a mobilité des rôles. C’est une période de maturation du

couple avec des remises en cause, de nouveaux choix, des mises au point, pour continuer, s’adapter, changer.

Cela correspond souvent à l’adolescence des enfants. C’est une période critique avec des difficultés, pour

chacun à suivre l’évolution et à marcher au même rythme, avec le danger et la tentation de vivre sur un

acquis. Les rôles masculins et féminins se précisent en référence aux modèles et contre modèles

parentaux qui gardent force de loi. Il y a difficulté à reconnaître et accepter l’autre comme étant différent. Le

dialogue est nécessaire et important pour une compréhension mutuelle et une prise de décisions communes

face aux impératifs de la vie.

Enfin, la phase de maturité du couple est celle où chaque membre est prêt à s’investir toujours mieux pour

construire un ensemble. Ce n’est plus le temps de la création, de l’organisation ou de la recherche de solutions,

mais celui de la jouissance des œuvres communes. C’est le temps de la sérénité, de l’ouverture, du

partage de toutes les richesses de la vie conjugale, en savourant les fruits de l’expérience commune. La

perception du conjoint s’est modifiée et précisée de façon plus réelle, plus objective et chacun est aimé et

accepté tel qu’il est. Le couple a tissé une œuvre d’art, pas forcément un chef-d’œuvre, mais une réalisation

originale, unique, une création commune, expression d’un cheminement plein d’obstacles, mais illuminé

par l’amour conjugal. Il peut y avoir un passage difficile, quand le couple a l’impression d’arriver à un

terme, il se démobilise et l’énergie n’étant plus utilisée, vont surgir des malaises physiques, moraux ou

intellectuels. Une nouvelle synthèse est à faire qui rend les conjoints solidaires face au monde qui change, et

qui cimente leur unité.

C’est l’image du couple tremplin, lieu où les couples plus jeunes, ceux des enfants ou d’autres, peuvent puiser

la force pour affronter le monde, couple référence, disponible, ouvert aux autres et prêt à transmettre son

expérience, dans la mesure où on le lui demande. En affrontant et dépassant les crises, qui sont normales et

Page 4: Savoir vivre en couple episode8: Avez-vous repéré des étapes dans votre vie de couple ?

nécessaires à son progrès et à sa maturité, le couple évolue vers sa « vitesse de croisière » et peut savourer des

moments de bonheur lorsqu’ils se présentent.