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FOCUS GROUPE ALIMENTATION DURABLE ET GOUVERNANCE ALIMENTAIRE DES VILLES DE DEMAIN
Action Prospective « Villes durables et impacts économiques locaux :
vers de nouveaux modèles économiques ? »
Dossier préparatoire
à la journée du 4 décembre 2012
FOCUS GROUPE ALIMENTATION DURABLE ET GOUVERNANCE ALIMENTAIRE DES VILLES DE DEMAIN
2Action Prospective « Villes durables et impacts économiques locaux :
vers de nouveaux modèles économiques ? »
I / PROBLÉMATIQUE ALIMENTATION DURABLE
ET GOUVERNANCE ALIMENTAIRE DES VILLES DE DEMAIN Page 3
L’alimentation des sociétés urbaines : une cure de jouvence pour l’agriculture des territoires métropolitains ? Page 3
Serge Bonnefoy et Caroline Brand, Vertigo
La gouvernance alimentaire des agglomérations françaises et la relocalisation des productions Page 16
Terres en Villes, APCA, FNCivam, FNCuma et Trame
Charte européenne de gouvernance alimentaire et territoriale Rururbal Page 24
II / AMÉNAGER Page 31
Prendre en compte l’agriculture dans les SCoT Page 31
En bref Page 31
III / PRODUIRE Page 32
Avis du Comité des Régions sur les systèmes agro-alimentaires locaux Page 32
En bref Page 41
IV / DISTRIBUER Page 43
En bref Page 43
V / CONSOMMER Page 46
En bref Page 46
VI / COMMENT S’INSCRIRE DANS UN CHANGEMENT
DE PRATIQUES ET DE MODÈLE ? Page 46
SOMMAIRE
Dossier préparatoire à la journée du 4 décembre 2012
JOURNÉE ET DOSSIER
PRÉPARÉS PAR
FOCUS GROUPE ALIMENTATION DURABLE ET GOUVERNANCE ALIMENTAIRE DES VILLES DE DEMAIN
3Action Prospective « Villes durables et impacts économiques locaux :
vers de nouveaux modèles économiques ? »
I / PROBLÉMATIQUE ALIMENTATION DURABLE
ET GOUVERNANCE ALIMENTAIRE DES VILLES DE DEMAIN
pour l’agriculture des territoires métropolitains ?
Serge Bonnefoy et Caroline Brand, Vertigo
Si les villes se définissent « comme des regroupements de population ne produisant pas
elles-mêmes leurs moyens de subsistance alimentaire » (Ascher, 2001 : 11), les travaux
qui envisagent de faire de la ville future une ferme à grande échelle (Viljoen, 2005, cité
par Morgan, 2010) ou d’installer en ville des fermes verticales (Despommier, 2010), nous
interrogent sur la place de l’agriculture dans le fonctionnement urbain. Face à cela, une
volonté de réinscrire la fonction nourricière de l’agriculture se fait forte. Ainsi, en France,
l’article 31 de la loi de programmation n°2009-967 du 3 août 2009 rappelle que « la vocation
première de l’agriculture est de répondre aux besoins alimentaires de la population, et ce
de façon accentuée pour les décennies à venir ». Le document assigne aux Schémas de
Cohérence Territoriale et aux Plans Locaux d’Urbanisme d’engager des mesures permettant
de préserver les surfaces agricoles, l’agriculture périurbaine se trouvant au cœur de
nombreuses tensions dans le contexte de métropolisation croissant qui caractérise nos
sociétés (Soja, 2000).
C’est pourquoi nous situons notre réflexion sur ces vastes régions urbaines, qui comprennent
aussi une part toujours plus importante de l’espace agricole national (Bertrand, 2010), afin
d’envisager les liens les unissant à l’alimentation, clé de leur survie. D’autre part, si les villes
ne produisent pas la matière première de leur alimentation (Ascher 2001), elles fabriquent
néanmoins une élaboration culturelle de ce qu’elles ingèrent qui contribue fortement à
modeler le système agricole périphérique.
Nous nous interrogeons donc sur la façon dont l’enjeu alimentaire pourrait constituer un
nouveau rendez-vous pour la gestion territoriale des territoires métropolitains.
L’alimentation des sociétés urbaines pourrait-elle constituer un nouveauliant entre
agriculture et ville dans le cadre des régions urbaines ?
Dans un premier temps, nous retraceront, à partir des travaux existants, les évolutions
globales du système alimentaire et la façon dont la géographicité dont est porteuse
l’alimentation (Fumey, 2008) semble dessiner une place renouvelée pour l’agriculture
malgré la complexité du système métropolitain. Puis, nous verrons, à travers l’étude des
politiques agricoles périurbaines des agglomérations adhérentes du réseau Terres en Villes
que la question alimentaire ouvre la réflexion sur l’agriculture à un raisonnement territorial
englobant sur la région urbaine.
LA RELATION ALIMENTAIRE ENTRE VILLE ET AGRICULTURE
AU REGARD DES CHANGEMENTS ALIMENTAIRES AU SEIN DES SOCIÉTÉS URBAINES
Selon Eric Dardel, il y a un rapport ontologique entre l’homme et l’espace qui est celui
de la géographicité (1952 : 2). Cette géographicité est entendue comme « une relation
concrète » qui se noue entre l’homme et la Terre. Si l’on suit les propos de Gilles Fumey,
l’alimentation serait un moyen d’expression de cette géographicité au sens où elle est « l’un
des moyens les plus forts « d’être au monde » […] le lien le plus intime entre tout être et le JO
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vers de nouveaux modèles économiques ? »
monde » (2010 : 20). Cette relation existentielle entre l’homme et la terre nous interroge
lorsque l’on se penche sur les évolutions des rapports à l’alimentation dans l’après seconde
guerre mondiale qui sont marqués par une certaine invisibilisation, une distanciation des
liens entre l’aliment et le mangeur sous les effets conjoints de l’industrialisation et de
l’urbanisation devenue métropolisation. Ces deux processus et leurs corollaires (révolution
des transports, progrès techniques en matière de conservation) changent le rapport à
l’espace et au temps depuis le XIXe siècle.
UNE DÉTERRITORIALISATION PROGRESSIVE DU SYSTÈME ALIMENTAIRE
L’étude des systèmes alimentaires pointe ce passage d’une société agricole où ce qui
est produit est consommé sur place à une société agro-industrielle puis agrotertiaire où
les aires d’approvisionnement alimentaire s’organisent à une échelle continentale, voire
mondiale pour certains produits (Malassis, 1997a et b, Charvet, 2008). Dans un contexte
de montée en technicité, de spécialisation et de développement des échanges à l’échelle
mondiale, le système agricole a progressivement tourné le dos à la proximité de la ville
au nom de la productivité et de la rentabilité. Le système alimentaire s’inscrit dans un
fonctionnement mondialisé et certains géographes parlent alors de « placelessfoodscape
» (Ibery&Kneafsey, 2000).
L’entrée dans l’âge agro-industriel marque aussi l’émergence de nouveaux acteurs, que
sont les acteurs de la filière agro-alimentaire et de la grande distribution, qui viennent
s’immiscer entre l’aliment et le mangeur. La préparation culinaire, facteur d’appropriation
des aliments, passant « de la cuisine à l’usine » (Fischler, 1993 : 187), le mangé s’éloigne du
mangeur.
SE NOURRIR EN VILLE : LA MÉTROPOLE PUDDING
En lien avec la période agro-industrielle la ville s’est d’abord détachée des contraintes
géographiques et de la dépendance au seul système alimentaire permis par l’agriculture
locale (Steel, 2009 : 7). Puis, le processus de métropolisation a accentué cette tendance
complexifiant la relation entre ville et agriculture périphérique.
La métropolisation est une mutation structurelle des sociétés urbaines, c’est la ville qui
sort de ses murs et se répand sur un territoire de fonctionnement quotidien étendu.
L’étalement urbain qui en résulte a fragilisé l’agriculture périphérique qui ne s’intégrait
pas dans le modèle agricole dominant. La métropolisation apparaît comme « l’avenir des
villes » (Ascher, 1995), un stade plus avancé du processus d’urbanisation où la ville devient
« coextensive au territoire » (Chalas, 1997 : 251) avec lequel elle est en rapport quotidien.
Si les villes ont toujours eu une fonction de brassage, cette caractéristique s’est accentuée
avec la mondialisation qui a mis en mobilité une ronde de produits alimentaires. Une étude
menée par le Centre de Recherche pour l’Etude et l’Observation des Conditions de vie
entre 2002 et 2003 montre que la génération d’après guerre est la première à s’ouvrir sur
l’extérieur en recherchant des produits exotiques (Hébel, 2007 : 27).
Dans un chapitre portant sur les impacts de la mondialisation sur la ville contemporaine, Edward
W. Soja (2000) présente l’utilisation du terme cosmopolis par les scientifiques pour parler des
villes-régions mondialisées et culturellement hétérogènes (2000 : 229). Comme le disent les
géographes David Bell et Gill Valentine, « if the cosmopolitan has a home, it is the city » (1997: 117). JO
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Inscrite dans des réseaux d’approvisionnement mondialisés, la métropole est ainsi le miroir,
autant que le moteur, de la mondialisation (Charvet, 2008 : 6), une Babel alimentaire,
cosmopolite permettant un accès à des produits d’ici et d’ailleurs à la fois. Par exemple,
si la métropole lyonnaise constitue une vitrine des productions régionales, sa culture
gastronomique est aussi tournée vers l’international. Ainsi, si l’on peut lire sur le site
internet de la ville de Lyon que les Halles de Lyon Paul Bocuse « sont le haut lieu de la
gastronomie lyonnaise » faisant la promotion des « produits de la métropole lyonnaise »1 ,
elles constituent aussi un écrin des produits gastronomiques français et mondiaux (Lefort,
2008).
François Ascher souligne que si la nourriture reste emblématique d’un local, ce n’est pas le
cas de sa consommation. Selon lui, les individus consomment de plus en plus de « produits
à origines localisées, et de provenances de plus en plus diverses » (2005 : 127) sans pour
autant s’identifier de façon exclusive à l’une de ses origines. L’alimentation métropolitaine
est ainsi marquée par une multi-appartenance territoriale, correspondant à l’éclectisme de
l’individu hypermoderne (Ascher, 2005). Dans les métropoles, le mangeur est dans une «
situation d’ubiquité » (Ariès, 1997 : 91) et il mange de la cuisine d’ici, « de son terroir de la
même façon que l’on mange celle de son passé ou du bout du monde » (Ariès, 1997 : 91).
La métropole lui donne accès à des produits d’origine localisée lointains ou proches ainsi
qu’à des produits globaux standardisés, homogénéisés.
Dans ce contexte, la place de l’agriculture périphérique dans le fonctionnement métropolitain
n’est pas évidente. Les espaces métropolitains prennent la forme d’un patchwork alternant
surfaces agricoles et surfaces urbanisées. La métropole habite donc une assiette mais ce
n’est pas forcément celle dans laquelle elle se nourrit étant donné son caractère cosmopolite
et la domination du caractère mondialisé du système agro-alimentaire.
Enfants et parents de la mondialisation, les deux processus d’industrialisation et
d’urbanisation changent donc la « relation concrète » de l’homme à la terre en une relation
plus abstraite. C’est pourquoi nous avançons qu’ils sont à l’origine d’un mouvement de
déterritorialisation de l’alimentation, d’une déconnexion entre espace de production
et espace de consommation de l’alimentation, au moins dans sa part matière. Dans ce
décloisonnement ville et agriculture périphérique se sont détournées l’une de l’autre, même
s’il faut souligner que dans ce mouvement dominant, toutes les pratiques alimentaires
reliant la ville à son agriculture de proximité n’ont pas été effacées.
VERS UNE RE-TERRITORIALISATION
Cependant, les processus amenant à cette forme de déterritorialisation de l’alimentation
sont porteurs de risques qui changent le rapport à l’alimentation depuis quelques décennies,
conduisant à un basculement vers une forme de reterritorialisation de l’alimentation.
Risques alimentaires et enjeux écologiques changent le rapport à l’alimentation
Ainsi, un sentiment de risque alimentaire se développe conjointement à l’industrialisation,
considérée comme une « mauvaise mère » (Fischler, 1993 : 208). L’aliment est devenu un «
objet comestible non identifié » (1993 : 209), sans passé ni origine connus. La technicisation
et la multiplication des acteurs de la chaîne alimentaire accroissent la peur originelle de
l’incorporation du « mauvais objet » qui devient soi (1993 : 209).
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vers de nouveaux modèles économiques ? »
Les crises emblématiques de l’Encéphalopathie Spongiforme Bovine ou des Organismes
Génétiquement Modifiés ont alimenté une représentation négative de l’alimentation
industrielle. On s’insurge ainsi contre la « malbouffe », on parle de « frankenfoods » en
Grande-Bretagne dans les années 1970 (Poulain, 2002 : 17). La « sur-bouffe » permise par
le système agro-industriel est aussi à l’origine du nouveau fléau sanitaire que constituent
les Maladies Non Transmissibles liées à l’Alimentation.
Peur de l’excès et peur des risques alimentaires liés à l’abondance alimentaire viennent
remplacer les peurs ancestrales liées au manque, aux difficultés d’approvisionnement.
Les enjeux écologiques planétaires introduisent aussi de nouvelles préoccupations vis-à-
vis de l’alimentation.
En effet, « la richesse symbolique de la nourriture en fait un enjeu politique et idéologique
qui donne une valeur spécifique aux choix alimentaires » (Ascher, 2005 : 191). Ainsi,
réchauffement planétaire, épuisement des ressources naturelles, sur-utilisation des sols,
appauvrissement de la biodiversité s’immiscent dans les préoccupations alimentaires
comme le montrent le développement de l’agriculture biologique ou des locavores.
D’une recherche de sens dans l’alimentation à une reterritorialisation
Ces facteurs sont à l’origine d’un mouvement de recherche de sens dans l’alimentation, de
traçabilité de celle-ci qui débouche sur des formes de reterritorialisation. On constate un
retour vers des produits identifiés, vers des produits « géographiques » (Charvet, 2008 :
31), liés à des territoires ou des terroirs. Cette reterritorialisation redonne aux géographies
locales et régionales une place dans les systèmes alimentaires (Morgan et al., 2009), qui
sont « la manière dont les hommes s’organisent pour produire et consommer leur nourriture
» (Malassis, 1997b : 227). Les recherches en sciences sociales portant sur l’alimentation
prennent ainsi acte d’un certain nombre de mouvements qui marquent un tournant vis-
à-vis du système alimentaire mondialisé de l’après seconde guerre mondiale (Deverre&
Lamine, 2010).
On assiste ainsi depuis une vingtaine d’années à une multiplication des signes de distinction
que sont les signes d’identification de qualité et d’origine qui mettent en valeur l’origine
du produit, contenue à la fois dans le lieu de production et dans les savoir-faire du
procédé de production (Csergo, 1995). Selon Gilles Fumey, l’alimentation de qualité est «
fondamentalement géographique » car « elle constitue une forme d’horizon plus ou moins
indépassable de ce à quoi prétend tout être humain : être au monde et l’incorporer avec du
sens et des valeurs auxquelles il tient » (2008 : 258).
Mais, la recherche de sens ne passe pas uniquement par des procédures d’identification
officielle. De nombreux mouvements marquent la recherche d’une (re)-connexion avec
l’espace nourricier, d’une « relation concrète » au sens d’Eric Dardel. Si le local est associé
dans les discours à la qualité (Csergo, 1995 : 162), il peut aussi revêtir une signification
autre, s’inscrivant dans une recherche de synergie avec le territoire. Les systèmes
agroalimentaires localisés sont un exemple de cette recherche des effets de proximité. Le
mouvement emblématique des Associations pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne,
(AMAP) toute proportion gardée, repose lui sur une proximité producteur-consommateur
(Delfosse& Bernard, 2007 : 24), entre des acteurs territorialisés. Le développement
multiforme des circuits de proximité, le mouvement Slow Food sont aussi des signes de
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recherche de sens dans l’alimentation et de réflexion sur l’inscription de l’alimentation dans
les territoires. Se nourrir apparaît alors comme un moyen de s’inscrire dans un territoire et
de l’habiter et c’est dans cette configuration que l’agriculture des territoires métropolitains
retrouve une place.
Ce mouvement s’observe aussi chez les acteurs de l’âge agro-industriel comme la grande
distribution qui commence à intégrer la symbolique territoriale à son activité (Fig. 3.).
On peut ainsi mentionner l’espace de vente « Saveurs du coin » géré par l’association
de producteurs du même nom et greffé au rayon fruits et légumes de deux magasins de
l’enseigne Auchan de la région lyonnaise. Cette opération est développée en partenariat
avec les producteurs pour mettre en valeur les productions agricoles de l’Est lyonnais et
participe d’une reconnexion entre espaces urbains et espaces agricoles à proximité sous
l’impulsion d’une demande urbaine.
Ainsi, si la période de l’après seconde guerre mondiale a été à l’origine d’une
déterritorialisation de l’alimentation, la géographicité (Fumey, 2008) de l’alimentation
revient sur le devant de la scène dans le cadre d’un retour vers les territoires qui marque
la période post-fordiste, fondée sur une dynamique de recherche de différenciation entre
les produits et les espaces (Pecqueur, 2006). Cette dynamique s’élargit des produits
alimentaires spécifiques, comme les produits de terroir, aux produits génériques comme
les fruits et légumes (Fig.3.). Parallèlement, si les mangeurs ont plus de libertés, ils ont
aussi plus d’angoisses ce qui expliquerait ce retour de balancier vers une recherche des
origines de l’aliment dont l’agriculture périphérique pourrait bénéficier. On observe ainsi le
développement d’actions allant dans le sens d’une (re)-connexion à l’espace nourricier de
proximité, dont l’échelle varie selon la configuration des régions urbaines et des espaces
agricoles périphériques. Ces évolutions dans les rapports à l’alimentation indiquent un
changement des relations entre espaces agricoles et espaces urbains qui peuvent avoir
des répercussions sur la configuration des régions urbaines.
En redécouvrant la problématique alimentaire, la ville, devenue région urbaine et ses
périphéries agricoles pourraient se redécouvrir des liens dont elles tireraient toute deux
bénéfice.
L’ALIMENTATION, LIANT DES TERRITOIRES MÉTROPOLITAINS ?
Dans une perspective aménagiste, les implications spatiales des nouvelles pratiques
alimentaires pourraient faire émerger un nouveau rendez-vous pour la gestion territoriale
des espaces métropolitains. Si l’enjeu qui nous préoccupe ici n’est pas l’autosuffisance
de la ville grâce à l’agriculture à proximité (Vidal & Fleury, 2010), les nouveaux rapports
à l’alimentation, même s’ils sont marginaux dans le système alimentaire global, nous
interrogent sur les conséquences qu’ils pourraient avoir sur l’aménagement des territoires
métropolitains, en s’immisçant dans la relation ville-agriculture périphérique.
Le contexte métropolitain comme occasion de rencontre du triptyque ville-alimentation-agriculture
Faisant écho au contexte de métropolisation des territoires, Carolyn Steel (2009) montre à
travers le paradigme de Sitopia, comment les systèmes alimentaires pourraient constituer
un objet croisement pour aborder les problèmes liés à la façon dont les territoires sont
habités. Elle invite à changer de regard sur la ville en se positionnant du côté de ce qui JO
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lui est vital : la nourriture. Sitopia, du grec sitos (nourriture) et topos (lieu) exprime ainsi
la ville comme façonnée par sa nourriture. Dans son approche, la ville et sa campagne
sont appréhendées comme un territoire continu, une même entité. Ainsi, dans le contexte
métropolitain qui réunit, au moins topographiquement, espaces urbains et espaces
agricoles, l’alimentation pourrait constituer une entrée pour penser l’ancrage et la cohésion
du système métropolitain, « city and country need one another, and their relationship is
what we should really be addressing », (Steel, 2009 : 316).
Vitale pour le fonctionnement de la ville, l’alimentation reste néanmoins la grande
absente des réflexions d’aménagement urbain. En levant le voile sur cette pièce du puzzle
métropolitain Kameshwari Pothukuchi et Jerome L. Kaufman s’en étonnent, « this low level
of involvement is perplexing because the food system is a significant metropolitan system
» (2000 : 121). Les systèmes alimentaires ont longtemps demeuré un terrain inexploré par
les aménageurs qui les considéraient comme une problématique rurale ou ne relevant pas
d’une compétence publique (Pothukuchi& Kaufman, 2000). Pourtant, selon les auteurs,
l’intégration d’une réflexion sur la problématique alimentaire permettrait le croisement
de nombreux champs de l’aménagement (transport, déchet, social, santé, économie,
environnement) et serait susceptible de créer un motif hybride, réunissant plusieurs enjeux
et motifs, pour la préservation et l’intégration des terres agricoles dans le fonctionnement
des systèmes urbains.
Dans un contexte métropolitain et de changement dans les rapports à l’alimentation,
l’agriculture des territoires métropolitains pourrait (re)-trouver une place renouvelée de
partenaire de l’espace urbain.
L’horizon des politiques alimentaires
C’est à travers la thématique des circuits courts que la question alimentaire s’est ainsi
invitée, ces dernières années, à la table des agglomérations françaises conduisant des
politiques territoriales en faveur de l’agriculture périurbaine2 . Pour ces dernières, on parlera
de politique publique (Muller, 2009 : 22) puisqu’elles se présentent sous la forme d’un
programme d’action gouvernementale local dans un secteur de la société ou un espace
géographique, et, qu’elles présentent les cinq éléments constitutifs de toute politique
publique : un ensemble de mesures concrètes, des décisions de nature plus ou moins
autoritaire, un cadre général d’action, un public et enfin des buts et objectifs. Leur champ
est plus ou moins large selon les agglomérations.
Les circuits courts ont été avec la protection du foncier agricole, un des deux piliers des
politiques territoriales en faveur de l’agriculture périurbaine conduites en France à partir
des années 1970.
Ce thème est pourtant peu présent dans deux des trois grandes approches historiques
de l’agriculture périurbaine. L’approche foncière de la profession agricole3 et l’approche
2 Le terme agriculture périurbaine est employé génériquement par les intercommunalités et les organisations professionnelles agricoles sans distinction entre agriculture urbaine et agriculture périurbaine.3 Liée aux conflits suscités par les villes nouvelles à la fin des années1960, elle a consisté pour la profession agricole à négocier des conditions acceptables en matière d’emprise, de prix d’acquisition du foncier, d’indemnisation voire de compensation pour les opérations les plus innovantes.J
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planificatrice francilienne4 ont en effet privilégié la protection des espaces agricoles ou
naturels. Par contre, l’approche-projet rhônalpine5 fondée sur l’alliance entre acteurs locaux
et la mise en œuvre de programmes agricoles qui se généralisera par la suite en France,
accorde dès 1979 une place centrale à la thématique des circuits courts comme à celle de
la protection et de la mise en valeur des espaces agricoles, de l’intervention foncière et de
l’installation agricole.
La quatrième approche en développement depuis quelques années est liée à l’irruption des
acteurs de la société civile (les AMAP notamment) et aux préoccupations montantes en
matière de ville durable et de métropolisation qui renouvellent le thème des circuits courts
et contribuent à sa généralisation dans toutes les politiques agricoles d’agglomération.
Politiques agricoles périurbaines et circuits courts
Un travail6 récent du réseau Terres en Villes, qui reste à affiner notamment en catégorisant
les histoires urbaines et les sentiers de dépendance des politiques locales, propose une
typologie des politiques agricoles périurbaines des 21 agglomérations membres7. Elle a
été construite à partir de données générales sur le territoire, l’agriculture, les relations
entre agriculture et ville, ainsi que sur les politiques agricole et de planification locales8
(répertoire d’actions, niveau d’intégration et gouvernance).
Cinq grands types ont été identifiés.
Le premier type de politique, « le compromis foncier », cherche à dégager un consensus
local entre extension urbaine et compensation des emprises sur les terres agricoles. C’est
une étape nécessaire mais non suffisante pour construire un projet agricole.
Le second type, « la campagne urbaine » regarde l’agriculture du point de vue de la ville :
il intègre l’agriculture dans le projet urbain en lui faisant jouer un rôle dans l’organisation
du territoire, l’amélioration du cadre de vie, la protection du milieu naturel mais aussi plus
récemment dans la production d’une alimentation de qualité.
Le troisième type, « les opportunités agri-urbaines », qui reste à préciser, et le quatrième
type « le développement agricole périurbain » sont assez proches. Le troisième recherche
une complémentarité multifonctionnelle entre ville et agriculture au gré des opportunités
locales alors que le quatrième aborde la question agricole périurbaine sous l’angle de
l’économie de proximité. Ces deux types sont actuellement profondément renouvelés par
la revalorisation de l’économie territoriale et l’émergence de la question alimentaire.
4 Initiée à la faveur de la circulaire du Premier ministre (1975) instituant les Zones naturelles d’équilibre, l’expérience francilienne a produit une innovation majeure, l’agence des espaces verts (loi du 6 mai 1976) qui met en place les périmètres régionaux d’intervention foncière (PRIF).5 Le premier projet de ce type est celui de la région urbaine lyonnaise en 1979. Grenoble et ses intercommunalités suivent en 1984 , Saint-Étienne en 1987.6 Tétillon, P., « Typologie des politiques agricoles périurbaines des membres de Terres en Villes», stage de fin d’études de l’Institut d’Etudes Politiques de Rennes, Août 2011.7 Hors l’agglomération de Dijon nouvelle adhérente et l’Ile de France8 Etude des grands documents politiques locaux (projet d’agglomération, schéma de cohérence territoriale, charte agricole et autre plan local de l’agriculture) et des fiches actions de la banque d’expériences de Terres en Villes qui regroupe actuellement près de 400 fiches actions des agglomérations membres.J
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Enfin, le cinquième type, « les filières territoriales », tente de conforter le système productif
local et ses filières longues.
Bien évidemment, chaque politique locale combine des éléments de plusieurs types.
Les deux premiers types regroupent très majoritairement les villes des grands bassins
de production céréaliers comme Toulouse, Amiens, Nancy ou laitiers comme Rennes et
Besançon qui ont vu disparaître leurs exploitations spécialisées et diversifiées au fur et à
mesure de la modernisation. Les trois derniers types rassemblent les villes de la polyculture
élevage comme Chambéry, Grenoble, Lyon, Nantes ou les villes méditerranéennes comme
Aix en Provence, Aubagne, Perpignan qui ont gardé jusqu’à présent une agriculture de
proximité diversifiée et des relations fortes entre agriculture et marché local.
Les actions en faveur des circuits courts de proximité et de l’alimentation s’intègrent dans
ce cadre général. Elles sont actuellement une composante obligée de toute politique
agricole d’agglomération. Le sens, les finalités de ces actions et leur intensité diffèrent
selon les types de ville et de politiques menées.
Dans le cas des agglomérations de bassin de production (type 1 et 2), nombre d’acteurs
locaux tiennent un discours présentant l’agriculture périurbaine (et sa politique en faveur
des circuits courts) comme un contre modèle à l’agriculture productiviste. Promotion de
« l’agriculture paysanne » et question alimentaire y sont souvent deux composantes d’une
militance citoyenne. Ailleurs, les circuits courts sont une question culturelle et identitaire
plus consensuelle.
Lors d’un premier travail de comparaison empirique des actions en faveur des circuits
courts dans les politiques d’agglomération réalisé en 2006 et 2007, Terres en Villes et ses
membres avaient cherché à mesurer l’intensité et la diversité des actions en faveur des
circuits courts. Il en ressortait trois cas de figure.
Ce sont les agglomérations caractérisées par le système de polyculture élevage (types 3, 4
et 5) qui ont conduit le plus loin, les actions en faveur des circuits courts : vente à la ferme,
marché de détail, point de vente collectif, paniers, assiettes locales, grande distribution,
carreau des producteurs du marché d’intérêt national, etc. Il s’agit d’une véritable stratégie
en faveur des circuits courts. Selon que la collectivité ou les organismes agricoles en sont
les moteurs, ces actions mettent en exergue le territoire ou l’entreprise. Cette stratégie va
dans certains cas jusqu’à la création d’une marque locale comme à Aubagne, Grenoble,
Lille ou encore Perpignan9.
Un deuxième groupe rassemble les agglomérations de bassins de production des types 1
et 210, qui ont entrepris depuis une dizaine d’années une première diversification agricole.
L’initiative, volontariste, a souvent été impulsée par la collectivité, soit seule, soit en s’alliant
aux acteurs agricoles minoritaires désireux de promouvoir un autre type d’agriculture. Les
conflits, déclarés ou non, ont émaillé ces expériences mais ils tendent à s’atténuer, le thème
étant mieux partagé. Les actions les plus courantes concernent l’aide à la création de points
de vente collectif, l’appui à l’agriculture biologique, la promotion des AMAP et la promotion
des exploitations en vente directe.
9 Dans ce dernier et seul cas, l’initiative vient des professionnels. Cela est lié au double débouché du maraîchage local qui produit pour l’expédition comme pour le marché local.10 L’Est toulousain, Rennes ou Lorient sont bien représentatifs de cette catégorieJ
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Enfin, le troisième groupe rassemble des agglomérations du type 1 qui mettent en place
des premières actions cherchant à initier la diversification de bassins agricoles centrés
exclusivement sur des productions de masse11. Ce sont même parfois les organisations
professionnelles traditionnelles qui tentent de convaincre les exploitants, peu réceptifs, de
s’intéresser au marché local. Cette préoccupation en faveur des circuits courts est devenue
un passage obligé pour pouvoir instaurer un partenariat durable entre la profession agricole
et la collectivité locale porteuse des demandes habitantes.
Ces politiques en faveur des circuits courts ont donc principalement cherché à spécifier
et faire reconnaître « l’agriculture périurbaine », à développer une offre de qualité et à en
favoriser la commercialisation, surtout via les circuits de distribution directe. L’impact de
ces politiques demeure limité à ceux d’une politique de niche.
Ces toutes dernières années, l’action publique nationale et territoriale en faveur des circuits
courts et des circuits de proximité a connu un essor et un renouvellement importants.
Plusieurs préoccupations nouvelles ont été mises à l’agenda politique alors que certains
acteurs économiques forts expérimentaient de nouvelles stratégies commerciales. Bien qu’il
soit encore difficile de discerner ce qui relève d’effets de mode, d’opportunités ponctuelles
et d’engagements durables, on discernera empiriquement trois grandes stratégies.
La première stratégie est portée par les acteurs professionnels agricoles. Elle vise à passer
de la niche au segment de marché en approvisionnant de manière significative les grands
marchés urbains. Face aux crises du marché agricole européen et mondial et à la volatilité
des prix, il s’agit de conquérir des parts de marché pour la production régionale. Pour
cela, il est impératif d’organiser des filières courtes avec une logistique adaptée (plate
forme, légumerie, abattoirs, etc.). L’intervention des collectivités est requise, la régulation
régionale souhaitée. Le circuit privilégié est actuellement celui de la restauration collective
publique, la contractualisation entre producteurs et clients étant une attente forte de la
profession. La posture professionnelle rhônalpine et l’intérêt que commencent à manifester
certaines coopératives agricoles importantes pour l’organisation de l’approvisionnement
des villes est représentative de cette évolution. Au-delà de la profession agricole, des
innovations commerciales comme celles des familles de la grande distribution (cf. la
Ferme du Sart à Lille), la marque « Le petit producteur » présente dans les différents
circuits de commercialisation ou la nouvelle posture des grandes sociétés de restauration
collective (intérêt pour la production biologique, locale et sa logistique de distribution),
annoncent l’arrivée de capitaux importants et du marketing alimentaire. Cette stratégie
d’approvisionnement des marchés alimentaires urbains ne signifie pas pour autant que
l’agriculture urbaine et périurbaine commercialisera mieux ses productions ordinaires
puisque les filières courtes valoriseront vraisemblablement surtout les productions agricoles
de grands bassins ruraux plus éloignés des villes.
Le changement de stratégie des acteurs économiques est amplifié par la mise à l’agenda
politique de la ville durable et de la question alimentaire.
La ville durable est devenue depuis la Charte de Leipzig et le Grenelle de l’Environnement
une politique à part entière. Les préoccupations de durabilité urbaine ont toiletté et élargi
le thème de la nature en ville, cherchant à rompre avec la construction hors sol de la ville.
11 Amiens en est l’archétype.JO
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L’agriculture urbaine et périurbaine12 est convoquée pour participer à une nouvelle gestion
qui tienne compte de la protection de la biodiversité et de l’empreinte écologique des
activités urbaines. « Cette évolution favorise une mise en relation/tension des acteurs de
la nature en ville et de l’agriculture périurbaine, à un moment où nombre d’acteurs du
monde des jardins revendiquent la fonction nourricière et le titre d’agriculteur urbain »
(Bonnefoy, 2011). Elle suscite des actions en faveur de la relocalisation de la production
agricole particulièrement dans le cadre des procédures d’Agenda 21 ou de Plan Climat. Ces
actions privilégient le développement de la production biologique et sa valorisation par la
restauration collective publique. Bien que les résultats de la recherche soient encore très
partiels pour apporter des certitudes, l’idée selon laquelle la relocalisation des productions
agricoles améliore l’empreinte écologique fonctionne souvent comme une évidence
communément admise et légitime l’action des collectivités locales en faveur des circuits
courts.
Enfin, la mise à l’agenda de la question alimentaire (collectivités, Etat et Europe) a suscité
et suscite de nombreuses recherches, interventions publiques et projets européens sur les
systèmes alimentaires et la gouvernance alimentaire.
Des circuits courts à une politique alimentaire d’agglomération ?
Deux grandes conceptions semblent sous-tendre l’action publique. La première, dominante,
borde la question alimentaire au champ de l’organisation de l’approvisionnement de la
ville (particulièrement de la restauration publique) en produits agricoles de qualité et
de proximité (définis selon des critères variables) : Amsterdam et Rome sont les cas
emblématiques les plus communément citées dans les rencontres européennes en raison
de l’exemplarité de leur organisation. Cette approche de la question alimentaire ouvre des
voies nouvelles comme celle du « food planning ». Elle reste toutefois dans le champ de la
production.
La deuxième conception prend en compte l’ensemble du champ alimentaire. On parlera ici
plutôt de politique alimentaire, de gouvernance alimentaire. L’expérience emblématique
est celle menée par le Grand Londres, à travers la « London Food Strategy », qui se traduit
en six plans d’action dépassant l’approche par la production agricole.
En France, le travail réalisé13 en 2008 et 2009 sur la gouvernance alimentaire des
agglomérations par Terres en Villes et ses partenaires14 montre qu’il n’existe pas encore
de politique alimentaire d’agglomération à même de prendre en compte l’ensemble des
champs (champ économique de la production et de la distribution, champ social, champ de
la santé publique, champ culturel, etc.) et d’en assurer à fortiori une cohérence stratégique.
A chaque champ correspondent des systèmes d’acteurs (Fig.5.), des objectifs et des
normes souvent étanches.
Par contre, l’analyse a révélé que dans certaines agglomérations les plus avancées en
matière de circuits courts, émergeaient des connexions entre ces champs. Elle révèle aussi
que le binôme ville centre/intercommunalité était moteur dans cette construction locale
qui associe acteurs publics et privés.
12 Le Plan Nature en Ville du Grenelle a retenu deux actions en faveur de l’agriculture périurbaine, un guide « les agriculteurs, acteurs de la nature en ville » et la mise en place de filières alimentaires de proximité.13 Travail réalisé sur 18 agglomérations du réseau Terres en Villes.14 APCA, TRAME, FNCivam, FNCuma et Inra.J
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Même s’il ne s’agit pas d’une grande région urbaine, Aubagne est le cas français le plus
avancé en matière d’intégration de la problématique alimentaire dans les politiques
agricoles périurbaines. La ville d’Aubagne a initié une politique agricole périurbaine élargie
depuis à la communauté d’agglomération.
Fort d’une grande tradition sociale, la ville a initié un processus structuré de démocratie
participative et mis en œuvre une action alimentaire, notamment en direction des
populations en difficulté : atelier ville santé et épicerie solidaire. Actuellement, ville et
intercommunalité cherchent à croiser la politique agricole intercommunale, les actions
alimentaires communales et la planification urbaine en s’appuyant sur la richesse du tissu
local, dont les AMAP15. L’atelier santé (commune) et la plateforme démocratie participative
(Communauté d’agglomération) sont les lieux de cette première forme de gouvernance
alimentaire.
La liaison entre agriculture périurbaine et politique alimentaire semble actuellement se
chercher entre une conception agricole qui tend à réduire la politique alimentaire à une
relocalisation et à une meilleure valorisation de la production agricole, et, une conception
militante qui peine à faire le lien entre alimentation, projet d’agglomération, planification
urbaine et agriculture réelle du territoire. L’investissement des grandes villes et des
intercommunalités d’agglomération est encore trop partiel pour structurer une politique
alimentaire. A ce point, affleure aussi la question de la territorialisation des grandes politiques
publiques françaises et de la reconfiguration des relations entre Etat et collectivités. Ainsi
la Loi de modernisation agricole institue bien une politique nationale de l‘alimentation
avec l’assentiment des acteurs agricoles mais ignore la dimension territoriale, à fortiori
métropolitaine.
CONCLUSION
L’histoire nous montre que les rapports à l’alimentation ont connu des évolutions parfois
paradoxales. Ainsi, comme il est indiqué dans la conclusion de L’Histoire de l’alimentation
(Flandrin &Montanari, 1996), les mouvements de balanciers entre localisme et ouverture
sur des horizons plus lointains ont toujours existé et proviennent d’une réaction face à
la prédominance d’un des mouvements. Ces processus ont entraîné corrélativement
des rapports eux aussi évolutifs entre les villes et les espaces agricoles périphériques.
Aujourd’hui, plusieurs signaux allant dans le sens d’une reterritorialisation des rapports à
l’alimentation nous interpellent. C’est en ce sens que nous nous sommes demandés si ces
signaux émanant des mangeurs ne pouvaient pas être à l’origine d’un nouveau mouvement
de balancier, constituant ainsi une cure de jouvence pour l’agriculture des territoires
métropolitains, un retour à un système où villes et espaces agricoles de proximité étaient
fortement liés par l’alimentation ou bien une occasion de renouveler ces relations à l’heure
de la métropolisation. La géographicité de l’alimentation semble dessiner un rapprochement
nouveau, créateur d’externalités positives, entre ville et agriculture.
Si les pratiques habitantes sont des facteurs d’évolution des territoires, se posent la question
de la planification territoriale de la question alimentaire et du nouvel enjeu que peut
constituer l’alimentation pour les politiques territoriales des régions urbaines. Evidence
trop aveuglante pour que l’on s’interroge jusque là sur son rôle dans le fonctionnement
urbain (Pérec, 1974, Steel, 2009), le système alimentaire émerge aujourd’hui à l’agenda des
15 Aubagne est le siège du réseau international des AMAPJO
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aménageurs dans le cadre d’un changement des rapports à l’alimentation. En témoigne le
champ des travaux ouverts sur l’ « urbanfood planning », visant à mieux associer monde
de l’alimentation et monde de l’aménagement urbain (Morgan, 2010) dans la fabrique des
territoires.
Les prémices d’une politique alimentaire d’agglomération montrent que des liens se créent
avec des sphères d’acteurs autres que celles du monde agricole, pouvant se retrouver
autour de la question alimentaire pour s’engager dans la construction de territoires
métropolitains. Espaces agricoles et espaces urbains s’engageraient alors dans l’écriture
d’un récit métropolitain à deux mains. Dans cet horizon, le lien entre agriculture et ville
serait renouvelé, dépassant les politiques de relocalisation et de valorisation agricole,
s’inscrivant dans une stratégie territoriale et dans un raisonnement plus englobant sur le «
vivre-ensemble » et la construction de régions urbaines « à vivre » dans lesquelles chacun
peut s’inscrire. L’hybridité des motifs que l’enjeu alimentaire apporte sont aussi ceux de la
transaction entre ville et agriculture et entre acteurs du territoire.
Ainsi, nous nous interrogeons sur les reconfigurations potentielles des acteurs traditionnels
du système agro-industriel et donc sur les politiques de filières territorialisées hybridant
logiques territoriales et logiques de filières qui peuvent émerger. Les systèmes alimentaires
métropolitains et les politiques alimentaires d’agglomérations ne se constitueront sans
doute pas sans ces acteurs.
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et la relocalisation des productions
Terres en Villes, APCA, FNCivam, FNCuma et Trame
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Les agglomérations et métropoles françaises jouent un rôle de plus
en plus important dans la vie quotidienne et l’aménagement du
territoire. La question alimentaire qui a longtemps été une affaireffff
en grande partie régulée par l’Etat et l’Europe, n’échappe pas à cette
évolution. Les enjeux de la durabilité renforcent cette tendance en
reliant la question alimentaire à la lutte contre le réchauffementffff
climatique, au développement économique, à la santé publique,
à l’équité sociale ou encore à l’identité culturelle. Enfin l’émergence
de politiques alimentaires revisite les politiques en faveur de
l’agriculture périurbaine et des traditionnels circuits courts.
A la faveur de l’appel à projet pour la préparation du 1er séminaire
rural français « Territoires, activités économiques et développement
durable » initié par le Réseau Rural Français, Terres en Villes en
collaboration avec l’Assemblée Permanente des Chambres
d’Agriculture, la Fédération Nationale des Coopératives d’Utilisation
du Machinisme Agricole, la Fédération Nationale des Centres
d’Initiative pour Valoriser l’Agriculture et le Milieu rural, Trame
(réseaux des groupes d’études et de développement agricole)
et l’Institut National de la Recherche Agronomique ont souhaité
approfondir cette problématique afin d’aider les acteurs à se repérer
dans le dédale d’une politique complexe en émergence.
Les travaux réalisés en 2008 et début 2009 ont eu pour but de
comprendre les enjeux qui conduisent les collectivités et leurs
partenaires à rechercher à mettre en place une telle politique,
de cerner ses champs et son système d’acteurs, d’identifier les
modalités actuelles de construction et de gouvernance partielle,
d’en commencer à pressentir les grands types d’impacts sur la
nature et la localisation des productions agricoles et des « services
alimentaires » ainsi que sur les solidarités inter territoriales.
Ce document présente les résultats du travail commun. Puisse t’il
contribuer à favoriser une nouvelle approche des coopérations en
faveur d’une politique alimentaire concertée.
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Le projet a rassemblé le monde des agglomérations, les acteurs des réseaux nationaux agricoles et la recherche.
Terres en Villes est le réseau français des acteurs locaux
de l’agriculture périurbaine et regroupe aujourd’hui 20
agglomérations. Chef de file du projet, le réseau a traité les
données de 18 agglomérations membres et de 2 métropoles
européennes, Turin et Barcelone.
L’APCA est le réseau des chambres d’agriculture. Elle a apporté son
expertise en matière d’analyse des grandes politiques publiques
liées à l’alimentation et a réalisé l’état de l’art des principaux
travaux sur l’alimentation.
La FNCUMA intervient en faveur de la mutualisation des matériels
et des moyens nécessaires aux exploitations. Elle a apporté son
expertise en matière d’outils collectifs de transformation et de
valorisation des ressources locales; elle s’est chargée de traiter les
données sur les CUMA.
La FNCIVAM, très impliquée dans le développement des circuits
courts et d’initiatives alimentaires françaises et européennes,
a traité les données sur les CIVAM et a permis, via le réseau
Alimenterra, dont elle est membre fondateur, de prendre en
compte l’expérience londonienne.
TRAME, dans le cadre de ses missions « ressource », a apporté son
expertise sur ces différents sujets et s’est chargé de collecter et ffff
traiter les données sur les GEDA et CETA, qui sont impliqués sur
les projets de diversification et action collectives ou actions liées
à l’alimentation.
L’INRA SADAPT a contribué à la méthodologie générale du projet
et à la mise en perspective des résultats au regard des questions
actuelles de recherche.
Le choix a été fait de confronter travaux d’étude et débats entre acteurs et chercheurs en 5 phases.
1ère phase : stabilisation du champ et des notions complétée d’un
recensement des acteurs intervenants sur la politique alimentaire
aux différents échelons.ffff
2ème phase : état des lieux simplifié de la situation dans 18 des 20
agglomérations1 Terres en Villes qui intègrent le positionnement des
réseaux agricoles (Cuma, Geda, Civam) en matière d’activités liées à
l’alimentaire et aux agglomérations.
3ème phase : état des lieux approfondi de 4 agglomérations choisis
pour leurs caractéristiques particulières et complémentaires :
Aubagne, Grenoble, Lille et Rennes.
4ème phase : comparaison avec trois agglomérations européennes :
Londres, Turin et Barcelone.
5ème phase : synthèse et mise au débat.
et les actes résumés
film « Des prémices de gouvernance alimentaire » qui illustre
les champs et les acteurs de la politique alimentaire à travers
l’expérience d’Aubagne
1 Les derniers territoires adhérents, Ile-de-France et agglomérations de Saint-Nazaire, n’ont pu être pris en compte
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Les actions et les relations entre institutions publiques, entreprises,
associations et individus structurent une sphère alimentaire
marquée par le poids de l’Etat (politique agricole et agro-
alimentaire, normes alimentaires, médecine scolaire, politique des
revenus,…) et la puissance des firmes multinationales.
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Elaboration de l’offreffff
Influence de la demande
Action sur le cadre du marché
Militantisme
Achat/non achat
Vote
Normes
Réglementations
Fiscalité
Octroi d’aides
Marchés publics
Les politiques étatiques constituent de véritables leviers en
matière de gouvernance alimentaire, notamment en termes de
méthode de production et transformation, de réglementation et
de contrôle tout au long de la chaîne alimentaire.
Pour autant, les politiques alimentaires actuelles initiées par
l’Etat sont très axées sur la sensibilisation des consommateurs
et beaucoup moins sur l’incitation économique des entreprises.
Par leur capacité à réguler la production et la distribution, l’Union
européenne ou les organisations internationales (OMS, FAO, OMC,
Banque mondiale) sont également des acteurs prépondérants du
système alimentaire.
Ce contexte encadre fortement la territorialisation des politiques
alimentaires (cf. le Plan National Nutrition Santé par exemple) qui
n’en ont pas moins aussi leurs enjeux et leurs orientations propres
ainsi que leur marge de manœuvre.
Dans les 18 agglomérations, les politiques alimentaires couvrent
deux champs principaux : L’alimentation en tant que telle et le
système de production.
Ces champs se segmentent en plusieurs « sous champs ».
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Les acteurs présents dans le champ des politiques alimentaires
sont divers, de plus en plus liés à la société civile urbaine.
La politique alimentaire est fortement marquée par les mondes
aux cultures spécifiques qui peinent souvent à échanger :
médecins et nutritionnistes dans le sous champ de la santé,
travailleurs sociaux et associations solidaires dans celui du social,
agriculteurs, transformateurs, distributeurs et consommateurs
pour l’économique, militants et associations pour l’environnement.
L’implication forte du mouvement associatif est patente dans
les actions de santé, d’accès social, mais aussi maintenant de
production et de distribution des produits agricoles (AMAP).
L’investissement grandissant des communes et de
l’intercommunalité dans ces différents thèmes est la preuve de ffff
l’émergence de cette politique dans les grandes agglomérations
françaises.
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NSPour les partenaires du projet, « la gouvernance alimentaire territoriale
désigne un nouvel ensemble de coopérations entre les différents acteurs ffff
et les échelons d’intervention géographiques, dont l’arène commune est
l’enjeu alimentaire ».
Cette nouvelle gouvernance consiste à :
Institutionnaliser la concertation
Encourager une multiplication des politiques partenariales
rapprochant sur le terrain acteurs publics et privés
Ménager des combinaisons entre activités économiques et
règles d’intérêt général
Fonder solennellement les coopérations territoriales sur des
contrats d’action publique
Les procédures de type contrat urbain social, plan climat ou agenda
21 ont accéléré, par leur transversalité, la prise en compte de la
question alimentaire alors que dans le même temps les politiques
agricoles périurbaines les plus anciennes cherchaient à mieux
prendre en compte les nouvelles demandes sociales. Toutefois, la
question alimentaire reste encore peu présente dans les grandes
procédures ou outils de l’aménagement du territoire : projet
d’agglomération, SCoT, schéma de développement commercial…
Première marche de la gouvernance alimentaire à l’échelle des
agglomérations, le rapprochement entre les « communes centre » et les
intercommunalités par un double mouvement croisé témoignent des
premières concrétisations.
Les « communes centre » des agglomérations se sont rapprochées
de l’intercommunalité pour optimiser leur politique sociale et
trouver des solutions à leur problématique d’approvisionnement
de la restauration collective, de soutien aux populations des
quartiers défavorisés. Les agglomérations, maîtres d’ouvrage des
politiques agricoles périurbaines, ont cherché à promouvoir les
circuits de proximité et se sont rapprochées des communes. Dans
le même temps les groupements de communes ont été investis
d’un rôle majeur en matière de politique de la ville ou de politique
de développement durable. Cette dynamique partenariale entre
communes et l’intercommunalité a enclenché des relations
nouvelles avec les acteurs privés du monde associatif et du monde
économique. En effet, les programmes développés participent auffff
maillage et à la mise en relation entre acteurs.
Toutefois, contrairement à la gouvernance du programme
alimentaire du Grand Londres considéré comme le modèle
européen, on parlera en France seulement « de segments de
gouvernance ».
En effet, les orientations et actions sont encore souvent trop ffff
sectorialisées et trop limitées. Les lieux de concertation et de
définition de ces politiques sont diffus, peu institutionnalisés.
Certaines commissions intercommunales, conseils de
développement ou ateliers santé pourraient évoluer vers ce statut,
à condition de devenir une instance de concertation établie,
stable, offrant une réelle place à l’ensemble des acteurs concernés
dans la « co-construction » politique.
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L’agglomération d’Aubagne semble la plus en avance. Elle
combine un volontarisme bien ancré en matière de démarche
participative avec une tradition de politique sociale et de politique
agricole périurbaine.
La métropole lilloise est empreinte d’une forte tradition
sociale. La désindustrialisation a très tôt conduit la ville centre
et la communauté urbaine à s’impliquer dans des politiques
volontaristes, notamment en matière d’économie sociale et
solidaire et de programme nutrition et santé. L’agriculture
métropolitaine combine quant à elle ceinture verte et grande
culture. Le poids de l’agro alimentaire est important et le Marché
d’Intérêt National de Lomme joue pleinement son rôle de plate
forme. Aussi, l’intercommunalité et la profession agricole ont-elles
cherché à favoriser le développement des circuits courts grâce à la
marque les maraîchers des campagnes lilloises, au soutien apporté
aux magasins de producteurs, à la mise en place de circuits de
fermes comme dans le Parc de la Deûle. Pourtant, si la thématique
alimentaire est reprise dans les politiques des collectivités locales
et territoriales (implication particulièrement forte de la ville et
du conseil régional, et plus récemment de Lille Métropole), les
champs et les acteurs de ces politiques sont encore très peu reliés
entre eux.
L’agriculture de Rennes Métropole est une agriculture de « bassin
de production » spécialisée dans l’élevage laitier. Pourtant Rennes
est une des métropoles les plus volontaristes en matière de circuits
courts et de politique alimentaire. Ce territoire présente une offre
faible en produits locaux du fait de la bonne organisation des filières
longues et a fortement investi (recherche, programmes européens)
les thématiques circuits courts pour innover dans l’expertise,
l’appui et le développement. Rennes Métropole privilégie la figure
territoriale de la ville archipel et recherche une grande cohérence
entre ses différentes politiques sectorielles. L’intercommunalité relie ffff
production agricole, nutrition, accès social et culture. L’agriculture
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NS et l’alimentation sont ainsi visées dans l’agenda 21, dans le plan
climat et en partie dans le schéma commercial. Comme Aubagne,
Rennes s’appuie sur le binôme commune/intercommunalité voir
le trinôme commune/intercommunalité/pays. La politique de la
ville en matière de restauration collective bio/locale est soutenue
par l’agglomération et l’offre locale est en voie de structuration.
Plusieurs lieux comme la commission prospective (Communauté
d’agglomération) et le conseil de développement (CODESPAR à
l’échelle du Pays) préfigurent une gouvernance territoriale partagée.Le schéma d’acteurs simplifiii é de la politique alimentaire aubagnaise
Le territoire de l’Y grenoblois relève du type « ceinture verte » puisque
le système polyculture-élevage local a toujours entretenu des
relations fortes avec le marché urbain.
C’est aussi un territoire historique de l’innovation technopolitaine,
urbaine… et agri urbaine. La création en 1984 de l’association pour
le développement de l’agriculture dans l’Y grenoblois, association
paritaire entre le monde agricole et les collectivités, a facilité le
dialogue entre mondes agricole et urbain contribuant à définir une
politique concertée en matière d’agriculture, d’espaces, de forêt et
de marchés de détail. La politique circuits courts débute dès la fin
des années 80 pour être structurée en 2002 autour de la marque
territoriale Terres d’Ici.
A cette occasion, la démarche a été élargie à la restauration collective
et plusieurs actions communes ont été conduites avec les acteurs
du secteur social, de la santé publique et de l’économie sociale et
solidaire.
En effet, l’importante société civile grenobloise a investi la question ffff
alimentaire, notamment à la faveur de la mise en place de nombreuses
AMAP ou d’actions solidaires.
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A Barcelone : comme en France, divers institutions ou acteurs
interviennent dans la sphère alimentaire sans réelle stratégie
intégrée.
Dans une métropole où la distribution de détail l’emporte sur
la grande distribution, notamment grâce à un réseau dense de
marchés couverts (40 halles couvertes pour 2 319 stands) qui
écoulent la production catalane, les entrées qui privilégient la
production agricole et l’intégration sociale prédominent. En
témoignent les politiques en faveur de la production agricole et
des parcs agraires (Diputacio et Généralitat) et les actions sociales
via l’alimentation conduites par la ville de Barcelone.
Mais la complexité de la gouvernance barcelonaise (notamment
à l’échelle métropolitaine) et catalane rend difficile leur mise en
cohérence.
A Turin : la capitale du Piémont s’illustre par une forte tradition
agro alimentaire, gastronomique et par un important soutien des
collectivités aux produits de terroir, produits identitaires comme
en témoignent le Salon du goût (Slow food) et Terra Madre, les
paniers de la Province de Turin, le développement des fermes
de l’Agriturismo Piemonte, les restaurants Kilomètre Zéro, le
développement des groupements d’achat citoyens…
Là encore, la complexité de la gouvernance turinoise (absence
de gouvernance métropolitaine, relations délicates entre Turin,
ses premières couronnes et le rural montagnard sous influence
urbaine) ne facilite pas la mise en cohérence des politiques
publiques.
Ville et intercommunalité ont choisi d’accompagner ces actions et
de développer leurs propres projets. La recherche d’une stratégie
intégrée et d’une gouvernance alimentaire stable apparaît aujourd’hui
comme la nouvelle étape à franchir. La difficulté sera de créer un
partenariat public/privé durable, équilibré et capable de prendre en
compte l’ensemble des intérêts des acteurs du système alimentaire
local. La commande publique semble pouvoir jouer un rôle pivot en
la matière.
Le «modèle» Grand Londres : la stratégie locale pour l’alimentation
« London Food Strategy » a été conçue en 2006 avec l’ensemble des
acteurs en réponse aux crises et problèmes alimentaires connus
par la Grande-Bretagne (fièvre aphteuse, vache folle, obésité…) et
dans l’idée de « refuser » que l’agglomération londonienne subisse
les aléas agricoles extraterritoriaux.
Elle s’est traduite par la définition d’un plan d’actions organisé
autour de 6 grandes orientations et s’appuie sur plusieurs acteurs
publics (ville et agglomération) et privés (associations, dont
Sustain et London Foof Link) pour sa mise en oeuvre.
1. Assurer la vitalité commerciale (London Development Agency)
2. Garantir l’engagement du consommateur (Regional Public
Health Group)
3. Utilisation du pouvoir d’achat public comme outil de
développement pour un système d’alimentation plus stable
(Government Office for London, Sustain)
4. Développer les liens entre les régions autour de Londres
(London Development Agency, Sustain)
5. Développer la santé dans les écoles (London Development
Agency, Greenwich Co-operative, Sustain)
6. Réduire le gaspillage de la nourriture et les déchets (London
Development Agency)
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Terres en Villes et ses partenaires, souhaitent approfondir dans les
prochains mois la connaissance de l’ensemble des champs de la
gouvernance alimentaire d’agglomération, particulièrement sur
le champ de la promotion des produits agricoles d’appellation,
du tourisme gastronomique et des valeurs identitaires liées à
l’alimentation, et le champ du commerce et de son organisation. Il
s’agira aussi de mieux appréhender les modalités d’articulation des
politiques publiques des différents niveaux territoriaux intéressantffff
le champ alimentaire et leur mise en cohérence en agglomération :
rôle des services de l’Etat, schéma de développement commercial,
agenda 21, plan climat…
Enfin la question de l’inter territorialité à l’œuvre et des effets deffff
l’émergence d’une politique alimentaire sur la localisation des
productions agricoles reste à étudier plus finement.
La mise en débat des résultats du projet dans le cadre du projet
mené dans le cadre du Réseau Rural Français 2009 et la parution en
2010 de la démarche Terres en Villes :
Le projet « Mise en perspective des circuits de proximité avec les
enjeux alimentaires pour mieux accompagner les territoires », mené
sur 2009 et 2010 dans cadre du groupe Valorisation économique
territoriale des ressources locales du Réseau Rural Français,
favorisera la mise en débat et l’approfondissement des résultats
du projet autour de trois axes (politiques sociales, politiques
environnementales, politiques identitaires) en s’attachant à la
question de gouvernance territoriale.
Par ailleurs, faisant suite à ses travaux ainsi qu’à ce projet, Terres
en Villes publiera au cours de l’année 2010 un guide pour le
développement d’une stratégie en faveur des circuits de proximité.
Ce guide, axé sur la spécificité périurbaine, proposera une démarche
adaptable selon le type de territoire.
Afin de renforcer l’implication des acteurs agricoles dans cette
nouvelle politique, Terres en Villes et ses partenaires souhaitent
conduire une expérimentation dans six grandes métropoles françaises
visant à mettre la qualité au coeur des stratégies de développement
des circuits de proximité des agglomérations durables et à organiser
la commande publique pour mieux développer l’offre des produits
périurbains de qualité dans le cadre du projet CasDar.
Si Terres en Villes et ses partenaires ont pu échanger avec Barcelone
et Turin, c’est grâce à la coopération européenne tissée par des
réseaux comme Alimenterra ou par des membres de Terres en
Villes comme Rennes Métropole ou l’ADAYG.
Alimenterra, dont la FNCIVAM est un des membres fondateurs,
travaille à l’échelle planétaire les questions alimentaires et la
production agricole durable. C’est un compagnon fidèle du
programme alimentaire du Grand Londres.
Rennes Métropole participe à un projet Interreg IVC qui souhaite
capitaliser les bonnes pratiques en matière de systèmes
alimentaires territoriaux durables afin d’en proposer un modèle
d’organisation. Le chef de file est la région anglaise du South
West England. Une dizaine d’autres gouvernements régionaux ou
locaux sont partenaires. Le projet sera déposé en novembre 2009.
L’ADAYG a tissé très tôt des liens avec la Province de Turin et
Agriturismo Piemonte à la faveur des programmes transfrontaliers
Interreg IIA, puis IIIA. Depuis 2009, elle participe à la mise en
oeuvre du projet Interreg IVB Med Rurubal, retenu lors du premier
appel à projets. Rururbal cherche à construire une gouvernance
de la chaîne alimentaire à même de garantir le polycentrisme
des métropoles européennes en valorisant les ressources des
espaces ouverts périurbains. La réalisation d’actions pilotes
concrètes donnera du crédit à la Charte européenne annoncée
pour la fin du projet. Le chef file catalan, le Consell comarcal du
Valles orientales, est secondé par la Diputacio de Barcelone et la
Generalitat de Catalogne. La Communauté d’agglomération du
Pays d’Aix, autre membre de Terres en Villes, y participe ainsi que
les Provinces de Sienne, Turin et l’Université de Thessalonique.
Ce projet est le symbole du partenariat construit entre les trois
réseaux : Terres en Villes, Arc Latin et Purple, réseau européen des
régions périurbaines.
Enfin plusieurs Leader des teritoires de Terres en Villes font la part
belle à la valorisation de la production agricole locale de qualité :
Pays de Lorient, Pays du Mans, Pays Voironnais et Plaine de Versailles...
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Réseau rural français :www.reseaurural.fr
MAP, Diact : www.diact.gouv.fr
http://agriculture.gouv.fr
Terres en Villes : www.terresenvilles.org
APCA :www.apca.chambagri.fr
Ville santé :www.villes-sante.com
Alimenterra :www.alimenterra.org
FNCUMA : www.cuma.fr
FNCIVAM :www.civam.org
Trame : www.trame.org
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24Action Prospective « Villes durables et impacts économiques locaux :
vers de nouveaux modèles économiques ? »
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31Action Prospective « Villes durables et impacts économiques locaux :
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II / AMÉNAGER
@ Réaliser un bon diagnostic agricole de SCoT, Réseau rural français - Terres en Villes,
201016
Cette fiche méthodologique présente la démarche dessinée par Terres en Villes et ses
partenaires, dans le cadre du projet AgriScoT, pour mettre en œuvre dans les territoires
un diagnostic opérationnel. La méthode proposée s’appuie sur l’analyse de diagnostics de
SCoT existants :
@ Diagnostic agricole de la Communauté d’agglomération de la région nazairienne et de
l’Estuaire
@ Diagnostic agricole du SCoT de Montpellier
@ Analyse fonctionnelle des espaces ouverts d’Ile-de-France
L’agriculture dans les SCoT, CERTU, 2012 (sur commande)
Ce guide prolonge le travail pluridisciplinaire entrepris en 2006 par l’équipe « AgriSCoT »
pour dépasser une vision trop « urbano-centrée » de la planification territoriale. A partir
d’une démarche en cinq étapes, ce document apporte des repères aux élus, aménageurs
et professionnels agricoles pour une prise en compte efficiente des espaces et activités
agricoles dans la planification territoriale.
Voir également les documents de synthèse diffusés préalablement à cet ouvrage (en libre
accès) :
@ Choisir de bonnes modalités de protection des espaces agricoles dans les SCoT, 2010
@ L’articulation de la trame verte et bleue avec l’armature verte et bleue, 2010
@ Forme(s) urbaine(s) et agriculture(s) périurbaine(s), 2009
Site de Terres en Villes : www.terresenvilles.org
LES PÉRIMÈTRES DE PROTECTION ET DE MISE EN VALEUR DES ESPACES AGRICOLES
ET NATURELS PÉRIURBAINS (PAEN)
Les PAEN, issus de la Loi relative au développement des territoires ruraux (DTR) de 2005,
constituent à la fois des périmètres de protection et des outils de valorisation de l’activité
agricole. Instaurés par le Conseil général avec l’accord de la ou des commune(s) concernée(s)
(ou de leur groupement à vocation PLU) et sur avis de la chambre d’agriculture, les PAEN
génèrent un droit de préemption au profit des Départements. Toute réduction du périmètre
se réalise par décret interministériel.
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16 Source : Agriculture, alimentation et territoires, repères et préconisations pour des politiques agricoles et alimentaires locales, réseau rural PACA.
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32Action Prospective « Villes durables et impacts économiques locaux :
vers de nouveaux modèles économiques ? »
La loi ne définit pas l’espace périurbain concerné. Elle exclut de ces périmètres les
zones urbaines ou identifiées comme « à urbaniser » dans les POS et PLU et les zones
d’aménagement différé (ZAD).
Il importe avant tout que l’espace identifié soit un espace porteur d’un projet mettant
en valeur la multifonctionnalité reconnue d’un territoire sur lequel les activités et les
aménagements pourront évoluer et se développer conformément à un programme d’action.
Ce programme est préalablement élaboré en concertation avec les différents acteurs
LES ZONES AGRICOLES PROTÉGÉES (ZAP)
Les ZAP, introduites par la loi d’orientation agricole de 1999, sont des servitudes d’utilité
publique instaurées par arrêté préfectoral, à la demande des communes. Elles sont destinées
à la protection de zones agricoles dont la préservation présente un intérêt général en
raison de la qualité des productions ou de la situation géographique.
Tout changement d’affectation ou de mode d’occupation du sol qui altère durablement
le potentiel agronomique, biologique ou économique au sein de la ZAP doit être soumis
à l’avis de la chambre d’agriculture et de la commission départementale d’orientation de
l’agriculture. En cas d’avis défavorable de l’une d’entre elles, le changement ne peut être
autorisé que sur décision motivée du préfet.
III / PRODUIRE,
locaux, 2011
Rapporteuse : Mme Lenie DWARSHUIS-VAN DE BEEK
LE COMITÉ DES RÉGIONS,
I. DEFIS ET OBJECTIFS
estimant que le thème du rapport, «les systèmes agroalimentaires locaux», devrait être
envisagé de manière globale, voudrait souligner que :
La production alimentaire et l’agriculture dans le cadre de la stratégie UE 2020
Le monde est actuellement confronté à un ensemble de défis d’une diversité et d’une
ampleur considérables: croissance rapide de la population, augmentation de la capacité de
dépense, et changement climatique.
Ces défis s’accompagnent de la menace d’une raréfaction des produits alimentaires, des
aliments pour animaux, des énergies fossiles, des matières premières, des fibres et de
l’eau potable ; d’une dégradation croissante des sols et d’une perte de biodiversité ; ainsi
que d’un risque croissant de dysfonctionnement des marchés financiers, de déséquilibre
politique et de conflits armés.
De plus, la sécurité alimentaire subit l’influence: d’un exode rural à l’échelle planétaire, les
populations quittant les zones rurales pour celles des grandes métropoles ; de l’amélioration
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33Action Prospective « Villes durables et impacts économiques locaux :
vers de nouveaux modèles économiques ? »
des résultats obtenus par les sites de production alimentaire qui existent dans le monde; de
la transformation de sites naturels en nouvelles zones de production ; du développement
de nouveaux modes de production ; et de la perte de terrain des zones de production
alimentaire au profit de la production de biocarburants et de l’extension des zones urbaines.
À l’échelle mondiale, l’on estime que 80 % des denrées alimentaires sont actuellement
produites et commercialisées au niveau local. Ce pourcentage n’est que d’environ 20 %
dans l’Union européenne.
Le modèle agricole européen
Il n’existe pas de modèle agricole européen unique, mais plutôt un modèle multiforme,
dont la diversité constitue un atout important.
Pour tirer le meilleur parti possible de ce modèle pluriel, il faut renforcer les liens entre
le secteur agricole et les attentes des consommateurs, de même que les liens entre la
production agricole et les marchés, qu’ils soient locaux, régionaux ou internationaux.
Au sein de ce modèle pluriel, le système agroalimentaire local constitue une question clé
sur laquelle on ne s’est pas encore suffisamment penché, et qu’il conviendrait de soutenir
de manière professionnelle, structurelle et novatrice.
Les objectifs de l’Europe en matière d’agriculture
L’agriculture européenne a pour vocation première de produire et de fournir des biens
alimentaires à la population des États membres, tout en veillant au respect de la concurrence
loyale et de l’environnement, ainsi que des autres conditions nécessaires pour garantir la
sécurité alimentaire, la qualité et des prix raisonnables.
L’agriculture et la production alimentaire devront à l’avenir être plus économes en eau
et en énergies fossiles, moins consommatrices d’engrais et de produits phytosanitaires,
plus diversifiées, et sachant mieux valoriser les complémentarités entre les cultures et
l’élevage, la gestion des déchets organiques, l’énergie résiduelle et la production d’énergie
renouvelable.
Il serait souhaitable que les producteurs tirent un revenu approprié de leurs productions,
mais le système actuel ne permet pas de trouver un rapport de forces équilibré entre
la chaîne d’approvisionnement alimentaire, les prix alimentaires et les marges qui sont
réclamées.
La politique agricole commune après 2013 devra rééquilibrer ses aides en faveur de l’emploi
et du maintien de la présence de l’activité agricole sur l’ensemble des terres cultivables
de l’Europe, en accordant une attention particulière aux zones vulnérables, y compris
les territoires périurbains. C’est pourquoi l’accent mis sur le territoire dans les nouvelles
priorités proposées par la Commission pour la PAC à l’horizon 2020 mérite d’être accueilli
favorablement.
Le développement des systèmes agroalimentaires locaux revêt une importance particulière
pour les collectivités locales et régionales. Ces mêmes collectivités jouent un rôle essentiel
car elles définissent, encouragent et soutiennent un développement durable de l’économie
rurale, en créant notamment les conditions propices aux systèmes agroalimentaires locaux.
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II. AVANTAGES DES SYSTEMES AGROALIMENTAIRES LOCAUX
Le Comité relève que :
Avantages des systèmes agroalimentaires locaux sur le plan économique
Le thème des «systèmes agroalimentaires locaux» revêt une importance capitale et dépasse
largement la question de positionner une nouvelle gamme de produits locaux européens, en
plus des produits qui dépendent du système déjà bien connu des programmes de qualité.
Les systèmes agroalimentaires locaux soutiennent l’économie locale et régionale en
fournissant des emplois dans l’agriculture et la production agroalimentaire, y compris les
activités et services de transformation, de distribution, de commercialisation et de vente.
Ces systèmes sont d’une importance capitale pour les zones rurales reculées, les zones
périurbaines, les zones montagneuses, les zones vulnérables et les zones défavorisées;
ces systèmes constituent un aiguillon pour la valorisation du potentiel local et un facteur
d’amélioration de l’image des territoires méconnus et souvent délaissés.
Lorsque les revenus sont dépensés localement pour l’achat de produits alimentaires locaux,
ils restent à l’intérieur de la région et ont un effet démultiplicateur puissant de l’ordre de 3
sur le revenu régional de la communauté par comparaison avec les circuits commerciaux
ordinaires.
Ainsi, investir dans les systèmes agroalimentaires locaux permettrait de relancer l’économie
dans les zones défavorisées, en générant de meilleurs revenus pour les producteurs
locaux, une coopération plus forte entre les parties prenantes, une redynamisation de
l’entrepreneuriat, de meilleures ouvertures sur les marchés locaux, davantage d’emplois,
des coûts réduits, et la garantie d’un maintien des services et de la prestation de services
au niveau local.
Avantages des systèmes agroalimentaires locaux sur le plan social
Les filières de distribution courtes permettent un renforcement de l’interaction et de la
connaissance/compréhension mutuelle entre consommateurs et producteurs. Par la
connaissance personnelle des producteurs, elles créent des relations de confiance et une
possibilité de traçabilité immédiate des produits pour les consommateurs. Elles fournissent
aussi un niveau minimal de souveraineté alimentaire.
L’offre de produits locaux authentiques, traditionnels, originaux, durables, saisonniers ou
présentant d’autres caractéristiques appréciées localement, est favorable à la cohésion
sociale et à l’esprit de communauté, et encourage la collectivité à adopter un comportement
respectueux de l’environnement. Les lieux de vente de produits locaux, tels que les stands
de vente directe ou les marchés de plein air, sont souvent des maillons d’un processus
d’inclusion sociale et professionnelle pour les consommateurs, les producteurs et les
vendeurs.
Comme le mouvement «Slow Food» l’exprime à travers sa philosophie des «communautés
pour une alimentation durable», les consommateurs possèdent un droit fondamental à une
alimentation goûteuse et saine, produite localement. Ce mouvement estime par ailleurs
que ces communautés devraient se regrouper au sein d’un réseau international. L’accès
à des produits frais dans un délai rapide dans le cadre de la vente de produits locaux JO
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contribue à une meilleure santé publique par la diversification des régimes alimentaires
et la préservation de toutes les qualités organiques des aliments (que les systèmes de
conservation de longue durée amoindrissent).
La sécurité alimentaire mondiale repose sur la préservation d’une capacité de production
agroalimentaire locale dans les pays industrialisés. Dans les zones de grandes métropoles en
pleine croissance, il faudrait, pour pouvoir répondre à la demande alimentaire, développer
la production alimentaire au niveau local, et même urbain.
Avantages des systèmes agroalimentaires locaux sur le plan environnemental
Les systèmes agroalimentaires locaux procurent des avantages sur le plan de l’environnement
grâce à des systèmes de production plus durables, des externalités réduites en matière de
transport (kilomètres alimentaires) et des possibilités de créer des systèmes circulaires
basés sur les déchets organiques, les résidus et l’énergie renouvelable.
Tout produit alimentaire a une contrepartie en «kilomètres alimentaires», c’est-à-dire qu’il
produit des émissions de carbone dues notamment au transport entre le lieu de production
locale et le consommateur. Cela est valable aussi bien pour les produits frais que pour
les produits alimentaires transformés (les ingrédients qui les composent). Les systèmes
agroalimentaires locaux contribuent à réduire le nombre de kilomètres alimentaires produits
par une communauté humaine.
Un produit alimentaire local devrait de préférence avoir une empreinte carbonique inférieure
à celle d’un produit similaire importé. Cette empreinte peut être calculée en réalisant une
analyse du cycle de vie du produit.
Les producteurs augmentent leurs chances de voir leurs arguments de vente spécifiques
correspondre aux attentes des consommateurs s’ils opèrent au sein d’un système
agroalimentaire local. Ces arguments de vente spécifiques peuvent se référer à des modes
de production durables, une production biologique, ou des services associés favorables à
l’environnement.
La création de débouchés locaux, pour des produits alimentaires produits en très petite
quantité ou ayant des caractéristiques gustatives spécifiques, peut contribuer au maintien
de la biodiversité et au développement de variétés de fruits, de légumes ou d’espèces
animales en voie de disparition.
À l’heure actuelle, les systèmes agroalimentaires locaux peuvent être liés à des systèmes
d’économie circulaire et à d’autres défis régionaux tels que la gestion des déchets
organiques, la gestion de l’eau, la réutilisation des résidus de production - par exemple la
chaleur - et l’énergie renouvelable.
Failles de la chaîne d’approvisionnement alimentaire
Les systèmes agroalimentaires locaux peuvent aider à garantir un revenu approprié aux
agriculteurs et à rééquilibrer le rapport de forces dans la chaîne d’approvisionnement
alimentaire. La mondialisation et la concentration accrue dans le secteur de la distribution
alimentaire ont créé un écart entre les hausses des coûts de production (3,6 % par an
depuis 1996), celles des prix à la consommation (3,3 % par an) et celles des prix payés
aux agriculteurs (2,1 % par an). Dans ce contexte, les systèmes susceptibles d’améliorer JO
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36Action Prospective « Villes durables et impacts économiques locaux :
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le pouvoir de négociation des agriculteurs, tels que les circuits de distribution courts,
suscitent un intérêt.
La politique actuelle touchant les produits locaux
La politique de qualité des produits agricoles de l’Union européenne fait intervenir
des critères de qualité qui permettent à des producteurs d’être enregistrés au titre de
l’Appellation d’origine protégée (AOP), l’Indication géographique protégée (IGP), la
Spécialité traditionnelle garantie (STG) ou l’Agriculture biologique certifiée. Des étiquettes
ont été créées pour ces catégories de produits. Elles ne peuvent être utilisées que pour
des produits enregistrés, afin de soutenir les objectifs de commercialisation et d’aider à
protéger les marques. Ces produits sont généralement distribués en volume substantiel, à
travers de nombreux canaux, vers un nombre important de marchés.
Les régions qui cherchent actuellement à préserver leurs valeurs traditionnelles,
gastronomiques et agricoles comptent des douzaines voire des centaines de produits
locaux qui pourraient être intégrés dans un système agroalimentaire local professionnel,
mais n’auraient pas les caractéristiques requises pour recevoir un label AOP, IGP, STG ou
agriculture biologique - bien que certains d’entre eux auraient le potentiel pour parvenir à
ce résultat. Il serait judicieux de créer un cadre complémentaire pour soutenir les produits
locaux.
III. RECOMMANDATIONS POLITIQUES
Le Comité observe que :
Vues déjà exprimées sur les produits agroalimentaires locaux
Le Comité des régions a déjà formulé, dans son avis du 18 septembre 1996 intitulé
«La protection et la promotion des produits du terroir: un atout pour les régions»17, des
recommandations sur les produits agroalimentaires locaux, lesquelles restent pour la
plupart dignes d’attention.
Définitions
Il est nécessaire d’adopter une définition commune du concept de «produit agroalimentaire
local». À partir du moment où tous les aliments sont produits ou transformés localement, il
faut définir des caractéristiques ou des traits de différenciation pour les «produits locaux».
Ces critères doivent être simples et clairs, afin d’éviter des procédures d’enregistrement et
de contrôle complexes.
Un produit agroalimentaire local :
1. est produit au niveau local/régional ;
2. contribue à la stratégie de développement rural locale/régionale ;
3. est vendu aux consommateurs dans le cadre d’une chaîne la plus courte
possible, rationnelle et efficace, c’est-à-dire ne comportant pas plus de parties que :
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a) le producteur ou l’organisation locale de producteurs; b) la partie ou la coopérative
de parties chargée de mettre en relation l’offre et la demande; et c) le consommateur ;
4. peut être vendu dans un magasin de détail ou un marché de plein-air local sur la
base d’un contrat local, mais ne peut pas être vendu sous l’étiquette «produit local» à
une centrale d’achat fournissant des magasins de détail ;
5. est adressé aux consommateurs avec un ou plusieurs argument(s) de vente
spécifique(s) tels que: le goût, la fraîcheur, la qualité élevée, la motivation culturelle,
la tradition locale, la spécialité locale, le bien-être des animaux, le respect de
l’environnement, des caractéristiques touchant à la santé ou à un mode de production
durable ;
6. est commercialisé le plus près possible, suivant un critère de rationalité et d’efficacité:
le paramètre de la distance pourra varier suivant le produit, la région et les conditions,
mais revient à cette question fondamentale: le point de vente est-il le plus proche
auquel le consommateur ait accès (ce qui peut varier de 1 à plus de 50 km) ?
7. est lié à un système agroalimentaire local.
La chaîne courte évoquée ci-dessus peut appartenir aux catégories suivantes :
les producteurs sont également consommateurs, là où les consommateurs font
pousser leurs propres produits ;
les partenariats producteur-consommateur, où les consommateurs mutualisent
les risques et avantages de la production avec le(s) producteur(s), un accord écrit
réglementant la vente directe du produit ;
la vente directe des producteurs aux consommateurs sans accord préalable entre
les deux parties, comme c’est le cas pour les marchés agricoles, les marchés locaux de
plein-air réguliers ou occasionnels et les ventes directes à la ferme ;
la vente par les producteurs dans des points de vente locaux ou à travers des
mécanismes de commercialisation collective, y compris la vente par le biais de nouveaux
medias tels que les portails de vente sur internet, qui permettent une livraison du produit
au consommateur final plus directe ou plus facile que par les filières traditionnelles.
Un système agroalimentaire local :
1. est un système qui relie l’entreprise au consommateur ;
2. concerne des produits qui sont produits localement dans la région d’origine ou dans
une région qui fait partie d’une coopérative de régions d’origine ;
3. est un ensemble de processus imbriqués qui établit un lien entre les producteurs
et : a) les consommateurs, et b) la société, c’est-à-dire l’environnement et l’économie
régionale ;
4. se compose de différents éléments à des niveaux divers, depuis l’exploitation
agricole jusqu’au niveau interrégional, et inclut la production et/ou la transformation
des produits alimentaires, la commercialisation et la promotion, la stratégie de marque
et l’étiquetage, la participation des consommateurs et de la société, la livraison de
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biens publics complémentaires, la distribution et le transport, les normes de sécurité
sanitaire et alimentaire, la gestion des déchets et les autres aspects liés à l’énergie,
ainsi que la formation et l’éducation.
Création et développement d’un «programme agroalimentaire local» et de «systèmes agroalimentaires locaux»
Dans ses futures lignes directrices stratégiques pour le développement rural, la Commission
européenne pourrait suggérer aux États membres d’envisager des objectifs pour développer
des systèmes agroalimentaires locaux dans le cadre de leur stratégie de développement
rural, lesquels seraient mis en œuvre par les collectivités locales et régionales avec le
soutien de l’UE et des pouvoirs publics nationaux.
Dans la mesure où un système agroalimentaire local fonctionne mieux suivant une
approche en partenariat, il convient de soutenir la création de tels partenariats y inclus les
consommateurs.
Un système agroalimentaire local ne peut être mis en place avec succès que s’il est
envisagé plus globalement et de manière intégrée, en tant que partie d’un ensemble
plus large de processus de développement au niveau local ou régional, et s’il fait partie
intégrante de la politique proactive des collectivités locales et régionales, y compris en
matière d’aménagement du territoire. Il serait souhaitable de mettre en place un modèle
stratégique et une feuille de route type pour aider les collectivités locales et régionales
sur ce point. Ce système pourrait intégrer une stratégie foncière dans les zones les plus
soumises à la pression urbaine, afin de faciliter l’installation de nouveaux producteurs.
Les responsabilités suivantes pourraient être déléguées aux collectivités locales et
régionales: approbation de l’enregistrement des produits alimentaires locaux; attribution
du droit d’utiliser le logo «produit local»; mise en œuvre des activités de suivi. Elles
exerceraient ces responsabilités en coopération étroite avec les parties prenantes du niveau
régional, par exemple un groupe Leader, une organisation d’agriculteurs ou une chambre
de commerce. Les résultats pourraient être communiqués au Réseau européen pour le
développement rural, qui serait chargé de leur suivi et de leur mise à jour.
Il convient qu’un système de suivi indépendant tienne compte des principes suivants :
l’évaluation des exigences requises pour accéder au label de qualité de produit local
devrait tenir compte à la fois du produit et de l’entreprise agricole concernée, et être
menée de préférence par une commission régionale ;
l’assistance technique et l’information des producteurs sur les opportunités
commerciales et les conditions techniques d’adhésion aux systèmes ;
il conviendrait sur le long terme de mener des audits sous la forme d’enquêtes, en
veillant à ce que tous les produits, toutes les entreprises et tous les partenaires de la
chaîne approvisionnement fassent l’objet d’une inspection régulière y compris avec les
soutiens des associations de consommateurs ;
les inspections permettraient d’exclure certains produits du programme ;
une tromperie délibérée à l’égard du consommateur devrait être considérée comme
une infraction.JO
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Dans le cadre du marché intérieur, il convient de garantir la protection de la propriété
intellectuelle concernant les produits reconnus et de solliciter l’intervention des États
membres le cas échéant.
Dans le cas d’un développement commercial, ou si la réputation d’un produit fait l’objet
d’une appropriation indue, les produits agroalimentaires locaux devraient pouvoir passer
à un degré de protection supérieure, tel que celui prévu pour les labels IGP, AOP, STG ou
agriculture biologique certifiée.
Critères et outils d’évaluation nécessaires au niveau de l’UE
D’un point de vue administratif, financier et économique, il serait particulièrement judicieux
de proposer un nouvel instrument européen spécialement conçu pour sélectionner et
promouvoir les produits agroalimentaires locaux.
Les mesures proposées pourraient, d’un point de vue typologique, viser à :
créer un environnement favorable, grâce aux outils suivants: cadre législatif, cadre
institutionnel, cadre politique, recherche, formation et éducation ;
intervenir dans la chaîne d’approvisionnement, en recourant à des instruments tels
que la certification, les techniques de commercialisation, la promotion, les partenariats
public-privé et les marchés publics ;
exécuter des actions pilotes et/ou de développement à plus grande échelle, en
soutenant les expérimentations et les initiatives de démonstration, tout comme la
diffusion et la répétition de ces initiatives ;
apporter des financements, qui soient européens, nationaux, régionaux ou locaux.
Par conséquent,
Il convient que l’UE adopte une définition des concepts de «produits agroalimentaires
locaux» et de «systèmes agroalimentaires locaux».
Qu’elle crée un nouveau logo et définisse un symbole commun ainsi qu’une identité propre
pour les produits locaux, qui viendront compléter le règlement sur la politique de qualité
des produits agricoles de l’Union. L’utilisation du label de l’UE repose sur le principe de
la démarche volontaire. Les labels de qualité existants des États membres et des régions
restent valables et utilisables. Tout État membre reste habilité à introduire ses propres
labels de qualité dans ses régions et entités subétatiques.
Il serait souhaitable qu’elle demande au Réseau européen pour le développement rural de
créer une base de données en ligne pour les produits enregistrés.
Il serait souhaitable qu’elle demande au Réseau européen pour le développement rural de
créer une base de données en ligne pour les systèmes agroalimentaires locaux existants, ce
qui permettrait aux parties intéressées de se renseigner sur les meilleures pratiques.
L’UE pourrait créer un programme de commercialisation directe pour les produits locaux
enregistrés, lequel serait mis en œuvre par les États membres au niveau des collectivités
locales et régionales. Ce programme pourrait prévoir un soutien à la promotion des produits
agroalimentaires locaux et dépendre du premier axe du second pilier de la PAC, à savoir la
politique de développement rural. JO
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Il serait souhaitable que l’UE mette en place une mesure de soutien aux collectivités locales
et régionales, aux associations de producteurs ou collectifs d’associations de producteurs
afin d’initier un système de production alimentaire locale. Cette mesure prévoirait des aides
pour les activités mentionnées sous les définitions proposées, avec des investissements
correspondants, et pourrait relever de l’axe 1 et/ou 3 ou des programmes Leader de la
politique de développement rural.
L’UE pourrait également prévoir l’éligibilité des systèmes agroalimentaires locaux à d’autres
fonds tels que le Fonds européen de développement régional, INTERREG, le Fonds social
européen et les programmes-cadres de recherche.
Afin de garantir la sécurité sanitaire et alimentaire, tout le circuit de production et de
distribution devrait respecter la législation sur l’alimentation et les normes obligatoires
d’hygiène. Des solutions alternatives pourraient toutefois recevoir également le soutien des
pouvoirs publics, dans la mesure où les produits alimentaires locaux ne sont généralement
pas élaborés dans un cadre industriel ou à partir de méthodes industrielles.
Effets potentiels des marchés publics
Les marchés publics représentent 16 % du PIB de l’UE. L’article six du Traité établissant la
communauté européenne (1997) exige que toutes les politiques de l’UE tiennent compte
d’objectifs environnementaux et sociaux. Les marchés publics peuvent en même temps
présenter des critères de durabilité, lorsqu’ils sont utilisés pour atteindre des objectifs plus
larges d’ordre social, économique ou environnemental, de manière à offrir des avantages sur
le long terme. À cet égard, la capacité colossale de dépense des gouvernements pourrait
être utilisée comme un levier pour développer les systèmes agroalimentaires locaux.
La directive 2004/18/CE du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 portant
coordination des procédures de passation de marchés publics de travaux, de fournitures et
de services établit que le principe de liberté de circulation des biens doit être respecté en
tout temps, ce qui exclut tout favoritisme à l’égard des fournisseurs locaux.
Toutefois, cette directive fait état de conditions et de critères particuliers qui peuvent
intervenir dans les appels d’offres de contrats de marchés publics, parmi lesquels peuvent
figurer des aspects ou traits spécifiques tels que la fraîcheur ou les conditions de production.
Ces critères ouvrent une possibilité de sélectionner des fournisseurs locaux. Néanmoins,
il est demandé à la Commission européenne d’étudier la possibilité de modifier l’article
26 de la directive afin que la notion de «production locale» puisse devenir un critère de
sélection standard dans les appels d’offres concernant la fourniture de produits alimentaires
pour des collectivités telles que les établissements scolaires, les maisons de repos et les
établissements ouverts au public.
Il est demandé à la Commission de diffuser une large information sur les possibilités déjà
existantes.
Il est demandé à la Commission de profiter de l’opportunité du nouvel acte pour le marché
unique pour clarifier les dispositions existantes et les simplifier dans une approche de
facilitation pour les autorités publiques locales et leurs fournisseurs de proximité.
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LE MÉTABOLISME AGRICOLE DE L’AGGLOMÉRATION FRANCO-VALDO-GENEVOISE
Afin de conduire une politique agricole favorisant une plus grande autosuffisance
alimentaire de l’agglomération franco-valdo-genevoise, une étude a été conduite en 2010
pour connaître le taux actuel de recouvrement des besoins par la production locale.
Il résulte de ces calculs un taux d’autosuffisance alimentaire de l’agglomération de près de
50 % avec des disparités fortes selon les filières (l’arboriculture couvre 135 % des besoins,
la viande bovine seulement 34 %).
Ces chiffres contribuent à orienter la politique agricole locale vers les productions qui
recouvrent à ce jour le plus difficilement les besoins alimentaires.
@ Rapport « Le métabolisme agricole de l’agglomération franco-valdo-genevoise »
« Le processus de spécialisation a été poussé à l’excès et a incontestablement rencontré
ses limites. Il ne s’agit pas de viser aujourd’hui une autonomie agricole et alimentaire
mais d’inciter les collectivités territoriales à soutenir telle ou telle filière qui participe au
développement des territoires ruraux »
CHANGER DE REGARD SUR L’AGRICULTURE D’UN TERRITOIRE
Le travail prospectif, conduit sur l’agglomération rennaise, « Rennes Métropole, ville vivrière
? », pose le débat sur l’agriculture et l’alimentation à l’échelle d’un territoire de manière
inédite. En effet, la méthode utilisée vise à évaluer la faisabilité agronomique, sociale et
technico-économique de l’autonomie alimentaire d’un territoire à l’horizon 2030.
L’étude porte sur la capacité du territoire à répondre aux besoins alimentaires futurs
de la population locale dans 20 ans, dans un contexte de changement climatique, de
renchérissement du prix du pétrole, d’une demande sociétale pour une alimentation locale,
de modification de la Politique Agricole Commune (PAC), etc.
L’ambition de la démarche est de proposer un outil de débat et d’aide à la décision sur
l’avenir de l’agriculture et sur le soutien public à l’activité agricole (installation, foncier,
planification, commercialisation).
Cette réflexion a été initiée dans le contexte spécifique du Pays de Rennes où l’agriculture
est une composante d’une vision territoriale très soucieuse du mieux vivre ensemble, de
l’évolution des comportements de vie et du projet urbain et fondée sur le schéma d’une «
ville archipel ». Ce concept renvoie à un modèle d’organisation territoriale selon lequel l’ «
île principale [Rennes], est reliée à des îlots [bourgs centres], dans un océan de verdure ».
« Rennes Métropole, Ville Vivrière ? » soulève l’idée fondamentale d’une nécessaire
connexion entre l’aménagement du territoire et le projet agricole.
@ Etude complète « Rennes Métropole, Ville vivrière »
@ Présentation résumée et testée sur cinq territoires de Provence-Alpes-Côte d’Azur,
rencontre du 21 juin 2012 (p.5)
@ Présentation du SCoT et de la Ville archipel
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POUR ALLER PLUS LOIN…
@ Guide de la co-construction des politiques agricoles péri-urbaines d’agglomération, Terres en Villes, 2008
Ce guide a pour but d’aider les agglomérations à élaborer leur politique agricole dans le
respect de certaines valeurs, telles que la participation et la co-construction. Ce document
apporte des éclairages utiles à tout territoire, urbain ou rural, qui souhaite s’investir dans le
champ agricole et alimentaire.
AVIS DE L’ADEME
Les avis de l’ADEME, avril 2012
Les circuits courts alimentaires de proximité constituent aujourd’hui une opportunité
économique non négligeable que ce soit pour le producteur (sécurisation de son modèle
économique), le consommateur (prix ajusté au coût réel) ou un territoire (création d’emplois
locaux). S’ils ont une influence plutôt positive sur l’environnement, la diversité des circuits
courts de proximité, ainsi que le manque d’études complètes ne permettent pas d’affirmer
que les circuits courts présentent systématiquement un meilleur bilan environnemental
que les circuits longs, notamment en matière de consommation d’énergie et d’émissions
de gaz à effet de serre.
Les modes de production et notamment la culture, pour les fruits et légumes, de produits
de saison sont beaucoup plus déterminants en matière de bilan environnemental que le
mode de distribution. Par ailleurs, plus de proximité ne signifie pas nécessairement moins
d’émissions de gaz à effet de serre si les moyens de transports utilisés sont inadaptés, si
la logistique est insuffisamment optimisée ou si le comportement du consommateur est
inadéquat.
En renforçant le lien entre producteur et consommateur et en redonnant du sens
tant à l’activité de production qu’à l’acte de consommation, les circuits courts de
proximité présentent un réel potentiel en matière de consommation durable. Il convient
d’accompagner les initiatives et de partager les bonnes pratiques afin d’optimiser les gains
environnementaux portés par ces modes de distribution.
Complémentaires des circuits longs, les circuits courts de proximité doivent permettre
de répondre autant que possible localement à une partie des besoins alimentaires de la
population d’un territoire, en fonction de la capacité agronomique du territoire et en restant
vigilant sur leur performance environnementale.
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IV / DISTRIBUER,
CIRCUITS COURTS ET CIRCUITS DE PROXIMITÉ
La notion de « circuits courts » a été définie par le ministère en charge de l’agriculture dans
le cadre du plan Barnier (2010) visant à développer ces modes de commercialisation. Il s’agit
de la vente de produits agricoles dans laquelle intervient, au maximum, un intermédiaire
entre le producteur et le consommateur. L’objectif est d’améliorer la captation de valeur au
bénéfice de la production. Cette notion ne fait aucune référence à la distance géographique
entre les lieux de production et de consommation.
Dans une approche territoriale, la notion de « circuits de proximité » est préférée à celle de
« circuits courts ». Le terme « proximité » fait en effet référence aux relations économiques
et sociales entre les acteurs d’un même territoire (habitants, agriculteurs, commerçants,
artisans…). Les circuits de proximité traduisent de façon plus juste les préoccupations des
élus locaux au regard des liens et des synergies entre acteurs qui se créent au bénéfice
d’une dynamique sociale et économique du territoire.
Dans le cadre de la politique alimentaire, les principales actions à mettre en œuvre par les
territoires ont pour objectifs d’identifier les liens à développer entre les besoins et l’offre
existants et/ou potentiels, de permettre l’accessibilité par tous à ces produits, de soutenir
une production adaptée à la demande et de contribuer à la qualité des produits.
OBSERVATION DES CIRCUITS ALIMENTAIRES DE PROXIMITÉ
Fortement impliqué dans le développement des circuits alimentaires de proximité, le Parc
naturel régional du Luberon dresse le double constat :
d’un fort développement des formes de commercialisation des produits locaux en
circuits courts (magasins collectifs, paniers de produits locaux, buffet fermier…) ;
d’une diversité d’acteurs impliqués dans leur développement (agriculteurs,
organismes professionnels, consommateurs, collectivités).
L’enjeu est donc moins, selon le PNR, l’impulsion de nouveaux projets, que leur
accompagnement et leur articulation dans le cadre d’une politique cohérente, structurante
et durable. Pour ce faire, le PNR constitue actuellement une base commune de connaissance
des initiatives en circuits courts sur le territoire, à destination des agriculteurs, des
organismes et associations d’appui à l’agriculture, des collectivités et des consommateurs.
Ces données seront mises en ligne dans un espace internet dédié à l’alimentation et à
l’agriculture locale et de qualité sur le territoire du Groupe d’Action Locale Haute Provence
Luberon (PNR Luberon et Pays de Haute Provence), financeur de l’action.
Il s’agit également d’animer, à partir de cet outil, un travail en réseau entre les différents
acteurs impliqués. Celui-ci portera sur l’analyse des données, la capitalisation des expériences
réussies, leur diffusion et leur articulation afin d’éviter qu’elles ne viennent en concurrence.
Source : PNR du Luberon
@ En savoir plus : www.dansvotreassiette.orgJO
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vers de nouveaux modèles économiques ? »
MISE EN PLACE D’UNE RÉGIE AGRICOLE COMMUNALE
Dans le cadre d’une réserve foncière, la commune de Mouans-Sartoux a acquis en 2005 un
ancien domaine agricole composé d’un terrain de 4 hectares et d’un mas provençal, situé à
deux pas du centre-ville. Le recours au droit de préemption urbain a permis à la commune
d’acquérir le domaine en lieu et place d’un promoteur immobilier. Sans projet précis au
moment de l’acquisition, le domaine a d’abord été laissé en l’état.
Parallèlement, soucieuse de la qualité des repas fournis par ses cantines municipales, la
commune a souhaité introduire des produits bio et locaux dans les repas proposés aux
enfants. Devant la difficulté à trouver des fournisseurs pour les produits frais, l’idée est
venue de mobiliser les 4 hectares placés en réserve foncière afin de produire les légumes
nécessaires à l’approvisionnement des cantines.
Afin de soustraire durablement ces terres à l’urbanisation, la parcelle acquise a été classée
en zone agricole dans le cadre de la révision du PLU. Ce sont donc 4 hectares de terrain en
friche, destinés à l’urbanisation qui sont retournés à un usage agricole.
@ Fiche expérience « Régie Agricole Communale de Mouans-Sartoux »
INTÉGRER LA RESTAURATION COLLECTIVE DANS L’AGENDA 21 LOCAL
Dans le cadre de l’Agenda 21 de la Ville de Gap, la Direction de l’Education (en charge
des cantines scolaires) a saisi l’opportunité de la fin de la Délégation de Service Public
des repas scolaires afin de rédiger un nouveau cahier des charges, beaucoup plus orienté
« développement durable ». Celui-ci comprend des exigences sur l’origine des produits,
le bilan carbone des opérations, la proportion des produits labellisés biologiques et/ou
agriculture raisonnée, la saisonnalité et la maturité des fruits.
Or, la cuisine mise à disposition pour la confection des repas n’a pas été conçue pour travailler
des produits frais, mais seulement pour faire de « l’assemblage ». Ainsi, l’entreprise retenue
dans le cadre du marché public a mis en place un partenariat avec un ESAT (Etablissement
et Service d’Aide par le Travail) portant sur la création et la gestion d’une légumerie au sein
de ce centre. Celle-ci permet de transformer les légumes produits par un maraicher local en
produits adéquats (lavage, épluchage, découpe) et de fournir la cuisine centrale selon les
normes d’hygiène de la restauration collective. La ville a confié le suivi de ce marché public
à l’un de ses agents qui est donc en contact direct et permanent avec le prestataire afin de
faire face collectivement aux difficultés et de trouver les meilleures solutions, dans l’intérêt
des partenaires et usagers.
@ Fiche expérience « Cuisine centrale de Gap »
POUR ALLER PLUS LOIN…
@ Agriculture de proximité, circuits courts : les territoires aquitains s’impliquent, Réseau
rural Aquitaine - PQA, 2011
Ce guide s’articule autour de quatre questions : Comment appréhender et susciter la
demande en matière de circuits de proximité ? Comment quantifier et qualifier l’offre
locale et estimer son potentiel de développement ? Comment introduire des produits
locaux dans la restauration collective ? Comment favoriser la synergie entre producteurs et
restaurateurs dans le développement des circuits courts ? JO
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45Action Prospective « Villes durables et impacts économiques locaux :
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@ Diagnostic des circuits alimentaires de proximité sur un territoire, LIPROCO, 201118
Elaboré à partir d’une expérience de diagnostic de la consommation, de l’offre proposée par
les agriculteurs et des circuits d’approvisionnement conduite au sein d’un Pays auvergnat,
ce « Carnet Pro » apporte des éléments de réflexion transférables à d’autres territoires.
@ Construire une observation des circuits courts alimentaires, LIPROCO, 2011
Ce second « Carnet Pro » fait le point sur les avancées méthodologiques de construction
d’un observatoire des circuits courts et outille sur les questions du partenariat et de la
gouvernance alimentaire.
@ Circuits alimentaires de proximité : Vers une stratégie territoriale, Réseau rural et péri-
urbain Nord-Pas de Calais - CERDD, 2012
Ce document, élaboré suite à l’investigation des pratiques d’une quinzaine de territoires en
Nord-Pas de Calais, livre des repères méthodologiques et des points de vigilance sur le rôle
que peuvent jouer les territoires dans l’accompagnement et le développement des projets
de circuits alimentaires de proximité.
@ Mettre en place des circuits alimentaires de proximité, Réseau rural et péri-urbain
Nord-Pas de Calais, 2012
Ce guide présente pour chaque type de porteurs de projet (agriculteurs, intermédiaires et
collectivités) les différentes démarches à suivre pour réaliser son projet de développement
d’un ou plusieurs circuit(s) alimentaire(s) de proximité.
@ Circuits courts et cohésion sociale. Capitalisation et analyse d’expériences conduites sur les territoires ruraux et périurbains, Réseau rural français – INRA et CELAVAR, 2010
Ce document présente des expériences où les circuits courts contribuent à la cohésion
sociale sur le territoire, notamment en permettant un accès à TOUS aux produits alimentaires
locaux.
@ Favoriser une restauration collective de proximité et de qualité : Guide pratique, DRAAF Rhône-Alpes, 2011
Ce guide propose des recommandations pratiques et juridiques à l’attention des
gestionnaires et responsables des restaurants collectifs.
@ Construire ensemble des circuits alimentaires de proximité. Guide à destination des élus et des animateurs de territoires, Réseau rural français - AFIP, 2009
Ce document est d’abord destiné à des animateurs, agents de développement et élus de
territoires qui souhaitent aborder dans leur politique locale la question de l’agriculture et
faire émerger des projets de circuits alimentaires de proximité. On y trouve des informations
et des méthodologies pour aider à l’émergence et à la conduite de projets.
@ Explorez le développement territorial avec les circuits courts de proximité, CERDD, 2010
Ce guide apporte des repères sur l’évaluation de la durabilité (sociale, environnementale,
économique, territoriale) des projets de circuits alimentaires de proximité à l’attention des
agents et élus des territoires.
@ Circuits courts : contribution au développement régional, TRAVERSAC J-B. (coord.),
2011 (sur commande)
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18 Documents consultables sur le site http://liproco-circuits-courts.com/
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46Action Prospective « Villes durables et impacts économiques locaux :
vers de nouveaux modèles économiques ? »
Du marché de plein vent au panier de fruits et légumes, cet ouvrage éclaire, à travers
divers exemples dans plusieurs régions françaises, l’organisation du travail et l’inscription
territoriale des acteurs et de leurs produits dans différentes configurations d’espaces et de
réseaux sociaux.
V / CONSOMMER
En 2010, le Pays de la Jeune Loire et ses Rivières (Haute-Loire), désireux de favoriser le
développement de la consommation de produits alimentaires locaux, a commandité un
diagnostic de la production, de la transformation, de la distribution et de la consommation.
Effectuée dans le cadre du projet de recherche LIPROCO (PSDR), l’analyse de la demande
visait à connaître les comportements alimentaires généraux et plus précisément la
consommation réelle de produits locaux et son potentiel de développement sur ce territoire
de 83 000 habitants dont un quart vivant dans l’aire urbaine stéphanoise. Le bilan de la
consommation avait pour objectif de déterminer la fréquence d’achat en produits locaux
(84,6 % des 294 répondants sont des acheteurs réguliers), les catégories de produits
concernées (produits laitiers et viandes dominent), les lieux d’approvisionnement (marchés,
commerces traditionnels et grandes surfaces arrivent en tête), ainsi que les motivations
(fraicheur des produits, soutien à l’agriculture locale, qualité gustative supérieure sont les
premières citées). Quant à l’étude du potentiel de consommation, elle a permis de mieux
cerner les intentions d’achat des consommateurs (40,2 % pensent acheter plus de produits
locaux dans l’année à venir, en priorité des fruits et des légumes), ainsi que les facteurs
pouvant les inciter à augmenter leur consommation (mieux identifier les lieux de vente,
rendre accessibles les produits locaux dans les lieux d’achats alimentaires habituels des
consommateurs, mieux les identifier dans les magasins, pratiquer des prix moins élevés ou
plutôt changer les représentations sur les prix…).
@ Bilan et potentiel de consommation de produits locaux dans le Pays de la Jeune Loire
et ses rivières
FAIRE PARTICIPER L’ALIMENTATION À LA COHÉSION SOCIALE ET TERRITORIALE
Convaincue du potentiel d’une politique alimentaire pour la dynamique et la cohésion du
territoire, la Communauté d’agglomération du Pays voironnais a recours à l’alimentation
comme vecteur d’échanges entre les habitants et de liens au territoire. Ainsi, dans le cadre
de la politique de la ville, des actions ont été conduites avec les CCAS (Centres communaux
d’Action sociale) dans les quartiers d’habitat social où l’alimentation a servi de support aux
échanges. D’autres projets et actions dans lesquels l’alimentation sert de lien entre les
habitants du territoire ont été soutenus tels que les fermes ouvertes (vendredis fermiers,
spectacles à la ferme), jardins partagés, etc. Une réflexion est également en cours sur la
création d’un centre sur le thème de l’alimentation comme lieu de rencontre entre ville et
campagne.
Présentation de Frédéric DELATTRE, Pays voironnais :
@ Compte-rendu de la rencontre du 8 juin 2011 (p. 6)
@ Diapositives
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FOCUS GROUPE ALIMENTATION DURABLE ET GOUVERNANCE ALIMENTAIRE DES VILLES DE DEMAIN
47Action Prospective « Villes durables et impacts économiques locaux :
vers de nouveaux modèles économiques ? »
VI / COMMENT S’INSCRIRE DANS UN CHANGEMENT
DE PRATIQUES ET DE MODÈLE ?
LA SOCIÉTÉ CIVILE ASSOCIÉE AU DIALOGUE
Lors du premier forum agricole organisé par l’agglomération du Pays d’Aubagne et de
l’Etoile, les agriculteurs ont été surpris par l’invitation de la société civile à participer et à
s’exprimer sur l’agriculture. L’association France Nature Environnement y fut notamment
conviée pour présenter le concept d’agriculture « Haute Qualité Environnementale ».
Finalement, cette rencontre a permis à tous de prendre conscience que l’agriculture n’est
plus seulement une question réservée aux agriculteurs. Ces derniers ont également compris
l’intérêt de partager avec les citoyens l’enjeu de préservation de l’agriculture pour le porter
ensemble et non séparément.
@ Fiche expérience « Charte pour une agriculture durable - Pays d’Aubagne et de l’Etoile »
LE FORUM PARTICIPATIF, ESPACE D’ÉCHANGES ENTRE LES ACTEURS
La Communauté d’agglomération du Pays d’Aubagne et de l’Etoile a pris le parti d’organiser
un forum participatif avec des ateliers thématiques où chacun a pu s’exprimer par écrit et
oralement. Les partenaires du projet (Chambre d’agriculture, Centre d’Etudes Technique et
d’Animation, SAFER, Alliance Provence) étaient fortement impliqués dans l’organisation et
la réalisation de ce forum. L’animation de chacun des ateliers, préparés en amont avec un
consultant, était assurée par deux personnes de ces structures partenaires. De plus, deux
autres personnes consignaient par écrit l’ensemble des paroles des participants.
@ Fiche expérience « Charte pour une agriculture durable - Pays d’Aubagne et de l’Etoile »
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FOCUS GROUPE ALIMENTATION DURABLE ET GOUVERNANCE ALIMENTAIRE DES VILLES DE DEMAIN
48Action Prospective « Villes durables et impacts économiques locaux :
vers de nouveaux modèles économiques ? »
EN PERSPECTIVE : POURSUIVRE LA RÉFLEXION
ET ÉLARGIR LA DYNAMIQUE D’ACTEURS !
L’espace de dialogue que nous développons vise en premier lieu à renforcer le potentiel
d’innovation des acteurs de la ville durable en Nord-Pas de Calais et de rechercher un effet
d’entraînement. En tant qu’acteurs de la ville de demain, rejoignez-nous et contribuez à
renforcer la dynamique entreprise par le Cerdd et la CCI Grand Lille ! Cette dynamique
se veut à votre service, au service de l’innovation pour la ville de demain en Nord-Pas de
Calais.
POUR REJOINDRE LA DYNAMIQUE, CONTACTEZ :
Au Cerdd : Tél : 03 21 08 52 40
jclipovac@cerdd.org
Antoine Boutonné : aboutonne@cerdd.org
A la CCI Grand Lille : Tél : 03 20 63 77 77
Didier Copin : d.copin@grand-lille.cci.fr
c.bartholeyns@grand-lille.cci.fr
POUR EN SAVOIR PLUS
L’ensemble des dossiers préparatoires, les comptes-rendus des séances de travail, la
« Synthèse du premier Cycle d’échanges sont en téléchargement sur le site du Cerdd et de la
CCI Grand Lille : www.cerdd.org, rubrique Développement Durable, puis Urbanisme.
JOURNÉE ET DOSSIER RÉALISÉS PAR :
Atemis : www.atemis-lir.com
Contact : Patrice Vuidel / Tél : 06 75 98 62 75 / p.vuidel@atemis-lir.com
Terres en Villes : www.terresenvilles.org
Contact : / Tél : 04 76 20 68 28 / s.bonnefoy@terresenvilles.org
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