la culture : L’homme est-il un animal comme les autres

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la culture :

L’homme est-il un animal comme les

autres ?

1. La conception traditionnelle de l’homme : le créationnisme

L'entrée dans l'Arche de Noé. Enluminure de Jacquemard de Hesdin,

XVe s., France.

I. L’homme, un être à part dans la nature ?

Créationnisme : théorie se basant exclusivement sur le texte biblique

de la Genèse (ou ses reprises coraniques) pour penser quand et

comment se sont formés l’univers, la terre, les êtres vivants,

l’homme.

- Datations

- Fixisme

La scala naturae :

représentation classique

de l’ordre de la création,

hiérarchique et immuable

Gravure de 1579

von Linné

« Il y a autant

d’espèces différentes

que l’Être infini en a

créées au départ »

Buffon

Les naturalistes au XVIIIe siècle sont créationnistes et fixistes

2. La filiation homme/animal: l’évolutionnisme de Darwin

(1859)Charles Darwin

- observations en Argentine

- observation des Galápagos : chaque

espèce de pinçon est adaptée à son milieu

« Le voyage à bord du Beagle (1831-1836 ) »

Le rôle du hasard

La sélection naturelle

La transmission héréditaire

Les grands principes de la théorie de Darwin

Les variétés sont des

espèces naissantes!

Similitudes et variations entre les espèces proches

Proailurus, ancêtre

le plus probable des

félins, vivait il y a 25

millions d’années

L’archeopteryx

entre les espèces éloignées :

Toutes les espèces vivantes sont parentes

l’homme n’a pas de place singulière dans l’ordre de la « création »

Il n’est qu’un moment

dans une évolution contingente

Contingent : qui pourrait être autrement qu’il n’est / qui

pourrait ne pas exister

« On ne peut plus croire que l'homme

soit l'œuvre d'un acte séparé de

création »

« avec toutes ses capacités sublimes,

l'homme porte toujours dans sa

construction corporelle l'empreinte

indélébile de sa basse origine. »

Conséquence : l’idée d’une supériorité de l’homme

- n’a plus de sens en biologie

- est contestée en ϕ

Toutes les espèces d’ hominidés ont eux-mêmes un

ancêtre commun avec tous les primates, dont font

partie les actuels singes.

3.comportements et sociétés humains s’expliquent-ils par la

biologie évolutionniste ?

Notre cerveau est hérité de nos ancêtres

cause physique immédiate de nos comportements

Donc des comportements en commun avec nos ancêtres

Donc avec nos parents les animaux.

Comportements d’agression / réaction

→ une origine naturelle de la violence

Comportements empathiques

→ une origine naturelle de l’attachement

Certains cptms peuvent s’expliquer par la biologie.

Mais tous ? …

Darwin

VS

Spencer

le « darwinisme » social de H. Spencer

•Individus et sociétés humaines évolueraient comme les êtres vivants

- la lutte pour la vie

- le progrès

•de la théorie à l’idéologie politique :

- au sein des sociétés

- entre les sociétés

Darwin : le processus de civilisation distingue l’homme du régime des

autres espèces.

Bien que l’homme soit le résultat de l’évolution, une rupture s'établit chez

l’homme

Nous autres hommes civilisés, au contraire,

faisons tout notre possible pour mettre un

frein au processus de l'élimination [des plus

faibles]; nous construisons des asiles pour les

idiots, les estropiés et les malades ; nous

instituons des lois sur les pauvres … »

Si importante qu'ait été, et soit encore, la

lutte pour l'existence, cependant, en ce qui

concerne la partie la plus élevée de la

nature de l'homme, il y a d'autres facteurs

plus importants. Car les qualités morales

progressent, directement ou indirectement,

beaucoup plus grâce aux effets de

l'habitude, aux capacités de raisonnement,

à l'instruction, à la religion, etc., que grâce à

la Sélection Naturelle ; et ce bien que l'on

puisse attribuer en toute assurance, à ce

dernier facteur les instincts sociaux, qui ont

fourni la base du développement du sens

moral.

II. L’Homme est un être doué de culture

1. L’Homme est un « animal social » (Aristote)

« Il est manifeste, (…), que l'homme est par nature un

animal politique, et que celui qui est hors cité, naturellement bien

sûr et non par le hasard des circonstances, est soit un être

dégradé soit un être surhumain »

Les Politiques, I,1

Aristote (-384 -322)

Le cas des « enfants sauvages » semble venir confirmer cette idée :

Victor de l’Aveyron

Photos extraites du film de François

Truffaut, L’Enfant Sauvage

•être humain au sens biologique : avoir une certaine nature•être humain au sens « moral » : avoir acquis certaines manières d’agir : une culture

… au moins deux notions de l’humain :

1/Ce qui rend un être cultivé → Processus de formation de l’esprit humain, par lequel celui-ci accède à une forme de vie plus élevée → connaissances (scientifiques, historiques, artistiques…)

Cicéron (Ier s. a.v.J.C.)

« Un champ, si fertile soit-il, ne peut être productif sans culture, et c’est la même chose pour l’âme sans

enseignement »

2. la notion de « culture » : un terme équivoque

Erasme

« on ne naît pas

homme, on le

devient »

2/ la culture d’une société peut désigner son patrimoine matériel ou immatériel : ce qu’elle a crée en termes d’arts, de techniques, etc. dans son histoire.

3/ mode de vie et manières de penser acquis par l’individu en société (sens ethnologique)

les croyances

Les savoirs

La langue

Les savoir-faire et les arts

Les techniques de production et le commerce

Les mœurs, les coutumes

Le droit et la morale

c’est l’ensemble des « faits sociaux » (Durkheim),

les manières d’agir et de penser

- qui préexistent à l’individu

- qui s’imposent à lui.

• la nature de l’homme. Équivoque.

- les caractéristiques que nous ne pouvons pas changer

- l’ensemble des caractéristiques qui définissent un homme

(syn : essence)

- l’ensemble des caractéristiques que nous tenons de l’hérédité

biologique : l’innée.

→ nous avons de besoins naturels

3- l’homme répond à ses besoins naturels d’une

manière culturelle

• mais l’homme répond à ses besoins naturels

d’une manière variable selon sa société

→ culture différente / nature uniforme

• Concept° ordinaire : la famille est une entité naturelle, car:

- « liens de sang »

- F° naturelle (reproduct° et survie des enfants).

Ex : étude de la famille ou « lien de parenté » par LS

• ethnologie : les structures familiales et rôles assignés à chacun des

membres varient d’une société à une autre.

famille eskimo = famille occidentale.

≠ Système « hawaïen »

Système « iroquois »

4- L’homme, un « animal symbolique »

L'homme a, pour ainsi dire, découvert une nouvelle méthode d'adaptation aumilieu. Entre les systèmes récepteur et effecteur propres à toute espèce animaleexiste chez l'homme un troisième chaînon que l'on peut appeler systèmesymbolique. Ce nouvel acquis transforme l'ensemble de la vie humaine. Comparéaux autres animaux, l'homme ne vit pas seulement dans une réalité plus vaste, ilvit, pour ainsi dire, dans une nouvelle dimension de la réalité. Entre les réactionsorganiques et les réponses humaines existe une différence indubitable. Dans lepremier cas, à un stimulus externe correspond une réponse directe et immédiate ;dans le second cas, la réponse est différée. Elle est suspendue et retardée par unprocessus lent et compliqué de la pensée. Le bénéfice d'un tel délai peut semblerà première vue bien contestable. (…) Il n'existe pourtant aucun remède contre cerenversement de l'ordre naturel. L'homme ne peut échapper à son propreaccomplissement. Il ne peut qu'accepter les conditions de sa vie propre. Il ne vitplus dans un univers purement matériel, mais dans un univers symbolique. Lelangage, le mythe, l'art, la religion sont des éléments de cet univers. (…) L'hommene peut plus se trouver en présence immédiate de la réalité ; il ne peut plus lavoir, pour ainsi dire, face à face. La réalité matérielle semble reculer à mesure quel'activité symbolique de l'homme progresse. Loin d'avoir rapport aux chosesmêmes, l'homme, d'une certaine manière, s'entretient constamment avec lui-même. Il s'est tellement entouré de formes linguistiques, d'images artistiques, desymboles mythiques, de rites religieux, qu'il ne peut rien voir ni connaître sansinterposer cet élément médiateur artificiel.

Ernst Cassirer

• Voca. Symbole a ici un sens large : signification

Un mot a une significationUn tableau compose des significations Un rite religieux n’est pas fait pour rien : il a un sens

• thèses 1 de Cassirer : le milieu de l’individu humain n’est pas

directement le milieu naturel mais surtout le « milieu symbolique » de sa

culture.

ex : distinction des arbres en fonction des mots dont on dispose.

notre langue nous fournit une classification naturelle qui conditionne

nos perceptions.

→ L’homme perçoit le monde de manière médiate : à travers des

concepts, des significations

- ex : je ne satisfait aucun instinct de manière « sauvage », sans

« manière », instinctive

→ l’homme agit généralement de manière intentionnelle,

signifiante (poursuit un but en suivant des méthodes et des règles)

• thèse 1 de Cassirer : le milieu de l’individu humain n’est pas

directement le milieu naturel mais surtout le « milieu

symbolique » de sa culture.

deux niveaux de signification – deux arguments

poule canardpintade faisan

gallinacée palmipède

volailles

oie

Espèce 1 Espèce 2 Espèce 3 Espèce 4

Genre genre

Genre

Argument 1- Nous ne percevons/concevons notre environnement pas à

partir de l’impression immédiate des objets sur nos organes sensoriels.

Nous percevons à partir de concepts qui nous permettent d’identifier, de

distinguer,

de classer les objets

Ces concepts sont notamment acquis par le langage.

Lance sumérienne décorée en l’honneur d’un roi, déposée dans un sanctuaire (2800 av JC)

L’outil n’est pas seulement une lance, ni n’est seulement utile » :symboles de pouvoirs, objets artistiques, etc.

nous ne nous contentons pas d’identifier/ classer les objets (premier niveau de signification)…

Peintures corporelles (ici aborigènes) : le corps est porteur de symboles (adulte, guerrier, statut marital… )

La mort n’est pas simplement la fin de la vie naturelle : c’est un événement signifiant, passage à une nouvelle vie.

Argument 2 : nous donnons un second sens aux objets, selon le rôle qu’ils

jouent dans nos pratiques culturelles.

- Sens esthétique

- Sens religieux

- Sens ludique …

• Thèse 2 de Cassirer : C’est l’esprit humain qui crée ces « symboles ».

Il n’y est pas déterminé par son organisme. Liberté de l’esprit.

5- la culture semble s’incrire dans la continuité de la nature

• l’acquisition d’une culture est impossible sans une certaine nature appropriée

certains organes (main, larynx, cerveau… ), donc un certain ADN

• il existe d’autres espèces sociales et des « proto-cultures »

- nombre d’espèces acquièrent des capacités par l’expérience (acquis) ≠ instincts (innés)- dans les espèces sociales,

certains de ces acquis sont des acquis sociaux

Proto- culture : première forme de

culture présente dans le monde animal

Le « milieu symbolique » a du s’insèrer progressivement dans

notre milieu naturel, notamment par le langage.

La culture humaine s’est ainsi démarquée d’une simple proto-

culture.

Lance sumérienne décorée en l’honneur d’un roi, déposée dans un sanctuaire (2800 av JC)

les aptitudes humaines spécifiques ont « émergé » à partir de l’animalité (Darwin)

Si importante qu'ait été, et soit encore, la

lutte pour l'existence, cependant, en ce qui

concerne la partie la plus élevée de la

nature de l'homme, il y a d'autres facteurs

plus importants. Car les qualités morales

progressent, directement ou indirectement,

beaucoup plus grâce aux effets de

l'habitude, aux capacités de raisonnement,

à l'instruction, à la religion, etc., que grâce

à la Sélection Naturelle ; et ce bien que l'on

puisse attribuer en toute assurance, à ce

dernier facteur les instincts sociaux, qui ont

fourni la base du développement du sens

moral.

les aptitudes humaines spécifiques ont « émergé » à partir de l’animalité (Darwin)

Caractéristiques et aptitudes biologiques

« Instincts sociaux »

Aptitudes culturelles

explique

Mécanismes sociaux et historiques

Sélection naturelle

explique

III- L’homme est l’animal qui « nie » sa nature

« Je pose en principe un fait peu

contestable : que l'homme est l'animal

qui n'accepte pas simplement le donné

naturel, qui le nie. Il change ainsi le

monde extérieur naturel, il en tire des

outils et des objets fabriqués qui

composent un monde nouveau, le

monde humain. L'homme parallèlement

se nie lui-même, il s'éduque, il refuse par

exemple de donner à la satisfaction de

ses besoins animaux ce cours libre,

auquel l'animal n'apporte pas de

réserve ».

Georges Bataille (1897-1962)

1- la thèse hégélienne : l’homme refuse sa propre animalité

Voca : négation (Hegel) : opposition. (logique dialectique)

L’esprit, de l’individu ou de la société (= l’homme, la personne ou la société) suit un mouvement « dialectique » : après s’être confondu avec la nature (thèse), il s’y oppose (antithèse), puis s’oppose à son état opposé et séparé; jusqu’à trouver une position de synthèse.

« Je pose en principe un fait peu

contestable : que l'homme est l'animal

qui n'accepte pas simplement le donné

naturel, qui le nie. Il change ainsi le

monde extérieur naturel, il en tire des

outils et des objets fabriqués qui

composent un monde nouveau, le

monde humain. L'homme parallèlement

se nie lui-même, il s'éduque, il refuse par

exemple de donner à la satisfaction de

ses besoins animaux ce cours libre,

auquel l'animal n'apporte pas de

réserve ».

Nier sa nature, ce n’est pas se suicider : c’est au contraire la vie même de l’esprit.

Pour Hegel, le moteur du réel est toujours l’opposition à soi-même. C’est manifeste chez

l’homme, qui progresse ainsi : voir par exemple la crise d’adolescence et son

dénouement ; voir sinon certains cycles historiques.

Que l’homme soit l’animal qui nie son animalité n’est donc que paradoxal, mais ce n’est

pas réellement contradictoire.

a- L’homme nie la nature hors de lui par la transformation de son milieu

Cultures dans le Kansas cultures dans une zone désertiques entre l’Afrique du sud et la Namibie

•Mise à distance de la dimension animale du corps :

-Vêtements : fonction naturelle mais aussi fonction morale : pudeur

b- L’homme nie la nature en lui : le refus de l’animalité

- transformation du corps : rite d’initiation et esthétisation quotidienne

peinture corporelle chez les Aborigènes d’Australie / Rituels de scarification chez les Papous

•Maîtrise des instincts par l’intériorisation de règles

→ Négation de certains réflexes instinctifs

→ Contrôle des instincts : différer la satisfaction des besoins

adopter une manière de les satisfaire

•apprentissage de pratiques qui sont entièrement « symboliques »

(sans fonction naturelle)

Exemples :

Les arts et le jeu

Conclusion :

• identité homme/animal (sciences du vivant et Darwin)

- l’homme est, sur le plan biologique, un animal.

Le dualisme homme / animal est donc indéfendable.

- il fait partie des espèces sociales, animées par une tendance à la sociabilité, et

aquiérant des aptitudes en société.

• une différence animal humain / non humain : le « milieu symbolique » (Cassirer)

- En société, l’homme développe ses aptitudes mentales, notamment par le

langage

- conséquences : il perçoit le monde à l’aide de significations

ses actions ont du sens.

• par la conscience qu’il a de lui-même, l’homme est l’être qui prend conscience

de son animalité et qui la transforme, voire la refuse (Hegel).

cela ne l’empêche pas d’être un animal (contre Hegel), un animal paradoxal.

Facteurs culturels Facteurs individuels ( ψ individuelle)

Facteurs naturels

douleurs

respirationdigestion

Arts, religionJeux de hasard suicide

jeux , sports

pratiques esthétiquespréférences alimentaires

alimentation, orientation sexuelle sexualité

Préférences individuelles, désirs particuliers

Appendice : 3 sortes de facteurs dans les comportements humains

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