Maxi fiches sciences economiques
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- 1. Sciences conomiques
- 2. Sciences conomiques Bertrand Blancheton
- 3. Dunod, Paris, 2009 ISBN 978-2-10-053653-5
- 4. V Table des matires Table des matires V Mode demploi 1 1.
Richesse, rpartition, progrs 2 1. Le produit intrieur brut 2 2.
Linstabilit de la croissance conomique 6 3. Les revenus 8 4. La
consommation 10 5. Linvestissement 12 6. Le dveloppement conomique
14 7. La pauvret 16 8. Les enjeux du dveloppement dune conomie de
service 18 2. Les grandes thories conomiques 22 9. Adam Smith et la
richesse des nations 22 10. Lanalyse conomique de Ricardo 24 11. La
loi de Say 26 12. Les termes du dbat sur les Corn Laws 28 13.
Lanalyse noclassique 32 14. Lanalyse macroconomique de Keynes 34
15. Les rigidits de prix 38 16. La courbe de Phillips 42 17. La
nouvelle conomie classique 46 18. La nouvelle conomie keynsienne 48
3. Les grands moments de lhistoire conomique 22 19. La Rvolution
industrielle anglaise (1760-1830) 50 20. La rvolution des
transports 54 21. La croissance des tats-Unis au XIXe sicle 58 22.
La restauration Meiji au Japon 62 23. La dflation britannique des
annes 1920 66 24. Lhyperinflation allemande 68 25. La Nouvelle
conomie Politique en URSS 70 26. La crise de 1929 74 27. Le New
Deal 78
- 5. Table des matires VI 28. Les Trente Glorieuses 80 29. Le
miracle conomique japonais 84 30. Les crises de mai 1968 en France
86 31. Les chocs ptroliers de 1973 et 1979 88 4. Lentreprise et son
organisation 22 32. Les thories conomiques de lentreprise 92 33. La
direction dentreprise 94 34. Le taylorisme 96 35. Le fordisme 98
36. Le toyotisme 100 37. Les firmes multinationales 102 38.
Nationalisations et privatisations 104 5. Le travail 22 39. La
population active 106 40. Lemploi en France 108 41. Le march du
travail 110 42. La mesure du chmage 112 43. Les explications du
chmage 114 44. La thorie du salaire defficience 118 45. Salaire
minimum et emploi 120 46. volutions et caractristiques du chmage
124 47. Les politiques de lemploi en France 126 6. Monnaie, banques
et marchs financiers 128 48. La monnaie 128 49. Monnaie et activit
130 50. Linflation 132 51. Cots et avantages de linflation 134 52.
La dflation 136 53. Lpargne 138 54. Les marchs financiers 140 55.
Les banques 142 56. Les banques centrales 144 57. Lautonomie de la
Banque centrale 146 7. Lconomie europenne 148 58. Lintgration
europenne 148 59. Le Systme montaire europen 152 60. La politique
agricole commune 154
- 6. Table des matires VII 61. La Banque centrale europenne 156
62. Leuro 158 63. Le Pacte de stabilit et de croissance 160 64. La
politique montaire de la BCE 162 8. Lconomie internationale 166 65.
quilibre externe et balance des paiements 166 66. Les dterminants
du commerce international 168 67. La comptitivit dune conomie
nationale 170 68. Le choix dun rgime de change 172 69. La
dvaluation 174 70. Les interventions sur le march des changes 176
71. Lvolution du cours euro/dollar depuis 1999 178 72. La thorie
des zones montaires optimales 180 73. Le triangle des
incompatibilits 182 74. Ltalon-or 184 75. Le systme de Bretton
Woods (1944-1971) 186 9. La mondialisation 190 76. Le coefficient
douverture comme mesure de louverture commerciale 190 77. Les
justifications du libre-change 194 78. Le protectionnisme 196 79.
Lintgration financire internationale 198 80. La crise financire
internationale de 2007-2008 200 81. La taxe Tobin 204 82. Les
dlocalisations 206 83. Le Fonds montaire international 208 84. La
Banque mondiale 210 85. Le GATT 212 86. LOrganisation mondiale du
commerce 214 87. Instances internationales de rgulation 216 10. Les
politiques conomiques 218 88. Politiques conomiques conjoncturelles
et structurelles 218 89. La politique budgtaire 220 90. La relance
Kennedy Johnson 1961-1965 222 91. La relance socialiste (1981-1982)
224 92. Le financement des dpenses publiques 226 93. La
soutenabilit de la dette publique 228 94. La dette publique de la
France 230
- 7. Table des matires VIII 95. La politique montaire 232 96. Le
policy mix, la combinaison des politiques budgtaire et montaire 234
97. La politique fiscale 236 98. La politique de lemploi 238 11.
Outils pdagogiques 240 99. Conseils pour la dissertation 240
Glossaire 242 Bibliographie 271 Index 273
- 8. 1 Mode demploi Le Maxi Fiches de Sciences conomiques se
prsente sous forme de fiches synthtiques de deux ou quatre pages.
Les fiches peuvent tre tudies dans lordre souhait. De nombreux
renvois en couleur permettent dapprofondir les thmes transversaux,
traits dans diffrentes fiches. Plusieurs outils pdagogiques sont
disposition du lecteur : c La rubrique Point clef, en dbut de
fiche, fait ressortir lintrt du sujet et ses principaux enjeux. c
La rubrique Repres chronologiques, en fin de fiche, rcapitule les
principaux vnements et dates mmoriser. c Le Glossaire de sciences
conomiques, en fin douvrage, regroupe les dfinitions de , surlignes
tout au long de louvrage. c La fiche 99 propose des conseils
mthodologiques pour la dissertation en conomie, afin de se prparer
au mieux aux examens. Cet ouvrage constitue un outil efficace de
rvision pour russir les examens et les concours. 283 notions
fondamentales
- 9. 2 1 Le produit intrieur brut 1. DFINITIONS Le produit
intrieur brut constitue une approximation de la richesse cre par
les agents co- nomiques rsidant dans un espace donn au cours dune
priode de temps (gnralement lanne). Le PIB est gal la somme des
valeurs ajoutes des branches productives de lconomie (somme des
valeurs ajoutes brutes + taxes sur la valeur ajoute + droits de
douanes subventions limportation). La valeur ajoute est la
diffrence entre la valeur de la production finale et les consomma-
tions intermdiaires engages pour lobtenir (biens et services
utiliss pour produire). Le PIB global dune conomie est exprim en
valeur, cest--dire en units montaires courantes. Une part de sa
croissance rsulte dune progression nominale des variables
conomiques. Le calcul dun PIB en unit montaire dflate est ralis
pour valuer la croissance relle du PIB, sa croissance en volume. Le
PIB peut tre dcompos en un PIB marchand et un PIB non marchand. PIB
= PIB marchand + PIB non marchand Le PIB marchand comptabilise les
valeurs ajoutes ralises par les branches marchandes de lconomie
(socits non financires, socits financires, entreprises
individuelles). Le PIB non marchand comptabilise les valeurs
ajoutes ralises par les administrations publiques et les
institutions but non lucratif. Le produit national brut (PNB) se
dfinit, quant lui, comme tant gal au produit intrieur brut plus les
revenus de facteurs reus de ltranger moins les revenus de facteurs
envoys ltranger. 2. LQUILIBRE EMPLOIS RESSOURCES Toute production
de biens et services au sein de lconomie engendre une distribution
de revenus du mme montant dont la dpense constitue une demande
permettant dcouler la production. Du fait de cet quilibre emplois
ressources plusieurs dcompositions du PIB sont possibles. a)
Approche par la production PIB = VA + Tp Sbp Avec : c VA : la somme
des valeurs ajoutes hors taxe ; c Tp : les impts sur les produits ;
c Sbp : les subventions sur les produits. Point clef Le produit
intrieur brut (PIB) reprsente une mesure de la production et une
approximation de la richesse cre. Il constitue un agrgat essentiel
pour apprcier les performances dune conomie. Deux indicateurs
doivent plus particulirement retenir lattention : le produit global
(et sa croissance) ainsi que le produit par tte (PIB rapport au
nombre dhabitants).
- 10. Fiche 1 Le produit intrieur brut 3 b) Approche par les
revenus PIB = W + EBE + RMB + T Sb Avec : c W : les salaires ; c
EBE : lexcdent brut dexploitation ; c RMB : le revenu mixte brut ;
c T : les impts ; c Sb : les subventions. L reprsente le profit
brut des entreprises. Il est obtenu en soustrayant de la valeur
ajoute la rmunration des salaris et les impts lis la production
verss par les entreprises. Le RMB reprsente, quant lui, lEBE des
entreprises individuelles. c) Approche par la demande PIB = CF +
FBCF + DSks + X M Avec : c CF : la consommation finale (v. fiche 4)
; c FBCF : la formation brute de capital fixe (v. fiche 5) ; c DSks
: la variation de stocks ; c X : les exportations de biens et
services ; c M : les importations de biens et services. 3. LE
PRODUIT PAR TTE, UN INDICATEUR DU NIVEAU DE VIE La croissance du
produit par tte (PIB par habitant) signifie une progression de la
quantit de biens et services la disposition des individus. La
progression du revenu par tte mesure lvolution du niveau de vie des
populations. Le tableau ci-dessous fait ressortir la position
dominante des tats-Unis sur ce critre avec un PIB par habitant de
prs de 37 798 dollars en 2006 nettement suprieur celui des autres
pays les plus industrialiss, 27 764 dollars pour le Japon, 27 734
pour la France. De mme, lcart de niveau de vie entre les pays du G7
et les pays en voie de dveloppement reprsents dans le tableau par
lAlgrie (6 425 dollars), le Maroc (3 938 dollars), lAfrique
subsaharienne (1 852 dollars seulement), ressort de faon criante.
Le PIB par habitant relativement lev de la Norvge (40 905 dollars)
et de lIrlande (36 860 dollars) signifie un haut niveau de vie dans
ces pays. Dans le cas de lIrlande, le fait de dpasser le
Royaume-Uni (28 756) est trs symbolique ; cela montre de surcrot la
ralit du rattrapage conomique. Nanmoins ni lIrlande, ni la Norvge,
ne soutiennent la compa- raison avec le Royaume-Uni, lAllemagne ou
le Japon en termes de poids conomique. Le PIB par tte est un
indicateur de niveau de vie et non puissance conomique. EBE
- 11. Fiche 1 Le produit intrieur brut 4 4. LE PRODUIT GLOBAL,
FONDEMENT DE LA PUISSANCE CONOMIQUE La croissance du produit global
fonde long terme la puissance conomique dune nation. La puissance
conomique a des avantages qui peuvent tre cumulatifs. Le progrs
technique tant un moteur de la croissance, le produit global rvle
une avance technologique qui peut aller de pair avec une domination
militaire. Dans ce cas, lconomie dominante possde une capacit
influencer les rgles du jeu international en matire montaire,
financier et com- mercial (voir bien sr lexemple des tats-Unis
depuis la Seconde Guerre mondiale). Par ailleurs la profondeur du
march financier (liquidit et acceptabilit dune devise comme le
dollar) et la garantie dune rentabilit du capital renforcent le
statut de monnaie internationale de la devise de la superpuissance
. Lmission de monnaie internationale offre ensuite des mar- ges de
manuvre importante en matire de politiques conomiques : possibilit
plus grande daccumuler des dficits courants, possibilit dabaisser
davantage les taux dintrt du fait de prime de risque infrieure,
douce insouciance concernant le change. Ces squences participent de
lauto-entretien dun leadership mondial que deux exemples
historiques peuvent nourrir : lAngleterre avant 1913 et les
tats-Unis depuis 1945. Le tableau ci-dessus propose une hirarchie
des conomies nationales suivant le produit global courant et le
produit global correspondant la des monnaies nationales. Il fait
ressortir lampleur de la domination amricaine en termes de produit
global (13 276 milliards de dollars en 2006, soit plus du quart du
PIB mondial, 48 273 milliards de dollars), seule lUnion europenne
avec 14 545 milliards de dollars en 2006 rivalise en termes de
puissance conomique avec les tats-Unis sans, pour autant, lui
contester son leadership mondial faute dintgration politique. Le
Japon est, sur la base du produit global courant, la deuxime
puissance conomique mondiale avec un PIB de 4 360 milliards de
dollars (v. fiches 22 et 29). PIB courants en milliards de dollars
2006 PIB correspondant la PPA, en milliards de dollars (base 2000)
2006 PIB par habitant en dollars (base 1995) 2006 tats-Unis 13 276
11 433 37 798 Japon 4 360 3 539 27 764 Allemagne 2 897 2 230 27 050
Royaume-Uni 2 377 1 750 28 756 France 2 248 1 741 27 734 Italie 1
852 1 555 26 740 UE 27 14 545 12 004 24 326 Irlande 222 150 36 860
Norvge 335 189 40 905 Chine 2 614 8 679 6 605 Inde 916 3 669 3 300
Russie 979 1 472 10 364 Brsil 964 1 441 7 664 Algrie 114 212 6 425
Maroc 57 131 3 938 Arabie Saoudite 349 338 12 504 Afrique
subsaharienne 702 1 396 1 852 Source : CEPII, Lconomie mondiale
2008. Paris, La Dcouverte, 2007. parit des pouvoirs dachat
(PPA)
- 12. Fiche 1 Le produit intrieur brut 5 Le cas complexe de la
Chine mrite une attention particulire. Son produit global courant
slve pour 2006 2 614 milliards de dollars. Ce chiffre rsulte dune
conversion en dollar, au cours de change courant, du PIB exprim au
pralable en yuan. Compte tenu du relatif faible niveau de
dveloppement de la Chine, le pouvoir dachat en biens et services
dun dollar en Chine est environ 3 fois suprieur ce quil est aux
tats-Unis do lintrt de proposer un PIB correspondant la PPA
(intgrant de facto la sous-valuation relle de la monnaie chinoise,
le yuan). Sur cette base, la Chine apparatrait paradoxalement ds
aujourdhui comme la deuxime puissance conomique mondiale, assez
loin devant le Japon. Le mme phnomne est luvre pour lInde, la
Russie, le Brsil, puissances montantes. Le produit intrieur brut
constitue une mesure exclusivement quantitative des performances
des conomies, il nintgre pas les consquences sociales et
environnementales du processus daccumulation. La notion de
dveloppement (et ses variantes) cherche intgrer des dimensions plus
qualitatives du bien-tre humain (v. fiche 6). 5. QUELS OBJECTIFS
VISER EN MATIRE DE CROISSANCE ? court terme, les autorits peuvent
avoir pour objectif que la croissance effective de lconomie soit
gale sa croissance potentielle (croissance qui correspond une
pleine utilisation des capacits de production). plus long terme,
les responsables doivent dynamiser le potentiel de croissance par
des politiques structurelles qui visent dvelopper les forces
motrices de la croissance. Solow (1957), pre du modle noclassique
de croissance, met en avant deux moteurs exognes : le progrs
technique conu comme un don de la sphre scientifique la sphre
conomique et la population. Les thories de la croissance endogne,
apparues partir de 1986 (travaux de Romer), sinscrivent en raction
contre cette conception exogne. Elles mettent laccent sur le stock
de capital technique et humain et galement sur le fait que des
externalits positives issues de la formation (Lucas, 1988) et de la
recherche (Aghion et Howitt, 1991) sont lorigine de la croissance
conomique. Il en dcoule la vision dune croissance qui peut tre
influence par les politiques conomiques et la reconnaissance dune
efficacit de lintervention des administrations publiques.
- 13. 6 2 Linstabilit de la croissance conomique 1. APPROCHE
HISTORIQUE Par nature, des conomies traditionnelles o le secteur
agricole reprsente une part impor- tante de la contribution la
valeur ajoute totale connaissent une croissance irrgulire, une
mauvaise rcolte contribue mme souvent un recul absolu de lactivit.
Malgr le dclin de lagriculture la croissance reste trs instable
durant lentre-deux-guerres. Des erreurs dans la conduite des
politiques conomiques (dflation anglaise dans les annes 1920,
gestion de la crise de 1929 par la Banque centrale des tats-Unis la
Fed) et le caractre chaotique des relations conomiques
internationales contribuent rendre compte de cette forte
instabilit. Depuis 1973 linstabilit de lactivit apparat
relativement forte. Lirrgularit de la croissance effective est
manifeste malgr les progrs raliss dans la modlisation des conomies
et la conduite des politiques conomiques. Les conomistes ont
toujours beaucoup de difficults effectuer des prvisions de
croissance fines sur la courte priode. Les responsables politiques
systmatisent les prvisions rsolument trop optimiste afin dancrer
les anticipations des agents (il sagit de leur donner confiance).
Du ct de loffre comme du ct de la demande, de nombreux facteurs
condamnent la croissance rester irrgulire. 2. LIRRGULARIT DE LOFFRE
Le , moteur le plus puissant de la croissance, apparat
difficilement contr- lable. Des dpenses de recherche ne
garantissent pas des innovations plus nombreuses. Le progrs parat
par essence imprvisible. Au mieux si lon se rfre aux travaux de
Schumpeter, Business cycles (1939), linnovation prsente un caractre
cyclique. La croissance est frquemment perturbe par des vnements
inattendus que lon qualifie de (perturbation non anticipe qui
affecte les cots de production de lentreprise). Ces chocs peuvent
recouvrir des variations de la productivit, tre de nature salariale
(vnements de mai 1968 en France qui dbouche sur une forte
progression des salaires rels) ou nergtique (chocs ptroliers de
1973, 1979 et 2008). Ainsi entre septembre 1973 et janvier 1974
lorsque les prix du ptrole sont multiplis par quatre, les
entreprises occidentales doivent faire face une hausse de leurs
cots de production. Linternationalisation des conomies est dj
forte, lenvironnement trs concurrentiel et elles ne peuvent
rpercuter entirement ce surcot sur leurs prix de vente. Elles
doivent compresser leurs marges ce qui rduit la profitabilit de
linvestissement et conduit lpoque son atonie et un ralentissement
du rythme de la croissance conomique. Point clef En conomie, de
nombreux facteurs concourent rendre la croissance instable. Les
innovations ont un carac- tre imprvisible. Les chocs doffre sont
nombreux (hausse des prix de lnergie). Plusieurs composantes de la
demande ont des ressorts psychologiques (surtout linvestissement et
la consommation). Enn louverture croissante des conomies est
porteuse de perturbations. progrs technique chocs doffre
- 14. Fiche 2 Linstabilit de la croissance conomique 7 3. LES
RESSORTS PSYCHOLOGIQUES DE LA DEMANDE Du ct de la demande, des
chocs peuvent aussi tre identifis. Ils prennent la forme de
modification exogne des comportements de consommation et dpargne,
voire dun dplacement de population (par exemple le rapatriement de
800 000 Franais dAlgrie en 1962). Il importe surtout de souligner
que derrire la plupart des composantes de la demande globale, il y
a une dimension anticipative (de la psychologie) qui la rend, elle
aussi, instable. Cette dimension psychologique est trs intuitive
pour linvestissement qui, dans une perspective keynsienne, dpend de
ltat de la demande anticipe (de lide que les chefs se font de la
demande qui leur sera adresse). Cest assez net aussi pour la
consommation qui peut ragir, par exemple, la situation de lemploi
(dveloppement dune pargne de prcaution en cas de pousse du chmage
qui rduit la consommation). Enfin lextrme, lvolution des dpenses
publiques peut affecter larbitrage consommation/pargne si lon se
situe dans un cadre la Barro : sous certaines hypothses
restrictives, la hausse des dpenses finances par lendettement
conduit les agents dvelopper une pargne supplmentaire en prvision
dune future hausse des impts ncessaire au remboursement de la dette
(v. fiches 17 et 92). 4. LOUVERTURE CONOMIQUE, FACTEUR DINSTABILIT
La mobilit internationale des capitaux est un facteur daccentuation
de linstabilit travers des crises financires plus frquentes et des
cours de change plus volatils. Linterdpendance croissante des
conomies favorise la transmission internationale des crises
notamment des crises financires. La crise asiatique de 1997, aprs
avoir provoqu un spectaculaire recul du PIB dans les pays de la
zone en 1998, (10,4 % en Thalande, 7 % en Core, 8 % en Malaisie, 15
% en Indonsie) sest propage au niveau mondial. Certains
investisseurs, des Corens en particulier, sont contraints de
liquider leurs avoirs ltranger notamment des bons du Trsor russes.
Ce facteur contribue la survenance dune crise en Russie en 1998 qui
par un effet de dominos provoque un mouvement de dfiance sur les
places financires occiden- tales (New York, Londres, Francfort,
Paris) et un ralentissement de lactivit en Occident. Plus rcemment
en 2007-2008, la crise financire dite des subprimes a eu un impact
ngatif sur la plupart des conomies occidentales du fait de
linterconnexion des marchs (financiers, immobiliers) (v. fiche 80).
La (pour partie lie la psychologie de marchs de plus en plus
profonds) accentue linstabilit de la composante externe de la
demande : un freinage brusque des exportations de biens et services
peut ralentir significativement de la croissance. Repres
chronologiques 1973 : premier choc ptrolier. 1997 : crise
asiatique. 2007-2008 : crise nancire internationale. volatilit des
cours de change
- 15. 8 3 Les revenus 1. LES REVENUS PRIMAIRES Le revenu primaire
est la somme des revenus de facteurs de production. Le terme
primaire signifie quil est calcul avant tout prlvement fiscal ou
social et toute redistribution. Les revenus primaires des mnages
rmunrent leur participation aux activits productives, ils
constituent la rmunration du travail et du patrimoine. Les revenus
du travail sont constitus des salaires et traitements. Les revenus
du patrimoine se composent : c des intrts reus (par les dtenteurs
dobligations par exemple) ; c des dividendes reus (par les
dtenteurs dactions) ; c des loyers (qui rmunrent la proprit
immobilire et foncire). Des revenus mixtes (revenus du travail non
salari) rmunrent le travail et le capital dans le cas des
entreprises individuelles (professions librales, entreprises
agricoles) 2. LES INGALITS DE REVENUS La rpartition des revenus
primaires rsulte du jeu du march et des rapports de forces au sein
de la socit (pouvoirs des syndicats en particulier). Le degr
dingalits peut facilement tre mesur travers le calcul dindicateurs
de concentration ( , intervalles interquantiles). Les ingalits de
revenus constituent la base des mcanismes dincitations qui
contribuent la recherche de lefficacit conomique. Celui qui sengage
plus dans le travail, qui est plus effi- cace, qui innove
davantage, qui prend des risques doit, a priori, tre rcompens par
un revenu plus lev. Les carts de revenus rcompensent en principe
laptitude tre efficace dans la production, la contribution la
valeur ajoute globale . A contrario, la redistribution des revenus
se justifie elle aussi au nom de la solidarit, du vivre ensemble.
Les individus nont pas des capacits productives gales. Pendant
lducation des dterminismes diffrents sexercent sur les individus et
les empchent datteindre les mmes niveaux de productivit dans le
travail. La redistribution doit compenser les handicaps et les
ingalits. 3. LE DEGR DINGALIT : UN CHOIX POLITIQUE Il nexiste pas
de norme dquit en matire de distribution des revenus. Chacun peut
porter une apprciation sur la situation. Partant la question
devient de nature politique. Le vote doit dterminer une orientation
sur la question des ingalits. Historiquement loffre politique voit
sopposer des tenants de laccroissement des ingalits (librer les
nergies) et des tenants de la rduction des ingalits (ncessaire
solidarit). Il convient de se situer entre deux cas polaires
(imaginaires). Point clef Lvolution du revenu disponible brut (RDB)
conditionne celle du pouvoir dachat des mnages. Le RDB rsulte des
revenus primaires verss et des choix politiques oprs en matire de
redistribution. indice de Gini
- 16. Fiche 3 Les revenus 9 Dun ct droite dans le tableau
ci-dessous, la forme absolue du libralisme qui est la jun- gle. Il
ny aurait pas de place pour celui qui aurait des handicaps et
serait dans lincapacit de participer la production, il devrait tre
laiss sur le bord de la route, sans revenu, ni soin De lautre,
gauche sur le schma, lgalit absolue qui conduit une socit fige. Les
indi- vidus sengagent peu dans le travail et innovent peu. Cette
situation pourrait correspondre une conomie de type sovitique (ETS)
sans mcanisme dincitation. La perspective est ici la stagnation et
le gaspillage des ressources. Lambition de Keynes tait de parvenir
dpasser cette opposition entre efficacit conomique et efficacit
sociale. Chez Keynes la redistribution peut, sous certaines
hypothses, ramener lconomie vers un quilibre de plein-emploi. Pour
Rawls (Thorie de la justice sociale, 1971) les ingalits conomiques
et sociales se justifient condition dtre lies des fonctions
ouvertes tous et surtout de profiter tous travers la dynamique
dactivit quelles engendrent. Si les ingalits produisent une socit
de rentiers, inertielle avec une forte reproduction sociale, elles
doivent tre combattues. 4. LES OUTILS DE REDISTRIBUTION DES REVENUS
Afin de rduire les ingalits dans la rpartition des revenus
primaires et dapporter des revenus ceux qui nen ont pas, les
pouvoirs publics oprent une redistribution. Des prlvements sont
oprs et des prestations sont accordes (elles sont appeles revenus
de transferts). Les prlvements sont constitus par : c les
cotisations sociales ; c des impts directs sur le revenu ; c des
impts directs sur le patrimoine. Les revenus de transferts sont : c
les prestations verses par les organismes de scurit sociale au
titre de la couverture de certains risques de la vie (maladie,
vieillesse, famille, emploi) ; c le RMI (Revenu minimum dinsertion)
qui constitue en France depuis sa cration en 1988 un revenu de
transferts. Cette allocation est verse par les Conseils Gnraux ; en
2008 prs de 1 100 000 personnes en bnficient. 5. LE REVENU
DISPONIBLE BRUT Le revenu disponible brut des mnages est un revenu
aprs cotisations sociales et impts directs mais avant transferts
sociaux en nature. Il est disponible pour la dpense de consom-
mation finale et lpargne. Le partage de ce revenu entre
consommation immdiate et par- gne dpend du niveau des taux dintrt
(approche noclassique), du niveau de revenu (approche keynsienne).
En comptabilit nationale le revenu disponible brut des mnages est
gal la somme de lexcdent brut dexploitation, de la rmunration des
salaris, de la rmunration du travail de lentrepreneur individuel
(voire de sa famille), des profits bruts de lentreprise, des
revenus de la proprit (dividendes, intrts), des prestations
sociales en espces moins les cotisations sociales et les impts sur
le revenu et le patrimoine verss. ETS Jungle Efcacit sociale
Efcacit conomique Transferts Libert dans lallocation Solidarit
Individualisme Compensation les handicaps Rcompenser les
talents
- 17. 10 4 La consommation 1. DFINITION La consommation dsigne
lutilisation dun bien ou dun service qui entrane terme sa
destruction. La consommation peut avoir deux buts : la production
de satisfactions et la production de biens. Lorsquelle est
productive de satisfactions, la consommation est dite finale. La
consom- mation finale des mnages concerne principalement des biens
et services marchands (denres alimentaires, vtements, voitures) et
aussi des services non marchands (forfait hospitalier, droits
dinscription lUniversit). Lorsquelle est productive de biens, la
consommation est dite intermdiaire ou de capital fixe
(amortissement). 2. PROPRITS DES BIENS La demande de biens ragit de
manire diffrente la variation des revenus et des prix. De grandes
typologies peuvent tre proposes. Un est dit si sa demande diminue
lorsque le revenu augmente : son lasticit- revenu est dans ce cas
infrieure zro (historiquement cest le cas du pain par exemple). Un
bien normal prsente une lasticit-revenu positive et infrieure
lunit. Un bien suprieur est un bien dont la demande augmente plus
de proportionnellement suite une progression du revenu, son
lasticit-revenu est suprieure 1. L dsigne le fait que llasticit
prix de la demande est positive pour certains biens de luxe et
certains groupes sociaux. La hausse du prix du bien, le rend plus
dsirable aux yeux de certains qui considrent son prix lev comme une
source de distinction. On voque un effet de snobisme. Dans louvrage
Thorie de la classe de loisir (1889), T. Veblen montre plus
largement le caractre social des comportements de consommation. Des
sont concurrents au sens ou la variation du prix de lun influence
for- tement la demande de lautre (llasticit de la demande de lun
par rapport au prix de lautre est leve, le beurre et la margarine
par exemple). Un est un bien dont la consommation ou lusage par un
individu exclut sa consom- mation ou son usage par un autre
individu. Un est un bien indivisible dont la consommation par un
individu ne rduit pas la quantit (ou le montant) de ce mme bien
encore la disposition des autres individus (exemples : route,
clairage public, jardin public). 3. LA STRUCTURE DE LA CONSOMMATION
Le est la part quune dpense de consommation (dun bien ou dune
catgorie de biens) reprsente dans le total des dpenses de
consommation. La dsigne le fait que le coefficient budgtaire des
dpenses de premires ncessits (alimentation) diminue lorsque les
ressources des mnages progressent. Point clef Lanalyse conomique et
sociale de la consommation est plurielle et complexe. Au niveau
microconomique les comportements individuels de consommation
(maximisation de la satisfaction, larbitrage entre consom- mation
prsente et future), ainsi que les proprits des diffrents biens sont
tudis. Au plan macrocono- mique de grands dterminants de la
consommation sont isols. bien infrieur effet Veblen biens
substituables bien rival bien collectif coefficient budgtaire loi
dEngel
- 18. Fiche 4 La consommation 11 L constitue une exception cette
rgle : la hausse du prix dun bien infrieur peut saccompagner dune
hausse de sa demande. Si un bien occupe une grande place dans le
budget des mnages, la hausse de son prix provoque une baisse du
pouvoir dachat du revenu et conduit le mnage accrotre la demande de
ce bien infrieur qui se substitue dautres. Lconomiste Giffen tudie
le cas particulier de la pomme de terre en Irlande au XIXe sicle.
La structure de la consommation diffre selon le niveau de vie des
diffrentes catgories sociales. Le coefficient budgtaire des dpenses
de premires ncessits est plus lev pour les catgories populaires que
pour les catgories moyennes et suprieures. linverse les coeffi-
cients budgtaires des biens de moindre ncessit comme les loisirs
sont plus levs dans les catgories suprieures. 4. LES PROPENSIONS
CONSOMMER Le revenu (not Y) est gal la consommation (C) plus
lpargne (S). Les notions de propen- sions moyenne et marginale
consommer sont centrales en conomie depuis la publication du livre
de Keynes Thorie gnrale de lemploi de lintrt et de la monnaie
(1936). La propension moyenne consommer dsigne le rapport entre
consommation et revenu, la part du revenu qui est consomme C/Y. La
propension marginale consommer (c) dsigne la part de la dernire
unit de revenu consacre la consommation DC/DY. La loi psychologique
fondamentale de Keynes dsigne le fait que la propension marginale
consommer soit dcroissante avec le revenu. Cette baisse relative de
la consommation (ou son corolaire lexcs dpargne) contribue
expliquer linsuffisance de la demande. 5. LES DTERMINANTS
MACROCONOMIQUES DE LA CONSOMMATION Au plan macroconomique de grands
dterminants de la consommation peuvent tre isols. Chez Keynes
(1936), la consommation la priode t (Ct) dpend du revenu courant
(Yt) : Ct = Co + c Yt Avec : c Co : une consommation incompressible
; c C : la propension marginale consommer. Cette fonction de
consommation fonde le raisonnement en termes de multiplicateur (v.
fiche 14). La thorie du revenu relatif labore par Duesenberry
(1949) postule que la propension consommer dun mnage dpend certes
de son revenu mais aussi dun effet de dmonstration exerc par les
mnages des catgories suprieures qui poussent vers le haut la
consommation des catgories infrieures. Dans louvrage Une thorie de
la fonction de consommation (1957) Friedman transpose lana- lyse
microconomique de la consommation (travaux de Fisher) au niveau
macroconomique. La consommation est principalement fonction du
revenu permanent, cest--dire le revenu moyen anticip sur lensemble
de la vie. Il dpend des revenus actualiss du travail et des actifs
possds. Lapproche en termes de cycles de vie, dveloppe par
Modigliani, Brumberg et Ando, insiste sur le fait que les flux
dendettement et dpargne permettent aux mnages dobtenir durant leur
vie un profil de consommation stable partir de revenus fluctuants.
En priode de jeunesse, lemprunt permet de consommer ; en priode
dactivit, lpargne progresse et un patrimoine est constitu ; lge de
la retraite, la consommation est alimente par une dspargne . effet
Giffen
- 19. 12 5 Linvestissement 1. DFINITIONS ET TYPOLOGIE
Linvestissement consiste fondamentalement engager du capital dans
le processus de pro- duction. Par nature il constitue un pari qui
revient changer une satisfaction immdiate et certaine contre un
espoir de gain. Linvestissement matriel ralis par lentreprise est
qualifi dinvestissement productif (quipements, machines). ct de cet
investissement de nature corporel, un investissement immatriel est
ralis (dpenses de recherche et dveloppement, de formation,
acquisition de licences, de logiciels, dpenses de formation, de
publicit). Si linvestissement brut (le nouveau flux annuel
dinvestissement) est suprieur lamortisse- ment (valuation annuelle
de la perte de valeur dactifs ou de biens de production frapps
dusure ou dobsolescence) le stock de capital progresse.
Linvestissement net reprsente la diffrence entre linvestissement
brut et lamortissement. Investissement de remplacement, de capacit
et de productivit : c Linvestissement de remplacement (ou de
renouvellement) est destin maintenir les capa- cits de production,
il compense lobsolescence et/ou lusure des quipements. c
Linvestissement de capacit (ou dextension) est destin accrotre le
potentiel productif de lentreprise. c Linvestissement de
productivit est destin rationaliser la production, intgrer le
progrs technique dans la combinaison productive. Au sein dune
conomie le taux dinvestissement se mesure par le rapport FBCF sur
PIB. La formation brute de capital fixe est constitue de
linvestissement productif des entreprises, de linvestissement des
administrations et de linvestissement des mnages (achats de
logements). La FBCF doit tre distingue des placements financiers
qui, eux, constituent une pargne. 2. RENTABILIT ET FINANCEMENT DE
LINVESTISSEMENT Un investissement nest ralis que si sa rentabilit
conomique est positive. Au niveau microconomique la valeur
actualise nette (VAN) dun projet dinvestissement peut tre calcule.
Elle revient comparer le cot initial de linvestissement (Io, t) la
somme actualise des recettes attendues de linvestissement (Ri)
pendant les T priodes venir. VAN = Io, t + Si la VAN est positive,
linvestissement est ralis ; si elle est ngative, il ne lest pas.
Selon John Maynard Keynes lefficacit marginale du capital dsigne la
rentabilit attendue de linvestissement, les recettes attendues des
projets ne sont pas certaines , elles rsultent des anticipations
des chefs dentreprise. Le financement interne de linvestissement
provient des capacits dautofinancement des entre- prises (profits
conservs en rserve). Le financement externe est constitu soit par
lmission de titres de diffrentes natures (obligations, actions),
soit par un recours lemprunt. Point clef Linvestissement est une
variable particulirement dcisive en conomie. Il est la fois une
composante de la demande et un puissant moteur de loffre
productive. Ri 1 r+( )i -----------------i 1= T
- 20. Fiche 5 Linvestissement 13 Lentreprise peut mettre des
obligations, cest--dire des titres de crances qui reprsentent une
partie dun emprunt long terme. Le plus souvent elle verse aux
dtenteurs du titre une rente annuelle et rembourse le capital
chance. Lentreprise peut aussi mettre des actions cest--dire des
titres financiers reprsentatifs dune partie du droit de proprit sur
une entreprise. Le souscripteur de laction contribue au financement
de lentreprise en change dun droit de vote lors de lassemble gnrale
(qui lit le conseil dadministration) et dun droit au partage des
bnfices travers la perception dun dividende. Lemprunt est un
financement obtenu le plus souvent auprs dune banque. Le cot de ce
mode de financement est constitu par le taux dintrt. Un de
lendettement se dclenche lorsque la rentabilit dun projet
dinvestis- sement est suprieure au cot de lendettement destin le
financer. Ds lors que le taux de profit est suprieur au taux
dintrt, lentreprise est dautant plus incite sendetter. Dans le cas
contraire on voque un effet de massue. 3. LES DTERMINANTS DE
LINVESTISSEMENT Les dterminants de linvestissement sont nombreux,
la prise de dcision complexe, il est dif- ficile dtablir
empiriquement linfluence dun facteur. a) Ltat de la demande
anticipe Keynes a mis en exergue le fait que linvestissement
dpendait de ltat de la demande antici- pe, cest--dire de lide que
le chef dentreprise se fait de la demande qui lui sera adresse
lavenir, ces anticipations mobilisent les animal spirits de
lentrepreneur. b) Le cot relatif du capital et du travail La hausse
du cot du travail (salaire et cotisations sociales) peut inciter le
chef dentreprise substituer des machines aux travailleurs. Le prix
relatif des facteurs peut galement influencer le choix de la
technologie adopte. c) Le taux dintrt Le taux dintrt reprsente le
cot du capital. En principe toute chose gale par ailleurs la baisse
des taux dintrt dynamise linvestissement puisquun plus grand nombre
de projets dinvestissement deviennent rentables. Mais empiriquement
linfluence des taux est difficile tablir. d) Les prots Le thorme de
Schmidt (ancien chancelier Allemand) a popularis lide que les
profits constituent un moteur de linvestissement : les profits
daujourdhui sont les investissements de demain et les emplois
daprs-demain . Une hausse des profits permet de financer les
investissements par le canal de lautofinancement. Plus la
rentabilit conomique de linves- tissement est grande, plus
lincitation investir est forte. Le taux de rentabilit conomique (ou
taux de profit) est le rapport entre le profit ralis et le capital
engag. e) La structure nancire de lentreprise Ds lors que les
marchs financiers sont imparfaits, la structure financire de
lentreprise influence linvestissement. Lendettement accrot le
risque de faillite alors que la possession de fonds propres obtenus
par mission dactions le rduit. En cas de difficults lentreprise
peut toujours interrompre le versement de dividendes alors quelle
ne peut cesser celui des intrts. Une banque est hsitante prter une
entreprise endette et peut exiger une prime de risque sur le taux
dintrt. effet de levier
- 21. 14 6 Le dveloppement conomique 1. CARACTRISATIONS DU
DVELOPPEMENT Historiquement le dveloppement dsigne la
transformation des socits et vhicule lide de progrs. Depuis le
milieu du XXe sicle, la notion sest charge dun sens plus prcis :
lamlio- ration de la qualit de vie des hommes. Par rapport la
croissance conomique, le dveloppement vise donc rintroduire des
caractristiques plus qualitatives pour apprcier les performances
dune conomie. Franois Perroux donne une dfinition du dveloppement
trs usite depuis le dveloppe- ment est la combinaison des
changements mentaux et sociaux dune population qui la ren- dent
apte faire crotre, cumulativement et durablement, son produit
global rel (1961). Par la suite Perroux parat rintroduire plus
ouvertement lhomme en prcisant que le dve- loppement dsigne le
changement des structures mentales et sociales qui favorisent
lentra- nement mutuel de lappareil de production et de la
population au service de cette dernire (1972). Parmi la multitude
des autres conceptions du dveloppement celle de A. Sen doit tre
men- tionne. Il conoit le dveloppement comme un processus
dexpansion des liberts relles dont jouissent les individus . Dans
louvrage Development as Freedom (1999), Sen affirme : lexpansion
des liberts constitue la fois la fin premire et le moyen principal
du dvelop- pement, () le rle constitutif et le rle instrumental de
la libert dans le dveloppe- ment. 2. LE DVELOPPEMENT DURABLE Le
dveloppement durable (ou soutenable) est dfini par le rapport
Brudtland (1987) comme un dveloppement qui rpond aux besoins du
prsent sans compromettre la capacit des gnrations futures rpondre
aux leurs . Ce concept attire depuis lattention sur les cons-
quences environnementales de la croissance conomique (mission de
gaz effets de serre, puisement des ressources naturelles). Au plan
thorique deux visions sopposent derrire cette dfinition du
dveloppement durable. La premire dinspiration noclassique fonde la
soutenabilit exclusivement sur une base environnementale. Elle
cherche au niveau microconomique valoriser montairement les lments
naturels afin de pouvoir les analyser dans un calcul cots-bnfices.
Cette conception dbouche sur la mise en place de mcanismes
dincitations (permis de polluer). Au plan macroconomique dans la
ligne du modle de Solow, les conomistes cherchent fournir des
fondements thoriques la relation vertueuse entre croissance et
qualit environnemen- tale (rapport Stern de 2006). Ils cherchent
formuler une rgle de soutenabilit assurant le maintien de la valeur
par tte du stock total de capital de la socit en postulant une
parfaite substituabilit entre les diffrentes formes de capital
(physique, humain, naturel). La deuxime approche qualifie dhtrodoxe
se veut plus globale en intgrant les dimensions environnementale,
sociale et conomique du dveloppement. Elle est associe au maintien
Point clef La notion de dveloppement vise introduire des
considrations qualitatives pour apprcier les performan- ces dune
conomie. Les conceptions et les critres du dveloppement
apparaissent pluriels, voire clats.
- 22. Fiche 6 Le dveloppement conomique 15 dun stock de capital
naturel dit critique et rejette le principe de la substituabilit
des facteurs au profit de leur complmentarit. Elle soppose la
valorisation montaire des lments naturels. Elle peut dboucher sur
lide de dcroissance. 3. LES INDICATEURS DE DVELOPPEMENT Parmi les
indicateurs de dveloppement, deux sont particulirement rpandus et
scruts : lIDH et lIPH. a) LIDH (Indice de dveloppement humain) Cet
indice a t cr par le Programme des Nations unies pour le
dveloppement en 1990, il combine trois critres : la longvit
(esprance de vie), le savoir (alphabtisation) et le niveau de vie
(PIB par tte). Les rsultats 2007 (Rapport mondial sur le
dveloppement humain), qui se fondent sur les sta- tistiques 2005 de
177 pays membres des Nations unies, font apparatre la hirarchie
suivante. LIslande est en tte, juste devant la Norvge et
lAustralie. Lorsque lon compare la hirarchie internationale sur les
bases du PIB par tte et sur la base de lIDH, la principale
diffrence concerne la place des tats-Unis qui rtrogradent en ter-
mes dIDH (12e position). b) LIPH (Indice de pauvret humaine)
Lindice de Pauvret humaine a t cr par le PNUD en complment de lIDH.
Pour les pays en dveloppement il repose sur trois variables : c le
risque de mourir avant 40 ans ; c le taux danalphabtisme des
adultes ; c les conditions de vie mesures par laccs aux services de
sant, leau potable et la sous- nutrition chez les enfants de moins
de cinq ans. Pour les pays dvelopps, il tient compte en plus du
manque de conditions de vie dcente apprhend par le pourcentage de
personnes vivant sous la demi-mdiane du revenu disponible des
mnages. IDH en 2005, classement mondial Rang Pays 1 Islande 2
Norvge 3 Australie 8 Japon 10 France 12 tats-Unis 16 Royaume-Uni 22
Allemagne 70 Brsil 81 Chine 128 Inde 176 Burkina Faso 177 Sierra
Leone
- 23. 16 7 La pauvret 1. UNE NOTION RELATIVE La notion de pauvret
est trs relative, on est toujours le pauvre de quelquun comme le
dit un adage populaire. La pauvret na dabord pas le mme sens dans
les conomies avances et les conomies en voie de dveloppement. Une
conception relative prdomine dans le premier cas alors quune
approche absolue fait davantage sens dans le second. Par-del ces
conceptions la pauvret renvoie fondamentalement desmanques en
termes davoir, de pouvoir, de sant, voire mme de considration. 2.
APPROCHE MONTAIRE : PAUVRET ABSOLUE ET PAUVRET RELATIVE a) Pauvret
relative Par convention au sein dune socit un individu est considr
comme pauvre si son revenu est infrieur 50 % (ou 60 %) du revenu
mdian (le revenu associ lindividu qui, lorsque lon classe les
individus par ordre croissant de revenu, est en position mdiane, il
y a autant de personnes qui ont un revenu infrieur au sien que de
personne dont le revenu est suprieur). Cette approche est utilise
pour mesurer la pauvret dans les conomies du Nord (exemple franais
ci-aprs). En France au cours des trente dernires annes le nombre de
pauvres a eu tendance dimi- nuer : il tait de 4,36 millions en 1979
contre 3,73 millions en 2005. La France prsente aujourdhui lun des
taux de pauvret les plus bas du monde (6,3 %). Il convient de ne
pas oublier que le choix du seuil est important : dans le cas de la
France si, pour 2005, on retient le seuil de 60 % au lieu de 50 %
le nombre de pauvres passe de 3,73 millions 7,13 millions. b)
Pauvret absolue Sur cette base un individu est considr comme pauvre
sil dispose de moins de un dollar ou de moins de deux dollars par
jour pour vivre. Cette approche est plus adapte la situation des
pays mergents ou en voie de dveloppement. Les estimations de la
Banque mondiale font ressortir quen Asie de lEst et du Pacifique
(Chine incluse), la part des individus vivant avec moins de deux
dollars par jour est passe de 84,8 % en 1981 40,7 % en 2002. En
Amrique latine cette proportion sest rduite (de 29,6 % 23,4 %). En
Afrique subsaharienne la proportion est passe sur la mme priode de
73,3 % Point clef La pauvret est une notion relative, sa dnition et
sa mesure sont particulirement conventionnelles. Le concept na
notamment pas le mme sens au sein dune conomie en voie de
dveloppement et dune conomie parmi les plus avances . La pauvret en
France depuis trente ans (au seuil de 50 %) 1979 1984 1990 1996
2000 2002 2003 2004 2005 Nombre de pauvres (en millions) 4,36 4,15
3,75 4,09 3,74 3,49 3,69 3,63 3,73 Taux de pauvret 8,3 7,7 6,6 7,2
6,5 6,0 6,3 6,2 6,3 Source : Insee.
- 24. Fiche 7 La pauvret 17 74,9 %. En Asie la mondialisation
conomique sest accompagne dune rduction de la pauvret alors quen
Afrique subsaharienne la pauvret a persist malgr louverture
conomique. 3. APPROCHE NON MONTAIRE DE LA PAUVRET La conception de
la pauvret humaine a volu au cours de la priode rcente vers une
approche dite non montaire centre sur les manques des individus en
termes de sant, de pouvoir, de capacit, voire de considration. LIPH
et le BIP 40 illustrent ce mouvement. a) LIPH Ainsi lIndice de
pauvret humaine (IPH) a t cr par le PNUD (Programme des Nations
unies pour le dveloppement) en complment de lIDH. Le calcul de
lIPH-1 adapt aux pays pauvres repose sur trois variables : c le
risque de mourir avant 40 ans ; c le taux danalphabtisme des
adultes ; c les conditions de vie mesures par : laccs aux services
de sant, laccs leau potable, la sous-nutrition chez les enfants de
moins de cinq ans. Le calcul de lIPH-2 adapt aux pays riches
combine quatre indicateurs : c indicateur de longvit, c indicateur
dinstruction, c indicateur de conditions de vie, c indicateur
dexclusion. b) Le BIP 40 Il sagit dun Baromtre des ingalits et de
la pauvret. Cest un indicateur synthtique des ingalits et de la
pauvret cr en 2002 par des militants (collectif rseau dalerte sur
les in- galits) en raction et en rfrence au PIB et au CAC 40
(indice phare de la Bourse de Paris). Le BIP est construit partir
de 58 critres qui concernent six dimensions (le travail, le revenu,
le logement, lducation, la sant, la justice). Proportion de la
population vivant avec moins de deux dollars par jour Zone 1981
1990 2002 Asie de lEst et Pacique 84,8 69,9 40,7 Amrique latine
29,6 28,4 23,4 Afrique subsaharienne 73,3 75 74,9 Source : Banque
mondiale.
- 25. 18 8 Les enjeux du dveloppement dune conomie de service 1.
DSINDUSTRIALISATION ET TERTIARISATION Le dveloppement des activits
dites de services est caractristique du XXe sicle. La tertiari-
sation des conomies les plus avances fait cho leur
dsindustrialisation. Les deux notions sont certes graduelles, mais
on convient didentifier un tournant dans les annes 1970 lorsque les
effectifs de lindustrie connaissent une baisse absolue et non plus
relative comme par le pass. Aujourdhui aux tats-Unis, moins de 10 %
des actifs travaillent dans lindustrie. En France cette proportion
est passe de 25 % en 1978 13,8 % en 2006. En France, la part de
lindus- trie dans le PIB est pass de 35 % en 1970, 22 % en 1990 et
seulement 17 % aujourdhui, la part des services passant aux mmes
dates de 54 %, 69 % pour atteindre plus de 75 % actuellement.
Faut-il sinquiter dun envahissement des services porteurs de peu de
gains de productivit et partant de perspective de croissance ? Tous
les services ont-ils le mme statut du point de vue de la
contribution la croissance ? Quelle est la contribution des
services aux changes internationaux ? 2. TERTIARISATION DE LCONOMIE
ET CRAINTE DUNE STAGNATION DE LACTIVIT a) La thse dun puisement de
la croissance Lapproche noclassique conduit la thse dun puisement
des sources de la croissance avec la tertiarisation des conomies,
en plaant au centre de lanalyse la dynamique sectorielle des gains
de productivit. Cette vision est celle de Baumol et Fourasti, qui
voquent lenvahis- sement de lconomie par le tertiaire et dnoncent
comme une erreur toute notion dun dveloppement fond sur le
tertiaire, ou encore Bell, pourtant chantre de la socit post-
industrielle, mais qui admet sans difficult que labsorption par les
services dune part crois- sante de la main-duvre freine
ncessairement la productivit et la croissance globales . Le modle
commun ces auteurs repose sur deux bases. Dabord les gains de
productivit dans le secteur tertiaire sont faibles ou nuls, et en
tout cas ngligeables au regard de ceux de lindustrie et mme de
lagriculture. Lexemple favori de Fourasti est celui de la coupe de
cheveux. Le coiffeur daujourdhui ne tond pas plus vite quil y a un
sicle, et le coiffeur de Chicago nest pas plus productif que celui
de Calcutta. Ensuite la demande de services tend augmenter long
terme, sous leffet de la progression des revenus et de la
saturation progressive des besoins en biens alimentaires, puis en
biens industriels. De l dcoulent plusieurs implications majeures.
Dabord, le prix relatif des services par rapport celui des biens
industriels est appel augmenter indfiniment, puisquil reflte long
terme lcart des gains de productivit respectifs entre les deux
secteurs. En second lieu, la part des services ne peut quaugmenter
au sein du PIB et surtout au sein de lemploi total. Enfin,
lalourdissement du poids relatif des services ne peut que freiner
le rythme de la croissance globale par un effet de structure. Point
clef La monte en puissance des activits de service caractrise le
XXe sicle. Cette transformation a des cons- quences majeures en
matire de productivit et de croissance potentielle.
- 26. Fiche 8 Les enjeux du dveloppement dune conomie de service
19 Il convient nanmoins de prendre en compte deux objections ce
modle. La premire con- cerne une omission grave : il ne tient pas
compte de leffet de freinage quexerce sur la con- sommation des
services la hausse de leur prix relatif. Dans la mesure o biens
matriels et services sont substituables pour rpondre aux mmes
besoins, les biens sont appels prendre le pas sur les services :
cest la thse des partisans de lconomie de self-service (lordinateur
remplace les services de la secrtaire, devenus trop coteux). Mais
toute gnralisation de ce type conduit des exagrations inverses des
prcdentes. Dans la ralit, consommation de biens et consommation de
services mesures en volume, et non plus en valeur augmentent peu
prs au mme rythme : une sorte de match nul, chacune des deux
composantes garde toute son importance. b) Les faits Un
rapprochement peut tre opr avec le ralentissement de la croissance
dans les conomies les plus avances, qui sont aussi les plus
tertiarises, et aussi avec le contraste entre les deux grandes
conomies du monde actuel : la Chine, dont le rythme de croissance
en pleine phase dindustrialisation gravite autour des 10 % par an,
avec des exportations qui exercent un rle moteur et des excdents
extrieurs systmatiques ; et lconomie amricaine, dont la croissance
est juge forte ds quelle culmine 3 %, avec des dficits extrieurs
records, qui se creusent toute acclration de la demande interne. 3.
LES COMPLMENTARITS ENTRE SERVICES ET INDUSTRIE : LA NCESSIT DUN
RAISONNEMENT EN TERMES DE PRODUCTIVIT GLOBALE a) Labsence dhomognit
des services du point de vue de la productivit Du point de vue de
la faiblesse des gains de productivit les services ne doivent pas
tre con- sidrs comme un bloc homogne. Il existe des contre-exemples
: les services de transport et communications mettent leur actif
des gains de productivit mesurables au mme titre que ceux de
lindustrie ou de lagriculture, et dune amplitude souvent encore
plus forte, comme latteste la baisse de leur prix relatif. Mais,
entre les deux extrmes (la coupe de cheveux et les transports), si
lon veut parvenir un jugement pondr, tout le problme vient de ce
quil nexiste pas de mesure directe de la productivit et de ses
variations pour un grand nombre dactivits de services, sans doute
la majorit. b) Renoncer mesurer la productivit des services ? Mieux
vaut renoncer toute tentative de mesure que de persister dans
certaines approches absurdes, comme de vouloir mesurer la
productivit du mdecin par le nombre de patients examins, celle du
professeur par le nombre de diplmes dlivrs : car cela revient
implici- tement (et inconsciemment) exclure toute possibilit dune
authentique progression de la productivit lie au contenu mme de
lactivit exerce. Or il serait contraire toute vraisem- blance que
des secteurs aussi volutifs puissent demeurer en marge du progrs de
la socit, et certains indicateurs objectifs globaux (comme les
gains desprance de vie) confirment sans ambigut quil nen est pas
ainsi. De plus, la situation est loin dtre fige, et aucune activit
tertiaire ne parat voue demeurer irrmdiablement lcart des gains de
productivit. c) Lindustrialisation des services La rvolution
informatique (les NTIC) a entran ce quon a appel l
industrialisation des services, en ralit lindustrialisation de
certains services, avec pour rsultat des gains de pro- ductivit
mesurables parfois spectaculaires, mais qui ont donn lieu des
gnralisations et prvisions abusives en matire de croissance. Une
autre mutation de plus grande porte mrite de retenir lattention des
responsables de la politique conomique : il sagit de limpli- cation
croissante en sens inverse cette fois des activits de recherche et
de services au sens
- 27. Fiche 8 Les enjeux du dveloppement dune conomie de service
20 large dans la gense et la diffusion des progrs de lindustrie,
une implication multiforme et de plus en plus dcisive au point que
les services sont dsormais au cur de linnovation industrielle. Il
rsulte de ces complmentarits que la dlimitation sectorielle du
secondaire et du tertiaire devient purement arbitraire, sinon
caduque : les frontires sestompent, les services sont omniprsents
dans la sphre productive comme dans la consommation finale. d) La
complmentarit entre services et industries La tertiarisation des
conomies avances nest pas synonyme dpuisement de linnovation, de
productivit stagnante et de fin de la croissance. Mais de fin de la
croissance conomique directement mesurable, sans doute, au moins au
sens de croissance directement imputable un secteur dactivit donne
(cest lenseignement le plus clair de tous les dbats autour du
paradoxe de Solow : On voit des ordinateurs partout, sauf dans les
statistiques de producti- vit ). Les complmentarits saffirment tous
les niveaux. Dans la phase actuelle, limpor- tance croissante des
activits de services pour lesquelles la productivit est impossible
mesurer directement ne signifie pas que lon doive renoncer toute
mesure globale de la pro- ductivit de lconomie dans son ensemble :
aussi longtemps que les biens matriels demeurent une composante
essentielle de la demande finale, leur croissance peut tre tenue
pour repr- sentative de la contribution productive de toutes les
branches de lconomie, y compris bien entendu les services. La
diffusion des gains de productivit partir du secteur qui en est
lori- gine caractrise plus que jamais la Nouvelle conomie et cette
diffusion ne sarrte pas aux frontires : les innovations originaires
des conomies avances font de plus en plus vite sentir leurs effets
sur lindustrie des pays mergents. Cest l lun des facteurs du
renforcement de la contrainte extrieure, qui reprsente, pour les
conomies post-industrielles fortement tertiarises, la menace la
plus directe de freinage de leur croissance globale. 4. LA FAIBLE
CONTRIBUTION DES SERVICES AUX CHANGES INTERNATIONAUX a) Des
reprsentations sur le dynamisme des services Il existe une
conviction trs rpandue que les exportations franaises de services
connaissent un essor sans prcdent . Cette vision sappuie notamment
sur les bonnes performances de la France en ce domaine, qui se
place souvent ces dernires annes au 2e rang mondial des
exportateurs de services. On fait frquemment tat aussi de la part
croissante des services avec lmergence trs visible de quelques
multinationales dans le total mondial des investissements directs
ltranger. Et surtout chacun pense la perce rcente des changes de
services nouveaux, issus de la rvolution informatique, sadressant
pour la plupart aux entreprises, et quelquefois aux particuliers.
Encore faut-il garder prsentes lesprit la grande htrognit des
changes de services et la dynamique trs contraste qui caractrise
les principaux postes en moyenne et longue priodes : un jugement
objectif ne saurait se fonder exclusivement sur la progression
rapide de quelques services nouveaux souvent trs frap- pante, mais
dont le poids relatif demeure encore assez faible (services
dinformatiques et information) sans prendre en compte le
comportement des services plus traditionnels comme les transports
ou les services gouvernementaux (dpenses des ambassades et dpenses
militaires ltranger). b) La faiblesse relative des exportations de
services Limportance relative des exportations franaises de
services que lon peut valuer en pro- portion du commerce extrieur
de marchandises ou du produit du secteur tertiaire na pas cess de
fluctuer depuis les annes 1950, mais sans trend nettement affirm.
La part des exportations de services dans le total des exportations
franaises oscille autour de 20 %. Le rapport des
- 28. Fiche 8 Les enjeux du dveloppement dune conomie de service
21 exportations de services la valeur ajoute totale du secteur
tertiaire oscille, lui, autour de 8 % sur les vingt dernires annes.
Lessor des changes internationaux de services a seulement accompagn
lessor (rapide) du commerce extrieur de marchandises ce qui est dj
beaucoup. Limpression souvent ressentie dun vritable envol rcent
des exportations de services comporte une part dexagration. Lide
reue selon laquelle lessentiel des services schangent peu (au plan
international) reste globalement vraie : le taux douverture du
secteur tertiaire (rapport des exportations de services la valeur
ajoute sectorielle : 8,2 % en 2001) reste trs infrieur celui de
lconomie nationale (rapport des exportations de biens et services
au PIB : 26,2 % en moyenne pour la France entre 1998 et 2002). Il
en rsulte un effet de structure le processus de tertiarisation long
terme tend rduire, toutes choses gales dailleurs, cest--dire
indpendamment des volutions au sein de chaque secteur, le taux
douverture global des conomies nationales , qui constitue un
dterminant important (en loccurrence, un facteur de freinage) de la
dynamique douverture internationale. Le constat de limbrication des
activits de services dans la dynamique des changes interna- tionaux
de biens manufacturs mais aussi de produits primaires ( travers le
transport et linnovation notamment) invite mettre au centre de
lanalyse de linsertion dune conomie nationale dans les changes
mondiaux la notion de comptitivit globale. Par cercles concen-
triques, les services participent au dveloppement des changes (du
transport qui facilite louverture manufacturire, aux services aux
entreprises qui dynamisent lensemble des changes en passant par les
activits de recherche qui orientent les spcialisations). Ds lors,
le solde courant apparat plus que jamais central pour apprcier la
comptitivit, comptitivit industrielle, comptitivit des services
dsormais indissociablement lies.
- 29. 22 9 Adam Smith et la richesse des nations 1. APPROCHE
MTHODOLOGIQUE ET CONCEPTS FONDAMENTAUX Lanalyse de Smith intgre les
caractristiques du libralisme et apparat pleinement en phase avec
la logique du capitalisme. Inspir notamment par Mandeville et
Helvesius, Smith thorise de faon systmatique l en conomie. Il prend
comme lment de base des indivi- dus gostes qui poursuivent leurs
intrts personnels. Dans la sphre conomique la recherche par chacun
de son intrt conduit par le jeu de la main invisible de la
concurrence au bien- tre collectif : Ce nest pas de la
bienveillance du boucher, du marchand de bire et du boulanger que
nous attendons notre dner mais bien du soin quils apportent leurs
intrts. Nous ne nous adressons pas leur humanit mais leur gosme .
Smith montre aussi que le prix permet dajuster les quantits
offertes et les quantits demandes. Le march, lieu dchanges, est
porteur dune harmonie collective et dune bonne allocation des
ressources. Sur la question de la valeur Smith propose une double
approche. Il aborde le thme par loffre en distinguant des biens non
reproductibles (mtaux, uvres dart) dont la valeur rside dans la
raret et des biens reproductibles dont la valeur est fonction de la
quantit de travail quils intgrent. Smith appelle prix naturel le
prix de production qui dpend de la quantit de travail incorpor dans
le produit et prix de march celui qui rsulte du jeu de loffre et de
la demande. Il est possible que le prix de march oscille autour du
prix naturel. 2. DIVISION DU TRAVAIL ET EFFICACIT PRODUCTIVE La
division du travail permet de raliser des gains de productivit.
Smith prend lexemple de la production dpingles, qui ncessite, selon
lui, dix-huit oprations distinctes. Il compare la production
obtenue dans une manufacture de dix ouvriers o chacun se spcialise
dans deux ou trois oprations celle qui serait obtenue en labsence
de spcialisation : Ces dix ouvriers pouvaient faire entre eux plus
de quarante-huit milliers dpingles dans une journe ; donc, chaque
ouvrier, faisant un dixime de ce produit, peut tre considr comme
donnant dans sa journe quatre mille huit cents pingles. Mais sils
avaient travaill part et indpendamment les uns des autres, et sils
navaient pas t faonns cette besogne particulire, chacun deux neut
pas fait vingt pingles, peut-tre pas une seule dans sa jour- ne .
Et Smith de gnraliser : Dans tout autre art et manufacture les
effets de la division du travail sont les mmes () la division du
travail amne un accroissement proportionnel dans la puissance
productive du travail. () Cette grande augmentation dans la quantit
douvrages quun mme nombre de bras est en tat de fournir, en
consquence de la division du travail, est due trois caractristiques
diffrentes : c premirement, un accroissement dhabilet chez chaque
ouvrier individuellement ; Point clef Louvrage Recherches sur la
nature et les causes de la richesse des nations, publi en 1776,
marque une tape importante dans lhistoire de lanalyse conomique.
Smith sintresse la plupart des thmes conomiques de son temps avec
comme l conducteur la croissance (la Richesse des nations). Smith
fait certes la synthse dides avances par dautres avant lui
(Mandeville, Helvesius, Hume) mais sa rigueur scientique le fait
apparatre comme le premier classique aux yeux de Karl Marx.
individualisme mthodologique
- 30. Fiche 9 Adam Smith et la richesse des nations 23 c
deuximement, lpargne du temps qui se perd ordinairement quand on
passe dune espce douvrage une autre ; c troisimement enfin
linvention dun grand nombre de machines qui facilitent et abrgent
le travail, et qui permettent un homme de remplir la tche de
plusieurs. Smith met ici en avant limportance de lapprentissage, de
lorganisation de la production et du en conomie. La division du
travail est, selon lui, dautant plus pousse que la taille du march
est grande. La possibilit de raliser ainsi des gains de productivit
conduit une vision optimiste des perspectives de croissance. 3. LE
RLE LIMIT DE LTAT Chez Smith, lanalyse de ltat est intgre aux
mcanismes dune conomie de march. Ltat doit dabord exercer ses
fonctions rgaliennes : c la dfense nationale ; c la justice et la
police. De manire plus originale et analytique, Smith pense quil
revient galement ltat de pren- dre en charge la fourniture de biens
publics, de crer et de maintenir les institutions publi- ques et
les difices et travaux publics qui, bien quils soient du plus haut
degr dintrt pour la socit, sont dune nature telle que lobtention
dun profit ne peut jamais couvrir les dpen- ses dun individu ou dun
petit groupe dindividus, et quen consquence on ne peut satten- dre
ce quils les installent ou les entretiennent. La ralisation de ce
devoir ncessite des degrs diffrents des dpenses qui varient selon
les stades de dveloppement des socits. En certaines circonstances
linstauration de droits de douanes par ltat peut se justifier : c
en prsence dindustries stratgiques pour la dfense nationale ; c
pour compenser dventuelles taxes lexportation et rtablir une
comptition quitable entre industries nationale et trangre. Pour
financer ses fonctions, ltat doit lever des impts. Limpt doit,
selon lui, tre fonction des capacits contributives des individus
et/ou des bnfices quils retirent des dpenses publiques. Smith
recommande une gestion quilibre des finances publiques. 4.
LIBRE-CHANGE ET AVANTAGES ABSOLUS Alors que les politiques
commerciales de son poque sont encore trs imprgnes des doctrines
mercantilistes, Smith est, de manire gnrale, favorable au
libre-change : si un pays tranger peut nous fournir une marchandise
meilleur march que nous ne sommes en tat de ltablir nous-mme, il
vaut mieux que nous la lui achetions avec quelque partie du produit
de notre pro- pre industrie . Il tend la notion de division du
travail au champ de lconomie internationale. Chaque pays doit,
selon lui, se spcialiser dans les productions pour lesquelles, il
dispose dun avantage absolu en termes de cot de production.
Linsertion dans la division internationale du travail est bnfique
ds lors quun pays dispose de lavantage dans au moins une
production. Sa dmonstration des vertus du libre-change repose sur
des hypothses restrictives : les facteurs de production sont
parfaitement mobiles au plan national et immobiles au niveau
international. Son approche exclut a priori des changes
internationaux une nation sans avantage absolu. Repres
chronologiques 1759 : publication par Smith de louvrage Thorie des
sentiments moraux. 1760-1770 : dbut de la Rvolution industrielle
anglaise. 1776 : publication par Smith de louvrage Recherches sur
la nature et les causes de la richesse des nations. progrs
technique
- 31. 24 10 Lanalyse conomique de Ricardo 1. RICARDO THORICIEN DE
LA VALEUR TRAVAIL Ricardo reprend la distinction de Smith entre
valeur dusage et valeur dchange mais adhre la thorie de la valeur
travail. La valeur des biens industriels reproductibles est fonde
sur la quantit de travail quils incor- porent : La valeur des
marchandises se trouve modifie, non seulement par le travail imm-
diatement appliqu leur production, mais encore par le travail
consacr aux outils, aux machines, aux btiments qui servent les crer
. Cette approche constitue le cas gnral. Dans certains cas
particuliers, la valeur des biens reproductibles peut avoir un
caractre sub- jectif, du fait de la loi de loffre et la demande.
Les biens non reproductibles, trs minoritaires selon David Ricardo
(tableaux prcieux, sta- tues), ont une valeur fonde sur leur raret,
elle dpend des gots et du caprice de ceux qui ont envie de possder
de tels objets . Le prix naturel fond sur le travail constitue la
valeur des choses, le prix courant peut osciller autour de ce prix
naturel. Selon Ricardo, le salaire des ouvriers oscille autour de
ce quil appelle le salaire de subsistance qui constitue un salaire
minimum ncessaire la reproduction de la force de travail
(nourriture, vtements). 2. RENTE DIFFRENTIELLE ET TAT STATIONNAIRE
CHEZ RICARDO Lanalyse des rendements dcroissants des terres mises
en culture conduit Ricardo raison- ner en termes diffrentiels,
cest--dire la marge. Il annonce les ingnieurs et les marginalis-
tes. Sa thorie de la rente diffrentielle consiste expliquer
lorigine du prix des terres payes aux propritaires fonciers (le
loyer) partir des rendements agricoles. Ce prix varie en fonction
des diffrences de rendements entre les terres. titre dexemple,
Ricardo considre trois terrains (identiques en termes de surface)
produi- sant respectivement 100, 90 et 80 quintaux de crales. Le
propritaire du terrain qui donne 90 quintaux avec la mme quantit de
travail que celui qui donne 80 quintaux met la diffrence de 10 sur
le compte de la qualit intrinsque de sa terre et rclame cette
rente. Sous leffet de laugmentation de la population, il conviendra
de mettre en culture de plus en plus de terres Les meilleures
terres ont t mises en culture les premires et la loi des ren-
dements dcroissants de la terre prvaut. La rente diffrentielle est
condamne augmenter et la part du produit national consacre aux
paiements des propritaires fonciers galement. Comme les salaris
touchent des salaires de subsistance incompressibles et que leur
nombre est croissant, la masse salariale augmente court terme
proportionnellement la population. En consquence, les profits des
entreprises sont lamins. long terme, le profit (ce qui reste Point
clef David Ricardo (1772-1823) apparat comme le pre du raisonnement
dductif en conomie. Il pratique le rai- sonnement diffrentiel. Il
justie thoriquement le libre-change en avanant largument de la
spcialisation sur la base des avantages comparatifs. Son analyse
centre sur lagriculture le conduit tre trs pessimiste sur les
perspectives de croissance.
- 32. Fiche 10 Lanalyse conomique de Ricardo 25 du produit brut
lorsque lon a enlev les salaires et la rente) tend vers zro. Le
stock de capital se stabilise : lconomie sinstalle dans ltat
stationnaire. Ltat stationnaire est stable. Il peut tre modifi par
le progrs technique qui peut amliorer la productivit agricole et
louverture commerciale de lconomie. Via la baisse du prix des
denres alimentaires et par consquent du salaire de subsistance, les
importations de produits agricoles permettent un dplacement de
lhorizon de ltat stationnaire. Au total, Ricardo apparat comme un
classique pessimiste quant aux perspectives de croissance
contrairement aux classiques franais comme Say et Bastiat qui
concentrent leur attention sur lindustrie naissante (v. fiche 11).
3. LIBRE-CHANGE ET AVANTAGES COMPARATIFS son poque, David Ricardo
prend position contre les corn laws (v. fiche 12) et se prononce en
faveur dun libre-change gnralis auquel il apporte des fondements
thoriques solides. Dans Principes dconomie politique et de limpt
(1817), il fonde la spcialisation sur la notion davantage
comparatif. Chaque nation a intrt se spcialiser dans la production
pour laquelle elle dispose du plus grand avantage comparatif ou du
plus petit dsavantage comparatif en termes de cots de production.
Chacun peut trouver avantage une rallocation interne des facteurs
vers les productions pour lesquelles le pays est naturellement le
plus comptitif. Il y a rupture avec Adam Smith dans la mesure o
chaque nation peut maintenant trouver une place dans le commerce
international. Chez Smith, une nation sans aucun avantage absolu se
trouvait exclue de lchange. Ricardo prolonge galement lanalyse de
Smith en signalant les gains de bien-tre associ laccroissement du
nombre de produits offerts aux consommateurs. Mais il y a continuit
avec Smith dans la mesure o lon ne connat pas lorigine ultime de
lavantage comparatif et de la spcialisation. Une approche
technologique (une combinaison efficace des facteurs) semble
derrire cet avantage en termes de cot de production, mais lon nen
sait pas plus. La dfinition de la nation reste galement la mme
(mobilit interne des facteurs de production, surtout du capital,
immobilisme externe de ces mmes facteurs). Pendant plus dun sicle,
la thorie ricardienne fait lobjet de critiques sans quaucune
approche alter- native ne la supplante. Il faut attendre pour cela
lentre-deux-guerres et lanalyse Heckscher- Ohlin-Samuelson (v.
fiche 66). Repres chronologiques 1817 : publication de louvrage
Principes dconomie politique et de limpt.
- 33. 26 11 La loi de Say 1. PRINCIPES ET HYPOTHSES DE LA LOI DE
SAY La loi des dbouchs est nonce par lconomiste franais
Jean-Baptiste Say dans son Trait dconomie politique publi en 1803.
Elle tient en une affirmation clef : Les produits schan- gent
contre des produits . Derrire cette proposition, il faut entendre
que, lors du processus de production, les revenus distribus
(salaires, profits, rentes) sont immdiatement rinjects dans le
circuit et viennent constituer une demande. Le revenu est rparti
entre consomma- tion (C) et pargne (S) sur la base du niveau du
taux dintrt rel (r). La consommation constitue une demande et
lpargne est immdiatement transforme en investissement (I). Cet
investissement prend la forme de machines et constitue lui aussi
une demande. La loi de Say ne relve pas dune simple galit
comptable. Sous certaines hypothses, toute offre cre sa propre
demande , il convient notamment que la monnaie soit neutre, cest--
dire ne constitue quun voile sur les changes. Chez Say, la monnaie
na que deux fonctions (intermdiaire des changes et unit de compte).
Elle nest pas dsire pour elle-mme (implicitement, il ne serait pas
rationnel de conserver une pargne sous forme liquide puisque ce
serait se priver du taux dintrt). Il peut arriver que le chef
dentreprise offre des produits indsirables par le march. Dans ce
cas le systme de prix (parfaitement flexible et vecteur
dinformations non biais) doit rpon- dre en envoyant comme signal
leffondrement des prix, ce qui conduit modifier les caract-
ristiques des produits offerts. Point clef La loi de Say fonde
lapproche conomique librale et constitue un rceptacle des grandes
controverses macroconomiques contemporaines. La loi des dbouchs
repose sur les hypothses de neutralit de la mon- naie et de
exibilit des prix. Elle fonde lide que la ralisation de lquilibre
macroconomique ne saurait rencontrer dobstacle du ct de la demande
et implique la mise en uvre de politiques doffre. Offre production
Salaires Profits Rentes C S Revenus r w/p Qmax March du travail Q r
Qmax March des capitaux Q I Demande
- 34. Fiche 11 La loi de Say 27 2. PORTE DE LA LOI DE SAY Dans la
tradition dun classicisme franais plutt ax sur lanalyse du
dveloppement de lindustrie (Say, Bastiat), la loi de Say fonde un
certain optimisme quant la possibilit pour une conomie de maintenir
une croissance durable et soutenue. Au contraire, les classiques
anglais dont lattention se concentre sur lagriculture (Malthus,
Ricardo) et ses rendements dcroissants craignent ltat stationnaire
(v. fiche 10). La loi de Say a fait lobjet de nombreuses critiques.
Malthus et Sismondi au dbut du XIXe sicle ainsi que Marx un peu
plus tard ont attir latten- tion sur la possibilit dune crise de
sous-consommation lie une pargne excessive et la possibilit dune
thsaurisation. Sismondi (1819) en particulier fait ressortir
limportance de la demande. Une crise de surproduction peut entraner
une rduction des prix et des revenus (en raison de la baisse de la
demande de travail). La baisse des revenus entrane une baisse de la
demande et de la production. Keynes apporte une contestation plus
nette partir dune analyse montaire. Lincertitude consubstantielle
la nature de lconomie conduit dsirer la monnaie pour elle-mme (pour
lessentiel au motif de spculation du fait des possibles variations
du taux dintrt : la dten- tion dencaisses liquides est prfrable la
dtention de titres en cas de hausse des taux). On comprend ds lors
que toute offre ne peut plus crer sa propre demande : une partie
des reve- nus distribus lors du processus de production est
conserve sous forme de liquidit. Si court terme la validit de la
loi de Say parat, sans conteste, devoir tre rejete en raison de la
force mme des hypothses ci-dessus, long terme une fois les
ajustements oprs ne deviendrait-elle pas valide ? 3. IMPLICATIONS
NORMATIVES Dans la mesure o la ralisation de lquilibre
macroconomique ne rencontre pas de pro- blme du ct de la demande,
la loi des dbouchs permet de justifier la mise en uvre de
politiques doffre. Il convient de librer linitiative individuelle,
favoriser loffre de travail et les comportements dpargne. Dans
cette perspective, il est souhaitable de libraliser le fonc-
tionnement des marchs dinputs (travail et capital) afin dengager
les quantits maximales de facteurs dans la production. Les pouvoirs
publics doivent veiller au laisser faire , au respect de la
concurrence la plus pure, veiller ce que le moins de distorsions
possibles napparaissent sur les marchs. Repres chronologiques 1803
: publication par J.-B. Say de louvrage Trait dconomie
politique.
- 35. 28 12 Les termes du dbat sur les Corn Laws 1. LHRITAGE
PROTECTIONNISTE, PRIVILGE DE LARISTOCRATIE FONCIRE a) Une pratique
ancienne Des corn laws existent en Angleterre ds 1436, elles
autorisent alors lexportation de crales uniquement si les prix
locaux tombent en de dun certain seuil. Des lois plus ou moins
rigoureuses perdurent jusquau XVIIIe sicle exprimant la fois le
pouvoir de laristocratie foncire et la force de la doctrine
mercantiliste. En 1791, une loi interdit limportation de bl tant
que son prix intrieur reste infrieur 54 shillings le quarter (soit
lquivalent de 291 litres de bl). Ce barme est port 66 shillings en
1804. Par la suite, en raison de la fin des guerres napoloniennes,
laristocratie foncire anglaise doit faire face une baisse de ses
revenus agricoles. Toujours dominante au Parlement, elle obtient en
1815 le vote dune nou- velle lvation du barme : la libre
importation des bls nest maintenant possible que si le prix du
quarter dpasse 80 shillings. Un tel prix est particulirement lev,
il est voisin dun prix de famine. b) Vue densemble du dbat Dans ce
contexte dlvation des prix, avec en arrire-plan la symbolique du
prix du pain, ces corn laws font lobjet dun dbat pendant prs de
trente ans. La controverse met dabord en prsence les plus grands
conomistes de lpoque. Ricardo (1772-1823) apparat comme le chef de
file des partisans de labolition des lois. Son argumentaire est
dabord analytique : le libre-change loigne lhorizon de ltat
stationnaire. Malthus (1766-1834) est le principal dfenseur des
corn laws, il avance des arguments de nature un peu plus politique,
mais pas seulement. Ce dbat traverse ensuite toute la socit
anglaise et structure la vie politique du XIXe sicle. Lpisode
illustre rtrospectivement le fait que la politique commerciale dune
nation dpend des rapports de force entre les diffrentes composantes
de la socit, essentiellement lpo- que, pour caricaturer, les intrts
agrariens face aux intrts industriels avec comme arbi- tre un
gouvernement dont les recettes douanires constituent environ 45 %
des rentres budgtaires au seuil des annes 1840. 2. LES TERMES DU
DBAT CONOMIQUE Au cours de la dcennie 1810-1820, les conomistes
semparent de la question des bls. Parti- sans et adversaires des
corn laws saffrontent dans un dbat qui traduit une monte en puis-
sance de lexpertise conomique et marque lhistoire de lanalyse
conomique par sa densit. Point clef Les Corn Laws (lois sur les
bls) sont lorigine dune controverse dans lAngleterre de la premire
moiti du XIXe sicle sur les avantages et les inconvnients du
protectionnisme agricole. Ricardo et Malthus posent alors
lessentiel de largumentaire contemporain sur la politique
commerciale. Ce dbat traverse la socit anglaise et structure la vie
politique. Lpisode montre que la politique commerciale dune nation
est notamment le produit des rapports de forces entre groupes
sociaux.
- 36. Fiche 12 Les termes du dbat sur les Corn Laws 29 a) Les
arguments ricardiens : baisse du prix du bl et des salaires,
restauration des prots et loignement de lhorizon de ltat
stationnaire D. Ricardo, appuy notamment par E. West, T. Tooke et
R. Torrens, recommande labrogation des corn laws. Plusieurs
arguments sont mis en avant. Le bl reprsente, selon Ricardo, une
composante importante de la consommation des tra- vailleurs. La
hausse du prix du bl pse ainsi sur les salaires qui oscillent
autour de leur niveau de subsistance et tend diminuer les profits.
En 1817 dans les Principes dconomie politique et de limpt, Ricardo
affirme : si, au lieu de cultiver notre propre bl ou de fabriquer
les vtements ou les autres biens ncessaires aux travailleurs, nous
dcouvrons un nouveau mar- ch qui nous fournit ces marchandises
meilleur compte, les salaires diminueront et les pro- fits
augmenteront . En ce sens, le libre-change travers la baisse des
prix des denres alimentaires permettrait de restaurer les profits
et dloigner lhorizon de ltat stationnaire auquel lconomie anglaise
lui semble condamne du fait des rendements dcroissants et de la
rente diffrentielle de la terre. Selon Ricardo et James Mill (pre
de John Stuart), la mise en place dun march cralier mondial
permettrait de lisser les fluctuations des prix du bl. Les prix
anglais seraient moins sensibles aux alas climatiques locaux. Les
dsquilibres se compenseraient lchelle inter- nationale. La
suppression des corn laws est une mesure dquit sociale, le bas prix
du pain profiterait tous. Pour Ricardo et plus tard pour John
Stuart Mill (1827) lintrt des propritaires fon- ciers ne doit pas
passer avant celui de la nation. b) Les arguments de Malthus :
indpendance alimentaire et stabilit sociale T. Malthus apparat
comme la figure de proue des dfenseurs des corn laws, il est appuy
par des auteurs moins connus comme W. Jacob et W. Spence. Dans ses
Observations sur les effets des lois sur les bls (1814), Malthus
conteste le lien entre prix du bl et prix du travail, la
consommation de bl nest quune composante mineure des achats des
salaris : le prix du bl ne rgle pas immdiatement ni gnralement les
prix du travail et de toutes autres marchandises . Il fait par
ailleurs observer que des situations de pauvret et de famine
apparaissent parfois dans des pays o les prix du bl sont trs bas.
Le lien entre baisse des prix du bl et augmentation des profits ne
lui semble pas tabli. Malthus met ensuite en avant limportance de
la scurit des approvisionnements en denres et lintrt de
lindpendance alimentaire nationale. Lpisode du blocus a rappel la
ralit de ce risque mme si, grce sa domination maritime, lAngleterre
sest alors appuye sur son empire colonial et a dvelopp ses
relations commerciales avec les tats-Unis et les pays neutres.
Enfin le maintien des corn laws se justifie au nom de la stabilit
sectorielle et sociale de lco- nomie. Il existerait, selon Malthus,
une proportion naturelle entre activits agricoles et indus-
trielles. Il soppose lide ricardienne dune division internationale
du travail et dune spcialisation sur la base davantages comparatifs
en termes de cots de production qui impli- quent le sacrifice de
certains secteurs de lconomie. 3. LES CORN LAWS : UN DBAT DE SOCIT
a) Le mcontentement des industriels Demble, ds 1815, llvation du
barme suscite des mcontentements : lors du vote, le peu- ple
manifeste devant les Chambres qui doivent tre dfendues par la
troupe. Les industriels sont, eux aussi, mcontents. Ils
souhaiteraient ltablissement dun libre-change gnralis en Europe
afin de souvrir les marchs continentaux. La baisse du prix des
denres alimentaires
- 37. Fiche 12 Les termes du dbat sur les Corn Laws 30
permettrait alors une rduction des cots de production travers la
baisse des salaires. Par ailleurs, laugmentation des quantits
produire pour lexportation autoriserait une plus grande mcanisation
de la production. Les industriels vont ds lors sopposer aux Lan-
dlords en rclamant la suppression de cette loi. Laudience des
abolitionnistes grandit pro- gressivement mesure que le poids de
lindustrie progresse au sein de lconomie anglaise. Selon les
estimations de Paul Bairoch en 1810, la part de lagriculture dans
le PNB tait sup- rieure de 70 % celle de lindustrie mais, en 1840,
lindustrie dpasse dj lagriculture de 60 %. Ds 1820, une ptition des
marchands contre les corn laws est remise la Chambre des Communes,
rassemble linitiative de lconomiste Thomas Tooke et avec le soutien
offi- cieux du Political Economy Club de Ricardo. Ce dernier meurt
en 1823, mais le poids et laudience des industriels continuent de
grandir mesure que le pays se dveloppe. Les indus- triels sont
rejoints par des propritaires fonciers clairs qui parfois ont
diversifi leurs activi- ts en investissant dans des affaires
industrielles et commerciales. En 1828, linstauration de lchelle
mobile des droits de douanes assouplit de facto les corn laws. En
1832, la rforme lectorale amliore la reprsentation politique des
industriels en redistribuant les siges et en doublant le corps
lectoral qui passe 800 000 votants. b) Lamplication du mouvement
anti-corn laws autour de la ligue de Manchester entre 1838 et 1846
En 1838, une association de patrons est cre Manchester, anime par
John Bright et sur- tout Richard Cobden. Cette ligue de Manchester
va alors faire cole. Un an plus tard, la National Anti-Corn Law
League (ligue contre les lois cralires) est cre sous forme de
fdrations dassociations locales. Le groupe de pression est trs
actif, distribue des brochures, organise des confrences (800 pour
la seule anne 1840), rassemble des ptitions. En 1843 The Economist
nouvel hebdomadaire appuie les tenants du libre-change en uti-
lisant notamment des arguments sociaux : la suppression des corn
laws permettrait la baisse du prix du pain et du cot de la vie, le
sort des classes moyennes et des ouvriers devrait de la sorte tre
amlior. Le mouvement qui cristallise par ailleurs divers
mcontentements et conteste les privilges tablis voit sa popularit
grandir. Le parti Tory de Robert Peel est de plus en plus sensible
aux thses libre-changistes. En 1842, la politique commerciale
anglaise connat une inflexion, le Premier ministre Peel rduit de
faon substantielle les droits de douanes et annule linterdiction
dexporter des machines en vigueur depuis 1774. Mais les corn laws
ne sont pas rellement modifies. Il faut attendre les dsastreuses
pluies de 1845 et la mauvaise rcolte de pommes de terre en Irlande
pour forcer labrogation des corn laws le 15 mai 1846. Selon la
formule de lcrivain Morlay (1882) It was the rain that rained away
the corn laws (cest la pluie qui emporta les corn laws). La
Grande-Bretagne parat sacrifier son agriculture sur lautel de la
division inter- nationale du travail. 4. LES CONSQUENCES DE
LABOLITION DES CORN LAWS ET DE LA MISE EN UVRE DUNE POLITIQUE DE
LIBRE-CHANGE PAR LA GRANDE-BRETAGNE a) Une dpendance alimentaire
croissante Labolition des lois sur les bls sinscrit dans un vaste
ensemble de mesures de libralisation des changes commerciaux
(suppression des actes de navigation en 1849, abrogation de nom-
breuses taxes douanires entre 1846 et 1852). De manire unilatrale,
la Grande-Bretagne
- 38. Fiche 12 Les termes du dbat sur les Corn Laws 31 adopte une
politique commerciale qui peut tre qualifie de vritablement
libre-changiste, elle reste en vigueur jusquau seuil des annes
1930. Quelles en sont les consquences ? En ce qui concerne
lagriculture, la production nationale de bl ne sest pas effondre la
suite du dmantlement des corn laws : entre la priode 1831-41 et la
priode 1849-1859 elle flchit dun peu moins de 15 %. Les prix du bl
fluctuent sur la priode 1850-1878 entre 46 et 70 shillings le
quarter mais aucune baisse tendancielle et substantielle ne peut
tre identi- fie selon A. Clment (2004). Lagriculture anglaise opre
une reconversion vers llevage qui lui permet de connatre une priode
faste jusquau seuil des annes 1870. Nanmoins les importations de bl
progressent et le taux de dpendance alimentaire saccrot durablement
: les importations reprsentent 13 % de la consommation de bl entre
1830 et 1850, elles atteignent 48 % entre 1868 et 1875 enfin prs de
75 % entre 1905 et 1909. Cette dpendance alimentaire croissante
jusque dans la premire moiti du XXe sicle impose la Grande-Bretagne
de prserver la scurit et la rgularit des approvisionnements par le
maintien dune domination maritime. b) Le renforcement de la
domination commerciale britannique Plus largement la stratgie
libre-changiste anglaise semble constituer un succs. Le dmant-
lement tarifaire permet lAngleterre de souvrir des marchs extrieurs
en pleine expansion. Les grandes puissances europennes consentent
en effet des mesures dassouplissement de leur politique commerciale
linstar de la France qui, ds le dbut des annes 1850, abaisse le
niveau moyen de ses droits de douanes. Comme prvu, lavance
technique britannique lui permet damliorer ses positions
commerciales. Lessor des exportations tait dj rapide dans les 10 15
ans prcdents (environ 5 % lan) et la tendance sacclre encore aprs
1846. De 1843-1847 1857-1861,