Ordonne-moi ! volume 3 - Créer un blog gratuitement...

Preview:

Citation preview

Egalementdisponible:

Contratavecunmilliardaire

DécouvrezlesaventuresdeJulietteetDarius,lemilliardaireauxmultiplesfacettes.Uneintriguesentimentaleintenseetsensuellequivoustransporterajusqu'auboutdevosrêveslesplusfous.

Egalementdisponibleettéléchargeabledansvotremagasin:

MrFireetmoi

LajeuneetjolieJuliaestàNewYorkpoursixmois.Réceptionnistedansunhôteldeluxe,riendemieuxpourparfairesonanglais!Àlaveilledesondépart,ellefaitunerencontreinattendue:lemultimilliardaireDanielWietermann,aliasMisterFire,l'héritierd'unegrandemarquedejoaillerie.Électrisée,ellevasesoumettreàsescapriceslesplusfousetpartiràlarencontredesonpropredésir...Jusqu'oùsera-t-elleprêteàallerpourréalisertouslesfantasmesdecethommeinsaisissable?

Egalementdisponible:

Toi+Moi:l’uncontrel’autre

Toutlesoppose,toutlesrapproche.QuandAlmaLancasterdécrochelepostedesesrêvesàKingProductions,elleestdéterminéeàallerdel’avantsansseraccrocheraupassé.Bosseuseetambitieuse,elleévoluedanslecercletrèsferméducinéma,maisn’estpasdugenreàsefairedesfilms.Sonboulotl’accapare;l’amour,ceserapourplustard!Pourtant,lorsqu’ellerencontresonPDGpourlapremièrefois–lesublimeetcharismatiqueVadimKing–,ellereconnaîtimmédiatementVadimArcadi,leseulhommequ’elleaitvraimentaimé.Douzeansaprèsleurdouloureuseséparation,lesamantsseretrouvent.Pourquoia-t-ilchangédenom?Commentest-ilarrivéàlatêtedecetempire?Etsurtout,vont-ilsparveniràseretrouvermalgrélessouvenirs,malgrélapassionquileshanteetlepasséquiveutlesrattraper?

Egalementdisponibleettéléchargeabledansvotremagasin:

Mords-moi!

Lemondesedivisedésormaisentremortelsetvampires.Lasociétésembles’êtreadaptéeàlacohabitationdesdeuxespèces,maislesméfiancespersistent.Unenuit,unegrosseberlineroulantàviveallurerenverseHéloïse,unejeunefemmede22ans.L'hommequiensort,visiblementpressé,s’emparedesoncorpsetletransportejusqu'àsavoiture.Cethomme,c'estGabriel,unmagnifiqueetmystérieuxvampire.Héloïsevadevoirresterchezluijusqu'àlanouvellelune,27joursplustard.Unerelationsensuelleetfascinante,contéeavectalentparSiennaLloyd.Unlivretroublantetenvoûtant,àlacroiséedeTwilightetCinquantenuancesdeGrey!

Egalementdisponibleettéléchargeabledansvotremagasin:

Toutpourlui

AdamRichterestjeune,beauetmilliardaire.Ilalemondeàsespieds.EléaHaydensenestunejeuneetjolievirtuose.Complexéeparsesrondeurs,inconscientedesontalent,Eléan’auraitjamaispenséqu’unehistoireentreAdametelleétaitpossible.Etpourtant…uneattiranceirrésistiblelespoussel’unversl’autre.Maisentrelemanqued’assuranced’Eléa,lafougued’Adametlesembûchesquecertainsaimeraientmettresurlaroutedesdeuxjeunesgens,leurhistoired’amournevapasêtredetoutrepos!

ChloeWilkox

ORDONNE-MOI!

Volume3

1.Luxe,panique…etvolupté?

27août

Jesuistellementnerveusequejenesaisplusoùdonnerdelatête.Quedois-jefaireenpremier?Mecoiffer ?M’habillerpournepasdéfairemonchignonpar la suite ?Memaquiller ?D’accord.Mais pour quel look opter ?Un rouge à lèvres foncéme donnerait l’air plusmûre,mais quelquechosedenaturelseraitcertainementdemeilleurgoût…

Ehoui!j’aibeaumetrouverdansl’unedessuitesduFourSeasonsdeNewYork,jerestelamêmeLouisa : jemanque toujours autantd’assurance…Ilvapourtant falloirque j’en fassepreuve, si jeveuxmemontrer à la hauteurde la soiréequim’attend : je suis attendue chez lesLaGuardiadansmoinsd’uneheure!LesLaGuardiasontlesparentsdeSandro,lecousindeDavid.SylviaLaGuardia,née baronne de Schiari – tout comme sa défunte sœur, la mère de David – a épousé ÉmilioLaGuardia,unpuissanthommed’affairesnew-yorkais.Cedernierestencemomenthospitalisésuiteà un grave problème cardiaque. Ce qui expliquema présence dans cette ville. Autant dire que cesombreévénementnem’aidepasàmedétendre.Jemedemandesimaplaceestvraimentparmicettefamillecesoir…Aprèstout,depuisnotrearrivée,Davidapassésontempsauchevetdesononcle.Ils’est installéchezsa tantepour l’aideret lasoutenir jusqu’à l’opération. Ilsembleavoiràcœurdepasserleplusdetempspossibleaveclessiens:jenevoudraispasparaîtreintrusive.

Bon,certes, ilm’ademandéde le suivrepour le soutenirdanscetteépreuve.Maismêmesi j’aiaccepté les yeux fermés, je garde en mémoire son avertissement dans le hall de l’aéroport deFlorence:«Ilyadeschosessurmoiquetudoissavoir.»Quelleschosesexactement?Jen’enaipaslamoindre idée. David a-t-il renoncé àme parler ?Ou est-il tout simplement trop absorbé en cemomentpar sesaffairesde famille,par l’angoisse,par la fatiguedueaudécalagehoraire,pour lefaire ? Je n’en sais rienmais ilme reste peu de temps pour découvrir ce qu’il semblait prêt, hierencore,àm’avouer.Dansdixjours,pourmoi,ceseraleretourenFranceet lareprisedescoursàl’université. Que va-t-il ensuite advenir de notre relation ? Est-il d’ailleurs juste de parler de «relation» ?Après tout, lorsque j’ai vouludire àDavid, juste avantnotredépart précipitépour lesÉtats-Unis,quejel’aime,ilarefusédem’écouter,arguantqu’ilétaitencoretroptôtpourça.Or,letempsnousmanque.Vais-jefinirparrentreràParissansmêmeavoirpuluidirecequejeressens?

Voilàque lespenséessebousculentdansma tête…Cen’estvraimentpas lemoment ! Jesuis sipressée…Ilnefautsurtoutpasquejesoisenretard,j’aivraimentenviedefairebonneimpression.Chaquedétailcompte.Lechoixdelatenuemeparaîtunequestionépineuse.Jen’aipasenviedefairepreuve d’une coquetterie déplacée et, de toute façon, je n’ai vraiment pas la tête à ça. Mais leconcierge de l’hôtel m’a apporté tout à l’heure une sublime robe de cocktail Chanel en soie etdentelle,«delapartdemonsieurFulton».Ceseraitinconvenantdenepaslaporter,neserait-cequepourmarquermareconnaissance.Mêmesi,jel’avoue,jen’aivraimentpasl’habituded’êtregâtéeàcepointetquejenesuispasforcémentàl’aiseavecl’idéequeDavidfasseautantdefoliespourmoi.

Rien que la pièce où jeme trouve en cemoment est d’un luxe extravagant ! Je n’ose imaginercombien il débourse chaque jour pour cette suite royale et son petit salon beige, son épaissemoquette, ses fenêtres immenses qui donnent sur Central Park, pour ces lis qui embaument lachambreaulitkingsize…Etjenepeuxpasm’empêcherdepenserqu’ilfautquejerestefidèleàmoi-même.Quejenem’habituepasàceluxe.Aprèstout,dansdixjoursseulement,moncarrosserisquefortderedevenircitrouille.

Je trotte jusqu’à la salle de bains de marbre en enfilant bon an, mal an ma paire de sandalesLouboutin–unefoliefaiteaujourd’huipoursurprendreDavid.Jen’auraissansdoutepasdûcraquerainsi mais je mets au défi toute fille de se promener dans New York sans rentrer dans l’un desinnombrablesmagasinsdechaussuresquijalonnentlesrues.Etpuisaprèstout,«YOLO»,commedisentlesétudiantsd’ici:YouOnlyLiveOnce,onnevitqu’unefois.J’arrivedevantlemiroiret là,c’estlechoc.Avecmatenueetmonchignon,j’ail’impressionpendantunefractiondeseconded’êtreAudreyHepburn!Rassuréeparl’imagequemerenvoiemonreflet,j’enfilemontrench,attrapemonsacàmainetmedirigejusqu’àl’ascenseur.

EnfranchissantlaporteduFourSeasons,j’enfilemeslunettesdesoleiletmeprendàrêverquejesuisunestardecinéma…LesLaGuardiahabitentunpeuplushaut–surla5eAvenue,bienentendu.J’ai envie de passer par Central Park ; je n’ai pas encore eu l’occasion d’y mettre les pieds. Jem’apprêteàm’élancerquandsoudain,Garysurgitdevantmoi.

–MademoiselleMars…bonjour.Meferiez-vousleplaisirdemesuivre?

Sa casquette sous le bras, il désigne du menton la limousine. Je fais un sourire radieux auchauffeuretluiemboîtelepas.Unefoisdeplus,lagalanteriedeDavidmefaitfondre.Garym’ouvrelaporteduvéhicule: jemeretiensdejustessedepousserunpetitcridejoielorsquej’entrevois lasilhouette de mon amant, irrésistible dans son smoking. Faussement impassible, je grimpe dansl’habitacleenprenantappuisurlabanquetteencuirquicraquesousmesdoigts,quandtoutàcoup,jem’exclame:

–Sandro?!

Careneffet,cen’estpasDavidFultonquim’attenddanslavoituremaissoncousin.Cederniermelanceundecessouriresenjôleursdontilalesecret.

–BonjourLouisa.J’espèrequevousnem’envoudrezpas:j’aiprislalibertéd’emprunterGarypourvenirvouschercher.Jenerésistejamaisauplaisird’untête-à-têteavecunejoliefemme.

Quel culot ! Jevire à l’écarlate et sens les ailes demonnez se froncer.QuandSandro joue lesséducteurs,çamemetmalàl’aise.Jetrouvecegenredephrasestrèsdéplacées.MaisSandroestaufondungentilgarçoncar,sentantmonmalaise,ilajoute:

–J’espèrequemaplaisanteriesurletête-à-têtenevouscontrariepas,Louisa.C’estsimplementmamanièreàmoidevousdirequevousêtes stupéfiantedebeauté, ce soir. Jem’excuse si jeme suismontrécavalier.

Jemedétendslégèrement.Sandroreprend:

–Pourtoutvousdire,jevoulaispasservousprendrepourvousbrieferunpeusurmafamille.Jesaisquecegenrederencontrepeutêtreimpressionnante,etDavidestplutôtdenaturetaiseuse…Àuntelpointquemamère elle-mêmeestnerveuse à l’idéedevous rencontrer !Rendez-vous compte :jamaisDavidneluiaprésentéde…dejeunefemme…

Cetteidéem’enchanteetmeterrifieàlafois.Ainsi,jeseraisdoncunegrandepremièredanslaviedeDavidFulton?Ehbienj’aiintérêtàmemontreràlahauteur.J’essaiedenepascéderàlapaniqueetsondeplutôtSandropoursavoircequim’attend.

–Davidestprochedelabaronne?–Proche?Vousvoulezrire,j’espère?Elleestcommeunemèrepourlui!Aprèstout,c’estelle

quil’aélevéaprèsledécèsdesesparents.Davidvousenaparléj’imagine.

Commesic’étaitdanslanaturedeDaviddeselivrer…

Tentantdemasquermonignoranceetmontrouble,jeréponds.

–Euh…Oui,unpeu,bienentendu.

MaisSandrosemblecomprendrequ’ilvafalloirm’éclairerpuisqu’ilenchaîne.

–Quandmononcleetmatantesontdécédésdanscetragiqueaccidentdelaroute,Davidestvenuvivreavecnous.Mamèrel’aélevécommes’ilétaitsonfils, jel’aiaccueillicommeunfrère.MonpèreÉmilioafaitdemême,maisavechélas,jecrois,moinsdesuccès.ToutcommeDavid,iln’estpastrèsdouépourmontrersessentiments.Cesdeux-làonttoujoursentretenudesrapportstendus…Onpourraitmêmeallerjusqu’àdireviolents…

J’aisansdoutel’airébahiparcesrévélationscarSandros’empressedepréciser:

–Jevousrassure,cettepériodeestrévolue:ÉmilioetDavidn’ontpaseudegravedisputedepuisdesannées.Cessouvenirsdéplaisantsremontentànotreadolescence.

–Cen’estpascela…C’estjustequejeprendsconsciencequejen’avaisjamaischerchéàsavoircequ’étaitdevenuDavidaprèss’êtreretrouvéorphelin.Enfait, jenesavaismêmepas,pout toutdire,que son père et samère avaient péri dans un accident de voiture.Vous le connaissez : il peut êtreassez…imperméable.

Sandroéclated’unrirefrancquinousrapprocheinstantanément.

–«Imperméable»?Vousavezlesensdel’euphémisme!C’estmoiquiaidûdireàmamèrequeDavidétaitrevenuenvilleen…puis-jelediresansvousoffenser?…encharmantecompagnie.Cetempotén’apasétéfichudepipermotàvotresujet!

Ilglisse,enappuyantsonproposd’unclind’œil:

–C’estdoncmoileresponsablequivousentraînedansl'assommanteréuniondefamillequivous

attendcesoir!

D’apprendrecelamedéçoitmaisjetentedemasquermondépit.J’auraisaiméqueDavidprennedelui-mêmel’initiativedemeprésentersafamille.Maiscelamefaitdubiendesavoirquej’aitrouvéunalliédanslapersonnedeSandro.Jeluisouris.

Cependant, les pensées tourbillonnent dans ma tête. Etait-ce de l’accident que David désiraitm’entretenir avant que nous n’allions plus loin, lui etmoi ? Avait-il besoin de se livrer avant depouvoirentendremesmotsd’amour?Pourtant,ceque jeviensd’apprendren’entacheenrienmessentiments !C’estmême tout le contraire : je pense à l’enfant qu’il a été, cet enfant dont la vie abrusquement basculé suite à une affreuse tragédie, et je ne l’en aime que plus. Derrière l’hommeimpressionnant et mystérieux, je vois désormais le petit garçon orphelin. Mon cœur se serre.J’aimeraisleconsoler,cepetitbonhomme,panserl’immenseblessurequ’ilporteenlui.N’est-cepascela,finalement,l’amour?Nonpastomberamoureuxetsedirequeceladureraàjamais,maisaimerunepersonneensedisantquecelaatoujoursétélecas,àchaqueétapedesavie,mêmesinousnelaconnaissionspasencore?Alorsquejepenseàtoutça,lavoituresegare.Leportierseprécipiteverslalimousineetnousouvrelaporte.Sandrosortlepremieretmetendlamain.

–Merci.

Nousentronsdansunhalltoutendorures.Mestalonsrésonnentsurlesoldemarbre.

Lavache!Quelluxe!

Nousavançonsversl’undessixascenseursdubuilding,qu’ungroomappellepournous.

–Dernierétage,monsieurLaGuardia?

Sandroacquiesce.Moncœurbatàcentàl’heure.Dequoiai-jel’air?Monnouvelami,sentantmapanique,meditavecchaleuretbonhomie:

– Ma mère va vous adorer, Louisa. Elle est beaucoup moins impressionnante et bien pluschaleureusequesontitrenelelaissesupposer.

L’ascenseurs’arrête.Jemesensflageolante,commesil’ons’apprêtaitàmelivrerenpâtureauxlions.Sandrosortsescléspourouvrir,jem’engouffreàsasuite.J’entendsunevoixs’exclamer:

–Enfin!

Unepetite tornadebruneaccourtversnous ;une femmed’environ45ans,menue, extrêmementchicdanssontailleurdegrandcouturier,avecunfauxaird’IsabellaRossellini–mêmespommetteshautes,mêmenezd’unefinesseexemplaire,mêmeregardardent.Cedoit-êtreSylviaLaGuardia.Ellepassedevantsonfilsenfaisantminedenepaslevoir.

–Pousse-toi,grandnigaud.Tum’empêchesd’embrassernotreinvitée!

Jecomprendsmaintenantd’oùSandro tiresadouce ironie.Labaronnemeplaît immédiatement.

Elle agrippe mes mains et m’embrasse sur la joue gauche. Surprise, je rougis et murmure, enesquissantunerévérencediscrète:

–Madame…–Oh!pasdemanièresentrenous:appelez-moiSylvia.

Elleattrapemonbrasetmeglisse:

–Après tout, c’estcommesinousétionsdevieillesamies. J’ai tellementcuisinémesgarçonsàvotrepropos!

Davidsurgitdans l’entréeetsemblesurprisdemevoirdéjàdemècheavecsa tante. Ilposesonregardsurmoi,puissurSandro.

–Tiens,vousêtesarrivésensemble?–Oui, j’espère que tu nem’en voudras pas,mais je n’ai pu résister au plaisir d’aller chercher

Louisa à son hôtel. J’ai donc enlevé, enmoins d’une heure, et ton chauffeur et ta fiancée. Tumeconnais,jesuisincorrigible.

Aumot«fiancée»,Davidseraiditetesquisseunsourireforcé.

Bon…

–J’imaginequetuasdûabreuvercettepauvreLouisadetonhabituelflotdeparoles.Tabouchedoit être asséchée : va donc nous servir un verre pendant que je débarrassemademoiselle de sesaffaires.

Davids’approchedemoietm’embrassechastementsurlajoueavecdes’emparerdemontrenchetdeletendreàunmajordomesurgidenullepart.Ilfaitdescendresamainlelongdemondosetlaplaque fermement contremes reins. Son contactme brûle.D’un geste assuré, ilme dirige vers lesalon.Sylvianousyattend.Ellem’accueilleavecunecoupedechampagne.J’attrapelecristaldélicatettrempemeslèvresdansleliquidedoré.

Bonsang,quelnectar!Jen’aijamaisrienbudetel!

Mesyeuxs’écarquillent.

–C’estunClosd’Ambonnayde2008,unemerveille.

Sylviameditçaensouriant.

–Jevoulaisfaireleschosesbien:c’estuntelévénementpourmoidevousrencontrer!

Elles’installesurlecanapéencuirbrundecevastesalonArtdéco.Jel’imite.

–Jesuisdésoléedevousrecevoirendesipéniblescirconstances.Avecl’opérationdemonmaridemain, jene saisplusoùdonnerde la tête.Heureusement,Sophie,notrecuisinière, a toutpris encharge.Nousmangeronsrussecesoir:lecaviaretlavodkasontdeuxexcellentesmanièresd’oublier

lessoucis!

JesuissurpriseparlecôtécanailledelamèredeDavid.Ellem’amuseetmeséduit.Jem’attendaisàunrepasguindé:jepensequefinalement,jevaispasseruneexcellentesoirée.

–Jesuismoi-mêmedésoléedevousavoirdonné tantdepeineavecmonarrivée,etpluspeinéeencoredestristescirconstancesdenotrerencontre.

– Mon enfant, ne le soyez pas ! Ce dîner va justement nous donner du baume au cœur. Laperspectivedevotrevenuem’apermisdevivremapremièrejournéejoyeusedepuisdessemaines.JemefaistantdesoucipourÉmilio…Maisjem’enfaiségalementpourDavid!Cegarçonvitdansunesolitudequim’effraie.Savoirqu’ilauneamiepourlesoutenirm’enchante!

Solitaire,David?OnparlebiendeDavidFulton,l’hommelepluscourtisédumondelittéraire?

–Mais dites-moi, Louisa, que faites-vous dans la vie ? Et comment avez-vous rencontré monneveu?

J’aimelachaleurmaternelleaveclaquelleelleévoquel’hommequej’aime.Labienveillancequenous ressentons pour David est, je l’espère, un point commun suffisant pour que nous devenionsbonnescamarades.

– Oh, c’est une histoire banale, qui a bien entendu viré au romanesque – mais ça, j’ai crucomprendrequec’était l’unedes spécialitésdeDavid.Nousnous sommesconnus surmon lieudetravail:JMLaroque,l’éditeurfrançaisdevotreneveu,chezquij’effectuaisunstage…

Davidm’interrompt:

–Audébut,Louisanem’aimaitpasbeaucoup.

Jeproteste,envain.

– Si, si, ne dis pas le contraire…Elleme trouvait arrogant. Elle était d’ailleurs d’une extrêmeimpertinence…

Davidsourit,amusédemagêne,etreprenddeplusbelle.

– J’ai immédiatement aimé son aplomb. Au bout de quelques jours à la courtiser, j’ai étélittéralementobligédelasupplierdemesuivreenItalie,chezClaudia!

Sylvias’exclame:

–VousavezrencontréClaudia!Oh!çamefaitplaisir.Claudiaestl’unedespersonnesquicomptelepluspourcettefamille.C’estbiensimple,c’estnotreciment.Elleétaitmanourricelorsquej’étaisenfant.Elleétaitaussicelledemasœur…

UnombrevoileleregarddeSylvia.J’enchaînevite,pournepasqu’unmalaises’installe:

– Je ne l’ai hélas pas rencontrée, mais David m’a beaucoup parlé d’elle. Nous étions dans sa

maison,unendroitmagnifique!

Nousparlonsunmomentdel’Italie.Sandroégaielaconversationdurécitdesesamoursestivalesdejeunesseaveclesfillesducoin.Ilajouteauxanecdotesdesesdéconvenuessuccessivesdesdétailsparfoisgrivoispourprovoquersamère,quilegrondecommeunenfantfacétieux.JerisbeaucoupetsurprendparfoissurmoileregarddeDavid,quisemblesoulagéetattendriparlascène.Puisnouspassonsà lasalleàmanger,et le festindémarre.Lemajordomeadresséune tablesomptueusesurlaquelle sont posés saumons aux arômes variés, différentes sortes de caviars, thé noir aux cerisesconfites,vodka–queSandros’empressedenousservirdansdepetitsverresàpeineplusgrosqu’undéàcoudre.

–Jevoudraisproposeruntoast.Je lèvemonverreàcettefamilleréunie.Àmonpère,absentcesoir,auquelj’envoiemesplustendrespensées.Àtoi,Maman,pourtaforceettoncourage.Tutebatstoujourspourquelavieetlajoietriomphent:unefoisdeplus,cettetableenestlapreuve,c’estunsuccès.ÀDavid,mon cousin etmon frère, et àLouisa, qui nous amène ce soir gaieté et douceur.Enfin,àSophie,grâceàquinousallonspouvoirprofiterdecesmetsalléchants.Nasdrovia!

Sandro vide son verre d’un trait. Nous l’imitons puis prenons place. Je suis installée à côté deSandroetfaceàDavid.Cetéloignementphysiquemerassurequelquepeu:sentirsoncorpsprèsdemoimetroubletantquejecroisquejen’auraispaseulaforcedem’intéresseràautrechosequ'àlui.Là,enpetit comité,àcôtédeSandro l’enfant terrible, j’écouteSylviaqui seconfieetme livre sescraintes.

–Vous comprenez,monmari est un tel bourreau de travail ! Et puis, il est tellement têtu ! Lesmédecinssesontpourtantmontréstrèsclairs:unpontagen’estpasunremèdecontrelesproblèmescardiaques.C’estunebéquille,quisertàsoutenirunchangementdemodedevieradical.Ilvafalloirqu’Émiliolèvelepied,renonceauxcigares,àlavianderouge…Lavéritableépreuven’estpastantl’opération de demain que toutes ses mauvaises habitudes qu’il va devoir perdre. J’ai peur qu’iln’écoutepersonneetn’enfassequ’àsatête.C’estuntraitdeshommesdecettefamille…

Ellemesouritd’unaircomplice.

–Ilspeuventsemontrertrèsobstinés.Voireinsupportables…

DavidetSandrofontminedeprotester.

–Neniezpaslesgarcons!Oh,Louisa,vousnepouvezpasimaginercequecesdeux-làm’ontfaitsubirlorsqu’ilsétaientenfants!Lorsquenousnousréunissionsavectoutelafamillel'étéenToscane,masœuretmoinepouvionspasleslaissersortirdelamaisonsanscraindrelepire.

–Oh!Sylvia.Parpitié,racontez-moi!–Figurez-vousqu’unjour,Davids’estmisentêtedeconstruireunradeau–ilyavaitunerivière

nonloindelapropriétédeClaudia.Ildevaitavoir7ansetSandro,4ou5ansàpeine.Avecdesboutsde corde, ils ont lié entre eux des rondins de boismort et des planches récupérées je ne sais où.Ensuite, ils ont lancé leur embarcation sur l’eau. D’après ce que Sandro m’a rapporté, David adécrété :« Jemonte lepremier.Jesuis lecapitainedecenavireet leplusâgédenousdeux : s’ilm’arrivequelquechose,ceseramoinsgraveparcequej’aivécupluslongtemps…»

Sandrocoupesamèrepourreprendrelefildurécit.

–Davidagrimpédessuset,parmiracle,ceboutdeboisaflotté.Ilm’afaitsignedelerejoindre.Jesuismontéàmontour,etlà,lacordeacraqué…

C’estautourdeDavidderaconter.

–Onacommencéàcouler.Danslapanique,j’aicommencéànagerverslarive.Enmeretournant,j’aivuSandroquitentaitdem’appelerentredeuxsanglots.Ilétaitsipetitqu’ilnesavaitpasencorenager!J’ysuisretournépourlerepêchermaisjen’avaispasassezdeforce…Heureusementqu’ilyavaitdesbaigneurssurlarivequisontvenusnoussecourirtouslesdeux.Onestrentréstrempésetpenaudsàlamaison…

–Etcesdeuxpetitscrétinsn’ontriendit!Bienentendu!

Sylvialeurjetteunregardfaussementfurieuxmaisjedevinequecesouveniréveilleencorechezelleunevéritableinquiétude.Cettefemmeestunelouve:elleferaittoutpoursespetits.

–Jen’aiappriscettehistoirequ’àleuradolescence,àlafaveurd’uneautrebêtisequ’ilsontfaiteensemble.Ilscroyaient,naïvement,qu’enavouantqu’ilss’étaientmisendangerdesannéesavantetavaientfailliylaisserleurpeau,j’oublieraisqu’ilsvenaientdetenterdefairelemur!

Jenecessederire.Jecontinuemavisiteguidéedansl’enfancedeDavidFulton.Sylviamemontredesphotosdelui,enfant.Certainescoiffuressont…improbables.

–Oh!maisondiraitunpetitchampignon.

Davidritdeboncœur.

–C’estClaudiaquimecoupaitlescheveuxl’étéetellen’étaitpastrèsaufaitdestendances…Maisjeteremerciedecetteflatteusecomparaison.

Dieu, que cette soirée est délicieuse ! J’ai l’impression, pour la première fois, d’être prochedeDavid. D’habitude, sa présence me tend. C’est comme si mon désir pour lui me paralysait etm’empêchait d’être tout à fait moi-même. Là, j’ai l’impression que nous sommes sur la mêmefréquence.Maisilest,hélas,déjàl’heuredepartir…Ledînerestterminéetmestroishôtesdoiventseleverauxaurorespouralleràl’hôpital:DavidresteraunenuitdepluschezSylviapourêtreprochedessiens.Jeprendscongé.Sylviam’étreintavecchaleur.

–MerciLouisa.Depuisplusieursjours,j’avaisl’impressiond’êtreunevieilledamede100ans:votrevenuem’arappelémajeunesseetdessouvenirsheureux.J’enavaisbienbesoin.

Sandrom’embrasse lui aussi, puisDavidme raccompagne à la voiture.Dans l’ascenseur, nousnous taisons et osons à peine nous regarder. Mes mains tremblent d’émotion. J’ai l’impressiond’avoirtantapprisdeluicesoir!Désormais,j’aipeur.Peurqu’unefoisdeplus,Davidserétracte.Qu’ildéniequecemomentabieneulieuetqu’ilnousarapprochés.Jesuisperduedanscessombrespenséesquand,toutàcoup,Davidpivoteetm’embrasseavecfougue.Seslèvres,soncorps,secollentaumien.Soussonpoids,jereculeetmeretrouveledoscolléaumur.Sesmainsviennentchercher

machair.Ellesremontentlelongdemescuissesetrelèventmarobe.Sonbassinsecolleaumien,jehalète…Mais déjà, une petite sonnerie nous avertit que nous sommes arrivés au rez-de-chaussée.Davids’éloignedemoietrajustesacravate,jelissemarobelelongdemeshanches,lesportesdel’ascenseurs’ouvrent.Nousavançonssansunmotjusqu’àlasortiedel’immeuble.Gary,fidèleàsonposte,seprécipitehorsdelalimousinepourm’ouvrir.L’instantestsolennel.

–Aurevoir,Louisa.–Aurevoir,David.–Nousnousverronsdemain.Jet’appelleraidèslafindel’intervention.–Oui,d’accord…J’espère…j’espèrequetoutirabien.Pourtononcleetpourvoustrois.–Jel’espèreaussi.

Jem’engouffredanslalimousinequand,soudain,Davidm’interpelle.

–Louisa?

Jemeretourne,lamainsurlapoignéedelaportedelavoiture.

–Cefutunesoirée…intéressante.Àbiendesniveaux.

Savoixsembleémuealorsque,tentantdegarderunecontenance,ilmelance:

–Bonnenuit,mademoiselleMars.

2.Lejournousappartient

28août

J’ouvrelesyeuxenayantl’impressiond’avoiràpeinedormi.J'aifaitdesrêvestellementréalistesqu’ils semblaient des souvenirs venus me hanter. Je revois l’intérieur de l’appartement desLaGuardia, jeme remémore certaines séquences du dîner. J’ai vraiment l’impression que quelquechose a basculé durant cette soirée, et celam’effraie. J’ai si peur queDavid, dont je commence àconnaîtrelesréflexes,serefermebrutalementaprèss’êtreabandonnéetouvert.Sipeurqu’ilarrivequelquechose à sononcle et quecela change ladonneentrenous.Sipeur à l’idéedequitterNewYorkdansseulementneufjours.

Masuiteimmense,avecsesfenêtresdonnantsurlavillebruyante,sembleunecageenverre.Jenepeuxpassupporterd’êtrelà.J’aibesoindedescendredanslarue,devoirdesvisages.J’aienviedemedépenserenmarchant.Jeprendsunedoucherapide,enfileunjeanetdesbaskets,noueunchignonnégligé,enfilemontrenchetquittel’hôtel.J’avanceinstinctivementversleparc.Nonloindulac,jecroiseunvendeurdehotdogs.

–Combienpourvospetitspains?–4dollarspièce.–Non,non,paspourunhotdog:justepourlepetitpain.

J’en achète quatre pour 8 dollars afin d’aller nourrir les canards. Émietter la brioche, la leurlancer,medistraitquelquepeu.J’essaiedenepasconsultertropsouventmonportablequiestdansmapoche,maisc’estdur.Iln'estpasloindemidi:l’opérationadûfinir.Soudain,letéléphonevibre.Mamainsefigeautourdelui.Unesonnerie,deuxsonneries…Jeprendsunegrandeinspiration.

–Allô?–Louisa?C’estDavid.

Unsilence.Quelquesfractionsdesecondedurantlesquellesmoncœurbatlachamade.

– Tout s’est bien passé, Louisa. Émilio est en salle de réveil : il a parfaitement supportél’intervention.

Mesmainstremblentalorsquejepousseunsoupirdesoulagement.

–Oùes-tu?–Dansleparc.Je…jevoulaismarcherenattendanttonappel.Tuesencoreàl’hôpital?–Oui.–J’arriveimmédiatement.

Je raccrocheetmeprécipitevers lapremièresortie. Jemeretrouvesur la5eAvenueethèleuntaxi.Pourarrêterlevéhicule,jemejettepresquesoussesroues,commejel’aivufairedanslesfilms.

–AuPresbyterianHospital,s’ilvousplaît.

J’arrivevingtminutesplustardetmeruedanslehall.Davidestlà,entraindeprendreuncaféàlamachine.Sescheveuxsontébouriffésetsesyeuxcernés.Ilestvêtud’unsimplejeanetd’untee-shirt.Ilal’airépuiséetsoulagé.Jecroisquejenel’aijamaistrouvéaussibeauqu’encetinstant.Jecoursversluietmejettedanssesbraspuissants.Ilmesoulève.Sansmêmeypenser,jepressemeslèvressurlessiennes.

–Oh!David,jesuistellementsoulagée…

Ilmereposeausoletmeserredanssesbras.

–Mercid’êtrevenueLouisa.Mercid’êtrelàpourmoi.

Jesuisbouleverséeparlaspontanéitédenotreétreinte,parlareconnaissancequ’ilm’exprime.

–Toutvabiensepasserdésormais?–L’opérationavaitpourbutd’éviterqu’Émiliorefasseunautreinfarctus.S’ilsuit lerégimequi

lui a été imposé par les médecins et laisse tomber ses affreux cigares, tout devrait rentrer dansl’ordre.

–Tuasl’airéreinté,David.–Éreinté,affamé,hirsute…Lamatinéeaétélongue.J’aijusteenviedequittercetendroit.–TatanteetSandrosontlà?Ceseraitsansdouteconvenablequej’aillelessaluer…–Ilssontdanslachambred’Émilio,maisseulelafamilleestadmise.

Moncœurseserreàcettephrase.Cen’estpasrationnel,jelesais,maisjemesuissentietellementàmaplacehierque jenepeuxm’empêcherd’avoir la crainteque seperde cettenouvelle intimitéavecDavidetlessiens.

–Toiaussi, tuas l’air tendueLouisa.J’imaginequelanuitnet’apasépargnée…Viens,sortonsd’ici,allonscélébrercetteexcellentenouvelle!Jet’emmènedéjeunerChezDaniel.

–ChezDaniel?

Mesyeuxs’écarquillent.JeconnaislaréputationduchefDanielBoulud.Jenesuisabsolumentpasassezapprêtéepourallerdéjeunerchezlacoqueluchedelacuisinefrançaise!

–David…Nousnesommespashabilléspourça!

Davidéclatederire.

– Te voilà devenue une dame de la haute, Louisa. Ne t’en fais pas : j’ai mes habitudes là-bas,personnenes’offusquerademonaccoutrement.Quantàtoi,tuesdivine,commed’habitude.

Noussortonsdel’hôpitalallégés,brasdessusbrasdessous,impatientsd’allerdégusterlacuisine

deDaniel.Ennousvoyantarriver,l’hôtessesouritàDavid.

–Latablehabituelle,monsieurFulton?

David acquiesce et nous suivons l’hôtesse jusqu’au centre de la salle, sous l’une des voûtes enpierre.J’examinelacartependantqueDavidcommandeunebouteilledechampagne.

–Nous sommes en jean et baskets dans un restaurant chic, avec comme projet de nous enivreravantledébutdel’après-midi:j’aimebeaucoupnotreirrévérence.

–C’estqu’ilyaentoiunenfantimpertinentdonttum’avaissoigneusementcachél’existence.

J’ailancéçadansunsourire,maislevisagedeDavidprendsoudainuneexpressiongrave.

–Tunecroispassibiendire…

Mince,quelleidiote!AprèscequeSandrom'adithier,j’auraispumedouterqueparleràDaviddesonenfancen’étaitpasunetrèsbonneidée!

–Louisa,tutesouviens,lorsquenousétionsàl’aéroportdeFlorence?Jet’aiditquetuignoraiscertaineschosessurmoi.Deschosesimportantes,dontjevoulaisteparler…

J’opineduchef.Alorslà,lasituationdevientdélicate!J’ail’impressionqu’ilcomptemeparlerdudécèsde sesparents.Est-ceque je le laisse faire ?Ce serait toutdemêmemalhonnêtede lui faireraconterunehistoirequejeconnaisdéjà.Maissijeluidisquejesuisaucourant,ilrisquedemalleprendre.N’avons-nouspasfinalement,avecSandro,violésonintimitéennousarrogeantledroitdeparler de lui dans son dos ? À la fois, la vérité est toujours la meilleure option. Je prends moncourageàdeuxmains.

–Sandrom’adéjàtoutraconté,David.

Sesyeuxs’écarquillent.

–Commentça?–Hier,lorsqu’ilestpassémeprendrepourmeconduireaudîner.Ehbien,danslalimousine…il

m’araconté,pourtesparents.

Davidal’airfuribard.

–Oh!ilnefautpasluienvouloir.Jet’enprie!Ilacrubienfaire!Ilvoulaitquejecomprennemieuxlanaturedetarelationavectononcleettatante!Çapartaitd’unbonsentiment…

–Louisa,écoute-moi,c’estextrêmementimportant:qu’est-cequeSandrot’aracontéexactement?–Pasgrand-chose, je t’assure ! Il est resté très factuel…Iln’a fait qu’évoquer l’accidentde tes

parentsetlefaitqu’ÉmilioetSylviat’ontensuiterecueilli…

Cette fois, je levois,Davidest ivredecolère. Il se reculedanssonsiègeetdéclare,d’unevoixtranchantecommeuncouteau:

– Eh bien mon cher cousin a une mémoire très sélective, Louisa ! Mon oncle ne m’a pas «recueilli»:ilalaissélesservicessociauxmeplacerdansunfoyer,àBrooklyn.C’estseulementdesannéesplustard–sept,pourêtreprécis–qu’ilasoudainementdécidédedevenirmontuteurlégal.

LetondeDavidsefaitouvertementsarcastique:

–J’imaginequelafortunedemesparentsetl’astronomiqueassuranceviequ’ilsavaientcontractéen’avaitrienàvoiraveccettegénéreusedécision.

Jedeviensblême. Je suisautantahuriepar lecaractère inattendudeces révélationsquepar leurviolence.DavidFulton,quejecroyaisêtrenéavecunecuillèreenargentdanslabouche,avécuenfoyerd'accueil!Ilasuccessivementperdusesparentsetaétéabandonnéparsaseulefamille!

–Davidje…j’étaisàmillelieuxd’imaginertoutça!–Cen’estrien,Louisa.N’enparlonsplus.Disonsjustequeçamemettrèsencolèrelorsqu’Émilio

apparaît soudaincomme lebonSamaritain.Contrairement à sonépouseouà son fils, cen’estpasexactementquelqu’undetrèsrecommandable…

Davidsemblesecalmerenfin:

–MaisSylviaetSandrol’aiment,etleurbonheurcompteplusquetoutàmesyeux.

Malgrécesparolesapaisées,jesuisdésormaisincapabled'avalerquoiquecesoit.Jesuisbientropbouleversée.Lesquestions sebousculentdansma tête.Sept ans?Dansun foyer ?Commecepetitgarçon, qui m’attendrissait tant hier encore en photo, a dû manquer d’amour ! Comme il a dûmanquerdetout!

–Tunemangespas?

Jesecouelatêtenégativement.Jen’arrivepasàfairetairemestropnombreusesinterrogations.JesaisbienquequandDavidditqu’unediscussionestclose,ilfautl’accepter.Maiscettefois,jenepeuxpas:cequisejoueestbientropimportant.

–David,jenecroispasquecequetuviensdemediresoit«sansimportance».Jesuisdésoléemais,pourmoi, toutcequi teconcernecompte. Jen’enai rienà faire,desgrands restaurants,desvoyages en jet, des cadeaux somptueux, si jenepeuxpas avoir accès à toi.L’hommeque tu es, legarçonquetuasété,toutcelacompteàmesyeux.EtjenepeuxpasmangeruntartaredecoquillesSaint-Jacquesenfaisantcommesiderienn’était.J’aibesoindecomprendrequitues.

Davidm’écoute, attentivement. Sonvisage reste impassiblemais dans ses yeux, je vois quelquechosedevenirflou.Jesensquemondiscoursletoucheplusqu’ilnel’agace.J’osereprendre:

–Jem’enfiche,deChezDaniel,duFourSeasonsetdel’UpperEastSide:c’estl’endroitoùtuasgrandiquim’intéresse.Quituasété,etquituesdevenu.

–Vraiment?–Oui.Biensûrqueoui.–Trèsbien.

David fait signeau serveurdenous apporter l’addition et nousquittons le restaurant en ayant àpeine touchéànosentrées.Nousmarchonsdans la rueensilence. Jen’aiaucune idéedecequi setrame.Soudain,Davids’engouffredansunebouchedemétro.

Tiens,pasdelimousineoudetaxipourunefois?

Jeluiemboîtelepasetréalisequejen’aiencorejamaisvisitélesubwaynew-yorkais.

–Pourfairelelienentremonenfanceetlaviequejemèneaujourd’hui,lapremièrechoseàfaireestdeprendrelaligneN,Louisa.C’estcellequirelieManhattanàConeyIsland.

Assis côte à côte dans le train, nous gardons le silence.Aubout d’un quart d’heure environ, lemétrosurgitdesentraillesdelaterreetsemetàroulerenpleinair.Nousmontons,nousdescendons:mon regard reste tourné vers la fenêtre. Les immeubles et les maisons défilent. Je me demandecombiende foisDavid a observé, enfant puis adolescent, cesmêmesbâtisses.La rameest déserte,hormisunevieilledamequelquessiègesplusloin,etunejeunefemmed’environvingtansaffairéeàtricoterunbonnetauxcouleursde laJamaïque.La lumièresembleannoncer l’automneàvenir : lecielestbas, la teinteocrequicaractérise lecieldeManhattansedissipepeuàpeu.Enfin,unevoixannonceleterminus.

Toujours silencieux, nous sortons du métro et arrivons sur une large promenade qui bordel’océan.L’heureestgrave,pesante.Jen’oseriendemanderàDavid.C’estluiqui,alorsquenousnousengageonsdansunerue,prendlaparole.

–Sinouscontinuonsplusloin,ceseralequartierslave.J’yaipassédelonguesheures,plusjeune.Jefaisaislemurpourallerdécouvrirlesnombreusesspécialitésdescafésetcantinesquifleurissentdanslecoin.Lebortschrusse,leskinkhaligéorgiens,lechepelgushtchétchène…C’estGaryquim’ainitiéàtoutça.SafamilleétaitoriginaireduCaucase…

– Jeme souviens, à présent, que tum’avais dit avoir rencontréGary lorsque vous étiez enfant.C’étaitdoncaufoyer…

Davidacquiesce.Soudain,noustombonsnezànezavecunegrandebâtissedélabrée.Lesbriquessontapparentesàcertainsendroitsoùlecrépitn’apasrésistéàl’érosiondesannées.

–VoilàLouisa,c’estlàquej’aigrandi.

L’endroitfaitfroiddansledos,nonàcausedesalaideurmaisplutôtàcaused’uneabsencetotaledecaractère.Rien,ici,nesembleindiquerquedesenfantsgrandissent,s’amusent,nouentdesamitiés,sontaimés;rienn’indiquequecesmursabritentdelavie.Lafaçaderestedésespérémentsilencieuse.

–Peut-onentrer?

Davidsecouelatête.

–JenepréfèrepasLouisa.Ilyaicidespersonnesquejepréféreraisnepas…nepascroiser.Tuvoulaisvoirmonenfance:voilà,tul’asvue.Iln’yariend’autreàendire.J’aipassédutempsici,j’aiparfoisétérecueilliquelquesmoispardesfamilles,maislesenfantsvieux,onfinittoujoursparles

rendre.Ilssontcommedesjouetscassés.Ilsontdéjàtropaiméettropperdu,lesadultesselassentvitedeleurtristesse.

Jecontemplemon«jouetcassé».Cethommequejenesauraisdépeindre,dontlevisageparfaitdemeurepourmoiuneénigme.Jem’attardesurlecoindesesyeux,oùsedevinelafatigue,sursespommettes,que j’aimeraisembrasser,sursabouche, figéedansuneexpressionneutre,dont jesaisqu’ellepeutd’uninstantàl’autres’épanouirdanslesourireleplussolairequ’ilm’aitétédonnédevoir.

–Partons,Louisa.S’ilteplaît,partons.Voircetendroit…Çafaitressurgirdevieuxfantômesquimebouleversentplusquejenel’auraisimaginé.

Nousavançonsàreboursdanscesruesoùjeneremettraiprobablementjamaislespieds.L’enfancede David Fulton est comme un livre qui se referme. Un conte terrifiant où je devine l’ombre dudrame.Encejourgrisoùl’étédécline,lesoleilestencorehaut;pourtantlajournéeestfinie.Jesuisépuisée, David également. La tristesse nous enveloppe et fait comme une bulle autour de nous.J’attrapesamain.Ilmelanceunpauvresourire.

– Louisa, je… jeme disais qu’on pourrait peut-être dormir chezmoi, ce soir. Sylvia n’a plusbesoindemoi, je peux regagnermon appartement.Nous enverrionsGary chercher tes affaires auFourSeasons?J’aibesoindesentirtaprésenceàmescôtéscettenuit.Desentirtoncorps.

Jem’arrêteetplantemesyeuxdanslessiensavecuncouragequimesurprendmoi-même.J’ouvrelaboucheetm’entendprononcer:

–Jamaisjenetelaisseraiseul,David.Pastantquetudésirerasquejesoisàtescôtés.

3.MalentenduàNewYork

29août

Auréveil,unesensationdechaleurirradiemapeau.J’ouvrelesyeuxlepluslentementpossible:jeveuxgardercetteimpressiondélicieusedefatigueetdecontentement.Lorsquej’émergetotalement,c’estpourconstaterqueDavidetmoisommessoigneusementenlacés.Luiestallongésurledosetmemaintientcontresonbuste,unemainautourdematailleetl’autreperduedansmescheveux.Matêtereposesurson torse,mesmainsagrippentsesépaules.J’aienviedecontemplersonexpression.Jetentedemeredresserleplusdoucementpossible.Malheureusement,monmouvementleréveille.

–BonjourLouisa.

Savoixestrendueenfantineparunrestedesommeil.

–Bonjour.

Jelelaisseembrassermescheveux,puismatempe,puismanuque…

– Je suis affamé !Nous n’avons rienmangé hier, entre ce déjeuner écourté et… et cette soiréesportive.

Jesenslefeumonteràmonvisage.Pourdissimulermontrouble,jemepressecontrelui–cequiapoureffetd’augmenterlesien.Oui,lasoiréeetlanuitontété…brûlantes,c’estlemoinsqu’onpuissedire.

–Quedirais-tudefilersousladouche?Letempsdeconsultermesmailsetjet’yrejoins.Nouspourrionsensuiteallerprendreunbrunch.Ilestdéjàtard!

–Quelleheureest-ilexactement?–Bientôt13heures.

Hein?

Jebondis. Jedétesteme leverendébutd’après-midi,même lorsque jen’aipasd’obligations. Jetendslebrasetattrapel’unedeseschemises,restéesurlachaise,quej’enfilenégligemmentavantdequitterlelit.Ilmeregarde,attendri.

–Çatevabien,celookgarçonne.–C’estheureux,parcequejen’aipasd’affairespropressurmoi.Jevaisdevoirtel’emprunter.

Jetrottejusqu’àlasalledebainsetouvreladouchemultijet.Jelaissel’eauchaudedénouermesmuscles un à un, en prenant soin de ne pasmouillermes cheveux qui sont déjà suffisamment enpagaillecommeça.Davidtardeàmerejoindre.Tantpis.Jesorsetluicrie:

–Aurais-tuunebrosseàdentspourmoi?–Oui!Danslederniertiroirsouslelavabo!

J’ouvreettombeeffectivementsurunstockdebrossesàdentsneuvesencoredansleuremballage.Soitcegarçonestextrêmementprévoyant,soitl’hygiènebucco-dentairedesesconquêtesluiimportevraiment…Davidpasseunetêteparlaporte.

–Louisa,j’aiuncontretemps:Judithvientdemelaisserunmessage;uninvités’estdésistépourl’enregistrementd’untalk-show.Laproductionmedemandesijepeuxleremplaceraupiedlevé.Jedois être au studio dansmoins d’une heure…Et ça risque deme prendre la journée entière… Jecrainsquenotrebrunchtombeàl’eau.Çat'embête?

–Paslemoinsdumonde!– Bien. D’après Judith, l’enregistrement risque de durer jusqu’à 19 heures. À cette heure-ci,

Williamsburgbouchonne…Onpourraitseretrouververs20heurespourdîner?Jet’appelle?–Trèsbien.–Faiscommecheztoi.Uncafét’attendàlacuisine.Jet’aiégalementlaissélenumérodeGarysur

unPost-it,encasdebesoin.IlestcenséprendretesaffairesauFourSeasonsaprèsm’avoirdéposé,pourlesramenerici.Situpréfèreslesemballertoi-même,passes-yavantquinzeheures,d’accord?

–D’accord.

Jesorsdelasalledebainsetvaism’installerà lacuisinepourdégustermoncaffè lungo.Davidpasseentrombeetm’envoieunbaiserdeloin.

–Àcesoir!

J’entends la porte claquer. Je me retrouve seule. J’attrape l’exemplaire duNew York Times quireposesurlecomptoirdubaraméricain.Jelisendiagonaleunarticle,m’étire,regardel’heure…JedevraismerendreauFourSeasonspourpréparermessacs…Ilfautquejeremettelamainsurmessous-vêtements,monjeanetmesbaskets.Aveclanuitquejeviensdepasser…J’ailesouvenirqu’ilsontsoigneusementétédisséminésdanstoutl’appartement.Jedis«appartement»maisletermeexactest plutôt penthouse puisqueDavid jouit d’une vue panoramique exceptionnelle. L’endroit est bienplusluxueuxqu’unesuiteduFourSeasons,maiségalementpluscosy.Entoutcas,mêmesijen’enaivuqu’unepartie,c’estimmense:espéronsquejenemeperdepas!

Dansl’entrée,jevoismeschaussures.Danslesalon,j’aperçoismontee-shirt.Monjeanestdanslecouloir,ainsiquemaculotte.Nemanqueplusquemonsoutien-gorge,quidoitsetrouverdansl’unedesnombreusespiècescloses.Paslachambre:ça, j’ensuiscertaine.Nilasalledebains,quenousavons…exploréeplus tard.Labibliothèque?Oui,c’estbien làque…Maisquelleportepousser?J’attrapeunepoignéeauhasardetlatourne.Non,cen’estpaslà:cettepiècesembleêtrelebureau.Unechosemefrappe,quim’empêched’immédiatementrefermerlaporte.Jenesaispasexactementcequec’est.

Toutàcoup,çamesaisit.Cettepièceestaveugle,iln’yaaucunefenêtre.

Pourquoiinstallersonbureaudansunespacesanslumière?

Machinalement,j’appuiesurl’interrupteur.Cequejedécouvremerassuredansunpremiertemps:c’estbienunbureau,avecunetable,unechaise,unepetitedizainededossiersquis’empilent…Maisrapidement,quelquechosemedérangeànouveau.Cesontlesmurs.Ilssontrecouvertsdecoupuresdepresse.Surlesarticleslespluslongs,onpeutvoirlamêmephoto:uneadolescenteavecdelongscheveux sombres, des yeuxperçants et un nez retroussé.Elle sourit avec sincérité et pourtant, sonregard reste dur, sauvage, farouche. Il s’en dégage une défiance qui me captive. Elle me sembleétonnammentfamilière…

Oùai-jedéjàvucesyeux?

Jem’approchepourmieuxexaminersestraitsetlirelesarticlescorrespondants.

Àcetinstant,monregardestaccrochéparunautredétail:l’undesdossiers,surlebureau.Ilportemonnom.Sansréfléchirauxconséquencesdemonacte,jem’ensaisis.Lamaintremblante,j’ouvrela chemise cartonnée puis, de stupeur, la lâche aussitôt. À l’intérieur, sont conservées desphotographies.Jemebaissepourlesramasseretcommenceàlesexaminer.Cesontdesportraitsennoir et blanc, pris sur le vif.Moi à la faculté,moi qui sors demon appartement,moi en train dedéjeuner avec Barbara, ma meilleure amie… Tout mon corps est parcouru de soubresauts. Jecontinue de faire défiler les images. Une nausée me saisit alors que je découvre des portraitsindividuelsdemesproches.Adèle,Olivier,mesparents…MêmeAntoine, l’hommequefréquentaitBarbaraàl’automnedernier!C’estàn’yriencomprendre…Jemesenstressaillir.Destachesnoiressemettentàdanserdevantmesyeux.Jem’appuiesurlatablepourconserverl’équilibre.Levertigepasse…

Paniquée,jeremetslesphotographiesenplaceetrangeledossierlàoùjel’aitrouvé.Jesorsdelapièce en prenant soin d’éteindre la lumière et me retrouve dans le couloir. Je reste un instantpantelante,puis lapanique se saisit denouveaudemoi. Il fautque je sorted’ici !À lahâte, jemeprécipitedansl’entrée.J’enfilemesvêtements.

Mince,lesoutien-gorge!

Tant pis. Je me chausse, attrape mon sac et mon trench, cours jusqu’à l’ascenseur. J’appuiefrénétiquement sur leboutond’appel.Leding d’arrivée retentit, la porte s’ouvre ; jem’engouffre.C’estalorsque jeconstate laprésenced’unesilhouettemasculinedans lacabine.Trop tard, jebutecontreelle.Jemerecule,terrorisée.

–Louisa,çava?

Jem’apprêteàpousseruncriquandsoudain,jereconnaislecousindeDavid.

–Sandro!Qu’est-cequetufaislà?–Jevenaisvousproposerdedéjeuner,toietDavid…

Ils’interromptetexaminemonvisage.

–Louisa,qu’est-cequisepasse?Tueslivide.Çanevapas?

Dans son inquiétude,Sandro est spontanémentpassé au tutoiement.Demoncôté, je tentedememaîtrisertantbienquemal.

Jenepeuxpasluidirecequej’aivu.JenepeuxpastrahirDavid,jamais.

–Si,si,toutvabien…Unpeudefatiguesansdoute.–Tuasmangé,cemidi?

Voilàl’explicationrêvéeàmonétat.

– Non, justement, non. Ni petit déjeuner, ni déjeuner… Je dois sans doute faire un peud’hypoglycémie.

Sandrosedétendetrevêtsonmasqued’ironietaquine.

–Lavoilàdonc,l’explication!Moncousint’affame!

Ilappuiesurleboutondurez-de-chaussée.

–Ilneserapasditquemafamilletelaisseramourirdefaim:jet’emmèneimmédiatementmangerquelquechose!Etd’ailleurs,oùest-cequ’ilest,David?

–Ilestalléenregistreruneémissiondetélé.

Jesuismalàl’aise.JeneveuxpasparlerdeDavid.

Commentl’évoquersansracontercequej’aivu,danscetteabominablepiècesansfenêtres?

Sandroreprendsonairinquiet:

–Toutvabienentrevousdeux?–Oui.Net’enfaispas.

***

Nousmarchonsmoins de deux blocs et rentrons dans une trattoria à la décoration épurée. Laserveusenousinstalleàunepetitetableaufond.Jem’assoissurlabanquetteetmedébarrassedemesaffairespendantqueSandrocommande:

–Deuxlinguiniauxscampi,s’ilvousplaît…Etunremontantpourmademoiselle.

Jeproteste.

–Non,Louisa:jeneveuxrienentendre.Ondiraitquetuasvuunfantôme.Unpeud’eaudevieetdessucreslents:voilàcequ’iltefaut,crois-moi.

S’adressantdenouveauàlaserveuse:

–EtvousnousmettrezégalementunebouteilledePrimitivodiManduria,année2008.

Sandros’installeàsontour.L’employéeposeunpetitverredevantmoi.

–Lespâtesarriventdanstroisminutes.

Sandrosesaisitdubreuvage,qu’ilmetend.

–Culsec,Louisa.Jenevaispasteposerdequestionssurcequ’ils’estpasséavecDavid,j’imaginequevousvousêtesdisputésetcelanemeregardepasmais,parcontre,ilfautramenerdescouleursàcejolivisagemaintenant.

Obéissante,jem’exécute.

–Bien.Désormais,nouspouvonspasserunagréablemoment.

Sandrosefendd’ungrandsourirequimeréchauffelecœur.Êtreavecluimefaitdubien.Côtoyerl’entouragedeDavid,çamerassureetmedonnel’impressiond’êtreancréedanssavie.Quecequenousavonsensemble,malgrésapartd’ombreetsessecrets,estréel.

Sandro,commeàsonhabitude,passeledéjeuneràfairelepitrealorsquejedégustecequidoitsansdouteêtre lesmeilleurespâtesdeNewYork. Ilmeressertdecevindélicieux.Mêmesi jemedétends au fil des minutes, parfois, la frayeur m’envahit de nouveau. Des images de la « piècemaudite» ressurgissentdansmamémoire. Sandro faitmine de ne pas remarquer quemon regards’assombritparmomentsetredoubled’effortspourmedistraire–cequ’ilréussitmagistralementàfaire.

–IlyauneexpositiondeBasquiatauMoMA:çatedirait?

J’accepteavecempressement.Jeneveuxpasmeretrouverseuleavecmespensées,etSandroestdetrèsbonnecompagnie.

Nous nous rendons aumusée en taxi. Nous déambulons devant les toiles immenses de l’enfantprodige de Brooklyn. Sandro me parle du vieux New York, celui des années 1980. Je l’écoute,attentive,meraconter l’émergencede laculturehiphop, lesgraffitisquiontsoudainfleurisur lesmétrosetlesfaçades,l’espritfestifdelajeunesse,lesclubsoùl’onpouvaitcroiserAndyWarholetsabande…Touteuneépoquequ’iln’a,desonpropreaveu,pasvéritablementconnuecarilétaitalorstropjeune,maisdontilgardetoutdemêmeunenostalgietouchante.

Ilestdéjà18heureslorsquenoussortonsdumusée.Davidn’auraparfiniavantuneheure.J’hésiteà aller l’attendre devant le studio d’enregistrement.Malgré l’agréable après-midi que je viens depasser, je sens qu’il me faut d’urgence une explication – même si l’idée de ce que je risqued’apprendremeterrifie.Detoutefaçon,jenesaispasoùmerendre.Peut-êtrequesij’appelaisGary?Mais j’ai laissé sonnuméroà l'appartementdeDavid. Je réaliseque j’aioubliédepasserà l’hôtelempaquetermesaffaires…Detoutefaçon,ilesthorsdequestionquejem'installechezDavidavantd'avoir eu une sérieuse explication avec lui.Mais par quel bout prendre cette discussion ? Sandrointerromptlefildemespensées:

–Louisa,j’airendez-vousauRainbowRoomavecquelquesamis.Toutcequelajeunessedoréede

Manhattan compte de plus amusant et de plus infréquentable. Voudrais-tu te joindre à nous ? Ont’aideraàpatienterjusqu’àl’heuredetonrendez-vousavecDavid.

J’acceptedeboncœur:jenemesenspasdutoutd’errerseuledanslaville.Nousgrimponsdansuntaxietarrivonsaubar,situéaudernierétaged’unbuilding,avecunevueimprenable.Jemesensvraimentpiteuse,avecmachemised’hommeetmonjean,surtoutlorsqueSandromeprésenteChloeetOlivia,«sœurssiamoisesdelanuitnew-yorkaise»,Taylor,«rentierromantiquedesonétat»etChelsea,«dernièrehéritièred’unedynastiedontonaoubliéjusqu’aunom».

Taylorbonditettireunfauteuilclubpourquejepuissem’installerpuisfaitsigneauserveur.

–SixBellini’s,s’ilvousplaît.

Unpianistejouedesstandardsdejazz.Oliviademande:

–Sandro,chiaro,commentétaitTrieste?–EnnuyeuxcommeVenise,etbienpluslaid.–Tuyasfaitdesrencontresintéressantes?–Aucune.Pour ça, j’ai dû attendreque leshasardsde laviemeconduisent enToscane, où j’ai

trouvémademoisellequevoici…–Louisa,quefaisiez-vousenToscane?Votrefamilleypossèdeunepropriété?

SandrorépondàChloeàmaplace.

– Figure-toi que la fascinante LouisaMars était là-bas en compagnie demon cousin, dont ellesemblesupporterlacompagnieetlecaractèreombrageux.

Jenemesenspasspécialementàl’aisefaceàcegroupedésinvolteetsarcastique.Lestroisfillesportentdesrobesdecocktailetdesbijouxsomptueux.Taylormeregardeavecunairinsistantquejen’arrivepasàdécrypter.Discrètement,jeconsultemonportable.

Bonsang,quefaitDavid?

LeserveurapporteunedeuxièmetournéedeBellini’s.Chloetentedem’interrogersurDavidetlanaturedenotrerelation.Jeprendsbiensoinderesterlaplusévasivepossible.ChelseaetOliviaontquittélatabledepuisbellelurette.Ellesetiennentdésormaisàcôtédupianistequ’ellesaccompagnentdeleurchant.Iputaspellonyou,becauseyou’remine.Taylorselèveettendlamainpourm’inviteràdanser.Leserveurdéposesurnotretablelatroisièmetournée.Jeconsultedenouveaumonportable.Ilest20h15ettoujoursrien.Entempsnormal,celamerendraitsimplementunpeuanxieusemais,aprèscequej’aivucematin,lanégligencedeDavidmesembleintolérable.Chloedemande:

–Neserait-ilpastempsdedîner?

Sandrorétorque,aunomdugroupe:

–Dîner, alorsque le cœurde tout lemondeest à la fête ?Tun’ypensespas !Allonsplutôt auMarquee,onsouperaensuite.

Sansquejecomprennecomment,jemeretrouvedansuntaxiavecOliviaetSandro.Lerestedelabande est à notre suite.Nous arrivons à l’entrée d’un club et coupons la file. Le physionomiste àl’entréeserrelamaindeSandro,ilembrasseOliviapuisnouslaissepasser.Unehôtessenousinstalleàune tableà l’étage.Leserveur seprécipiteversnousavecunseauàchampagne.Lamusiquequipasseencelieum’inspiremoinsquelejazzduRainbowRoom.Montéléphone,soigneusementrangédansmapoche,nevibre toujourspas. Je sens ledépitm’envahir.Ainsi, ces troispremiers jours àNewYorkn’aurontétéqu’uneparenthèseenchantée.JesavaisqueDavid,aprèss’êtretantouvert,serefermeraitaussitôtmaisçan’empêchepasune infinie tristessedes’emparerdemoialorsquemaplusgrandecrainteseconfirme.

Qu’ilailleaudiable,avecsonindifférenceetsesmystères!

Etpuism’espionner,espionnermesproches…Trop,c’est trop.Jemelèveet titube.J’entends lavoixdeSandroquimecrie:

–Oùest-cequetuvas?

Jenerépondpasetdescendsl’escalier,chancelante.Jevaism’installeraucentred’unepistequi,malgrél’heure,estdéjàremplie.Jedanse,uneflûtedechampagneàlamain.Taylornetardepasàmerejoindre;Sandroetlesfillesarriventàleurtour.J’essaiedecalquermesmouvementssurlesleurs.Taylormesoulèveetmefaittournoyerdanslesairs.J’entendsSandrodire:

–Baslespattes,Tye.

Maintenant,mespiedssontdenouveauposéssurlesol.Latêtemetourne.J’aiperdutoutenotiondel’heure.Jesorsmonportable.Pasloinde22heures.Toujoursaucunenouvelle.C’estalorsquejeconstate,horrifiée,qu’aucunebarrede réseaune s’affiche à l’écran. Je ne captepasdans le club !Paniquée, je quitte précipitamment la piste et me rue vers la sortie. Et si David avait tenté demejoindre?Jeperdsl’équilibreenpassantlaporte.Oh,mince,çanevapasdutoutlà.Jeprendsappuicontreunmur.Sandro,quim’asuivie,s’approche.

–Çanevapas?–Sandro,je…

Jesuisincapabledefinirmaphrasetantjemesensmal.Lebruitdelaruem’agresse.Leslumièresdespharessemblentamplifiées.JelèvelesyeuxverslevisagedeSandro,quisedédouble.

–Veux-tut’asseoiruninstant?

Ilm’enveloppedesavesteetm’aideàglisserlelongdumur,monportabletoujoursàlamain.Cederniervibre enfin.Une fois, deux fois…six fois ! J’ai desmessages. Il faut que je les écoute. Jecompose avec difficulté le numéro de mon répondeur, me trompe de touches… C’est alors quej’entendsunevoiturepileretuneporteclaquer.

–Sandro!Tulalâchesimmédiatement!

David??

Sandroseretourneettentedeprotestermaiss’écroulesoudainàmespieds,assomméd’undirectdudroitassénéparsoncousin.DeloinmeparvientlavoixdeDavidquicriedesordres.

–Gary,vaimmédiatementauvestiairerécupérerlesaffairesdeLouisa…Oui,unsacencuirbleuetuntrench-coatbeige.

Deuxbraspuissantsmerelèventetmeguidentjusqu’àlalimousine.Jetiensàpeinesurmesdeuxjambesetnecomprendspascequim’arrive.Laportières’ouvre.Davidtientmatêtepourquejenemecognepaspuism’allongesurlabanquette.J’essaiedefaireunemiseaupointavecmesyeuxpourdeviner l’expressionde sonvisage,maiscelamecause immédiatementuneatrocedouleurdans lecrâne.

–Louisa,tuvasbien?

Je suis incapable de répondre. Tout tourne autour de moi. Je sens des bras autour de moi quim’enserrent,unemainquisurélèvematête;jesombre…

4.Histoired’A.

Aïe!

Unéclairm’atranspercélecrânealorsquejetentaisd’ouvrirlesyeux.

Oh!lavache,cequej’aimal.

Je n’ai aucune conscience de l’endroit où je suis. J’essaie une nouvelle fois de soulever mespaupièrespourconstaterquejesuisétenduesurlelitdeDavid,enchemiseetenculotte.Pendantuninstant,jesuisdésorientée.Soudain,toutmerevient.

LeRainbowRoometsesBellini’s.

Letaxi.

ChloéetOlivia.

LechampagnesurlapisteduMarquee.

Montéléphone.

Uneboufféedehonte terribles’emparedemoi.Jemeredresse le feuaux joues.Daviddoitêtrefurieux!

–Bonjour,Louisa.

Jesursauteetdevine,malgrélesrideauxtirés,lasilhouettedeDavidassisedansunfauteuil.

–Jet’aipréparédel’aspirineetunverred’eau.Ilssontsurlatabledechevet.Prends-les.

Au toncinglantdesavoix, jesensbienque je feraismieuxd’obéirsansbroncher.Jeprendsuncompriméet le laissesedissoudredansleverre,quejeboisparpetites lampées.LavoixdeDavidtrahitl’exaspération:

–Tuasconsciencequej’aidûteveillertoutelanuit?Tuasconsciencedelasituationdedangerdanslaquelletut’esmise?Jeneparlepasseulementdesconséquencesphysiquesde…detesexcèsentoutgenre.Jeparleégalementdecequipeutarriveràunejeunefemmeétrangère,seuledanslaville,etvisiblementivre!Heureusementquejemesuisinquiété!Heureusementquej’aienvoyéGaryàtarechercheetqu’ilaréussiàtelocaliser!

–David,je…ilnepouvaitrienm’arriverdegrave:Sandroveillaitsurmoi.

Davidéclated’unriremauvais.

–Tuappellescela«veiller»surtoi?Telaisserboirejusqu’aumalaise?

Davidselèveetmerejointsurlelit.Ilagrippefermementmesépaules.Souslechoc,matêteserenverseenarrière.Sesyeuxseplongentdanslesmiens.

–Tuestropconfiante,Louisa.Tut’enremetsàSandro,quetuconnaisàpeine.J’aimemoncousinmaisc’estungaminpourrigâté.Jenesaismêmepascommentjevaisréussiràluipardonner.Jenesaispascedontj’auraisétécapables’ilt’étaitarrivélemoindremal…

Jemesensaffreusementcoupable.Toutcelaestdemafaute,etc’estSandroquipaiepourmoi.Jem’écrie:

–David, je t’enprie, ilne fautpas luienvouloir…C’estmoiquiaiperdu lecontrôle !Sandrovoulaitjustemedistrairemaisj’étaistellementbouleversée,j’aibusansmêmem’enapercevoir!

–Bouleversée?

Davidal’airdésarçonné.

–Maisbouleverséedequoi?Lajournéeavaitsibiencommencé!

C’estlemoment.

Courage,Louisa.Siseulementj’avaismoinsmalaucrâne…

–David,ilfautquejetedisequelquechose…Hier,aprèstondépart,jecherchaismesaffaires…Etjesuisentréeparaccidentdanstonbureau.

–Comment?–C’était…C’était un accident !Toutes les portes étaient fermées, j’en ai ouvert une au hasard,

pensantquec’étaitcelledelabibliothèque!

Monsentimentd’injusticeesttotal.C’estDavidquim’espionne,etiltrouvelemoyendesesentirtrahi?

–Leproblèmen’estpascommentjemesuisretrouvéedanscettepièce,David:c’estcequej’yaivu.

–Etqu’as-tuvu,exactement,Louisa,pendantquetufouillaisdansmesaffaires?

C'enesttrop.Jefondsenlarmeetmavoixsebrise.

–Commentpeux-tutecomportercommesi j’étaisfautiveaprèscequej’aidécouvert?Tum’asfaitesuivreDavid.Tuasamassédesinformationssurmesprochesetsurmoi.Etpuiscettepièce…Toutecettepièceestatroceetmalsaine.C’estquoi,toutescescoupuresdepresse?Ondiraitunfilmd’horreur!

Davidserelèveetfaitlescentpas,horsdelui.

–Commentoses-tudiredeschosespareilles?C’est toiquias fouillémonappartement,etc’est

moiquel’onjuge?–JenetejugepasDavid:j’aipeurdetoi.

Àcesmots,ils’arrête,ébahi.

–Peurdemoi?–Commentveux-tuqu’ilensoitautrement?Est-cequetupeuximaginerl’effroiquim’asaisieen

découvrant…Jen’aimêmepasdemotspourça.Jenesaismêmepasparoùcommencerpourdécrirecequej’aivu!

Davidselaissetomberdanslefauteuiletpassesamainsursonvisage.

–Ok,ok.Jecomprends.

Ilsoupire.

–Cequetuasvu,Louisa,cen’estriend’autrequedeladocumentationpourmonprochainlivre.Je compte écrire un roman policier qui se passe dans les bas-fonds de Brooklyn. J’ai fait desrecherchespourm’inspirerd’unfaitdiversréel.J’aiégalementcontactéundétectiveprivépourqu’ilm’expliquesesméthodesd’investigation.

Ils’interromptunmoment,cherchesesmots.

–Quandjet’airencontrée,moiaussi,j’aieupeur.Jemesuissentiplusprochedetoiquejenel’aiété de quelqu’un depuis des années. Mais ouvrir un espace dans ma vie à une inconnue, c’estcompliquépourmoi, tulesais.Monpassém’arenduméfiant,etmafortuneetmonexpériencemedisentquej’airaisondel’être.J’aisansdouteeutortmais…latentationétaittropgrande.J’airappelécedétectiveetluiaidemandédeserenseignersurtoiavantdeteproposerdemesuivreenItalie.Jedevaisêtresûr,tucomprends?Sûrquetun’enavaisniaprèsl’argent,niaprèsmacélébrité.

Jeresteinterdite.Moncœursebrise.

–Tuasdoutédemoi?

Davidseprécipiteversmoietm’étreint,maisjerestecommeinertedanssesbras.

–JesuisdésoléLouisa.Je…jen’aipasl’habitudedefaire…cequ’onfaitlà,toietmoi.Jenesaispas comment les autres gens s’y prennent. Je ne comprends pas comment est-ce qu’ils peuventaccueillirquelqu’undansleurviecommeça,sansgaranties…

Ils’interrompt.

–Jedoisêtrefou.

Son désarroi est tel ! Et après ce que j’ai découvert depuis deux jours, je ne peux que lecomprendre.

–Non,David,non,tun’espasfou!Tuascommisuneerreur.Çaarrive.Maissicetteerreurt’a

permisdet’ouvriràmoi,alorselleétaitsansdoutenécessaire…

Stupéfait,Davidmedemande:

–Tuveuxdirequetumepardonnes?–Biensûr!Onnecessepasd'apprécierdesgensàleurmoindrefauxpas.C'estfini,n'enparlons

plus,etj’espèrequetumepardonnesd’avoirdoutédetoietd’avoirimmédiatementimaginélepire.

Ilm’embrasseavecintensité.Jesuisàmoitiénuesurlelitetjetremble:delaviolencedelascène,delapassiondansseslèvres,desesmainssurmoncorps.

–Louisa,oh,Louisa…Ilfautquenousapprenionsànousfaireconfiance,toietmoi.

Jemurmure,éperdue:

–Oui…Oui…David…Jeveuxtefaireconfiance.Aveuglément.

Ses baisers reprennent de plus belle.Au contact de son corps, jem’abandonne tout à fait.MaisDavidrelâchesoudainsonétreinte.

–Garyaramenétesaffaireshier.Ellessontlà,prèsdelafenêtre.Tuastoujourslefoulardquejet’aioffertenItalie?

Je fais signe que oui. David traverse la pièce, ouvre ma valise, et revient en tenant à la mainl’étoffegrisperleauxmotifscorail.Aveclasoie,ilcaressemapeau.

–J’aiune idée.Unesorted’exercice,ouplutôtdecontratquenouspourrionspasser, toietmoi.Pourquenoussachionsquenoussommesensécuritél’unavecl’autre.

Ils’approchedemonoreilleetmemurmure,avecunevoixquimefaittotalementchavirer:

– Je vais te bander les yeux avec ce foulard et, pendant trenteminutes, tu vasm’appartenir. Tuverrasalorsqu’iln’yarienàcraindredemoi.

Quoi???

Cen’estpastantl’idéed’avoirlesyeuxbandésquimefaitréagirmaisplutôtcelledefairel’amourtoutdesuite,aprèsunedisputesiviolente.

–David,jenesuispascertainedevouloir…pastoutdesuite…jesuisencorebouleversée.

Monténébreuxamantsouritetdemande:

–Vraiment?

Ils’emparealorsdemamainetlafaitglisserentremesjambes,àl’endroitcritique.

Incroyable!

Jepeuxsentirmonsexetrempé!

–Jepenseaucontrairequetoicommemoiavonsbesoindedécharger toutecette tension.Tunepensespas?medit-il,unsourireencoin.

Lesoufflecourt,j’acquiesce.J’avoue,jesuistrèseffrayéemaisaussitrèsexcitéeparsonautorité,parcetteperspectivede…delui«appartenir».Davidcommenceàdéfairesaceinture.Jedéglutis.Matensionaugmentebrutalement,ainsiquelatempératuredelapièce.Mesyeuxsontrivéssurlui.Surcettepartiedesoncorps.

–Non,Louisa,nemeregardepas.

Ilsepencheversmoi.Dansungestedeprofondesoumission,jefaisglissermescheveuxlelongdemonépaulealorsqu’ilrecouvremesyeuxdel’étoffe.Sesmainsnouentlefoulardàl’arrièredemon crâne. Je ne peux absolument rien voir. J’entends le lit qui grince, les draps qui se froissent.J’entendslebruitdesachemisequiatterritsurlefauteuil.J’entendssaceinturetomberausol,lebruitd’unebraguettequ’onouvre.Cesonmerendfolle:messeinsdurcissent.J’attends.

Unemainseposesurmanuqueetfaitbasculermatêteenarrière.

–Jepourraiscontemplertoncorpsoffertpendantdesheures,Louisa…

Ils’empressed’ajouter,cequimefaitfrémir:

–Dommagequej’aied’autresprojets.

Unemains’emparealorsd’undemespoignets,puisdel’autre,etlesramèneau-dessusdematête.Jesenslepoidsdesoncorpsquimefaitbasculerenarrièreetm’écrasesurlelit.

–Nebougepas.

Commentlepourrais-je?

David glisse unemain sousmon dos. Il la fait descendre le long dema colonne, jusqu’à mesfesses.Elle passe sous elles et remonte, jusqu’à l’entréedemon sexe. Instinctivement,mes cuissess’ouvrent.

–Tuasenviedesentirmesdoigtsentoi,Louisa?

J’acquiesce.

–Jeveuxquetumeledises.Jeveuxquetumeledemandes.

Lesmotsn’arriventpasàsortirdemabouche.LaréactiondeDavidnesefaitpasattendre:ilposeundoigtexpertsurlapartielaplusdélicieuseetlaplusexposéedemonanatomie.

–Demande-moi,Louisa.–Je…Jeveuxquetumecaresses.Jeveuxquetumefassesjouir.

Moncorpsentierestenfusion.Davidjoueavecmonclitoris,délicatement,m’emplissantdeplaisirmaiségalementdefrustration.J’aienviedel’avoirenmoiautantquejesavourecettefaçonqu’iladefairemonterlapressionaveclenteur,jusqu’àmemettreausupplice.Durantdelonguessecondes.Ens’interrompantparfois.

Dieuquec’estbon!

Maissoudain,samains’enlève.

–Pastoutdesuite,Louisa.D’abord,jeveuxquetuapprennesàsuivretoninstinct.Tunepeuxpasmefaireconfiancesitun’aspasconfianceentoi-même.

Jesenssoncorpss’étendreàmescôtés.

–Donne-moiduplaisir,Louisa.CommetuasapprisàlefaireenItalie.

Intimidée, je poseunemain sur ceque je devine être son torse. Jemeconcentre soudain sur lasensationdesapeauauboutdemesdoigts.Jecommenceàtracersescontours.Ici,jepeuxsentiruneveine frémir. Là, c’est unmuscle qui se tend. Je ne fais que l’effleurermais je prends peu à peuconsciencedemapuissance.Del’effetquejeluifais,delamanièredontsoncorpsvitetréagitsousmesdoigts.Ilm’enfautplus.

Jelefaispivoteretbascule.Jemetiensàcalifourchonsurluietfaisdescendremamainjusqu’àsonsexe.Jel’enserreetm’étonnedesesproportions.

Ilest…tellementlarge!

Jerelâchemonétreinteetfaisremonterundoigtlelongdesaverge.Jesensladouceurdesapeau,jesenslaraideurextrêmedesonmembre,jesensladoucehumiditédesonextrémité.Sansmêmeypenser, je passe une main entre mes cuisses pour la mouiller à mon sexe, avant de la refermerlentementsurlesien.Jecommenceàalleretvenir,doucement.Jenesuisplusqu’uncorps,àl’écouteetauserviced’unautre.J’essaiedemeconnecteràsonrythme.Jedescendsunpeuplusbassurseshanches afin que mon clitoris touche sa verge, et continue de la caresser lentement, doucement,pendantquemonbassinbougedehautenbas.Lasensationestdivine!Jejoueavecmafrustration:ilseraitsisimpledelefaireentrerenmoi…Jejoueégalementaveclasienne:jechangederythme,demain,m’adapteàsesmouvementpourlessuivreou,aucontraire,lescontrarier.Jel’entendshaletersousmoi,deplusenplusfort.Jecouchemonbustesurlui.Mestétons,effroyablementdurs,entrentencontactavecsontorse.J’inclinematêtepourrecueillirsonsouffleàmonoreille.Cesonmerendfolle.Jelâchepriseetcommenceàdescendresurluienprenantsoindelaissermescheveuxcourirsursoncorps.

Arrivée à son sexe, je raidis ma langue. Mes mains se posent sur ses cuisses et mes doigtspénètrentsachair.Jepeuxsentirchacundesesmusclestendus,alertes,enattente.Jeposemabouchesursongland.D’ungeste,ilmeretient:

–Attends,Louisa.

Jesenssonbrassetendre.Ilfouille,cherchequelquechose.Unemballagesedéchire.Jereconnaiscebruit.J’attrapelepréservatifdanssamainetlecoinceentremeslèvres.C’estavecmabouchequejedéroulelelatexsurlui,cequiapoureffetdelerendrecomplètementdingue.Ilestdéjàtellementexcité…Jecommenceàlesucergoulument.Ilbasculeversmoi.

Ilestàmamerci.

Jeredoubled’ardeuret tentede lefaireremonter leplus loinpossibledansmagorge.J’aibeauêtreaveugle,jamaisjen’aijamaiseul’impressiond’êtreaussiclairvoyante.D’avoiruntelcontrôle,unetellemaîtrisedemesgestes.

–Louisa,c’esttropbon…

Jerelâchemalanguepuislaraidittouràtour.Avecmabouche,jeformeunétauchaudethumideautour de sa verge. Je lèche, je suce,mon attention entière est focalisée sur sa réaction. Je sens lajouissancemonterenlui.Iltented’allerplusprofondenmoi.Ilagrippemescheveuxetlesserre.Ilbouge son sexe dans ma bouche, s’enfonce tant qu’il peut et, de nouveau, les rapports de forces’inversent:jenesuisplusqu’unemachinefaitepourluidonnerduplaisir…

Ilpousseundernierrâleetserelâche.Jemeretireetroulesurlecôtépuismeredresse,prêteàenleverlebandeau.Jel’entendsprotester.

–Cen’estpasfini,Louisa.Ilvafalloirqu’ons’occupedetoi,maintenant.

Jesensunsourirefendremeslèvres.

– Tu as appris à me faire confiance les yeux fermés… Mais jusqu’où es-tu prête à allerexactement?

Encemoment?Jenesuispascertained’avoirdelimites.Maisça,jemegardebiendeleluidire!

–Tendstesmainsversmoi.

J’avancemesbrasdanscequ’ilmesembleêtre sadirection. Il s’emparedemespoignets et lesserrel’uncontrel’autrepuislesenserreaveccequej’identifieêtreducuir.Bonsang!

–Tuesd’accord?

J’opine.

–Ça,c’étaitmaceinture…

Ilditçaenm’étendantsurlelit.Jemelaisseguider.

–…etça…

Ilattrapemajambedroite.

–…c’estl’unedemescravates.

Jesensuntissus’enroulerautourdemacheville.Ilnouel’autreextrémitédelacravateaupieddulit. Il recommence lamêmeopération : autrecheville, autrecravate.Heureusement, la longueurdutissu me laisse une certaine latitude pour bouger, mais au bout d’une dizaine de centimètres, çacoince:mesjamberestentobstinémentouvertes.Danscetteposition,ilpeutfairedemoicequ’ilveut.Cettepenséem’exciteatrocement.Jemecabre.

–Chut…Neremuepastant.

Ilglissecequej’identifiecommeuncoussinsousmesreins,cequisurélèvemonbassin.

–Voilà.

Je le sens glisser entre mes jambes et remonter vers moi. Son corps glisse contre le mien.D’instinct, je tentede refermermes jambesautourde luimaismesentravesviennent se rappeleràmonbonsouvenir.Jetiredessus,jemebalance,maisnepeuxrienfaire:lemoindremouvementapoureffetderesserrer le tissuautourdemeschevilles,cequicauseunelégèrebrûlurequin’est…pasdésagréable.JesenslesexedeDavid,durdenouveau,sepressercontrelemien.

–Louisa,tuestellementmouillée…

Il entre enmoi, brutalement. Je pousse un petit cri de surprise.Toutmon corps se tend puis serelâche pour le recevoir. Il commence à bouger en moi, profondément. Je peux le sentircomplètement.J’ai l’impressionquesonsexeesténormeencomparaisondumien.Lajouissanceetunelégèredouleurviennentsemêler.Jedécouvreuneextasealorsinconnue.Jenecomprendspascequ’ilm’arrive.Jetentedebougermaisn’arrivequ’àdonnerdespetitscoupsdereinssecsàcausedemesattaches.JesensqueçarendDavidfou.

–Tumefaisconfiance,là,Louisa?

Jehalètedeplusbelle.Sesmainsremontentlelongdemescôtes,demesbras,pourallermaintenirmespoignetsfermementcontrelematelas.Jemesenstotalementécartelée,emprisonnée…Salanguevienttitillermapoitrine:monbustesetendverslui.Ilplaquel’unedesesmainssurmahanchepourmemaintenirimmobile.

–Tumefaisconfiancepourtefairejouir?–Oui…Oh,oui…–Alorsabandonnetoitoutàfait.

Àcesmots,j’oublietout:jelaissemoncorpsenpriseauxcaressesdeDavid.Sabouchevientsepresser contre lamienne, sa langue s’enfonce profondément enmoi. Il passe sesmains sousmesreinsetsurélèvemonbassin.Ilsedécolledemoiets’enfonceencoreplusprofondément.

Tellementloin!

Jesuismaintenanttoutàfaitouverte,toutàfaitlascive:jel’accueilleengémissant.

–Oh!Louisa,cequec’estbon.

Mespiedssontposésàplatsur le litetmesjambesfléchies.Danscetteposition, jenepeuxplusbougerdu tout : c’estDavidqui fait coulisser son sexeenmoi,dansunmouvementdeva-et-vientlangoureux,effroyablementintense.Jevoudraisretirermonbandeauetlevoirmaisjenelepeuxpasàcausedesaceinture.Alors je ferme lesyeuxetmeconcentrepourme le représenter : sesmainsresserréesautourdemataille,sonbassinquiavanceversmoipuisquirecule,soncorpstendudansl’effort…Çayest,jel’imagineparfaitement.

–Tuesàmoi,Louisa.

Sapossessivitémefaitperdrela tête.Ilaugmentelerythmeet laviolencedesonmouvementdeva-et-vient.Jesuisàundegrédesoumissioninouï,etpourtantilyaentrenousunegrandedouceurdueànotrecomplicitédanscejeu.Leplaisiresttellementintensequeçaendevientinsupportable.Jegémisdeplusbelle.

–Oui!Jouispourmoi!Etjejouiraienmêmetempsquetoi,Louisa.

Encore un coup de reins. Une vague me submerge. Un deuxième coup de reins. Toute monattentionsefocalisesurlasensationdansmonventre–unetempête,unséismedontl’ondedechocmeparcourt.Jem’entendscrierdeplaisir.Daviddonnealorsunultimecoupdereins,plusprofond,plusintense,pluslongquetouslesautres.Mabouchesetorddansunrâlequisemblenepasconnaîtredefin.Puissoncorpsretombesurlemiendansunultimesoubresaut.

5.Abandon

31août

Je suis encore totalement troublée par la dispute qui vient d’avoir lieu mais aussi par laréconciliationpour lemoins inattenduequi a suivi.Davidm’ademandéde lui faireune confianceabsolueetjecroisyêtrearrivée.L’étreintequiaponctuénotrediscussionestcertainementlachoselaplusénigmatiqueetenivrantequ’ilm’aitétédonnédeconnaître.Laviolencedenotreconflitnousaobligésàêtretotalementouvertl’unavecl’autre.Noscorps,eux,n’ontpasmenti:ilssesontditleurvérité.

Ilesttemps.

Jepeuxl’entendrechantonnersousladouche.Lorsqu’ilserarevenu,jeluiparlerai:jeneveuxpasquelarentréeuniversitairesignelafindenotrehistoire.

Levoilàjustement,uneservietteàlataille,quimerejoint.Ilselaisselourdementtombersurlelitetm’embrassedanslecou.

–Décidément,avectoi,jevaisdesurpriseensurprise,Louisa.

J’éclatederire.

–C’esttoiquidisça?Toiquimefaisvivreunevieàcentàl’heureetquim’emmènesauxquatrecoinsdumonde?

–Ça?Cen’estrien.Quandjepenseàtouteslesautreschosesqu’onafaitesensemble…

Ilmefaitpivotersurlui.

–Oui,quandj’ypense…Jenepensepasquecetteserviettetiendrabienlongtempsenplace.

Jerougisetjouelesfemmesoutrées.

–DavidFulton!Vousêtestotalementinsatiable!–Outotalementaccro,quisait?

Ilmefaitunclind’œil.

Ilesttemps.

–Peut-êtreest-cemoiquisuisaccroàtoi?C’estpourçaquej’aitraversél’Atlantique,achetédeschaussureshorsdeprixetfaitunnumérodecharmeeffroyableàtatante.Tuyaspensé?

Davidserembrunit.

–Oui,j’yaipenséLouisa.J’yaibeaucouppensé.

David se relève alors que je suis encore à califourchon sur lui. Ilme repose sur le lit puismetourneledosetavanceverslefauteuil.Ilcommenceàs’habillerensilence.Jeleregardeavecunairinquisiteurmaisilrefusedemefaireface.Soudain,illâche:

–Ilnefautpasquetutombesamoureusedemoi,Louisa.

Quoi?

Non,c’est impossible. Iln’apaspulancerçacommeça.Pasmaintenant,pasdansunmomentsijoyeuxetsibeau.Pasquandjem’apprêtaisà luidireque jevoulaisresteràNewYorkàsescôtés,quitterParis,m’inscrireàlafacultéici!

–Pasquejetombeamoureusedetoi?

Mavoixsembledévastée.Jetentedemeressaisirmaisnepeuxquerépéter,d’untonhautperché:

–Pasquejetombeamoureusedetoi?

Jemerelèveetm’élanceverslui.J’attrapesonbrasmaisilsedégage.Jesupplie:

–David,parpitié,regardemoi…Explique-moipourquoitudisça…

Ilposesurmoiunregarddur.

–Jetelerépète,Louisa:jenesaispasfaireceschoses-là.–Maisquoi?Quelleschoses?Jenet’airiendemandé,moi!Riendeplusquecequej’aidéjà…

Cequenousavons.

Il passe à côté de moi comme s’il ne me voyait pas, ne m’écoutait pas, et se dirige vers lacommode.

–David,parle-moi.

Ilredresselatêteetmelanceunregardtellement…dur.

–Et tedirequoiLouisa?Qu’onvacontinuercommeça jusqu’àceque je te rendemisérable?Jusqu’àcequetusacrifiestoustesrêvesd’amour,decouple,defamillepourmesuivreàtraverslemonde?Jusqu’àcequetufinissesparmehaïrdenepasêtrecommetoutlemonde,denepassavoirêtreheureux?Denepasreconnaîtrelebonheurquandilestlà,justelàdevantmoi?

Ils’avanceversmoi.

–Jet’avaisavertie:demavied’homme,jen’aijamaisaimépersonne.

Jem’écrie:

–Çaneveutpasdirequetun’aimerasjamais!

Sonvisagesedéfiguresouslecoupdeladouleur.

–Si.C’estexactementcequeçaveutdire.

Ilmeprenddanssesbrasetparleàmonoreille,d’unevoixd’autantpluscruellequ’elleseveutdouce.

–Tunecomprendspas,Louisa,etpourtantjetel’aidéjàdit, jetel’aimêmemontré: jesuisunjouetcassé,unpantindésarticulé.Rienn’aéténormalouapaisédansmavie,etrienneleserajamais.Aucunefemmenepeutchangerça,pasmême…

Ils’interromptuninstant.

–Pasmêmetoi.

Ils’avancedenouveauverslefauteuilclubpourramassersavesteetl’enfilenégligemment.

–Alorsqu’est-cequeçaveutdirepournous,David?

L’airmemanque.C’estatroce.Jenepeuxpascroirequecesoitentraind’arriver.

–Qu’ilfautquejetelaissepartir.

Non.Nonnonnonnonnonnon.

Ilposesamainsurlapoignéedelaporte.

–David,attends!

Ilsefige.

–Dis-moi.Dis-moicequit’arenducommeça.Parle-moi:jepeuxtoutentendre.Maispasquetuneveuxpasdemoi.Ça,jerefused’ycroire.Moncorpsentier,monâmesaventquec’estfaux.

–«Âme»?Etoùest-cequeçasesitueexactement,l’âmedonttuparles,Louisa?Parcequemoi,jet’assurequejenelasenspas.

Iltournesonvisageversmoi.Jepeuxvoirunelarmeroulersursajoue.Pourtant,c’estd’unevoixneutrequ’illance:

–Jesorsfaireuntour.Préparetesaffaires,j’appelleGarypourqu’ils’occupedureste.RentreàParis ce soir, Louisa. Oublie-moi, trouve un homme qui sera un peu plus capable que moi de tedonnercequetumérites.

–Etqu’est-cequejemérite,exactement?–Tout.Absolumenttoutcequ’unêtrehumainpeutêtreenmesurededonneràunautre.

Puisiltournelestalonsetquittelapièce.

Jesuisenétatdechoc.Jeneressensplusrien.Mêmeladouleurmesemblelointaine.Jel’examinecommesiellenem’appartenaitpas.Quantàmoncorps,ilnerépondplus.Jeresteinerte,assisesurlelit, àcontempler le sol.Pendantuneheure,peut-êtreplus.Mon téléphonen’arrêtepasdevibrer. Jel’entendssurlatabledechevet.Auboutd’unmoment,jeréussisàtendrelebrasetdécroche.

–MademoiselleMars?C’estGaryàl’appareil.Lavoiturevousattendenbas.J’airéservéunvolpourvous.Puis-jemontervousaider?Vossacssontprêts?

Garytentedegarderuntonprofessionnelmaisjepeuxsentirsoninconfort.

–Oui,ilssontprêts.Jenelesavaispasdéfaits.Jen’enaipaseuletemps.

Je me lève péniblement et referme la valise de laquelle David avait extrait le foulard, puisrassemblemesvêtementsquej’enfile,apathique.Jemeretourneetvoisl’étoffedesoiequireposesurlelit.Celleaveclaquellejemesuislaisséebanderlesyeuxensignedeconfiance,durantl’ultimefoisoùj’aifaitl’amouravecDavidFulton.Elleseratoutaussibienlà.Ellenesignifieplusrienpourmoi.Toutestmortàl’intérieur.Tousmesrêves.

J’entendslasonneriedel’ascenseurquiannoncel’arrivéedeGary.Lesondesespass’approche.Ilfrappedeuxpetitscoupsdiscretsàlaporterestéeentrouverte.

–MademoiselleMars?Jepeuxentrer?

Jemeraclelagorgepourpouvoirémettreunson,cedontjenesuispascertaine.

–OuiGary,c’estbon.

Gary porte à son brasmon trench.Avec une infinie douceur, il passe ce dernier autour demesépaules.Ilmetendégalementmonsacàmainetm’aideàmerelever.Puisilsepenchepourramassermes bagages : un objet tombe de sa poche. Son portefeuille.Machinalement, jeme baisse pour lerécupérer.Unephotoaglissé,pliéeendeux,dontjemesaisiségalement.C’estuntirageargentique.OnvoitGaryaucentre.Ildoitavoirdouzeoutreizeans.Unbrasjaillitducôtégaucheetenserresoncou,depuislapartierepliée,cequifaitquejenepeuxpasvoiràquiilappartient.Garysouritalorsqu’unejolierouquinedumêmeâge,àsadroite,embrassesajoue.

Jeconnaiscettefille.

JudithCampbell?

Garym’arracheleportefeuilleetlaphotodesmains.

–Merci,mademoiselle.Vousêtesprêteàyaller?

Jemelaisseguiderdocilementjusqu’àlasortiedupenthouse.Monespritvientdereveniràlavie.Lespensées tournoientdansma tête.SiJudithetGaryseconnaissaientà l’époque,pourquoiDavid

m’aaffirmén’avoir rencontrésonagentqu’à l’âgededix-neufans?Labâtisse,à l’arrière-plan…J’ai rêvé où c’est bien le foyer où ont grandi les deux garçons ?À qui appartenait le bras qu’onpouvaitvoirdépassersurlaphoto?Etd’ailleurs,pourquoiavoirpliécelle-ci?Etsurtout:QUItenaitl’appareil ce jour-là ? Au moment de grimper dans la limousine, ma décision est prise : tropd’énigmessubsistentconcernantlepassédeDavidFulton.Desénigmesquipourraientexpliquersonrefusdemegarderàsescôtés.JedoisresteràNewYorkpourdécouvrircequ’ilm’acaché.Jedoiscomprendrecequil’empêchedem’aimer.

Àsuivre,nemanquezpasl’épisodesuivant.

Egalementdisponible:

Toi+Moi:seulscontretous

QuandAlmaLancasterrencontreVadimArcadiàlafacdecinémadeLosAngeles,toutlessépare.Alma,lajeuneFranco-anglaise,atoutjuste18ans,desparentsaisés,unpetitamiparfaitetunevietoutetracée.Vadim,lui,estaméricain.Iladesoriginesrusses,unpassétroubleetnepossèdenifamilleniattache.Elleestprisonnièredesonmilieu,luiestéprisdeliberté.Elleveuttoutdécouvrir,luineveutrienlâcher.Pourtant,cesdeux-làs'attirent,sedéfient,serepoussent,s'apprivoisent…Lapetitefillemodèleetlemauvaisgarçontorturén'enfinissentplusdelutterpournepass'aimer.Lesdeuxétudiantsnelesaventpasencore,maiscetterencontrevachangerleurvieàjamais.Etc'estseulscontretousqueVadimetAlmavontconnaîtrel'amour,safougueetsespremiersémois.NepassezpasàcôtédeSeulscontretous,lanouvelleséried'EmmaGreen,auteurdubest-sellerCentfacettesdeMrDiamonds!

Recommended