Troubles anxieux et dépressifs · 2018. 12. 3. · Troubles anxieux et dépressifs Pr Cédric...

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Troubles anxieux et dépressifs

Pr Cédric Lemogne UF de Psychologie et Psychiatrie de liaison et d’urgence

Service de Psychiatrie de l’adulte et du sujet âgé HUPO / INSERM UMR 894 / Université Paris Descartes

Liens d’intérêts

• Activités de conseil : Lundbeck

• Conférences : Janssen, Lundbeck, Otsuka Pharmaceutical, Servier

Anxiété

• Anxiété :

– état mental

– pénible

– de tension interne

– accompagné d’un sentiment d’insécurité

– lié à l’anticipation d’un événement négatif

• S’exprime dans quatre registres :

– cognitif (représentations menaçantes, rumination, etc.)

– émotionnel (peur, voire panique)

– comportemental (hyper-vigilance, évitement, etc.)

– Physique : tension musculaire, oppression thoracique, etc.).

• Généralement adaptative mais peut être considérée comme pathologique lorsqu’elle est disproportionnée ou entraîne une détresse trop intense ou un retentissement fonctionnel.

« Anxiété-symptôme » versus troubles anxieux

• L’anxiété-symptôme : – est fréquente chez les patients atteints de cancer ;

– peut être secondaire à l’hospitalisation, à l’anticipation du diagnostic ou du pronostic, à l’appréhension d’un geste chirurgical ou des effets secondaires d’un traitement ;

– est volontiesr liée à un manque d’information sur la maladie ou son traitement ;

– peut aiguiser la perception des symptômes physiques

– peut révéler une cause physique directe : hyperthyroïdie, hypoglycémie, syndrome de Cushing, phéochromocytome, tumeurs carcinoïdes, confusion

• Les troubles anxieux : – diffèrent les uns des autres par le type d’objet qui induisent l’anxiété et comportements

d’évitement

– peuvent exister avant la maladie cancéreusen s’aggraver lors de celle-ci, compliquer la prise en charge d’un patient qui en est atteint ou encore survenir à cette occasion

– se distinguent de l’anxiété-symptôme par leur caractère récurrent ou chronique et par leur retentissement fonctionnel

– Apparaissent souvent dans l’enfance ou chez l’adulte jeune

– sont plus fréquents chez les femmes, 2 femmes pour 1 homme environ.

Les troubles anxieux caractérisés

• Attaque de panique ≠ trouble anxieux

• Trouble panique & agoraphobie

• Phobie spécifique – Sang, injections / transfusions, autres soins médicaux

• Anxiété sociale

• Anxiété généralisée

• Stress aigu / stress post-traumatique

• Trouble anxieux induit par une substance / un médicament

Cancer et peur de la récidive

• Définition peu consensuelle, nombreux outils de mesure

• Niveau modéré à élevé pour ≥ 50 % des patients

• Crainte légitime, attendue voire adaptative…

• … mais détresse psychologique augmentée, qualité de vie diminuée et fonctionnement altéré

• Comportements de santé

– Augmentation des comportements de vérification / de réassurance

– Augmentation du recours aux médecines non conventionnelles

• Probable continuum du normal au pathologique

• Evolution temporelle hétérogène selon les études mais diminution avec plateau > autres modes évolutifs

(Glaser et al., BMJ Open 2013; Simard et al., J Cancer Surviv 2013)

Cancer et peur de la récidive

• Facteurs de risque :

– Jeune âge (moins net dans les cancers masculins)

– Symptômes physiques résiduels

– Faible soutien social perçu

– Sexe féminin (mais possible confusion par le type de cancers)

– Type de cancer (prostate < autre types)

– Faible niveau d’éducation (littératie en santé ?)

– Stade avancé au moment du traitement ?

– Peu d’influence du type de traitement dans les analyses multivariées

– Association transversale avec anxiété et dépression

• Niveau souvent plus élevé chez les conjoints ! (femmes > hommes)

(Simard et al., J Cancer Surviv 2013)

Episode dépressif (OMS)

• Critères généraux :

– Durée ≥ 2 semaines.

– Pas de symptômes maniaques

– Episode non imputable à une substance ou à une affection organique

• Au moins 2 des symptômes suivants :

– Tristesse pathologique

– Perte d’intérêt et de plaisir

– Asthénie

• Au moins 1 des symptômes suivants, pour atteindre un total ≥ 4 symptômes : – Perte de confiance en soi

– Sentiment inapproprié de culpabilité

– Idées suicidaires récurrentes

– Troubles cognitifs

– Agitation ou ralentissement psychomoteur

– Troubles du sommeil

– Modification de l’appétit avec variation pondérale

Epidémiologie de la dépression en France

Epidémiologie du suicide en France

Particularités liés à l’âge

• Symptômes cardinaux moins fréquents

• Cognitions dépressives : – Certaines moins fréquentes : culpabilité

– D’autres spécifiques : banalisation au regard de l’âge, impossibilité du changement

• Fréquence des symptômes et plaintes somatiques

• Dépression à début tardif = sous-type de dépression ? – Dépression sans tristesse

– Importance du syndrome dysexécutif et du retentissment

– Risque d’évolution démentielle

– Facteurs de risque cérébro-vasculaires

– Lésions cérébro-vasculaires

Epidémiologie des troubles anxieux et dépressifs chez les patients atteints de cancer

(Mitchell et al., Lancet Oncol 2011)

• Troubles dépressifs : 20-25 % dont 15 % de dépressions caractérisées

• Troubles anxieux caractérisés : 10 %

• Troubles de l’adaptation : 15-20 %

• Au moins un de ces diagnostics : 30-40 %

Population contrôle

Après 10 ans :

• Retour à une prévalence

« normale » de la

dépression

• Prévalence des troubles

anxieux × 1,5

(Mitchell et al., Lancet Oncol 2013)

Corrélats des symptômes anxieux et dépressifs chez les patients atteints de cancers

• Qualité de vie diminuée

• Fonctionnement altéré sur tous les plans – social

– familial

– affectif

– sexuel

– physique

• Symptômes physiques majorés / moins bien tolérés

• Idées de mort passives voire idées suicidaires

• Adhésion thérapeutique compromise

• Crainte de la récidive augmentée

• Survie diminuée ?

(Chida et al., Nat Clin Pract Oncol 2008) a significant publication bias

Facteurs psychologiques et risque de cancer

CESD score in 93 a CESD score in 93 > threshold b

N HR [95% CI] P HR [95% CI] P

Prostate (men) 377 / 9,058

Breast (women) 128 / 3,184

Colorectal 113 / 12,244

Smoking-related 117 / 12,239

Lymphoid & hematopoietic tissues

82 / 12,244

Other sites 221 / 12,244

CESD: Center of Epidemiologic Studies Depression scale; CI: Confidence Interval; HR: Hazard Ratios; N: number of events / number of participants at risk. a The 25th and 75th percentile value were used for scaling b CESD score ≥ 17 among men or ≥ 23 among women

Dépression et risque de cancer

(Lemogne et al., Am J Epidemiol 2013)

CESD score in 93 a CESD score in 93 > threshold b

N HR [95% CI] P HR [95% CI] P

Prostate (men) 377 / 9,058 0.987 [0.862-1.131] 0.851 1.072 [0.836-1.375] 0.584

Breast (women) 128 / 3,184 0.874 [0.664-1.149] 0.334 1.014 [0.664-1.549] 0.947

Colorectal 113 / 12,244 0.855 [0.652-1.122] 0.259 0.707 [0.428-1.167] 0.175

Smoking-related 117 / 12,239 0.911 [0.708-1.172] 0.469 0.913 [0.585-1.423] 0.688

Lymphoid & hematopoietic tissues

82 / 12,244 0.981 [0.736-1.308] 0.895 0.890 [0.520-1.522] 0.670

Other sites 221 / 12,244 0.924 [0.775-1.102] 0.380 0.800 [0.571-1.119] 0.192

CESD: Center of Epidemiologic Studies Depression scale; CI: Confidence Interval; HR: Hazard Ratios; N: number of events / number of participants at risk. a The 25th and 75th percentile value were used for scaling b CESD score ≥ 17 among men or ≥ 23 among women

Dépression et risque de cancer

(Lemogne et al., Am J Epidemiol 2013)

Et en ce qui concerne le pronostic ?

(Chida et al., Nat Clin Pract Oncol 2008) a significant publication bias

Effect of depressive symptoms on mortality: adjusted hazard ratios

(Satin et al., Cancer 2009)

Low heterogeneity (I²=25.7%, P=0.241)

High heterogeneity (I²=63.6%, P=0.013)

Asymmetrical funnel plot but fail-safe N=83 (k=12)

1.09 1.03 1.15

Méta-analyse de Pinquart & Duberstein, Psychol Med (2010)

• 105 échantillons issus de 76 études

• RR moyen = 1,17 (1,12-1,22) ; Q=94,58

• Modérateurs : – Risque ajusté vs non ajusté : NS (1,22 vs 1,19)

– Dépression mesurée avant vs après diagnostic du cancer : NS

– Stade du cancer : NS

– Organe : NS

– Durée de suivi : effets + larges en cas de suivi < 2 ans

– Symptômes vs épisode : NS

– Echelles : association significative pour CESD et HADS mais pas BDI

– Age : effets + larges chez les patients plus âgés

– Sexe : NS

0

0,1

0,2

0,3

0,4

0,5

0,6

0,7

0,8

0,9

1

Cognitionsdépressives

Anhédonie Tristesse Anxiété Asthénie Plaintedouloureuse

Troubles dutransit

Insomnie Anorexie

Cluster1 Cluster2 Cluster3 Cluster4 Cluster5

(Gouraud et al., in press) ELCAPA (N = 1092 personnes ayant un cancer âgées de plus de 70 ans)

0

0,1

0,2

0,3

0,4

0,5

0,6

0,7

0,8

0,9

1

Cognitionsdépressives

Anhédonie Tristesse Anxiété Asthénie Plaintedouloureuse

Troubles dutransit

Insomnie Anorexie

Cluster1 Cluster2

Cluster 1

« somatique » (35,8%)

(Gouraud et al., in press)

Cluster 2

« pauci-symptomatique » (26,4%)

ELCAPA (N = 1092 personnes ayant un cancer âgées de plus de 70 ans)

0

0,1

0,2

0,3

0,4

0,5

0,6

0,7

0,8

0,9

1

Cognitionsdépressives

Anhédonie Tristesse Anxiété Asthénie Plaintedouloureuse

Troubles dutransit

Insomnie Anorexie

Cluster3 Cluster4

Cluster 3

« majeur » (19,9%)

(Gouraud et al., in press)

Cluster 4 « mineur »

(13,8%)

ELCAPA (N = 1092 personnes ayant un cancer âgées de plus de 70 ans)

0

0,1

0,2

0,3

0,4

0,5

0,6

0,7

0,8

0,9

1

Cognitionsdépressives

Anhédonie Tristesse Anxiété Asthénie Plaintedouloureuse

Troubles dutransit

Insomnie Anorexie

Cluster4 Cluster5

Cluster 5

« Démoralisé » (4,1%)

(Gouraud et al., in press)

Cluster 4 « mineur »

(13,8%)

ELCAPA (N = 1092 personnes ayant un cancer âgées de plus de 70 ans)

Survie à 5 ans : analyse univariée

(Gouraud et al., in press) ELCAPA (N = 1092 personnes ayant un cancer âgées de plus de 70 ans)

Modèles ajustés sur l’âge, la localisation, le statut métastatique, l’hospitalisation, les comorbidités, la perte de poids, la mobilité, les traitements

Survie à 2 et 5 ans : analyse multivariée

(Gouraud et al., in press) ELCAPA (N = 1092 personnes ayant un cancer âgées de plus de 70 ans)

Immune and stroma cells ↓ NK cytotoxicity ↓ Th1 T-cell activity ↑ TAM (MMPs, VEGF, IL-10, TGFβ)

Cancer cells ↓ Anoikis (↑ pFAK) ↑ Migration / Invasion ↑ angiogenic factors (VEGF, IL-6, IL-8, TNFα)

(Lutgendorf & Sood, Psychosom Med 2011)

Dépression et mortalité en fonction de la population étudiée

(Cuijpers et al., Am J Psychiatry 2014)

Dépression et récidive des cancers

(Satin et al., Cancer 2009)

No heterogeneity (I²=0.0%, P=0.483)

Case-control study N = 105 patients with a smoking-related cancer who smoked at the time of diagnosis 51 had quit since diagnosis (48.6%) 54 continued smoking (51.4%)

Dépression et arrêt du tabac

1.08, 1.45

(Berg et al., Psychooncology 2013)

Dépression et défaut d’adhésion thérapeutique

• Non spécifique des soins en cancérologie

• Affecte surtout la persistance

• Niveau de preuve élevé dans le domaine des traitements oraux du cancer du sein

• Impact amené à ↑ ?

(Mausbach et al., Breast Cancer Res Treat 2015; Smith et al., Ann Oncol 2016)

Dépression et retard au diagnostic / traitement

(O'Rourke et al., Dis Esophagus 2008; Desai et al., Int J Psychiatry Med 1999; Robertson et al., Br J Cancer 2004)

• Retard au diagnostic – Portland Veteran’s Administration hospital : association rétrospective

entre ATCD de troubles mentaux (dont dépression 79 %) et stade avancé au diagnostic de cancer de l’œsophage 37 vs. 18% (p=0,009) ; délai médian = 90 vs. 35j (p=0,001)

– New Haven Epidemiologic Catchment Area × Connecticut Tumor Registry : association prospective entre dépression et stade avancé au diagnostic de cancer du sein (OR = 9,81 ; p=0,039)

• Retard au traitement – Scottish Cancer Registry × medical records

– ATCD d’anxiété ou dépression associés à un retard au traitement du cancer colorectal : 210 vs 130 j (p<0,001) ; <90 j : OR = 0,47 [0,28-0,77]

– Pas d’association dans le cancer du sein

Antécédent de dépression et cancer du pancréas : stade au diagnostic et traitement

Adjusted OR=1.13 (1.01–1.26), P=0.0276

Adjusted OR=0.63 (0.52–0.76), P<0.0001

Adjusted OR=0.79 (0.70–0.90), P=0.0003

(Boyd et al., Surgery 2012)

Antécédent de dépression et cancer du pancréas : stade au diagnostic et traitement

(Boyd et al., Surgery 2012)

Adjusted HR=1.20 (1.09–1.32), P=0.0002

Further adjustment for surgical resection : HR=1.14 (1.04–1.26) P=0.006

27% HR reduction

Adjusted HR=1.08 (1.01–1.14), P=0.016

Further adjustment for surgical resection : HR=1.03 (0.97–1.09) P=0.32

60% HR reduction

2-year survival of patients with distant or unknown stage disease

2-year survival of patients with locoregional disease

Surveillance des seins Dépression (CES-D) p

= recommandations 11,52 ± 8,6 -

< recommandations 13,53 ± 8,8 NS

> recommandations 11,61 ± 8,3 NS

Surveillance de l’utérus Dépression (CES-D) p

= recommandations 9,29 ± 7,5 -

< recommandations 12,78 ± 9,6 0,005

> recommandations 12,88 ± 8,6 0,005

Niveau de dépression plus de 5 ans après le traitement d’un cancer du sein en fonction de la surveillance gynécologique recommandée.

Dépression et surveillance après le cancer

(Katz et al., Cancer 2009)

50 % des épisodes dépressifs en médecine somatique ne sont pas diagnostiqués

• Méconnaissance de l’existence d’une souffrance psychique :

– Evitement mutuel de la dimension psychologique

– Dépression « masquée » :

• Expression somatique au 1er plan… (femmes, enfants, sujets âgés, variations culturelles)

• … mais symptômes psychologiques présents, à rechercher

• Méconnaissance de son caractère pathologique

– Banalisation : la dépression « normale »

Epidémiologie des troubles anxieux et dépressifs chez les patients atteints de cancer

(Mitchell et al., Lancet Oncol 2011)

• Troubles dépressifs : 20-25 % dont 15 % de dépressions caractérisées

• Troubles anxieux caractérisés : 10 %

• Troubles de l’adaptation : 15-20 %

• Au moins un de ces diagnostics : 30-40 %

Dépistage de la dépression en milieu somatique

• Les outils les plus utilisés évaluent la détresse émotionnelle :

– HADS : plusieurs seuils proposés :

• >14 : Se = 0,8 et Sp = 0,74 (Mitchell et al., J Affect Disord 2011)

• >15 : Se = 0,87 et Sp = 0,85 (Walker et al., J Psychosom Res 2007)

– « Thermomètre de détresse » :

• >3 : Se = 0,76 et Sp = 0,82 (Dolbeault et al., Palliat Support Care 2008)

• Certains dépistent spécifiquement la dépression :

– Beck Depression Inventory

• >18 EDM probable (Wedding et al, Annal Oncol 2007)

– Brief Edinburgh Depression Scale

• >6 : EDM peu probable (Se = 0.83, Sp = 0.68)

• >10 : EDM très probable (Rhondali et al., Bull Cancer 2011)

– « Au cours des 2 dernières semaines, avez-vous souvent été gêné(e) :

• par un manque d’intérêt ou de plaisir à faire les choses ?

• par le fait de vous sentir triste, déprimé(e) ou désespéré(e) ? »

• Une réponse OUI : Se = 0,97 et Sp =0,67

Dépistage de la dépression en milieu somatique

• GDS-4, version française :

– Etes-vous souvent découragé et triste ?

– Avez-vous le sentiment que votre vie est vide ?

– Etes-vous heureux la plupart du temps ?

– Avez-vous l’impression que votre situation est désespérée ?

• Analyse transversale des données d’inclusion de la cohorte ELCAPA

• 965 patients âgés de 70 ans ou + (âge : 80,4 ± 5,6 ans, 48,6 % de femmes)

• 91,5 % avaient un cancer solide dont 51,5 % au stade métastatique

• Prévalence de la dépression : 27,7 % [IC à 95 % : 24,9–30,6]

• Pour le seuil ≥ 1/4, la sensibilité était de 91 % (86,9–94,2), la spécificité de 88 % (85,3–90,3), la valeur prédictive positive de 74,3 % (69,2–79,0) et la valeur prédictive négative de 96,2 % (94,5–97,6)

• La GDS-4, au seuil ≥ 1, semble être un outil performant de repérage de la dépression chez les sujets âgés atteints de cancer.

50 % des épisodes dépressifs en médecine somatique ne sont pas diagnostiqués

• Méconnaissance de l’existence d’une souffrance psychique :

– Evitement mutuel de la dimension psychologique

– Dépression « masquée » :

• Expression somatique au 1er plan… (femmes, enfants, sujets âgés, variations culturelles)

• … mais symptômes psychologiques présents, à rechercher

• Méconnaissance de son caractère pathologique

– Banalisation : la dépression « normale »

• Mais également risque de sur-diagnostic

– Médicalisation de la tristesse

– Symptômes de recouvrement : asthénie, anorexie, amaigrissement, douleurs, troubles du sommeil, etc.

« Trouble dépressif dû à une autre affection médicale » (DSM-5)

• Endocriniennes : hypothyroïdie, Σ de Cushing

• Cancers : pancréas

• Maladies auto-immunes : lupus, Σ de Gougerot-Sjögren

• Métaboliques : déficit en vitamine B12 et/ou B9

• Respiratoires : Σ d’apnées du sommeil

• Neurologiques : maladie de Parkinson, SEP, Alzheimer, Huntington, AVC et « dépression vasculaire », épilepsie

« Sickness behavior »

• Changements « comportementaux » – Sensation de malaise physique

– Hyperalgésie

– Hypersomnie

– Sommeil fragmenté

– Fatigue

– Troubles de la concentration

– Anhédonie

– Perte d’appétit

– Retrait social

• En réponse à une infection

(Hart, Neurosci Biobehav Rev 1988)

Inflammation et symptômes « dépressifs »

(Raison et al., Trends Immunol 2010)

(Köhler et al., Acta Psychiatr Scand 2017)

Dépression et inflammation périphérique

Mécanisme adaptatif ?

• Changements motivationnels :

– Fatigue • promouvoir le repos (bénéfice

individuel)

• optimiser gains / pertes

(Harrison et al., Biol Psychiatry 2015)

Reward PE: V < P Punishment PE: V > P

(Izuma et al., Neuron 2010)

Striatum ventral et récompense

Mécanisme adaptatif ?

• Changements motivationnels :

– Fatigue • promouvoir le repos (bénéfice

individuel)

• optimiser gains / pertes

– Retrait social • limiter le contage (bénéfice

collectif)

• limiter le risque d’exclusion

(Inagaki et al., Neuroimage 2012)

Inflammation et signaux sociaux

Inflammation et figure d’attachement

(Inagaki et al., Brain Behav Immun 2015)

P = .05

P = .003

P = .04

Mécanisme adaptatif ?

• Changements motivationnels :

– Fatigue • promouvoir le repos (bénéfice

individuel)

• optimiser gains / pertes

– Retrait social • limiter le contage (bénéfice

collectif)

• limiter le risque d’exclusion

– Appétence sociale sélective • rechercher le support des proches

Dépressions iatrogènes

• Anticonvulsivants : phénobarbital*, vigabatrine*, topiramate*, tiagabine, primidone, felbamate, levetiracetam, zonisamide

• Antimigraineux : flunarizine*

• Antihypertenseurs : réserpine, clonidine, méthyldopa, β-bloquants, IEC, ARA2, diurétiques, inhibiteurs calciques, statines

• Anti-infectieux : efavirenz*, mefloquine*

• Cytokines : interféron-α*, interleukine-2, interféron β

• Antimitotiques : pemetrexed, L-asparaginase, paclitaxel, docetaxel, vinblastine, vincristine, fludarabine

• Traitements hormonaux : anastrozole, tamoxifène

• Autres : corticoïdes*, isotrétinoïne, varenicline

* incidence de la dépression > 10 %

(Celano et al., Dialogues Clin Neurosci 2011)

Difficultés diagnostiques : 4 grandes approches

• Approche « inclusive » : – Pas de modification des critères

– Sensible mais peu spécifique

• Approche « exclusive » : – Suppression des critères ambigus

– Spécifique mais peu sensible

• Approche « étiologique » : – Non prise en compte des symptômes attribuables à la maladie somatique

– Sensible et spécifique

– problème de fiabilité inter-juges

• Approche « substitutive » : – Remplacement des critères somatiques par des critères psychiques

– Sensible et spécifique

(Cohen-Cole & Stoudemire, Psychiatr Clin North Am 1987)

Approche substitutive : critères d’Endicott

Critères DSM-5

• Humeur dépressive

• Anhédonie

• Appétit / poids

• Troubles du sommeil

• Agitation / ralentissement

• Fatigue / perte d’énergie

• Auto-dévalorisation

• Troubles cognitifs

• Pensées de mort récurrentes

Critères d’Endicott

• Humeur dépressive

• Anhédonie

• Apparence dépressive

(expression, posture, pleurs)

• Retrait social / parle moins

• Agitation / ralentissement

• Rumination / auto-apitoiement /

pessimisme

• Auto-dévalorisation

• Absence de réactivité

• Pensées de mort récurrentes

(Endicott, Cancer 1984)

Evaluation de l’approche substitutive

Dep 1=dysphoric mood; Dep 2=loss of interest or pleasure; Dep 3=weight loss or gain or a decrease in appetite; Dep 4=insomnia or hypersomnia; Dep 5=psychomotor agitation or retardation; Dep 6=fatigue or loss of energy; Dep 7=feelings of worthlessness, self-reproach or excessive or inappropriate guilt; Dep 8=diminished ability to think or concentrate or indecisiveness; Dep 9=recurrent thoughts of death, suicidal ideation, wishes to be dead or suicidal attempt.

(Akechi, Gen Hosp Psychiatry 2009)

Evaluation de l’approche substitutive

(Akechi, Gen Hosp Psychiatry 2009)

Dep 10=not participating in medical care; Dep 11=tearfulness or depressed appearance in face or body posture; Dep 12=social withdrawal or decreased talkativeness; Dep 13=brooding, self-pity or pessimism; Dep 14=cannot be cheered up, doesn't smile, no response to good news or funny situation.

Apparence dépressive

Désengagement Retrait social

Aréactivité

Approche substitutive : critères d’Endicott

Critères DSM-5

• Humeur dépressive

• Anhédonie

• Appétit / poids

• Troubles du sommeil

• Agitation / ralentissement

• Fatigue / perte d’énergie

• Auto-dévalorisation

• Troubles cognitifs

• Pensées de mort récurrentes

Critères d’Endicott

• Humeur dépressive

• Anhédonie

• Apparence dépressive

(expression, posture, pleurs)

• Retrait social / parle moins

• Agitation / ralentissement

• Rumination / auto-apitoiement /

pessimisme

• Auto-dévalorisation

• Absence de réactivité

• Pensées de mort récurrentes

(Endicott, Cancer 1984)

Sémiologie différentielle ?

Sickness behavior Dépression majeure

(Cleeland et al., Cancer 2000)

Symptoms clusters in patients with cancer

Sémiologie différentielle ?

Sickness behavior

• Asthénie augmentée par l’effort

• Hyperalgésie

• Hypersomnie + anorexie

• Ralentissement constant

• Evitement des étrangers & recherche des proches

• Rareté des cognitions dépressives

Dépression caractérisée

• Asthénie diminuée par l’activité

• Hypoalgésie

• Insomnie + anorexie

/ hypersomnie + hyperphagie

• Ralentissement ou agitation

• Evitement des proches & tolérance des étrangers

• Triade de Beck (vision négative de soi, du monde, de l’avenir)

(Capuron et al., J Affect Disord 2009)

20 patients with malignant melanoma administered IFNα (clinically free of disease) 28 medically healthy subjects with major depression Similar age and gender distribution Hamilton Rating Scale for Depression

(Pasquini et al., J Psychosom Res 2008)

Guilt

Failure

Dissatisfaction

Self-dislike

Cancer, IFNα et cognitions dépressives

Aspects pharmacologiques – généralités

• Optimisation du traitement de la maladie somatique

• Limitation des médicaments inducteurs de dépression

• Traitements symptomatiques

– Sommeil

– Douleur

• Médicament antidépresseur si dépression d’intensité modérée à sévère

Choix de la molécule

• Algorithme principalement basé sur :

– Le profil de tolérance, les contre-indications et le risque d’interactions

– La documentation d’un antécédent de réponse à une molécule donnée

• 1ère | 2ème intention :

– ISRS : sertraline (faible inhibiteur 2D6, bonne tolérance cardiaque, pas d’adaptation de posologie dans l’insuffisance rénale, Cipriani 2018)

– Si anorexie | insomnie : mirtazapine (faible inhibiteur 3A4, pas de SIADH)

– Si douleurs : venlafaxine (pas d’inhibition enzymatique, surveillance de la PA)

• ≥ 2ème intention :

– IMAO sélectif

– Agoniste MT1-2 / antagoniste 5HT2C (surveillance des transaminases)

• En dernière intention :

– Antidépresseurs tricycliques

– IMAO non sélectif

(Rayner et al., Cochrane Database Syst Rev 2010)

2.33 [1.80, 3.00]

Antagonistes α2 :

2.46 [1.28, 4.73]

Aspects non pharmacologiques – généralités

• Evaluer le risque suicidaire

• Evaluer le support social

• Dépister la dépression de l’entourage / de l’équipe

• Prévenir la perte de chances

• Légitimer la détresse psychologique

• Valoriser son expression et l’opportunité de recevoir une aide

• Rassurer sur son impact

• Favoriser un sentiment de continuité psychique

• Orienter vers une psychothérapie si intensité légère à modérée

Thérapies cognitives et comportementales

(Beltman et al., Br J Psychiatry 2010)

Pas de supériorité démontrée / autres formes de psychothérapie structurée

-0.83 [-1.36, -0.31]

Modèle des soins collaboratifs

Psychologue

clinicien

Formation au dépistage

Diagnostic

Supervision du traitement

Interventions ciblées

Equipe soignante

Médecin référent

Dépistage

Sollicitation du psychiatre

Prescrit le traitement pharmacologique

Psychiatre

Infirmier

spécialisé

Interventions psychothérapeutiques simples

Surveillance

Sollicitation du psychiatre

Autres professionnels

Interventions psychothérapeutiques complexes

Interventions systémiques

Modèle des soins collaboratifs

(Sharpe et al., Lancet 2014)

Conclusion

• Une association fréquente

• Pas de rôle cancérigène de la dépression per se

• Des corrélats cliniques inquiétants en cas de co-occurence

• Une clinique complexe voire spécifique

• Un risque de perte de chance

• Des recommandations claires « pendant » le cancer

• Une organisation des soins à définir dans « l’après-cancer »

107 auteurs francophones

5 nationalités différentes

66 chapitres en 8 sections

• Une discipline : la psychiatrie de liaison

• Les champs théoriques et cliniques connexes

• La consultation de psychiatrie de liaison (pourquoi, comment, avec quels partenaires)

• Les consultations spécifiques (avant une décision de traitement, avec d’autres équipes)

• Les grands motifs d’avis psychiatriques (patient déprimé, agité, n’adhérant pas aux soins, etc.) avec arbres décisionnels

• Le travail avec les unités de soins somatiques spécifiques (cardiologie, cancérologie, etc.)

• La thérapeutique, médicamenteuse ou fondée sur les psychothérapies

• Les situations particulières (fin de vie, particularités culturelles, etc.)

Paru en janvier 2018

DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL

1) Anxiété liée à une affection médicale

(notamment pathologies cardiovasculaires, respiratoires, neurologiques et

endocriniennes)

2) Trouble anxieux induit par une substance ou un médicament*

TROUBLE ANXIEUX CARACTERISE: CONDUITE A TENIR

Soutien et réassurance +/- relaxation

Favoriser la communication avec l’équipe et l’infirmation du patient

Diminuer le risque de perte de chance associé notamment en terme de qualité

des soins

Traitement médicamenteux symptomatique éventuel en l’absence de contre-

indication

Discuter l’instauration d’un traitement spécifique d’un antidépresseur

Interactions médicamenteuses à surveiller

Mise en place d’un suivi psychothérapeutique

Proposer une prise en charge comportementale et cognitive adaptée au trouble

Notifier ses propositions au médecin en charge du patient

DIAGNOSTIC POSITIF DE TROUBLE ANXIEUX CARACTERISE

1) Symptômes en faveur d’un ou plusieurs trouble(s) anxieux caractérisé

Trouble panique, anxiété généralisée, trouble obsessionnel-compulsif, agoraphobie,

phobie spécifique, anxiété sociale et/ou trouble de l’adaptation

2) Evolution chronique

3) Retentissement significatif

DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL

1) Anxiété liée à un sevrage (alcool, toxiques,

médicament…)

2) Syndrome confusionnel

3) Autre trouble mental

NON OUI

ANXIETE-SYMPTOME: CONDUITE A TENIR

Soutien et réassurance +/- relaxation

Favoriser la communication avec l’équipe et l’information du patient

Information au médecin en charge du patient

Traitement médicamenteux symptomatique éventuel en l’absence de contre-

indication

Réévaluation

NON

OUI

CONDUITE A TENIR

Traitement étiologique

Information au médecin en charge du

patient

Soutien et réassurance

Réévaluation

OUI

CONDUITE A

TENIR

Traitement spécifique

Réévaluation

NON

* Médicaments les plus fréquemment responsables de symptômes anxieux: Anti-cancéreux, baclofène, bupropion, caféine,captopril, corticoïdes, oestrogènes,

interféron α et β, L-dopa, mefloquine, méthylphénidate, metoclopramide, opiacés, statines, sumatriptan, théophylline, thiabendazole

Troubles anxieux et dépressifs

Pr Cédric Lemogne UF de Psychologie et Psychiatrie de liaison et d’urgence

Service de Psychiatrie de l’adulte et du sujet âgé HUPO / INSERM UMR 894 / Université Paris Descartes

N = 16 patients with cancer receiving IL-2 or IFN-α

Δ TRP at 1 week: • Reduced appetite (ρ = −0.609; P < 0.05) • Pessimistic thoughts (ρ = −0.574; P < 0.05) • Suicidal ideas (ρ = −0.533; P < 0.05) • Loss of concentration (ρ = −0.495; P = 0.05) Δ TRP at 1 month: • Inner tension (ρ = −0.533; P < 0.05) • Suicidal ideas (ρ = −0.496; P = 0.05).

(Capuron et al., Mol Psychiatry 2002)

Traitement de la dépression et pronostic

(Mulick et al., Lancet Psychiatry 2018)

Prendre en charge efficacement la dépression

des patients atteints de cancer n’a pas d’effet

significatif sur la survie

(Köhler et al., JAMA Psychiatry 2014)

Celecoxib as an add-on to antidepressant therapy (4 trials, 132 patients)

Depressive symptoms: SMD=−0.82 [−1.17, −0.46]; P<.001, I²=0%

Remission : OR=7.89 [2.94, 21.17]; P<.001; I²=0%

Response (3 trials, 92 patients): OR=6.59 [2.24, 19.42]; P<.001; I²=0%

Infliximab et dépression résistante

(Raison et al., JAMA Psychiatry 2013)

N=30 N=30

Interaction (P = .01) treatment × time × baseline log hs-CRP

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