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MARDI 23 AOÛT 2011 - N° 4791 Andorre : 1,60 €. Antilles, Réunion, Guyanne : 2 €. Belgique : 1,50 €. Espagne : 1,60 €. G-B : 1,30 £. Italie : 2 €. Luxembourg : 1,50 €. Maroc : 15Dh. Portugal : 2 €. Suisse : 3 FS. Tunisie : 2.200 TND. Zone CFA : 1400. www.latribune.fr FRANCE MÉTROPOLITAINE - 1,50 € PUBLICITÉ Abonnez-vous à La Tribune au 0800 13 23 33 ou via internet en vous rendant sur www.latribune.fr « LA TRIBUNE S’ENGAGE AVEC ECOFOLIO POUR LE RECYCLAGE DES PAPIERS. AVEC VOTRE GESTE DE TRI, VOTRE JOURNAL A PLUSIEURS VIES. » CAC  40 + 1,14 % 3.051,36 pts FTSE  100 + 1,08 % 5.095,30 pts DAX  30 – 0,11 % 5.473,78 pts EURO – 0,10 % 1,4385 $ Pétrole  WTI + 0,06 % 82,75 $ ÉCONOMIE SOCIAL. Fillon consulte les parte- naires sociaux avant d’arrêter les mesures antidéficit. PAGE 4 FINANCES PUBLIQUES. Les députés seront saisis du budget dès le 6 sep- tembre. PAGE 4 ENSEIGNEMENT. Querelle de chiffres sur le coût de la rentrée universi- taire. PAGE 4 BUSINESS ÉDITION. La rentrée littéraire pourrait faire décoller les ventes de livres numériques. PAGE 7 EXCLUSIF. TNT : le gouvernement projette de changer de technologie. PAGE 7 TOURISME. Chute de 45 % des visi- teurs français en Tunisie. PAGE 8 ÉNERGIE. PetroChina et Shell lan- cent une nouvelle OPA dans le gaz australien. PAGE 9 FINANCE FRAUDE. Le rôle des banques a été décisif dans le gel des avoirs des di- rigeants arabes déchus, livre à « La Tribune » Tony Wicks, directeur des solutions antiblanchiment chez Nice Actimize. PAGE 11 GESTION D’ACTIFS. Les fonds mo- nétaires américains ont allégé leur exposition aux banques européen- nes. PAGE 11 INDICATEURS DU LUNDI 22 AOÛT 2011 REA BLOOMBERG REUTERS REUTERS REUTERS I S S N 0 9 8 9 - 1 9 2 2 La Corée du Nord ouvre son économie à la Russie et à la Chine Les marchés tablent sur des taux encore plus bas En proie à de sérieuses difficultés économiques, Pyongyang cherche à développer sa coopération avec la Russie. Kim Jong-il (photo) rencon- trera d’ici à mercredi Dmitri Medvedev pour avancer sur un grand projet de gazoduc sur le territoire nord-coréen. Le régime encourage également la Chine à s’implanter sur son territoire, mais l’environnement économique et politique inquiète les investisseurs. PAGE 5 L’or a établi un nouveau record lundi, alors que le rendement des obli- gations d’État américaines chutait. Le président de la Fed doit pro- noncer un discours vendredi, et les investisseurs anticipent l’annonce d’un troisième cycle d’assouplissement quantitatif. Ce qui permettrait aux taux d’intérêt de long terme de baisser encore. Les investisseurs s’organisent pour surfer sur cette vague de taux bas. PAGE 12 LA RENTRÉE LITTÉRAIRE : Patrick Deville SPÉCIAL NEW YORK (2/5) : Manhattan LA SAGA DES PME FAMILIALES : Zéfal RÉVISEZ VOS CLASSIQUES : Chateaubriand de l’ été d l’ d l La SNCF vise le marché russe de la grande vitesse. PAGE 8 Le Minitel disparaît après trente ans de services rendus. PAGE 6 Les défis économiques de l’après-Kadhafi Les défis économiques de l’après-Kadhafi Le Conseil national de tran- sition s’est installé à Tripoli et gouverne le pays, mettant ainsi fin au régime Kadhafi. Priorité au pétrole : remet- tre en marche les installa- tions et créer un consensus sur la gestion des ressources. Français et Italiens, Total et ENI en tête, entendent jouer les premiers rôles dans la reconstruction de la Libye. Les événements libyens vont coûter 0,4 % de croissance à la Tunisie en 2011, selon certaines estimations. PAGES 2-3, ANALYSE ET ÉDITORIAL PAGE 23

ì + 1,14 % 3.051,36 pts ì + 1,08 % 5.095,30 pts î – 0,11 % ... · L'ÉVÉNEMENT MARDI 23 AOÛT 2011 - LA TRIBUNE PAGE 2 L e colonel Kadhafi restaitintrouvable lundi soir et

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  • MARDI 23 AOÛT 2011 - N° 4791

    Andorre : 1,60 €. Antilles, Réunion, Guyanne : 2 €. Belgique : 1,50 €. Espagne : 1,60 €. G-B : 1,30 £. Italie : 2 €. Luxembourg : 1,50 €. Maroc : 15Dh. Portugal : 2 €. Suisse : 3 FS. Tunisie : 2.200 TND. Zone CFA : 1400.

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    CAC  40 ì + 1,14 % 3.051,36 pts FTSE  100 ì + 1,08 % 5.095,30 pts DAX  30 î – 0,11 % 5.473,78 pts EURO î – 0,10 % 1,4385 $ Pétrole  WTI ì + 0,06 % 82,75 $

    ÉCONOMIE

    SOCIAL. Fillon consulte les parte-naires sociaux avant d’arrêter les mesures antidéficit. PAGE 4

    FINANCES PUBLIQUES. Les députés seront saisis du budget dès le 6 sep-tembre. PAGE 4

    ENSEIGNEMENT. Querelle de chi*res sur le coût de la rentrée universi-taire. PAGE 4

    BUSINESS

    ÉDITION. La rentrée littéraire pourrait faire décoller les ventes de livres numériques. PAGE 7

    EXCLUSIF. TNT : le gouvernement projette de changer de technologie. PAGE 7

    TOURISME. Chute de 45 % des visi-teurs français en Tunisie. PAGE 8

    ÉNERGIE. PetroChina et Shell lan-cent une nouvelle OPA dans le gaz australien. PAGE 9

    FINANCE

    FRAUDE. Le rôle des banques a été décisif dans le gel des avoirs des di-rigeants arabes déchus, livre à « La Tribune » Tony Wicks, directeur des solutions antiblanchiment chez Nice Actimize. PAGE 11

    GESTION D’ACTIFS. Les fonds mo-nétaires américains ont allégé leur exposition aux banques européen-nes. PAGE 11

    INDICATEURS DU LUNDI 22 AOÛT 2011

    REA

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    REUT

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    REUT

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    I S S N 0 9 8 9 - 1 9 2 2

    La Corée du Nord ouvre son économie à la Russie et à la Chine

    Les marchés tablent sur des taux encore plus bas

    En proie à de sérieuses di7cultés économiques, Pyongyang cherche à développer sa coopération avec la Russie. Kim Jong-il (photo) rencon-

    trera d’ici à mercredi Dmitri Medvedev pour avancer sur un grand projet de gazoduc sur le territoire nord-coréen. Le régime encourage également la Chine à s’implanter sur son territoire, mais l’environnement économique et politique inquiète les investisseurs. PAGE 5

    L’or a établi un nouveau record lundi, alors que le rendement des obli-gations d’État américaines chutait. Le président de la Fed doit pro-noncer un discours vendredi, et les investisseurs anticipent l’annonce d’un troisième cycle d’assouplissement quantitatif. Ce qui permettrait aux taux d’intérêt de long terme de baisser encore. Les investisseurs s’organisent pour surfer sur cette vague de taux bas. PAGE 12

    uLA RENTRÉE LITTÉRAIRE : Patrick DevilleuSPÉCIAL NEW YORK (2/5) : ManhattanuLA SAGA DES PME FAMILIALES : ZéfaluRÉVISEZ VOS CLASSIQUES : Chateaubriand

    de l’ étéd l’d l’

    La SNCF vise le marché russe de la grande vitesse. PAGE 8

    Le Minitel disparaît après trente ans de services rendus. PAGE 6

    Les défis économiques de l’après-Kadhafi

    Les défis économiques de l’après-Kadhafi

    uLe Conseil national de tran-sition s’est installé à Tripoli

    et gouverne le pays, mettant ainsi fin au régime Kadhafi.

    uPriorité au pétrole : remet-tre en marche les installa-

    tions et créer un consensus sur la gestion des ressources.

    uFrançais et Italiens, Total et ENI en tête, entendent

    jouer les premiers rôles dans la reconstruction de la Libye.

    uLes événements libyens vont coûter 0,4 % de

    croissance à la Tunisie en 2011, selon certaines estimations.

    PAGES 2-3, ANALYSE ET ÉDITORIAL PAGE 23

  • L'ÉVÉNEMENT MARDI 23 AOÛT 2011 - LA TRIBUNE PAGE 2

    Le colonel Kadhafi restait introuvable lundi soir et les combats faisaient toujours rage dans cer-tains quartiers de Tri-poli. Mais les cris de

    joie et les manifestations d’eupho-rie dans la ville ne trompent pas : l’ère de Muammar Kadhafi est révolue. L’ex-Guide suprême, qui a combattu son propre peuple pendant six mois et une semaine, rejoint Ben Ali et Hosni Mouba-rak au chapitre des dictateurs dé-chus en 2011.Comme la Tunisie et l’Égypte, la Libye est maintenant face au plus grand des défis : se re-lever. Après avoir gagné la guerre, les rebelles doivent gagner la paix et remettre l’économie en état de marche. La mission s’annonce diPcile. Après quatre mois de guerre, l’OCDE prédisait début juin une récession de… 19 % en 2011, suivie d’une croissance de 16 % en 2012. Une demi-année de combats (le nombre de morts est pour l’heure incertain) et le ralen-tissement, voire l’arrêt brutal de certains secteurs économiques comme le pétrole [voir plus bas] vont laisser des traces.

    Mais la Libye a des atouts. Grâce à une dette publique qui représen-te seulement 3,3 % du PIB, le pays est l’un des moins endettés du monde et devrait, selon l’OCDE, sortir dès 2012 de la récession sans conséquences durables sur les finances publiques. Riche de son pétrole, de ressources consi-dérables en gaz dont l’exploitation

    est pour l’instant embryonnaire (un seul gazoduc en direction de l’Italie), la Libye devrait atti-rer en masse les investissements étrangers, notamment français ou italiens [voir page 3]. D’autant plus que l’absence de transports performants (il n’y a pas de ligne ferroviaire), la faiblesse du secteur du tourisme, ou le manque d’in-frastructures devraient favoriser le développement d’une activité soutenue.

    « ÉVITER LES REPRÉSAILLES »¢

    À l’intérieur, la chute du clan Kadhafi va entraîner une réor-ganisation profonde de l’appareil économique. « Encore plus qu’en Tunisie avec les Trabelsi, tous les

    leviers économiques de la Libye étaient ac-tionnés par la famille Kadhafi », explique Mathieu Guidère, chercheur et auteur du livre « le Choc des

    révolutions arabes », aux Éditions Autrement, 2011. « Les enfants Kadhafi avaient fini par être aux commandes dans tous les sec-teurs de l’économie, comme le pétrole, les infrastructures, les télécommunications, les médias ou l’armement. On ne pouvait rien construire, pas acheter un com-merce ou signer un gros contrat sans traiter directement ou in-directement avec le régime, qui récupérait des sommes colossales d’argent », décrypte le spécialiste.

    Mais la remise en route de l’éco-nomie dépend aussi du rétablisse-ment imminent de la sécurité. Le président américain Barack Oba-ma ou la patronne de la diploma-tie européenne Catherine Ashton ont invité le Conseil national de transition (CNT), l’organe politi-que des insurgés, « à agir avec le sens de la responsabilité » pour éviter les représailles. La ques-tion libyenne sera d’ailleurs l’objet dans la semaine d’un sommet de l’ONU, pour « aider à la transition démocratique » dans le pays. SYLVAIN ROLLAND

    Les enjeux économiques de la reconstruction libyenneAprès la chute du colonel Kadhafi, au pouvoir depuis 42 ans, la Libye s’apprête à écrire une nouvelle page de son histoire. Le Conseil national de transition (CNT) doit rétablir la sécurité et développer l’immense potentiel du pays.

    d’ailleurs largement participé à la reprise de l’indice CAC 40 - voir aussi en page 14). Le Qatar, qui a soute-nu les rebelles, devrait également avancer ses pions. Mais ce n’est qu’une hypothèse. S’il semble possible techniquement de redémarrer les champs de l’est du pays d’ici à quelques semaines, le redémarrage de l’ensemble des gisements pourrait prendre des an-nées, puisqu’il nécessitera un consensus politique entre les dimérents groupes de rebelles.

    Pour la société de conseil JBC à Vienne, trois ou quatre ans pourraient être nécessaires. Des inter-rogations se posent également sur l’état des pipeli-nes et autres réservoirs. « Autant les dommages ont été légers avant l’intervention de l’Otan, autant on ne sait rien de précis sur ce qui s’est passé depuis le début des bombardements aériens », assure Harry Tchilinguirian. « Si les deux principaux terminaux d’exportation, Es Sider et Ras Lanuf, ont été endom-magés, personne ne sait dans quelle proportion. Des mines pourraient par ailleurs avoir été placées sur certaines installations par les forces pro-Kadhafi. Dans le doute, le marché du pétrole s’apprête donc à continuer de se passer de la Libye, d’autant qu’avant la mi-2012 il n’y aura pas de changement fondamen-tal de l’omre », assure Emmanuel Fages, analyste sur l’énergie à la Société Générale. ALINE ROBERT

    LES MARCHÉS DU PÉTROLE ONT FRAÎCHEMENT ACCUEILLI la nouvelle de la chute imminente du régime libyen. Le baril de pétrole brent a abandonné jusqu’à plus de 3 dollars lundi matin, avant de regagner du ter-rain en fin de journée, alors que les traders antici-paient — un peu vite — la reprise de la production du pays. Les 1,6 million de barils de brut léger que la Libye mettait encore sur le marché chaque jour en janvier dernier semblent bien loin. Les interro-gations s’accumulent.

    « La vraie question qui se pose est juridique : à qui appartient le pétrole libyen ? Les banques ne peuvent financer des opérations, ne serait-ce que le transport de pétrole, s’il n’existe pas de titres de crédit claire-ment établis à partir de certitudes juridiques », ob-serve Harry Tchilinguirian, expert du pétrole chez BNP Paribas, en rappelant l’exemple de l’Irak où le chaos intérieur a bloqué toute évolution économique longtemps après la chute de Saddam Hussein.

    LES ACTIFS DE TOTAL PROTÉGÉS A PRIORI¢

    L’engagement de la France et de l’Italie au sein des forces de l’Otan devrait a priori protéger les actifs de Total et d’ENI, les premières compagnies pétroliè-res présentes dans le pays aux côtés de Wintershall et Marathon (l’action Total, en forte hausse lundi, a

    L’exploitation de la rente pétrolière ne peut se faire sans consensus politique.

    La complexe remise en route des installations pétrolières

    concentrée pendant cinq mois sur Tripoli, selon le blog de Renesys, qui conseille les entreprises sur les infrastructures Internet. Lundi à midi, le site de Lybian Telecom and Technology, qui connecte la Lybie à la Toile, était de nouveau accessible. En bas de page, ce message : « Félicitation à la Lybie, qui s’émancipe du tyran. »

    L’ancien pouvoir en place avait également pendant plusieurs mois censuré les SMS et l’Inter-net mobile. Pas plus tard que vendredi, le régime de Kadhafi menaçait d’exécution quiconque utilisait un téléphone satellite sans autorisation. Outre la cen-sure, les journalistes présents sur place soupçonnaient des hackers d’avoir espionné leurs ordinateurs et leurs emails. S. C.

    FAUT-IL Y VOIR UN LIEN de cause à ef-fet ? Comme par miracle, l’entrée des rebelles à Tripoli ce week-end a coïncidé avec le retour d’Inter-net. Après plusieurs mois d’une connection erratique, les habi-tants de certains quartiers de Tri-poli ont pu, selon des témoignages relayés sur Twitter et recueillis di-manche soir par l’AFP, se connec-ter de nouveau à la Toile. Comme en Égypte en début d’année au plus fort des révoltes contre le ré-gime Mubarak, la Lybie a connu ces derniers mois de fortes coupu-res au Net.

    BLACK OUT NUMÉRIQUE¢

    Début mars, le pays a été plongé plusieurs jours dans un noir nu-mérique total, selon le Transpa-rency Report de Google, qui analyse la connection Internet à ses services. Puis, la censure s’est

    Après plusieurs mois de coupures, les habitants de la capitale libyenne pouvaient de nouveau surfer sur la Toile lundi.

    L’accès à Internet et aux SMS a été rétabli à Tripoli

    Traduction du troisième tweet : « Je confirme qu’Internet

    est rétabli à Tripoli. Je ne sais pas ce que

    cela cache. »

    Scène de liesse à Benghazi, dimanche dans la nuit, à l’annonce de l’entrée des rebelles dans Tripoli.

    REUTERS

    DR

    On ne pouvait rien construire, pas acheter

    un commerce ou signer un gros contrat sans traiter directement ou indirectement avec le régime. »

  • L'ÉVÉNEMENTLA TRIBUNE - MARDI 23 AOÛT 2011 PAGE 3

    Les enjeux économiques de la reconstruction libyenne

    volu en 2011 aux opérations extérieures (les « opex »), de 650 millions d’euros, va être largement dépassé. « Avec l’Afgha-nistan et la Libye, les dépenses devraient se situer entre 950 millions et 1 milliard d’euros », dit-on au ministère de la Dé-fense. Qui financera ce surcoût ? Mystère. Dans le passé, l’État n’avait pas hésité à combler de tels surcoûts en ponctionnant les autres ministères.FABRICE GLISZCZYNSKI

    AUTOUR DE 200 MILLIONS D’EUROS. C’est envi-ron l’ordre de grandeur du coût pour la France de l’opération Harmattan débu-tée le 19 mars en Libye, explique-t-on au ministère de la Défense. Ceci sur la base d’un mode de calcul très simple. « Le surcoût du conflit s’élevant en moyenne à 1,2 million d’euros par jour, le montant sur cinq mois approche les 190 millions [187 millions, Ndlr] », assure une source militaire. « Les munitions et les salaires des 2.000 à 2.500 soldats de l’aérona-vale constituent l’essentiel de la dépense. L’enveloppe englobe aussi l’utilisation des avions Rafale ou Mirage, des hélicoptè-res, du porte-avions Charles-de-Gaulle jusqu’à début août, de la maintenance… Entre le 11 et le 18 août, le dispositif mili-taire français a assuré près de 150 sorties, dont plus de 65 % sont des missions de frappe au sol », explique un communiqué de l’état-major. À titre de comparaison, le coût de la présence française en Afgha-nistan est légèrement supérieur à près de 1,3 million.

    Les opérations en Libye n’ayant évi-demment pas été prévues, le budget dé-

    Déjà 1 milliard de dépenses pour les « opex », pour 650 millions budgétés pour 2011.

    L’opération Harmattan a coûté près de 200 millions d’euros à la France

    Le porte-avions « Charles-de-Gaulle », seul bâtiment européen de ce type.

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    tuniso-libyenne (BTL) et The National Arab Investment Bank (NAIB).

    IMPACT DIFFICILE À CHIFFRER¢

    L’impact de la crise sur le touris-me, diicile à chijrer, est consé-quent. « Les habitants vivant des revenus générés par le commerce informel avec la Libye ont été im-pactés, tout comme les ménages qui ont perdu les fonds envoyés par les Tunisiens qui travaillaient en Libye », précise le rapport.

    Au-delà de l’impact économi-que, l’akux de migrants libyens

    Les échanges commerciaux en-tre les deux pays ont été sérieu-sement ajectés. L’importation de produits libyens, notamment le pétrole, a chuté de 94 % au premier trimestre 2011. Et les exportations tunisiennes en di-rection de la Libye sont passées de 247 millions de tonnes au pre-mier trimestre 2010 à 163 mil-lions de tonnes au premier tri-mestre 2011, soit une perte de 34 %. Des projets d’envergure ont été abandonnés à cause de la crise, comme la création d’un holding bancaire tuniso-libyen par la fusion entre la Banque

    TOURISME, INVESTISSEMENTS ÉTRAN-GERS, flux financiers, envoie de fonds des migrants, commerce dans les zones frontalières… L’économie tunisienne, très liée à celle de son voisin libyen, a aussi subi les conséquences de la guerre civile qui sévissait depuis six mois à l’est de ses frontières. Selon une étude de la Banque africaine de développement (BAD), l’impact de la guerre sur la croissance tunisienne pourrait coûter 0,4 point de pourcentage. La BAD estime d’ailleurs que le PIB tunisien n’augmentera que de 0,7 % en 2011.

    Déjà impactée par sa propre révolution, la croissance tunisienne pourrait perdre 0,4 point de pourcentage à cause de la crise libyenne.

    La Tunisie, première économie touchée par la guerre libyenne

    est diicile à gérer pour la Tu-nisie. De janvier à fin juillet, les douanes ont enregistré 764.639 entrées de Libyens sur le terri-toire tunisien, provoquant un renchérissement des prix ali-mentaires de base dans les villes frontalières, comme la farine, le riz ou les bouteilles d’eau.

    Mais cette migration massive n’a pas eu que des conséquences négatives. La forte augmenta-tion de la consommation, expli-quée par la demande accrue des réfugiés, pourrait compenser en partie les pertes en rapportant 0,1 point de croissance, selon la

    BAD. La fréquentation des hôtels a bondi dans les villes transfron-talières. À Tataouine, Djerba ou Zarzis, les gérants ont constaté une hausse des nuitées de 50 % par rapport aux autres années à la même période. Le port de la petite ville méditerranéenne de Zarzis, qui servait jusque-là à ex-porter du sel et du pétrole, a re-marquablement tiré profit de la situation, jusqu’à devenir un vrai pôle d’échange entre la Libye et le reste du monde.JULIE GOMMES, À TUNIS

    activités avec le Conseil national de transition.

    Elles y ont rencontré des gens « très crédi-bles, d’un excellent niveau et avec une vision claire et réa-liste » et sont donc

    « raisonnablement optimistes », même si

    les outils de paiement ne sont pas encore en place et la

    plupart des avoirs bloqués, expli-que Michel Casals.D’autres missions sont prévues sur place dans les prochaines se-maines, avec une priorité donnée

    se préparent activement à jouer un rôle impor-tant dans l’ère post-Kadhafi.Avec le soutien de Bercy, la chambre de commerce fran-co-libyenne a d’ores et déjà, en juin et juillet, conduit à Ben-ghazi une mission d’une bonne vingtaine d’entreprises françaises (dont Alcatel-Lucent, Bolloré, Total, Thales, Entrepose, EADS, Sanofi, Veolia, GDF Suez, Sidem et Denos) pour évaluer les possibilités de développer leurs

    S’IL N’ÉPARGNE PAS SES EFFORTS pour aider les entreprises françaises à participer aux travaux de re-construction en Libye, Michel Casals, président de la chambre de commerce franco-libyenne, reste lucide : « La concurrence sera vive sur un marché au po-tentiel important. » La France se situe au 6e rang des parte-naires commerciaux de Tripoli, avec 1 milliard de dollars d’ex-portations en 2010, loin derrière l’Italie, premier fournisseur de la Libye (3,43 milliards de dollars de marchandises vendues). Pour autant, les entreprises françaises

    Les entreprises françaises ont multiplié les missions auprès du Conseil national de transition libyen. Les groupes italiens du pétrole et de la construction sont l’arme au pied.

    Les entreprises italiennes et françaises se préparent pour la relève

    à la remise en état de l’outil de production pétrolière et aux pro-jets d’infrastructures. « La Fran-ce a pris des positions politiques et militaires risquées, ce qui nous vaut un certain crédit, mais pro-bablement pas jusqu’à nous faire bénéficier de contrats de gré à gré », souligne Michel Casals.

    Les groupes italiens, tradition-nellement très implantés en Li-bye, sont également déjà sur les rangs. Les titres d’entreprises comme Ansaldo STS, qui a si-gné un contrat pour développer la première ligne ferroviaire du pays, le pétrolier ENI, qui réalise

    17 % de sa production en Libye, ou encore le spécialiste du BTP Impregilo se sont envolés hier à la Bourse de Milan. « Les accords pétroliers ont été confirmés, a précisé dimanche le ministre italien des Ajaires étrangères, Franco Frattini, les techniciens de Saipem (filiale ingénierie de l’ENI) sont déjà au travail depuis un certain temps pour remettre en fonction les installations. » Selon le ministre, « avec le retour de la paix, de grandes opportuni-tés s’ouvriront dans le domaine de la santé et du BTP ».M.-C. L., D. P. ET R. L., À ROME

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    LIRE aussi l’édito et l’analyse en page 23.