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ag it-el le positivement sur cerueau et la santé ? L'écriture en miroir : fréquente, mais sans conséqueltGes Météo et humeur un lien fort D'où vient notre attacheme aux choses ? r u0l Pou rq Ie M 07656-sz-F: 6,95 €-no n"52 - Bimestriel juillet-août 2012 L'argent un obstacle au bonheur I T

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ag it-el le positivementsur cerueau et la santé ?

L'écriture en miroir :

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Météo et humeurun lien fort

D'où vientnotre attachemeaux choses ?

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n"52 - Bimestriel juillet-août 2012

L'argent un obstacle au bonheurI

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e besoin de calme s'est emparé de notre monde. Face au bruit,à l'agitation, au stress, nous cherchons à retrouver I'unitéde nos pensées et de nos affects. Heureusement, les hommeset les femmes se sont posé cette question depuis des millé-naires. C'est l'Orient qui a montré la voie. Mais depuis quel-

ques années, la science occidentale rend visibles, presque tangibles,les effets positifs de ces pratiques méditatives sur le fonctionnementdu cerveau, sur I'orientation de l'attention ou la régulation des émo-tions. À tel point que le corps lui-même en retire des bénéfices. Mêmeles enfants vivent mieux en apprenant ces pratiques simples de l'es-prit, que ce soit à l'école ou en famille.

Un dossier à méditer...

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@ Cerveau&Psycho - n'52 iuillet-août 20l2

La méditationI

le mot méditation au singulier. Il serait bon de

parler de « méditations » ou de « techniques

méditatives ».

Déjà dans son étymologie, Ie terme « médi-

ter » disperse celui quiveut en saisir le sens en

le renvoyant à plusieurs compréhensions' Pour

I'homme de la rue, méditer c'est songer à quel-

que chose, ou se soumettre à une longue et

mûre réflexion. Pourtant, jusqu'au début du

xve siècle, méditer désignait 1'action de réflé-

chir sur un mystère de la religion, signe que

les pratiques méditatives imbibaient intime-

ment la pensée et la pratique religieuses. Mais

la racine antique du mot nous rapproche du

@ Cerveau & Psycho - n" 52 iuillet- août 20 I 2

thème de ce dossier, puisque Ie terme latinmedeor (qu'on retrouve darc remède) signi-

fie soigner. Les peuples antiques avaient-ils

perçu 1'existence subtile d'une passerelle entre

1es pratiques méditatives et leurs vertus médi-

cinales sur Ie corps-esprit ? Tiès certainement.

= Les pratiques méditatives sont aussi anciennes que diverses,

plusieurs fois millénaires et présentes dans l'lnde ancienne toutcomme en Chine, au Japon, en Birmanie.

æ On y retrouve généralement une attention portée

aux sensations corporelles et au calme intérieuç parfois pour

alléger des souffrances, souvent dans une démarche désintéressée

u Méditer peut être une activité laique, ou intervenir

en complément d'une pratique spirituelle ou religieuse'

L'histoire de la méditat ron se pe rd dans la nuit des temPs

Quels sont les points communs des différentes traditions

méd itatives, a uj ou rd' h u i étud iées scientif i q uement?

oss ie r

De nombreux mouvements méditatifs nésil y a des millénaires se sont égarés dans lesméandres de l'histoire. Explorons ici quelques-uns des grands courants méditatifs encoreconnus aujourd'hui, et dont la pratique etl'étude se déploient au sein du monde occi-dental depuis quelques années.

Le taoi'sme

Le tao (ou Do au fapon) est un terme trèsdifficile à traduire, car porteur de plusieurssens. Ceci est sans doute dû à ses origines dis-parates, autant dans les époques que les lieux.On peut lui faire correspondre les mots detoie, chemin, direction. Le tao évoque le coursspontané et naturel des choses ; il représenteaussi une structure, une trame matricielle quiordonne l'univers et au sein de laquelle le Qi(énergie ou souffIe interne) fait circuler sonprincipe énergétique.

Le taoisme qui en est issu est un mouvementde pensée, vaste dans ses idées et ses origines.Il semble que ce mouvement soit né près de2 000 ans avant l'ère chrétienne, sinon davan-tage. Le taoïsme est en vérité un sy,ncrétisme,amalgamant plusieurs mouvements mystiques,philosophiques et scientifiques ; c'est ainsiqu'au fil des siècles, il a réussi à survivre ens'adaptant avec souplesse à d'autres mouve-ments philosophico-religieux (tel le boud-dhisme, par exemple) et en s'en enrichissantplutôt qu'en s'y opposant. Dans son espritd'origine, le taoisme inspire les principes dela médecine chinoise, de la gestion politique,de Ia cosmologie, des arts divinatoires. Et il ins-pire diverses pratiques méditatives, tels les dif-férents styles de Tâi-chi-chuan et de Qi gong,le Do in, les arts martiaux chinois (ou Wushu)et japonais (ail<ido, kendo, judo, etc.)

Mais, outre le fait d'être un mouvementde pensée, le taoisme est-il une religion ? LeTao-te-king,l'un des ouvrages fondateurs dutaoïsme, fait ressentir au lecteur qui se laissebercer par sa poésie parfois hermétique l'exis-tence d'un principe unique, équilibré, impal-pable, invisible, une sorte de trame d'où

émerge la multiplicité immense et contrastéede la création. Cette source ineffable préfi-gure-t-elle le principe d'unicité, fondateur desreligions monothéistes ? On peut le penser, ouplutôt le pressentir ; il évoque le « Un » dujudaïsme,le « Tàwhid » de l'islam, et le « Père »

du christianisme.Plusieurs pratiques inspirées du tao fleu-

rissent aujourd'hui : on les nomme médita-tions taoïstes. Variées dans leurs consignes etleurs postures, leur intention commune restele travail sur le Qi, afin de permettre la mani-festation et la circulation de ce souffle interne.Certaines méditations taoïstes demandent aupratiquant de développer l'équivalent dusamatha au sein de l'esprit, un état de calmeintérieur ; ce sont les pratiques issues de l'écoledite du Nord. D'autres techniques (venant del'école du Sud) invitent à travailler plutôt surles centres liés à Ia circulation du Qi dans lecorps, notamment par la respiration. Maiscette distinction corps-esprit mérite d'êtrenuancée puisque dans le taoïsme f idée d'unefrontière entre l'esprit et le corps reste incer-taine. Certaines pratiques se font dans uneposture assise immobile. D'autres se rappro-chent d'exercices de gymnastique aux mou-vements doux et répétés.

Le bsuddhEsme

Le bouddhisme est né au VIe siècle avantnotre ère dans le Nord de l'Inde, inspiré par unhomme dont l'existence n'est pas contestée,le bouddha historique Siddhârta Gautama.Selon les sources ou les légendes, cet hommeaurait vécu une jeunesse aisée dans un palais,confiné par son père à n'y connaître que lesplaisirs terrestres et à rester à l'abri des souf-frances qu enduraient les humains. Ce n'estqu'à l'âge de 30 ans que cet homme auraitconnu le monde extérieur à la faveur d'uneéchappée secrète hors du palais, réalisant alorsl'existence des maladies, de la vieillesse et deses tourments, de la mort. Heurté par lecontraste entre sa yis msndaine et la réalitéde la misère humaine, il prit conscience de la

@ Cerveau&Psycho . n'52 juillet - août 2012

-

I

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détresse de ses frères humains et décida

d'abandonner savie facile. Et c'est dans le désir

de comprendre et trouver un remède à ladétresse humaine que le bouddha, alors qu ilméditait près de Bénarès (l'actuelle Vârânasî),

eut l'inspiration de ses célèbres « quatre nobles

vérités » sur l'origine et les remèdes à la souf-

france. Il énonça aussi les principes nécessai-

res à adopter (ou « octuple noble sentier »)

pour parvenir à soulager Ia souffoance.

Dans l'Inde de l'époque, soumise à la ségré-

gation des castes religieuses, à quels types de

besoins l'éclosion du bouddhisme répondait-

La méditation à travers les âges

elle : était-elle d'ordre humain ? social ? reli-gieux ? politique ? voire religieux, sans doute ?

Car il est vrai que certaines branches mysti-ques du bouddhisme ont divinisé l'hommeSiddhârta ou son message. Par ailleurs, par

l'expérience méditative bouddhiste, le prati-quant peut s'approcher - incidemment ouintentionnellement - de ressentis d'unionextatique, d'un principe cosmique unifiant,de compassion pour tous les êtres, etc. Autantde sensations qui s'apparentent à l'expérience

du divin. Pourtant, dans son intention origi-nelle le bouddhisme n'évoque l'existence

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@ Cerveau & Psycho - no 52 juillet - août 20 I 2 23

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sont plus souples sur ce point. D'autres encoreinvitent à Ia pratique méditative déambula-toire (la marche en pleine conscience duVipassana, le Kinhin du zenSoto), voire dansdes conditions insolites, comme sous destrombes d'eau (le Tâkigyo japonais ou « ascèse

de la cascade »).

Ensuite, les méthodes se rejoignent oudivergent selon les qualités d'âme que leurpratique développe. Par exemple, la pratiquedu Shiné tibétain se rapproche de celle del'Anapana indobirman, qui invitent toutesdeux à porter son attention à sa simple res-piration ; alors s'affine la concentration men-tale propre au Samatha. Pareillement, laméditation tibétaine Dmigs med snying rjese rapproche de la pratique de Metta bhavanaindobirmane puisqu'elles font toutes deuxfleurir la compassion et l'amour incondition-nel pour les êtres sensibles.

Mais cette compassion peut aussi être lefruit du Tonglen tibétain mobilisant riche-ment l'imagination créatrice, puisque le pra-tiquant imagine inspirer les souffrances deson prochain sous forme d'une fumée quidisparaît en lui pour donner la place à unelumière scintillante et magnanime, qü émanehors de lui à chaque expiration. Et sous d'au-tres cieux, ceux du lapon bouddhiste, le Kÿanest un support aussi puissant qu'insolite pour

d'aucun être suprême, d'aucune transcen-dance. Il se propose, rappelons-le, de remé-dier à la souffrance humaine par une meil-leure connaissance de soi et par la pratiquede règles simples et universelles.

Bien que la pratique méditative demeurecentrale dans le monde bouddhiste, ses for-mes diffèrent grandement selon les mouve-ments (écoles dites Theravada, Mahayana,Yajrayana.. . ) et les origines géographiques(Thaïlande, Birmanie, fapon, Chine, Tibet,Viêt-Nam, etc.). De façon très générale, lesinvariants concernent les deux piliers que sontle Samatha et le Vipassana (uoir l'encadré ci-dessous). Mais les approches pour y parvenirdivergent notablement. Par exemple, f impor-tance donnée à la posture est variable : dansl'école zen japonaise, elle constitue un pilierconstitutif de la pratique alors que d'autresécoles (Vipassana indobirman par exemple)

e façon très générale, il existe deux axes communsà la grande majorité des techniques méditatives,

quelles qu'en soient les origines culturelles ou histo-riques. Ce sont des invariants, fruits de toute pratique,et dont le méditant appliqué peut faire I'expérience.

Le premier pilier est le Samatha. Ce terme pali, unelangue antique de l'lnde, signifie « tranquille », « paisi-ble ». ll souligne que les méditations procurent un calmemental au fil de la pratique. Cependant, tout commecertaines techniques de relaxation moderne, le fait deméditer peut créer incidemment des moments inten-ses : accès d'angoisse, résurgences de souvenirs diffi-ciles, accélération cardiaque, montée d'émotions péni-bles, douleurs diverses. Mais, même si de tels espacestourmentés peuvent être traversés au cours d'une pra-tique méditative, il faut comprendre que le Samatha

désigne davantage un vécu durable au sein du corpset de l'esprit ou un bruit de fond serein dans son rap-port entre soi et le monde, qu'un apaisement passater.C'est un état d'être, qui perdure au-delà de la médita-tion. De façon pratique, le Samatha n'est pas propre à

une technique précise puisque plusieurs techniques ydonnent accès : diverses pratiques bouddhistes, diffé-rents yogas, et des relaxations dites « lalques »> (voir l'or-ticle de Ch. André poge 34).Toutes invitent à focalisersa concentration sur un objet précis. ll peut s'agir dela respiration, de la contemplation d'une flamme, d'unecouleur ou d'un objet, voire d'un oblet mental.

Le second pilier de toutes les pratiques méditativesest le Vipassana ou Vipashyana. Ce mot pali signifie« vision pénétrante ». On peut le rapprocher du termeanglais mindfulness, traduit en français par « pleine

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Les deux piliers de toute pratique méditative

méditer : sous l'apparence d'une tormuleinsolite ou d'une brève histoire qui semble

absurde (« Larbre qui tombe dans la forêtfait-il du bruit si personne n'est là pour 1'en-

tendre ? »),le Koan zen, proposé par le rnaî-

tre à son disciple, invite ce derr-ricr à s'extraire

des ornières et égarements de Ia rationalité

pour alier vers le satori : l'éveil.

#§^eËe"ed*uEsmæ

Peut-on dire que l'hindouisme est une reii

gion ? Plutôt un univers de pensée immen-

sément riche et varié dans ses sources, quiimprègne les dornaines philosophique, moral,

théologique, scientifique et cosmolclgique du

subcontinent indiel. Il partage avec le taoïsrne

Ie fait d'être une constellation vivante de mou

vements culturels extrêmement disparates,

bien davantage qu'un assemblage rigide et

unique de crclyances.

Au fil des siècles, l'hindouisme s'est éPa-

noui à travers plusieurs systèmes ou écoles

philosophiques, dont le yoga fait partie' Ce

terme désigne divers styles de praticlues,

faites de postures (asanas) du corps ou des

mains (nrudras), et de techniques Portalltsur le soulfle. De fàçon synthétique, ie

yoga vise une harnronie, utre réunification de I'ensenrble corps esprit.

conscience » et désignant une

technique de soins insPirée

par le bouddhisme et le Yoga,

créée à la fin des années I 970

par le biologiste américain JonKabat-Zinn.

La vision pénétrante, ou Vipassana, amène à perce-

voir les choses telles qu'elles sont et non telles qu'on

voudrait qu'elles soient,grâce à un esprit libéré de nos

croyances et de nos schémas de pensées aliénants, eux-

mêmes nés de nos Peurs. LeVipassana est aussi l'art

d'entrer dans une connaissance aiguë de notre for inté-

rieur :ce monde psychique, sensoriel et émotionnel qui

nous gouverne le plus souvent à notre insu. Outre

l'existence de plusieurs Pratiques Permettant d'expé-

rimenter la vision pénétrante (le zen, par exemple), le

La méditation à travers les âges

Dans la philosophie des yogas, le Prana tientune place centrale ; proche du Qi chinois,

ce concept aux limites imprécises imbiberait

le cosmos, mais circulerait aussi dans le corps

physique, notamment à la faveur de la prati-que du yoga. Toutefois, bien que le yoga soit

d'inspiration résolument hindouiste, il n est

ni une doctrine, ni une religion, ni un dogme.

ReâÊgË*m æu Eæieité ?

Est il possible d'être profondénrent chré-

tien, musulrnan ou juif et de pratiquel Zazeu

(la posture nréditirtive dans le bouddhisrne

zen), le Hatha-yoga indien ou de prendre

refuge clans le boucldha, sans Pour autant

déroger à sa t'oi prenrière ? Plusietlrs pratiques

nréditatives issues d'horizons lointains épou-

scnt avec bonher-tr Ia fbi de ceh-ri qui croit en

Dieu. Nlieux elrcore, la pratique inéditative se

révèle être ul excellerrt adjuvarrt pour retlfor-

cer ure tbi i,acillante, quelle que soit Ia reli

gion dolt eile se réclarne, conllne Par s)'ner-

gie. C'est dans un article clu Monde des

ReLigiorrs tlue cles chrétiens pratiquants, horn-

nles ou fet-nnres d'Eglise, ont raconté avec

énotion leur récclnciliation avec leur foi et la

pensée cle Jésus, grâce à la pratique du boud-

dhisrne. Par ailleurs, par l'expérience rrrédi-

tativc le pratiquant peut s'approcher

motVipassana désigne aussi

une technique de méditation

spécifi que d'inspiration indo-

birmane ;son origine se Per-drait dans le fond des âges de

l'lnde, mais elle aurait été redécouverte Par le boud-

dha historique lui-même. ll y est demandé de porter

une attention assidue et dépassionnée aux sensations

corporelles qui vivent, évoluent et meurent instant

après instant à la surface de notre corPs et dans nos

viscères. Cette approche apparemment simple demande

une pratique assidue et minutieuse. A celui qui la pra-

tique ainsi,leVipassana Permet de développer une qua-

lité mentale d'une immense richesse :l'équanimité (ou

égalité d'humeur, détachement et sérénité) face aux

choses et phénomènes éPhémères.

Pe

o

N

@ Cerveau & Psycho ' n" 52 luillet - août 20 I 225

oss ie r

I Bouddha a énoncé les principes nécessaires à adoI pour parvenir à soulager la souffrance humaine.

11 li t r irli,

R. Hanson,Le cerveou duBouddho, ÉditionsLes Arènes, 201 I .

F. Rosenfeld,Méditer,c'est se soigner,Editions Les Arènes,2007

Jésus, Bouddho :

ce qui les ropproche,ce qui les sépore,in Le Mondedes Religions,n'l 8, iuillei 2006.

' I r1,r,

www mindondlife.org

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- inciclcrlnrent ou intentionnellerrent - dcressentis d'union extaticlue, cl'ur.r principe cos_rlique uniflant et nragnaninre, cl'amour cont_prissionuel pour tous les êtres, ctc., ce clui serapproche cle l'expérien ce religie use.

PoLrrtant, dar.rs le cas du ltoucldhismc, rieln'évoclue l'existence d'un être suprrênrc, otrd'une transcerrdirrrce. [)ans ccrtains cle scsmcssages d'origine, il se propose, rappelons-le, cle rcr.r.réclier aux tounleltts par la prat.iquede règles sinrples, r,ruiverselles et inclépenclan-tes de toute iutentiun rcligieuse. Dès lors, est-il indispensablc d'avoir unc cr()yauce lrourpratiqtrer la rléclitation ? Heureuseu.rent, non.Il n'est pas trécessrrire cl'être religieux poLrrméditer puisqLre le boucldhisme, noLls l'avonsdit, s'appuie sur I'enseignenlent d'uu sintplehnrlar'rr ayant atteint rrne grande sagcsse ;

quant au tirclïsnre, il s'inspire d'un mouvement naturel, rtrais ne lui donne ni nom niforrne, etc. C'est pourquoi la plupart desméditations, bien c1u'inspirées par cles nrou-vements spiritualistes, peuvent s'adapter i\l'hornrrre nroderne, qu'il soit lalc ou croyant.

Méditer ëst-il utile ?

A cette cluestion pratique, plusieLrrs r.épar-ties. La plus ptrre cor-rsiste ii clire que.. . nrédi-ter ne cloit servir à rien I Car toute pratique dcn-réditation colrporte une part de non-connaissance, cle non-attente, d'aléatoire.Méditcr intplique cl'ignorer ce qui vient ar_r

devant cle soi, dc ne rien envisager. Le mouve-ment clui arrinre celui qr-ri ntédite est, cur.ieu_sernent, un nolt-ntouvetltellt : lrne intentionde non-intention I C'est cc que les taolstesappellent le Wu-wei : l'agir sans agir. Cette pos-ture d'esprit, subtile et paradoxale, le rabbinNirhmarr cle Braslav l'évoquait au X\/lltc siècledans cette uraxir-ne sage et joyeLrse : u Giirde-toi bien de dentander ton chemin, tr.r risque-rais de lte pas pouvoir 1e pcrdre I »

l)ourtant, dans plusieurs ntouventerrts spi-ritLralistes existent cles prir.rcipes r.nédicinauxtrès claireurent e(noncés. Le Qi du taoTsnte ins-pire les principes cle nrédecine chinoise ; leboLrddha histoliqr,re cherchait Iui-nrênte un

rentc\de aux soufll-ances de ses fières hun-rair-isi\ trar.ers ses quatre nobles vérite(s ; enfin, lePrana (énergie vitale) hindouistc contmuni_que son souffle aux differents courants deyoga. Ccux qui pratiquent les techniqr-resn.réclitatives savent clepu is pl usieurs clizai r.res

cle siècles qr-r'elles ont des actions bénéfiquessut'lc c()tps ct I'e.prit.

Science et méditationPlus près cie rrous, l'Occiclent ruoclerne se

penche depuis cluelques décennies sur lesbéne<fices rne<clicaux et psychol«rgiclues cles pra-tiqr.res ntéditatives. Grâce à cles oLLtils d'éva-Ir-ration scientilirlue (rlesnres de parar.nètresphysiologiqLres, outils statistiques, irnageriecérébralc foncticlnr.relle, analyses cle sang, élec-troencéphak)grarnnte, élect«rcard iogranlne,etc.), de très nonrbreuses étndes internatio-nales révèlent les bienfaits fondantentaux depratiques anciennes ou nroclernes. C'estnotalnntent 1e cas de la r-néclitation ditc depleine conscience et cle scs dérivés.

Science sirns conscience n'est clue rr-rine del'ânre, ciisait Rabelais. Aujourcl'hLri, ccttealliance encore fi'aîche entre la science dunronde occicler.rtal et la conscience de.s tradi-tions spirituelles donne lieLr à cles partagescnrichissants por-rr lcs der_rx clisciplines. C'estdans cet élan qu'à la fin cles années l9g0 lutcrééIe MinLl artLl Life Institutc (ou Institut deI'esprit et de [a vie) sous l'égide clu l4e tlalaTlar-na, de Varcla, et de l'hontme d'at1àires anté-ricain Aclan.r Engle.

Selon les ternres cle Varela : « Les 2 -500 anscl'his toire du bo uddl-risrne avaient beaucouprà oflrir aux neuroscientitiqLres ». Depuis sacréation, l'Ltstitut propose d'ép:rnouir le dia-logr-re ertre le boudclhisrre et les sciertifiqtresouverts i\ la ntéditatiun par des échanges ..ltreces deux rlondes, et en participant à tles cltu-des scien titicl ues rap proc hirn t d r. s nt ridi t.r r.rtscle clifférents bords et cles sprécialistes tlesscietrces de l'esprit ct de la santci. .\u grci deces rappr«rcheurents, chatlue di:ciplinetéconde cle sa sagesse Ie tcrreaLr tcrtil., de i'au-tre. l)ès lors, oui : ntécliter cst Lltile. . I

@ Cerveau & Psycho - n" 52 juillet - août 20 I 2

Le cerveau méditatif

Dossier

le cerveau de personnes se livrantà la méditation est étudié pardes méthodes scientifi ques.

. Les méditants les plus expérimentés :

présentent une activité cérébrale :

de mieux focaliser leur attention. :

En Bref, Le cerveau méditatif estle siège d'une activité spécifique,qui favorise la régulationdes émotions et la compassion.

O Cerveau&Psycho - n'52 iuillet' août 2012 27

Les neurosciences mettent en évidence

Ies changements cérébraux qui interviennentpendant la méditation, et qui favorisentla conscience, l'attention et la compassion.

oss ier

l. lJimageriecérébrale

de personnes

adeptes des pratiques

méditatives (ici,

le méditant tibétainMingyur Rinpoche)

a permis de repérerdes corrélats neuronaux

de la méditation

et assignée à l'étude quantitative des l<-ris dela matière. La religion ou la spiritualité ontété reléguées au domaine de la subjectivité etde l'expérience qualitative, choses non observables et non mesurables. Or voici que lascience occidentale pose son regard sur ces

phénomènes subjectifi, vécus de l'intérieurà la première personne, qui sont le propre des

pratiques spirituelles, dont la rnéditation. Cerapprochen.rent remonte à la rencclntre duneuroscientifique français Francisco Varelaavec le dalaï-lama, en 1983. Varela décida decréer un forum oii le dalaï-larra et d'autresméditants pourraient échanger leurs idéesavec des scientifiques de renom.

C'est ainsi qu'au mois d'avril de cetieannee s'est tenu à Denver, aux Etats Urris, lepremier symposium internaticlnal consacréà l'étude des « sciences contemplatives ,. I)escentaines de neuroscientifiques, psychoio-gues, ciiniciens et rnéditants venus de lab<l-ratoires de recherche prestigieux y onl partagé les résultats les plus récents sur lesmécanisrnes cognitifs et neuronau-x sous ten,dant les pratiques contemplatives, ieurs effetssur Ia santé mentale et physique et les appli-cations possibles pour I'éducation.

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2" L'anrygdalecérébrale (en bleu)

est molns acûve

chez des méditants

soumts a

des distracteursémottonnels alors qu'ils

se concentrent sur

un objer : la producuond'érnotions est

tenipérée er permerd'atteindre ia smbilité

du ressenti émouonnel

Le temre de rnéditatiorl recouvre une diver-srté d'cntraîne[lents mentau-{ allant des tech-niques to urriées vers la rela-xatiorr jusqu'à des

exercices visant à atteindre, par exernple unsenti-nrent prclford de bien-être. II s'agit d'unefànrille de néthodes corrplexes de régulationLlcs enlutioils ct dc l'attcrrtit-rrr, rnises etr (f uvrcà des firrs variées, dont Ia coupréhension deia nature des phénomènes mentaux et l'équi-libl< tlcs allce ts. Nuus nous Lunccntrerons icisur les rnéthodes d'origine bouddhiste, quisorlt pratiquées aujourd'hui dans un contextet raditiorrr rel ou se. ulier.

Que disent les texes bouddhistes ? D'abord,que la méditation doit viser à élirniner Iasouttrance d'origine rneltale (ruminations,énrotiorrs légatives) ; que toute méthode effi-cace en ce sens doit introduire des changerlerrts daüs les états érlotionnels et cognitifs,notarnrilent dans les habitudes centrées sursor ; enfin, que ces changements prennentcomme point de départ i'observation détail-lée des états émotiolnels et une compréhen-sion des phénonrènes rrrentaux. Mais com-Inent y pârvierit-on, et conlnlent le cerveauparticipe t il à cet objectif ? Les neuroscien-titiques se sont surtout intéressés à trois typesde méditation : la niéditation par atterrtiontocalisée,1a surveillance ouverte (ou pieinetrJIr:ricllcc I ct la \oilrpdssion.

à-" æÊËæe=€§g>c= $æe* E Ë sæ*

La méditation par attention focaliséeconsiste à se concentrer sur un objet (flamrne,respiration), et à la stabiliser afin d'apprendreprogressivenrent à réguler son attention.f objectif est d'apaiser I'esprit, de réduire les

distracrions et d'accéder à ul état de surveiliance de ses processus intentes, qr-r'il s'agisse

(9 Cerveau::. Psycho - n" 52 juillet - août 20 l2

Amygdole

Le cerveau méditatif

d'émotions, de pensées ou de perceptions. Aufil de la pratique, cette capacité de surveillance

permet de basculer vers le second type de pra-

tique méditative : la surveillance ouverte, que

les bouddhistes nomment Vipassana, et que

nous appelons méditation de pleine conscience.

Cette dernière consiste à demeurer dans

l'état de surveillance évoqué, mais sans foca-

liser son attention sur aucun objet en parti-culier. Il s'agit ici d'accéder à ce qui fait larichesse d'une expérience subjective : l'inten-sité de nos perceptions - leur valeur émotion-nelle, le schéma cognitif à l'æuvre (quel type

de pensées apparaît, comment elles s'articu-Ient, etc.) - ou f implication du soi autobio-graphique dans cette expérience (afflux de

souvenirs, notamment).Ces deux premiers types de pratiques sont

souvent couplés à une troisième : la médita-

tion de compassion ou d'amour-bienveil-lance, qui vise à cultiver des comportementset attitudes altruistes, des affects positifs, et à

inhiber les tendances centrées sur soi.

Attei ndre l'éq uan imÊté

Si vous avez uî jour l'occasion de vous

asseoir dix minutes dans un endroit tran-quille, sans rien faire d'autre que d'accorder

une présence attentive aux sensations Pro-duites par votre respiration, il vous sera alors

aisé d'assister au flot turbulent et involontaire

des pensées et des émotions' Méditer c'est en

grande partie prendre conscience de ce flux :

les facultés d'attention qui permettent ce

regard intérieur se développent graduelle-ment, de même que les capacités de régula-

tion émotionnelle.Les personnes qui s'adonnent régulièrement

à la méditation modifient l'actiüté de leur cer-

veau d'une façon qui peut être observée gràce

aux techniques d'imagerie cérébrale. Dans

notre équipe de l'Université du Wisconsin,nous avons ainsi examiné le cerveau de per-

sonnes pratiquant assidttment la méditationd'attention focalisée. Ces personnes ont en

moyenne 10 000 heures de méditation à leur

actif. Quand on leur fait entendre des sons

angoissants tels que des voix exprimant lasouffrance, on constate que l'activité de leur

amygdale cérébrale,zone cruciale dans la pro-.duction

d'émotions diverses, mais surtout de

l'angoisse, de la peur ou du stress' est notable-

ment réduite par rapport à des personnes

@ Cerveau & Psycho - n' 52 iuillet - août 20 I 2

techniques de méditation sont auiourd'hui utilisées en milieu

hospitalieri et leur efficacité clinique a été bien établie dans cer-

tains champs d'application, notamment dans le cadre de la dépres-

sion et de la douleur chronique.Ainsi, le psychologue cogniti-

viste Zindel Segal et ses collègues, du Centre de I'Ontario pour

I'addiction et la santé mentale, ont suivi 84 suiets déprimés ayant

pris des antidépresseurs iusqu'à rémission de leurs symptômes'

À la fin de cette première phase, un tiers poursuivait le traitement

antidépresseur, un autre tiers recevait un placebo et le dernier

tiers suivait des séances de thérapie cognitive fondées sur la médi-

tation de pleine conscience. Un an et demi plus tard,30 pour cent

des méditants de pleine conscience avaient rechuté, autant parmi

les personnes du groupe traitées par des antidépresseurs, mais

cette proPortion atteignait 70 pour cent Parmi ceux qui avaient

reçu un placebo. On en déduit que la pratique de la pleine

conscience serait aussi efficace que les antidéPresseurs pour évi-

ter les rechutes.Les effets positifs de la méditation sur la santé s'appuient sur

une modification de I'activité cérébrale. Le cas des douleurs chro-

niques a été étudié, notamment par le neuroscientifique Fadel

Zeidan et ses collègues, de I'Université de Caroline du Nord' lls

ont mesuré l'activité cérébrale de suiets méditants recevant des

stimulations douloureuses. Chez ces Personnes, I'intensité Perçue

de la douleur diminue de 40 pour cent et son caractère désagréa-

ble de 57 pour cent Par raPPort à des suiets contrôles. Cette dimi-

nution de l'intensité de la douleur est associée à une augmenta-

tion de I'activité du cortex cingulaire antérieur et à une baisse de

I'activité de I'insula antérieure, des régions intervenant dans la régu-

lation cognitive de la douleur' Ainsi, ce sont bien des mécanismes

cérébraux qui entraînent une diminution de la perception de la

douleur. De surcroît, une activation du cortex orbitofrontal leur

permet de iuger la douleur moins << désagréable >>'

Le cortex cingulaire

antérieur et I'insula

antérieure sont des aires

cérébrales impliquées

dans la perception

de la douleur.

Chez une personne

qui souffre, le cortexcingulaire antérieur est

plus activé en condition

de méditation (en hout,

à droite). En revanche,

chez la même personne,

la méditation inhibe

l'activité de l'insula

(en bos, à drorte).

29

Comment Ie cerveau soigne le corps

a

oss ie r

Prisede conscience

du vogobondoge

Détochementde l'ottention

3. Un cycle cognitif se met en place dans la méditation par attentionfocalisée :à un moment, le méditant voit son attention vatabonder

vers des pensées par lesquelles il se laisse distraire (état l),puis il prendconscience de cette dérive (état2),et détache son attention de ce qui I'a

distrait (état 3). Enfin,il refocalise son attention sur la consigne initiale (érat4).

n)ayant pas cette pratique (voir la figure 2). Laméditation cultive donc l'équanimité, lafaculté de maintenir un climat émotionnel sta-ble, propice à la focalisation de l'attention.

Comment se pratique l'attention focalisée ?

Le novice choisit un endroit calme, pour nepas subir de distractions externes, une posi-tion assise à la fois détendue et alerte, pouroptimiser l'état de vigilance, et un objet sim-ple d'attention, par exemple les sensationsproduites naturellement par la respiration, surIequel le sujet doit essayer de se concentrersans se laisser distraire. Si, comme c'est tou-jours le cas, il prend conscience qu il s'est laissé

distraire au bout de quelques minutes, il doitalors détacher son attention de l'objet de ladistraction et la ramener vers la cible initiale.

La neuroscientifique Wendy Hasenkamp,de l'Université d'Atlanta, et ses collègues ontrécemment cherché à identifier par image-rie cérébrale les réseaux fonctionnels sous-

.\

q.oÈ

9

o

U

tendant la pratique d'attention focalisée. Dansle scanner, les participants s'adonnent à cetexercice tout en signalant la fin de chaque épi-sode de vagabondage de I'esprit en appuyantsur un bouton. Les auteurs de cette étude ontidentifié quatre phases durant ce que nousnommons un cycle cognitif : un épisode devagabondage de l'esprit, un moment de prisede conscience de la distraction, une phase deréorientation de l'attention et une phase d'at-tention soutenue et focalisée. Chacun de ces

épisodes est lié à l'activité d'un grand réseau(voir la figure 3). La première partie du cycleest associée à l'activité d'un réseau cérébral ditpar défaut, qui fonctionne lorsque l'on estabsorbé dans ses pensées. Ce réseau regroupenotamment plusieurs régions médianes dansle cortex préfrontal et cingulaire.

te eyele des états rmentaux

Le deuxième épisode du cycle est associéà la prise de conscience de l'état de distrac-tion. C'est une capacité essentielle dévelop-pée par la méditation, qui fait intervenir lafaculté d'introspection et certaines zonescérébrales telles que l'insula antérieure, le cor-tex somatosensoriel et le cortex cingulaireantérieur. Ces deux régions forment ce quel'on nomme le réseau de saillance, qui sous-tend la perception d'émotions et de senti-ments en réponse à des événements ayant unepertinence particulière pour l'organisme, qu ils'agisse de stimulus extérieurs (effrayants, parexemple) ou internes (perception de la dou-leur physique). Lorsque ce circuit de saillanceentre en action, il interrompt d'autres méca-nismes cérébraux telle la circulation libre depensées sous-tendue par le réseau par défaut(premier épisode du cycle). D'ailleurs, lors-que l'activité du réseau de saillance augmente,celle du réseau par défaut diminue.

Les troisième et quatrième épisodes du rycleméditatif sont respectivement associés au faitde o reprendre » son attention en la détachantdu stimulus distracteur - ce qui est permis parl'activité du sillon frontal supérieur et du sil-

30 @ Cerveau & Psycho - n'52 iuillet - août 20 I 2

Refocolisotionei mointien

de l'ottention

Le cerveau méditatif

lon intrapariétal - et au maintien de la consi-gne de méditation, une consigne prise encharge par le cortex préfrontal dorsolatéral.

Quel est l'impact d'une telle pratique régu-lière sur l'attention ? Nous avons étudié, dans

l'équipe de Richard Daüdson à l'Université duWisconsin, l'impact de trois mois de médita-tion intensive (huit heures par jour de médi-tation par attention focalisée) sur des partici-pants. Lors d'un test, les sujets recevaient des

écouteurs qui diffrrsaient des sons à une fré-quence donnée auxquels étaient mêlés épiso-

diquement des sons légèrement plus aigus. Ils

devaient se concentrer sur les sons diffi,rsés dans

une seule oreille du casllue, et repérer chaque

émission d'un son parasite. On enregistrait leurtemps de réaction ; cette tâche, très répétitive,entraîne facilement des épisodes de distractionqui se traduisent par une grande variabilité des

temps de réaction. Nous avons constaté que les

méditants présentaient moins de variationsdans leur temps de réaction, Que les oscillations

électriques des neurones des zones antérieures

du cerveau étaient plus régulières d'un essai à

l'autre, et que l'attention était plus stable.

Développer son attentionDans une autre étude, nous avons observé

I'activité cérébrale de méditants débutants ouconfirmés en attention focalisée. Les médi-tants confirmés présentent une augmenta-tion d'activité dans de multiples régions ducerveau impliquées dans l'engagement de l'at-tention (cortex visuel), son maintien (cortexpréfrontal dorsolatéral) et son orientation(sillons frontal supérieur et intrapariétal, voirI'encadré ci-contre). Toutefois, nous avons

constaté qu'il existe des différences selon le

degré d'expertise des méditants. Si ces médi-tants confirmés - totalisant 19 000 heures de

pratique - présentent bien une augmentationd'actiüté de plusieurs aires, les experts -, ceuxqui ont encore davantage de pratique, jusqu à

totaliser 44000 heures de pratique - voientcette activité cérébrale baisser !

Une telle évolution de l'activité cérébrale(d'abord une hausse, puis une diminution)en fonction du degré d'expertise s'observedans la plupart des domaines d'apprentis-sage. Au terme d'un entraînement intensif de

méditation par attention focalisée, la per-sonne est si experte qu'elle ne doit presqueplus fournir d'effort pour focaliser son atten-

@ Cerveau & Psycho - n' 52 juillet - août 20 I 2

tion. Les cxperts préselltent également ulelioindre activation de Ieur arnygclale, qui leurpenlret cie s'allianchir de leurs réactiorrs érncr

tiotrttcllcs. L)'autrcs cr.pet ictt.es nrut)lrctlt qtlcles rnéditants experts parvielnent à inhiberdes réactions autorrratiques dans certains tests

psychorn oteurs, conduisant les psychologues

à évclquer uure « déautornatisation , des éruo

tiorrs et des comportetr]ents.

Ë-æ << pr*s*fiË* ætt*m€Eu* cr

Ainsi, se fbcaliser sur un aspect local duchanrp de l'attention (par exemple les sensa

tiurrs dc la rcspiratit-,rr ) Lon5tituc utt excrrireutile pour éviter de se laisser distraire. MaisIa concentration seule 11'est pas sutllsantepour rnaîtriser l'attention et réguler les éruo-

tions. Le savant tête en l'ail sait se concetttrerd.r hcurcs srJr scs equatirttts, II)di\ pcut ett'(égalernelt négligerrt et distrait dans ies acti-vités quotidiennes. La nraîtrise de l'attelticlnpasse donc aussi par une sur-veillance glo-bale, détachée des routines éruotionnelles,

eerveau de nréditants expertsLe cerveau de médiants confirmés, lors d'un test d'attention

focalisée sur un objet visuel, est plus actif dans des régions impli-quées dans I'engagement de I'amention (cortex visuel), son main-

tien (cortex préfrontal dorsolatéral) et son orientation (sillons

frontal supérieur et intrapariétal). Pour les experts encore plus

entraînés, I'activité tend à diminuer dans ces aires : la focalisation

et le maintien de I'attention n'exigent presque plus aucun effort.

Sillon frontql, supérieur :

tJl reirir;ill;: üe I uiiË:iijJil Sillon introporiéiol :

Crieniciicnde l'ofenTio;r

visuelIooqo

Coriex préfrontol dorsolqtérol :

,irâi;:r :i icir r-ie i' L:t'*ri,.;r,

oss ie r

ver une forme plus ouverte de contrôle atten-tionnel, où le méditant ne contrôle plus expli-citement la cible de son attention.

Les méditants s'ouvrent alors à I'expérienceau sens large, c'est-à-dire à tout ce qui se passe

en eux et autour d'eux. Les manifestationspeuvent en être agréables ou non, le tout étantde les aborder avec curiosité en observant demanière détachée et sans chercher à contrô-ler émotions ni pensées. Cette forme de médi-tation serait comparable à la pratique du surf,or) l'on glisse sur les vagues en épousant leursmouvements spontanés. L attention doit se

laisser porter par les vagabondages de l'es-prit, sans chercher à lutter contre eux ou à lesinfléchir. Par opposition, la pratique de l'at-tention focalisée serait comparable à la voile,ou I'on maintient le cap indépendammentdes fluctuations du vent et des vagues.

Cl i gnennemt d'âttentionDans la méditation de pleine conscience,

le pratiquant devient moins réactif à ses pro-pres émotions, il gagne une conscience plusclaire de ses processus mentaux, ce qui offreun moyen de les transformer, et conçoit plusclairement sa propre identité, son passé et deson avenir possible.

Nous avons cherché à savoir, avec HeleenSlagter, de l'Université d'Amsterdam, si unentraînement à cette forme de « surveillanceouverte » (ou open monitoring) pendant une

cognitives et motrices qui émergent de l'ac-tivité de l'esprit.

Ce mode d'attention plus global est bienconnu des musiciens et athlètes experts quidisent souvent livrer leurs meilleures perfor-mances lorsqu ils se trouvent dans le « flux »

de leur expérience sensorielle, émotionnelle,attentionnelle et cognitive. Il s'agit donc, dansla pratique de la pleine conscience, de culti-

pratique de pleine conscience, pouvait chan-ger la capacité à maintenir cette forme d'at-tention globale et non réactive. Nous avonsutilisé la tâche dite du clignement attention-nel. Le participant doit détecter deux chif[resprésentés très rapidement parmi une succes-sion de lettres. Si le second chiffre apparaitenviron 300 millisecondes après le premier,il passe inaperçu, comme si la personne avaitcligné des yeux. Si le second chiffre apparaîtaprès un délai de 600 millisecondes, il peutêtre détecté sans difficulté.

Le clignement de I'attention reflète la limi-tation des ressources attentionnelles : lesrégions frontales du cerveau étant toujoursen train de mémoriser le premier chifÊre, elles

ne sont plus disponibles pour détecter lesecond. Lallocation des ressources attention-nelles au premier chifte s'accompagne d'uneonde cérébrale nommée P300, qui reflète l'ac-tivité d'un réseau regroupant des zones fron-tales, temporales et pariétales, et que l'on peutrecueillir grâce à des électrodes placées auniveau pariétal postérieur (voir la figure 4).

Nous avons fait I'hlpothèse que cette formed'attention globale pourrait aboutir à uneoptimisation des ressources attentionnnelles,et donc à une réduction du clignement atten-tionnel. Nous avons mesuré les performancescomportementales et l'onde P300 avant etaprès une retraite intensive de méditation.Chez les méditants, nous avons observé un plus

@ Cerveau & Psycho - n" 52 iuillet - août 20 I 2

4. Les courants électriquesproduits par le cerveau révèlent

que l'attention est plus fluide et dynamique

après une longue pratique de la méditation.

32

faible clignement attentionnel (ils voyaientplus souvent le second chiffre) et une onde

P300 plus faible. Ainsi,la pratique de la médi-tation ouverte, ou de pleine conscience, per-

met à l'attention de ne Pas rester « bloquée »

sur une sensation, une pensée, une Percep-tion, et d'être plus disponible pour tout ce quipeut survenir dans le flux de la conscience.

Lattention est moins captive de ce qui peut la

détourner de son but.

La voie de la eompassion

Le troisième type de pratique méditativeconsiste à développer un état émotionneld'empathie, d'affection et de compassion. Le

but de cette approche est d'étendre les senti-

ments de bonté, d'empathie et d'amour à

autrui. Iiéquanimité, cultivée dans la pleine

conscience, est considérée comme nécessaire,

car une vraie compassion suscite forcémentdes émotions fortes et potentiellement désta-

bilisantes, qu il s'agit de tempérer. Également,

parce qu il faut parfois compatir avec des êtres

qui vous ont offensé ou que vous n aimez pas.

En 2008, nous avons étudié l'activité du cer-

veau de méditants en pratique de compas-

sion, et avons constaté une activation supé-

rieure de deux régions cérébrales en réaction

à des sons de voix humaine exprimant ladétresse. Ces régions sont l'insula antérieure

et le cortex cingulaire antérieur, tous deuximpliqués dans la perception empathique de

la douleur d'autrui (voir la figure 5). Dans la

méditation compassionnelle, le cerveau

devient plus empathique vis-à-vis de la souf-

france des autres.En outre, Ies experts les plus chevronnés

présentent une hausse d'activité dans le cor-tex somatosensoriel secondaire, qui traite les

sensations corporelles, suggérant que les médi-

tants experts ressentiraient dans leur chair la

souffrance d'autrui. Enfin, la pratique de laméditation compassionnelle produit une aug-

mentation d'actiüté dans des zones telles que

la jonction temporo-pariétale, le cortex pré-

frontal médian et le sillon temporal supérieur,

tous trois mobilisés lorsque nous cherchons

à nous mettre à la place d'autrui.La méditation, sous ses formes variées, est

une exploration de la nature de l'esprit. Elle

pose, sous une forme nouvelle, une question

ancienne : qu est-ce que la conscience et la sub-jectiüté ? Avec Richard Davidson et Matthieu

@ Cerveau & Psycho - n'52 iuillet ' août 20 I 2

Ricard, nous avons examiné cette question en

collaboration avec des méditants bouddhis-tes experts. Nous avons mesuré le degré de syn-

chronisation des signaux électriques produitspar leur cerveau en des sites distants de plus de

dix centimètres, partant de f idée acceptée

aujourd'hui, selon laquelle la synchronisation

de régions cérébrales distantes est un des cor-

rélats essentiels de la conscience, de par sa capa-

cité à unifier des informations diverses dans

une expérience globale.

Méditation et eonscien(e

Nous avons ainsi observé des synchronisa-

tions très nettes des ondes Samma (entre 25 et

45hertz) chez des méditants totalisant jusqu à

50 000 heures de pratique, ce qui nous conduità entrevoir l'état de méditation comme unmécanisme d'intégration globale des actiütés

de différentes régions cérébrales. Le niveau de

synchronisation atteint par ces experts, notam-

ment entre des régions frontales et pariétales,

est nettement supérieur à celui d'un cerveau

« normal » au repos. Peut-on en déduire que

l'expérience consciente est améliorée chez ces

individus ? À l'heure oùr l'on parle beaucoup

de cerveau augmenté, voici peut-être une voie

plus prometteuse, sans pilules ni implants neu-

ronaux, pour développer son état de conscience

vis-à-vis de soi et du monde environnant. La

philosophie ne manquera pas d'observer qtiunsurcroît de conscience est souvent s)'nory''rne

de meilleures décisions, de respect, d'apaise-

ment et de non-violence. Espérons que la« science de la sagesse », profitant des savoirs

conjugués des méditants et des scientifiques,

saura gagner les esprits ! Tout en gardant à l'es-

prit que la sagesse, en science, consiste à éva-

luer des hypothèses rigoureusement testées et

à répéter les observations. I

Le cerveau méditatif

et le cortex cingulaire

5. L'activitédu cerveau

de personnes pratiquant

la méditation de compassion

est supérieure dans l'insula

antérieurs, impliqués

dans la perception

de la douleur d'autrul.

-::. I :.a.: : -. | : :r.. :-. ;. : : :..

W" Hasenkampet al., Mind wondering

ond oltentîon durîngfocused meditotion : ofineç,roined temporolonolysis of fluctuotî ng

cognitîve stotes,

in Neuroimoge,vol 59(1),

pp 750-760,2012.

J.-P. Laehaux,Le cerveou otlentif ,

OdileJocob,20l 1

A, Lutz et al.,Mentol troining

enhonces otlentionolstobilîty : neurol ond

behovîorol evidence,in J Neurosci ,

vol.29142),pp. 1341 8-27,2009

M, RÉeard,

L'ort de lo méditotion,Nil Éditions, 2OO8

J. Brefczynski-Lewiset al.o Neuro/ correlotes

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A. Lutz et al,,Longlerm medrfolors

self-tnduce high-omplitude gammcsynchrony durtng

menfol procttce, in

Proc Nol/ Acod Sc;

uSA,vol l0l(46)pp 1636973 2Aaa

22

oss ier

tluvuir regarder Ie soletl se

levcr ou se coucher charlucjour, ailrr dc rrous relicr à ulphérrotnèrre uriivcrsel, pleserveralI notre sante Pout

toujours » l)arrs son petit trarté, la Vic s,lrsprincipes, rédtgé dans lcs arurées 1850,1'etlivain améticain Henry Davicl Ihoreau rappelait l'ule de ses convictions : l'homllre rr tourà gagrier à se rapprocher d'une vie plr-rs

conterlrplative. (-c poiut de t,Lre est r1 r,éritiépar les rechcrches scicntitiqries et rnédicaies -(

Regardons y de pius près.

Qu"e*Ë-ee {ëM* Ër}*diË*il fLa nréditation est urre dértrarchc dans

laquellc ulr t(,Lll ItL sutr .rtt(rrtiuD r (r5 Lilt Lcltaitr lclrnbre de l,'ariables corporelles, scrrscr

rielles rt rnentales. Ce nrouvemclt dc ['cspritest voiolrtairc : ruênre si des états prcirhes del'état rnéditatif pcuverrt naitre spontalénrerrten nous (devant un tèu de bcl:is ou les l,aguesde l'tlteart ). uc riUc I ol lr()nutr(, rrredrtatiuurelève d'exercices délibérés, prolongés et répetes, rcpresctrtdttt un clltrdltcll)(llI dc I cs1,r rt.

Le mot rlléditation est trorrlpeLrr, à plusie urs titres. D'abclrd parce qu'rl est perçu parbcautoUp de pcr.orrncs LuullllL Uns d\ ti\ iteinteliectuelle (rétléchir protbndénterrr sur urlsujet), alors que la plupart des pratiqr-Lcs niédi-tatives passellt surtout par le corps [.trsi_Litc,

parcc quc ce n1L)t rrc desigrre pas ure dénuu

che urriqr-re, miris urre multitude de pratiqr-res :

certaitres consistelt à focaliser sot) attentiolt,d'autres au contraire à l'ouvrir largerner-rt ;

partois méditer requiert l'iuimobilité, partbisie nouvcrnent. Enlin, parce qu']on associer"olontiers lii méditation à un ensemble decortvictiorrs religie uses, alors qu'ellc peLrt parfarterrrent se pratiqLrer dals un caclre IaTque,

philosoplriquc ou therapcutiquc.Pour autarrt, il existe un certain nornbr-e de

poilts colnnlurls à tuutes les pratiques quel'on pounait qualilier de u rnéditatives » : ces

ser d'agir, pour s'accorder ur) ternps de retrait,clc silerrce, de lentcur, de continuité ; durantce ternps de silcnce, stabiliser son attention ;

rre pas réagir aux stirluiations externes(bLuits) ciu internes (pensées, éruotions) ;

ubs<[rcl rc: stirrrulatiorrs irrIcrrrcs ou cxtcrr)cs avec attertion et détachernelt.

Qu'attendre de cette démarche ? Dans tou-tes les approches rtréditatives, la traditionrcconrnrancle de ne justetnelt rien attendred'irunédiat. Mais de simplenrent voir ce quipeut énlergcr de cette atritude inhabitueilepor.u la plLLpart des gens (nous sommes pres-quc toujours engagés dans des actions ou des

distractrorrs, raretl)ent « atteutits à ne rienl.iirc ', ). luus lcs nraltrr's et crrseigrrarrts rrr.

rnânquent pas de racor)ter à leurs disciplesunc toule d'historres à ce propos. Ainsi, cellede cet applerrti qui denaldait combien detcrrrps il lui 1àudrait por-rr savoir rnéditer :

n Cinq arrs ,,llLi répoldit son naitre de zen.

@ Cerveau Sr Psycho - n" 52 juillet - août 20 I 2

Méditer; pour une vie

34

« Et si je mets les bouchées doubles, si jemédite sans arrêt ? » « Alors, ce sera dixans. . . »

Ou encore, dans la tradition chrétienne, ce

conseil de Saint-François de Salles : « Unedemi-heure de méditation est essentielle cha-

que jour, sauf quand on a une vie très occu-pée. Dans ce cas, une heure est nécessaire. »

IVTéditer psur se soigner

En réalité, des attentes existent bel et bien,et elles divergent selon les contextes : pourles méditations religieuses, c'est bien srhr unétat d'éveil spirituel ou de lien avec le divin ;

pour les méditations philosophiques, c'est unesprit clairvoyant, au-delà du voile des faci-lités et des apparences ; et pour les médita-tions psychothérapiques, c'est un bénéficepour sa santé, physique ou mentale.

Les vertus thérapeutiques de la méditationsont pressenties depuis longtemps : dans les

fondements du bouddhisme, la libération de

la souffrance est ainsi un enjeu central. Il est

donc logique que la méditation intéresseaussi le monde de la médecine et de la psy-

chologie. Le mot méditer vient d'ailleurs dulatin rneditarl, fréquentatif de mederi, « don-ner des soins à »...

De très nombreuses études à ce sujet ont été

conduites auprès de populations variées. Chez

É

Ë . Méditer consiste à prendre du recul, à se plongerdans le calme et le silence, et à prêter attention,sans y réagir, à ses sensations corporelles et ses pensées.

r Cette activité améliore la santé. Elle permet de lutter contrele stress, la dépression, I'anxiété ou des maladies auto-immunes.

r Méditer module I'expression de certains gènes, ce qui confirmeles liens entre le fonctionnement de I'organisme et le psychisme.

@ Cerveau & Psycho - n" 52 juillet - août 20 I 2 35

oss ie r

des sujets non malades, les pratiques médita-tives améliorent globalement les variables de

santé, tels le niveau de stress, les réactionsimmunitaires, la tension artérielle ou la tolé-rance à la douleur. Chez des personnes souf-frant de diverses pathologies, la méditationaméliore systématiquement et significative-ment la qualité de vie : c'est le cas pour la sclé-

rose en plaques, le cancer du sein, les pneu-mopathies obstructives, et de nombreusesdouleurs chroniques. On a aussi constaté unerégression des symptômes dans diverses

pathologies, telles que l'hl.pertension artérielle,

le psoriasis et les maladies auto-immunes.La méditation est probablement bénéfique

par son impact global sur le stress. Cet effet

est loin d'être négligeable, car le stress est glo-balement le « grand aggravateur » de toutesles pathologies. Notamment les pathologieschroniques, douloureuses, ou dans lesquelles

l'efficacité des traitements classiques est limi-tée. Chez ces patients, la pratique de la médi-tation apporte de nombreuxbénéfices au planpsychologique : elle augmente Ia fréquencedes ressentis émotionnels positifs, ce qui est

remarquable dans la mesure oîr la méditationne se rattache pas du tout au champ de la psy-

chologie positive (on n'y cherche pas à susci-

ter directement des émotions positives). Maisla qualité de conscience et d'attention qui yest cultivée a sans doute un effet indirect surla capacité à savourer les moments agréables

e *o*-tbrcri*Ees appr+cE:e=, ayâil'r Én e*trn=:u* üË:€

d*march* asE*<iat'tt *r+ Èravall sui^ i* e*rps *r *i1e

+rienæti+n meneaËe particulière, Ë€uvËnt êirt e*rsidé-rées eom*:e âFpart*ôrianl à !a gracd* famiil* des prat!:

çutes m*dieat!ves.

Relaxation : même si la relaxation vise explicitementl'obtention d'un état de détente physique et psychique,

ses formes avancées et approfondies (comme leTraining

autogène de Schultz) s'approchent d'états méditatifs.

Yoga: surtout connu pour être centré sur le travailpostural et respiratoire (comme dans le HothoYogo),le yoga, d'origine indienne, contient de nombreux élé-

ments méditatifs.

Chi-Gong: au-delà de la prati-que de mouvements lents etd'exercices respiratoires, desti-nés à protéger la santé et favo-riser la longévité, cette pratiquechinoise est considérée par les

experts comme une « méditationen mouvement ».

MéthodeVittoz : cette psychothérapie d'origine suisse

repose sur I'attention prêtée aux sensations corporel-les et à la stabilisation de I'attention.

Prière : pour prier: on se met au calme, on ferme les yeux

et on s'abandonne. Rien d'étonnant donc à ce qu'un

renouveau associant prière et méditation existe dans les

grandes religions, par exemple dans la religion chrétienne.

Méditation bouddhiste : la tradition bouddhiste, à

la fois religieuse et philosophique, est sans doute celle

qui a poussé au plus haut point de raffinement les Pra-tiques méditatives, mais dans des directions multiples.

Le Shomatho vise la stabilité attentionnelle et la pacifi-

cation émotionnelle, le

Vipossono la culture d'unevision du monde débar-rassée des illusions ; il

existe aussi des médita-tions centrées sur la com-passion, I'altruisme, etc.

Méditation transcendantale : elle représente un

exemple de technique méditative utilisant un rétrécis-sement du champ de la conscience, focalisée sur un(( mantra », suite de syllabes à répéter de manière pro-longée pour accéder à un état d'apaisement et de

conscience modifiée. Certaines sectes ont utilisé cetteapproche, très à la mode dans les années I 960, et dontles Beotles furent des adeptes.

Pleine conscience : il s'agit d'exercices d'ouverturede la conscience à l'ensemble des éléments constituantl'expérience de l'instant présent (respiration,sensations

corporelles, sons, émotions, pensées) sans s'accrocherà aucun d'eux. Cette méthode a fait I'obiet du plus grand

nombre de recherches et de publications scientifiques.

36 @ Cerveau & Psycho - n'52 iuillet - août 20 I 2

7)§

Les pratiques méd itatives

ev**tj* rf'* g:**sa!*s r= #g* fii,*â

*f #**e i*çr rs=f,Éc"i*r:r*.

du quotidien lorsqu ils surviennent. D'autrestravaux ont souligné que la méditation aug-

mente en généra7, surtout pour la méditationdite de pleine conscience, les capacités à l'au-tocompassion, qui consiste à manifester de la

douceur envers soi-même. Il est aujourd'huiavéré que cette dimension d'autocompassionest associée à de nombreux bénéfices pour lasanté selon différents mécanismes : meilleureobservance des traitements et des régimes,limitation des comportements autoagressifs

ou autodestructeurs, etc.

Les mécanismes psychologiques d'actionde la méditation ont été assez finement étu-diés, par exemple dans le cas de la douleur(voir l'encadré page 38). Dans le cadre des

maladies psychiques, le plus important d'en-tre eux réside sans doute dans la diminutiondes cycles de rumination anxieux et dépres-

sifs. La rumination est un symptôme fré-quent, où l'esprit est absorbé par des pensées

répétitives et focalisées sur des difficultés :

bien que ne débouchant sur aucune solutionconcrète, ces ruminations persistent, soit au

premier plan de la conscience, soit en bruitde fond même si nous essayons de dirigernotre attention vers autre chose.

eomment l'espritagit sur le corps

La pratique méditative apprend à ne pas se

fixer sur ces pensées préoccupantes qui tra-versent l'esprit, mais à tolérer leur présence

sans y adhérer. On rappelle souvent à ce pro-pos le proverbe chinois : « Tu ne peux pas

empêcher les oiseaux de voler au-dessus de

ta tête, mais tu peux les empêcher de faire leurnid dans tes cheveux. » De même, s'il nousest impossible d'empêcher pensées ou émo- €tions négatives d'apparaître à notre esprit, ànous pouvons garder nos distances vis-à-vis ;d'elles. C'est ce que permet la méditation dite §de pleine conscience : prendre les pensées §pour des pensées, non pour des certitudes. §Lenjeu est de comprendre qu'il y a une dif- 3

@ Cerveau & Psycho - n'52 juillet - août 20 I 2

Méditer, pour une vie plus saine

férence fondamentale entre être préoccupépar un problème, et réfléchir au fait qu'on est

préoccupé par un problème. En ce sens, laméditation ne cherche pas à modifier les pen-sées (comme le fait la psychothérapie cogni-tive), mais à faire évoluer le lien entretenuavec ces pensées, afin de ne pas y adhérer sans

réflexion. Comme pour la douleur ou les

Divers effetspositifsde la méditation sur

le fonctionnementde I'organisme ontété rassemblés sur

cette figure.

Boisse des ruminotions onxieusesAméliorotion du bien-être subiectifAméliorotion de l'ottentionDiminution des cycles dépressifs

des fonctions cordioques

. Régulotion delo tension ortérielle

. Élévotiondes défensesimmunitoires

. Diminutionde lo libérotionde cortisol (stress]

oss ie r

ff j-#i #aicir,+g #'*fr* fuæ*r*s-.,'s'

,s#f{* qÉi* f "*sl *e-:r: Èiiü#,'iæ sær:É*. :"'

émotions négatives, il ne s'agit pas d'en empê-cher l'existence ou la survenue, mais de dimi-nuer notre réactivité, et donc notre dépen-dance, vis-à-vis d'elles.

La réduction du stress par la méditationintéresse les chercheurs, car elle peut aussiêtre étudiée à un niveau biologique assez fin,

été à leur tour entraînés à méditer, et l'équipede Harvard a comparé leur profil d'expres-sion des gènes « avant et après » : ils ontconstaté des modifications de l'expressiongénique comparables, allant dans le sensd'une diminution de l'expression des gènes

liés au stress. Quel que soit donc notre capi-tal génétique,la méditation (à condi-tion tout de même d'être intensive, dumoins d'après cette étude !) Iimiteraitcertaines prédispositions héréditaires.

Autre modification biologique nota-ble : l'impact de la méditation sur les

télomères, sortes de bouchons protec-teurs qui recouvrent l'extrémité des

chromosomes. Une enzyme) la télomérase,dont la découverte a valu à ElizabethBlackburn le prix Nobel de physiologieen2009, sert à garantir que la longueur des

chromosomes lors de la réplication des chro-

Voltaire

Ch. André, Méditer

iour oprès jour,25 leçons de pleineconSctencetL'lconocloste, 201 I .

f. Grant et al.,A non-eloborotivemenlol stonceond decouplingof execulive ondpoin-related corticespredicls low poinsensiliviÿ in Zenmeditolors, in Poin,vol. \52, p. 150-156,2011.T.facobs et al.,lntensive medilationtraining, immune celllel ome ro se o ctivîÿ, o ndpsychologicolmediotors, inPsychoneuro-endocrinology,vol. 36(5),pp. 664-681 , 2O11 .

B. Hôlzel et al.,How does mindfulnessmeditolion work ?

Proposing mechonismsof oction hom oconcepluol and neurolperspective,in Perspectives onPsychologicol Science,vol. 6(6),pp. 537-559,2011 .

38

IVIéditation, douleurans les démarches dites psycho-édu-catives, on a l'habitude en médecine

d'apprendre aux patients à différencierdouleur et souffrance. La douleur est uneréalité biologique, pouvant être corrigéepar les médicaments antalgiques. La souf-france correspond à l'impact psychologi-que de la douleur.

Dans la méditation de pleine conscience,on encourage les patients à accepter la

présence de la douleur (cela ne peut doncse faire au début qu'avec des douleursmodérées, inutile de faire preuve de stoï-cisme), mais en évitant de laisser leurattention se centrer sur elle. En effet, le

mouvement naturel de notre esprit, lors-que nous souffrons, est de nous focali-ser sur ce qui nous fait souffrir : la dou-leur occupe alors seule tout I'espace denotre conscience. Lors de la « digestion »

méditative de la souffrance, on s'efforced'ouvrir I'espace de la conscience à d'au-tres phénomènes : prêter attention à larespiration, aux parties du corps qui nesouffrent pas,aux sons;on s'efforce d'ob-server les pensées que fait naître la souf-france («Je ne supporterai pas cela long-

dans le cadre notamment de la psycho-neuro-immunologie, qui étudie les connexionsétroites et réciproques entre état psychologi-que et activité des systèmes nerveux etimmunitaires (ce que l'on désignait autre-fois par « médecine psychosomatique »). Ona ainsi montré que quelques semaines de pra-tique méditative régulière suffisent à amélio-rer les réactions immunitaires après uneinjection de vaccin antigrippal, ou à augmen-ter la quantité de lymphocltes T (des cellu-les de défense essentielles) chez les porteursdu virus du sida.

Mais l'impact de Ia méditation peut allerencore un peu plus loin, en modifiant l'ex-pression des gènes, c'est-à-dire la productionde protéines influant sur le fonctionnementde l'organisme. On sait aujourd'hui que cetteexpression est notablement influencée par denombreux facteurs, notamment par les émo-tions : le stress peut ainsi activer certainsgènes, et les émotions positives les inactiver.Ainsi, Herbert Benson et son équipe, del'Université Harvard,ont comparé 20 person-nes méditant depuis neuf ans en moyenne à

20 autres, ne méditant pas, mais présentantle même profil psychologique.

La méditation influesur l'exprë§sÉom des gènes

Ils ont identifié des différences dans leniveau d'expression de certains de leursgènes : chez les méditants, plus de 2 000 gènesimpliqués notamment dans les mécanismesde la réactivité au stress (inflammation, pro-duction de cortisol, mort cellulaire. . . ) sontinactivés, ce qui n'était pas le cas chez lessujets non méditants. Ces derniers ont alors

@ Cerveau & Psycho - n'52 juillet - août 20 I 2

mosomes soit conservée. Mais elle ne srrtfitpas à empêcher que la longrreur des télomères ne diminue petit à petit atr fil des divisionscellulaires. Par aillerrrs, les télomères sont serl

sibles ar-r stress, qui les endon'mrage

l-lne très importante étrrde, conduite s<'rus

le nom de Projet Shanrirtha par l'équipe du

neuroscientifiqrr e auréri cain (.1ifford Saron,

de 1'Llniversité de (lalifornic, a montré que

la méditation stimule l'activité de la télonré-rase, ce qui freine le vieillissement cellulaircPorrr cclte etllde, r'0 pcrsontrcq [)r,ltiqr].lnldéjà la méditation ont été recrutées. 'frente

d'entre elles, tirées au sort, acceptèrent de se

retirer en retraite dans les montagnes drr

Colorado pendant trois nrois, drrrant lesquels

elles pratiquèrent environ six herrres dc

méditation par jour. Les 30 autres tirrcnt p1a

cées en liste d'attente avant d'intégrer lc ccn

tre de retraite, et ser\.irent ainsi de compa

et souffrance

temps... ») avec le plus de recul possible, etc.Plutôt que de chasser la souffrance de notreesprit, I'idée est de la << diluer >> dans un

contenant plus vaste,fait de l'ensemble de ce

que nous ressentons, et pas seulement celui

des ressentis douloureux. lnutile de préciserque cela requiert un certain entraînement...

Quand cet entraînement est régulier, les

effets deviennent mesurables, tant sur ladiminution subjective des sensations dou-loureuses, que sur leurs fondements céré-braux. De nombreuses études de neuro-imagerie ont attesté des changementsentraînés par les pratiques méditatives.

Ces changements peuvent être anatomi-ques, tel l'épaississement de I'insula, la régiondu cortex qui permet de décoder l'état de

nos viscères associé aux expériences émo-tionnelles. Mais ils peuvent aussi être fonc-tionnels, avec des mécanismes d'actionvariés : plusieurs études ont montré que la

moindre réactivité à la douleur résulte de

deux mécanismes différents selon que I'onconsidère des pratiquants débutants ouconfirmés. Chez les débutants, il s'agit d'uncontrôle de type top down,ou de haut en bas,

c'est-à-dire partant du cortex préfrontal - la

Méditer, pour une vie pius saine

raison T)es t-ésrrltats nets firrent obtenus surclilférents tests psvcho)ogiques (au gmenta-tion du sentiment de cor.rtrôle, drr sens donnéà sa vie, diminr.rtion cles émotions négatives,accroisscr.ncnt des capacités de recrrl, etc.),rnais aussi sur I'augmentation dc l'activité de

la télon.rérase, Cette harrsst' d'activité étaitnrêr.ne proportionnelle à l'amélioration des

r.a r j abl es psvch ol o gi<qr-r es, dont cl I e ser.rrbl e

ôtre rrn marquelrr

e*

oo

structure cérébrale hiérarchiquement la plus

élevée - pour limiter l'activité de l'amygdale

cérébrale - appartenant au cerveau limbi-que, ou émotionnel. Schématiquement, cela

correspond à « se calmer » par des straté-gies verbales d'autocontrôle et de relativisa-tion des douleurs ressenties.

En revanche, les méditants plus expéri-mentés bénéficient eux d'un contrôle de

type bottom up, de bas en haut : leur cerveau

<< traite » les informations douloureuses à

la source, au niveau de l'amygdale et des

structures voisines, sans avoir besoin de stra-tégies verbales. C'est comme si la médita-tion avait amélioré la tolérance spontanéeà la douleur, évitant à cette dernière de se

transformer en souffrance mentale.

@ Cerveau & Piycho - n'52 iuillet - août 20 I 2

ossier

/

Mécanismes Bénéfices I

_l Localisations cérébrales

Régulation de I'attention, stabilisée par le focus 1

mis sur sa respiration, un son, un objet, etc. ;

Conscience du corps, dont on observe

le fonctionnement sans chercher à le modifier(en position assise droite, mains sur les cuisses).

Détente, apaisement émotionnel, j Cortex cingulaire

accroissement de la concentration. 1 antérieur

Dépistage plus précoce des

modifications de l'état émotionnellnsula, jonction

i temporo-pariétale

Régulation émotionnelle, qui consiste

à accepter la présence de toutesles émotions, même douloureuses,

et à en observer l'évolution sans

les alimenter ni les refouler.

Cortex préfrontal

i ventro-médian l

, et dorsal, hippocampe, I

' amygdale

Cortex cinguloire ontérieur

Cortex prélrontol ventro-médion

Tolérance accrue aux émotions

négatives, diminution des sentiments

de déresse et des ruminations ;

développement des capacités

à apprécier les émotions agréables.

I

Capacités accrues de détachement j Cortex cingulaire

et de recul par rapport à ses pensées I postérieuri insula

et iugements automatiques.,1=_=_--* -

-

Jonction temporo-poriétole

Hippocompe

Amygdole

Modification du rapport à soi.

On cherche à se libérerde ses réactions habituelles.

Cortex préfrontoldorsol

Toutefois, les chercheurs restent prudents :

si l'effet de la méditation sur la télomérase,et donc sur le vieillissement cellulaire, sem-

ble attesté, quels en sont les mécanismesexacts ? Sont-ils propres à la méditation ? Ousont-ils consécutifs au mieux-être apporté en

I'occurrence par la méditation ? Dans pareilcas, tout ce qui améliore notre bien-être sub-jectif, sport, amour, plaisirs variés, peut-ilaccroitre l'activité de la télomérase ? Si laméditation est bonne pour tout un chacunparce qu'elle améliore le bien-être émotion-nel et favorise des émotions positives, alorsd'autres démarches de psychologie positive

devraient agir aussi sur la télomérase. Debeaux sujets d'étude en perspective... Quoiqu'il en soit, toutes ces données confirment

que les approches méditatives - écologiques,

gratuites, et finalement assez simples - peu-

vent avoir un impact majeur sur la santé et

le vieillissement. Tout comme l'activité phy-sique ou une alimentation équilibrée.

Mais tout comme ces dernières, elles ne

peuvent se montrer efficaces que dans le cadre

de pratiques durables et régulières: c'est-à-dire qu'elles doivent être intégrées dans unstyle de vie permanent. C'est là que le bâtblesse, car ce sryle de vie est en effet assez éloi-gné de ce vers quoi nous pousse notre société,

qui nous incite au contraire à la vitesse, faci-lite la sédentarité et expose à des régimes ali-mentaires déséquilibrés. Lair de rien, la médi-tation est une sorte de révolution ! Au moinsde nos styles de vie. I

40 @ Cerveau& Psycho - n'52 iuillet-août 20 I 2

oss ie r

,/\

a méditation de pleine conscience,progressivement, s'installe commeune technique efficace pour vivremieux, s'apaiser et se reconnecterà soi-même. E,lle commence aussi

à s'inviter dans le domaine de la santé pourréduire l'anxiété, sortir des états dépressifs,stimuler le système immunitaire, favoriserla guérison...

Elle propose de prendre conscience, par des

exercices, de tout ce qui constitue notre expé-rience de l'instant présent. Conscience dessons, de la respiration, des sensations corpo-relles, des odeurs... Conscience aussi du fluxdes pensées qui se succèdent, sans chercher à

se focaliser sur elles. Cette méthode fait l'ob-jet d'un très grand nombre d'évaluations etrecherches scientifiques à travers le monde.Refaçonnée par les Américains qui l'ont for-malisée sous forme de protocoles rigoureux(ussn - Min dfulness Based Stress Reduction,ou Réduction du stress fondée sur la pleineconscience - ou MBCT -Mindfulness BasedCognitive Therapy, Thérapie cognitive fondéesur la pleine conscience), peut-elle avoir sa

place dans l'univers de l'enfance, voire del'adolescence ? Si oui, quels bénéfices en atten-dre et quel ÿpe de pratique recommander ?

Enfants méditants

Un jeune enfant qui joue, assis par terre,grattant la terre, absorbé par ses sensations,est totalement dans l'instant présent. Ils'adonne sans le savoir à une forme de médi-tation spontanée où tout le corps et l'espritsont focalisés sur ce qui est en train de se

vivre. Aucune rumination mentale, aucuneinquiétude pour le futur, aucune nostalgie dece qui appartient au passé... Telle est l'atti-tude méditative : accueillir pleinement ce quiest, sans rien chercher à changer.

Pourtant, la vie va très vite plonger l'enfantdans une accélération du temps où les stimu-lations extérieures, la pression de la réussite,les enjeux de la performance, vont l'entraî-ner dans un tourbillon qui va créer une mul-titude de tensions et de stress.

Lenfant est particulièrement perméableaux stimulus externes. Le stress environnant

en silence et dans I'inaction,sa conscience de différentesperceptions, sensations, ou pensées.

r Conseillée aux adultes, mais aussià certains enfants, elle amélioreles capacités d'attention, réduitle stress et I'impulsivité,et renforce le sentimenrde liberté de choix.

r Certains systèmes éducatifsà l'étranger intègrentcette formation dans la scolarité,et Permettent aux enfantsde retrouver le contrôle de

Quand la méditationvient aux enf ants...

@ Cerveau & Psycho - n'52 iuillet-août 20 I 2

leur attention et de leurs émotions.

oss ier

l. Observerattentivementune grenouille,

une fourmi, une goutte

de rosée : l'enfant

adopte spontanément

la bonne attitude

pour être dans

l'instant présent,

et se rapproche sans

le savoir de ce que

I'on nomme

les états méditatifs.

le touche, avec des conséqtlences insidietrses.

Dès 1'entrée à 1'école, il est fréquent de ren-

contrer de jeunes élèves qui, déjà' sotrffrent

d'une agitation psvchiqtre à l'origine d'uncomportement turhulent, vite réprimandépar l'école. Les enfants d'aujourd'hui, soumis

à de nombreuses sollicitations, ont de plus en

plus de mal à se poser tranqtrillement, s'as

seoir. écouter, se concentrer... T.e multitâcheest devenu leur mode de r.ie et de pensée avec

tor-rs ses effets indésirables.

L'*sprÈt qi ptrlËu* 3l

pæfl trr:F d* stËrs=q"e§æËs*ets

Notre époque est celle clu zapping. Tout va

vitc. 'Irès vite. Trop vite. LIne chose presque

instantanémettt en chasse une atltre. La télé

vision aux centaines de programmes sillrLrl

tanés, les jeux vidéo où I'actiolr exige une

rapidité extrême, Internet avec sa toile infinie et ses fenêtres sur le monde ouvertes

simultanément, les résearrx sociartx qui obli

gent à une réactivité immédiate, ies télépho-

nes mobiles qrti norrs connectent les uns aux

autres dans un va-et vient ininterrollptt...

Nos enfartts sont les premiers exposés et, s'il

ne s'i'rgit pas de blâmer cette époque u d'hy-

perconnerion ", il est essentiel de compren

dre que cette Pratique du u rl'rultitâche 'conslant,rtrqucl llous sommes fott' 'otlmisfinit par notrs épuiser mentalement et physi-

quement. .\insi, Ie stress devient potlr nos

enfants ut-t nralhettreux compagnou cle route,

entravatlt lettr parcours personnel et scolaire,

affectant la confiance et l'estirne de soi, per

turbant les urpprentissages scolailes. et enta-

mant parfois leur plaisir de vivre.

Sans conlPter le stress des parer-its. .11 par-

ticulier ar.ttotlr des inquiétudes po,rr 1'al'e-

nir de lenrs enfants, auxquels ils sont ioumis

constamment. Dans ce contexte tl'l.ieléra-tion et de pression constante, l'attcnti'in et la

concentration sont altérées' ].es trtll,I: les de

l'attention constituent aujourd'hLri 1 Lrn des

premiers motifs de consultation ert L"r cho-

logie de l'enfant et de l'adolescent ( -: trou-ble, qr-ri touche près de cinq pt'rs; .311t des

enfants scolarisés, a des répercusiipll ' 11.11p61-

tantes à la lois sur leurs apprenr ".' 'r' (t sur

toute ler-rr vie sociale. La Preoccui'.rtionalltour de 1a concentration est cenilale attssi

c

.eN

ô.q

=

42 @ Cerveau & Psycho ' n'52 iuillet - août 20 I 2

bien du côté des enseignants que des parents.C'est devenu un enjeu de santé publique quimobilise de nombreux travaux de recherche.

Les apports de la méditation de pleineconscience, bien validés pour les adultes,commencent à faire l'objet de récentes recher-ches pour en évaluer les bénéfices auprès desenfants et des adolescents. Deux études ontété réalisées par Randye Semple, à l'Universitéde Californie à San Diego, et Laura Visu-Petra, de l'Université de Cluj-Napoca enRoumanie, auprès d'enfants scolarisés (âgés

de7 à9 ans, et de 9 à 13 ans). Ces psycholo-gues ont examiné les effets de la méditationde pleine conscience sur les performances des

fonctions exécutives et celles du cortex pré-frontal régissant l'attention, la concentration,la mémorisation, la planification ou encorela métacognition (capacité de contrôler sonraisonnement). Il en ressort que cette prati-que améliore le contrôle exécutif, la méta-cognition et l'impulsivité.

La pratique dansles établ lssernents seolai res

On observe aussi un effet sur la flexibilitécognitive, fonction essentielle permettantd'adapter rapidement un nouveau raisonne-ment et de mobiliser des ressources nouvel-les. Un autre travail récent de L. Visu-Petraindique qu'après une séance hebdomadairependant cinq semaines, les capacités decontrôle cognitif augmentent dans 64 pourcent des cas. Or il existe un lien fort entrecapacités de contrôle cognitif et réussite sco-laire. Ces études, ainsi qu'une autre réaliséeauprès d'une cohorte importante de jeunesadolescents (173 garçons âgés de 14 etl5 ans), valident que la pratique de la médi-tation de pleine conscience améliore le sen-timent de bien-être, qu elle réduit le stress res-senti, et que ses effets dépassent le cadre del'école pour déteindre sur tous les secteurs dela vie de l'enfant, y compris ses relations avecautrui et sa confiance en lui.

O Cerveau & Psycho - no 52 iuillet - août 20 ! 2

Quand la méditation vient aux enfants

Aux Pays-Bas, depuis quelques années, lapsychologue Eline Smet promeut une méthodede méditation de pleine conscience adaptéeaux enfants ; la méthode a été recomman-dée par le ministère de l'Éducation qui a

décidé de former l'ensemble des enseignantsà cette pratique.

De notre côté, nous avons introduit cinq ate-liers de pleine conscience dans un établissement

scolaire à Marseille, auprès de 18 jeunes collé-giens de classe de sixième, âgés de 10 à 12 ans.

L'exercice de la petite fourmians la pratique formelle des protocoles de MBSR (Mindfulness

Bosed Stress Reduaion, Réduction du stress fondée sur la pleinecon sci en ce) o u M BCT (Mindfulness Bosed Cognitive The ropy,Ihér apiecognitive fondée sur la pleine conscience), le balayage corporelde la tête au pied, qui consiste à focaliser son attention successi-vement sur chaque partie du corps, est un exercice central. Pourles enfants, il peut paraître fastidieux et I'exercice de la petitefourmi que j'ai imaginé et testé sur de nombreux enfants offreune alternative intéressante. Le principe en est simple : I'enfant

est allongé les yeux fermés.Vous

commencez alors à lui raconterla promenade de la petitefourmi qui, partie de son grosorteil droit, en passant par cha-que parcelle du corps, remonteprogressivement iusqu'au som-met du crâne.Vous décrivez en

détail I'ascension de cette petitefourmi qui chatouille entre les

orteils, se faufile entre les poilsdes jambes, entend un vacarmesouterrain important lorsqu'elle

passe au-dessus du cæur,glisse sur le menton, se fait surprendrepar le souffle sorti des narines, etc. Ces descriptions attirent I'at-tention de I'enfant sur ses sensations corporelles et maintiennentcette attention tout au long de I'exercice. Laissez libre cours à

votre créativité pour imaginer toutes les aventures sensoriellesde cette fourmi se promenant sur le corps de votre enfant, etvous serez, vous aussi, saisi par la pleine conscience !

Ëlü:_oo

à-è

oss ie r

2. La télévision'les leux vidéo,

les tablettes

numériques,

les téléphonesportables et leurs

inévitables SMS. sont

autant de stimulations

Permanentes qul

empêchent les enfants

de se concentrer

et de proliterde I'instant présent.

Latelier se déroule durant une heure et l'onpropose aux enfants plusieurs petits exerci-

ces de méditation pour les initier à cette sen-

sation nouvelle d'être posés, attentifs, pré-

sents, conscients d'être là les uns avec les

autres, calmes, apaisés. Nous proposons, par

exemple, 1'« exercice du silence » : les enfants

reçoivent la consigne de fermer les yêux et

« d'écouter ensemble le silence », puis de par-

tager ce qu'ils ont vécu. Dans l'exercice de

« l'algue », nous simulons une algue au fond

de l'océan, d'abord agitée pat les flots puis

qui, petit à petit, ralentit son mouvementpour onduler imperceptiblement au gré du

mouvement apaisé des vagues.

Dans un autre exercice, tous les enfants, les

yeux fermés, se donnent la main pour se sen-

tir reliés les uns aux autres. Ou encore, on

demande à chaque enfant, tranquillement assis

sur sa chaise, de se connecter en pensant à une

« image ressource », un lieu imaginaire ou réel

qui lui inspire la tranquillité. Après ce dernier

exercice, Iules s'étonne : « I'étais allongé sur

un nuage. Tiès moelleux. Tianquille. ]'étais tel-

lementbien. Je sentais dans mon corps comme

une douceur. Tout était calme à l'intérieur de

moi. Je ne sentais presque plus mon corps et

c'est comme si je me voYais au loin. »

]ules est un enfant particulièrement arxieux,

et nous l'avons encouragé, à la suite de cet

atelier, à s'entraîner régulièrement à l'exer-

cice pour retrouver cet état de tranquillité.Nous avons revu lules deux mois plus tard,

et cette fois-ci, c'est sa maman qui témoigne :

« lules dort beaucoup mieux ; en classe, les

professeurs se plaignent moins de son agita-

tion et ses résultats scolaires se sont amélio-

rés. Parfois je lui rappelle de faire son exer-

cice du « nuage » avant de se coucher. Mais ille fait volontiers car il en a vraiment senti

concrètement les effets. »

Introduire la méditation à l'école, cela

signifie aussi d'offrir aux enseignants la pos-

sibilité de s'approprier une méthode simple

et efficace à pratiquer régulièrement avec leurs

élèves. Dans notre expérience, Ies professeurs

ont continué à proposer régulièrement des

exercices de pleine conscience à leurs élèves,

avant un cours ou un contrôle, ou encore

après une récréation agitée.Ils témoignent

tous des bénéfices ressentis pour leurs élèves

(apaisement, qualité de présence et d'atten-

tion)... et pour eux-mêmes ! De plus, dans

notre expérience, tous les enfants ont mani-

festé un réel plaisir à pratiquer ces exercices,

ce que confirme également une récente expé-

rimentation américaine : 69 pour cent des

adolescents âgés de 14 à 15 ans soumis à un

programme de pleine conscience ont dit qu ils

avaient apprécié cette pratique et qu ils conti-

nueraient, pour- 74 d'entre euxl

Mathénrratiques, f rançaiset méditation

Une des clefs de la méditation de pleine

conscience reste l'apprentissage. Cette nou-

velle attitude n'est pas spontanée et demande

un entraînement. Les études et expériences cli-

niques montrent qu il ne s'agit pas nécessai-

rement pour les enfants de suivre un proto-cole formel de tant d'heures hebdomadaires

pendant tant de semaines. Des ateliers d'en-

viron une heure, adaptés à l'âge et au rythme

des enfants, sont davantage conseillés. Un

minimum de quatre à cinq séances reste

@ Cerveau & Psycho - n" 52 iuillet - août 20 I 2

Lesense ants;!'?r è;as:*: F"

gà §'#c*És : qisemenL attention,r-# # if 'P-E Ë9"{E ËF # ÊË -

44

cependânt indispensahle pour hien connaîtreles exercices et pouvoir les reprodrrire seul.

Par la suite, des sérnces de rappel renf-orcent les effets et l'automatisation de la pleineconscience au quotidien. Car le principalobjectif cle l'entraînement est de pouvoir à

chaque instant utiliser la pleine conscience.pour répondre allx situations de stress, se

concentrer, vivre pleinement le rnoment présent. Pour les grands aclolescents (à partir de

l5 à l6 ans), l'apprer.rtissage peut être sinrr

laire à celui proposé aux adultes, avec un protocole en six à hr,rit séances Cepent.lant, porrrles amener à la méditation, les adolescents ontbesoin d'en comprendre les fondements et les

mécanismes Leur adhésion à cette pratiqrre,qu'ils peuvent avoir tendance à tourner en

dérision, passe par les explications des nréca

nismes cérébraux à l'reuvre.

fisli*e"sx ânæiÈrà§*r§*rB fl*rve*â.Ë

Notre cerveau, qtri prend, chaqrre jour, plusde 6 000 décisionr selon ccrtaincs cstim.rtionc,

travaille en dehors du champ de la consciencela plupart drr teml-rs. Ft trnt rnierrr porrr ccr

taines cle nos actions qui doiver.rt être automatisées pour ne ptrs surcharger inutiiementnos compétences cognitives, lesqtrellesseraient alors bien en mal de gérer toutes Ies

tâches. Pourtant, les autonratismes de 1a pen'sée peuvent aussi être des pièges, Norrs réa

gissons de façon spontanée et inconscientedans de nombreuses sitrrations, et ce pilotageautomatique nous conduit parfois à des attitr-rdes, des ér:r-rotions, des décisions qrri nouséloignent de nos souhaits profonds.

Nous ne cl.roisissons plus ce qLri nousconvient vraiment, nous somlres 1'ohjet d'uneprogralllnration parfois ancienne et bicnancrée de notre cerveau. I a nréditation de

pleine conscience permet de retrouver, en nolrs,

la possibilrté de choisir, de décider lTn nouvelespacc cst crei, qrri norrs apparlienl, en propre.Sur un plan fonctionnel et neurophvsiologi-que, c'est du côté de la plasticité céréhrale que

nous pouvons localiser le mécanisme.I-es découvertes récentes rrontrerlt qlre

nous produisons de nouveaux nerrronesjusqu'à notre mort. Pourtant, ces cellrrles res-

teront souvent inemployées et se résorberontPar ailleurs, nous savons qu'à la naissance,nous disposons de milliards de neurones et

@ Cerveau S. Psycho - n" 52 juillet - août 20 I 2

Quand la méditation vient aux enfants,.

que, par apprentissage, un certain résearr neu-ronal fonctionnel se cotrstruit, qui n'utiliseqll'rlne partic de cette réserve initialenrent r-lts

ponihle Ft, contrairement à ce qui a longtemps été irdmis, I'architectrrre céréhrale ne se

fige pas à l'adolescence, mais peut se rnod ifierà torrt âge. Créer de norrr.elles svnapses, éta

hlir de nourrelles connexions neuronales, des-

sine r de nolrve aux circuits, reste possihle à

chaqrre instantApprendre à méditer participe à ce réarné-

nagcment céréhral Sous detrx aspects : toutd'ahord, de norrveaux neurones sont intégrésau résearr neuronaJ, ce qrri a porrr conséquence de dér,elopper nos compétences céré-

l-rrales Fnsrrite, la méditation pernret de tracer de norrvelles voies, des u cl-renrins de

traverse , qtri r-rous permettellt de sortir des

onrières rnentales habitrrelles et nous invitentà retrour.er la liberté de choisir de norrveauxchemins ! Au scns propre, contme aLl sens

figrrré ! l.es adolescerlts comprerlnent bien ce

discorrrs et sont sédr-rits par l'idée de repren-dre le porrvoir sttr letrr cer\reatl.I-a perspec-tir..e dc dér,elopper de nouvelles ressources, de

se sentir plus libre, de ne pas se rédtrire à des

oilà un exercice à proposer à un adoleseent stressé par un

examen, en lui expliquant au pr'éalable pourquoi cela fonc-tionne : se coneentrer sur ses sensations réduit Ia productionde eortisol (hormone du stress) et libère la mémoire de travail,mémoire à eourt terme indispensable pour I'aetivité intelleetuelleet la coneentration. Proposez-lui d'imaginer qu'il dessine son stress

sur une feuille, qu'il la replie en quatre ou la froisse et la posesur le bureau. Se détaeher de son stress, crée, symboliquement,un espaee intér ieur dégagé. Le stress est là, mais extériorisé etnon plus internalisé ll doit ensuite poser les mains

sur le rebord du bureau, pieds à plat sur le sol,parallèles, si possible le dos droit sur la chaise.ll serre le bord du bureau très fort en se

concentrânt sur les sensations des doiEsqui se erispent, presque jusqu'à unetension douloureuse. ll doit rester'ainsi quelques instants. Puis r elâ-

cher d'un seul coup ll percevrades sensations norrvelles dans ses

mains otrvertes ll peut ensuiterespirer profondément et se

concentrer su!' son travail.

oss ie r

www.meditez.com

ËÈhiÈ+çr*pâ:ie

J. Siaud-Fachin,Commentlo méditotiono chongé mo vie...et pourroit bienchonger lo vôtre !,

Odile locob, 20,l 2

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êtres programmés, correspond au besoin de

cet âge de devenir soi-même.

Éduquer ses enfantsen pleine conscience

De surcroît, la méditation entraîne uneréduction de la production de cortisol, l'hor-mone du stress. Car si le stress est bénéfiquequand il s'agit de réagir vite pour se protégercontre certains dangers par la fuite, l'évite-ment ou l'attaque, il devient nocif s'il duretrop longtemps. Quand la situation stressante

se prolonge, se renouvelle souvent, ou quandnous pensons ne pas parvenir à la surmon-ter, alors le cortisol est sécrété en excès etinonde le cerveau.

Le stress paralyse et inhibe toute possibi-lité de réfléchir et d'agir. En cas d'examen sco-

laire, par exemple, cela se traduit par l'inca-pacité de se concentrer, de retrouver le savoiracquis, de mobiliser des compétences. Le

stress sature la mémoire de travail, la mémoireà court terme indispensable pour mémoriser,réaménager les connaissances, restituer, orga-niser, planifier. Ce lien entre stress et mobili-sation intellectuelle, expliqué aux adolescents,

leur ouvre la possibilité de réagir différem-ment. Ils en comprennent les rouages et

acceptent plus facilement de s'entraîner à des

techniques leur permettant de s'apaiser.IJavantage est la rapidité avec laquelle ils peu-vent en mesurer les bénéfices. Ne serait-ce quepar la respiration : une seule respiration amplepermet de faire chuter de 90 pour cent laconcentration de noradrénaline.

Sensibiliser les parents à la pleine conscience

offre aux enfants la possibilité de rester aumaximum centrés sur les sensations de l'ins-tant. Il s'agit de pioposer aux enfants régu-lièrement des « pauses sensorielles » : obser-ver attentivement une petite fourmi charriantune miette sur son dos et suivre sa trajectoire,sans discontinuer, par plaisir et curiosité ;

jouer avec les gouttelettes d'eau qui dégou-

linent derrière la vitre un jour de pluie ;

observer les multiples reflets de l'eau quibrille ; s'asseoir un instant, en pleine nature,et regarder l'herbe qui ondoie sous la briseou les petits nuages dans le ciel, et se sentirbien ensemble, à ce moment-là.

Mais aussi dans la rue, s'arrêter quelquessecondes, ressenti5 regarder, ou à table, obser-

ver les couleurs dans 1'assiette, manger en

gotrtant waiment les aliments et s'amuser des

différences de textures, de saveurs... Tous ces

petits moments de bonheur, à notre portée,et que nos vies surchargées nous font oublier,alimentent nos enfants en sensations, qui leurdonnent la possibilité de rester présents à eux-

mêmes et capables d'apprécier pleinementces instants qui construisent la vie.

Apprécierles « moments de rien »

Pour les parents, ces moments partagésseront autant de pauses, autant de possibili-tés nouvelles d'être vraiment avec leursenfants plutôt que d'être toujours en traind'agir ou de les pousser à agir. Souhaitant les

rendre performants, nous les soumettons par-fois à un grand nombre d'activités diverses,

convaincus que c'est pour leur bien et pourles préparer au mieux à l'avenir. Cultiver des

« moments de rien » avec ses enfants ne leurfait pas perdre du temps, ne risque pas de les

priver ou de « gâcher » du temps, mais aucontraire, leur donne cette possibilité qui leurrestera utile pour leur vie entière : savoir être

connectés à ce qu'ils vivent, à I'instant pré-sent, ressentir chaque moment vécu danstoute son intensité, retrouver facilement unespace de calme et de sécurité intérieure,récupérer rapidement des ressources et des

capacités de concentration.Être un parent pleinement conscient

change les perspectives d'éducation, une édu-

cation à la portée de chacun et pour Ie bien-fait de tous, petits et grands. I

@ Cerveau & Psycho - n'52 iuillet - août 20 I 2

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