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/// Cassande BANDRY & Marion BÉRAUD LARTIGOT / CRÉATION D’UN ATELIER DE BRODERIE COUTURE AU VILLAGE DE TAFRAOUT N’ GABOUN SUD DU MAROC / JUILLET 2013 ///

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Cassande BANDRY & Marion BÉRAUD LARTIGOT/

CRÉATION D’UN ATELIER DE BRODERIE COUTURE AU VILLAGE DE TAFRAOUT N’ GABOUN

SUD DU MAROC

/JUILLET 2013

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CONTEXTE & PRÉSENTATION DU PROJET///

Depuis le mois d’Avril 2013, les associations Back Up Rural (Poissy, France) et Imoudal (Ta-fraoute N’Gaboune, Maroc) ont envoyé et accueilli les premiers bénévoles français à Tafraoute N’Gaboune, dans la région de Sidi Ifni, au Sud du Maroc, pour participer activement à la création d’un atelier de broderie-couture destiné aux femmes et aux jeunes filles du village. Il est apparu que sur une population d’environ 300 personnes (60 foyers), une vingtaine de femmes et jeunes filles souhaitaient développer des compétences artisanales et produire des objets commercialisa-bles. Elles ont exprimé le désir d’acquérir une forme d’autonomie financière et également d’être valorisées socialement.

Cette initiative a été soutenue et promut par l’Association La Guilde du Raid, grâce à la-quelle nous avons eu part de cette mission, par l’intermédiaire d’une annonce sur leur site inter-net. Le projet a pu démarré en Avril 2013, grâce à l’intervention de deux premières bénévoles, Agnès Lehuen (64 ans) et Isabelle Haack (56 ans) de l’association Agir ABCD.Pour notre part, cette mission était l’opportunité idéale de mettre en pratique et de faire valoir les compétences acquises dans le domaine textile, à la suite de notre diplôme et de nos différents parcours professionnels:

– Marion Béraud-Lartigot, 21ans, est diplômée d’un Diplôme de Métiers d’Arts Tex-tiles spécialisé en Tapisserie/Structures textiles à l’Ecole Supérieure des Arts Appliqués Duperré, Paris.En avril 2012, elle a fait un stage chez Marion Chopineau, créatrice textile et brodeuse pour la Haute-Couture. En été 2013, elle a voyagé à travers le Népal pendant 5 semaines, et un stage à Bagan (Birmanie) était prévu en Septembre 2013 dans un atelier de laque Myat Thit Sar pour effectuer une immersion dans un atelier de création de laque de haute qualité afin d’apprendre des techniques traditionnelles pour appuyer une recherche de création d’objets pour l’entreprise Ruhlmann (Paris, XVème).

– CassandreBandry, 21ans, est diplômée d’un BTS MODE ET ENVIRONNEMENTS option Textile/ Matériaux / Surface, spécialisé dans les Tendances et l’Art de vivre de demain, à l’Ecole Supérieure des Arts Appliqués Duperré, Paris.Elle a effectué un stage de deux mois auprès d’ ARTISANS D’ANGKOR, une entreprise de prêt à por-ter de luxe à Siem Reap au Cambodge (Asie), qualifiée dans ces compétences artisanales khmers, aux mois de Mai et Juin 2012. Un voyage au Laos, d’une duré de trois semaines, à la découverte des différentes techniques tex-tiles laotiennes a suivi (visite de workshops, marchés artisanaux, musées).

Entreprendre des projets à l’étranger n’était donc pas nouveau pour nous, et l’enthou-siasme et l’excitation liées à la mise en place de notre mission était immense. Pour cela, nous avons rencontré Agnès Lehuen (avant et après sa mission) afin d’avoir une première connaissance du projet, de ce qui avait déjà été mis en oeuvre, des différents enjeux à prendre en considé-ration et de la vie sur place, d’une manière générale. Nous avons aussi rencontré Rekia Chakrid, présidente de l’Association Back Up Rural. Marion a également assisté à la réunion réservée aux bénévoles envoyés pendant les missions courtes, organisée par la Guilde du Raid qui a été d’une grande aide à la préparation du travail et qu’elle recommande chaudement aux prochains bénévoles.

///BILAN DE LA PREMIÈRE INTERVENTION

AVRIL 2013 AGNÈS LEHUEN & ISABELLE HAACK(cf: rapport de mission d’Agnès et Isabelle)

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Les femmes et les jeunes filles de l’atelier ayant déjà reçu une première formation grâce à l’intervention d’Agnès et d’Isabelle, un premier bilan a donc pu être établit: – les premiers points de broderie ont été appris (point de croix, surfilage), – création et distinction de différents groupes de travail en fonction des compétences de chacune pour une plus grande justesse et efficacité de réalisation et 19 sacs ont été crées. – un fort enthousiasme et un réel investissement de la part des femmes se sont avérés.

Les premières perspectives ont également été dessinées: - Développer l’apprentissage de la machine à coudre pour rendre les femmes totalement autonomes dans la production des objets, - Continuer l’apprentissage d’autres points de broderie (point lancé/passéplat/point de tige) qui permettront de s’affranchir de la texture des tissus (trame visible néces-saire pour réaliser des points de croix) et donc de broder des motifs plus élaborés, – Développer éventuellement d’autres catégories d’objets textiles à fabriquer. -Mettre en place la commercialisation des sacs Un des freins majeurs à la création et au développement de nouveaux objets était du au fait que l’atelier disposait de très peu de matériels, notamment dans la diversité des matières textiles et du choix des couleurs de fils (problème de gamme colorimétrique).

///PRÉPARATION DE NOTRE MISSION

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+ Objectifs création +

Compte tenu de notre parcours professionnel, nous souhaitions adopter une démarche de travail de jeunes designers, en suivant les différentes étapes de création d’un carnet de tendan-ces. Un carnet de tendances est un répertoire référentiel dans la recherche créative, composé d’une première partie liée à la recherche motifs, d’une deuxième liée à la recherche colorimé-trique et des différentes harmonies en terme de gammes de couleurs, d’une troisième liée aux propositions de compositions, puis d’une dernière liée aux techniques souhaitées et employées.Ainsi, notre objectif était d’extraire différents pôles de tendances à partir de l’Art de vivre au sein du village et de notre expérience sur place. Dans un contexte où il n’y avait aucune pratique artisanale auparavant, nous avions à notre disposition toutes les libertés de création possibles.Notre but était la réalisation d’un accessoire, de type pochette pratique, dont la cible serait le marché occidental (tourisme au Maroc et exportation en France). Tout en respectant le souhait émis par l’atelier de travailler avec la technique de la bro-derie et de la couture. De notre côté, nous cherchions à obtenir un rendu graphique plus ornemental et plus fourni, telle une valeur ajoutée, afin que chaque produits témoignent d’un réel investissement de temps et de minutie. Le choix des différentes gammes de couleurs allait se justifier directement sur place; inspiré d’une part, par notre propre observation « sur le terrain », d’autre part, provenant des propres goûts personnels de chaque femme de l’atelier. D’un point de vue technique, nous souhaitions leur apprendre de nouveaux points de bro-deries (point de poste, point d’abeille, enrobage, point dessin), la technique de fabrication de «pompons fleurs» et de «pompons-rideaux», celle de la réalisation d’écheveaux de teinture et de bobines, une première initiation au dessin et un perfectionnement avec la machine à coudre.Ainsi, d’une manière plus générale, nous voulions les initier à une démarche de création, à une méthode de travail et ancrée dans une réalité du marché du design.

+ Objectif gestion du matériel consommable et investissements +

Pour fournir un stock de matériels prêts à être utilisés et nécessaires à la continuité du développement du projet, un premier investissement financier a du être mis en oeuvre. Celui-ci a été à l’initiative de l’Association Back Up Rural, qui a fait un don de 100 € pour l’achat de nouveaux matériels, à Paris puis sur place, dans différents points de vente au Maroc.

///PÉRIODE D’AUTONOMIE

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Au retour d’Agnès et Isabelle en France, l’atelier a été livré à lui-même, devant fonction-ner et avancé en toute autonomie, sans l’aide des bénévoles. Une période qui a été très productive et bénéfique, puisque les femmes ont continué à perfectionner leurs savoirs dans la technique de broderie (les points que leur avaient enseigné Agnès et Isabelle). Elles ont été à l’atelier tous les dimanches en alternant deux groupes de tra-vail. En terme de réalisation, 24 endroits de sacs ont été brodés, ainsi que 26 envers ont été surfilés. L’assemblage à la machine à coudre restait à faire, les femmes n’ayant pas encore ap-pris à utiliser la machine.

///CONTEXTE D’ARRIVÉE

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Les conditions de notre arrivée étaient les suivantes: nous devions être présentes à l’ate-lier en plein mois de Juillet, et qui plus est, le mois de Ramadan dans l’ensemble du Maroc. C’était donc en période de vacances scolaires, période pendant laquelle les familles se retrou-vent de nouveau réunies (les enfants faisant leurs études supérieures par-exemple, retournent chez leurs parents). De ce fait, les femmes allaient certainement être plus occupées par les activités liés à la maison. Une réorganisation de l’emploi du temps de la semaine allait être opérée, puisque le rythme de vie pendant le Ramadan offre un quotidien différent que le reste de l’année (une vie essentiellement nocturne). De fortes chaleurs provenant des vents chauds du Sahara étaient prévues.Le lieu de travail résidait toujours dans une des classes de l’école. La seconde était réservée au déroulement de la prochaine mission destinée aux enfants, avec l’arrivée de nouveaux bénévo-les la deuxième semaine de notre séjour.

Nous devions également prévoir une première organisation pour la gestion des comptes et des recettes de l’atelier, concernant les futures ventes de sacs. Pour la gestion actuelle de l’argent de l’atelier, Saadia Gaboune est la personne qui s’occupe d’inscrire les revenus dans un carnet (à demander une fois sur place), et de noter les fréquences d’assiduité de chacune au travail.

+ Identification des contraintes et enjeux +

– optimisation du budget– quels sont les membres permanents au sein de l’atelier?– présence de nouvelles arrivantes?– manque de matériels de teinture sur place,– présence d’une seule machine à coudre, de mauvaise qualité.

///RÉALISATION DE LA MISSION

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+ ÉTAPE 1 : PARIS +

+Réunion du 3 Mai de la Guilde pour la préparation des bénévoles avant leur départ.

+Rencontres d’Agnès et Rékia afin de préparer notre mission.Echange de mail avec Abdellah Bounnit instituteur de l’école de Tafraout N’ Gaboun ainsi qu’avec les bénévoles qui allaient nous rejoindre sur le site mi-juillet pour une mission d’anima-tion et de soutien scolaire pour les enfants.

+Achat de matériel dans les magasins et fournisseurs parisiens. Avec les 100€ d’investissement de Back up Rural.

IDM Mercerie 8 rue Française Paris IIème (métro Réaumur)>Teintures Dylon petites capsules (rouge scarlet, désert, noir ebony, bleu king fisher, vert jungle freen, vert emerald, bleu deep blue), grande dose pink flamingo> 3 pelotes de laine jaune flou, orange et fuchsia>cordelette deux tailles blanche IDM >3 pelotes coton (IDM)

Dons Marion > 10 bobines fils dans les tons de rouges > 8 bobines dans les tons sables >corde de chanvre

Dons Rékia >10 ciseaux Rékia > 2x1m de pompons jaune et marron

Nous avions fait le choix d’entreprendre notre démarche créative surplace. Etant notre premier voyage au Maroc pour toutes les deux il s’agissait de découvrir la culture marocaine et de puiser notre inspiration avec les éléments quinous entouraient. Les choix en terme de création se sont fait au fil de notre séjour.

+ ÉTAPE 2 : FÈS +capitale de l’artisanat marocain

Visites de nombreux ateliers d’artisans (confection Babouches, kaftans, céramiques, tan-neries, tissages)Observations et connaissances de nouvelles techniques locales

Achat de matériels pour l’atelier dans le souk de la medina: > fil de soie d’agave achat Fes>sequins doré et argenté (souk Fès) >ZeligesPremière étape d’inspiration pour l’élaboration du carnet de tendance, étape d’immersion dans la culture marocaine.

+ ÉTAPE 3 : MARRAKECH +

Visite du musée berbère dans l’enceinte du Jardin Majorelle - Fondation Pierre Bergé/Yves Saint-Laurent. Inspiration motif découverte de la culture berbère à travers des objets de collection. Déposer les 4 sacs à Fatimzara pour le Ryad.

+ ÉTAPE 3: ARRIVÉE À SIDI IFNI +

Achat de matériels pour l’atelier dans une petite mercerie (adresse donnée et conseillée par Agnès):6m tissus à broder mercerie Sidi Ifni 210 DRH (tissus en coton à teindre)

Note : Possibilité d’acheter du fil de soie d’agave et des galons tissés en soie d’agavePossible fournisseur de matériel pour l’atelier accessible aux femmes. (elles se rendent réguliè-rement à Sidi Ifni)

+ ÉTAPE 4 : TAFRAOUT N’ GABOUN +

le samedi 6 juillet 2013/

PREMIER JOUR : RENCONTRE

Les brodeuses sont arrivées au compte goutte, elles étaient une petite vingtaine. Nous avons pu rapidement découvrir leur fort tempérament ainsi que leur accueil généreux. Nous nous sommes toutes deux présentés puis elles ont fait de même, une à une donnant leur nom, prénom et âge. Nous avions disposé le matériel sur les grandes tables de la classe afin de leur présenter les nouveaux fils, les paillettes, teintures etc. Nous leur avons donc fait part de l’aide de 100€ de Back Up Rural qui nous a permis de fournir un petit stock de matériel à l’atelier ainsi que des dons provenant de Back Up Rural et de la part de Marion. Nous leur avons expliqués où nous avions acheté les fournitures (Paris-Fès-Marrakech). Elles nous ont présenté le travail qu’elles ont réalisés durant l’absence de bénévoles et en continuité de la formation qu’elles avaient reçu d’Agnès et Isabelle. Nous étions enchanté de découvrir leur production, généreuse en nombre et en création. En effet, certaine brodeuse se sont amusées à faire de nouveaux motifs. Nous étions ravie de voir qu’elles avaient pris des initiatives créatives et que la qualité de réalisation progressait nettement. Nous leur avons présenté notre projet, les objectifs de notre venue. Toutes deux ayant tout juste fini nos diplômes respectifs en design textile (BTS Mode- Textiles et Diplôme de Mé-tiers d’Arts Texiles) nous souhaitions leur transmettre la démarche de création que nous avions pu apprendre à l’ESAA Duperré, en s’adaptant bien sûr à l’atelier. Notre méthode de création devant ainsi faire un maximum intervenir les participantes de l’atelier ; notre méthode de créa-tion s’organisait en quatre étapes : -Atelier initiation Motif-Atelier initiation couleur-Apprentissage de nouvelle techniques-Création produit - forme

Nous allons alors expliqué notre désir d’apprendre de leur culture afin de créer des sacs dont la source d’inspiration émane de leur quotidien et des éléments qui font partis de leur vie. En effet, aucun artisanat n’est réalisé à Tadraout N Gaboun ce qui laissait le champs libre à toute création, autant esthétique que techniques dans les limites des contraintes de produc-tion et de réalisation. Leur implication à nous faire partager leur vie et leur univers était alors essentielle. Le but de notre projet étant leur indépendance, nous leur avons expliqué qu’il était important qu’elles prennent des initiatives et qu’elles produisent des objets qu’elles aiment. Nos sacs devant être une sorte d’illustration de la culture tamazigt au village de tafraout N Ga-boun. Compte tenu du début du Ramadan et de la chaleur estivale nous avons choisi ensemble de travailler le matin, les séances d’atelier commençant à 7h-7h30 et se terminant à l’heure du repas. Pour le lendemain nous leur avons demandé d’apporter des objets qui leur plaisent avec des motifs.Cette première séance s’est terminé dans les chants et en dansant comme la plus part de celles qui suivirent...

le dimanche 7 juillet/

SÉANCE D’INITIATION DESSIN-MOTIFS

Nous souhaitions que les brodeuses dessinent elles même leurs motifs afin que nous puis-sions puiser dedans pour la création des broderies. Nous avions préparé du papier et des crayons à papier (sans gomme) afin d’avoir une unité de production. La majorité avaient apporté un objet (bijoux amazigt, tissus, …). Nous avions fait un dessin de bijou au tableau, distribué le matériel et nous leur avons demandé de commencer à dessiner. Certaines avaient pris le crayon en devançant la formulation de nos consignes témoi-gnant leur enthousiasme. Elles avaient alors entre 14 et 50 ans à peu près et nous nous sommes rendu compte très rapidement qu’un tier n’avait jamais appris à tenir un crayon donc n’étaient jamais allées à l’école. Une ou deux se sont montrés réticentes (les plus âgées) affirmant qu’el-les faisaient du surfilage et pas du dessin. Nous avons pu découvrir le caractère bien trempé de certaines mais en insistant un peu pour leur faire faire cette exercice dont elles n’avaient pas l’habitude et toutes se sont mises à dessiner dans la joie et la bonne humeur qui leur est pro-pre. Nous nous réjouissions de leur ouverture d’esprit et de la confiance qu’elles avaient en nous. Nous étions consciente que faire dessiner des adultes n’est pas forcément chose aisées d’autant plus quand elles se retrouvent confronté au fait qu’elles ne savaient pas tenir un crayon pour certaine. (Faite l’expérience autour de vous pour faire un atelier dessin de motif avec votre famille, c’est source de blocage chez beaucoup de personnes!)Nous accrochions les dessins au fur et à mesure au tableau. Nous avions alors une source graphi-que très importante. Nous leur avons demandé d’apporter pour le lendemain un objet, vêtement qu’elles aimaient pour faire des recherches de gamme colorée.

le lundi 8 Juillet/

D’INITIATION À LA COULEUR

Afin que nous puissions cerner leur gout nous avions numéroté les bobines colorés pour faire un sondage des couleurs des objets qu’elles apporteraient ainsi que de leur melhfa (grand tissu qu’elles portent à la mode saharienne). Par petits groupes nous nous sommes alors présen-tées devant la table et nous leur avons fait noter leurs couleurs. Nous en avons extrait la gamme colorée pour le sac «la vie quotidienne de Tafraout N Gaboun». Puis nous leur avons appris à faire des écheveaux en dévidant les pelotes de coton afin d’opérer aisément aux teintures.

le mardi 9 Juillet/

APPRENDRE A RÉALISER DES POMPONS «RIDEAUX» ET POMPONS «FLEURS»

Toutes les participantes ne pouvant pas réaliser des broderies (problème de vue) ont été affilié au surfilage, nous avons choisi de leur apprendre à faire des Pompons de deux formes diffé-rentes en laine et en coton. La nouvelle technique est appris à tout le groupe et réalisé avec succès. Elles apprennent très vite et en deux heures toutes les laines étaient finies. Nous avions acheté de la laine à Paris de trois couleurs différentes : jaune, orange et fuchsia (remarque : il est possible d’acheter de la laine à Fès ou de la faire teindre sur commande, laine marocaine).

Nous en avons profité pour faire un sondage, elles préféraient en majorité le fuchsia. La cha-leur arrivant nous arrêtons de travailler au bout de trois heures. Réalisation : 105 pompons bleus (à teindre en noir), 8 sables, 24 jaunes à teindre en vert.

le mercredi 10 Juillet/

PREMIER JOUR DE RAMADAN - REPOS

Nous avons dit aux femmes de rester chez elles pour qu’elles se reposent. Ce jour là nous en avons profité pour trier et sélectionner les motifs et choisi les couleurs des fils à teindre en fonction des résultats de la séance d’initiation à la couleur. Nous avons fini l’inventaire du matériel apporté et nous avons fait des essaies de point de postes et du point abeille. Préparation de la séance suivante.

le jeudi 11 Juillet

Les femmes sont arrivées à partir de 7h, dès notre réveil. C’est la première journée de travail pendant la période de Ramadan. Nous avons commencé la matinée par leur apprendre un nouveau point de broderie, le « point de poste », légèrement plus difficile à réaliser que le point de croix ; afin d’apporter de la variété et de la difficulté dans la maitrise des techniques. Les femmes se sont d’abord exercées en répétant le point seul pour apprendre à bien le maitriser, puis elles ont dessiné des motifs avec ce point, pour commencer une composition.La dernière étape de l’apprentissage fut de mélanger le point de croix et le point de poste dans un même motif. Au cours de la matinée, nous avons pu constater la rapidité à laquelle elles apprenaient les nouvelles techniques et points de broderie. Elles sont preneuses d’initiativess, et choisisent elle-même la gamme de couleurs qu’elles souhaitent utiliser pour leur création de motifs. Ce matin, elles sont plus concentrées que les jours derniers. Nous n’arrivions même plus à les arrêter dans leur travail!

le lundi 15 Juilelt 2013

Au programme de la matinée :-surfilage des sacs-faire des bobines de fils -apprentissage point d’abeille-apprentissage enrobage sur cordeletteElles sont toujours motivées et nous sommes toujours aussi surprise par leur rapidité d’appren-tissage. En se concertant, nous leur proposons de leur donner un cours de langue (français pour elles, tamaziht pour nous) de 30min en fin de séance. Malgré les grandes disparité de niveau, nous arrivons à leur faire apprendre quelques mots. Celles qui sont allées à l’écoles (les plus jeune) sont ravies de pouvoir de nouveaux utiliser leurs connaissances.

le mardi 16 Juillet 2013

Au programme de la matinée :-découper et surfiler des dos pour compléter les faces de sacs à linge brodés durant notre ab-sence-finir les broderies des sacs à linge-commencer à coudre à la machine les sacs à linge. Marion a appris à Fadma à coudre les sacs (elle sait déjà utiliser une machine à coudre). Puis, nous lui avons dit d’apprendre à Saadia. Elle s’entraident très bien toutes les deux pour réaliser cette tache. Toute l’après midi jusque tard dans la nuit nous réaliser les teintures des fils et des fonds pour les trois sacs. Nous avions demandé à Hassan qu’il nous donne une vieille casserole à cous-cous dont il n’avait plus besoin. Nous avons pu réaliser nos teintureCours de français-tamaziht de 30min en fin de séance.

L’après midi jusque tard dans la nuit nous avons teint les fonds de sacs, les fils et les pompons. Hassan a eu la gentillesse de nous donner une marmite à couscous dont il ne faisait plus l’usage pour que nous puissions faire nos teintures.s Nous avons fait les teinture dans la cui-sine de l’école et nous avions étendu les fils, les tissus et les pompons dans la salle pour qu’ils sèchent durant la nuit.

le mercredi 17 Juillet 2013

Les femmes arrivent et nous leur montrons les teintures que nous avons fait la veille. Au programme :-mettre tous les écheveaux nouvellement teint en bobines-surfiler -début de la répartition des sacs selon les niveaux de difficultés des broderies. Réalisation des frises. Elles sont toutes très appliquées et contentent de commencer à broder les sacs.Cours de français-tamazigt de 30min en fin de séance.

le jeudi 18 Juillet 2013

Les différents groupes continuent les broderies de la veille. Nous avons opéré à deux méthodes de broderie : l’une en faisant le dessin sur le tissus, l’autre en comptant les points (avec le chaine et trame du tissus). Pour les plus habiles compter les points est possible mais pour celles qui voient moins bien, il est préférable de leur faire faire des broderies au dessin. Cours de français-tamazgt de 30min en fin de séance.

le vendredi 19 Juillet 2013

Les différents groupes continuent les broderies de la veille.

Nous sommes ravie de voir leur progrès et leur application. Les «surfileuses» lors du pre-mier stage de formation deviennent brodeuses et nous voyons que certaines prennent confiance en elles. Elles vont à des rythmes différents et sur une nouvelle réalisation comme celle-ci, nous devons presque faire du cas par cas. Nous remarquons qu’en ce dernier jour de la semaine, plusieurs manquantes à l’appel. Celles qui sont venues sont assez fatiguées : entre la chaleur, le ramadan, les taches domesti-ques, l’atelier le matin de 7h30 à 13h parfois (et la séance de football hebdomadaire...) ça se comprend!Cours de français-Tamazigt de 30min en fin de séance.

le lundi 21 Juillet 2013

Dernière ligne droite, début de la dernière semaine et nous devons finir les quinze sacs.Nous répartissons le travail entre différents groupes. Ainsi, une personne ne réalise pas un sac du début à la fin mais il est le résultat d’un travail collectif. Le point arrière est appris sur le tas et très bien réalisé. Nous constatons que la soi d’agave n’est pas très aisé à l’utilisation et les soeurs Gaboun trouvent une solution en torsadant le fil. (penser à la possibilité de torsader le fil directement à l’atelier avec une petite machine comme dans les rues de Fes) Cours de français-tamazigt de 30min en fin de séance.

le mardi 22 Juillet 2013

Elles continuent les broderie et certaines commencent à broder la petite fibule à l’inté-rieur du rabat, comme une petite signature. Lors de cette deuxième semaine, nous lancions la séance en veillant à la bonne compré-hension de notre demande puis nous partions une demi heure pour prendre notre petit déjeuner afin de les laisser seules et favoriser leur entraide et leur autonomie sans qu’elles aient besoin de faire appel à nous.Cours de français-tamazigt de 30min en fin de séance.

le mercredi 23 Juillet 2013

Les surfileuses ne sont pas venues ce jour-ci car nous n’avions pas de travail à leur don-ner. (problème auquel il faudra penser à l’avenir) Les participantes continuent leur broderie et nous voyons le travail bien avancer. Cours de français-tamazigt de 30min en fin de séance.

le jeudi 24 Juillet 2013

Le temps presse et les brodeuse se mettent à broder à deux sur un même sac. Nous ap-précions leur adaptabilité en cette période de «rush»! Ce jour-ci a été marqué par la broderie des paillettes dorées et argentées pour leur plus grand bonheur : on a cru qu’elles allaient mettre des sequins partout sur les sacs, nous n’arri-vions plus à les arrêter!

le Vendredi 25 Juillet 2013

DERNIER JOUR

Tout le monde continue à broder, nous aussi par la même occasion! Nous avions installer la salle pour que nous puissions en fin de matinée distribuer les diplômes. C’est dans la joie, la bonne humeur, les chants, la danse et les rires que nous avons passé cette dernière journée. Nous avons distribué à chacune d’entre elles un diplôme qu’Abdellah Bounnit avait rédigé et fait imprimer, signé par Hassan Anchoum (président d’Imoudal), Saadia et toutes les deux. Nous leur avons témoigné tous nos remerciements et nos voeux de développement de leur atelier en insistant sur notre intervention temporaire, n’ayant pour seul but qu’elles soient indépendantes. Elles ont à ce moment là choisi de mettre de coté l’argent jusqu’alors récolté et de ne pas encore le distribuer.

///RESULTATS DE L’ATELIER ET PERSPECTIVES

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+ FRÉQUENTATION +

Au cours de notre séjour, deux nouvelles sont arrivées dans l’atelier. Malgré la réorganisation du quotidien pendant la période de Ramadan et de vacances scolaires, la fréquence moyenne des femmes à l’atelier restait constant: entre 20 et 23 femmes tous les jours. Compte tenu de leur quotidien chargé, les fins de semaines nous avons remarqué une hausse de la fatigue. D’où le besoin urgent de procéder à une sorte « d’inscription officielle » qui permettrait d’assurer une assiduité quotidienne dans l’atelier, nécessaire à un bon déroulement de projets et surtout en période formation. Nous avons également pu constater que les femmes aimaient se retrouver et travailler ensemble. Le travail en groupe est donc primordial et il est très important qu’un système d’en-traide se mette en place pour consolider l’entente et l’efficacité de l’atelier. Saadia Gaboune nous a été d’une grande aide, puisque c’est majoritairement elle qui fait présence de traductrice entre le groupe et les bénévoles intervenants. D’autant plus que les femmes semblent vraiment lui faire confiance. Saadia a des possibilités de déplacements vers Sidi Ifni et où nous pouvons racheter du matériels pour l’atelier. Nous soulignons donc son rôle important dans la mise en place du projet. Fadma, l’épouse d’Abdellah nous a aussi été d’une grande aide pour la traduction.D’autre part, nous avons apprécier la finesse qu’elle avait à comprendre les relations humaines au sein de l’atelier et de nous en faire part pour que nous puissions adapter notre comportement au groupe. Habitant à Tiourza, nous espérons qu’elle pourra tout de même poursuivre son activité à l’atelier.

+ PRODUCTION ET COMMERCIALISATION +

En terme de productivité et de commercialisation, Hassan Anchoum (directeur de l’As-sociation Imoudal pour le Dévelopemment) nous a soumis l’idée de produire des sacs en cuir (matière première local) qui permettraient aux habitants d’acheter les produits crées et de participer au développement des ressources de l’atelier. Il nous a expliqué que la solidité et la souplesse du cuir étaient particulièrement appréciées par les locaux, qui recherchaient avant tout des objets pratiques et pérennes, à utiliser au quotidien. Une idée, qui pour nous est à prendre en considération dans les prochaines perspectives de projet. Nous pensions également proposer de vendre les sacs aux marchands ambulents de bijoux et autres accessoires, qui se déplacent de village en village.

Pour ce qui est de la production, nous avons pu constater l’importance accordée par les femmes d’avoir leur propre sac à réaliser, tout du long de sa création. Malgré le fait que l’on souhaite instaurer une répartition de travail collective, à l’attention d’un même objet.De même que nous avons été confrontées à certains problèmes liés au fait que quelques unes d’entre elles (surfilleuses) avaient de grandes difficultés à broder (problèmes de vue, par-exem-ple). Des disparités de compétences ont donc pu être observées. Mais ce qui est le plus important à souligner, c’est leur incroyable capacité à apprendre rapidement, leur exigence de minutie et de réaliser un travail de qualité, ainsi que leur forte volonté à progresser et à faire avancer le projet. Chacune d’entre elles est réceptive à accueillir de nouvelles idées. D’une manière générale, il est très agréable et enrichissant de travailler à leurs côtés.remarque: au cours de notre mission nous avons pu prendre le travail des brodeuses en photo mais ce n’est qu’en gagent leur confiance que nous avons pu prendre des photos de leur visage. En effet, elles redoutent que leur photos soient mises sur internet. Le respect de leur souhait est primordial pour garder la confiance qu’elles nous accordent ainsi que celle de leur famille.

///PERSPECTIVES

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En terme de perspectives d’avenir, nous avons remarqué l’engouement porté à l’ap-prentissage du français, en fin d’atelier. Qui plus est, la maitrise d’une langue étrangère est favorable et valorisante dans une démarche professionnelle, ne serait-ce que pour faciliter les échanges avec les intervenants de l’atelier. Si nous créons une adresse mail de l’atelier, il sera indispensable que l’une d’entre elles au moins puisse écrire le français. Enfin, notre questionnement final est de savoir quelle femme est chargée d’être respon-sable du matériel, qui rachète et renouvelle le stock de l’atelier ?

///COURS DU SOIR POURLES HOMMES

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A la fin de la première semaine quatre nouveaux bénévoles sont arrivés au village : Lise, Camille, Romain et Claire. Ils ont réalisé une mission d’animation et de soutien scolaire aux en-fants de l’école. Nous nous sommes très bien entendus et nous avons rapidement formulé le souhait d’avoir un projet commun. Notre mission de broderie couture ne touchant que les femmes du village, et celle de Lise, Camille, Romain et Claire concernant les enfants, il était extrêmement important à nos yeux de faire une activité à destination des hommes de Tafraout N Gaboun afin que notre action ne porte aucune discrimination. Nous avons alors proposé à Hassan et Abdellah de donner des cours de français aux hommes. Ils ont été tout à fait motivé à nous aider dans ce nouveau projet. Nous avons alors convenu de donner ces cours le soir à 22h après le déjeuner du ramadan (nous nous sommes adaptés à l’organisation de leurs journées, se faisant majoritairement la nuit en cette période). Une vingtaine d’hommes entre 18 et 50 ans (approximativement) ont répondu présents et nous avons fait deux groupes : un premier pour les débutants (apprentissage de mots de bases) et un deuxième constitué de personnes parlant français couramment mais en demande de mise en pratique et de partage culturel (mis en place de débats à thème : histoire de France, Histoire du Peuple Amazigt, le couple, la drogue…). Chaque groupe était constitué de trois bénévoles et Hassan était toujours présent pour nous aider à donner les cours aux débutant. Nous avons été enchanté de cette expérience et très touché par leur motivation à rece-voir des cours malgré le fait que nous soyons, pour la plus part, plus jeune qu’eux et qui plus est, pour cinq d’entre nous, des femmes. Leur volonté d’apprendre et de partage des cultures a été sincère et nous espérons qu’Hassan pourra continuer à donner des cours ponctuellement et selon sa disponibilité car nous avons découvert chez lui un vrai talent d’enseignant! A la fin de chaque séance, les hommes ont joué de la musique amazigt et chanté pour nous. Nous avons tenté de leur rendre la pareil en préparant une chanson avec Romain à la gui-tare.

Les hommes nous ont fréquemment demandé à votre le travail des femmes. Nous leur avons présenté régulièrement l’avancé du projet en leur expliquant l’évolution de la réali-sation des sacs. Ils ont pu aussi nous voir au travail et nous aurions pu presque instaurer des «débats&broderie».

Cette expérience s’est avérée très positive. Nous avons préparé un soir un grand diner moitié français, moitié marocain. Tout le monde aidant à la préparation de ce diner. Ainsi, nous avons eu la sincère impression que notre motivation à tous pour partager et apprendre par l’échange pouvait dépasser la langue, les frontières culturelles, d’âges et de sexe.

///REMERCIEMENTS

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Cette mission initiée par les Associations Imoudal (Tafraoute N’Gaboune, Maroc) et Bac-kUp Rural (Poissy France) et soutenue par la Guilde du Raid, n’aurait pu aussi bien se dérouler sans l’aide:

De l’Association Imoudal pour le Développement: UN GRAND MERCI à Hassan Anchoum (Président) et à l’ensemble des membres de l’as-sociation, pour leur confiance et leur intérêt à l’égard de notre travail au sein de l’atelier. De nombreuses visites nous ont été rendues et notre projet a été soutenu.

UN GRAND MERCI à Abdellah Bounnit (instituteur à l’école de Tafraoute N’Gaboune), pour ses nombreux conseils et son accueil au sein de l’école. Nous le remercions de nous avoir fait partager son engagement auprès des habitants en milieu rural, afin d’aspirer à de meilleures conditions de vie et à un plus grand respect des droits humains.

MERCI à tous les deux pour votre investissement dans le bon déroulement de notre mis-sion, pour avoir activement participer à notre épanouissement durant notre séjour au village. MERCI pour votre implication, votre disponibilité et l’accueil que vous nous avez réservé dès notre arrivée sur les lieux.

LE PLUS GRAND DES MERCI à toutes les femmes et jeunes filles de l’atelier, travailler à vos côtés est le plus beau des cadeaux.

Ainsi que tous les autres membres qui nous ont été d’une aide précieuse lors de notre vie quotidienne (Ali, Ahmed Dhamour, les familles...).

UN GRAND MERCI aux hommes du village pour leur ouverture d’esprit et leur investisse-ment personnel durant les cours de français, tout niveau confondu.

MERCI de l’attention qu’ils ont porté envers le travail des femmes et de leur soutien.

Enfin, MERCI à Back Up Rural (Rekia Chakrid) et à La Guilde du Raid (Vanessa Gilles, res-ponsable des missions courtes).

Un remerciement spécial à Agnès Lehuen et Isabelle Haack, avec qui nous avons un im-mense plaisir à travailler.

///CONCLUSION

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Pour conclure ce rapport et après avoir revisité ce séjour à Tafrout N Gaboun, l’une des premières pensées qui nous vient à l’esprit est l’envie certaine de retourner au village. Notre expérience a été d’une grande richesse et nous sommes ravies d’avoir pu autant partager durant trois semaines. Les participantes de l’atelier couture broderies ont été d’une immense générosité et leur motivation au travail donne beaucoup d’espoir et d’énergie pour la poursuite du projet. La prochaine étape reste à monter la coopérative et faire connaitre le projet au sein du village afin de s’assurer du soutien total des familles, et de mettre en place le circuit de commerciali-sation des produits. Au delà de l’acquisition d’une magnifique expérience professionnelle et d’avoir pu décou-vrir un travail de qualité réalisé par les femmes, se sont de très belles amitiés que nous avons tissés au sein de ce village.