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Congis-sur-Thérouanne
Etrépilly
Trocy-en-Multien
La Thérouanne La Thérouanne en terre de mémoire
La Thérouanne introuvable
L’eau n’appartient à personne
à Etrepilly
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Paysage de la Thérouanne.
La Thérouanne ne fait rien comme les autres rivières de Seine-et-Marne : partantdu nord-ouest du département, elle s’en va vers le sud-est, alors que les autrescours d’eau convergent, en général, vers Paris. Elle doit cette orientation auxcollines de la Goële qui, du nord de Meaux, s’élèvent à Penchard, puis àMonthyon, se couvrent de bois à Montgé, et donnent la butte de Dammartin,dernier relief que survolent les avions venant de la plupart des pays d’Europeavant de s’abaisser dans l’axe des pistes de l’aéroport de Roissy. Ainsi empêchéede rejoindre la Marne par un chemin plus court, elle coule jusqu’à ne plus rencontrer un tel obstacle, pour la retrouver quelques kilomètres seulementaprès la confluence de l’Ourcq. Rivière modeste, qui ne dépasse pas 25 km delongueur, elle est totalement seine-et-marnaise. Entre les sources de Gouesche àSaint-Pathus, et sa confluence à Congis-sur-Thérouanne, elle accueille le ru deVaux venant des collines de Goële, longe l’étang de Rougemont après Oissery, sedivise, fréquemment, en petits bras, reçoit le ru d’Avernes qui, avec ses propresaffluents, sort du massif de Montgé et draine Saint-Soupplets, puis celui deBrégy venant du département de l’Oise et celui du Bois Colot, au sud, pour finiravec les ruisseaux des Elouats et de Beauval, qui coulent de part et d’autre de labutte de Trocy-en-Multien.
Les terres du plateau où serpente la Thérouanne sont faites de riches limonsportant blé, maïs, betterave et colza ; elles sentent la Picardie, et au-delà, le nord: ona pavé des entrées de champs, la brique apparaît dans les vestiges d’une distillerie ;
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La Thérouanne en terre de mémoire
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les paysages s’ex posent au vent, leshaies sont rares, et les fermes gran-des et peu nombreuses. Mais pourles attentifs, cette terre riche etlaborieuse se révèle terre demémoire : croix, monuments, dra-peaux dans les cimetières, et par-fois, encore, impacts de tirs sur lesmurs, obligent au souvenir deceux qui y ont défendu la patrie.
Dans ces horizons longs, c’est lapetite vallée de la Thérouanne etles vallons de ses affluents qui atti-rent le regard. Les routes y plon-gent de temps à autre, passantmarais, prairies, peupleraies ouanciennes cressonnières. Elles neconvergent vraiment qu’à Etrépillyqui, avec Oissery à l’amont, etCongis à l’aval, sont les seuls bourgs
à s’être construits autour de la rivière, les autres se nichant sur le plateau, ou se per-chant sur ses rebords, chacun près de son ru, ou, au moins, de sa fontaine.
Le cours de la Thérouanne aurait pu être tranquille ; c’était compter sans l’intérêt qui lui a été porté lors de la construction du canal de l’Ourcq(l’impérial…). Elle est ainsi deux fois moins large et profonde à sa confluence (1,5 mètre et 30 centimètres), qu’au milieu de son cours. La cause s’en trouveau Gué-à-Tresmes, juste avant Congis, où un petit canal lui prélève une grandepart de son eau, s’écarte de son cours, et rejoint le canal de l’Ourcq. Un peuplus loin, la rivière passe sous celui-ci, traverse discrètement Congis et, à laGueule du Ru, se raccorde au petit bras de Marne qui contourne l’île d’Ancre.
Des 17 000 habitants de son bassin versant, les trois quarts se trouvent àl’amont, là où l’on est le plus près de Paris, de l’aéroport, et des grandes carriè-res de gypse qui, à Saint-Soupplets, donnent le plâtre. Une zone industrielle ici,des serres à Oissery, la moderne usine de traitement des déchets ménagers detoute la partie nord de la Seine-et-Marne, à Monthyon, quelques autres carrièresplus modestes et de rares élevages constituent, avec, comme partout, commerceet artisanat, l’essentiel des activités de cette petite région. Avant le prélèvement de son eau au Gué-à-Tresmes, le débit de la Thérouanne est, en moyenne, de600 litres par seconde, mais lors d’une crue exceptionnelle, c’était le 10 juillet2000, il s’éleva à 11 m3/s. Sa qualité est plutôt moyenne, car dès l’amont ellesubit de nombreux rejets, trop conséquents au regard de ses modestes dimen-sions ; elle s’améliore vers l’aval avec néanmoins des teneurs toujours élevéesd’azote et de phosphore qui y exagèrent le développement d’algues, et rédui-sent ses potentialités piscicoles ; d’ailleurs une seule association y exerce la
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Monument Hildevert à Forfry.
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Le château de Fontaine-les-Nonnes.
pêche, principalement dans son coursaval. L’étang de Rougemont est classéparmi les zones naturelles d’intérêtécologique, floristique ou faunistique(ZNIEFF cf. p. 52) en raison notam-ment de sa flore spécifique desmilieux humides. Sur les sept mou-lins recensés en 1851, deux sont par-venus jusqu’à nos jours, à Etrépilly etau Gué-à-Tresmes.
La Thérouanne est menacée : àl’ouest, où elle débute, les villes sedéveloppent sous l’attraction del’agglomération parisienne toute pro-che. La ruralité du reste de son coursne suffit pas pour annuler l’impactdes eaux qu’elle recueille à l’amont :réguler le débit des apports d’eauqu’elle reçoit par temps de pluie,
mais aussi améliorer la qualité de toutes les eaux que l’on y rejette, directement,ou par le biais de ses affluents, devraient devenir des priorités reconnues collec-tivement, à l’échelle de son bassin versant. Elle nous le rendrait bien, au détourde promenades qui, pour beaucoup, restent à inventer.
Launette, la petite voisine du nord
Au moment de quitter la Thérouanne, il nous faut faire une modeste entorse à lalogique des bassins versants (Marne d’abord, Yerres puis Seine), car sinon, nousomettrions de citer un cours d’eau, très discret dans notre département, mais
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Ancien moulin à Etrépilly.
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qui reçoit les eaux de villes qui ont, elles aussi, brutalement grandi depuis quedes avions se posent à Roissy. Il s’agit de la Launette qui fait partie du bassin del’Oise ; et cette petite exception géographique est due aux collines de Goële,que domine Dammartin. Une butte ayant toujours plusieurs côtés il fallait bienque des ruisseaux se dirigent vers le nord, et regardent le département voisin : à la suite de sa source située à Marchémoret, ce sont les eaux issues de Rouvres,d’Othis, la ville construite au milieu des champs, et d’une partie de Dammartin,qui alimentent la Launette, par petits rus interposés. Après avoir quitté le dépar-tement, la Launette passe par Ermenonville et l’abbaye de Chaalis, puis elle
rejoint la Nonette qui bordeSenlis et coule fièrement,plus large qu’un canal, auparc de Chantilly, avant de sejeter dans l’Oise. A Conflans-Sainte-Honorine, et commel’avaient fait, avant Paris,toutes les autres rivières deSeine-et-Marne, Launette,Nonette et Oise, à leur tourdonnent la Seine. M.B. !
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Pont sur la Thérouanneà Oissery.
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Bords de la Thérouanneà Etrepilly.
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J’ai pour la Thérouanne une affection toute particulière. Elle coule jolimentau fond de mon jardin. Ailleurs elle est bien difficile à suivre, elle s’éloigne à la limite des champs, inaccessible lorsqu’on cherche à se rapprocher ou
surgit de part et d’autre d’un pont nous laissant stupéfait. Ses méandres nousconfisquent une grande partie de sa vue.
Les sources sont à Saint-Pathus où la rivière est encore un ru, les autres luidonnent au fur et à mesure de plus en plus de consistance.
Cette rivière a plus de vingt kilomètres, elle a deux sœurs, la Gergogne et la Grivette dans l’Oise, qui coulent dans le même sens et se jettent dans l’Ourcq.A Oissery se trouve le tombeau des Barres, un vaillant chevalier du Moyen Age
dont le château était voisin. Il fut enterré entre ses deuxfemmes. On y cultive fleurs etarbres en quantité. Puis la riviè-re se repose dans l’étang deRougemont et musarde jus-qu’aux ruines romantiques deForfry qui se disloquent de plusen plus dans le fracas du temps.A la Ramée demeure, près du
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Les ruines de Forfry.
La Thérouanne introuvable
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pont, un moulin rénové avant que larivière ne croise la jolie demeure de laMarre habitée pendant la Révolutionpar le marquis de Boissy, puis le châ-teau de Fontaine-les-Nonnes quiconserve un beau porche et fut pendantdes siècles le domaine des religieusesaux vêtements blancs, guimpes plisséeset capuches noires. Elles représentaientles plus grandes familles de la région.Le monastère éminent a traversé nonsans mal la guerre de Cent ans et les batailles de la Réforme. Les religieu-ses furent évincées à la Révolution lais-sant la famille Aubry Vitet proche desprinces. Etrepilly, fille de l’évêché ethaut lieu de la bataille de la Marne, au
vaste cime tière militaire, possède une place où voisinent l’église au clocher duXVIe siècle, la ferme de l’Evêque, la maison de maître où habita le seigneur de Longvilliers, gouverneur de la Martinique qui laisse aujourd’hui la place auxPresses du Village, après avoir été la demeure du célèbre serrurier Fichet qui inventale coffre-fort.
On arrive bientôt à Congis où le château du comte de la Myre Mory est deve-nu lycée technique. Dans le cimetière voisin, onze jeunes de Choisy furentfusillés et enterrés par les Allemands. Un peu plus loin la Thérouanne se laisseboire en partie par le canal assoiffé avant d’aller se jeter dans la Marne. C.deB. !
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Notre-Dame-de-la-Marne.
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Le cimetière de Chambry.
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L’eau n’appartient à personne
Comme presque toutes les rivières, la Thérouanneest un cours d’eau «non domanial», ce qui signi-fie que ses berges, et le lit (le fond) de la rivière fontpartie des propriétés riveraines ; seule l’eau qui s’yécoule est le bien de tous. Ce sont donc les riverainsqui, en leur qualité de propriétaires, ont la charge del’entretien des berges. A l’inverse, et c’est alors plu-tôt le cas des fleuves, ou de larges rivières, les coursd’eau «domaniaux » relèvent de la gestion de l’Etat ;celui-ci peut être propriétaire, ou non, des berges,mais en tout cas c’est lui qui en assure la gestionet l’entretien ; presque toujours c’est au niveau d’ou-vrages tels que les écluses que l’Etat possède lesberges, et donc le lit, de ces rivières. Ailleurs, là oùl’Etat n’est pas propriétaire, les propriétés riverainessont frappées de servitude (de marchepied, ou dehalage sur la rive où, autrefois, des chevaux tiraientles convois flottants). Un cours d’eau est domanialgénéralement parce qu’il est navigable, et c’est cettecapacité à supporter la navigation qui a justifié, enson temps, les investissements réalisés par l’Etat,longtemps au travers du Service de la Navigation, etdepuis 1991 par un Etablissement public : VoiesNavigables de France.Lorsque les cours d’eau faisaient, activement, tournerles roues des moulins, une bonne gestion, tout aulong de la rivière, était indispensable pour satisfaire
l’intérêt collectif : dérivations, bras d’amenée et dedécharge, et cours d’eau eux-mêmes étaient entrete-nus afin d’éviter le colmatage des ouvrages, ou desdébordements nocifs. L’abandon progressif des mou-lins, avec l’émergence de machines à vapeur alimen-tées au charbon, puis de l’électricité, ainsi que denouveaux moyens de transport s’affranchissant descours d’eau, ont rapidement provoqué le désintérêtvis à vis de ceux-ci. La végétation des rives reprit rapi-dement son exubérance, et d’année en année, bran-ches puis arbres tombèrent à l’eau, constituant desembâcles (accumulation de bois mort, obstruant lescours d’eau) à l’origine de nouveaux débordements,d’érosion de berges, et de déstabilisation des cons-tructions. Afin de se substituer aux riverains qui, dansleur très grande majorité, ne s’intéressaient plus à larivière ou ne savaient plus comment en entretenirles berges, presque partout les communes se sontgroupées en syndicats, d’aménagement, puis d’entre-tien de rivière. En Seine-et-Marne, ce mouvements’est surtout manifesté à partir de 1960, et accéléréà la suite des grandes crues des années 1980. LeSyndicat Intercommunal d’Aménagement de laThérouanne s’est constitué en 1968, à partir des8communes sur le territoire desquelles elle coulait ;il s’est élargi plus tard aux 14 communes dont toutou partie du territoire faisait partie de son bassin
versant (ensemble des terresoù l’eau de pluie, en ruisselant,s’écoule vers la même rivière).Les divers syndicats qui se sontconstitués comme celui de laThérouanne, étaient assistés parla Direction départementale del’agriculture ou celle de l’équi-pement, afin d’entreprendre destravaux, souvent lourds, de res-tauration du lit des rivières, decertains barrages, des berges…Par la suite, ils ont engagé desprogrammes d’entretien, élabo-rés, et suivis, par l’Equipe dépar-tementale d’assistance tech-nique à l’entretien des rivières
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≈Exemplede la constitutiond’embâcles aupied d’un pont.
≈Page de droite,Ru des Avernesà Forfry.
créée par le Conseil général, avec un
financement de l’Agence de l’Eau
Seine-Normandie. Ces tra vaux d’en -
tretien régulier, répartis sur 4 ou 5
années pour couvrir l’ensemble du
cours de la rivière, voire de ses
affluents, sont subventionnés par le
Département et l’Agence de l’Eau, ou,
dans le cas du bassin versant de la
Marne, par l’Entente interdéparte-
mentale pour l’aménagement de la
rivière Marne et de ses affluents
(cf p. 108). Un seul syndicat, dans le
sud du département, fait participer
financièrement les riverains à ces tra-
vaux d’entretien ; partout ailleurs,
c’est la contribution des communes
qui composent le syndicat, générale-
ment en fonction du poids de leur
population et de la longueur de berges
sur leur territoire, qui constitue le bud-
get de celui-ci. Les travaux d’entretien
consistent d’une part à enlever les
embâcles et à curer ponctuellement les zones les plus
envasées, et d’autre part à éliminer les arbres morts
ainsi que les branches basses qui peuvent faire obs-
tacle à l’écoulement des eaux en période de crue.
En zone de culture, c’est plus souvent un débrous-
saillage qui est effectué. On tente néanmoins
d’essayer d’obtenir des riverains qu’ils admettent de
laisser repousser des arbustes et des arbres en haut
de la berge : cela permet de tenir celle-ci, surtout
lorsque les ragondins, qui se sont multipliés à ou -
trance, y creusent trop de terriers. Cela permet
d’ombrager la rivière, de constituer des abris pour
les poissons d’un côté, mais aussi pour les oiseaux de
l’autre, et enfin de marquer à nouveau le passage des
cours d’eau dans le paysage.
La réglementation sur l’eau est l’une des plus com-
plexes ; sur chaque cours d’eau, même le plus
modeste, il y a des droits et des obligations, des
autorisations à obtenir (prélèvement, rejet) ou des
interdictions, que deux types d’agents sont suscepti-
bles d’instruire ou de rappeler aux collectivités, entre-
prises, ou personnes concernées. La police de l’eau,
la plus générale, et la police plus spécifique de la
pêche, sont exercées par des agents de l’Etat : ceux
de la Direction Départementale de l’Agriculture et de
la Forêt (en cours de regroupement avec celle de
l’Equipement) ou ceux du Service de la Navigation,
ces derniers intervenant uniquement sur les cours
d’eau domaniaux : Seine, Marne, Yonne. Des garde-
pêches assermentés, et des agents de l’Office natio-
nal de l’eau et des milieux aquatiques peuvent eux
aussi intervenir, et dresser procès-verbal en cas
d’infraction à l’une de ces polices, tout comme les
représentants de la Police ou de la Gendarmerie.
Dans le cas de la Thérouanne, police de l’eau et
police de la pêche sont donc exercées par la Direction
départementale de l’agriculture et de la forêt, comme
dans tous les autres cours d’eau secondaires de
Seine-et-Marne.
Enfin, pour pouvoir assurer l’entretien régulier de ces
cours d’eau, il a fallu instaurer des servitudes de
passage, au moins sur l’une de leurs rives, afin de
garantir le passage des personnes et des matériels
nécessaires à celui-ci ; les rivières du département en
disposent depuis de nombreuses années.
Ce qui fait qu’en fin de compte, pour préserver
une eau qui n’appartient à personne, la gestion des
rivières est plus complexe qu’il n’y paraît ! M.B. !
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