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« Tu n’as pas dansé avec moi… »,avait-il murmuré à son oreille d’une voix profonde et troublante.Et il l’avait entraînée dans un slow. Sans ses talons, il la dépassait d’une bonne tête. Elle avait

passé les bras autour de son cou et, après quelques pas, l’avait vu s’incliner lentement vers elle. Ellen’avait rien fait pour empêcher ses lèvres de se poser sur les siennes, d’abord doucement, puis defaçon de plus en plus appuyée. Ce traître embrassait divinement bien.

POUR UN INSTANT DE VÉRITÉ

Pauline Libersart

Corrigé par Jeanne Corvellec

ÉDITIONS LASKA

Montréal

Éditions LaskaMontréal, QuébecCourriel : [email protected]

Ceci est une œuvre de fiction. Les noms, personnages, lieux et incidents sont soit le fruit del’imagination de l’auteur, soit utilisés de manière fictive.

Tous droits réservés© Stéphanie Joubert, 2013Extraits de L’Homme de la sierra et Pour un instant d’incompréhension © Stéphanie Joubert, 2013.

Aucune reproduction ou transmission, totale ou partielle, n’est autorisée sans le consentement écritpréalable de la détentrice des droits et de l’éditeur.

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Design de la couverture : Jeanne CorvellecPhoto de couverture © Whitebox Media - Fotolia.com

ISBN : 978-2-924242-75-9

Table des matières

Chapitre 1Chapitre 2Chapitre 3Chapitre 4Chapitre 5Chapitre 6Chapitre 7Chapitre 8Chapitre 9Chapitre 10

L’auteure

L’Homme de la sierra (Chapitre 1)L’Homme de la sierra (Chapitre 2)Pour un instant d’incompréhension (Chapitre 1)

Chapitre 1

Ryan ouvrit un œil. Levant le bras, il regarda sa montre, dont les aiguilles fluorescentesindiquaient 5 h 20. Par la porte de la chambre, restée ouverte, il vit le salon en désordre. Après lafête de la veille, il n’avait pas eu le temps de ranger. En fait, il avait eu beaucoup mieux à faire,songea-t-il en resserrant ses bras autour du corps doux et souple lové contre lui. Son désir se ralluma,et il ne vit aucune raison de résister à la tentation.

* * *Lisa flottait dans les brumes d’un sommeil épais. Une sonnerie stridente heurtait ses tympans. Elle

eut conscience d’un frisson de froid parcourant sa peau et du son d’une voix masculine qui intrigua lapart éveillée d’elle-même.

« Wyndham ! » grogna la voix.Wyndham… Ryan Wyndham ? Son voisin ? Lisa tenta d’ouvrir les yeux.« J’suis pas de service ! » entendit-elle râler.Un soupir précéda un « J’arrive ! » grognon.Lisa essaya une nouvelle fois d’ouvrir les yeux, sans résultat. Elle était tellement lasse. Elle sentit

le matelas bouger sous elle et la couette vint la recouvrir entièrement. Nichée dans ce cocon dechaleur, elle eut bien l’impression d’entendre des bruits pas très loin d’elle — de l’eau, peut-être ? — mais malgré ses efforts, elle glissa de nouveau dans le sommeil.

Un moment plus tard, une main ferme la secoua doucement par l’épaule, l’obligeant à émerger.« Je dois partir, mais prends ton temps, murmura une voix grave et sensuelle près de son oreille.

Tu n’auras qu’à tirer la porte derrière toi. »Incapable de sortir de sa léthargie, Lisa sentit un baiser se poser sur son front et une caresse dans

ses cheveux. La jeune femme se rendormit instantanément en pensant : Je rêve.La porte se ferma et brutalement, sa conscience se réveilla. Lisa se redressa vivement,

cramponnant la couette contre elle. On était lundi, elle devait aller travailler ! Elle regarda, effarée,la couette anthracite. Elle n’avait pas de couette, elle n’avait jamais eu de couette sur son lit, ellen’était pas dans son lit ! Elle n’était même pas dans son appartement… Elle était totalement nue dansle lit de Ryan Wyndham ! Ryan le fêtard ! Ryan, son casse-pied de voisin !

Lisa serra les dents et s’obligea à réfléchir, à se rappeler, malgré son début de migraine. Lessouvenirs du week-end remontèrent lentement en un kaléidoscope coloré et… alcoolisé.

Tout avait dérapé à cause de sa dispute avec Kevin, son petit ami.« Ex-petit ami », se corrigea-t-elle à haute voix.Vendredi, son directeur lui avait annoncé qu’elle était nommée au poste de responsable adjointe

de l’actuariat, la promotion qu’elle espérait depuis des semaines. Elle aurait aimé appeler sesparents en premier pour leur annoncer la grande nouvelle, mais ils étaient en croisière…

Elle avait alors appelé Kevin, et son enthousiasme avait été douché net. Monsieur était tropoccupé. Il lui avait royalement proposé d’aller au restaurant, mais pas avant dimanche midi ! Déçue,elle avait malgré tout accepté, sans oser lui demander ce qui le retenait.

Puis elle avait téléphoné à K.C., sa meilleure amie. Celle-ci avait sauté de joie et décrété unsamedi shopping, coiffeur, manucure. Comme toujours, elles s’étaient follement amusées. Un peu plusâgée que Lisa, K.C. la poussait sans cesse à vaincre sa timidité et à avoir les activités de son âge.

* * *

Le dimanche midi, Kevin était venu la chercher… en retard, comme toujours. Au lieu durestaurant promis, ils avaient atterri devant un hamburger-frites. Lisa avait eu beaucoup de mal àcacher sa déception. Totalement inconscient de son état d’esprit, Kevin avait monopolisé laconversation, brillant et futile, comme toujours.

Quand il s’était lancé à bâtir de grands projets sur son nouveau salaire à elle, Lisa avait soudainidentifié le malaise qu’elle ressentait depuis un moment. À cet instant précis, elle avait eu unerévélation, un véritable flash, et sa vision de sa propre vie avait changé.

Le beau Kevin, le chouchou du country club que fréquentaient ses parents, qui l’avait éblouieavec son physique, sa présence, qui ne cessait de lui répéter qu’une gamine banale comme elle étaitchanceuse qu’un homme tel que lui l’ait remarquée, était toujours entre deux emplois, deux « superplans . En fait, il lui devait déjà pas mal d’argent alors qu’ils ne se connaissaient que depuis quelquesmois.

Lisa s’était soudain sentie très mal. Comment avait-elle pu se tromper à ce point sur lui ? Croirequ’il pouvait être le prince charmant de ses rêves ? Il s’était servi d’elle, mais aussi des relations deses parents… À cet instant, elle avait su qu’il n’avait jamais eu la moindre affection pour elle.Dépitée, elle avait insisté pour rentrer.

« Je te ramène », avait-il décrété alors qu’elle aurait préféré prendre un taxi.Lisa avait cédé pour se débarrasser de lui le plus vite possible, pour pouvoir se réfugier chez elle

et réfléchir au calme. Faire le point.* * *

À mi-chemin, Kevin avait soudain garé sa rutilante voiture de sport dans une allée déserte.« On va fêter notre nouvelle vie », avait-il annoncé en l’attirant à lui, l’embrassant de force.Lisa s’était débattue, sidérée qu’il ose se conduire ainsi.« Oh, arrête de faire ta mijaurée ! Ça va te plaire », s’était-il exclamé, en colère face à sa

résistance, en essayant de remonter sa jupe.Réussissant finalement à ouvrir la portière, elle s’était enfuie en courant.« Tu reviendras me supplier ! » avait-il hurlé.Arrivée à son appartement, elle s’était jetée sur son lit en pleurant, sanglotant sur sa propre

stupidité, se demandant comment sa vie avait pu basculer en un seul instant…Des cris, des sifflements et des injures provenant de l’étage inférieur avaient progressivement

franchi la barrière de son désespoir.Se redressant d’un bond, Lisa avait pesté. Elle avait choisi cette petite résidence sur un étage

pour son grand patio arboré, sa situation dans un quartier élégant et calme, et pour son apparentetranquillité. Elle ne savait pas alors que les murs étaient en papier et que son voisin du dessousalternait longues absences et méga fiestas !

Le premier soir, excédée, elle avait appelé la police. Les officiers l’avaient sermonnée pour sonintolérance… Leur collègue avait bien le droit de s’amuser un peu. Elle avait appris à cette occasionque Ryan Wyndham était flic, lieutenant à la brigade criminelle.

Depuis, soit elle prenait son mal en patience, soit elle descendait et il prenait un malin plaisir à lafaire enrager. Ce malotru ne manquait d’ailleurs jamais une occasion de la provoquer. Il avait mêmeosé l’inviter à une de ses soirées. En tout cas, à cause de lui, depuis trois mois, elle passait la plupartde ses weekends chez ses parents.

Consciente que ses yeux gonflés et son nez rougi n’échapperait pas à son voisin, Lisa était tout demême descendue pour lui dire sa façon de penser. Quand la porte s’était ouverte sur un Ryangoguenard, elle avait vu derrière lui une demi-douzaine d’individus vautrés dans le salon devant

l’écran géant.« Est-ce que vous pourriez baisser le son, lieutenant ? »Il avait arqué un sourcil moqueur au-dessus de ses yeux vert clair.« C’est la finale du Super Bowl. Une institution nationale. Vous ne pouvez pas me demander ça,

ma belle ! Une bière ? » avait-il proposé d’une voix traînante et provocatrice en lui tendant sabouteille.

Lisa détestait le foot, détestait la bière, mais ce soir-là, elle détestait plus encore sonaveuglement. Relevant le défi, elle avait attrapé la bouteille qu’il lui tendait et était entrée d’un pasconquérant en territoire ennemi, sous le regard pour le moins étonné du maître des lieux.

Chapitre 2

Les joyeux drilles lui avaient fait une place sur le canapé. Elle s’était retrouvée coincée entrel’accoudoir et Ryan. Elle avait soudain pris conscience de sa carrure quand il l’avait poussée pourcaser ses larges épaules. Après la deuxième bière, elle ne s’était pas offusquée qu’il passe son brasderrière elle. Au passage, elle avait noté le diamètre impressionnant de son biceps…

À ce moment de la soirée, tout le monde avait oublié qu’elle était une fille coincée, engoncéedans une jupe stricte, et elle aussi. Elle avait même fini par envoyer promener ses escarpins sous latable basse couverte de chips et de cacahuètes…

Lisa avait entendu plus de gros mots durant ce match que dans toute sa vie. À la mi-temps, elleétait allée aux toilettes. Les murs tanguaient un peu et elle s’était dit qu’elle n’aurait jamais dûaccepter la troisième bouteille… À son retour, ils avaient tous changé de place et il n’y en avait pluspour elle.

« Hé ! Et moi ! » se souvenait-elle avoir râlé.Sans répondre, Ryan l’avait attrapée par la taille et installée sur ses cuisses, elles aussi

diablement musclées sous ses fesses. Elle aurait dû se lever, exiger une place… À la place, elle avaitmis son bras autour de son cou et avait regardé le reste du match ainsi, les bras de Ryan autour de sataille, criant et jurant autant que les autres !

Après le match, Lisa avait encore eu envie de s’amuser, de danser, de faire la folle.Contrairement à son habitude, elle avait cédé à son impulsion et mis un CD. Tous les copains de Ryanavaient exigé leur danse ! Quand un grand brun plutôt sexy appelé John avait commencé à la serrerd’un peu trop près, Ryan lui avait dit deux mots et il était redevenu un vrai gentleman.

Lisa s’était alors autorisé une quatrième bière. Danser lui avait donné soif ! Elle n’avait rien àcraindre, Ryan la protégeait. Seulement, elle n’avait pas pensé que personne ne la protégeait de Ryan.Ses copains étaient partis quasiment tous en même temps.

Lisa allait partir, elle aussi, quand il l’avait attrapée et l’avait plaquée contre lui, sa main aucreux de ses reins.

« Tu n’as pas dansé avec moi… », avait-il murmuré à son oreille d’une voix profonde ettroublante.

Et il l’avait entraînée dans un slow. Sans ses talons, il la dépassait d’une bonne tête. Elle avaitpassé les bras autour de son cou et, après quelques pas, l’avait vu s’incliner lentement vers elle. Ellen’avait rien fait pour empêcher ses lèvres de se poser sur les siennes, d’abord doucement, puis defaçon de plus en plus appuyée. Ce traître embrassait divinement bien.

Lisa n’avait pas plus protesté quand, au rythme doux de la musique, il l’avait guidée vers sachambre. Elle n’avait pas eu envie de résister, elle ne voulait pas qu’il s’arrête. Elle avait toujoursvoulu réserver sa première fois à l’homme de sa vie, et pourtant, elle avait laissé Ryan la dénuder,l’allonger sous lui, lui ravir son innocence sans une protestation… seulement des soupirs de plaisir !

* * *Revenue au présent, Lisa fut submergée par la honte. Si seulement elle pouvait invoquer l’excuse

de l’alcool. La première fois, peut-être… un peu. Quoiqu’elle ait le souvenir exact de ce qui s’étaitpassé, de Ryan lui demandant si elle était sûre d’elle.

Je me mens, admit-elle.L’alcool n’y était pour rien. Surtout la deuxième fois ! Elle avait volontairement cédé à Ryan

parce qu’au fond, il lui plaisait avec son physique solide et ses beaux yeux verts toujours pétillantsde malice. Il savait d’ailleurs formidablement s’y prendre avec une femme. À côté de lui, Kevin étaitnul ! Sa sensualité l’avait subjuguée, avait annihilé ses dernières réticences, ses angoisses de novice.Elle aurait dû s’enfuir au lieu de s’endormir dans ses bras.

Lisa s’extirpa du lit, se sentant étonnamment courbaturée. Elle rougit en constatant qu’elle neportait plus que sa montre, qui indiquait presque huit heures.

Au moins, je ne serai pas en retard, pensa-t-elle.S’étant rapidement rhabillée, elle regagna son appartement. Une douche et de l’aspirine calmèrent

un peu son mal de tête, mais pas la honte qu’elle éprouvait. Comment allait-elle pouvoir croiser sonvoisin et continuer à se comporter comme si rien ne s’était passé ? Parce qu’elle ne se faisait aucuneillusion : pour lui, elle n’avait été qu’une aventure. Par contre, pour elle…

* * *Au moment de quitter son salon et de fermer sa porte, elle vit clignoter son répondeur. Le premier

message était de ses parents qui, tout juste rentrés, s’inquiétaient de son absence un dimanche soir. Lesuivant était de Kevin.

« Je sais que tu es là, Lisa, réponds ! … Tu ne vas pas faire la tête jusqu’au siècle prochainpour si peu. Je te rappelle ce soir. Nous avons des décisions à prendre pour notre avenir. »

Les deux messages suivants étaient du même genre.« Loupé pour tes délires à mes frais ! J’ai découché », pesta Lisa à haute voix.Son aventure de la veille avait au moins un côté positif : sa timidité maladive avait disparu,

comme envolée.Malgré le manque de sommeil, elle réalisait maintenant qu’elle avait toujours eu peur de ne pas

trouver un homme qui accepterait un petit génie plutôt coincé dans son genre. Elle savait désormaisque certains pouvaient s’intéresser à elle en tant que femme. Elle ne se laisserait plus jamais faire parKevin ou un de ses semblables.

Chapitre 3

Dans la matinée, Lisa rappela ses parents. Ravis d’apprendre sa promotion, ils étaient tellementfiers d’elle qu’ils en oublièrent de lui demander où elle était la veille au soir, lui épargnant dedébiter un mensonge. Jamais elle ne leur aurait avoué la vérité, de peur de les choquer. Ses parentsavaient des principes, et finir la nuit dans le lit d’un voisin qu’on connaissait à peine n’en faisait paspartie.

Lisa téléphona ensuite à K.C.. Après quelques minutes de conversation, celle-ci l’interrompit :« Allez ! Arrête de tourner autour du pot. Dis-moi ce qui ne va pas !— J’ai rompu avec Kevin.— Alléluia ! s’exclama son amie, qui n’avait jamais pu le supporter. Elle a largué le loser ! C’est

la meilleure nouvelle de la journée. Non, de la semaine. Il faut fêter ça ! Youpi !— Cache ta joie ! soupira Lisa, désabusée. En fait… ce n’est pas ça, le problème.— Alors qu’est-ce que tu as fait ? T’as oublié d’arroser les plantes vertes de ta mère ? Tu as

triché au Scrabble ? plaisanta K.C..— Non… Arrête de te moquer de moi. Hier, je suis allée voir le Super Bowl chez mon voisin.

J’ai descendu quatre bières, atterri sur ses genoux, dansé avec un tas de types et pour bien finir lasoirée, j’ai… couché avec lui. »

Pour la première fois de sa vie, K.C. en resta sans voix. Sa Lisa, qui ne buvait jamais une goutted’alcool, qui détestait le sport et qui s’était toujours montrée si prude ! Coucher ? Impossible !

« Tu blagues, là ? interrogea-t-elle après s’être éclairci la voix.— J’aimerais bien, seulement ce matin, je ne me suis pas réveillée dans mon lit !— Aïe ! … Et il est comment, le voisin ? demanda K.C., craignant le pire. Vieux ? Moche ? »Lisa prit une profonde inspiration. Elle avait trouvé son appartement grâce à Shane, le petit ami

de K.C., lui aussi policier. Avant même qu’elle ne puisse le remercier, son amie et lui avaientrompu… et le sujet était encore très, très sensible pour la jeune femme.

Pour ne pas attrister K.C., elle avait préféré passer sous silence toutes les fois où elle avaitcroisé Shane à la résidence. C’étaient les seules occasions où, depuis qu’elles se connaissaient, Lisalui avait caché des choses.

« En fait, tu le connais… C’est un flic de la Criminelle… Ryan Wyndham.— Oh, mon Dieu ! s’étouffa K.C.. C’est le meilleur ami de Shane. Il… était là aussi ?— Oui », confirma Lisa, navrée.Inutile de dire à K.C. qu’elle avait même dansé et plaisanté avec lui comme si de rien n’était.K.C. encaissa et, après un long silence, enchaîna d’une voix un peu forcée :« T’as fait très fort. Passer d’un gros naze à l’un des plus beaux mecs du secteur !— N’exagère pas, quand même.— Oh ! Ouvre tes jolis yeux, jeune bergère naïve. Les filles du service ont lancé des paris sur

lui ! Si elles savaient que tu lui as mis la main dessus, tu te ferais trucider !— Pas que la main », répondit lugubrement Lisa, provoquant le rire de son amie.Elle hésita quelques instants, puis finit par oser poser la question qui lui brûlait les lèvres :« Qu’est-ce que tu sais sur Ryan ?— Je me demandais si tu oserais me le demander, la titilla K.C.. Voyons… Célibataire, jamais

marié. Il a vingt-neuf ans, je crois. Il y a deux ans, il a résolu une très grosse affaire. C’est ce qui lui a

valu d’être nommé lieutenant, le plus jeune de nos services de police. Très bien noté, mais pastoujours très populaire auprès des huiles.

— Sans rire, marmonna Lisa en pensant au look jean-cuir de Ryan. Et que sait d’autremademoiselle la procureure à son sujet ?

— Adjointe ! Procureure adjointe, je te prie, s’amusa K.C.. Officiellement, rien, je le croiserarement. Je m’occupe des délits financiers, pas des crimes.

— Et officieusement ?— D’après… Shane, il est l’aîné de trois garçons. Ses parents sont à la retraite et vivent en

banlieue. Il plaît aux femmes, mais ce n’est pas un cavaleur. Je ne l’ai vu qu’avec deux ou trois fillesdepuis que je le connais. Quoi d’autre… Il aime la randonnée, le sport, les pizzas… Ah, oui ! Ildéteste les sushis. Et sous des allures de bad boy, c’est quelqu’un de bien. »

Venant de K.C., le compliment n’était pas négligeable et rassura Lisa. Cette fois au moins soninstinct ne l’avait-il pas induite en erreur.

« Et zut, s’exclama soudain K.C. Mon rendez-vous vient d’arriver. Un avocat qui veut négocier unaccord dans un délit d’initié. Génial ! »

Son ton était tellement lugubre qu’elle réussit à faire rire Lisa avant de raccrocher.* * *

Le reste de la journée passa dans un tourbillon d’activités pour la jeune femme, qui dut secontenter d’un sandwich devant son ordinateur à midi.

Quand le numéro de Kevin s’afficha sur son portable à plusieurs reprises, Lisa laissa faire lerépondeur. Entre sa nuit trop courte, sa journée chargée et son mal de tête qui revenaitprogressivement, elle ne se sentait pas assez solide pour l’affronter.

Chapitre 4

Il devait être presque trois heures du matin quand un bruit incongru la réveilla en sursaut. Un chocde vaisselle… Ryan rangeait ! Vu le raffut, il faisait même le grand ménage. Lisa pesta en seretournant.

Epuisée, elle avait réussi à s’endormir sans penser à lui et maintenant, les souvenirs revenaient enforce. Son sourire charmeur, ses mains habiles la déshabillant lentement, sa bouche taquine, sonregard étonné et heureux quand il avait compris…

Les questions revenaient aussi. Une fois la douleur estompée, Lisa avait adoré le sentir en elle, sifort, si maître de lui. Elle avait cédé sans un regret à toutes ses avances, découvrant sa propresensualité… Mais pourquoi lui ? Kevin, dont elle s’était crue amoureuse, n’avait jamais déclenché enelle ce genre d’envies, de désirs. Ryan avait un corps magnifique et savait parfaitement en jouer poursatisfaire une femme, mais ce n’était pas une raison…

À la chaleur traîtresse qui se répandit dans son ventre, Lisa sut qu’elle aurait du mal à serendormir et qu’elle n’en avait pas fini avec lui. Elle prit surtout conscience que le problème neconcernait peut-être pas que son corps…

* * *Malgré ses efforts, Ryan se rendait parfaitement compte qu’il faisait trop de bruit, mais il fallait

qu’il s’occupe. Il avait beau être vidé, le sommeil le fuyait. L’appel qui l’avait tiré du lit et des brasde Lisa l’avait envoyé directement en enfer. Il faudrait du temps avant qu’il n’arrive à fermer les yeuxsans voir les corps démembrés qu’avec ses collègues, il avait passé sa journée à exhumer de ladécharge municipale.

Trois ans dans la rue, cinq à la Criminelle, il en avait déjà beaucoup vu. Mais ce matin, les portesde l’antre de Lucifer s’étaient ouvertes…

Son appartement astiqué comme rarement, il se laissa tomber sur son lit pour se relever aussitôtd’un bond. La tuyauterie faisait un bruit infernal, mais il avait impérativement besoin d’une autredouche. Peut-être arriverait-il à se débarrasser de cette odeur nauséabonde qui lui collait à la peau ?

Il fit aussi vite que possible, espérant ne pas déranger sa jolie voisine.Quoique…, pensa-t-il.Il aurait plutôt dû faire un maximum de bruit : Lisa serait venue se plaindre et il aurait pu la

remettre dans son lit, se perdre au creux de son corps adorable… oublier.Enfilant son caleçon, il repensa à l’arrivée, quelques mois auparavant, de cette jolie blonde aux

yeux bleus très « comme il faut », accompagnée de ses parents, eux aussi très « comme il faut ». Ilavait immédiatement été saisi d’une violente envie d’aller jouer sous ses jupes si sages. Ce n’étaitpas la présence d’un crétin de petit ami qui l’avait retenu, mais le panneau invisible que portaitLisa et qui le narguait en chantonnant :

Si tu touches,C’est dimanche chez mes parents,

Mariage dans un mois,Bébé dans un an.

Ryan voulait profiter encore un peu de sa vie de célibataire. En plus, ils avaient eu un premiercontact désastreux, et elle l’avait pris en grippe ! Il savait qu’il lui faudrait du temps pour arriver àl’amadouer, effacer cette première impression. Même s’il gardait un œil très intéressé sur elle, il ne

pouvait s’empêcher à l’occasion de la faire enrager.Pourtant, la veille, elle l’avait stupéfié… Il se laissa tomber sur le lit et plaqua le deuxième

oreiller sur son visage. Le tissu gardait une infime trace du parfum de Lisa. Il l’imagina allongée,endormie juste au-dessus de lui, et son désir se réveilla. Sa conscience aussi.

Alors, fier de toi ? Lisa était ivre !Non, elle savait ce qu’elle faisait, il s’en était assuré… Alors pourquoi lui avait-elle bradé sa

virginité ? Il n’avait pas de réponse, mais cela lui convenait finalement très bien.Ses origines latines lui valaient une peau mate, une tendance à être un tantinet jaloux… et surtout,

un tempérament ultra-possessif quand il était maintenant question de Lisa.Le sommeil le surprit alors qu’il songeait à ce qu’il allait lui dire la prochaine fois, ce qu’il lui

proposerait pour bien débuter leur relation et préparer leur vie à deux. Il rêva de son corps…jusqu’au moment où les cauchemars surgirent.

Chapitre 5

La semaine fut longue et difficile. Lisa était rentrée tard tous les soirs ; son nouveau job était trèsstimulant, mais pas vraiment reposant. Assurer la mise en place d’un nouveau secteur du serviceactuariat d’une compagnie d’assurance, dont la vingtaine d’employés avaient tous plus que ses vingt-trois ans, était un vrai challenge ! Elle devait sans cesse faire ses preuves, démontrer sescompétences et, le plus difficile pour elle, parvenir à asseoir son autorité.

Ce vendredi soir était vraiment le bienvenu. Arrivant enfin à la résidence, Lisa ne rêvait plus qued’un bain avant de s’effondrer sur son lit. Le lendemain, elle irait se faire dorloter chez ses parents,se promit-elle.

Seul avantage de son emploi du temps démentiel : elle n’avait pas eu le temps de penser à Ryan età ce qu’elle ressentait. Enfin, pas trop… Parce que dans cette histoire, une seule chose étaitmalheureusement sûre et la blessait profondément. Il n’avait pas essayé de la joindre, lui confirmantqu’elle n’avait été qu’une aventure pour lui.

Pourvu qu’il n’ait pas organisé une de ses maudites soirées « entre potes », songea-t-elle enpassant devant sa porte au rez-de-chaussée. Elle avait besoin de dormir. Et elle ne savait toujours pascomment elle allait se comporter en face de lui, vu les circonstances.

Lisa avait fini par admettre qu’elle aurait aimé le connaître mieux. Que s’il l’avait tellementagacée au début, c’était parce qu’il ne lui était pas indifférent, mais juste tellement loin de ce qu’ellecroyait chercher chez un homme…

Même si K.C. disait vrai, elle se sentait inexpérimentée, désarmée. Elle n’avait pas la moindreidée de comment s’y prendre pour éveiller son intérêt et avoir une véritable chance avec lui.

Brutalement arrachée à ses pensées, Lisa stoppa net en arrivant en haut de l’escalier. Unemauvaise surprise l’attendait sur son palier : Kevin !

Elle afficha un masque neutre, celui qu’elle réservait à ses relations de travail les plus pénibles.Ce mercredi au téléphone, elle avait pourtant été très claire : leur histoire était finie !

« Lisa chérie ! » s’exclama-t-il dès qu’il la vit, tendant les bras.La jeune femme s’écarta pour l’éviter. Une seconde, Kevin laissa voir sa contrariété.« Voyons, Lisa chérie, tu as déjà fait la tête toute la semaine ! Ça suffit. Tu ne vas pas gâcher aussi

notre weekend en te comportant en petite fille capricieuse… », dit-il avec un sourire faux.Mon Dieu ! Je l’ai toujours laissé me parler comme ça. J’étais tellement reconnaissante qu’il

s’intéresse à moi. Non, mais quelle gourde ! pensa Lisa, sidérée par son culot.« Je vais t’aider à surmonter ton blocage, ma chérie. Je te le promets », continuait Kevin,

parfaitement sûr de son pouvoir sur elle, de sa capacité à retourner la situation en sa faveur.Parles-en à Ryan, de mon blocage ! Tu vas bien le faire rire, songea Lisa, de plus en plus

furieuse, mais tellement choquée par son outrecuidance qu’elle n’arrivait plus à parler.« C’est fini ? Je te pardonne ! » déclara-t-il en ouvrant les bras et en souriant de son sourire refait

de playboy de country club…Lisa recula de nouveau, manquant de tomber à la renverse dans le petit escalier. Heureusement,

elle tenait encore la rambarde en fer forgé. Rétablissant son équilibre, elle l’écarta d’un geste du braset le contourna pour se planter devant sa porte. Prenant une grande inspiration, elle lui fit face.

« Je t’ai dit que c’était terminé. Nous deux, c’est fini !— Pourquoi ? Tout peut continuer comme avant. Je t’ai pardonné…

— Non, mais tu n’écoutes rien ! La seule chose qui nous lie encore, c’est l’argent que tu me dois :deux mille sept cents dollars, pour être exact. Je veux mon argent et c’est tout ! Maintenant, va-t’en ! »

Cette fois, Kevin ne chercha pas à cacher sa colère. Il saisit Lisa par les épaules et la secouadurement. Sous sa violence, les dents de la jeune femme s’entrechoquèrent.

« Tu me fais mal. Arrête ! cria-t-elle. Lâche-moi !— Oh, non ! Espèce de garce frigide ! Tu vas…— La demoiselle t’a dit de la lâcher », énonça une voix glaciale.Kevin tourna la tête et vit un grand type émerger de la cage d’escalier. Le genre voyou, à flanquer

la frousse à une fille coincée comme Lisa… Certain qu’entre lui et ce type, elle n’hésiterait pas,Kevin rétorqua :

« Te mêle pas de ça ! C’est ma nana !— Visiblement, elle n’est pas de cet avis », riposta l’intrus de la même voix calme et froide.Profitant de sa distraction, Lisa s’échappa et alla se réfugier derrière Ryan. Les deux hommes se

mesuraient du regard. Difficile d’être plus dissemblable : l’un avec sa barbe de trois jours, sescheveux en brosse et son vieux jean, l’autre avec son costume à la dernière mode, sa coiffure stylée etses manières raffinées. L’un parfaitement calme et toujours maître de lui, l’autre énervé… L’un étaitun gentleman, l’autre pas !

« Je t’ai dit de te tirer !— Et moi, je t’ai dit de ne pas toucher Lisa. »Kevin lança rageusement son poing vers Ryan, qui l’évita facilement. La seconde suivante, son ex

se retrouva le visage écrasé sur le mur, les mains dans le dos. Des menottes jaillirent et claquèrentautour de ses poignets.

« Tenter de cogner sur un flic n’est pas le truc le plus intelligent que tu aies fait ! se moqua Ryanavant de lui réciter ses droits et de sortir son portable pour téléphoner au poste.

— Ce n’est pas possible, balbutia Kevin, totalement défait, en la regardant d’un air suppliant.— Je crains que si », confirma Lisa, dont la colère était retombée.La jeune femme ne tenait pas à ce que tout cela dégénère, même si Kevin était un abruti.« Ryan, il ne savait pas, plaida-t-elle quand il eut raccroché.— Raison de plus. Moi, je peux me défendre, mais si ça avait été McPherson ? »Ernest McPherson était leur voisin, un inoffensif octogénaire curieux comme une pie. C’est lui qui

tenait Lisa au courant des potins de la résidence et surtout, de toutes les supposées frasques deRyan…

* * *Attrapant Kevin par le dos de son luxueux manteau en alpaga, Ryan le fit descendre sans

ménagement dans la rue et le remit à l’officier arrivé avec la voiture de patrouille. Après leur départ,Ryan se tourna vers Lisa.

« Quand un mec ne veut pas comprendre, ça peut mal finir. Tu devrais porter plainte », luiconseilla-t-il, visiblement soucieux.

Lisa songea à ce qui s’était passé dans la voiture une semaine plus tôt, mais n’osa pas lui enparler. Elle avait honte de s’être laissé berner comme une idiote.

« Non, dit-elle finalement. Il va se calmer. Je te remercie… Qu’est-ce qu’il risque ?— Tu t’inquiètes pour lui ? demanda Ryan, soudain tendu, presque… jaloux.— Non, je veux juste savoir, répondit sincèrement Lisa en le fixant droit dans les yeux.— Malheureusement, pas grand-chose. Je n’avais pas décliné ma fonction. Si le juge est mal luné,

trente heures de travaux d’intérêt général. Autrement, une nuit au poste et un avertissement. »Ryan lui sourit et repoussa derrière son oreille une mèche échappée de son chignon. Lisa aima ce

geste, mais la situation était bizarre. Elle sentit monter en elle un malaise. Il était dix heures du soir,et elle discutait sur le palier de son ex-petit ami avec son voisin flic, qui s’avérait être aussi sonamant !

Elle vit que Ryan hésitait à parler. Finalement, il lui adressa un nouveau sourire, étrange cettefois.

« Je suis désolé. Je voulais venir te voir… Je n’ai vraiment pas pu. En plus, il faut vraiment quej’y aille. Je t’appelle plus tard, d’accord ? Promis !

— Oui, souffla Lisa, incertaine de ce que cela signifiait pour lui.— Au fait, Lisa, ajouta Ryan en lui volant un baiser. Je suis content que tu aies enfin éjecté ce

crétin ! Ça m’a évité de le faire. »Et il disparut dans la nuit, la laissant surprise au milieu du couloir.

Chapitre 6

Quand Lisa partit samedi matin, elle était incapable de décider si elle était soulagée ou contrariéede ne pas avoir eu de nouvelles de Ryan. Ses parents l’attendaient avec impatience et lui avaientconcocté un programme chargé pour fêter sa promotion.

Lisa rentra dimanche soir, épuisée mais ravie. Le lundi repartit sur le même rythme infernal.Heureusement, Kevin ne se manifesta pas.

Par contre, elle était maintenant sûre d’être très, très contrariée ne pas avoir de nouvelles deRyan. Un coup de téléphone ou même un simple SMS n’était quand même pas trop demander après cequi s’était passé entre eux !

* * *Le mercredi matin, Lisa partit travailler de bonne heure. Elle arrivait dans le hall du rez-de-

chaussée quand elle vit l’objet de ses pensées devant la porte de son appartement.Son voisin avait l’air d’un véritable zombie. Or visiblement, il ne rentrait pas d’une fiesta ! Ses

vêtements étaient tachés et une odeur atroce frappa les narines de la jeune femme.« Ça va ? » demanda-t-elle, inquiète et navrée de ne rien trouver de plus original.Ryan sursauta, lui jeta un coup d’œil par-dessus son épaule avant de se pencher pour ramasser

ses clés qu’il avait laissé échapper. Il dut s’appuyer contre le mur pour se redresser.« Je ne t’avais pas entendue, marmonna-t-il d’une voix éraillée par la fatigue.— Ça n’a pas l’air d’aller. Je peux t’aider ? proposa-t-elle spontanément en s’approchant.— Si tu peux me donner le nom du taré qui balance des corps découpés dans les poubelles, oui,

ça m’aiderait ! répondit Ryan avec un sourire las et sarcastique en se tournant vers elle.— Oh ! Tu travailles sur cette affaire », murmura Lisa, atterrée.Comme tout le monde en ville, elle avait entendu parler de ce tueur en série terrifiant qui narguait

la police.« On travaille tous sur ce dossier, précisa Ryan, un peu radouci, en s’adossant à sa porte. Si tu

écoutes les infos de neuf heures, tu apprendras qu’on a encore passé notre nuit à ramasser desbouts… »

Il contint de justesse un haut-le-cœur au souvenir de la lumière aveuglante des projecteurs, del’odeur mêlée des ordures et du diesel des groupes électrogènes qui s’infiltrait dans les masques deprotection. Il avait aussi fallu soutenir les collègues qui s’effondraient les uns après les autres face àl’horreur. Seuls Shane et lui avaient tenu toute la nuit…

« C’est dur ? demanda-t-elle, certaine de la réponse, en tendant la main vers lui.— Ne me touche pas… », s’écria Ryan en s’écartant brusquement.Désolé de sa rebuffade et de la peine qu’il venait de voir apparaître dans ses yeux bleus, il lui

expliqua :« Je ne veux pas te salir… J’étais à la décharge… J’ai besoin d’une douche à la javel », conclut-

il, amer.Ryan avait dépassé ses limites. Il était sur le point de s’effondrer ou de dire des âneries. Une part

de lui avait besoin d’elle, mais ce n’était pas le bon moment pour parler d’avenir.« Je vais me coucher… Bonne journée, Lisa, marmonna-t-il en entrant dans son appartement.— Ryan ! le rappela-t-elle timidement. Ma grand-mère disait que… le citron… ça efface toutes

les odeurs. »

Surpris, Ryan se retourna. Elle était rouge comme une pivoine… mais le conseil était le bienvenu.« Merci », répondit-il avec un sourire fatigué mais complice.Dans sa voiture, Lisa écouta les informations. Le journaliste rappelait que les policiers

travaillaient nuit et jour pour arrêter le tueur, qui avait été surnommé « le démembreur ». Il faisait étatdes découvertes de la nuit que Ryan avait mentionnées. Certaines victimes avaient enfin étéidentifiées : toutes des SDF, dont certains, portés disparus depuis plusieurs années.

Le reporter précisait aussi qu’une cellule d’aide psychologique avait été mise en place par lemaire pour aider les policiers à affronter l’horreur de ce qu’ils découvraient jour après jour.

Sans blague, pensa Lisa en songeant à l’état de Ryan.* * *

Ce soir-là, en rentrant chez elle, Lisa croisa M. McPherson, qui lui confia ses nouveaux soupçonssur les activités de leur turbulent voisin.

« On est vendredi et il a découché toute la semaine. Vous vous rendez compte ! Vous savez, jepense qu’il doit avoir une nouvelle petite copine. »

Lisa réussit à ne pas rougir, le salua et conclut que le vieil homme ne devait pas suivre lesinformations de très près.

Chapitre 7

À dix heures du soir, elle regardait le journal local en pyjama, espérant apercevoir Ryan dans unreportage, quand on frappa doucement à sa porte. Par le judas, Lisa reconnut sa tignasse brune etouvrit aussitôt. Il sortait visiblement de la douche, il s’était rasé et il sentait le citron… très fort.

« Je peux entrer ? » demanda-t-il, incertain.Cette fois, Lisa s’inquiéta vraiment. Ryan était toujours si sûr de lui. Elle s’effaça pour le laisser

passer, et il s’immobilisa au milieu du salon.« Ça ne t’embête pas d’éteindre la télé ? demanda-t-il, hésitant.— Non, bien sûr », répondit Lisa en appuyant sur la télécommande.Un silence gêné emplit la pièce. Ryan se balançait d’un pied sur l’autre. Il avait de profonds

cernes noirs qui faisaient ressortir ses yeux clairs. Il paraissait épuisé, à bout. Lisa remarqua qu’ilserrait les poings.

« Est-ce que je peux te prendre dans mes bras ? » demanda-t-il.Lisa, surprise, marqua une pause. Pensant qu’elle hésitait, Ryan précisa d’une voix mal assurée :« Juste te tenir contre moi. S’il te plaît… Lisa… »Sans un mot, elle lui ouvrit les bras. Il franchit les deux pas qui les séparaient et l’enlaça. Il se

pencha pour enfouir son visage dans son cou, dans la masse de ses longs cheveux. Ses bras laserraient convulsivement, et Lisa se rendit compte qu’il tremblait. Elle sentit soudain une larmeglisser sur sa peau.

« Ryan ? interrogea-t-elle tout doucement.— C’est rien. C’est les nerfs… »Lisa l’entraîna sur le canapé et sans hésiter, s’installa sur ses cuisses, comme pendant le match.

Seulement cette fois, elle le serra fort contre elle. Ryan enfouit à nouveau son visage dans le creux deson cou. Il cachait ses larmes, même s’il était venu chercher son réconfort. Il avait désespérémentbesoin de chaleur humaine après toutes les horreurs vues ces derniers jours. Pourquoi s’était-il tournévers elle ? Elle l’ignorait, mais si quelqu’un d’aussi solide flanchait, cela devait être pour une raisonterrible.

Au fond d’elle-même, elle sentit monter le désir de le protéger et faillit sourire. Il était sans doutebeaucoup plus fort qu’elle, beaucoup plus solide… Seulement, à cet instant, il avait besoin d’elle. Ilsrestèrent un très long moment enlacés. Lentement, il reprit le contrôle. Les tremblements s’espacèrent.Il releva la tête, essuyant ses yeux humides d’un revers de main.

« Désolé, je ne voulais pas t’imposer ça.— Ce n’est rien. Je suis là si tu as besoin de parler, tu sais ?— J’ai parlé avec le psy, mais ça n’a pas été très efficace », répondit-il avec un rictus amer.En fait, le psy lui avait juste conseillé de passer du temps avec les gens qu’il aimait. Il avait

hésité à aller chez ses parents ; il avait surtout eu envie d’être avec Lisa, de la tenir dans ses bras…« Tu étais avec l’équipe qui a encore trouvé des… restes ce matin ?— Oui, et c’était encore pire que d’habitude.— Pourquoi ? » demanda-t-elle, bien qu’elle n’ait aucune envie de le savoir.Il hésita, et les tremblements revinrent, s’intensifièrent. Il ne voulait pas le lui dire, faire entrer

l’horreur dans cet appartement douillet. Il resserra son étreinte sur sa taille pour tenter de contenirses frissons, mais sans résultat. Et brusquement, il craqua :

« Il y avait un enfant. »Lisa dut réprimer sa nausée. Le voyant se mordre la lèvre au sang, elle posa ses doigts sur sa

bouche, geste qu’elle n’aurait jamais osé dans d’autres circonstances.« Arrête, tu vas te blesser ! »À l’instant où elle le toucha, Lisa vit le regard vert de Ryan changer, se charger de désir. Elle

sentit son corps se tendre contre le sien.Arrête-le ! hurla sa raison.Mais Lisa ne fit pas un geste pour l’empêcher de passer ses mains sous la veste de son pyjama.

Elle venait de découvrir qu’elle aimait sentir ses mains sur elle. Quand il colla sa bouche sur lasienne, exigeant, elle l’accueillit. Il la caressait d’une manière possessive, tout en l’embrassantpassionnément. Soudain, Ryan mit Lisa debout. D’un geste, il la fit pivoter, la débarrassa de sonpantalon, puis l’attira à califourchon sur lui. Il déboutonna son propre jean et enfila à toute allure uneprotection dénichée dans son portefeuille. Lisa le regarda faire sans aucune appréhension. Pourquoin’avait-elle pas peur ?

Je le veux, songea-t-elle seulement, en proie au désir.Ryan la souleva et elle eut juste le temps de s’accrocher à ses épaules avant qu’il ne la prenne.

Elle était étroite pour lui, même si elle s’offrait totalement. Ryan allait plus loin à chaque poussée etelle gémit quand il plongea enfin complètement en elle. Il chercha alors de nouveau sa bouche. Leplaisir monta, monta… et déferla enfin, puissant, presque brutal. Lisa cria, arquée contre lui. Ellereprit son souffle lentement.

Autant la première nuit, il avait été patient et tendre, autant cette fois, il lui avait révélé sesinstincts les plus primitifs… et c’était loin d’être désagréable. Lisa comprenait qu’il ait eu besoin dese sentir vivant, avec l’enfer qu’il traversait. Elle espérait juste avoir été pour lui autre chose qu’unefille disponible. Ryan murmura :

« Pardon… J’étais venu pour parler… Je n’avais pas prévu ça. Je…— Chut…, chuchota Lisa en posant les doigts sur ses lèvres. Je sais. J’ai compris… »Elle s’étonnait de cette conversation complice dans cette position indécente. Il était toujours en

elle. Ryan s’empara à nouveau de sa bouche, l’embrassa tendrement cette fois, lui prodiguant delentes et longues caresses de ses grandes mains avant de s’écarter à regret. Il la repoussa doucementet s’éclipsa dans la salle de bain avec un sourire embarrassé.

Lisa remit son pantalon en se demandant comment elle avait pu accepter une telle chose etpourquoi elle n’arrivait pas à éprouver le moindre regret.

Allez, avoue-le ! s’admonesta-t-elle. Tu es amoureuse !Quand Ryan réapparut, rhabillé, il avait l’air presque aussi gêné que Lisa.« Est-ce que… »Mais avant qu’il ne puisse terminer sa phrase, son portable sonna.« Non, pitié, pas ça ! s’écria-t-il avant de décrocher. Wyndham ! Quoi ? Et merde ! Bon, j’arrive.

Je suis désolé, Lisa, il faut que j’y aille, murmura-t-il en caressant sa joue. J’aurai voulu rester. Il fautqu’on parle, tous les deux…

— Je sais… Ryan, depuis quand n’as-tu pas dormi ? demanda-t-elle, inquiète.— J’ai dormi trois heures cette nuit dans la voiture, répondit-il après un instant de réflexion.— Fais attention… Tu es à bout.— Promis », dit-il avant de l’enlacer et de l’embrasser très tendrement.Lisa savoura ce baiser, qui n’était que douceur et cachait peut-être une promesse.« À plus tard ? interrogea-t-elle timidement au moment où il quittait l’appartement.

— Oui, confirma Ryan avec un sourire complice. Tu peux en être certaine. »

Chapitre 8

Quand jeudi soir arriva, le moral de Lisa n’était pas vraiment au beau fixe. Il était presque huitheures, elle était fatiguée. Kevin la harcelait : coups de téléphone, fleurs, chocolats… Elle refusaittout, mais il ne voulait pas comprendre. Elle regrettait maintenant de ne pas avoir suivi le conseil deRyan et porté plainte.

Et surtout, Ryan n’avait donné aucun signe de vie depuis le vendredi précédent. Elle ne lui envoulait pas, elle était inquiète à cause de l’annonce de nouvelles découvertes macabres : desmorceaux de corps, congelés cette fois.

Lisa venait d’ouvrir la porte de son appartement quand deux mains se refermèrent sur sa taille, lafaisant violemment sursauter. Avant qu’elle n’ait le temps d’avoir peur, Ryan la fit pivoter et la collacontre lui. Juste avant qu’il n’écrase sa bouche sur la sienne, Lisa eut le temps de voir son regard…hanté.

Il la poussa dans l’appartement, claqua la porte. Il lui ôta son manteau d’un geste, son sac tomba,et il la plaqua contre le mur du hall obscur. D’un mouvement brusque, il remonta sa jupe sur seshanches. Quand il la souleva, Lisa comprit son intention et enroula ses jambes autour de lui. Sansinterrompre leur baiser passionné, il glissa sa main entre eux, déboutonna son jean, écarta sa culotteet vint en elle. Lisa gémit sous cette possession presque brutale. Une fois unis, la rage qui semblaithabiter Ryan s’apaisa. Son baiser se fit moins ravageur, plus doux, plus tendre. Sa main, entre eux, lacaressa, l’amenant au plaisir avant qu’il ne se laisse aller, lui aussi. À bout de souffle, il pressa sonvisage dans le creux de son cou. Mal à l’aise, Lisa s’agita légèrement.

« Ne bouge pas », murmura-t-il.Ryan releva la tête, et Lisa vit ses yeux verts briller dans l’ombre. Elle devina un petit sourire.« Je crois que je vais encore être obligé de te demander pardon… Ça devient une habitude ! Au

moins, cette fois, on sera tranquille. »Sur ces paroles étranges, il affermit sa prise et s’écarta du mur. Lisa ne put retenir un petit cri de

surprise et resserra instinctivement bras et jambes autour de lui. Toujours en elle, Ryan étaitvisiblement prêt à recommencer… et un nouveau cri échappa à la jeune femme. Il la déposa endouceur sur son lit et elle gémit de frustration quand il se retira. Lorsqu’il alluma la lampe de chevet,son visage affichait un sourire complice malgré les traces évidentes de fatigue.

« Tu me laisses me faire pardonner ? »Lisa hocha la tête. Il avait le regard de la première nuit, quand il s’était montré tendre, patient et

passionné pour lui enseigner l’amour. Elle ne regretta pas sa décision : Ryan embrassa chaque poucede peau qu’il dénuda. Pourtant, il lui laissa ses bas. Gênée, Lisa se tortilla :

« Enlève-les !— Pourquoi ? Tu es très sexy, ronronna-t-il. Tu es belle, Lisa, si belle… »Il guida ses mains pour qu’elle le caresse. D’abord gênée, elle se laissa aller à jouer avec son

corps musclé, qu’il pliait à ses envies. La passion flamba entre eux. Elle s’entendit crier, le griffa enatteignant les sommets.

« J’ai besoin d’une douche », annonça-t-il un long moment plus tard.Il se leva brusquement et en riant, la souleva dans ses bras. Ce qui se passa sous la douche aurait

pu beaucoup gêner Lisa si son voisin avait entendu ! Au début, elle crut qu’il allait la prendre commedans le hall. Mais après s’être protégé, Ryan lui demanda de se tourner et de poser ses mains sur le

mur. La sentant se crisper, il précisa doucement, embrassant son cou.« Ne t’inquiète pas. On va rester classique. Tu n’es pas encore prête pour quelque chose de

plus… chaud, mais plus tard », susurra-t-il comme un démon tentateur.Le cœur de Lisa fit un looping ! Il voulait que leur histoire continue…

* * *« Je meurs de faim », s’exclama Lisa une fois séchée par les soins très intéressés de Ryan.Il l’entraîna dans la cuisine tout en picorant des baisers dans son cou. Ils prirent tout ce qu’ils

trouvèrent dans le frigo et les placards, puis s’installèrent sur la table du salon, jouant et chahutantcomme des adolescents, roulant à moitié sur la moquette.

Lisa avait cédé au vieux fantasme féminin : porter la chemise de son homme ! Torse nu, Ryan étaitsexy en diable. Lisa comprenait maintenant pourquoi il l’avait impressionnée si longtemps… Sesabdominaux sculptés lui mettaient des fourmis dans les doigts.

Après le repas, Ryan devint soudain sérieux :« Tu ne prends pas la pilule, n’est-ce pas ?— Non, pourquoi ? répondit Lisa, surprise et inquiète.— Tout à l’heure, dans le hall, j’ai cédé à une pulsion. J’ai… oublié de nous protéger. Je suis

clean. Tu n’as rien à craindre de ce côté-là. Mais pour le reste…— En principe, je ne suis pas dans les dates…, compta Lisa en s’obligeant au calme.— Si tu es enceinte…, reprit-il, embarrassé. Je serai là. Quelle que soit ta décision. »Ryan avait spontanément attrapé sa main, la fixant dans les yeux. Lisa ne douta pas de sa sincérité.

Elle repoussa ses angoisses. Il était trop tôt pour s’inquiéter. À la place, elle changea de sujet :« Je peux te poser une question ? Pourquoi étais-tu aussi …— … à cran ? compléta Ryan. On a trouvé l’atelier du tueur ce matin. L’antre du diable ! »Lorsque Ryan appuya son dos sur le canapé, Lisa le sentit s’éloigner d’elle, et pas seulement

physiquement. Elle vint se coller tout contre lui, offrant sa chaleur, sa tendresse.« Raconte-moi, suggéra-t-elle malgré l’angoisse qu’elle éprouvait à cette idée.— Non, pas ce soir ! décida-t-il après un instant de réflexion. Tu es fatiguée et tu travailles dans

quelques heures. Tu dois dormir. On en parlera demain. Allez, ouste ! » conclut-il en posant sesmains sur ses hanches pour la relever.

Lisa acquiesça, prenant conscience de son épuisement, qui devait être minime à côté du sien.« Lisa, est-ce que je peux rester dormir avec toi ? » demanda Ryan d’une voix incertaine.Pour elle, la question ne se posait même pas. Elle l’entraîna vers sa chambre.

Chapitre 9

Le réveil sonna trop tôt au goût de Lisa, l’obligeant à quitter la chaleur des bras de Ryan.« J’suis convoqué qu’à dix heures », marmonna-t-il se rendormant, sa tête brune enfouie sous

l’oreiller.Lisa eut l’impression de revivre leur premier matin… à l’envers. Elle le secoua doucement.« Je te laisse le double des clés », murmura-t-elle en posant un baiser sur sa nuque et en faisant

glisser une caresse le long des muscles durs de ses épaules.Heureusement, le vendredi fut calme au bureau. Lisa essaya de ne pas trop penser à sa relation

avec Ryan, au risque de grossesse, et à Kevin qui venait encore d’envoyer des fleurs !Elle téléphona tout de même à K.C. pour lui parler du beau gosse qu’elle avait laissé dans son lit.

Celle-ci fut rassurée d’apprendre que Ryan semblait vouloir s’engager sérieusement.* * *

Poussant la porte de son appartement à sept heures passées, Lisa eut la surprise de trouver Ryanvautré dans le canapé, regardant un match de hockey ! Il s’étira comme un félin, se leva et eut unsourire moqueur en voyant son étonnement.

« T’as vu l’heure où tu rentres ? Alors, qu’est-ce qu’on mange ? » demanda-t-il.Lisa éclata de rire tout en envoyant promener ses escarpins. Ryan était loin d’être le macho qu’il

aimait paraître. La table était mise et une agréable odeur flottait dans l’appartement.Elle se tourna pour accrocher son manteau. Se plantant derrière elle, il posa ses mains sur ses

épaules, les fit glisser jusqu’à sa taille, et sa bouche sensuelle frôla le creux sensible de son cou.Lorsqu’il se plaqua contre son dos, Lisa sentit un frisson de plaisir la parcourir.

« Je préfère manger… avant », chuchota-t-elle d’une voix mal assurée, devinant sans peine sesintentions.

Elle sentit ses lèvres chaudes s’étirer en un sourire contre sa peau.« Tu es sûre ? » souffla-t-il alors que sa main s’égarait dans une caresse osée entre ses jambes.Lisa se dégagea d’un bond en le fusillant du regard.« Allez ! Viens », dit-il, beau joueur, en lui tendant la main.

* * *Ryan se débrouillait très bien en cuisine et le repas, délicieux, se déroula dans une ambiance

complice. Il s’intéressa à la vie de Lisa, à sa famille, son travail, parla volontiers de lui, de sespropres parents, de ses frères… Lisa comprit qu’il repoussait les sujets plus graves.

Au dessert, il demanda soudain :« Tu préfères que j’amène ma brosse à dents ou tu descends la tienne chez moi ?— Quelle différence ? demanda Lisa, heureuse de ce que la question signifiait.— Si tu l’amènes chez moi, tu seras toujours libre de partir quand je te taperai sur les nerfs… Par

contre, si j’amène la mienne, tu ne pourras plus te débarrasser de moi !— C’est un peu rapide, non ? demanda Lisa, posant sa cuillère d’une main tremblante.— Nous deux, j’y pense depuis longtemps, admit Ryan en haussant les épaules. Je savais qu’à la

seconde où je poserais les mains sur toi, je serais cuit.— J’ai du mal à te croire, répondit Lisa, surprise et pas vraiment flattée. En plus, tu adorais me

faire enrager.— Et je n’ai pas l’intention d’arrêter, sourit-il avant de redevenir sérieux. En fait, je ne savais

pas comment t’approcher. On est partis du mauvais pied dès le premier soir. Je savais ce que jevoulais. Il me fallait juste du temps. Mais pour toi ? »

Il y avait un doute, une incertitude dans sa voix grave qui émut Lisa.« Tu es le seul homme dont j’ai accepté le contact… Je pense que cela veut dire quelque chose !— C’est du désir, ça ne veut pas forcément dire qu’il y ait autre chose, fit-il remarquer.— Je suis une fille sage et tu le sais. Pour moi, les sentiments et le… reste sont indissociables.— Alors il y a des sentiments ? » demanda Ryan, souriant, en se penchant pour l’embrasser.Lisa releva soudain la tête et le fusilla du regard.« Ça ne te dérangeait pas que je sorte avec Kevin ?— Je te rappelle que les murs sont en papier ici. “Bonsoir, Kevin. — Lisa, je peux entrer ?

— Oh, mais non, voyons”, imita Ryan en éclatant de rire. Trop mignon !— Espèce de… de… », râla Lisa en se jetant sur lui.Il se laissa basculer en arrière et ils roulèrent sur la moquette.« Non, ce qui m’a décidé, répondit-il, soudain très sérieux, c’est de voir John te tourner autour…

Tu étais flattée. Je me suis dit que je risquais de louper ma chance. »Aidant Lisa à se lever, Ryan l’attira dans le canapé. Elle s’installa en riant sur ses genoux.« J’adore quand tu es là !— Est-ce que tu as envie de parler de ce qui n’allait pas hier ? »Ryan soupira, sachant que toute l’histoire serait bientôt connue. Il pouvait la lui expliquer même

s’il n’en avait pas franchement envie.Et puis, pour qu’ils aient un avenir ensemble, il fallait qu’elle s’habitue à son job…« On a bossé comme des dingues. Interrogé des centaines de personnes. Recoupé des tas

d’informations. Le parcours et les heures des camions bennes. Les images de toutes les caméras desurveillance… On a fini par identifier une petite mamie avec un caddie à roulettes. On a débarquédans son joli petit pavillon hier matin à six heures tapantes. La surprise était au sous-sol ! Une sallede torture, des machines avec du sang partout sur les murs et même au plafond… et d’énormescongélateurs encore à moitié pleins ! »

Lisa retint de justesse un haut-le-cœur. Ryan racontait cela sur un ton détaché, presque absent.« La mamie vivait avec son fils d’une cinquantaine d’années. Il est mort d’une crise cardiaque il y

a trois mois. Elle a décidé de vendre pour partir en maison de retraite et elle est descendue dans la“salle de jeu du petit”. Elle croyait qu’il faisait des maquettes quand il s’enfermait là-dedans ! Elles’est dit que personne n’achèterait une maison où il y avait eu des morts alors, au lieu de nousappeler, elle a chargé son caddie et tous les matins, elle le vidait dans une benne différente duquartier…

— Ça explique beaucoup de choses…, frissonna Lisa.— Oh, oui ! C’est le pire tueur en série qu’ait jamais connu cette ville. On a encore des semaines

de boulot. Identifier les victimes. Retrouver les familles… Les journalistes vont nous démolir. Unevraie partie de plaisir… Bon, si on passait à des choses plus agréables ? »

Et d’une torsion, Ryan la bascula sur le canapé, s’allongeant sur elle.« Toi, tu n’as pas envie de dormir, plaisanta Lisa.— Pas vraiment », confirma-t-il en s’attaquant aux boutons de son chemisier.

Chapitre 10

Après une grasse matinée occupée à tout autre chose qu’à dormir, Lisa était d’excellente humeur.Elle mettait la dernière main au déjeuner et sourit en entendant l’eau s’arrêter dans la douche. Ilsavaient beaucoup parlé cette nuit.

Ryan s’avérait être beaucoup plus réfléchi qu’il ne le laissait croire. Ils étaient tombés d’accordpour attendre un peu avant de vivre ensemble. Ils devaient mieux se connaître et prendre leursmarques. Ryan admettait des manies de célibataire endurci, tandis qu’elle n’était pas prête à renoncertout de suite à son indépendance toute neuve.

Par contre, ils étaient d’accord pour que dans leur prochain appartement, les voisins n’entendentpas tout !

* * *À cet instant, la sonnette tinta. Intriguée, Lisa jeta un coup d’œil au judas. Kevin ! Elle allait lui

dire son fait une fois pour toutes, se débarrasser de ce parasite qui lui polluait la vie !Elle ouvrit la porte à toute volée… et se figea. Un genou à terre, Kevin tenait devant lui un écrin

ouvert où brillait un tout petit diamant. Derrière lui, sur le palier, les parents de Lisa les regardaient,attendris mais un peu inquiets.

« Lisa, veux-tu m’épouser ? » déclama Kevin avec son plus beau sourire.Elle resta un instant tétanisée, mais se ressaisit très rapidement.« Qu’est-ce que ça veut dire ? C’est une blague ? » demanda-t-elle froidement.William et Irène se regardèrent, surpris par la réaction de leur fille. Quand Kevin était passé les

chercher à l’improviste le matin même, ils avaient émis des doutes. Cependant, le jeune hommeparaissait tellement sûr de lui, comme toujours, qu’ils s’étaient laissé persuader.

« Je crois que nous devrions entrer, suggéra William avec diplomatie.— Oui, chérie, je crois que ce serait parfait », susurra Kevin, se relevant et passant devant elle

pour entrer d’autorité dans l’appartement.Lisa le fusilla du regard et s’effaça pour laisser passer ses parents, puis ferma derrière eux. Elle

avait compris la stratégie de Kevin. Il voulait la prendre par surprise, jouer les romantiques avec sademande en mariage devant ses parents, sachant que jamais elle n’oserait lui dire non devant eux. Dumoins, l’ancienne Lisa n’aurait pas osé…

Surprise ! pensa-t-elle, sarcastique.Se plantant au milieu du salon, Kevin roucoula avec un sourire à destination de ses parents.« Ça sent délicieusement bon, mon amour. »Lisa se campa bien en face de lui, les bras croisés, décidée à régler la situation.« Je ne suis pas ton amour ! J’aimerais bien savoir ce que tu fais ici.— Voyons, Lisa chérie ! s’exclama Kevin avec le parfait accent de la sincérité. Je sais bien que tu

étais un peu déçue que je ne puisse pas venir pour fêter ta promotion, mais tu ne vas pas remettrenotre avenir en cause… surtout maintenant que je suis enfin décidé à m’engager !

— Visiblement, tu ne comprends rien à rien ! s’exclama Lisa. Nous deux, c’est terminé, fini ! »Le regard des parents de Lisa passait de l’un à l’autre. Ils avaient l’air de plus en plus intrigué.« Ma puce, intervint William. Qu’est-ce qui se passe ?— J’ai rompu avec ce type et il ne veut rien comprendre, expliqua-t-elle à ses parents, puis se

tournant de nouveau vers Kevin, ajouta : Tu leur as raconté comment tu avais fini chez les flics ? »

Kevin adressa son sourire le plus mielleux à Irène avant de s’approcher de Lisa.« C’était un malentendu, chérie, dit-il en baissant la voix. Je ne peux quand même pas parler de

ton blocage sexuel devant tes parents. Je suis le seul à pouvoir t’aider. »Il tendit la main vers Lisa dans l’intention de lui caresser la joue.« Je t’ai déjà dit de ne pas la toucher ! » claqua la voix dure de Ryan.Lisa sourit devant l’air ahuri de Kevin quand il se retourna d’un bloc. Etonnés, ses parents aussi

se tournèrent. Lisa vit que sa mère avait instantanément compris. Il faut dire que Ryan était plantédevant la chambre, impressionnant en jean et tee-shirt noirs, mais avec les pieds nus et les cheveuxhumides…

« Qu’est-ce que tu fais là, toi ? » attaqua Kevin, incapable d’accepter l’évidence.Ryan le fixa droit dans les yeux et s’avança, le faisant reculer. Tout en lui exprimait clairement la

colère. Une colère d’autant plus dangereuse qu’elle était froidement maîtrisée.« Je te retourne la question. Qu’est-ce que tu viens encore emmerder Lisa ?— Ce ne sont pas tes affaires, tenta de répliquer Kevin.— J’ai peur que si ! intervint Lisa, ravie de la déconfiture de Kevin.— Mais, mais…, bafouilla Kevin.— Ça y est ! La lumière vient de comprendre, commenta durement Ryan. La porte est là. Personne

ne te retient. Je te conseille même de sortir avant que je ne décide de t’aider… »Si la situation n’avait pas été aussi embarrassante, Lisa aurait éclaté de rire devant le visage

décomposé de Kevin. Elle y voyait toutes les émotions se succéder. Il venait de comprendre qu’ilavait perdu la poule aux œufs d’or. La colère apparut et déforma hideusement ses traits. Ryan réagitinstantanément et s’interposa. Il saisit Kevin par le col de sa veste, approchant son visage à un poucedu sien :

« Tu t’approches d’elle encore une fois et tu auras affaire à moi, articula-t-il lentement à voixbasse avant de le repousser brutalement.

— Tu me le paieras ! hurla Kevin, qui avait failli tomber.— Menacer un flic devant témoins. De mieux en mieux. Continue ! » le provoqua Ryan en

marchant sur lui, dangereux, le contraignant à reculer.Kevin jeta un regard alentour. Lisa se tenait les bras croisés, attendant tranquillement qu’il sorte.

William et Irène le regardaient avec dédain. Serrant les dents, il sortit. Définitivement.Ryan ferma la porte et se retourna. Un silence gêné tomba sur l’appartement. Lisa toussota.« Papa, maman, je vous présente Ryan Wyndham. J’aurais aimé vous le présenter d’une façon

plus… conventionnelle. Euh… Ryan, je te présente mes parents.— Vous ne seriez pas ce fameux Ryan, le voisin qui fait la fête le samedi soir à l’étage en

dessous ? s’amusa Irène.— J’en ai peur ! répondit-il en se frottant la tête, gêné.— Il y a donc peu de chance désormais que Lisa vienne passer le weekend chez nous, conclut

Irène, de plus en plus amusée de faire rougir ce grand gaillard.— Ça se pourrait, madame », répondit Ryan en lui dédiant son sourire le plus charmeur.William l’observait attentivement. L’irruption de cet homme pour le moins impressionnant l’avait

pris de court. La mort dans l’âme, il s’était habitué à cet imbécile de Kevin puisque Lisa semblaittenir à lui. Mais sa fille avait visiblement changé d’avis et de catégorie. Exit le poseur bien habillé,Lisa était passée à un homme dur et protecteur.

William remarqua le regard appréciateur d’Irène. Le choix de leur fille lui plaisait cette fois. Etpuis, à combien de reprises avaient-ils entendu parler de « Ryan » ? Ce qu’il avait fait, dit ou, au

contraire, ce qu’il n’avait pas dit. Ils auraient dû deviner.Il tendit la main à celui qui semblait destiné à devenir son gendre. Ryan la serra avec un sourire

légèrement soulagé.« Vous voulez manger avec nous ? proposa spontanément Lisa.— Je crois, ma puce, que nous allons rentrer, répondit sa mère. Par contre, je serais ravie que

vous veniez tous les deux déjeuner demain midi à la maison.— Avec plaisir », répondit Lisa après avoir consulté son homme du regard.Une petite voix moqueuse se mit à chanter dans la tête de Ryan :

Si tu touches,C’est dimanche chez mes parents,

Mariage dans un mois,Bébé dans un an.

Etonnée, et sans comprendre, Lisa entendit Ryan marmonner : « On va discuter les délais ! »

Vous venez de terminer la nouvelle Pour un instant de vérité.

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Pauline Libersart a toujours été passionnée de lecture. Adolescente plutôt timide, sa meilleureamie s’appelait « carte de bibliothèque municipale ». Elle a ensuite entamé des études sérieuses pourtrouver un travail tout aussi sérieux. Ce qui n’a jamais empêché une partie de son cerveau decontinuer à tricoter des scénarios.

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Extrait de

L’HOMME DE LA SIERRA

Pauline Libersart

Corrigé par Jeanne Corvellec

ÉDITIONS LASKA

Montréal

Chapitre 1

La nuit tombait déjà sur la sierra, et Amélie dut se résigner à camper. Elle hésita un moment, puisfinit par se décider. Elle serait plus en sécurité si elle s’éloignait un peu de la piste principale.Personne ne devait remarquer sa présence. Si tant est que quelqu’un passe un jour sur cette routedéserte…

Elle guida son cheval entre les sapins, derrière une petite saillie rocheuse qui lui semblaprésenter un bon abri. Il la dissimulerait de la route et la protégerait aussi du vent. Elle avait bienentrevu une grotte un peu plus loin dans la paroi, mais elle n’osait pas y entrer, de peur de tomber nezà nez avec un ours finissant son hibernation.

Elle descendit maladroitement de son poney et l’attacha à un arbre avant de saisir son sac et sacouverture, attachés sur la selle. Un frisson glacé remonta le long de son échine. Amélie serra lesdents. Elle ne pouvait pas se permettre de se laisser aller…

Elle se dirigeait vers l’ouest, essayant de suivre la piste qui menait de Reno, dans le Nevada, àSacramento, en Californie. Elle avait espéré atteindre la ville de Truckee ou au moins le relais duPony Express avant la nuit. Malheureusement, se diriger seule dans la Sierra Nevada s’était avéréencore plus compliqué qu’elle ne l’avait craint. La forêt de conifères était dense, sans aucun repère.La piste se divisait parfois en plusieurs sentiers, dont certains aboutissaient à des précipices,d’autres à des rivières en furie, infranchissables avec le début de la fonte des neiges. Elle avait dûrebrousser chemin à plusieurs reprises et avait perdu beaucoup de temps.

* * *Elle s’assit avec précaution au pied de la paroi, craignant de déranger un reptile. Amélie serra sa

jupe autour de ses jambes, en arrivant presque à regretter de ne pas porter de corset. Une épaisseurde plus n’aurait pas été de trop. Elle se recroquevilla dans sa pelisse et sa couverture, car il faisaitfroid depuis que le soleil avait disparu à l’horizon. Cette nuit de printemps était même vraimentglaciale.

Le cheval hennit et s’ébroua, la faisant sursauter. Le bruit de bêtes se déplaçant dans l’obscuritéla décida à faire un feu. Et tant pis si celui-ci risquait de trahir sa présence. Éclairée par la pleinelune, elle n’eut aucun mal à réunir du bois mort et quelques pierres. Elle dénicha une boîted’allumettes dans son sac. Le feu prit rapidement, mais elle ne voulut pas prendre le risque de faireun grand brasier ; elle se contenta de petites flammes, suffisantes pour la rassurer et la réchaufferlégèrement.

Elle mangea lentement ses maigres provisions, autant pour les faire durer que pour s’occuper,frottant régulièrement l’une contre l’autre ses mains gantées de fin chevreau.

* * *Un craquement plus fort que les autres la fit sursauter, et elle se redressa brusquement. Elle avait

dû s’assoupir… Le feu était presque mort. Inquiète, elle saisit le scalpel qu’elle avait toujours aufond de sa poche. Une bien piètre arme…

Une ombre inquiétante et silencieuse se détacha lentement de l’obscurité. Un ours ? Tremblantede peur, la jeune femme se rencogna contre la paroi. Un nouveau craquement la fit tressaillir. La bêteapprochait…

Reste calme, tu sais te défendre, s’encouragea-t-elle silencieusement.L’ombre grandit et, à la faible lumière de la lune, elle identifia la forme d’un stetson. L’homme

qui le portait avança jusque dans le faible halo du feu. Il était revêtu d’un épais et probablement trèschaud manteau de cuir et de fourrures, qui lui donnait cette allure large et étrange. Il tirait son chevalpar la bride et, attachées au pommeau de la selle, elle vit des longes qui tiraient ce qui devaient êtredeux mules, encore en partie dissimulées par les arbres.

Un homme, et pas un ours… Ce n’était pas beaucoup plus rassurant pour une femme seule.Tétanisée, Amélie ne dit pas un mot — et lui non plus. Avec des gestes calmes, il alla attacher

son appaloosa près du poney d’Amélie. Il le dessella tranquillement puis, sans rien demander, ôtaégalement la selle du petit cheval pie. Le cowboy les bouchonna efficacement avant de s’éloignerpour s’occuper des mules de la même façon.

La jeune femme n’osait pas dire un mot, retenant son souffle et serrant toujours son arme entre sesdoigts gourds.

Lorsque l’homme ramassa sa selle et s’approcha d’elle, elle se raidit. Elle avait beau seraisonner, s’exhorter au calme, ses dents se mirent à claquer, cette fois pas seulement de froid. Sanslui demander la permission, il posa sa selle juste à côté d’elle. Ensuite, il prit la couverture indiennequi y était attachée et la lui tendit silencieusement. Étonnée, Amélie la prit gauchement, puis sedécidant brusquement, s’enroula dedans.

« Merci », chuchota-t-elle.Elle eut l’impression que le cowboy haussait les épaules. Il se détourna, toujours silencieux, et

s’agenouilla pour remettre une bonne quantité de bois dans le feu, lentement, méthodiquement. Lesflammes s’élevèrent rapidement, vives, et la jeune femme sentit une vague de chaleur venir jusqu’àelle et réchauffer ses joues. L’homme se redressa et passa dans la lumière. C’est à ce moment qu’ellele reconnut.

* * *La veille, pour sa première soirée de travail comme serveuse dans le seul saloon de la ville de

Floriston, un client l’avait attrapée. Amélie avait appelé son patron à l’aide, mais celui-ci, derrièreson comptoir, s’était contenté d’annoncer le prix qu’il voulait pour elle. La jeune femme s’étaitdébattue, avait tenté de s’échapper sous les quolibets avinés des autres clients, criant qu’elle n’étaitpas une prostituée.

L’homme, un prospecteur sale et puant, avait presque réussi à la traîner jusqu’à l’escalier menantaux chambres, quand ce cowboy avait poussé la porte à double battant du saloon. Avisant la situation,il avait réagi à la seconde, frappant l’autre d’un coup en plein menton.

Libérée, Amélie s’était enfuie sans demander son reste ni attendre la suite de la bagarre. Elleavait passé la nuit cachée dans la grange du maréchal-ferrant, à réfléchir. Elle ne pouvait pas resterdans cette ville où ne s’arrêtaient que des prospecteurs et des cowboys en manque de compagnie…Au matin, elle s’était faufilée dans sa chambre d’hôtel au-dessus du saloon pour réunir ses quelquesaffaires. Elle avait dépensé ses derniers dollars pour acheter un poney appelé Nopy, et elle avait prisla route, sachant que cette solution était au moins aussi dangereuse que de rester.

* * *Le cowboy s’installa près d’elle, appuyant son dos au rocher. Il sortit de sa sacoche de la viande,

une gourde d’eau et des biscuits. Toujours sans le moindre mot, il tendit un bout de bœuf séché à lajeune femme. Inquiète et sur ses gardes, elle tendit doucement la main, hésita et attrapa vivement lemorceau.

« Merci », dit-elle à nouveau en l’attaquant à pleines dents, affamée.Il hocha simplement la tête, mastiquant le morceau qu’il venait de couper, le regard perdu dans

les flammes. La jeune femme retint un sourire désabusé. Le couteau qu’il venait de rengainer était

bien plus effilé et meurtrier que la malheureuse petite lame qu’elle-même dissimulait.Après s’être désaltéré, il se tourna lentement vers elle.« Où vas-tu ? demanda-t-il d’une voix grave et agréable.— Sacramento, répondit-elle en essayant d’avoir une voix aussi calme que la sienne.— Sacrée chevauchée… »Amélie serra les poings sous la couverture. Elle le savait. Elle était loin d’être naïve. Elle allait

devoir traverser presque la moitié de l’État, éviter les bandits, les Indiens, les bêtes sauvages… etmême les hommes. Seulement, elle n’avait pas le choix. Et pourtant, elle était tellement fatiguée. Ellen’en pouvait plus. Elle n’était même pas sûre de trouver sa famille une fois là-bas. Un sanglot luiéchappa. Surpris, son compagnon improvisé l’observa attentivement à la faible lueur des flammes.

« Ça va ?— Pas vraiment, mais il faudra bien.— Pourquoi Sacramento ?— Je vais rejoindre ma tante et son mari. C’est la seule famille qui me reste. »Elle hésita un instant, mais le besoin de parler, de se confier, fut le plus fort.« Mon père a été tué par les Yankees pendant la guerre, il y a deux ans. Après, j’ai dû travailler à

l’hôpital pour gagner de quoi vivre. Quand notre maison de Charleston a brûlé, ma mère s’est mise entête d’aller en Californie rejoindre sa sœur. Nous avons pris le train, mais à Reno, la ligne étaitinterrompue. Il nous fallut prendre la diligence. »

Sa voix se fêla et elle dut essuyer les larmes qui coulaient sur son visage. Patient, il attenditqu’elle se reprenne.

« Nous étions dans la montagne quand un éboulement nous a fait basculer dans un torrent.Plusieurs passagers ont été tués… dont ma mère. »

Cette fois, elle ne put retenir ses sanglots et cacha son visage dans la couverture. Il fallut unmoment avant qu’elle ne se calme. Lentement, elle s’apaisa. Les larmes avaient relâché la tension, lalaissant simplement épuisée, sans force, à bout de courage.

Chapitre 2

Attentif, il la regardait sans oser la toucher, de crainte qu’elle ne perde pied et ne fasse une crised’hystérie. Elle avait déjà vécu un enfer, et elle n’était pas encore sortie d’affaire. Sacramento était àplus d’une semaine de trajet pour un homme armé avec un bon cheval et des provisions. Elle n’avaitrien de tout cela.

Son silence laissa le temps à Amélie de se reprendre. Elle renifla et reprit son récit :« J’ai été assommée pendant l’accident. Je me suis réveillée à Floriston, où des cowboys avaient

ramené les survivants. J’ai dû payer l’enterrement de ma mère… Je n’avais presque plus rien et lepatron de l’hôtel a dit que je pourrais payer ma chambre en travaillant pour lui au saloon. Une desfilles a essayé de m’avertir, mais je ne l’ai pas écoutée. Vous avez vu le résultat ! Le pire est que jene suis même pas sûre de retrouver ma famille. Je leur ai envoyé un télégramme, mais mon oncle estmédecin, il a une clinique itinérante. Il est rarement à Sacramento. En attendant, il me faudra untravail. Vous ne connaîtriez pas quelqu’un qui cherche une infirmière, une garde-malade, voire unebonne à tout faire ? »

Le cowboy prit un long moment pour réfléchir avant de prendre la parole. Dans la semi-obscurité,elle ne voyait de lui que son profil à la barbe fournie sous le rebord de son chapeau.

« J’ai un ranch et j’ai besoin de quelqu’un…— D’accord, répondit-elle un peu trop vite.— Je vis seul », précisa-t-il en la fixant soudain.Amélie frissonna et n’eut pas besoin d’autres explications. L’offre était claire.Un instant, elle se reprocha d’avoir abordé le sujet, puis réalisa qu’il se serait imposé à un

moment ou à un autre. Cet homme était aussi seul que tous les autres dans cette région, avec lesmêmes besoins, les mêmes désirs…

Elle ne voyait pas son regard noyé dans l’ombre, mais visiblement, il n’était pas pressant, pasagressif. Il n’avait pas essayé de la toucher. Il admettrait peut-être un refus. Mais avait-elle lesmoyens de refuser ?

Il lui restait, en tout et pour tout, 2,50 dollars, un poney indien et un sac de vêtements qui n’étaientmême pas tous à elle.

Si elle acceptait, elle aurait un refuge et un protecteur contre tous les autres. Un endroit où elleserait en sécurité jusqu’à ce qu’elle puisse contacter sa famille… Enfin, s’il ne lui mentait pas. Maissachant qu’il l’avait défendue la veille, elle était prête à prendre le risque de lui faire confiance et àassumer les conséquences, le prix de la sécurité qu’il lui offrait. Ce qu’il proposait avait un nom…mais elle se refusa y à penser de cette façon.

Elle devait être pragmatique, dure. Elle devait faire ce qu’il fallait pour survivre. C’était une desleçons qu’elle avait retenues de cette maudite guerre. Subir un seul homme respectueux serait moinspénible qu’être à la merci de tous les autres. Sa mère en aurait été morte de honte. Elle l’auraitreniée…

La jeune femme déglutit difficilement et réussit à murmurer :« D’accord, j’accepte. »Il hocha la tête mais ne répondit pas, et un silence étrange s’installa entre eux. Le cowboy sortit

de sa poche un cigarillo qu’il alluma avec l’une des brindilles du feu. Il le fuma tranquillement. Sonattitude sereine eut un effet apaisant sur les nerfs ébranlés de la jeune femme. Il finit par se lever et

écrasa le mégot sous le talon de sa botte. Il attrapa doucement Amélie par un coude, l’obligeant à semettre debout. Trop fatiguée pour discuter ou même poser une question, Amélie se laissa faire.

Le cowboy étala l’une des couvertures par terre et la fit se rasseoir dessus. Il lui ôta celle qu’elleserrait encore étroitement autour d’elle et la poussa pour qu’elle s’allonge. Alors que la jeune femmecraignait le pire, il étendit la couverture sur elle, puis retira son épais manteau pour lui en faire unesorte de couette. Instinctivement, elle replia les jambes, faisant disparaître ses bottines en dessous.

« Est-ce que vous allez… ? commença-t-elle.— Dors », la coupa-t-il.Il parut hésiter un instant avant de venir s’installer près d’elle, sous les couvertures. Il posa sa

tête sur la selle et rabattit son chapeau sur ses yeux. Des larmes de soulagement coulèrentsilencieusement sur les joues glacées de la jeune femme. Il lui accordait un répit… Elle sentit lesvagues acides de la peur refluer. Pourtant, elle continua de trembler, tellement qu’il ne put l’ignorertrès longtemps.

Sous les couvertures, il passa son bras autour de ses épaules et l’amena tout contre lui pour laréchauffer. Quand il saisit ses mains, il découvrit avec inquiétude qu’elles étaient gelées, malgré sesgants. Il les lui ôta et se mit à frictionner ses paumes, ses doigts gourds, mais aussi ses poignets pourfaire circuler le sang dans les articulations. La chaleur des couvertures n’était pas suffisante. Il fallaitles mettre vraiment au chaud pour éviter les engelures. Alors il tira sur son épaisse chemise et sur sonmaillot pour les sortir de la ceinture de son pantalon, puis il guida ses mains sous le tissu.

Très surprise, Amélie sentit le sursaut qu’il contrôla quand elle effleura la peau nue de sonventre. Elle posa ses mains très doucement.

Quant à lui, il eut besoin de quelques instants pour supporter ce contact glacé. Les frissons defroid cessèrent progressivement et elle se détendit contre lui. Elle se rapprocha encore et finit parposer sa tête blonde au creux de son épaule, le laissant l’enlacer encore plus étroitement.

Dans son demi-sommeil, elle glissa ses mains plus loin sous le tissu, se serrant contre lui,profitant de la chaleur qu’il lui offrait. Inconsciemment, elle fit jouer ses doigts sur sa peau, luiprodiguant de petites caresses lentes et toutes douces, comme il n’en avait jamais reçu.

* * *Caressant doucement le dos de la jeune femme endormie dans ses bras, il sourit. Il n’aurait jamais

pensé qu’elle puisse accepter sa proposition, et surtout pas aussi facilement.À la réflexion, vu ce qu’elle lui avait raconté, elle devait être désespérée… Il l’avait même

entendue réciter une prière avant de s’assoupir.Savourant le contact de ce corps souple et doux, il repensa à la première fois où il l’avait vue.

Elle lui avait immédiatement plu. Elle était jolie, pas encore marquée par cette lassitude des femmesusées par les rudes conditions de vie de l’Ouest. La veille, il n’avait pas supporté de voir ce saletype poser la main sur elle. La bagarre lui avait coûté une nuit en cellule à cause des dégâts ausaloon, mais cela en valait la peine.

Il l’avait cherchée en sortant de prison, mais elle avait quitté la ville à l’aube. Il n’avait pas eubeaucoup de mal à suivre sa piste ; il était aussi doué qu’autrefois… À la tombée de la nuit, il avaitdécidé de poursuivre un peu à pied, persuadé qu’elle n’était plus très loin. Elle n’avait que quelquesheures d’avance sur lui, au maximum. Il avait continué d’avancer, tirant l’appaloosa par la bride etutilisant la lumière de la lune. Il allait finalement se décider à camper quand le vent lui avait apportéune odeur de bois brûlé.

Elle était allée plus loin qu’il ne l’aurait cru possible. Elle avait de l’endurance, de l’obstinationet du courage. Malgré lui, il avait été impressionné.

Quand il l’avait trouvée, recroquevillée près de son petit feu, le regard chargé d’angoisses et depeurs, il avait eu envie de la secouer comme un prunier pour qu’elle comprenne les risques qu’elleavait courus, seule dans cette montagne. Finalement, il avait préféré commencer par s’occuper deschevaux et l’approcher en douceur, comme on approche un animal blessé.

En entendant son adorable accent sudiste, il avait été définitivement séduit. Elle s’exprimait avecdistinction et s’habillait avec élégance… Elle était sans doute trop bien éduquée et bien trop instruitepour lui, mais elle lui avait accordé une chance !

Il glissa lentement dans le sommeil et rêva d’une promenade en ville où, portant son plus beaucostume, il avait à son bras, vêtue d’une belle robe blanche, souriante sous une élégante ombrelle dedentelle, la plus jolie fille qu’il ait jamais vue.

Extrait de

POUR UN INSTANT D’INCOMPRÉHENSION

Pauline Libersart

Corrigé par Jeanne Corvellec

ÉDITIONS LASKA

Montréal

Chapitre 1

K.C. resserra ses bras autour d’elle. Elle ne pouvait arrêter de trembler. Un pompier s’approchaavec un sourire et lui posa une couverture sur les épaules.

« Ce n’est rien, c’est le contrecoup. Ça va passer. »Elle eut envie de hurler. Non, ça n’allait pas passer. Non, ça n’irait pas mieux tant que le malade

qui essayait de la tuer serait en liberté.« On va vous emmener passer des radios. Les policiers de l’escorte sont arrivés. »Soupirant de soulagement, elle tourna très doucement la tête dans la direction indiquée. Elle avait

la nuque raide. Heureusement, l’appui-tête et l’airbag avaient limité les dégâts.À la vue des trois hommes qui venaient vers elle, son cœur rata un battement. Il y avait deux

officiers en uniforme, comme elle s’y attendait, mais il y avait aussi Shane West, inspecteur à laCriminelle, son rêve et son pire cauchemar.

« Procureur ! la salua-t-il, le visage impénétrable.— Inspecteur West, répondit-elle, crispée.— Les agents Jones et Rice vont vous accompagner. Ils ont ordre de rester avec vous. Je vous

remercierai de leur faciliter la tâche. Ça nous changerait ! »Elle ne l’avait pas volé. Elle s’était conduite en idiote. Seulement, il n’était pas obligé de lui

parler comme ça devant les autres. Elle se releva en grimaçant et monta dans l’ambulance avec l’aided’un pompier. Shane regarda les portes se fermer sur elle.

« Satanée tête de mule ! » marmonna-t-il.* * *

Il était dans sa voiture quand il avait entendu le message radio. Un van avait poussé la voiture deK.C. dans la glissière de sécurité. Elle avait de la chance de s’en sortir sans trop de dommages.

C’était la deuxième tentative contre elle. Deux semaines auparavant, elle avait atterri dans le lac,poussée par un inconnu alors qu’elle faisait son jogging le long des berges. Depuis, Mlle KatherineCecily Huntington-Smith, procureure adjointe de l’État, était sous protection policière de niveau 2.Elle devait les prévenir de tous ses déplacements pour être accompagnée. La nuit, une patrouillepassait devant chez elle toutes les vingt minutes. Sauf que cet après-midi, cette enquiquineuse avait euune course à faire et n’avait pas daigné les appeler.

Quand il avait appris l’accident, son cœur avait raté un battement. Il n’avait repris un rythmenormal que quand il l’avait vu assise, indemne, à l’arrière de l’ambulance. Ensuite, il avait remis sonmasque professionnel pour lui parler. C’était le seul moyen.

Lucas et son équipe de la police scientifique arrivaient et Shane se dirigea vers eux. Enquêter surles crimes, c’était son métier, il savait faire. Les relations humaines, par contre…

* * *À l’hôpital, K.C hésita à appeler sa mère. Inutile de lui causer des soucis. Quoique…Allez, sois honnête, s’admonesta-t-elle. Tu n’as pas peur qu’elle s’inquiète. Tu as peur qu’elle

te dise : “tu te fais des idées, ma fille.” Comme la dernière fois…Rageuse, elle attrapa son téléphone et appela la seule personne au monde pour qui elle comptait

vraiment : Lisa, sa meilleure amie.« C’est moi !— Je n’osais pas t’appeler. Comment vas-tu ?

— Physiquement, ça va. Moralement, c’est bof. Un malade m’a envoyé dans le fossé. Ryan t’aprévenue ?

— Évidemment ! »Evidemment ! se répéta ironiquement K.C.Lisa allait épouser Ryan Wyndham au mois de juillet. Ryan était lieutenant à la brigade

criminelle, accessoirement le supérieur et le meilleur ami de Shane.« Je suis secouée et j’avoue que j’ai eu peur.— Plus qu’après ton plongeon dans le lac ?— Je sais nager ! Je ne risquais par grand-chose, à part un bon rhume…— … et des boutons, se moqua Lisa.— Oui, sourit-elle enfin. Quand il a heurté ma voiture et qu’elle est partie en toupie, j’ai vraiment

eu la frousse. Le pire, c’est que je n’ai rien vu !— Qui se charge du dossier ?— Avec la chance que j’ai en ce moment… Shane, évidemment.— Vous vous êtes parlé ? demanda prudemment Lisa.— Comme deux étrangers. Pitoyable, pathétique… », avoua K.C.Non, ne pleure pas, s’ordonna-t-elle.« Je dois raccrocher, on m’appelle », annonça-t-elle en coupant la communication

précipitamment.Lisa ne fut pas dupe une seconde. Elle allait en parler avec Ryan. Il fallait trouver une solution à

cette situation.* * *

Deux heures plus tard, dans les bureaux de la Criminelle, l’ambiance était tendue.« C’est hors de question, répliqua Shane en se levant d’un bond.— Je ne vous demande pas votre avis, répondit le capitaine Davis.— Merde ! Ryan, explique-lui ! Vous ne pouvez pas me demander ça !— K.C. Huntington passe en protection de niveau 3, confirma Ryan très calmement. J’assure les

journées, toi les nuits.— Je vais en crever », marmonna Shane en se laissant retomber sur sa chaise.Ryan échangea un regard avec leur capitaine.« Ecoute, ce que je vais te dire est confidentiel. K.C. travaille avec les affaires internes… »Shane comprit à demi-mot. Il y avait des ripoux dans leur service.« Qui ?— C’est la question. On ne peut pas charger n’importe qui de sa protection…— Il y a bien quelqu’un d’autre, bon sang !— Les fédéraux ! répondit le capitaine. Et je préfère éviter de faire appel à ces emmerdeurs. »Soupirant, Shane comprit qu’il était coincé. Jamais il ne laisserait K.C. à la merci du danger.

L’enfer lui tomberait donc dessus ce soir à huit heures précises.* * *

Une heure plus tard, dans le bureau du procureur général, la réaction de K.C. fut quasimentidentique.

« En qui as-tu confiance ? lui demanda Ryan, stoïque.— Toi !— … et Shane. Que tu le veuilles ou non, c’est la meilleure solution. »K.C. finit par s’avouer vaincue et retourna dans son bureau en pestant.

« Qu’est-ce qui se passe ? lui demanda Annie, l’une de ses assistantes.— Rien d’important. Les flics font une crise de paranoïa et me mettent sous protection

rapprochée. Je vais avoir un baby-sitter collé à mes baskets !— C’est plus prudent, avec tout ce qui vous est arrivé. Vous ne devriez pas prendre tout ça à la

légère. Vous devriez aussi faire attention à vos fréquentations. »Lui jetant un regard peu amène, K.C. attrapa un dossier et s’enferma dans son bureau, faisant

bruyamment claquer la porte.Ce n’était pas parce qu’elles avaient suivi les mêmes cours à la fac que cette fille pouvait se

croire autorisée à lui donner des conseils. Surtout que cette nunuche ne devait pas son job à sonbrillant niveau d’études, mais à l’intervention du juge Moore, son cher et influent papa.

Nous espérons que vous avez apprécié la lecture de cet ebook.

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