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FRANCE P.3 Sarkozy dégaine Fillon n Le Premier ministre a été appelé au front pour contrer l’offensive socialiste jeudi soir sur France 2. Il répondait à Martine Aubry. INTERNATIONAL P.4 Violences en Egypte n Le haut conseil mili- taire est sous le feu des critiques après le match meurtrier de mercredi soir, qui a fait 74 victimes. ECO/CONSO P.7 L’économie numé- rique française à la traine n L’entrée en ourse de Facebook est une nou- velle preuve de l’impor- tance grandissante de l’économie numérique. Un domaine dans le- quel la France est un peu en retard. CULTURE P.8 Black history month n Kathleen Cleaver, figure légendaire du Black Power, était à Paris pour la première célébration de l’événe- ment en France. L’ESSENTIEL Condamnation inédite pour la Scientologie EXPRESSO n Jeudi matin, la cour d’appel de Pa- ris a condamné la branche française de l’Eglise de Scientologie à 600 000 euros d’amende pour « escroquerie en bande organisée ». Une première en France pour l’organisation américaine. Dénonçant une « sorte de procès fan- tôme entaché d’irrégularités », l’Eglise a annoncé qu’elle se pourvoyait en cassation. PAGE 2 A la sortie du palais de justice, les scientologues se sont réunis jeudi pour protester contre la décision de justice. QUOTIDIEN DU MASTER DE JOURNALISME DE L’ INSTITUT FRANÇAIS DE PRESSE - PROMO 2012 # 03 03 02 2011 L’organisation écope de 600 000 euros d’amende

03 Expresso 2012

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le quotidien école de l'IFP

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FRANCE P.3Sarkozy dégaine Fillonn Le Premier ministre a été appelé au front pour contrer l’offensive socialiste jeudi soir sur France 2. Il répondait à Martine Aubry.

INTERNATIONAL P.4Violences en Egypte

n Le haut conseil mili-taire est sous le feu des critiques après le match meurtrier de mercredi soir, qui a fait 74 victimes.

ECO/CONsO P.7L’économie numé-rique française à la trainen L’entrée en ourse de Facebook est une nou-velle preuve de l’impor-tance grandissante de l’économie numérique. Un domaine dans le-quel la France est un peu en retard.

CULTURE P.8Black history month

n Kathleen Cleaver, figure légendaire du Black Power, était à Paris pour la première célébration de l’événe-ment en France.

L’EssENTIEL

Condamnation inédite pour la Scientologie

ExPREssO

n Jeudi matin, la cour d’appel de Pa-ris a condamné la branche française de l’Eglise de Scientologie à 600 000 euros d’amende pour « escroquerie en bande organisée ». Une première en

France pour l’organisation américaine. Dénonçant une « sorte de procès fan-tôme entaché d’irrégularités », l’Eglise a annoncé qu’elle se pourvoyait en cassation. PAgE 2

A la sortie du palais de justice, les scientologues se sont réunis jeudi pour protester contre la décision de justice.

qUOTIdIEN dU mAsTER dE jOURNALIsmE dE L’ INsTITUT FRANçAIs dE PREssE - PROmO 2012# 03

03 02 2011L’organisation écope de 600 000 euros d’amende

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«C'est une décision historique pour ceux qui luttent

contre les dérives sectaires ». Par ces mots, Me Olivier Morice, l'avocat de l'Union Nationale des Associations de Défense des Familles et de l'In-dividu (Unadfi), a salué l'arrêt rendu par la cour d'appel de Paris condamnant jeudi deux entités de la branche française de l'Eglise de Scientologie à 600 000 euros d'amende pour « escroquerie en bande organisée ». Cette décision confirme le jugement de première instance qui avait vu, en octobre 2009, les personnes morales de la Scientologie frappées de 600 000 euros d'amende. Touchée au coeurPour la première fois, la jus-tice française reconnaît que les activités scientologues constituent une escroquerie. Jusqu'ici, seules des personnes physiques, responsables de

la Scientologie, avaient été condamnées en France dans d'autres affaires. Sur ce cas, l'accusation reprochait aux deux principales structures de la Scientologie française – l'as-sociation spirituelle de l'Eglise de Scientologie, Celebrity Centre, et sa librairie SEL, et à cinq scientologues d'avoir profité de la vulnérabilité d'an-ciens adeptes pour leur soutirer de fortes sommes d'argent. « La France est à l'avant-garde

dans la lutte contre cette orga-nisation », a souligné Me Oli-vier Morice à l'issue de l'au-dience. « C'est une très bonne nouvelle et une défaite sévère pour l'Eglise de Scientologie touchée au coeur de son dispo-sitif », a-t-il ajouté.

Un procès fantôme Mais, l'Eglise de Scientologie ne s'avoue pas vaincue et, dès la décision du tribunal, a annoncé qu'elle se pourvoyait en cassa-

tion. « L'Association Spirituelle de l’Eglise de Scientologie - Celebrity Centre considère que la décision rendue est tota-lement faussée et inéquitable, car elle est le résultat d’une sorte de procès fantôme, où de nombreuses irrégularités et violations des droits fondamen-taux des scientologues se sont succédé », a-t-elle indiqué dans un communiqué. Cette réac-tion épidermique de l’Eglise de Scientologie est compré-hensible tant l’enjeu pour elle dépasse les frontières hexago-nales. Considérée en France par différents rapports parlemen-taires comme une secte, elle a le statut de religion dans d’autres pays, comme aux Etats-Unis. Or, l’arrêt rendu jeudi matin par la justice française pour-rait bien donner des idées aux adversaires de l’Eglise à travers le monde et faire tanguer toute l’organisation. o Vincent Bouquet et Claire Branchereau

FRANCEJUSTICE La secte controversée se voit infliger une peine record

Coup d’arrêt à l’Eglise de Scientologie

Des adeptes indignés par le jugement n Les Anonymous français s’étaient donné rendez-vous ce jeudi face au Palais de jus-tice de Paris pour narguer les scientologues, leur cible favo-rite.

Seulement à l’heure dite, il y a plus de policiers sur la place que de masques de Guy Fawkes, l’homme qui sert de modèle aux hackers. « On est comme vous, on les attend. On ne sait pas combien ils seront, ni à quoi ils ressemblent. On veut juste éviter une confrontation avec les scientologues. » nous expliquent trois gendarmes, postés près de la bouche de métro. A 12h45, ils remballent : toujours pas l’ombre d’un Ano-nymous. Auraient-ils posé un lapin aux scientologues ?Les coreligionnaires de Tom Cruise et de John Travolta, célèbres adeptes de l'Eglise de Scientologie, ont d'autres chats à fouetter. Ils sont là, eux, pour dire « NON à un procès en héré-

sie », « NON à une justice sous pression », d'après les pancartes qu'ils agitent au son du tambour apporté pour l'occasion.

OpérationCeux qui ne réclament pas haut et fort le « droit à (leur) reli-gion » avec le gros du groupe

distribuent un peu plus loin des tracts explicatifs, impri-més à l'avance. Ils portent des autocollants « scientologues indignés », et renvoient les passants un peu curieux vers ceux qui « pourront mieux (les) renseigner ». Une opération rondement menée, pour une

réaction supposée spontanée à une décision de justice rendue quelques heures plus tôt. « On s’y attendait », explique Véro-nique, la cinquantaine, venue spécialement de province. A ses côtés, d’autres scientologues semblent pourtant moins sûrs d’eux. Michel par exemple n’a pas connaissance des amendes et condamnations prononcées le matin à l’encontre de l’Eglise de Scientologie. Dominique, elle, a pris sa journée pour être présente mais elle semble ignorer que la Cour d’appel a déjà rendu sa décision,et sur quels chefs d’accusation exacts. D’ailleurs, elle ne comprend pas même la plainte pour escro-querie à l’origine de sa pré-sence: « Chez nous, les gens sont remboursés quand ils ne sont pas satisfaits. ». Mais on s’égare. Bien vite, les mots officiels reviennent : « On ira jusqu’à la Cour européenne des Droits de l’Homme. » oVB et CB

02 - EXpREsso - vENdREdi 3 FEvRiER 2012

Les vitamines purificatricesParmi les condamnations confirmées jeudi matin par la Cour d’appel à l’égard de l’Eglise de Scientologie, il en est une qui est passée inaperçue : celle d’exercice illégal de la médecine. Michel, « scientologue indigné » présent lors de la manifesta-tion de mercredi midi, explique : tout prétendant à la Sciento-logie est prié de se soumettre à un programme de purification. Il doit alors prendre des vitamines, qu’il paie au préalable plus cher que la normale, et dont le dosage est fait par un membre de l’Eglise. Seul problème : le « doseur » n’est pas médecin, et les vitamines ont été identifiées comme médicaments par les autorités de santé.

Plusieurs centaines de scientologues s’étaient donné rendez-vous

Réactions trois heures après le rendu de la Cour d’appel

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n Nicolas Sarkozy croit en sa stratégie. En refusant d’endosser officiellement les habits du candidat, le cham-pion de la droite se posi-tionne au-delà des clivages. Depuis peu, c’est en homme d’Etat qu’il se présente aux Français plutôt que comme le dirigeant d’un parti, selon les commentateurs. Mais com-ment contrer l’opposition ? Le Roi ne s’est pas déclaré mais, comme dans tout conte, il a des princes. Bons pour le front. La semaine dernière, Alain Juppé, était ainsi prié de re-mettre en place François Hol-lande, favori des sondages. Dans l’émission de France 2 Des Paroles Et Des Actes, le ministre des Affaires étran-gères s’est exécuté non sans mal, défendant le bilan d’un Président pas encore candidat. Pourtant fort de son image de ministre fiable et fin connais-

seur du jeu politique, Alain Juppé a manqué ce soir-là son offensive, de l’avis des jour-nalistes politiques. Jeudi soir, l’émission accueillait un prince de choix : François Fillon, autrefois dédaigné par le Roi, voire donné partant.

Une grosse erreur Un temps disparue, la confiance semble donc retrou-vée entre Nicolas Sarkozy et son unique Premier ministre du quinquennat, ainsi porté en modèle de stabilité. Pas d’autre solution : à l’UMP, qui pour défendre le projet du Roi face à des cadres du PS galvanisés par les sondages ? Nicolas Sarkozy a donc fait le pari de charger les siens d’occuper le terrain. Il peut y perdre des plumes mais est convaincu d’y gagner des galons. Côté UMP, on s’inter-rogeait avant son passage télé-visé. Eric Ciotti voit dans cette stratégie l’occasion de démon-trer qu’à l’UMP, « on a des

hommes d’État ». De son côté le député Claude Goasguen dé-sapprouve la méthode. « C’est une grosse erreur » tranche-t-il. « Vous donnez deux avan-tages à l’adversaire : Martine Aubry aura du grain à moudre contre Fillon qui n’aura rien ! Que voulez-vous qu’il lui ré-ponde ? ‘Vous gérez mal Lille’ ? » Si son absence du débat démocratique lui permet de se préserver un temps des salves de l’opposition, elle présente aussi le risque de voir tomber un à un ses meilleurs atouts. Et de ne plus pouvoir remonter la pente lorsque, le moment venu, Nicolas Sarkozy se présentera au suffrage des Français. o Julien Cholin

Fillon affronte Aubry ce soir AubryprocureurFrançois Hollande peut se féliciter du travail accompli par la première secrétaire du PS. Très populaire auprès des militants socialistes, Martine Aubry a déci-dément pris à cœur son rôle dans la campagne. Fini le temps des at-taques contre Sarkozy, à présent la maire de Lille est « séduite » par son candidat. Jeudi soir, c’était peut-être sa successeure au poste de Premier ministre qui affrontait François Fillon sur France 2.

POLITIQUE DES PAROLES ET DES ACTES sur France 2

Les hommesdu présidentà l’assaut du PS

FRANCE

FROID La consommation de watts boostée

La pénurie d’électricité menace Bretagne et PACAn Les températures dégrin-golent et les radiateurs fonc-tionnent à plein régime. La consommation d’électricité menace d’enregistrer un pic généralisé ce week-end. Le Ré-seau de Transport d’Electricité, filiale d’EDF, prévoit un record historique lundi prochain avec une pointe à 98 700 mégawatts. Pour la plupart des régions, pas de problème d’alimentation en perspective. Mais Bretons, Varois, Alpins maritimes et Monégasques doivent anticiper des coupures de courant loca-lisées et prévoir charentaises et soirées au coin du feu.

Deux réacteurs nucléairesVictimes d’un déséquilibre entre consommation et pro-duction d’électricité qui ne satisfait pas les besoins locaux, ces régions dépendent de l’ali-

mentation fournie par les ter-ritoires voisins. En période de grand froid, chaque degré perdu entraîne une hausse supplé-mentaire de 2 300 mégawatts à l’échelle nationale – soit la production de deux réacteurs nucléaires. Dépendants à 90% d’un réseau unique de 400 000 volts, le Var et les Alpes Mari-times comme la Bretagne ne produisent qu’à peine 10% de ce qu’ils consomment. Le mot d’ordre d’Ecowatt, dispositif de prévention de la surconsomma-tion : éteindre les appareils en veille et la lumière. o Nathalie Tissot et Kim Lévy

vENdREdi 3 FEvRiER - ExpREsso - 03

EN bREFParis Habitat accusé par la CNIL d’atteinte à la vie privée La Commission nationale informatique et libertés (CNIL) a ren-du publique jeudi une mise en demeure de l’office public HLM de Paris Habitat, qui gère 120 000 logements, pour « atteinte à la vie privée de ses locataires ». Elle dénonce le contenu de certaines données enregistrées dans les fichiers de l’OPHP. Dans la zone « commentaires », plusieurs mentions très per-sonnelles sur les habitants : « Ancien SDF addiction boisson », « N’est pas de nationalité française », « Séropositif », « Cancer », « Dépression hôpital psychiatrique ». Alertée par les associa-tions de locataires, la CNIL a aussi constaté que la plupart des 1200 gardiens pouvaient consulter ces informations. L’office

600 nouvelles places d’hébergement d’urgence en Ile-de-Francen Dans le cadre du plan "Grand froid", le porte-parole du ministère de la Défense, Gérard Gachet, a annoncé jeudi la mise à disposition par l'armée de 600 places d'hébergement d'urgence en Île-de-France. La semaine dernière, un rapport parle-mentaire signalait un déficit de 70 000 lits sur l'ensemble du territoire pour l'hiver 2012.

Enquête française sur le naufrage du Costa Concordian Le parquet de Paris ouvre le volet français de l’enquête préliminaire sur le naufrage du paquebot de la compagnie italienne Costa, le 13 janvier dernier au large des côtes toscanes. La gendarmerie maritime doit entendre les 456 rescapés français afin de déterminer les « conditions de l’accident, de l’évacuation et du sauvetage ».

ErratumDans le premier numéro d’Ex-presso, l’étiquette «ancien FN» a été attribuée à Philippe Guye-not. Nos excuses à l’intéressé.

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n Après la mort mercredi soir d’au moins 74 personnes lors d’un match de football, les militaires au pouvoir en Egypte sont directement mis en cause.

« La révolution égyptienne est face à un grand danger » : le président de l’Assemblée égyp-tienne a donné l’alerte. Issu du mouvement des Frères musul-mans, Saad al-Katatni a direc-tement désigné les forces de sécurité comme responsables des violences de Port-Saïd. Une journée seulement après la violente fin du match opposant Al-Masry, un club de Port-Saïd, à l’équipe cairote Al-Ahly, la télévision d’Etat égyptienne continue de montrer les images de chaos dans le stade. On y voit des centaines de suppor-ters d’Al-Masry envahir le ter-rain quelques secondes après le dernier coup de sifflet et commencer à jeter des pierres et des bouteilles sur ceux d’Al-Ahly. Un joueur de l’équipe du Caire témoigne en direct « Il y a des morts sur le sol ! Il y a des morts dans les vestiaires ! Je ne jouerai plus au football tant que justice ne sera pas faite ».

Violence organisée?Les circonstances du drame s’éclaircissent, mais pas les causes. Pourquoi les soldats présents à l’intérieur du stade ne réagissent pas ? Comment armes blanches et objets incen-

diaires ont-ils pu être intro-duits ? On apprendra plus tard que la fouille à l’entrée n’a pas eu lieu. Et pourquoi ce sont les supporters de l’équipe gagnante qui s’en prennent à ceux d’en face ? Un témoin raconte à Reu-ters : « On a essayé de s’enfuir, le stade était fermé à clef avec de grosses chaînes ».

La théorie du complot prend corps dans les conversations. L’armée est montrée du doigt. Dans les rues comme sur Inter-net, tout et n’importe quoi est avancé. On parle d’une ven-geance envers les Ultras d’Ah-ly, véritables bras armés de la

révolution et fervents opposants au Conseil suprême des forces armées.

Ygal Saadoun, ancien corres-pondant de France 24 au Caire, commente pour Expresso : « le mélange d’opacité, de théories du complot et parfois de mau-vais journalisme en Egypte rend approximative toute expli-cation pour l’instant. Cette vio-lence sert en tout cas les mili-taires qui viennent de retirer à contrecœur l’état d’urgence ». Ils avaient soumis ce retrait à une seule condition : la fin des violences en Egypte…

o Séverin Graveleau

INTERNATIONALEGYPTE Bain de sang à Port-Saïd après un match de foot

Football, chaos et complot

L’hiver de Poutinen C’est l’histoire d’un homme, simple, modeste, attachant. Imaginez : seul, au milieu de ses quinze voitures de luxe, dans l’austérité de son manoir néo-zélandais, il avait réussi à générer des centaines de millions avec seulement trente employés. Son astuce : la mise en ligne plus ou moins gratuite de films et séries. Quel entre-preneur ! Sa récompense ? La justice néo-zélandaise veut l’extrader vers les Etats-Unis, sous prétexte de pira-tage massif. Grand seigneur, Kim Dotcom insiste pour payer sa caution. Le tribu-nal ne veut rien entendre. Sur Internet, les hommages se multiplient. Numéro un mondial du jeu en ligne Call of Duty, ce héros des temps

modernes a tué 185 000 ad-versaires en six heures seu-lement. Libérez-le ! Ou pas. o J. S. et S. G.

Libérez le fondateur de Megaupload !n L’opposition russe n’a pas froid aux oreilles. Samedi il fera - 18° C dans les rues de Moscou et malgré les avertis-sements répétés du ministre de la santé, les militants anti-Pou-tine défileront. Ils feront fi des menaces de grippe brandies par le pouvoir, comme des risques d’arrestation arbitraire par la police. Leur but : continuer à affaiblir l’influence déjà remise en cause du parti Russie Unie.

Contesté depuis les élections de décembre, le Premier ministre commence à s’inquiéter. Et il a raison de le faire selon Igor Jurgens, politologue russe cité dans les colonnes du Novaïa Gazeta. Il évoque la présiden-tielle de mars : « Poutine est encore proche de la victoire au premier tour, mais c’est

loin d’être un fait assuré. Et ce simple fait rend sa victoire illé-gitime aux yeux des opposants ».

Pour les dernières - et tout à fait inédites - manifestations de masse il y a deux mois, ce sont les fraudes massives qui ont mis le feu aux poudres. Les bourrages d’urnes et les pres-sions sur les électeurs ont été monnaie courante.

Des soupçons planent déjà sur l’organisation du prochain scrutin. Des observateurs inter-nationaux seront présents, mais c’était déjà le cas lors des légis-latives. 27 ans après le glasnost, l’ours russe ne semble pas tout à fait prêt à la transparence totale.

o Julien Sartre

Les affrontements de mercredi soir ont fait au moins 74 morts

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Du foot au drame Ghana-2001 : 126 morts causées par le méconten-tement des supporteurs de l’équipe vaincue.Afrique du Sud-1991 : 40 morts après l’annulation d’un but par l’arbitre.Belgique-1985 : 39 morts à Bruxelles quand des hoo-ligans anglais envahissent le stade avant le début de la rencontre entre Liverpool et la Juventus.Pérou-1964 : 320 morts et 1000 blessés suite à un mouvement de foule dans les tribunes au cours d’un match Pérou-Argentine.

RUSSIE L’opposition au pouvoir s’activeBILLET D’HUMEUR

Kim Dotcom

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n « La configuration de la future Assemblée nationale se dessine », écrit le quotidien congolais Le Potentiel. Il a sans doute raison et il aurait pu ajou-ter: « Il était temps ! » . Selon les résultats annoncés jeudi par la Commission élec-torale, la coalition portée par le Parti du peuple pour la re-construction et la démocratie (PPRD) du président Joseph Kabila a obtenu la majorité absolue aux élections législa-tives de novembre dernier. Le camp présidentiel, aux manettes depuis 2006, a pourtant perdu 45% de ses sièges, n’alignant à lui seul que 63 députés contre 111 lors des précédentes légis-latives. Cette chute pourrait affaiblir le tout puissant Joseph Kabila, en particulier dans les

provinces de l’Est, riches en ressources minérales. L’opposition contrariéeLe parti de l’opposant Etienne Tshisekedi, l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), est arrivé second avec 41 sièges. M. Tshisekedi a considéré comme «nulles» ces législatives, qui comptaient près de 19.000 candidats de 450 par-tis. L’opposant s’était d’ailleurs autoproclamé président après avoir rejeté les résultats de la présidentielle - couplée aux législatives- ce qui ne vas pas faciliter la tâche de M. Kabila. Le résultat des législatives, re-porté maintes fois et tant atten-du, a soulevé des critiques quant

au mode de dépouillement. Une cinquantaine de femmes ont été par ailleurs élues à l’Assemblée nationale congolaise, dont la soeur jumelle du chef d’Etat, candidate indépendante de la province du Katanga, un fief de Kabila. Son frère cadet a également fait son entrée dans l’hémicycle comme député élu. Joseph Kabila a succédé à son père Laurent Kabila, assassiné en 2001, et a pris le pouvoir of-ficiellement après les élections présidentielles organisées par les Nations Unies. Le vote de novembre dernier était le pre-mier scrutin autonome organisé par le gouvernement. Le pays, indépendant depuis cinquante ans, vivait là sa seconde élection démocratique.

o Shao Hui

CONGO Le camp du président sortant majoritaire au Parlement

Kabila reconduit après deux mois d’attente

Une chaussure et des cailloux pour M. Bann Le convoi du secrétaire gé-néral de l’ONU Ban Ki-moon a été accueilli jeudi à Gaza par des jets de chaussures et de cailloux. Les manifestants en colère protestaient contre son refus de rencontrer des familles de Palestiniens déte-nus en Israël. Au dernier jour de sa tournée pour obtenir la poursuite des discussions israélo-palestiniennes, les représentants de la société civile ont également boycotté un déjeuner prévu avec lui dans l’enclave.

5 otages libérés au Sou-dan n Retenus depuis l’année der-nière, cinq Turcs ont été libé-rés par le Mouvement pour la justice et l’égalité, un groupe rebelle de la région du Dar-four, dans l’Ouest du pays. Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a annon-cé à l’AFP que les cinq otages sont arrivés jeudi à Khartoum, la capitale.

Le Premier ministre pakistanais sera inculpé

n Yousuf Raza Gilani va être inculpé le 13 février pour outrage à la Cour suprême, a annoncé mercredi son avo-cat. Cette décision fait suite à son refus de relancer une procédure judiciaire contre le président Asif Ali Zar-dari pour détournement de fonds présumé. Une inculpa-tion contraindrait le Premier ministre à démissionner et réduirait considérablement le pouvoir du chef de l’état.

Dénouement espéré n L’ONU prendra-t-elle enfin une position sur la Syrie ? Une résolution semble en passe d’être adoptée, rap-portent des diplomates jeudi. Pour lever le blocage russe, le texte présenté par la Ligue arabe n’évoque plus le cas de Bachar Al-Assad.

MALOUINES Le prince William arrive sur l’archipel britannique

Regain de tension auxMalouinesn C’est le premier déplacement périlleux du prince William. Le futur héritier de la couronne bri-tannique est attendu pour une mission de six semaines sur les îles Malouines, dans le cadre de sa formation de pilote de la Royal Air Force. Il a déclaré ne pas vouloir être reçu « comme membre du protocole », mais sa venue ravive tout de même de douloureux souvenirs parmi l’opinion argentine.

En 1982, l’archipel des Ma-louines, situé à 500 km des côtes argentines et contrôlé de-puis 1833 par le Royaume-Uni (sous le nom d’îles Falkland), a été l’objet d’une guerre de 74 jours entre les deux pays. Rem-portée par les Britanniques, le conflit n’est toujours pas digéré par les Argentins.

Une souveraineté contestéeLa question de la souveraineté sur l’archipel, très convoité pour ses ressources pétrolières, est depuis toujours au centre du conflit. L’ancien président Nés-tor Kirchner n’a cessé de rap-peler, dès le début des années 2000, les droits de l’Argentine sur les îles Malouines, dénon-çant le refus britannique d’enta-mer de nouvelles négociations

bilatérales. Depuis, l’actuelle présidente Cristina Fernàndez de Kirchner, veuve de Néstor Kirchner, a repris le flambeau, et les attaques croisées s’inten-sifient entre les deux pays, ris-quant à présent de s’étendre à toute la région.

Soutien régionalEn soutien à l’Argentine, les pays du Mercosur (le marché commun du Sud qui rassemble le Brésil, l’Uruguay et le Para-guay) ont interdit en décembre dernier aux navires battant pa-villon des Malouines de mouil-ler dans leurs ports.

Aussitôt, le Premier ministre anglais David Cameron a quali-

fié l’Argentine de pays « colo-nialiste », précisant qu’il conti-nuerait de défendre « les 3000 habitants des îles Falkland qui veulent rester Britanniques ». Ces propos ont déclenché la colère du chef de la diploma-tie argentine. Mardi dernier, un communiqué du ministère des Affaires étrangères regrettait l’arrivée prochaine du prince William « avec l’uniforme du conquérant ».

La présidente argentine, réélue pour quatre ans en octobre der-nier, a fait du conflit des Ma-louines son nouveau cheval de bataille, et ne semble pas prête à désarmer.

o Sophie Rahal

Le drapeau argentin avertissait en 2007: « Nous reviendrons ».

en brefInTernATIOnAL

VendredI 3 feVrIer 2012- eXpressO - 05

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06 - EXPRESSO - VENDREDI 3 FEVRIER

ECO/CONSO

La Chine à la rescousse de l'Europen Le Premier ministre chinois Wen Jiabao a déclaré que la Chine pourrait participer davantage au Fond européen de stabilité financière et à son successeur, le Mécanisme eu-ropéen de stabilité.

Contre Free, les opérateurs ripostentn Face aux offres de Free Mobile, SFR a annoncé le lan-cement d’un nouveau forfait : appels illimités fixe et mobile en France et vers les fixes de 100 destinations, SMS illimi-tés, et Internet jusqu’à 2Go.

La zone euro sous de meilleurs auspicesn L’agence de notation Stan-dard & Poor’s estime dans un rapport que la zone euro devrait sortir de la récession et retrouver une croissance positive au cours du second semestre 2012 et en 2013.

Les employés de Dassault s'indignentn Les salariés des usines Dassault de Gironde ont ma-nifesté jeudi pour une aug-mentation de salaire et uneamélioration des conditions de travail, alors que le groupe va vendre 126 Rafale à l’Inde.

EN BREF

TOURISME La filière subit les retombées du naufrage du Costa Concordia

La croisière ne s’amuse plusnDes paysages alléchants, une mer bleu azur, des prix qui défient toute concurrence. Sur le site de Costa Croisières, on tente de faire oublier le naufrage du Concordia pour ne pas tomber dans le gouffre financier.

On casse les prix : une traversée en Méditerranée de 8 jours est mise en vente à 640,5 euros

au lieu de 1640. Si la période hivernale peut expliquer ces promotions exceptionnelles, la catastrophe en Italie, en janvier dernier est peut-être un facteur à prendre en compte. Les dif-férents opérateurs contactés, comme Costa Croisières, n’ont pas souhaité s’exprimer sur le sujet. Face aux réticences des différents prestataires pour répondre à nos questions, quoi de mieux que de se faire passer pour de simples clients.Dans une agence de voyages parisienne, le vendeur nous explique : « Les gens annulent en masse ». Les images du nau-frage sont dans tous les esprits. « L’histoire est encore trop proche dans le temps, ça affecte les gens ». Et les réservations le prouvent. S’il est encore trop tôt pour se rendre compte des pertes commerciales, le marché des croisières n’est pas prêt de rebondir.

Des bateaux qui restent à quaiLe « Romantica » de la compa-gnie Costa, un paquebot iden-tique au Concordia restera à quai pour de nombreux mois, affirme le même agent. « J’ai

entendu dire que le bateau n’avait aucune réservation jusqu’en septembre prochain. » Une information que Costa Croisières n’a pas confirmée mais qui pourrait expliquer les promotions en masse annoncées sur internet. « C’est très révé-lateur, Costa c’est pas le genre de compagnie à baisser les prix », confirme le vendeur. Mais l’événement du 6 janvier der-nier secoue aussi le marché des autres compagnies. C’est toute la profession qui est touchée, déplore l’agent.

Pas de grosses conséquences, selon les professionnelsMais la compagnie de croisières bon marche souffrira t-elle dura-

blement de ce drame ? Pas sûr, si l’on en croit les professionnels du tourisme. Dans une autre agence de voyages parisienne, on affirme que Costa avait déjà eu plusieurs incidents, parfois graves mais sans conséquences. « C’est déjà arrivé pendant une croisière en mer rouge en 2000 » raconte une respon-sable d’agence de voyages, sans avancer de preuves. Selon elle, un accident avait également eu lieu à Dubaï sur un bateau de Costa il y a quatre ou cinq ans « Une affaire « étouffée » par le groupe » dont la presse n’a pas eu écho. Impossible de vérifier auprès de Costa croisières. Le milieu du tourisme n’est pas in-quiet et assure que « les bateaux

Costa sont quasi complets pour mars 2012».

Réductions isolées, mais publi-cité massivePas question non plus pour la concurrence de brader les offres de croisières. « Les autres opé-rateurs ne vont pas faire plus de réductions ». Aucun des agents rencontrés n’a affirmé avoir reçu de consignes particulières : pas de campagne de pub pour relancer le marché, ni d’offre alléchante. Pourtant sur inter-net, des promotions incroyables fleurissent pour inciter de nou-veau la clientèle à prendre le large.

o Sarah B. et Leïla Y.

Le Costa Concordia a sombré en janvier dernier près des côtes italiennes. Depuis, le marché connaît des difficultés .

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n Etablir le contact. C’est l’objectif de Christine Lagarde, directrice du Fonds monétaire international (FMI), en visite à Tunis ce mercredi.Depuis la fuite du dictateur Ben Ali, le berceau du prin-temps arabe connaît une grave crise économique et sociale. Au programme de la directrice du FMI, des rencontres avec le président de la banque centrale tunisienne, le Premier ministre Hamadi Jebali, le président tu-nisien Moncef Marzouki, ainsi que des chefs d’entreprise et les responsables de la principale centrale syndicale du pays. Il était temps.Depuis la révolution, le pays peine à renouer avec la crois-sance économique (- 1,8 % du PIB) et le chômage atteint les 18%. Mais le gouvernement n’entend pas solliciter un prêt auprès du FMI. Mme Lagarde vient seulement dispenser quelques principes d’ordre éco-nomique qu’elle souhaite voir respecter par ses membres. Elle a donc demandé aux autorités tunisiennes et aux principaux acteurs de se « concentrer sur le développement économique ainsi que sur la création d’em-plois pour retrouver le chemin des investissements et restaurer la confiance des investisseurs ».Mais le chemin vers la crois-sance se passe souvent de recette miracle. D’autant plus que les mouvements sociaux nourrissent l’instabilité écono-mique, notamment à l’intérieur du pays.

Avec la récession, les tensions se cristallisent En premier lieu, le gouvernorat de Gafsa, région défavorisée qui vit essentiellement de l’exploi-tation minière. Les grèves et les sit-in y sont récurrents et le chômage aurait atteint les 40%. Début janvier, les tensions ont redoublé lorsqu’un homme s’est immolé, provoquant des vio-lences entre des jeunes armés et la police. Le secteur minier, le plus rentable après le tourisme, est ainsi paralysé depuis un an.En 2011, le gouvernement a dénombré 513 grèves et sit-in dans le pays, dont 163 seule-ment étaient autorisés. Le pays aurait ainsi perdu 1,3 milliard d’euros, « soit l’équivalent du coût de création de 100 000 emplois », selon le porte-parole du gouvernement.

o A. F.

Reconstruction économique, un défi tunisien

COMMERCE

Série noire pour l’Espagne. Les chiffres du chômage n’ont jamais été aussi hauts depuis la première diffusion des statis-tiques de l’emploi, en 1996.Le pays compte désormais près de 4,6 millions de chômeurs, soit une hausse de 177 470 per-sonnes en janvier (+ 4% par rap-port à décembre) selon les ser-vices publics de l’emploi. C’est aussi la sixième augmentation mensuelle consécutive depuis l’été dernier.La secrétaire d’Etat à l’emploi, Engracia Hidalgo, s’est empres-sée de commenter la nouvelle : « [Le gouvernement socialiste] n’a pas pu empêcher que les licenciements soient la princi-

pale variable d’ajustement face à la chute de la demande ». Et de réaffirmer l’urgence d’une réforme du marché du travail, dont les grandes lignes seront présentées le 10 février pro-chain.

Des solutions qui divisentL’Espagne connaît le taux de chômage le plus important de l’Union européenne, soit près de 23% de sa population active. Le FMI, l’UE et la Banque d’Espagne dénoncent au pre-mier chef la rigidité du marché du travail. Selon Javier Diaz-Gimenez, économiste à l’IESE Business School de Madrid, « lapremière mesure à prendre est

de réduire les coûts du travail, qui sont excessifs, en limitant les indemnités de licenciement, et la deuxième est de se débar-rasser des contrats temporaires pour établir un seul contrat à durée indéterminée ».Pas sûr que les Espagnols l’en-tendent de cette oreille. Lors d’une discussion informelle avec son homologue finlandais au sommet européen de ce dé-but de semaine, le Premier mi-nistre Mariano Rajoy a confessé que cette réforme risquait de lui coûter la première grève géné-rale de son mandat.

o Anthony Favalli

NUMERIQUE Le secteur génère croissance et emploi

La France 2.0 cherche à rattraper son retard

Fin janvier, une étude réalisée par le cabinet Deloitte révélait que Facebook pesait 32 milliards de chiffre

d’affaires en Europe et avait gé-néré 232.000 emplois indirects, dont 22.000 en France.Mercredi soir, impossible de passer à côté de la nouvelle : Mark Zuckerberg, fondateur de Facebook, a déposé un dossier d’introduction en Bourse pour sa société. L’événement a agité les acteurs du Web et les agents économiques de Wall Street. Il faut dire qu’une opération d’une telle ampleur est une première dans le secteur d’Internet, sur-passant l’entrée en bourse de Google il y a sept ans.

Le numérique, acteur incontour-nable de l’économieAu-delà de son aspect social et médiatique, le numérique prend ainsi une part de plus en plus im-portante dans l’économie. « In-ternet et les réseaux sociaux : ce n’est pas que des publications et des photos. C’est une ques-tion d’emplois, de croissance », expliquait lors d’une confé-rence de presse Sheryl Sand-berg, numéro 2 de Facebook. Sauf qu’en France, ce constat est encore absent des esprits. Un fait que souligne Pierre Babinet, président du Conseil national du numérique -institution char-gée d’éclairer le gouvernement dans ce domaine- dans une tri-

bune sur le site Frenchweb.fr : « En matière de compétitivité par le numérique, la France doit changer de braquet : 21ème en terme d’usage d’Internet par les entreprises, 31ème en termes d’usages, 20ème en terme de contribution au PIB, légèrement en dessous de la moyenne de l’OCDE en matière de PIB nu-mérique. Les chiffres changent vite et sont souvent obsolètes mais plusieurs pays sont proba-blement au delà des 10% de PIB d’origine numérique. »

L’Investissement, orientation à ne pas négligerEn temps de crise économique,

investir dans le numérique est une orientation à ne pas négli-ger. Un sujet dont l’Etat com-mence à se saisir. En novembre dernier, lors des Assises du numérique, Eric Besson, mi-nistre chargé de l’Industrie, de l’Énergie et de l’Économie numérique, a présenté le plan « France Numérique 2020 ». En tête des 57 objectifs de ce programme, le « renforcement de la compétitivité de l’écono-mie française grâce au numé-rique ». Un beau défi à relever.

o Sara Taleb

Le numérique est désormais un secteur de l’économie à part entière.

ECO/CONSO

EMPLOI Le pays enregistre le taux de chômage le plus élevé d’Europe

Les Espagnols en mal d’activité

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CULTURE

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CEREMONIE Premier Black History Month français

Les attachés de presse s’agitent pour trouver des chaises pour tout

le monde dans la salle Felix Eboué, mise à disposition par le Ministère. Visiblement, Maboula Soumahoro, maître de conférence et organisa-trice de l’évènement, est un peu dépassée par le succès de la soirée. « J’ai l’impression d’être à New-York, sauf que tout le monde parle français ! » plaisante Kathleen Cleaver, faisant référence à l’assemblée majoritairement noire réunie pour cette première manifes-tation du Black History Month en France. Le « mois de l’his-toire noire » est depuis long-temps une institution aux Etats-Unis. Chaque année en février, cette manifestation célèbre les luttes et les succès de la diaspora noire. Instaurée dès 1976, le Black History Month est aujourd’hui fêté dans de nombreux pays, dont l’Angle-terre et l’Allemagne, mais pas en France. Oubli réparé avec la venue de Kathleen Cleaver, légende du militantisme noir des années 60. Première femme élue au comité central du Black Panthers Party et épouse de leur leader Everidge Cleaver, elle est aujourd’hui une universi-taire renommée.

Vision révolutionnaire« Je suis heureuse d’être ici pour amorcer la transition du « no black history » au « Black History Month » a déclaré la militante, qui a toujours dé-fendu une vision globale et révolutionnaire de la lutte des Noirs. Claudy Siar, délégué in-

terministériel pour l’égalité des chances des français d’Outre-mer saluait lui une « première au cœur de l’Etat.»Réunis autour de Cleaver, Rokhaya Diallo, éditorialiste, Almamy Kanouté, fondateur de l’association antiraciste la « Brigade Anti-Négrophobie » et Fatou Biramah, journa-liste, ont discuté de la légiti-mité d’une telle manifestation en France. Diallo a mis en garde contre la tentation pour toute organisation antiraciste française de regarder vers les Etats-Unis : « Un Black History Month français est une bonne idée mais nous devons faire attention à ne pas nous appro-prier une histoire qui n’est pas la notre. » Selon elle, le défi de

l’antiracisme en France est la lutte contre « l’organisation de l’oubli et la construction d’une mémoire noire française, issue d’une réflexion postcoloniale. »Conclusion douce-amère à la soirée, le retard d’une ving-taine de minutes sur l’horaire poussa Maboula Soumahoro à une petite phrase maladroite, enjoignant l’auditoire à « sortir le plus rapidement possible et dans le calme pour que d’autres réunions de ce genre ait lieu à l’avenir. », provoquant quelques remous. Preuve en est que même sous les chandeliers du Ministère, les Noirs de France se sentent toujours un peu « in-digènes», un mot souvent revenu dans la bouche des intervenants. o Guillaume Gendron

n La communauté noire est en deuil après la disparition de l’animateur télé qui popu-larisa la musique noire auprès du grand public dans les an-nées 1970. Sans Don Corné-lius et l’exposition médiatique qu’il leur offrit à travers son émission musicale Soul Train, Michael Jackson, Stevie Won-der ou encore Marvin Gaye n’auraient sans doute jamais eu autant d’impact sur la culture populaire américaine. Avant Soul Train, diffusé sur de nombreuses chaines amé-

ricaines de 1971 à 2006, la soul music était cantonnée aux radios R&B et n’avait droit de cité sur le petit écran. Ce Top 50 hebdomadaire de la

musique noire exposa l’Amé-rique à de nouveaux sons tout en promouvant vigoureusement l’esthétique « Black Is Beauti-ful » hérité du mouvement pour les droits civiques de la fin des années 1970. Les plages publi-citaires, tournées par Cornélius en personne, visaient exclusi-vement le public noir, une pre-mière à l’époque.L’animateur, souffrant d’une longue maladie, s’est suicidé chez lui à Los Angeles à l’âge de 75 ans. o Guillaume Gendron

Disparition du créateur de l’émission culte «Soul Train»

Almamy Kanoute (a gauche), cofondateur du mouvement Emergence et la brigade anti négrophobie, autour de Kathleen Cleaver. GG/Expresso

n Jean Dujardin, belles gam-bettes à la main. Gilles Lel-louche, à la braguette une de-moiselle châtain. Les affiches du film Les Infidèles vont être retirées demain à titre provi-soire, suite à plusieurs plaintes de particuliers auprès de l’Au-torité de régulation profession-nelle de la publicité (ARPP).« Même sans ces [plaintes], nous serions intervenus ! » explique sur Libération.fr ce jeudi Stéphane Martin, le direc-teur général de l’ARPP, « Il y a une représentation sexuelle explicite à la vue de tous, et ce n’est pas acceptable. Les images portent en plus atteinte à la dignité de la femme... Ces affiches ne respectent pas les ”convenances”».

Les Infidèles s’ajoute à une longue liste : les affiches du spectacle de l’humoriste Sté-phane Guillon, ont été retirées du métro vendredi dernier. Le slogan délictueux « En mai 2012, Stéphane Guillon s’en va aussi » a été jugé comme étant « un message à caractère poli-tique », interdit par la conven-tion de la RATP.Hier, c’était la compagnie de bus de Marseille, RTM, qui dé-cidait de retirer les affiches de promotion du quatrième volet d’Underworld, sur lesquelles Kate Beckinsale, l’air avenant, pointe deux gros calibres. Le climat « kalachnikovien » qui règne en ce moment dans la cité phocéenne a justifié la décision de ce retrait.Alors, puritanisation de la société ou stratégies média-tiques ? L’équipe des Infidèles déplore sur Twitter « un buzz dont on se serait bien passé », mais maligne, en a profité pour surenchérir et être mieux réfé-rencé sur le réseau social. o J.Sal. et C. Staub

POLEMIQUE

Don Cornelius, créateur de l’émis-sion Soul Train. DR

La communauté afro-américaine pleure Don Cornelius

L’affiche de la discorde. DR

Les affiches de la discorde

Une figure du mouvement noir américain honorée à Paris

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WEB La star des réseaux sociaux a annoncé son entrée en Bourse

MEDIAS

n Mark Zuckerberg enfile le costume businessman de Wall Street : mardi, Facebook a dé-posé un dossier d’entrée à la Bourse de New-York en vue de lever cinq milliards de dollars. Huit ans après sa création dans une chambre d’étudiant à Har-vard, le géant des réseaux so-ciaux compte aujourd’hui 845 millions d’utilisateurs actifs et a enregistré un chiffre d’affaires de 3,71 milliards de dollars en 2011. Une entrée en grande pompe qui constitue la plus importante introduction jamais réalisée dans la Net-économie, largement devant Google et ses 1,67 milliard levés en 2004. Le petit génie réalise un coup de maitre et s’apprête à devenir le sixième homme la plus riche de la planète à seulement 27 ans. En revanche, fini les cachote-ries ! Mark Zuckerberg, qui détient 28,4% de Facebook, se gardait bien de rendre des comptes et ne divulguait aucun résultat financier. On sait désor-mais qu’un utilisateur du réseau

rapporte 1,7$ par an à la com-pagnie du jeune milliardaire.Dès son entrée officielle à Wall Street mi-2012, les marchés et investisseurs voudront être ras-surés et chaque nouvelle stra-tégie de développement devra

être justifiée. Une perspective qui n’enchante pas franchement le nerd de la Silicon Valley, dont il a plusieurs fois affirmé qu’elle pourrait gêner son « po-tentiel de création ».

o Charlotte Staub

RADIO Podcast

Finale olympienne n L’Olympique de Marseille s’est imposé 2-1 mercredi soir contre l’OGC Nice en demi-fi-nale de la Coupe de la Ligue. Double tenant du titre, l’OM rejoint en finale l’Olympique lyonnais qui compte bien mettre fin à la suprématie mar-seillaise dans cette compétition.

Cissé fidèle à ses habitudes n Fraîchement transféré aux Queens Park Rangers, Djibril Cissé est resté fidèle à ses habi-tudes. Comme il l’a fait pour Liverpool, Sunderland et la Lazio de Rome, « Djib » a mar-qué mercredi soir un but sous ses nouvelles couleurs lors de sa première titularisation.

Mort d’Angelo Dundee n L’ex-entraîneur du boxeur Mohamed Ali est décédé mer-credi à l’âge de 90 ans à Tampa en Floride. Véritable légende de la boxe, Angelo Dundee a coaché pas moins de 15 cham-pions du monde et est entré en 1994 à l’International Boxing Hall of Fame.

Les Monfils en double

n Gaël Monfils et son frère Daryl ont participé au tournoi de Montpellier en double. Tout est parti d’une promesse du n°13 mondial à son cadet classé 0. Hélas, l’expérience a tourné court, ils se sont fait sortir par la paire russe Davydenko/Ku-nitsyn 6-2/6-1.

n Podcaster une émission, c'est facile. Se connecter à Internet, se rendre sur le site de la radio choisie, trouver la rubrique Podcast, cliquer. Voici ce qu'il fallait écouter cette semaine.

De la cultureOuvert la nuit, l'émission culturelle de France Inter, diffusée quotidiennement de 21h à 23h, offrait un très bon cru le 31 janvier. Alexandre Héraud et Tania de Montaigne recevaient Jacques Gaillard (pour Jean-Baptiste Botul), l'excellent groupe canadien Random Recipe, les écrivains Emmanuel Ostian et Jean-Luc Raharimanana.

De la nostalgie Le 24 janvier sur RTL : « La marque du Mailhot : Déçu par l'interview d'Anne Sinclair ! » par Régis Mailhot. Certes, ce n'est plus le Mailhot du Fou du Roi, mais la diction aléatoire de l'humoriste est toujours plai-sante.

De la mauvaise foi Radio Nova, le 27 janvier : « Les vendredis du complot : Concordia. » Giulio Callegari relie l'actualité à une théorie du complot. Drôle et (presque) inquiétant.

De la musique Le 1er février, dans « Le 20 heures de TSF Jazz : Klezmer Nova ! » le saxophoniste Pierre Vekstein explique ce qu'est le klezmer (musique juive d'Eu-rope Centrale et de l'Est). A écouter autant pour la musique que pour les anecdotes.

De l'info Sur RFI le journaliste espagnol Joachim Luna revient sur le procès du juge Garzon dans l' Appel presse Européenne du 31 janvier. Indispensable. o J.Salvestroni

Séance de rattrapage

n Tumblr : 120 millions d’uti-lisateurs, 15 milliards de pages vues par mois, la plate-forme de micro-blogging qui permet de poster texte, image, vidéo et hypertexte a été valorisée à 800 milliards de dollars en 2011. Son secret selon son PDG Da-vid Karp : son « extrême sim-plicité ».

n Instagram : Désigné appli-cation de l’année 2011 par Apple et utilisé par les équipes de campagne d’Obama, le ser-vice de partages de photos qui compte plus de quinze millions d’utilisateurs est aujourd’hui le premier réseau social au monde. Avec son aspect « photo vieil-lie », hommage à l’Instamatic et au Polaroïd, l’appli a réussi avec brio à surfer sur la vague du vintage.

n Google+ : Le dernier né des réseaux sociaux qui avait pour ambition de contrer le géant Fa-cebook ne compte aujourd’hui « que » 90 millions d’utili-sateurs (contre 845 millions pour Facebook). Néanmoins,

tout n’est pas à jeter car Mark Zuckerberg s’est largement ins-piré des « cercles » d’amis, des groupes de contacts que l’utili-sateur peut créer et au sein des-quels il décide des informations qu’il souhaite partager.

Facebook s’invite à Wall Street

Mark Zuckerberg, le créateur de Facebook. DR

EN BREF SPORTS

Ces autres réseaux sociaux qui montent

Google condamné pour abus de position dominanteLe tribunal de commerce de Paris a condamné mercredi la filiale française de l’entreprise américaine Google à 500.000 euros d’amende et 15.000 euros de frais de justice pour abus de position dominante. L’entreprise française Bottin Cartographie qui vend des plans d’accès et des cartes en ligne reprochait au géant américain de mettre gratuitement à disposition des entreprises son service Web Google Maps. Une offre gratuite qui, selon l’avocat de Bottin Cartographe, porte atteinte aux règles de la concur-rence. Google a d’ores et déjà annoncé qu’il comptait faire appel et affirme que «la concurrence sur ce secteur de-meure réelle (...) tant en France, qu’à l’international.» En mars 2011 la firme avait édjà était condamné par la CNIL pour une collecte illégale de données privées. o P.F.

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Son mètre soixante-huit et sa silhouette filiforme détonnent un peu dans sa catégorie des moins de 57 kg.

Une tête de plus. C’est en géné-ral ce qui sépare Automne Pavia de ses concurrentes et de ses partenaires d’entraînements. Pas difficile, donc, de la repérer au milieu des armoires à glace qui évoluent sur le tatami du grand chapiteau provisoire de l’INSEP.Automne a toujours le sou-rire et elle peut se le permettre. Actuellement 5e de la ranking list mondiale elle a déjà un pied dans l’Eurostar pour les JO de Londres. Même si son billet n’est pas encore validé, « la qualifica-tion est en bonne voie » dixit son entraîneur Cathy Fleury.Mieux vaut ne pas se fier à sa blondeur angélique et son visage poupin car sur un tatami, son agressivité fait des étincelles. Avec un père et une mère prof de judo à Carcassonne, difficile pour elle, comme pour ses sept frères et soeurs, de passer au tra-vers du sport familial. Automne enfile son premier kimono à quatre ans avant de passer par le pôle France de Marseille et d’intégrer l’INSEP en 2008. Un mental à toute épreuve« Au-delà de l’agressivité dont elle fait preuve, sa véritable force c’est son mental à toute épreuve » explique Cathy Fleury. « Elle a vraiment un gros potentiel, on peut dire que c’est une guerrière ! ». Intrinsèquement, ses qualités techniques sont loin d’être une

référence dans le judo féminin mais son envie de gagner à tout prix compense très largement ces lacunes. « Je suis une mauvaise perdante, j’ai encore beaucoup de mal à accepter la défaite »

admet-elle. Une rage de vaincre qui la pousse parfois même à se mettre en danger comme lors de ses premiers championnats du monde junior. Alors qu’elle se luxe le coude pendant le combat,

elle refuse d’abandonner jusqu’à faire un malaise sur le tatami.

De l’ombre à la lumièreLongtemps dans l’ombre de Morgane Ribout, Automne com-mence tout juste à attirer l’atten-tion des médias. Une évolution qui ne la perturbe pas plus que ça : «Ça ne me met pas de pression particulière, j’ai montré de quoi j’étais capable et maintenant je considère cela comme un plus.» Dernier objectif avant les Jeux, le Tournoi de Paris ce week-end dont Automne est la tenante du titre. « Ça sera plus dur cette fois-ci car j’ai un peu gagné par surprise l’année dernière. Mais comme d’hab je vais aller à la baston. » Elle le dit en blaguant mais la déclaration est probable-ment plus sérieuse qu’elle ne veut le faire paraître.Un gros résultat au Tournoi de Paris samedi rendrait la présence d’Automne sur les tatamis londo-niens presque certaine. En atten-dant l’été olympique, la jeune ju-dokate prend son mal en patience en espérant bien prendre part à ce qui ne représente rien de moins pour elle « qu’un rêve de gosse ».

o Pierre Fesnien

ExprEsso03 02 2011 # 03

Automne attend l’étéportrait A la veille du Tournoi de Paris, la sportive rêve déjà des Jeux

Automne Pavia, judokate de 23 ans, compte renforcer sa position de numéro une française des moins de 57 kg.

ExprEsso iNsoLitEsVoyageUn ballon de kermesse traverse 14 000 kilomètresn La directrice de l’école Estelle Boutet de Limalonges, dans le département des Deux-Sèvres, n’aurait jamais pensé qu’un ballon lâché le 25 juin lors de la fête de l’école serait retrouvé le 17 décembre dernier par un pêcheur thaïlandais. 14 000 kilomètres parcourus en six mois. « Je me promenais à dos d’éléphant sur la plage et j’ai trouvé un ballon ainsi que l’adresse de votre école. », explique l’auteur de la découverte dans une lettre adressée à l’établissement et rédigée en thaï et en français. Une petite carte plas-tifiée, reliée au ballon, mentionnait les coordonnées de l’école.

AmazonieFlashés!

n On voit à l’expression de leurs visages que c’est la pre-mière fois qu’ils sont pris en pho-to. Les indi-gènes Mas-cho-Piro forment une tribu amazonienne coupée du monde. Plutôt asociaux, ils intimident à l’aide de flèches et de pierres tous ceux qui essayent de s’approcher d’eux, et restent ainsi complètement iso-lés. Le gouvernement péruvien décon-seille de tenter de leur rendre visite.

ConcordiaReliques macabres on-line

n Verres à cocktail et tsses de la marque «Costa Concordia» partent à prix d’or sur le site de vente en ligne eBay. Un moyen pour les clients des précédentes croi-sières de la compagnie Costa d’écouler leurs bibelots souvenirs dont la valeur a fortement augmenté depuis le naufrage du paquebot. Un jeton de casino d’un euro, annoncé comme un «objet unique», pourrait trouver acquéreur pour la mo-dique somme de 250 euros, si l’enchère ne grimpe pas davantage. Dans la même veine, 5 000 objets du Titanic seront mis à la vente en tant que lot unique à New York en avril prochain à l’occasion du cente-naire de la tragédie.

10 - ExprEsso - VENdrEdi 3 fEVriEr 2012

Palmarès2011 - Championne du monde par équipe - Championne d’Europe par équipe - Vainqueur du Tournoi de Paris2010 Championne de France2009 Championne de France